Écho du Témoignage:Notes sur l’évangile de Matthieu/Partie 3
Dans le chapitre 9 nous trouvons l’œuvre du Seigneur, Son caractère en grâce ; comme au chapitre 8 c’est Sa personne (toutefois plus précisément en Israël), mais rejetée. Le Seigneur retourne en Sa propre ville (Capernaüm), mais loin de la scène qui a clos le dernier chapitre et qui est complète en elle-même : le monde Le rejetant, et, Lui, laissant le monde. Maintenant on Le voit de nouveau au milieu de Son service en Israël. La foi apporte un homme frappé dans son corps. Le Seigneur est encore ici comme Emmanuel, mais homme au milieu d’eux, mais Il s’annonce là avec la bénédiction promise de la présence de Jéhovah en grâce. Ici il ne s’agit pas de la rédemption, quoique certes sans elle il ne saurait y avoir un tel pardon, mais de l’application du pardon en grâce en Israël, comme on le voit au psaume 103, et pour la bénédiction présente il faut qu’Israël soit pardonné. Le Seigneur vient avec cette bénédiction et c’est un témoignage direct au pardon, sinon Il eût tout simplement guéri le paralytique comme en d’autres cas. Mais lorsque Jéhovah venait en grâce, Il pardonnait tous leurs péchés et guérissait toutes leurs infirmités. Le Seigneur annonce la présence de Jéhovah pour faire la première de ces choses. Les scribes murmurent en eux-mêmes. Quel autre que Jéhovah pouvait pardonner ? Mais Celui qui connaît les pensées était là et prouve par l’autre portion du verset que le Seigneur était là dans la puissance de la grâce. Il guérit sur-le-champ l’infirmité du malade.
Nous pouvons remarquer qu’en cela, comme dans le chapitre précédent, Il prend le titre de Fils de l’homme, Son titre de prédilection en amour pour nous, d’une plus vaste portée que celui de Christ, lequel, bien qu’Il fût le Christ, Il n’était pas venu prendre et qu’Il ne prend jamais en Israël. Il est là comme Emmanuel Jéhovah, pour sauver Son peuple ; mais, comme Fils de l’homme, titre de toute importance ; Celui qui prend le royaume en gloire depuis le ciel, qui même a toutes choses sous Ses pieds. Christ ne se présente jamais comme Christ. Le Fils de l’homme devait être fort pour Dieu (Ps. 80, 17) ; mais à présent il fallait qu’Il souffrît. Mais, quoique au milieu de Son peuple, il faut, lorsqu’Il est ici-bas, que Dieu prenne, dans Sa nature et dans Son œuvre, Sa place en rapport avec les hommes, au-delà de toute relation selon la loi, comme le rejeté sur la terre. Le Fils de l’homme a sur la terre le pouvoir de pardonner les péchés ; aussi la foule dit-elle : « un tel pouvoir aux hommes ». Le pardon était donc là, et la grâce pour les pécheurs. Il était là dans ce caractère. Il va et mange avec les publicains après avoir appelé Matthieu qui en était un. Ce n’était pas le dehors qui dirigeait Sa marche. Dieu était là et l’œuvre devait être l’effet de Sa présence et de Sa grâce et non dépendre de ce qu’Il trouvait. Et Il connaissait aussi le cœur et les vaisseaux à choisir pour être sous l’effet de cette grâce comme ses instruments. Mais le principe de l’œuvre était le principe de la grâce ; Il était venu non pour trouver, mais pour apporter ce qui était nécessaire, et les vaisseaux pour recevoir cela pour le service étaient des vaisseaux choisis, connus de Dieu et disposés par la grâce en instruments nouveaux et appropriés.
Il est donc là pardonnant les péchés et mangeant avec les pécheurs, mais c’est Jéhovah qui guérit (Ps. 103). Mais la révélation quant à l’œuvre va plus loin. On ne pouvait la placer dans les vieilles formes juives, ni prendre ce qui se trouvait en elles comme vaisseaux pour la contenir. Un publicain devait être un apôtre ; un pharisien, tout au plus, apprendre qu’il fallait qu’il naquît absolument de nouveau. Aucune des vieilles formes de justice réellement en rapport avec la chair et l’homme dans la chair, ne pouvait recevoir le vin nouveau ; la doctrine de la grâce en puissance venait par Jésus Christ. Les vieilles outres appartenaient à la chair, mais ce qui était venu maintenant était la puissance divine en grâce, et ce qui était complètement nouveau devait avoir ses propres vaisseaux. En outre, l’Époux était là : ce n’était pas pour les fils de la chambre nuptiale le temps de jeûner. Le temps viendrait pour cela. C’est une chose frappante de voir comment le Seigneur tient toujours Sa réjection à Lui comme partie intégrante de Son histoire. Il faut que le Fils de l’homme souffre, que l’Époux soit ôté. C’était Jéhovah là en grâce ; cela ne pouvait s’adapter aux vieilles outres et ne faisait qu’exciter la haine de l’homme et d’Israël qui préférait ses outres, comme lui donnant de l’importance, à Dieu Lui-même, et cela quand Il était révélé en grâce.
Le récit suivant contient la véritable histoire d’Israël arrivé sur le point de mourir[1], Christ a à faire avec lui comme mort, et Il le peut, mais ceux qui, en chemin avec Lui, ont foi en Lui, sont guéris complètement alors que tout secours avait failli. La vertu et la puissance de la vie étaient en Lui, bien qu’en définitive Il eût à vivifier un Israël réellement mort. Telle est l’histoire du ministère du Fils de l’homme — Jéhovah en Israël. Sont ajoutés à cela deux effets accessoires de Son pouvoir quant à son caractère spécial à l’égard d’Israël, quand il Lui est fait appel sous le nom de Fils de David. Toutefois le caractère général bien que manifesté en Israël, va dans sa nature au-delà de lui — Jéhovah et le Fils de l’homme — et c’est ce qui est d’un intérêt si profond à remarquer ; mais Il était le Fils de David en Israël.
Au verset 27 nous entrons exclusivement sur le terrain israélite où l’esprit des chefs se manifeste pleinement, tandis que la patience du Seigneur continue encore en grâce. Les aveugles en Israël recouvrent la vue par la foi au Fils de David, et ici Il est dans la maison, et alors Il ouvre là aussi la bouche des muets : l’attention de la multitude est attirée, et elle confesse qu’on n’avait jamais rien vu de pareil ; mais s’Il chasse la puissance du diable, les chefs du peuple appellent Sa puissance celle du diable. L’esprit d’une impardonnable apostasie était déjà manifesté, mais Jésus n’avait pas fini Son œuvre de bonté en Israël, et Il va par les villes et par les bourgades, enseignant, prêchant l’évangile du royaume, et opérant des guérisons. Son cœur était ému de compassion pour Israël, pour ces multitudes qui étaient comme des brebis sans bergers. Car s’Il était Jéhovah dans Sa bonté, Son cœur pouvait être ému de ce qu’Il voyait comme homme et jusqu’à ce que cette bonté ne trouvât plus lieu à son exercice. Son temps ne trouvait pas d’obstacle dans la méchanceté de ceux qui étaient Ses ennemis ; la moisson était encore abondante, les ouvriers peu nombreux. Oh ! combien le cœur peut encore sentir cela ! Il veut encore accomplir Son œuvre, avoir Ses brebis. Notre part est de demander au Maître de la moisson qu’Il envoie Ses ouvriers.
Nous avons donc dans ce chapitre la grâce de Son ministère, Son véritable caractère, le ministère de Jéhovah venu en grâce, profitable pour la foi, mais qui doit ressusciter les morts ; et qui, en tant que chose actuelle, est rejeté et blasphémé. Sa personne et Son œuvre n’ont pas de place ici sauf en grâce. Pendant qu’Il peut travailler ainsi, Il continue encore de s’occuper de tous ceux qui peuvent être atteints.
Le Seigneur qui, touché de compassion envers les masses délaissées, avait dit à Ses disciples de demander au Seigneur de la moisson d’envoyer des ouvriers dans Sa moisson, mu par cette même compassion, les envoie Lui-même, car Il est aussi Seigneur de la moisson ; mais ici Il est toujours à la recherche des brebis perdues de la maison d’Israël. Il a toujours Son rejet en vue, mais Il agit encore dans le cercle des promesses, et n’en sort pas, tout en annonçant qu’on viendrait de l’occident et de l’orient. Le serviteur accomplit son service dans les limites de sa mission ; mais Dieu et Sa grâce ne sauraient être ainsi bornés. La grâce de Sa divinité et Ses droits percent à travers l’humiliation à laquelle Il s’est assujetti, mais Il sert dans ces limites encore et renvoie Ses disciples dans le champ où Il cherche encore Ses brebis. Ils ne doivent pas aller par le chemin des Gentils, ni entrer dans une ville des Samaritains. Ils devaient annoncer l’arrivée prochaine du royaume des cieux, puis exercer la puissance que Jésus leur avait confiée, celle de détruire parmi les hommes toute la puissance de l’ennemi jusqu’à la mort même. Remarquez ici que non seulement Jésus faisait des miracles, mais Il pouvait conférer le pouvoir d’en faire. C’était la puissance divine qui se révélait dans Sa personne tout en servant comme Il avait été envoyé.
