Messager Évangélique:Le bagage à la frontière

De mipe
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Chacun sait que pour passer certaines marchandises d’un pays à l’autre, il y a des droits à payer à la frontière, et qu’il y a même des marchandises qui ne peuvent pas entrer du tout, ne fût-ce qu’un paquet d’une livre dans un sac de voyage. Alors ce qu’il y a à faire pour passer sans difficultés, c’est d’annoncer ce que l’on a dans son bagage et d’en payer les droits, car le contraire serait de la contrebande. Si un voyageur a, dans son bagage, des objets qui ne peuvent être importés sans payer, ou dont l’entrée est formellement interdite, et qu’il ne les annonce pas, il arrivera que son bagage étant visité, et les objets découverts, le voyageur ne pourra passer lui-même ; il sera conduit au bureau et condamné à payer une forte amende, surpassant de beaucoup la valeur des objets qu’il voulait passer en contrebande. Cette perte de temps et d’argent, ces ennuis et cette humiliation, tout cela aurait été évité en accusant franchement les objets qui constituaient son bagage.

Ayant dit cela, nous en tirerons une comparaison, pour nous en faire ensuite l’application, à nous, chers enfants de Dieu, qui connaissons plus ou moins notre privilège et notre liberté d’entrer dans les lieux saints pour rendre culte à notre Dieu.

Nous supposons donc un certain nombre de jeunes gens qui sont placés dans un pays étranger pour leur éducation, mais qui ont les moyens et l’autorisation de faire souvent une visite dans leur patrie, où ils ont de grands biens en réserve, dans la possession desquels ils entreront quand leur éducation sera achevée. — Il faut donc qu’ils passent la frontière toutes les fois qu’ils entrent dans leur patrie. Mais arrivés là, il se trouve que, quoique ayant le même but, il y a de la différence entre eux ; les uns ont du bagage, les autres n’en ont point ; les uns déclarent ce qu’ils portent avec eux, les autres ne le font pas ; il s’ensuit des difficultés dont l’ennui réagit sur tous, parce qu’ils sont unis les uns aux autres comme ayant le même avenir. Ceux qui sont sans bagage pourraient entrer librement ; ce sont ceux qui ont le mieux profité des moyens employés pour leur éducation, et des renseignements que l’on ne néglige pas de donner à tous sur la beauté et la richesse de leur patrie et sur leur avenir glorieux ; ceux donc qui sont sans bagage ont le cœur attaché à leur patrie, ils estiment comme peu de chose, et même comme des ordures, les objets qui font le bonheur des habitants du pays où ils vivent comme étrangers ; ainsi ils n’ont rien avec eux, sachant très bien qu’aucun objet de ce pays ne peut passer la frontière pour entrer dans leur patrie.

Les autres, ayant moins profité, ont le cœur moins attaché à leur patrie ; par conséquent, les choses du pays étranger ont encore une certaine valeur pour eux : de là vient qu’ils ont des objets de contrebande avec eux. Mais quelques-uns, en approchant de la frontière, sont repris par leur conscience ; alors ils jugent leur inconséquence, ils accusent franchement les objets qu’ils portent avec eux et les abandonnent entre les mains des employés : ils ont un petit retard, après quoi ils pourraient aussi entrer. Mais ceux de leurs compagnons, qui forment une troisième classe, ont suivi les autres un peu par imitation ; ils sont réellement attachés aux choses du pays étranger, et en relations d’intimité avec ses habitants : ils ont donc des objets de contrebande, et sont assez insensés pour essayer de les faire entrer avec eux. Il en résulte que non seulement leur bagage est saisi, et qu’ils en subiront les conséquences et ne pourront entrer ; mais de plus, que leurs compagnons, qui étaient en règle, se trouvent arrêtés aussi, parce qu’ils sont tous solidaires les uns des autres. La troisième classe sera donc cause que tous les autres seront privés de la jouissance d’une visite dans leur patrie. Une quatrième classe de ces jeunes gens ne sont pas venus à la frontière ; ils n’ont pas à cœur de profiter des moyens et de l’autorisation de faire souvent des visites dans leur patrie ; ils se disent qu’il leur suffit de savoir que, quand le temps du séjour qu’ils ont à faire dans le pays qu’ils habitent sera achevé, ils entreront dans le leur ; pour le moment ils ne désirent pas en savoir davantage.

