Livre:Étude sur l’Apocalypse/Chapitre 2

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« À l’ange de l’assemblée qui est à Éphèse, écris : Voici ce que dit celui qui tient les sept étoiles dans sa droite, qui marche au milieu des sept lampes d’or ». Nous nous trouvons évidemment ici sur un terrain large, où tous les caractères sont généraux. Cette première épître considère l’état du témoignage chrétien sur la terre sous sa forme la plus étendue, et, comme je le suppose, dès les jours mêmes de l’apôtre Jean. En conséquence, le Seigneur se présente Lui-même à ce large point de vue. Il tient les sept étoiles dans Sa droite et Il marche au milieu des sept lampes d’or. C’est Sa position à la fois ministérielle et ecclésiastique ; Sa relation avec les anges, c’est-à-dire avec ceux qui, à Ses yeux, représentent moralement les assemblées, et Sa relation avec les assemblées elles-mêmes.

L’étoile est ce qui avait une action sur l’assemblée, ce qui ouvertement était le vase destiné de la part du Seigneur à projeter la lumière sur les saints de Dieu. Si cette lumière était inefficace, si le mal y était mêlé, l’état de l’assemblée devait s’en ressentir. Si elle était brillante, le niveau moral de l’assemblée s’en trouvait relevé. Voilà, je pense, ce que signifie l’étoile. Ainsi Celui qui les tient toutes dans Sa droite et qui marche au milieu des sept lampes d’or, c’est Christ, non seulement tenant sous Son autorité ces représentants moraux des assemblées, mais s’intéressant aussi aux assemblées ; Christ vu, selon le caractère du livre, dans Son aspect ministériel et ecclésiastique le plus complet et le plus général.

L’état de l’église à Éphèse est décrit avec la même généralité.

« Je connais tes œuvres, et ton travail, et ta patience, et que tu ne peux supporter les méchants ; et tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas, et tu les as trouvés menteurs ». Ainsi il y avait dans l’assemblée à Éphèse de la fidélité, en particulier à l’égard du genre de mal que Satan cherchait alors à introduire dans l’Église. Les apôtres avaient peut-être tous disparu, sauf Jean. À mesure qu’ils s’en allaient pour être avec le Seigneur, il était naturel que Satan essayât de susciter des hommes, ses instruments, qui réclamassent leur succession. L’église à Éphèse, et particulièrement l’ange qui l’avait aidée en cela par la grâce du Seigneur, avait éprouvé ces prétendus apôtres et avait trouvé qu’ils n’étaient point ce qu’ils se vantaient d’être. L’étoile avait donc jusque-là agi pour le bien de l’église.

Il y avait beaucoup plus encore chez ceux d’Éphèse. Non seulement la fidélité, mais un dévouement persévérant les caractérisait : « Tu as patience, et tu as supporté des afflictions pour mon nom, et tu ne t’es pas lassé ». Cependant le Seigneur a un sujet de plainte contre eux : « Mais j’ai contre toi que tu as abandonné ton premier amour ». Il est clair que c’est ici, comme toujours, le premier pas, le symptôme le plus général du déclin. Ce qui nuit et finalement conduit à la ruine, vient constamment du dedans, jamais du dehors. C’est en vain que Satan cherche à renverser ceux qui, s’appuyant sur l’amour de Christ, ont en Lui l’objet aimé qui remplit leurs pensées et leur vie. N’en était-il pas ainsi quand Paul écrivait aux Éphésiens ? Mais ils avaient abandonné ce premier amour. Ils avaient failli à cet égard et s’étaient relâchés, quoiqu’ils poursuivissent avec diligence leurs œuvres, leur travail et leur patience. Mais était-ce l’œuvre de foi, le travail d’amour et la patience d’espérance de notre Seigneur Jésus ? Ce qui d’abord avait produit de si beaux résultats n’agissait plus, et ne pouvait plus agir. L’effet subsistait, mais la source n’était plus là : ils avaient abandonné leur premier amour. C’en était fait d’eux, à moins qu’ils ne se jugeassent eux-mêmes et que, par la puissance du Saint Esprit, Christ ne reprît Sa place dans leur cœur. « Souviens-toi donc d’où tu es déchu, et repens-toi, et fais les premières œuvres ; autrement, je viens à toi et j’ôterai ta lampe de son lieu, à moins que tu ne te repentes ».