Le discours du Seigneur se divise en deux parties, l’une se rapportant à la mission dans laquelle étaient engagés les disciples dans ce moment-là, l’autre, plus générale, se rapportant en même temps au service qu’accompliraient Ses disciples après Sa mort, voire jusqu’à Son retour, à la présence du Saint Esprit et au retour du Fils de l’homme, mais toujours à un service rendu au milieu d’Israël, quoique l’effet s’étendît jusqu’aux Gentils — mais par le moyen de la persécution suscitée par les Juifs. La première partie s’étend du verset 5 jusqu’au 15, la seconde du 16 jusqu’à la fin et comprend les principes généraux de leur position. Comme les disciples allaient, envoyés de la part de Dieu et munis de Sa puissance, pour renverser toute celle de l’ennemi, ils devraient aussi se confier entièrement en Lui, ne rien prendre avec eux, ni faire provision de ce qu’il fallait pour leur voyage. Emmanuel présent, disposait les cœurs et prenait soin d’eux. Le temps viendrait sans doute où il n’en serait pas ainsi (voyez Luc 22, 35 et suivants). Toutefois, ils devaient demander en entrant dans une ville, qui était digne, et demeurer là jusqu’à ce qu’ils s’en allassent de la ville. C’était, on peut dire, le dernier témoignage rendu à Israël ; il y avait bien encore les soixante-dix la dernière fois qu’Il est monté à Jérusalem, mais il n’en est pas question dans cet évangile. Le Seigneur avertissait le résidu en Israël. En souhaitant la paix à une maison, si le fils de paix y demeurait, la paix y resterait, sinon reviendrait sur eux. Ce n’est pas l’évangile envoyé au monde, aux pécheurs, mais l’évangile du royaume envoyé à ceux qui avaient des oreilles pour écouter en Israël. Ensuite, là où ils n’étaient pas reçus, ils devaient secouer la poussière de leurs pieds. On voit le caractère final du témoignage qu’ils devaient rendre. Le jugement d’une telle cité serait plus terrible que celui de Sodome et Gomorrhe. Ici se termine la première partie de leur mission. Le Seigneur Lui-même les envoie avec la conscience, et Il l’exprime, qu’Il les envoyait comme des brebis au milieu des loups et qu’il leur faudrait être sages comme des serpents et simples comme des colombes, conseil impossible à suivre si ce n’est de ceux qui sont enseignés de Dieu.
Le monde peut être prudent, connaissant le mal ; le cœur peut être simple par ignorance et se trouver trompé ; le chrétien peut être prudent, sage, par la sagesse de Dieu qui le dirige, et simple parce qu’il marche selon la vie qui est en lui, et n’exprime autre chose que ce qui s’y trouve de fait. Les deux choses se lient parce que, par la possession positive du bien on discerne le mal, et les pièges ne réussissent pas parce que les motifs qui engagent les hommes à y toucher, n’exercent aucune influence sur le cœur ; on garde la simplicité parce qu’on agit selon ce qu’on est ; on est prudent, parce que, sachant qu’on est au milieu du mal, on l’évite par l’intelligence qui appartient à la spiritualité. Ce n’est pas la simplicité de l’ignorance, mais le bien qui évite tout ce qui le ferait sortir de sa vraie position devant Dieu. Mais, terrible mot pour l’homme, donnez-vous garde des hommes, dit le Seigneur ; et tous sont jetés comme tels maintenant dans la même masse. — Il ne dit pas, d’Israël. C’était bien en Israël qu’ils travaillaient, mais Israël est fondu dans la masse d’iniquité humaine. Dieu pouvait penser à lui et à Ses promesses, mais, par le fait, le cœur de l’homme était là comme ailleurs. Ils seraient forcés de comparaître devant les autorités judaïques par leur malice, et non seulement cela, mais devant les tribunaux des Gentils, mais pour porter un témoignage qui ainsi atteindrait les hauts lieux de la terre, car c’est ainsi que Dieu porte Son témoignage dans les hauts parages du monde, et non en mondanisant les siens — mais Dieu serait avec eux.
Et ici nous voyons clairement que cette partie du chapitre se rapporte au temps où le Seigneur serait loin. Ce serait l’Esprit de leur Père qui parlerait en eux. Mais la haine du cœur humain contre le témoignage de Dieu se montrerait en ce qu’elle pousserait les hommes à rompre tous les liens que Dieu avait formés lors de la création ; l’affection de la chair, du cœur humain, se changerait en une antipathie positive. Plus la relation serait intime, plus la haine serait acharnée. Il y a des droits dans ces relations, mais maintenant ce seraient les droits de la haine : le frère livrerait le frère à la mort.
Quel solennel effet du rejet du Christ, seul vrai lien de l’homme avec l’homme, parce que la volonté est restreinte et Dieu reconnu ! Dieu peut retenir la bride, et Il l’a fait en miséricorde ; mais quand Il est rejeté en grâce, il ne reste plus que la manifestation du cœur de l’homme tel qu’il est. La nature ne bride pas la nature, et le témoignage de Dieu quand Dieu est rejeté ne fait que réveiller la haine de celui qui ne veut rien de Ses droits, qui ne veut pas qu’il y en ait parce qu’il sait qu’il L’a abandonné. Mais Sa grâce poursuit son œuvre pour en arracher les âmes.
Si les disciples étaient persécutés dans une ville, ils devraient aller dans une autre ; ils n’auraient pas accompli leur tâche en Israël avant que le fils de l’homme fût venu. Ainsi nous voyons que ce témoignage des disciples en Israël s’étend jusqu’au retour du Seigneur. Interrompu par la destruction de Jérusalem et inachevé, il doit s’accomplir. Un autre témoignage a été suscité de Dieu dans la personne de Paul, l’apôtre de l’incirconcision, mais ici nous avons la mission des disciples formellement limitée à Israël, et les Gentils exclus. Ils devaient s’attendre à l’opprobre ; ils n’étaient pas au-dessus de leur maître que leurs adversaires avaient déjà appelé Béelzébul. Leur part était de se fier à Dieu quels que fussent les complots cachés de leurs ennemis ; tout serait mis en lumière et eux devraient agir comme y étant déjà. Ils ne devaient pas craindre. Premièrement ils devraient bien plus craindre Celui qui pouvait jeter corps et âme en enfer que ceux qui ne pouvaient rien faire que tuer le corps ; mais de plus, sans leur Père, Celui qui les gardait comme un Père, pas un passereau ne tombait à terre. Ils avaient plus de valeur à Ses yeux que bien des passereaux. Ensuite, celui qui confesserait Jésus devant les hommes, Jésus le confesserait devant les anges de Son Père. Ce sont les trois motifs qu’Il donne pour la fermeté ; mais ils ne devaient pas penser qu’Il était venu mettre la paix sur la terre. Comme résultat final Il le fera bien, régnant comme prince de paix, mais un Sauveur rejeté est autre chose. Ce serait la guerre intestine dans la maison ; voilà le triste effet de l’arrivée de Dieu et de la vérité sur la terre. L’homme ne les supporterait pas, et encore moins chez lui ; mais d’un autre côté, Il était, Lui, la pierre de touche pour le cœur. C’en était fait de l’homme selon la nature, nature que Dieu reconnaissait en elle-même pleinement mais qui, Christ, la pierre de voûte si elle avait pu être bénie, étant rejeté, était tombée en ruine ; et maintenant tout dépendait de Jésus seul ; et si l’homme violait les relations naturelles par la haine, les siens dévoués à Lui devraient être au-dessus de la nature par la grâce. Il était, Il est tout : quand il s’agit de Lui, tout doit céder, et cela non seulement à l’égard de ces relations, mais à l’égard de soi-même (et c’est toujours de soi-même qu’il est question). Il faut charger sa croix et suivre Christ ; qui trouverait sa vie pour lui-même, la perdrait ; et qui la perdrait pour l’amour du Christ, la sauverait. Tout dépendait maintenant, dans un monde déchu et jugé, de la réception de la Parole et de l’estimation qu’on en faisait, et de la justice selon Dieu. Celui qui recevait un prophète au nom d’un prophète, parce qu’il était tel, avait aux yeux de Dieu la valeur morale de la parole qu’il portait, car c’était la parole qu’il aimait telle qu’elle était de la part de Dieu ; et de même de la pratique. Les cérémonies n’avaient abouti à rien. Il s’agissait de la Parole de Dieu et de ce qu’Il aimait, Lui, dans un monde qui avait rompu avec Lui. Si ce n’était qu’un verre d’eau, donné à cause de Christ, l’âme qui le donnait aimait Christ et ne serait pas oubliée. C’est bien quant aux voies de Dieu au milieu d’Israël que toutes ces choses se déploient, c’est à leur œuvre en Israël que les instructions données aux douze disciples s’appliquent, mais quelles instructions pour nous tous quant à l’effet du rejet de Christ ! Le chapitre qui suit nous fait voir le changement qui s’en est suivi historiquement, et la place que le Christ prend lors de Son rejet par l’homme, seul resté debout devant Dieu dans la ruine du monde et d’Israël.