Cette comparaison un peu bizarre n’est-elle pas un tableau assez vrai de ce qui arrive, la plupart du temps, dans nos réunions de culte ? C’est une grande grâce de Dieu que nous ayons été éclairés par la Parole quant à cet immense privilège d’être, dès ici-bas, des adorateurs du Dieu saint, qui a aboli notre péché par le sacrifice de Son Fils, d’être de vrais adorateurs du Père, tels qu’Il les cherchait, des adorateurs en esprit et en vérité. Les Juifs n’ont jamais pu être cela, parce que leurs péchés n’étaient pas ôtés ; aussi leur plus grande cérémonie n’était-elle qu’une commémoration du péché chaque année (Héb. 10). Nous, au contraire, nous nous réunissons autour de la table du Seigneur pour faire la commémoration de l’abolition du péché, quelle grâce ! — Quel privilège d’être une maison spirituelle, une sainte sacrificature, pour offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus Christ (1 Pier. 2) ! Quel privilège de pouvoir, déjà ici-bas, entrer dans le ciel même, en la présence de notre Dieu, pour jouir de tout Son amour, et pour L’adorer et Le bénir de tout ce qu’Il est, et de tout ce qu’Il a fait pour nous. « Ayant donc, frères, une pleine liberté d’entrer dans les lieux saints par le sang de Jésus, par un chemin nouveau et vivant qu’il nous a consacré, à travers le voile, c’est-à-dire sa chair, et ayant un grand sacrificateur établi sur la maison de Dieu,… approchons-nous avec un cœur vrai, en pleine assurance de foi, ayant les cœurs par aspersion purifiés d’une mauvaise conscience et le corps lavé d’eau pure » (Héb. 10).

Mais tout privilège emporte avec lui une responsabilité, et si nous avons le bonheur de nous réunir d’après des principes venant directement de Dieu par la Parole, pour réaliser ces principes, il faut absolument que nous soyons en bon état pratique devant Dieu et en communion avec Lui ; sans cela nos réunions ne sont qu’une contrefaçon ; ce n’est pas la faute des principes, mais la nôtre. C’est surtout quand nous sommes réunis dans le but exprès de faire profession d’entrer dans le sanctuaire céleste pour adorer notre Père en esprit et en vérité ; c’est surtout alors qu’il est important pour nous d’être conséquents avec notre privilège ; — de nous rappeler que notre Dieu est lumière, que, par conséquent, si nous disons que nous avons communion avec Lui et que nous marchions dans les ténèbres, nous mentons (1 Jean 1) ; — de penser que rien de souillé n’entre dans le ciel, que Dieu a les yeux trop purs pour voir le mal, et que toutes choses sont nues et entièrement découvertes aux yeux de Celui à qui nous avons affaire. L’on dira peut-être : S’il en est ainsi, qui d’entre nous osera se présenter devant Dieu, comme étant en état d’entrer dans le ciel pour Lui rendre culte, car nous bronchons tous en plusieurs choses, et chaque jour nous avons à déplorer des manquements ? C’est vrai, et heureux sommes-nous si nous le savons, mais la grâce de Dieu a pourvu à tout. Si la Parole nous dit que nous avons pleine liberté d’entrer par le sang de Jésus, elle nous dit en même temps que nous avons un grand Sacrificateur établi sur la maison de Dieu. Quel bonheur de savoir cela ! Non seulement Il purifie nos saintes offrandes (selon Ex. 28, 38), ce qu’il est bien précieux de savoir ; mais Il intervient pour nous, et nous lave les pieds. Nous sommes tout nets (Jean 13) ; par une seule offrande, Il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés (Héb. 10) : c’est pourquoi nous avons pleine liberté d’entrer.