Nous retrouvons encore ici, comme lorsqu’il s’agissait de Christ, de l’état de l’Église et de la plainte portée contre elle, la même généralité dans le remède proposé et dans le jugement dont Éphèse est menacée. Le Seigneur s’attache dans cette épître aux sujets de l’importance la plus large et la plus générale. On peut le remarquer aussi dans la promesse par laquelle il termine : « Mais tu as ceci, que tu hais les œuvres des Nicolaïtes, lesquelles moi aussi je hais. Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux assemblées. À celui qui vaincra, je lui donnerai de manger de l’arbre de vie qui est dans le paradis de Dieu ». Qu’y a-t-il de plus vaste que cette promesse ?

Dans l’épître suivante, nous nous trouvons en présence d’un état de choses complètement différent. C’est un cas essentiellement spécial. Après que l’Église a déchu de la pureté apostolique, et par-dessus tout, après qu’elle a abandonné son premier amour, il semble bon au Seigneur d’envoyer sur elle l’affliction. Il lâche la bride à la puissance de Satan agissant par des persécuteurs païens et permet que toutes sortes d’épreuves tombent sur les siens. Telle est l’occasion de la lettre à l’ange de l’assemblée à Smyrne.

« Voici ce que dit le premier et le dernier, qui a été mort et qui a repris vie : Je connais ta tribulation, et ta pauvreté (mais tu es riche), et l’outrage de ceux qui se disent être Juifs ; et ils ne le sont pas, mais ils sont la synagogue de Satan ». Remarquez que ce ne sont plus de faux apôtres qui éprouvent les saints : un nouveau mal apparaît. Aussi longtemps que les vrais apôtres furent sur la terre, Satan ne put jamais faire reconnaître le judaïsme dans l’Église de Dieu. Le concile de Jérusalem exemptait expressément les Gentils du joug de la loi. L’apôtre Paul montre qu’introduire la loi et l’imposer au chrétien, soit pour la justification, soit comme règle de vie, c’est en réalité rendre Christ inutile et déchoir de la grâce. Cette vérité, évidente quand il s’agit de la justification, l’est moins dans le second cas qui cependant est, tout autant que le premier, une véritable négation de l’évangile. En effet, si Christ est pour le chrétien la règle de vie, et si la loi est la règle de mort pour le Juif, il est clair qu’abandonner l’un pour l’autre, c’est tendre à l’apostasie. Les premiers pères ont ainsi judaïsé et depuis lors le levain n’a pas cessé d’agir. Faire de même, se replacer sous ce régime juif, c’est être du nombre de ceux qui se disent Juifs et ne le sont pas, et ne sont hélas ! que la synagogue de Satan.

Le Seigneur considère ici ces mauvais ouvriers (et c’est ce que deviennent les prôneurs d’œuvres) comme formant un parti. Ce n’est pas simplement Satan luttant pour introduire le judaïsme ; il y a une « synagogue de Satan ». Ceux qui se disent Juifs et ne le sont pas, ont un caractère corporatif et peuvent être envisagés comme une congrégation. Ainsi, il ne s’agit pas d’une simple tendance individuelle comme cela avait eu lieu auparavant ; il y a plus ici. C’est un parti formé et connu et qui affiche les prétentions les plus élevées. Ceux qui le composent prétendent être plus saints et plus justes que les autres, et les dénoncent comme antinomiens parce qu’ils s’appuient sur la pure grâce de Dieu. Mais ce sont eux, au contraire, qui corrompaient et détruisaient le vrai christianisme qu’ils ne connaissaient pas. Séduits par Satan, ils sont ses zélés instruments, travaillant d’autant plus activement à séduire les autres, qu’eux-mêmes sont sérieux et honnêtes selon la chair.

Ceux que l’on nomme communément « les pères », semblent avoir été les chefs du parti auquel il est fait allusion ici. Sur eux repose la honte d’avoir introduit le judaïsme dans l’Église de Dieu. Ils ont exercé cette influence dans tous les âges, et c’est ici, à mon sens, que leur système est stigmatisé par le Seigneur Jésus Christ. Offensant pour Lui, ce système est entièrement opposé au principe de la grâce. Le caractère en est clair ; il arrache le chrétien à sa position céleste pour l’abaisser au niveau d’un judaïsme corrompu, et perd toute la précieuse vérité de cette vie réelle qui nous est donnée en Christ, vérité qui est le point capital des écrits de Jean. Ainsi, soit en pervertissant les âmes ou en formant des sectes à la manière des hommes parmi ceux qui, selon Paul, sont du ciel, soit en les sortant de la vie de Christ et leur faisant perdre de vue qu’ils doivent marcher comme Lui-même a marché, pour les placer sous des ordonnances semblables à celles des Juifs, les pères, dans leur ensemble, ont, je le crains, pleinement mérité d’être désignés ici par le Seigneur.