La question est soulevée par Jean maintenant en prison, si Jésus était donc le Christ quand aucune délivrance n’était opérée pour Israël. Ce n’était pas un manque de confiance dans la parole du Seigneur, car Jean s’en rapporte à cette parole, mais tout est changé dans les relations entre Jean et Christ et Israël. Quant à l’intelligence, Jean, probablement, comme individu, était embarrassé ; mais l’effet de cet embarras était de changer son rôle de prophète en une question de foi individuelle, et la tournure que prennent les choses et que Jésus leur donne, est selon la sagesse divine. Pleinement reconnu de Lui comme plus que prophète, Jean doit croire individuellement en Jésus par le témoignage que Jésus donne de Lui-même. Puissant pour tout faire, plein de grâce pour penser aux pauvres, pour leur apporter l’évangile, mais déjà rejeté, et un petit résidu reconnu dans Ses paroles, « heureux celui qui ne trouve pas la pierre d’achoppement en moi ». De sorte que nous avons encore Jéhovah en Israël, pierre d’achoppement, mais un sanctuaire pour ceux qui se confiaient en Lui. Jean doit recevoir Jésus sur ce témoignage ; ensuite c’est Christ qui rend témoignage à Jean, Jéhovah qui reconnaît Son serviteur, et non Jean à Jésus. Le témoignage des deux avait été rendu ; les chants lugubres de Jean, les sons attrayants de la flûte avaient été entendus tous les deux dans le marché, mais Israël ne voulait ni s’humilier pour les uns, ni se réjouir de l’autre. Tout cela était fini. Seulement il y avait un résidu selon la grâce, et la sagesse de Dieu dans les deux avait été justifiée dans les deux par ces enfants de sagesse ; et Jésus restait seul dans Sa grâce, Jéhovah dans le monde, dans un monde où l’homme avait montré qu’il ne voulait rien de Lui, pour manifester ce qu’Il était en Lui-même pour les besoins de ceux qui, dans un monde pareil, avaient fait la découverte de leurs besoins et de leurs misères. Le monde avait été mis pleinement à l’épreuve, et Jésus qui l’avait fait et savait qu’il n’y avait rien pour consoler un cœur éprouvé, qui savait que Son esprit avait été comme la colombe envoyée par Noé, dans cette grâce qui ne brillait qu’avec d’autant plus de splendeur que le monde était ténébreux, se présente à toute âme travaillée comme la ressource et une ressource parfaite pour ses besoins. Il donne le repos dans la révélation de l’amour du Père dans Sa personne, puis dans la parfaite soumission d’un cœur fléchi sous la volonté de Dieu, le repos pratique dans la vie. Mais les détails demandent un peu plus d’attention.
Le Seigneur n’était nullement insensible à Son rejet, Il le sentait profondément, bien que ce fût dans un esprit de grâce. On Le voit pleurer plus tard sur l’obstination finale de Jérusalem, Son cœur d’amour pensait avec douleur à l’endurcissement de Jérusalem en voyant la cité bien-aimée, mais méchante, rejeter le dernier effort de Dieu pour la ramener et la bénir. Ici le sentiment de Son cœur était un peu différent. Il avait déployé Sa puissance en bénédictions et en témoignage, et tout avait été en vain. Il leur reprochait la dureté de leur cœur. Il s’était dépensé pour eux, mais leur cœur était resté insensible. Ni Tyr, ni Sidon, ni Sodome, ni Gomorrhe ne seraient restées insensibles dans les mêmes circonstances ; elles se seraient repenties, il y avait longtemps, dans le sac et dans les cendres. Leur jugement en serait d’autant plus terrible ; mais alors, dans la même heure, Il accepte tout de la main de Son Père : soumission parfaite ! Il avait trouvé bon d’humilier l’orgueil de l’homme, et avait caché ces choses aux sages et aux intelligents et les avait révélées à de petits enfants. Aux yeux de Dieu, ces voies étaient bonnes, et Jésus les accepte sans question.
Alors, dans cette parfaite soumission d’homme, s’ouvre devant Lui toute la vérité de Sa gloire et de la position relative d’Israël et de Lui, et de Lui-même avec les hommes. Le Fils de Dieu était là ; toutes choses Lui étaient données de la part du Père et personne ne connaissait le Fils que Lui. Il était dans la vérité de Sa personne que personne ne Le connaissait. La divinité du Fils est sauvegardée dans Son humiliation par l’inscrutabilité de Sa personne. Le témoignage rendu à ce que les hommes en Israël étaient appelés à croire avait été accepté, mais la pleine vérité allait beaucoup plus loin et sortait de l’obscurité maintenant que le témoignage de Jean, de Christ et de Ses œuvres était rejeté. Lui, Il était inconnu ; Lui, Il révélait le Père. La grâce souveraine de Dieu dans cette révélation est alors manifestée. On n’avait qu’à venir à Lui et on aurait le repos. Ce n’était plus le royaume en Israël, mais, par la révélation du Père, le repos de l’âme fatiguée. Ainsi c’est Dieu en grâce pour celui qui en avait besoin — le Fils révélant le Père. Mais il y avait un autre élément dans ce touchant tableau de la grâce. La soumission parfaite d’un homme humble de cœur avait été l’occasion de la révélation de la gloire et de la grâce dans Sa personne : il en est de même Jean 12, il en est toujours ainsi. La soumission aux voies de Dieu ouvre la porte à la connaissance de Sa grâce et de Sa gloire. Or il en était ainsi de Jésus homme ; et Il engage Ses auditeurs à prendre ce joug, le joug qu’Il avait pris Lui-même, et à apprendre de L1ui dans cette manifestation de soumission et de pauvreté d’esprit, et ils trouveraient le repos de leurs âmes. C’est la grâce parfaite, la révélation du Père dans le Fils qui donne le repos aux cœurs fatigués de ce monde de péché. — C’est la soumission parfaite de la volonté qui donne la paix pratique du cœur pendant qu’on le traverse. C’est Christ-Fils révélant le Père, Christ homme parfaitement soumis au joug, qui donne les deux.
Dans le chapitre 12, nous trouvons le rejet final du système judaïque et de ceux qui étaient à sa tête. Christ rompt avec le système et en juge les chefs, se place au-dessus du sabbat qui était le sceau de l’alliance, annonce la ruine complète de la génération perverse d’Israël et refuse de reconnaître ses liens selon la chair avec ce peuple et ne veut reconnaître que les disciples amenés par la Parole et qui avaient suivi cette Parole. Mais il faut suivre le chapitre de plus près.