Mais en marchant dans ce monde nous sommes en contact avec la souillure ; traînant avec nous notre ancienne nature corrompue, et hélas ! étant souvent traînés par elle, la souillure s’attache à nos pieds, à notre marche pratique. Nous avons donc besoin d’avoir les pieds lavés pour pouvoir profiter de notre pleine liberté d’entrer, parce qu’il est impossible d’entrer avec les pieds sales, de passer la frontière avec du bagage interdit. Eh bien ! Jésus nous lave les pieds. — Mais ce que nous avons à faire, c’est de confesser à Dieu nos péchés et tous les manquements de notre marche pratique ; « Dieu est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier de toute iniquité » (1 Jean 1). Nous sommes si misérables du reste, que nous pouvons avoir les pieds sales et les yeux bouchés. Alors il y a la Parole qui est vivante et opérante, et plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants, atteignant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles, et jugeant des pensées et des intentions du cœur (Héb. 4). C’est cette Parole qui jugera de notre état si nous la laissons agir sur nos cœurs et sur nos consciences ; elle nous fait mettre le doigt sur la plaie, non pas pour nous amener devant un trône de jugement, ni pour nous abandonner au désespoir ; non, si nous nous jugeons à la lumière de Dieu, la même lumière qui nous montre notre péché, nous montre en même temps le trône de la grâce, duquel nous sommes invités à nous approcher avec confiance, afin que nous recevions miséricorde et que nous trouvions grâce pour avoir du secours au moment opportun (Héb. 4, 16). Quel est ce moment opportun ? Nous pensons que c’est celui où nous nous laissons juger par la Parole. Remarquez la liaison de ces deux choses à la fin de ce chapitre 4 aux Hébreux : il y a la Parole vivante et opérante qui coupe et qui juge jusqu’au plus petit repli de nos mauvais cœurs, et tout de suite après la sacrificature de Christ qui guérit. Nous avons donc tout à gagner à nous laisser juger par cette Parole, et quand elle nous a convaincus de péché, d’aller tout de suite le confesser à Dieu, et là à Sa lumière nous jugerons le mal comme Lui le juge, et nous trouverons la sacrificature de Christ, pour nous laver, nous pardonner, nous purifier et nous rétablir, ayant tout réglé, dans la communion de Dieu notre Père, dans la jouissance de Son amour, et par conséquent dans la capacité de Lui rendre culte, le mauvais bagage ayant été accusé et abandonné. Quelle grâce précieuse d’avoir ainsi Christ non seulement pour Sauveur, mais pour souverain Sacrificateur, et de pouvoir ainsi tout régler à mesure pour être maintenus malgré notre misère dans la réalisation de notre communion qui est avec le Père et avec Son Fils Jésus Christ ! Que nous sommes coupables quand nous négligeons ce précieux moyen, et que, accumulant ainsi un compte avec Dieu, nous attirons sur nous les coups de Sa verge paternelle, qui nous châtie et nous corrige pour nous débarrasser du mal, car ce que Son amour veut pour nous, c’est que nous soyons déjà ici-bas pratiquement saints et pratiquement heureux.

Nous pouvons donc rendre culte à Dieu « malgré notre misère », comme l’exprime un de nos hymnes (n° 88). Oui, nous le pouvons, ayant un grand souverain Sacrificateur qui a traversé les cieux ; et ayant ce grand Sacrificateur établi sur la maison de Dieu, nous pouvons approcher avec un cœur vrai. Mais ce que nous ne pourrons jamais faire, c’est de vouloir essayer d’entrer en présence de Dieu pour lui rendre culte avec du péché sur la conscience qui n’a pas été jugé et pardonné au moyen de la sacrificature de Christ. Il est important d’y penser, et de nous rappeler que les principes de la sainteté de Dieu demeurent toujours les mêmes. Hélas ! il arrive bien souvent que l’on essaye de passer la frontière avec du bagage interdit.

Il faut nous rappeler aussi que pour pouvoir profiter, le dimanche, des bénédictions attachées à la présence du Seigneur au milieu des siens réunis, pour pouvoir user de notre pleine liberté d’entrer, il faut avoir marché avec Dieu pendant la semaine ; nous ne pouvons pas être mondains la semaine et chrétiens le dimanche matin. Ce n’est pas le tout de pouvoir dire : Je me réunis avec les frères, je suis dans la marche des frères. La réalisation des principes scripturaires, que nous appelons la marche des frères, emporte avec elle la mort de la chair.