Quand l’homme se règle ainsi sur le modèle juif, toute la beauté et le but de l’Église de Dieu sont ruinés en principe. Mais le point important à remarquer ici, c’est que ce fut vers cette époque même, que la succession ecclésiastique et les ordonnances commencèrent à être érigées en système. On trouve ce grand fait, en contraste avec l’épître inspirée, même chez les pères qui vécurent avant le conseil de Nicée. Il me semble que le Seigneur, dans cette épître, constate cette action, en même temps qu’Il montre Dieu employant en quelque mesure pour le bien, ceux qui étaient fidèles dans les persécutions suscitées par les païens. Ainsi, tandis que Satan déployait son activité en formant sa synagogue, Christ disait à ceux qui souffraient : « Ne crains en aucune manière les choses que tu vas souffrir. Voici, le diable va jeter quelques-uns d’entre vous en prison, afin que vous soyez éprouvés : et vous aurez une tribulation de dix jours ». L’épreuve devait avoir une durée limitée ; le Seigneur en assigne le terme.

« Sois fidèle jusqu’à la mort et je te donnerai la couronne de vie… Celui qui vaincra n’aura point à souffrir de la seconde mort ». Ils pouvaient tomber sous les coups de la première mort, mais non pas être atteints par ce qui suivra et qui est irrévocable. Il y avait là une question de foi en Dieu, et on doit se rappeler en semblables circonstances que c’est par beaucoup d’afflictions qu’il nous faut entrer dans le royaume de Dieu.

« À l’ange de l’assemblée qui est à Pergame », vient un message très différent et qui est aussi tout à fait spécial.

« Voici ce que dit celui qui a l’épée aiguë à deux tranchants : Je sais où tu habites ». C’est une chose sérieuse que de savoir où et avec qui nous habitons. « Tu habites là où est le trône de Satan ». Comment cela a-t-il pu arriver ? On comprend qu’ils eussent à passer au travers de la scène où Satan déploie sa puissance, mais y habiter ! Aimaient-ils donc être près d’un trône, y demeurer, alors même que c’était celui de Satan ? Recherchaient-ils la protection de l’éclat du pouvoir humain ?

Le Seigneur reconnaît cependant ce qu’il y a de bon. « Tu tiens ferme mon nom, et tu n’as pas renié ma foi ». Il est digne de remarque qu’après les plus grandes persécutions, quand la chrétienté et les chrétiens se furent laissés séduire jusqu’au point d’accepter le patronage du monde, même alors il restait assez de fidélité pour repousser tous les efforts tentés contre la divinité de la personne de Christ. Sous le même Constantin qui étendit sur le christianisme le bouclier de la puissance terrestre, se livra la bataille dans laquelle fut vaincu l’ennemi arien. Ce fut sous l’autorité et par l’ordre de cet empereur, que se réunit le fameux concile de Nicée qui établit et promulgua publiquement le dogme de la Trinité, je ne dis pas pour les chrétiens qui n’avaient pas besoin d’un semblable rempart, mais pour la chrétienté. Alors fut aussi publié le symbole ou confession de foi vulgairement dit de Nicée, dont l’objet était d’affirmer la déité consubstantielle de Christ. Je ne puis m’empêcher de penser que c’est à cet état de choses qu’il est fait allusion ici. « Tu tiens ferme mon nom, et tu n’as pas renié ma foi, même dans les jours dans lesquels Antipas était mon fidèle témoin, qui a été mis à mort parmi vous, là où Satan habite ». Étrange et solennelle association de choses ! La proximité du trône de Satan au-dehors, et, au-dedans, la miséricorde de Dieu continuant à maintenir la foi en cette vérité fondamentale : la gloire personnelle de Christ !