Les pharisiens blâmaient les disciples de ce qu’ils avaient cueilli des épis et les frottaient entre leurs mains. Le Seigneur répond que quand David, l’oint de Dieu, avait été rejeté, la loi de Moïse avait perdu sa force. Ensuite, les sacrificateurs, quand l’occasion le demandait, violaient le sabbat ; et il y en avait un plus grand que le temple, le Dieu vivant Lui-même, faisant de l’homme Son temple. Ensuite, ils auraient dû comprendre ce qui est dit, que la miséricorde se réjouissait en se mettant au-dessus du jugement. De plus, le Fils de l’homme était seigneur du sabbat ; Il était au-dessus du système qu’Il avait établi Lui-même comme Jéhovah, et Son caractère de Fils d’homme Le plaçait en dehors et au-dessus des droits que l’ancienne alliance avait sur l’homme et du repos qu’elle exigeait, mais ne pouvait pas donner. Au reste, Il montre leur hypocrisie dans ces choses, dans le cas de l’homme qui avait la main sèche. L’amour et la bonté de Dieu sont au-dessus des cérémonies, quelques saintes qu’elles soient. Ainsi, Sa personne rejetée comme l’avait été David est au-dessus du système judaïque, et la bonté de Dieu ne peut pas céder le droit souverain de Sa grâce divine envers l’homme. Mais le temps du jugement n’était pas encore. On n’entend pas Sa voix dans la rue jusqu’à ce que le moment arrive où Il l’élèvera en jugement dans le temps de Sa gloire et qu’Il enverra ce jugement victorieux sur toute opposition, et où les Gentils se confieront en Lui. Il chasse encore un démon, et l’hostilité sans conscience et sans cœur des pharisiens éclate ; ils ne peuvent pas nier le miracle, et plutôt que de reconnaître Jésus ils l’attribuent à un démon, c’est-à-dire en reconnaissant malgré eux que la puissance était là — mais, adversaires de Dieu, ils appellent le Saint Esprit, par lequel le miracle se faisait, un démon. Pour ceci il n’y avait pas de pardon.
Ensuite, le Seigneur en vient à la condamnation complète des Juifs. Remplis d’incrédulité, ils demandent un signe, eux qui venaient d’attribuer le signe au démon plutôt que de le croire ; mais le Seigneur ne leur en donne aucun autre que celui de Jonas, préfiguration de Son séjour dans la tombe, mais signe que maintenant c’était trop tard pour eux, que Celui qu’ils avaient déjà rejeté était le Fils de Dieu, et que toute relation avec cette génération était terminée pour toujours. Il cite les gens de Ninive et une reine du Midi qui se lèveraient en jugement contre cette génération, car un plus grand que Jonas ou Salomon était là.
Il me semble qu’un sentiment profond de peine perce à travers les paroles de Jésus à la vue de l’incrédulité des meneurs d’Israël, d’aveugles qui prétendaient conduire des aveugles. Mais le temps du jugement était venu, et le Seigneur prononce ce jugement. L’esprit immonde était sorti de ce peuple, l’esprit d’idolâtrie, je n’en doute point, car depuis la captivité de Babylone, ils n’étaient pas tombés dans l’idolâtrie ; mais le démon avait besoin, pour ainsi dire, de ce peuple où le nom de Dieu se trouvait, mais où Dieu n’était plus, et qu’ils avaient rejeté quand Il était venu au milieu d’eux dans la personne de Jésus. La maison était vide, balayée et garnie ; les formes religieuses et la piété extérieure s’y trouvaient, mais Dieu n’y était pas. L’esprit immonde rentrerait avec sept esprits plus mauvais que lui-même et y demeurerait, et le dernier état serait pire que le premier. L’état final du peuple, au moins de la génération perverse, serait plus mauvais que ses péchés auparavant. Déjà, ils se sont montrés comme les porcs de Génésareth après la mort du Seigneur, mais les paroles du Seigneur auront leur accomplissement à la fin des temps, quand les Juifs seront de nouveau idolâtres et que toute la puissance du démon sera développée sous l’antichrist. Il est bon qu’on comprenne chacun pour soi-même comment, si un vice est vaincu sans Dieu, rien n’est réellement gagné. On peut chasser un vice grossier par un péché plus subtil : si ce n’est pas vraiment l’œuvre de Dieu dans le cœur, on peut en être endurci et Satan y régner plus que jamais. Mais ici le Seigneur applique ce qu’Il dit à la génération qui L’a rejeté, aux Juifs incrédules et pervers auxquels Dieu a caché Sa face pour en voir la fin (Deut. 32, 20). Ensuite ceux qui étaient l’expression du lien par lequel Il était attaché au peuple juif selon la chair, sont venus faisant valoir ce lien. Le Seigneur n’a pas voulu les reconnaître et, indiquant Ses disciples, a dit : Voilà ma mère et mes frères ; les relations que je reconnais sont celles qui sont formées par la Parole de Dieu. Quant à l’histoire des Juifs, tout était fini. La grâce pouvait continuer, pouvait relever le peuple dans un résidu reconnu de Dieu ; mais quant à la responsabilité, leur histoire était finie. Le Seigneur ne cherche plus du fruit sur un arbre démontré mauvais, et se montre semeur au bord de la mer, apportant ce qui, reçu dans le cœur, produirait du fruit. Mais alors, cela introduisait le royaume des cieux où les Gentils pouvaient avoir part.
Le chapitre auquel nous sommes arrivés a été si souvent traité que je n’aurai pas besoin de m’étendre beaucoup sur les détails ; seulement il nous faudra un aperçu général sur la position qu’il tient dans l’évangile, et quelques mots sur la dernière parabole.
Nous avons vu le Seigneur prononcer sur le peuple juif un jugement qui s’étend jusqu’au dernier temps, en rompant, en tant que venu en chair, toutes Ses relations avec lui. Les chefs du peuple avaient blasphémé contre le Saint Esprit et amené ce jugement sur le système tout entier, bien que la patience de Dieu cherchât encore tous ceux qui avaient des oreilles pour écouter. Le Seigneur ne cherchait plus de fruit dans Sa vigne. Il n’y avait que du verjus après tous Ses soins. Tel était réellement l’homme, car Israël n’était que l’homme placé sous la loi avec tous les avantages que Dieu pouvait lui prodiguer. Dans l’épreuve à laquelle l’homme avait été assujetti, deux choses avaient été démontrées : qu’il ne pouvait pas atteindre à la justice selon la loi, et qu’il ne voulait pas recevoir Dieu venu en grâce, manifesté dans l’humanité pour gagner l’homme, et exerçant une puissance suffisante pour guérir tous les maux auxquels l’homme avait été assujetti par le péché.
Il sort donc de la maison, signe, je n’en doute pas, de ce changement immense dans les voies de Dieu, et s’assied dans une nacelle, sur la mer, et se présente comme un semeur, c’est-à-dire comme ne cherchant plus de fruit, mais apportant avec Lui, dans ce monde, ce qui devait en produire. Le Seigneur ne va pas plus loin que la parole du royaume. Les versets 10-17 constatent le jugement du peuple selon la prophétie d’Ésaïe dont le Seigneur, dans Sa patience, avait si longtemps différé l’accomplissement, et la séparation d’un résidu reconnu du Seigneur, résidu dont les oreilles et les yeux étaient ouverts par la grâce.
Il est bon de rappeler qu’il y a sept paraboles : la première n’est pas une similitude du royaume, les autres le sont. De celles-ci, les trois premières nous présentent la forme que prendrait le royaume dans le monde ; les trois dernières, les pensées de Dieu en établissant de cette manière le royaume, et puis le résultat de tout à la fin du siècle. La première s’occupe des individus et de l’effet visible de la Parole. Il n’est pas question de l’œuvre du Saint Esprit, ce qui se trouve enseigné ailleurs, sans doute, mais ici c’est l’œuvre extérieure de Christ en semant et dans l’effet, la conséquence, en tant que manifestés sur la terre. Nous avons bien la parole du royaume, mais ni le royaume, ni la fin du siècle. Christ sème, et voilà le résultat dans ce monde, dans l’homme sur la terre : la semence produit du fruit dans un cas sur quatre. Dans le premier la semence ne pénètre pas du tout, Satan l’ôte aussitôt qu’elle est semée : c’est la légèreté du cœur, son indifférence qui ne reçoit rien, la parole n’est pas comprise, le cœur est occupé d’autre chose. Toutefois c’est une parole adaptée à l’homme et semée dans son cœur. Dans le second cas, au contraire, le cœur est gagné quant à ses sentiments un moment, mais la conscience n’est pas atteinte, il n’y a pas de racine : la doctrine a été reçue pour la joie qu’apporte le message, et quand la parole apportait les souffrances à la place de la joie, le cœur n’en voulait plus. Il n’y avait pas un vrai besoin. Le Saint Esprit produit toujours des besoins. Ce n’était pas comme les apôtres : « Seigneur, à qui irions-nous ? ». Dans le troisième cas, le monde a étouffé le bon grain. Hélas ! il n’y a pas besoin de l’expliquer, cela se voit tous les jours. C’est une chose pourtant plus subtile ; le monde, les affaires n’ont pas l’air mauvais comme le péché grossier, mais la parole est étouffée et ne produit rien.