Est-ce que, en général, quand nous sommes réunis pour le culte, faisant profession d’entrer dans les lieux saints ; est-ce que, si l’on pouvait lire dans chacun des cœurs (c’est ce que Dieu fait), on ne verrait pas entre autres ce que nous avons cherché à faire ressortir dans notre comparaison, les trois classes de jeunes gens à la frontière ?

Ne verrait-on pas chez l’un, un chrétien qui a bien travaillé de ses mains pendant la semaine ? Mais il a tout fait avec Dieu, dans Sa communion ; il a aussi bronché en plusieurs choses, mais il a tout jugé et confessé à mesure : il est manifesté à Dieu, il apporte avec lui sa communion, et il est prêt à Lui rendre grâces.

Ne verrait-on pas, dans un second, un chrétien qui a été toute la semaine dans le tourbillon des affaires de la vie, peut-être dans un bureau, ou dans un magasin, ou à la tête d’un atelier ou d’un train de campagne, etc. ? Il y a été plus ou moins fidèle ; mais étant absorbé par les affaires, il n’a pu s’occuper du Seigneur : alors il arrive le cœur sec, mais sa conscience n’étant pas endormie, il juge ses inconséquences ; la contemplation de la grâce et de l’amour de Dieu le touche et le confond ; il peut donc célébrer Dieu malgré sa misère. Mais qu’il prenne garde pour la semaine suivante.

Ne verrait-on pas, hélas ! dans un troisième, un chrétien qui est aussi dans l’une des occupations du précédent (ce qui a pu aussi être le cas du premier) ? Mais faute d’avoir veillé et prié, d’avoir tout confessé et jugé à mesure, sa conscience s’est émoussée, son cœur est pris par la mondanité, l’amour de l’argent ou autre chose, et maintenant ce n’est plus pour lui qu’une habitude de s’habiller proprement le dimanche matin et d’aller s’asseoir sur un banc à la réunion ; mais le cœur est loin de Dieu, et non seulement cela, mais ce mal non jugé constitue de l’interdit dans l’assemblée, l’action de l’Esprit est entravée, et l’on sent cette atmosphère lourde, écrasante, qui provient de ce que Dieu ne peut avoir communion avec le mal. C’est alors pour ceux qui sont ainsi dans le péché, le bon moment de laisser agir la Parole et la conscience afin d’échapper à la discipline.

Que Dieu nous donne de savoir retenir la grâce par laquelle nous servions Dieu, d’une manière qui Lui soit agréable, avec révérence et avec crainte. Car aussi notre Dieu est un feu consumant (Héb. 12, 28, 29).

Il y a aussi des chrétiens correspondant à la quatrième classe de nos jeunes gens. Ils n’ont pas à cœur les réunions des saints et, tout en ne vivant pas dans des péchés grossiers, ils sont dans un état apathique ; il leur suffit de savoir qu’ils sont sauvés et qu’ils trouveront le ciel au bout de leur chemin. La Parole, en 2 Pierre 1, en contraste avec cet état, nous parle des choses qui doivent être jointes à la foi (v. 5-7), et nous dit que si ces choses sont en nous et se multiplient, nous ne serons point oisifs ni stériles, en attendant le ciel ; que si, au contraire, elles ne s’y trouvent pas, l’on est aveugle, on ne voit pas de loin, et on peut même oublier la purification de ses péchés d’autrefois. Nous voyons aussi dans ce chapitre que le Seigneur ne se contente pas, Lui, que nous arrivions au ciel en tout cas ; mais qu’Il désire que l’entrée dans Son royaume éternel, au lieu de se faire comme à travers le feu, nous soit richement donnée.

Que Dieu nous fasse la grâce d’aimer Sa lumière et Sa sainteté et de juger les fruits de la chair à cette lumière qui manifeste tout, afin que nous puissions jouir constamment de Sa communion individuellement et de Sa présence collectivement ; et bientôt nous serons pour l’éternité à l’abri de toute atteinte du mal.

Si ces lignes peuvent servir à rendre plus délicate une seule conscience, nous ne regretterons pas notre comparaison, peut-être par trop singulière, du « bagage à la frontière ».