« Mais j’ai quelques choses contre toi : c’est que tu as là des gens qui tiennent la doctrine de Balaam ». Une fois que l’Église s’est placée sous la sauvegarde du pouvoir terrestre, le cléricalisme s’introduit et fait de rapides progrès. L’autorité du monde présente des appâts mondains et le ministère devient un clergé, une profession qui apporte plus ou moins de profits. Les promoteurs de cet état de choses, voilà ceux qui tenaient la doctrine de Balaam. En même temps s’introduisaient nécessairement toutes sortes de compromis avec le monde et ses voies perverses, et le clergé les encourageait par de fausses applications des Écritures. C’est ainsi qu’il est dit ici de Balaam : « lequel enseignait à Balak à jeter une pierre d’achoppement devant les fils d’Israël, pour qu’ils mangeassent des choses sacrifiées aux idoles et qu’ils commissent la fornication ». Nul doute que tout cela ne soit symbolique, mais la portée en est assez claire pour toute conscience non émoussée. Il ne faut pas s’étonner si on ne comprend guère ces avertissements là où les mêmes maux existent, et où a disparu tout ce qui pouvait garder l’Église comme une vierge chaste, fiancée à Christ. Le monde s’est introduit, il est resté, et hélas ! la chose est surtout cachée par ceux mêmes qui doivent leur position professionnelle à cette influence terriblement corrompue et corruptrice. Le même esprit d’incrédulité qui fut la source du mal, lui conserve sa puissance et son action, et maintenant, comme alors, détourne de la conscience la pointe de l’épée aiguë à deux tranchants. Les chrétiens avaient été éblouis par la puissance et la gloire du monde qui, en ces jours, s’étaient déployées pour protéger non seulement eux, mais la foi publique de la chrétienté. En même temps, par leur alliance avec le monde, ils avaient, d’une manière fatale, déshonoré Christ, et la conséquence était un retour pratique à ce monde hors duquel la grâce avait tiré l’Église, pour l’unir à Christ glorifié.

« Ainsi tu en as, toi aussi, qui tiennent la doctrine des Nicolaïtes pareillement ». L’épître à l’ange de l’église à Éphèse dénonce les œuvres des Nicolaïtes ; maintenant l’iniquité en question, que je suppose être l’antinomianisme, était devenue une doctrine.

« Repens-toi donc ; autrement je viens à toi promptement, et je combattrai contre eux par l’épée de ma bouche ». Ainsi le Seigneur ne combattait plus pour la défense de Son peuple ; Il n’employait pas non plus la haine de l’ennemi ou la persécution pour retrancher le mal, ou pour l’étouffer dans son germe, comme nous l’avons vu précédemment. Un épreuve plus grande apparaît, mais, hélas ! l’état de ceux qui portent Son nom est tel, que le Seigneur se voit forcé d’agir sévèrement envers eux.

« Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux assemblées. À celui qui vaincra, je lui donnerai de la manne cachée ». Alors que l’Église cherchait une position publique et glorieuse, l’encouragement donné à la foi était la manne cachée. La fidélité individuelle envers le Seigneur Jésus, même si elle n’était pas appréciée, se rencontrait du moins encore. Il y avait des saints qui s’attachaient à Son nom, bien que le temps ne fût pas venu où ils dussent se séparer du corps public des professants et en sortir pour prendre la position du résidu.

Peut-être la foi n’avait-elle pas assez d’énergie pour cela, mais en tout cas la fidélité à Christ ne manquait pas, et où elle se trouvait s’appliquait la parole du Seigneur. « À celui qui vaincra, je lui donnerai de la manne cachée, et je lui donnerai un caillou blanc, et, sur le caillou, un nouveau nom écrit, que nul ne connaît, sinon celui qui le reçoit ». Son approbation est suffisante pour le cœur fidèle, elle lui est plus douce qu’un triomphe public devant l’univers.

Puis vient la dernière des quatre assemblées. « Et à l’ange de l’assemblée qui est à Thyatire, écris ». Je ne puis douter que cette épître ne contienne une esquisse exacte et aussi complète qu’elle pouvait l’être par le moyen des faits alors présents, de ce que nous trouvons dans les temps du Moyen-Âge.

« Voici ce que dit le Fils de Dieu, qui a ses yeux comme une flamme de feu, et dont les pieds sont semblables à de l’airain brillant ». Christ est présenté maintenant, non seulement avec cette puissance de jugement moral qui discerne tout, mais prêt à agir judiciairement contre le mal : « Ses pieds sont semblables à de l’airain brillant ».