Le danger et la tendance de ces choses se trouvent chez le chrétien. Selon la mesure dans laquelle le monde exerce de l’empire sur lui, sa vie en souffre. Il n’est pas mort, soit ; mais il dort, il ne comprend pas les choses spirituelles, ne les voit pas, n’en jouit pas ; malheureux en présence des chrétiens spirituels, il ne jouit pas des choses dont ils jouissent et souffre même des reproches de sa conscience ; et s’il va avec le monde, il souffre aussi en y réfléchissant ; sa conscience lui reproche son manque de fidélité ; comme un malade qui souffre, il n’est pas mort, autrement il ne souffrirait pas, mais c’est un triste moyen de savoir que la vie y est. Dans le quatrième cas, la parole est comprise ; elle pénètre, croît, et produit du fruit à des degrés différents en différentes personnes. Dans le premier cas, il est dit que la parole n’était point comprise, dans ce cas-ci il est dit qu’elle est comprise, dans les autres cas ce point n’est pas touché. Dans le premier cas, on voyait que rien n’avait pénétré. Dans les deux suivants, il y en avait l’apparence ; mais il n’en était rien. La plante périt sans fruit. Dans le dernier cas, la semence se développe dans l’intérieur du cœur et le fruit est produit : précieux effet selon la nature de ce qui a été semé, fruit pour Celui qui a semé la semence et pour celui qui l’a reçue ! Il n’y a pas de jugement, mais les faits patents constatés par le Seigneur, en contraste avec Sa vigne et Son figuier où Il cherchait du fruit, et en contraste aussi avec le royaume ou état de choses dans le monde, et leur résultat dans le jugement à la fin.
La première des paraboles suivantes montre l’effet des semailles dans le monde jusqu’à la fin du siècle, mais ne comprend pas l’exécution du jugement ; cela se trouve, ainsi que la manifestation de la gloire, dans l’explication faite aux disciples dans la maison. On doit remarquer que dans la parabole du semeur, celui-ci n’est pas nommé ; c’est l’effet de la parole dans le cœur de l’homme, qui que ce soit qui l’ait semée. Ici, par contre, nous avons une similitude du royaume, et celui qui sème prend le caractère, non pas de Christ, nous avons vu Son œuvre terminée dans Son rejet, le Christ cherchant du fruit était venu pour être reçu en Israël, mais celui de Fils de l’homme ; Celui qui sème est le Fils de l’homme et le champ est le monde ; mais j’anticipe. Nous avons toujours le caractère général de l’œuvre que le Seigneur faisait : Il semait ; mais non le résultat personnel dans l’individu, mais le résultat public dans le monde. Il a semé de bonne semence dans Son champ, mais la responsabilité de l’homme est en question dans le résultat produit ; et pendant qu’ils dormaient, l’Ennemi est venu et a semé de l’ivraie. Cela n’empêchait pas que le bon grain ne fût pour le grenier, mais gâtait l’ensemble de la récolte dans le champ, et le mal qui avait été fait était sans remède. Il est défendu aux serviteurs d’arracher l’ivraie de peur d’arracher le bon grain avec, ce qui est bien arrivé quand on a voulu le faire ; les deux devaient croître ensemble jusqu’à la moisson. Le royaume des cieux présentait dans ce monde une récolte gâtée, fruit, d’une part, de l’œuvre du Seigneur, de l’autre, de l’œuvre de l’Ennemi. Or, dans la parabole, nous avons seulement ce qui arrive dans le royaume avant la manifestation du roi et l’exécution du jugement par Lui. Quand Lui sera manifesté, et que le jugement public sera là, il n’y aura plus de parabole, le mystère de Dieu sera terminé. Dans les paraboles nous avons les mystères, ce qui exige une révélation pour le savoir ; l’exécution du jugement est en soi la révélation la plus éclatante. Dans la parabole nous avons donc à la fin, en général le temps de la moisson, et l’ivraie est rassemblée premièrement en faisceaux pour être brûlée. L’ivraie est là en faisceaux sur le champ de ce monde et le bon grain est caché dans le Seigneur.
Ensuite, avant d’expliquer la parabole de l’ivraie, le Seigneur donne deux autres similitudes du royaume ; et souvenons-nous qu’il s’agit ici du royaume. Il est bon de remarquer ici que le mot similitude n’est pas le même dans ces paraboles et celle du semeur. Ici, c’est seulement le caractère que prendra le royaume ; il est semblable à… etc. Dans la parabole du semeur, il est devenu, a été fait semblable. C’est un caractère qu’il a pris dans les circonstances actuelles, vu le rejet du roi. Il vaut la peine aussi de remarquer dans ces paraboles celles dans lesquelles la chose en elle-même est le sujet de comparaison, et celles où c’est l’individu ou ceux qui forment la partie essentielle de la parabole. Le royaume même est semblable à un petit grain de moutarde devenant un grand arbre, symbole dans l’Ancien Testament d’une chose élevée dans ce monde, d’une puissance politique. Nous savons bien que cela est arrivé ; — que les oiseaux se nichent dans ses branches signifie la protection qu’il accorde (comp. Dan. 4, 12). C’est l’apparence publique du système chrétien telle qu’elle a été pendant des siècles. Ici point de jugement. Ensuite vient la parabole du levain. La similitude est le levain. La femme n’est pas un semeur. Ce n’est pas le Seigneur qui sème ce qui est désigné comme bonne semence, ce n’est pas un grand arbre dans le monde : c’est une doctrine qui s’insinue partout en de certaines limites et forme la pâte entière selon sa propre nature ; le tout est levé, c’est la chrétienté ; mais, ni dans l’une, ni dans l’autre de ces deux paraboles nous n’arrivons au jugement. C’est le royaume tel qu’il est quand le grain de moutarde ou le levain a pleinement agi et produit son effet. Il est vrai que le levain est toujours employé dans un sens mauvais, mais je ne pense pas que ce soit le but de la parabole, mais la doctrine qui forme tout dans une seule pâte, là où elle pénètre. Si c’était purement le mal comme mal, nous aurions eu quelque exception. Ceci est noté dans l’ivraie, mais d’un autre côté. Ce n’est pas le bien qui est semé, ni le Seigneur qui sème ; de sorte que l’idée du bien positif est soigneusement évitée, ainsi que de celui qui le fait. Il ne s’agit pas de la Parole de Dieu, mais du fait de la profession générale du christianisme et dans une forme où aucune idée du bien n’est présentée ; car certes le levain n’est pas, dans la Parole, une image du bien. La parabole n’est pas davantage la description d’un individu : il n’est guère besoin de discuter ce point, parce qu’il est une similitude du royaume des cieux et en aucun cas, un individu n’est le royaume des cieux. Au reste, le résultat dans un individu n’est pas ce qui est dépeint ici.
Voilà donc les trois descriptions du royaume sur la terre pendant l’absence du roi, tel que ce royaume s’est présenté aux yeux de tous : un mélange de bons et de mauvais ; la récolte était ainsi gâtée comme un tout ; — ensuite une grande puissance humaine et politique sur la terre, et une profession générale de doctrine, sans question de l’état individuel de qui que ce soit. Ensuite le bon grain est caché dans le grenier, et la providence prépare la semence de l’ennemi pour être brûlée en les associant ensemble en faisceaux sur la terre. Ensuite le Seigneur entre dans la maison ; et là, parlant à Ses disciples seuls, Il entre davantage dans les principes intérieurs du royaume dont Il parle, communiquant non l’effet dans le monde, mais les pensées de Dieu, le grand résultat qui expliquera tout dans le jugement et la gloire manifestée sur la terre, et le but réel de ce qu’a fait le Seigneur ainsi que l’action de ceux qui entrent avec intelligence dans Ses vues.
Premièrement, Il explique la parabole de l’ivraie. Nous avons déjà parlé des traits principaux, mais le Seigneur ajoute ici ce qui concerne la manifestation du résultat dans ce monde. Dans la parabole nous avons laissé le froment dans le grenier et l’ivraie en faisceaux sur le champ, les méchants rassemblés par les anges, soit par la providence de Dieu. Mais ici paraît sur la scène le Fils de l’homme pour ôter tout scandale de Son royaume (ce qu’Il fait) et Il jette ces méchants dans une fournaise de feu où il y a des pleurs et des grincements de dents. C’est le jugement exécuté ; les serviteurs devaient les laisser croître ; puis, ensuite du jugement, les justes luisent dans le royaume comme le soleil — en effet comme Jésus Lui-même. C’est le résultat, et ainsi l’explication divine de ce qui était un mystère auparavant, car le jugement manifeste ce que la foi discerne. Remarquez que tout ce qui est révélé est dans le monde, premièrement le royaume, avant puis après le jugement. Le fait est constaté que le grain est caché, mais rien n’est dit du grenier, ni de l’état du grain quand il est là.
Dans les paraboles qui suivent, nous avons, comme il a été dit, les pensées de Dieu, le but du Seigneur dans le royaume, mais encore ces pensées, sans parler d’un résultat en jugement, ainsi que nous avons vu dans celle du grain de moutarde et celle du levain. La première nous fait voir le royaume comme la découverte d’un trésor auparavant inconnu, caché dans un champ, et celui qui l’a trouvé renonce à tout ce qu’il a pour l’avoir et pour cela achète le champ. C’est ce que Christ a fait. Tout ce qu’Il avait comme Messie sur la terre, Il l’a laissé pour avoir le trésor de Son peuple, en prenant le champ où ils se trouvaient, la terre, pour les avoir. Ils étaient cachés dans ce monde ; mais Christ savait ce qui en était, enseigné du Père, comme homme sur la terre, et a tout quitté jusqu’à Sa vie pour nous avoir. Si, de fait, nous renonçons à tout pour avoir Christ, toutefois il ne s’agit pas d’un individu, on l’oublie trop, mais du royaume ; et de plus nous n’achetons aucun champ pour l’avoir.
Le second cas est un peu différent. Il ne s’agit pas d’une découverte. Le marchand cherchait de belles perles. Il savait ce qu’il en était d’une belle perle, il savait les apprécier, il en fallait de belles. Or, Christ a trouvé dans l’Église l’objet de Ses recherches sans tâche ou ride, ou aucune chose semblable : je ne pense pas à l’Église corps, ni à un système, mais à sa beauté morale. Le marchand avait le goût de ce qui était beau en fait de perles, Christ de ce qui était beau aux yeux de Dieu, et pour l’avoir, Il a quitté Sa gloire messianique et Sa vie. Quel bonheur que de penser qu’Il satisfait à Son cœur en nous, et que la perfection de beauté aux yeux de Dieu est chose effectuée ! Sion est appelée la perfection de beauté, mais là c’était terrestre ; ici céleste et réellement selon le cœur de Dieu.
La dernière parabole demande l’attention la plus sérieuse. Pour ma part, je ne doute pas qu’elle s’applique particulièrement à ces jours-ci. Le filet de l’évangile est jeté dans la mer des peuples, et rassemble des poissons de toutes les espèces. L’effet de l’évangile n’est pas que tous les poissons entrent dans son giron, mais qu’une quantité de toutes les espèces bonnes et mauvaises soit rassemblée dans le filet. C’est le résultat. Puis ceux qui ont tiré le filet se mettent là, sur le rivage, et s’occupent de ce qu’ils ont à cœur, du but pour lequel ils ont tiré le filet : avoir de bons poissons ; et ils choisissent les bons, les séparent d’avec les mauvais, et les mettent à part dans les vaisseaux, rejetant les mauvais et les laissant là. Ce sont les pêcheurs qui font cela, et ils s’occupent des bons. C’est-à-dire, quand le christianisme a rassemblé comme il l’a fait une certaine masse de gens, qui tous ont place ensemble dans le filet de la chrétienté, à la fin des jours, les serviteurs du Christ s’occupent de la masse et recueillent les bons dans des vaisseaux. Ce sont des serviteurs de Christ et qui ont de l’intelligence, et savent les distinguer, savent ce qu’ils veulent. Quand le jugement public arrivera, ce sera l’inverse. Les anges, ministres de la providence et du gouvernement de Dieu, prennent, non les bons, mais les méchants sur la terre, et les jettent dans le feu. Ils ne s’occupent que des mauvais, tandis que les pêcheurs ne s’occupent que des bons. Le principe, je le crois, s’applique toujours quand l’évangile dans un endroit a rassemblé beaucoup de personnes : le but du Seigneur est de mettre les siens ensemble, en des compagnies à part, mais la parabole semble parler directement du résultat de l’opération de l’évangile en rassemblant beaucoup de gens comme ayant part au nom chrétien ; alors comme seconde opération, sur le rivage, on fait le triage et l’on s’occupe à mettre les bons à part. L’exécution du jugement est autre chose. Dans cette parabole comme dans les deux précédentes, nous trouvons le discernement spirituel à l’égard du but de Dieu. Dans la seconde cela caractérise l’action du marchand ; dans la première et la troisième le champ est acheté, le filet rempli ; mais dans les deux cas, le trésor et les bons poissons sont distingués de ce qui est pris extérieurement et gouvernent l’action soit du marchand soit des pêcheurs.
Il est à remarquer que quatre de ces similitudes ne parlent pas du jugement, mais de l’apparence extérieure ou du but de Dieu dans le royaume, et du résultat soit dans le monde, soit auprès de Dieu. Le grand arbre et le levain, voilà le résultat dans le monde ; le trésor et la perle, voilà ce qui est acquis pour Dieu. Dans la première et la dernière nous avons le jugement, mais la différence est sensible. Dans la première, et c’était naturel, on voit le Seigneur commencer l’œuvre, et Il la fait, cela va sans dire, sans mélange de mal, le bon grain est tout bon. L’ennemi fait une œuvre distincte, ne peut autrement. Il y a une récolte ; mais la Parole a produit des plantes individuelles ; le mélange se trouve dans la récolte : mais il y a deux œuvres distinctes et les deux choses restent telles quelles jusqu’à la fin, et la préparation du jugement est l’action de Dieu dans le monde, et Il s’occupe premièrement des méchants pour les préparer pour le jugement ; les hommes n’agissent pas, il leur est défendu d’agir. Ce qui est produit est l’effet de l’action du Seigneur et de l’ennemi. Les serviteurs dormaient, voilà tout. Froment et ivraie étaient toujours froment et ivraie et fruit d’une œuvre distincte. Dans le filet le mélange était le résultat du travail de l’homme, le genre de poissons distincts sans doute, mais tous rassemblés dans le filet par un seul travail, et cela de la part des hommes, des pêcheurs. — Ce n’est pas ici une œuvre de l’ennemi, mais l’œuvre imparfaite de l’homme. — Ce n’est que le fait cependant qui est constaté ; le filet est plein, puis tiré sur le rivage, et ceux qui ont l’intelligence de ce que c’est qu’un bon poisson, ceux dont le but (et c’est le but de Dieu) est d’avoir de bons poissons, en font le triage et mettent les bons dans les vaisseaux. L’explication, comme précédemment, est le jugement qui montre publiquement ce qui était vrai et compris spirituellement précédemment. Mais les anges ne s’occupent que des mauvais. Dans la première parabole, il s’agit d’arracher de ce monde les mauvais, ce qui n’était pas permis aux serviteurs. Dans la dernière, il s’agit de mettre les bons ensemble dans les vaisseaux, ce qui était leur œuvre intelligente. Il ne faut pas oublier que les derniers temps étaient déjà venus du temps des apôtres.
Les relations immédiates et pour le temps d’alors, du Seigneur avec les Juifs, étaient, ainsi que nous l’avons vu, terminées, et le royaume des cieux, dans la forme qu’il devait prendre par suite de Son rejet, annoncé. Il ne cherchait plus de fruit sur Sa vigne, mais semait pour en avoir par la Parole. Mais Jésus continuait à s’occuper du peuple, montrant ce qu’Il était, et hélas ! ce qu’ils étaient eux-mêmes, et ce qui devait remplacer Ses relations avec les Juifs, telles qu’elles auraient été, s’Il avait été reçu. — Les chapitres 14 et 16 nous montrent ce qu’Il était alors pour les Juifs, et ce que le résidu deviendrait par Son absence de ce peuple et le renvoi ou la mise de côté de celui-ci, et le chapitre 15 ce qu’Il était divinement pour lui, lors même que le peuple fût méchant et rejeté ; seulement étant cela par ce qu’Il était Dieu et que Ses conseils ne pouvaient changer. Cette grâce s’étend aux Gentils qui n’avaient aucun droit aux promesses, bien qu’Il ne lâche pas Ses relations positives avec Israël ; car les dons et l’appel de Dieu sont sans repentance. Mais il nous faut souvenir que, dans ce déploiement des voies de Dieu, la grâce du Seigneur, la grâce divine et personnelle se manifeste de la manière la plus touchante et instructive, et des leçons pratiques pour nous ressortent continuellement de ce qui se passe.