« Je connais tes œuvres, et ton amour, et ta foi, et ton service, et ta patience, et tes dernières œuvres qui dépassent les premières ». Malgré toutes les ténèbres et l’ignorance qui existaient au Moyen-Âge quant à la doctrine, il y avait un dévouement remarquable. Ceux qui aimaient le Seigneur montraient leur amour, moins par leur intelligence de Ses voies, que par un renoncement à eux-mêmes habituel et sans réserve. Je ne parle pas de ce que produisait la superstition envers Marie ou envers l’église, lorsque de chacune on faisait une sorte de « bonne déesse », mais je parle du fruit produit dans la vie par un cœur tourné simplement vers Christ, si faible que fût d’ailleurs la connaissance.

« Mais j’ai contre toi, que tu laisses faire la femme Jésabel ». C’était un genre de mal tout à fait nouveau. Il n’y a pas maintenant simplement le cléricalisme, ou des personnes qui tiennent la doctrine de Balaam, mais un état de choses formellement établi, comme le représente toujours la femme employée symboliquement. Il est facile de s’en assurer en examinant l’Écriture. L’homme est l’agent, la force active ; la femme est l’état de choses produit. Jésabel est donc le symbole qui convenait ici, comme Balaam dans le cas précédent. L’activité était dans le clergé qui avait fait avec le monde les plus honteux compromis, et qui avait vendu l’honneur de Christ pour de l’or et de l’argent, pour du bien-être et des dignités. De là était issue Jésabel. Telle était la condition produite et tolérée pendant le Moyen-Âge dans ce qui portait le nom de Christ.

« Tu laisses faire la femme Jésabel qui se dit prophétesse ». Voilà précisément la prétention de la soi-disant église, c’est-à-dire l’affirmation de posséder une infaillibilité permanente, d’être une sorte d’autorité inspirée pour régler la doctrine, promulguer des dogmes et diriger tout au nom de Dieu. N’est-ce pas là exactement ce que fait le romanisme ?

« Et elle enseigne et égare mes esclaves en les entraînant à commettre la fornication et à manger des choses sacrifiées aux idoles ». Tout cela était le fruit, sans nul doute, de ce qui avait été auparavant, mais un fruit arrivé à une maturité avancée.

« Et je lui ai donné du temps afin qu’elle se repentît ; et elle ne veut pas se repentir de sa fornication. Voici, je la jette sur un lit, et ceux qui commettent adultère avec elle, dans une grande tribulation, à moins qu’ils ne se repentent de ses œuvres ; et je ferai mourir de mort ses enfants ». Jésabel était une mère, en vérité, une sainte mère, comme l’appelaient et les séducteurs parmi elle, et ceux qui étaient séduits. Mais qu’en pensait le Seigneur et ceux qui préféraient endurer les plus grandes souffrances plutôt que de commettre adultère avec elle ? Cette église-monde, dans sa corruption flagrante, était alors une institution établie. Ce n’est pas une erreur passagère comme un nuage, c’est un corps constitué et occupant la plus haute position dans le monde, c’est une reine, mais une reine qui prétend aussi au pouvoir spirituel le plus élevé, c’est une soi-disant prophétesse, établie maintenant d’une manière permanente dans la chrétienté et donnant naissance à une postérité d’iniquité distincte, qui est appelée « ses enfants ». Mais, dit Celui dont les yeux sont comme une flamme de feu, « je ferai mourir de mort ses enfants ; et toutes les assemblées connaîtront que c’est moi qui sonde les reins et les cœurs ; et je vous donnerai à chacun selon vos œuvres ».

« Mais à vous je dis, aux autres qui sont à Thyatire ». Ici apparaît clairement le résidu, « vous », « les autres… autant qu’il y en a qui n’ont pas cette doctrine », et c’est à eux, à ce résidu, que le Seigneur s’adresse maintenant.

Arrêtons-nous un instant sur ces paroles remarquables. Ici, pour la première fois, nous voyons formellement reconnus des saints, qui ne sont pas compris dans la condition publique de l’Assemblée, sans toutefois en être aussi ouvertement séparés qu’on le trouvera plus tard. Cependant, en esprit, ils deviennent et forment plus ou moins un corps rendant témoignage, à part de ce qui, en affichant les plus hautes prétentions, était en réalité dans la plus intime et la plus impie communion avec Jésabel, ainsi que le Seigneur juge et stigmatise ce que l’homme a nommé « notre mère, la sainte église catholique ».