Le rejet du témoignage de Dieu commence à se réaliser dans les faits. Jean-Baptiste est mis à mort par Hérode, à l’instigation de sa femme. Le Seigneur, touché et sensible à la violence faite à Son fidèle serviteur, se retire dans le désert : Élie, comme il est dit ailleurs, était venu et ils lui ont fait ce qu’ils ont voulu, et le Fils de l’homme devait aussi souffrir de leur part. Cet acte de cruauté n’était pas seulement la mort du fidèle prédicateur du Seigneur, mais il partait du cœur du fidèle témoin de l’état du peuple. Mais quelque douloureux que fussent Ses sentiments comme venu au milieu d’eux, ce divin amour s’élève au-dessus de tout, au-dessus des peines du Fils de l’homme. La multitude entend qu’Il s’est retiré dans le désert et y accourt. — Sortant de Sa retraite, Il voit la foule, et, ému de compassion, Il les guérit. Sa bonté ne se lassait pas devant l’iniquité de l’homme qui se hâtait maintenant de s’accomplir. Le soir étant venu, la multitude était là, n’ayant rien à manger. Les disciples sentent l’inconvénient de cette position et veulent les renvoyer, ressource toute naturelle de l’homme. Mais Dieu était en Israël et voulait de plus que Ses disciples, après tant de preuves, eussent la conscience de la puissance qui était là. Mais leur cœur n’avait d’autre ressource que ce qui était visible à l’homme, et selon la mesure de l’homme. Donnez-leur, vous, dit le Sauveur, à manger, et moi, je leur donnerai ; mais eux, au lieu de la foi en Dieu, dans la puissance divine du Sauveur, avaient cinq pains et deux poissons. Quelle différence entre la foi et la chair ! Dieu qui peut tout, et les pauvres ressources qui sont sous nos mains ! Mais la chair ne voit pas plus loin. Les disciples ne pouvaient pas se servir de la puissance qui était là ; hélas ! ils n’y pensaient pas. Mais ici le Seigneur manifestait qu’Il était au milieu du mal, non se mettant en relation avec Israël, si Israël le voulait, mais se montrant au-dessus d’Israël le Jéhovah qui bénissait Son peuple, selon Son cœur. Ce n’était qu’un témoignage de cette grâce, mais c’était à cette grâce que le témoignage était rendu. Au psaume 132, il est dit des temps où l’Éternel se lèvera et se souviendra de David et agira en grâce selon Son cœur : « Il rassasiera de pain ses pauvres », et Il le fait, témoignage inutile pour Israël et même, sauf la grâce, pour les disciples, mais non pour Sa gloire. — Le Christ rejeté est Jéhovah, le Sauveur de Son peuple et malgré tout. Le prélude à Son rejet et à Sa mort Le conduit à la preuve de Sa grâce divine et toute-puissante qui est au-dessus du mal et de l’incrédulité, même des siens. Mais il n’en est pas moins vrai que ce n’est qu’un témoignage et que les choses poursuivent leur cours, et c’est ce qui est intimé ici dans les faits. Il envoie Ses disciples traverser la mer seuls, renvoie le peuple et monte en haut pour prier : tableau en peu de traits, mais vivant, de tout ce qui est arrivé. Le peuple juif est renvoyé, Christ est en haut et les siens sur la mer. Toutefois comme nous l’avons déjà vu partout dans cet évangile, les Juifs ou les disciples comme résidu sont au premier plan. Je ne doute nullement même que le nombre des corbeilles de débris, quelque léger que soit l’indice, ne se rapporte à la pleine bénédiction des derniers jours dans le règne. C’est le nombre consacré à cela, douze tribus, douze apôtres, douze trônes pour eux jugeant les douze tribus, douze étoiles sur la femme. — C’est l’idée de la perfection du gouvernement de Dieu dans l’homme. C’est pourquoi cela se trouve aussi dans la Jérusalem céleste. Mais venons-en aux faits plus formels de cette histoire.
Le Seigneur fait monter Ses disciples dans une nacelle sans Lui, puis Il renvoie la multitude des Juifs qui avait joui de Sa présence. — Ce ne sont pas ici les jugements sur le peuple, mais Il disparaît pour ainsi dire. Ceux qui sont au Seigneur, le petit résidu, sont ailleurs exposés au tourment de l’orage, sans avoir le Sauveur avec eux personnellement présent, Lui est en haut seul. — Voilà la position. Mais quelques autres faits s’introduisent. Le Seigneur les rejoint, maître de tous les éléments qui les exercent sur le chemin. L’eau et les vagues sont le chemin de Ses pieds et aussitôt qu’Il les rejoint tout est calme, et ceux de la nacelle le reconnaissent comme Fils de Dieu, le monde aussi. Génésareth qui L’avait rejeté Le reçoit maintenant avec joie et ses plaies sont guéries comme le résidu d’Israël avait trouvé la paix.
Nous n’avons pas encore parlé d’un autre fait. Pierre sort de la barque pour aller vers Jésus avant qu’Il eût rejoint les disciples ; Il marche sur l’eau quand Pierre va à Sa rencontre. Cette partie de l’histoire nous présente, je ne doute pas, la position chrétienne en dehors du judaïsme. Jésus n’a pas rejoint Ses disciples qu’Il avait fait monter dans la barque, quand Il s’est séparé d’eux. Christ seul est la force et le motif : « Si c’est toi ». Il faut marcher où il n’y a rien, comme Christ y a marché. La tourmente des vagues fait manquer de foi à Pierre ; mais la grâce et la puissance du Sauveur sont là pour les autres comme pour Lui-même. Il étend Sa main et soutient Son pauvre serviteur. C’est ce qu’Il a fait afin que nous marchions comme Il a marché, où il n’y a aucun soutien que Lui-même. Une fois que Christ est revenu à Ses disciples, tout est paix et le voyage est fini. Mais il y a de précieuses instructions personnelles ici.
Le chrétien a à marcher sur l’eau, marcher par la foi, marcher comme Jésus a marché, là où il n’y a aucun sentier que la puissance divine, et là où l’homme ne peut pas marcher, est totalement incapable de le faire. Y marcher est le fruit de la puissance de Christ et de la foi dans le chrétien. Mais ce n’est pas tout. Il faut avoir l’œil fixé sur le Seigneur, sans cela on s’enfonce. Pierre a regardé à la mer agitée et s’est enfoncé. Christ étant hors de sa vue, c’était une comparaison faite entre les difficultés et lui-même : pas possible de marcher. Il avait raison, mais la puissance divine était entièrement oubliée. Ainsi Israël avec les espions. Les villes sont murées jusqu’au ciel, les Anakim sont là, « nous étions comme des sauterelles ». C’était oublier Dieu ; Lui était-Il comme une sauterelle devant les Anakim ? Et que faisaient des murs jusqu’au ciel ? Ils tombaient quand on sonnait avec une corne de bélier. — Non, il s’agit de regarder vers Dieu dans le chemin de Sa volonté et c’est ce que Josué et Caleb ont dit : Si l’Éternel prend Son bon plaisir en nous, nous sommes bien capables, disent-ils. — Pierre avait dit : « Si c’est toi », mais alors il aurait toujours dû regarder vers Lui. Et voyez comment l’incrédulité est insensée ; il a vu la mer agitée, et si elle avait été calme ? La raison de la différence n’était pas là, mais s’il regardait à Jésus ou non. Si l’on regarde à Lui, tout est possible et tout réussit, parce qu’Il peut tout et veut tout dans Sa grâce, toute bénédiction, tout le fruit de la foi. Grâces à Dieu, Il est là pour nous soutenir, quand même notre foi nous fait défaut. Si Jésus est l’objet qui nous fait marcher sur l’eau, Jésus est la force pour y marcher et il faut tenir l’œil fixé sur Lui. Si sa puissance est là, l’orage ne fait rien. Si elle n’y est pas, on s’enfonce dans le calme comme dans l’orage. On marche en tout cas par la foi, et il nous faut toujours Jésus, et avec Lui nous pouvons tout. L’orage et le calme sont la même chose.
Au chapitre 15 la grande controverse avec le peuple, controverse au fond avec le cœur de l’homme, est continuée, mais sur le terrain moral ; toujours au milieu d’Israël, mais pleine d’instruction pour tous les siècles. Ce sont les ordonnances en contraste avec la moralité voulue de Dieu qui est immuable dans ce sens qu’elle se rapporte aux relations dans lesquelles l’homme se trouve placé soit avec Dieu, soit avec les hommes, et qui consiste dans le maintien, dans sa marche, de ce qui convient à ces relations. Une fois que Dieu a formé ces relations, soit de Sa créature avec Lui-même, soit de Ses créatures entre elles, les devoirs existent d’eux-mêmes, ne sont que l’expression pratique de la relation, comme un vrai culte rendu à Dieu, soit piété et obéissance filiales avec toute autre conséquence de ces relations. Or le cœur corrompu de l’homme aime trop sa volonté propre et la satisfaction de ses convoitises pour accomplir ses devoirs ; et des formes de piété qui nourrissent son amour-propre lui plaisent plus que les devoirs et le laissent libre de suivre ses convoitises ; ni Dieu ni Son caractère ne sont vraiment connus. Dieu n’est pas honoré du cœur et le cœur n’est pas purifié. Se laver les mains vaut mieux pour un homme tel qu’un cœur pur, ou que s’approcher réellement de Dieu. Le Seigneur touche du doigt cette plaie morale, en montrant en même temps que le culte de ces hypocrites n’était rien moins qu’accepté de Dieu ; que les commandements des hommes ne faisaient que mettre Dieu de côté et exalter l’homme au détriment de la gloire divine. Les commandements de Dieu étaient annulés, Son culte envahi par la fausse autorité des hommes, et rendu en vain par ceux mêmes qui étaient entraînés dans ce courant (car le cœur de l’homme est facilement subjugué par de telles prétentions à la piété) et l’homme remplaçait Dieu en ce qui agissait sur le cœur. Le Seigneur prend soin de protester ouvertement contre les principes mêmes qui conduisaient à cette hypocrisie, en s’adressant à la foule qu’Il appelait vers Lui. Il n’y a rien que le Seigneur déteste plus que la religion humaine, les traditions des hommes. Rien n’exclut Dieu davantage en abusant de Son nom et assujettissant ainsi les consciences qui ne Le connaissent pas vraiment. Rien toutefois de plus simple : ce qui vient du cœur, voilà ce qui souille l’homme. Mais on voit comment le cœur de l’homme est influencé par ces choses et comment les simples subissent, par ce moyen, l’influence des hypocrites et de toute la classe des docteurs religieux. Les pharisiens en étaient scandalisés, disaient les disciples. Pas étonnant. Avoir une conscience devant Dieu selon Sa Parole et dans la lumière de Dieu pour elle-même gâtait toute leur affaire. Mais par amour pour nous, par la nécessité du vrai et du bon, c’est ce qu’il faut. Or, au point où nous en sommes dans l’histoire du Sauveur, il ne s’agissait plus de tenir compte de ces docteurs faux ; ce n’étaient pas des plantes que le Père céleste du Seigneur avaient plantées. Elles seraient déracinées. Il fallait les laisser : solennelle pensée à l’égard du peuple et encore pour la chrétienté ! C’étaient des aveugles conducteurs d’aveugles ; tous les deux tomberaient dans le fossé. Pour les disciples, la réponse du Seigneur va plus loin, tout en faisant remarquer le manque d’intelligence de l’apôtre car, en effet, le principe est évident. Mais alors quel tableau du cœur de l’homme ! suivi, grâce à Dieu, par celui du cœur de Dieu et de Ses voies en grâce. Ce qui sortait du cœur souillait l’homme. C’est tout simple. Mais qu’est-ce qui en sortait ? Mauvaises pensées, meurtres, puis une terrible liste de ces noirs produits du cœur déchu et corrompu. Mais le Seigneur ne peut-Il pas relever un peu ce sombre tableau par des traits de lumière qui se trouvent dans ces cœurs ? Il ne s’en trouve pas. Il laisse le cœur de l’homme ainsi caractérisé. Il ne manquait pas de bonté. Il connaissait le cœur, savait ce qui en était de l’homme, mais au-delà de cette liste, Il se tait. Ce n’est pas dire qu’il n’y ait pas de traits aimables dans le cœur naturel ; cela se trouve, même dans les animaux ; mais moralement, voilà ce qui sort du cœur, les fruits de la racine du péché qui s’y trouve ; restreints, arrêtés, modifiés, mais les fruits que le cœur de l’homme produit, là où il lui est permis de suivre ses penchants.
Ainsi le Seigneur passe des usages hypocrites employés par l’homme pour couvrir ce qu’il est et se donner un caractère religieux (quand même les vérités qu’on professe soient divines, et le système dans son origine émané de Dieu), Il passe des traditions humaines et du vain culte d’ordonnance humaine, au cœur qu’on cherche à couvrir, et le met à nu. Nous apprenons ce qui en est de ce cœur, comme Dieu le voit en ceux qui ne sont pas des plantes plantées par le Père. Et leur religion qui le cachait — qu’est-ce qu’elle était ? — L’hypocrisie de plus, et Dieu mis de côté par les ordonnances humaines. Voilà dans un peuple que Dieu avait rapproché de Lui-même, et dans une religion qu’Il avait établie Lui-même, Dieu mis de côté pour introduire l’homme, ses saintes traditions et ses commandements avec ses mains lavées à la place du cœur, puis ce que le cœur naturel est dans ses fruits devant Dieu.
Maintenant, le Seigneur passe de la manière la plus frappante à ce qui est en dehors de toutes les promesses, à une race maudite selon les promesses faites au peuple de Dieu, à l’endroit que le Seigneur cite comme modèle d’endurcissement, et montre, tout en reconnaissant les dispensations de Dieu envers Son peuple, et Sa fidélité en lui envoyant le Christ, ce qui en est d’un cœur poussé par ses besoins et par la foi qui va droit au cœur de Dieu, et ce que c’est que ce cœur divin pour les besoins que cette foi Lui apporte, ce qu’il est en soi en dehors des règles des économies. Le Seigneur s’en va du côté de Tyr et de Sidon. Une femme cananéenne se rend auprès de Lui. Sa fille était tourmentée d’un démon. Elle reconnaît le Seigneur comme héritier des promesses en Israël, comme fils de David. C’était bien la foi quant à Sa personne. Mais quelle part avait une Cananéenne avec les promesses faites en Israël ou aux bénédictions qui lui était accordées comme peuple de Dieu ? Le Seigneur ne lui répond pas. Des leçons plus profondes doivent être données de ce que l’homme est, mais de ce que Dieu est aussi.
Les disciples auraient voulu que le Seigneur fît ce qu’elle demandait pour s’en débarrasser, mais le Seigneur garde Sa place de fils de David. Il est envoyé aux brebis perdues de la maison d’Israël. Les besoins de la pauvre femme s’élèvent au-dessus de sa reconnaissance formelle de Jésus comme fils de David : « Seigneur, aide-moi ». Les besoins sont simples, ils se déclarent, mais le Seigneur veut l’éprouver pleinement. « Il ne convient pas de prendre le pain des enfants et de le donner aux chiens ». Le Seigneur reconnaît les dispensations de Dieu à l’égard de Son peuple, tout méchant qu’il était, et la femme aussi, mais des leçons bien autrement profondes se trouvent enseignées. — La pauvre femme — l’homme en elle trouve sa place. Il est sous la malédiction, sans promesse, n’ayant droit à rien, ou la puissance du démon. Il faut qu’il se reconnaisse, c’est ce que la femme fait. Elle est un chien, mais dans le besoin. Son espérance n’est pas dans quelque droit qu’elle possède, mais dans la bonté gratuite de Dieu. C’est un besoin qui se rencontre avec Dieu venu en grâce. — Elle reconnaît pleinement ce qu’elle est, un chien, mais elle maintient que s’il en est ainsi, il y a assez de bonté en Dieu pour des êtres tels. Dieu pourrait-il dire : Non, il n’y en a pas ? — Christ pouvait-Il se représenter ainsi ? — Impossible. — Par la foi, le besoin se rencontre à travers tous les obstacles de droits judaïques et d’indignité personnelle, les reconnaissant bien, mais se plaçant en dehors de tout droit, en contact immédiat avec la bonté de Dieu. — Voilà la foi. Elle reconnaît l’état de ruine et de misère dans lequel nous sommes ; humble et vraie, elle apporte son besoin à Dieu, mais compte sur ce qu’Il est. Or, Il ne peut pas se renier. Au reste, c’est la clef de tout l’évangile. Jésus était le Christ, le fils de David, ministre de la circoncision, mais par-derrière, pour ainsi dire, Dieu était là dans toute la plénitude de Sa grâce et dépassait les étroites bornes d’Israël et les promesses pour être Lui-même en grâce, grâce qui suffisait à tout. La malédiction pouvait être là, l’indignité complète, mais si le besoin était là et se plaçait, par la foi, sur le terrain de la grâce et de la bonté de Dieu, les barrières disparaissaient, et le besoin et Dieu se rencontraient, et la réponse était selon Sa souveraine bonté, les richesses de Sa grâce, et selon la foi qui comptait sur cela : — et la fille était guérie, la Cananéenne heureuse et Dieu en Christ révélé.
- ↑ Arti eteleutêsen « finit juste à présent » « morte en ce moment ». Nous savons que le père reçut en route la nouvelle qu’elle était réellement morte. Arti est le point jusqu’auquel le temps s’était étendu, nun la chose existe déjà.