« À vous je dis, aux autres qui sont à Thyatire, autant qu’il y en a qui n’ont pas cette doctrine, qui n’ont pas connu les profondeurs de Satan, comme ils disent : je ne vous impose pas d’autre charge ; mais seulement, ce que vous avez, tenez-le ferme jusqu’à ce que je vienne ». Le Seigneur, sans attendre d’eux de grandes choses, parle avec la plus exquise tendresse de ceux qui étaient fidèles à Son nom. Je suis persuadé qu’il est fait allusion ici à ceux qui sont communément appelés Vaudois et Albigeois et peut-être à d’autres du même caractère. Ils étaient sincères et pleins d’ardeur pour Christ, mais avec une petite mesure de lumières et de connaissances, si on la compare au témoignage plus complet et plus riche que le Seigneur suscita plus tard, comme nous le montre le chapitre suivant.

À la fin de l’épître le Seigneur fait entendre une promesse appropriée à la condition des saints : « Et celui qui vaincra, et celui qui gardera mes œuvres jusqu’à la fin — je lui donnerai autorité sur les nations ». Cette méchante Jésabel ne s’était pas contentée de persécuter les vrais saints du Seigneur ; elle avait recherché la suprématie universelle et la domination sur toutes les âmes. Le Seigneur demande aux siens de ne pactiser en rien avec elle, leur promettant la véritable autorité quand Lui-même la prendra en main. En attendant, qu’ils demeurent dans la patience, même à travers la tribulation, contents de souffrir actuellement pour l’amour du Christ.

« Et celui qui vaincra, et celui qui gardera mes œuvres jusqu’à la fin — je lui donnerai autorité sur les nations ; et il les paîtra avec une verge de fer, comme sont brisés les vases de poterie, selon que moi aussi j’ai reçu de mon Père ». Le fidèle partagera le pouvoir de Christ à Sa venue et Lui sera associé dans Son règne ; mais ce n’est pas encore tout ce que la grâce veut lui donner. Le Seigneur ajoute : « Et je lui donnerai l’étoile du matin ». Cela n’est pas être associé à Christ quand Il régnera publiquement, mais c’est Le posséder Lui-même, et c’est ce qui est tout à fait au-dessus des choses du monde. L’espérance céleste d’être avec Christ, voilà ce qui est donné au fidèle, aussi bien qu’une part dans le royaume.

Ici, comme on l’a observé avec raison, se fait remarquer un grand changement. L’invitation à écouter ce que l’Esprit dit aux assemblées suit la promesse au lieu de la précéder. La raison en est que, maintenant, il existe un résidu qui n’a plus rien à faire avec l’état public de l’Église, et le Seigneur adresse d’abord la promesse à celui qui vaincra, parce qu’il n’y a pas lieu d’espérer que l’Église dans son ensemble la reçoive. Dans les lettres aux trois premières assemblées, au contraire, l’invitation à écouter vient en premier lieu, parce que le Seigneur s’adresse à la conscience de l’Assemblée toute entière. Maintenant le résidu seul est vainqueur, la promesse est pour lui, et c’est lui seul que le Seigneur exhorte à prêter l’oreille.

La division entre le deuxième et le troisième chapitres est donc bien placée, car il y a un immense changement quand on passe aux trois dernières églises. En effet, l’introduction de l’épître adressée à l’assemblée à Sardes, nous montre le Seigneur recommençant un nouvel état de choses. L’ancienne phase ecclésiastique ou catholique de l’Église se termine avec Thyatire qui, néanmoins, en cela, présente ce trait particulier que c’est la fin de l’état public de l’Église, et le commencement de cette condition qui dure jusqu’à la venue du Seigneur. Nous trouvons en Thyatire la représentation mystique du romanisme, car il serait difficile de nier que Jésabel au moins n’offre ce caractère ; tandis que « les autres », le résidu, représentent ceux qui, sans être protestants, ont formé, à part et en dehors de la papauté, un corps de témoins, avant l’apparition du protestantisme, que le commencement du troisième chapitre place devant nous.

Ainsi nous avons vu la condition générale de l’Église dans son premier déclin ; puis les persécutions suscitées par le paganisme ; ensuite l’Église se plaçant sous le patronage du monde, et enfin le romanisme qui seul, d’après l’allusion faite à la venue de Christ, doit aller jusqu’à la fin.