Livre:La sympathie chrétienne/Lettre 63

De mipe
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Le 18 novembre 1834
Mon cher Monsieur,

J’espère que votre gorge va mieux, et qu’elle ne vous obligera pas à tant de précautions cet hiver. Notre Dieu emploie des moyens bien diversifiés pour faire notre éducation, et pour nous mettre en état de porter le poids de gloire qu’Il nous a préparé. Il garde la miséricorde, et nous sommes bienheureux d’avoir ainsi l’assurance que jamais nous ne serons tentés au-delà de ce que nous pouvons. Cette pensée m’a occupée en lisant l’histoire d’Abraham. Si le Seigneur avait un moment plus tôt mis un terme à son épreuve, Abraham n’aurait pu avoir le privilège d’entendre cette douce parole : « J’ai connu que tu crains Dieu, puisque tu n’as pas épargné pour moi ton fils, ton unique ». Si l’épreuve avait été prolongée d’un instant, Isaac n’était plus. Qu’il nous est précieux de savoir que Celui qui raffine est assis et qu’Il surveille Son feu ! Il ne paraissait faire aucune attention à Abraham, pendant qu’il allait avec son fils à la montagne ; Il le laissait bâtir son autel, ranger le bois, lier Isaac ; cependant, Ses compassions n’attendaient pour se montrer que le moment favorable. On peut dire les mêmes choses au sujet d’Agar, quoique ce fût son péché qui eût été la cause de ses maux. Elle avait semé le vent, pourquoi n’aurait-elle pas recueilli le tourbillon ? Elle avait semé sur une couche de pierres, elle ne devait attendre qu’une moisson d’afflictions. Mais non ; elle était sans ami, sans consolation, et c’était assez. Le Seigneur ne pouvait oublier la pauvre abandonnée ; Il sortit pour la regarder ; Il la trouva dans le désert ; Il la consola avec tendresse, parce qu’Il avait compassion de sa douleur. Il y a quelque chose de si doux dans ces paroles : « L’ange de Dieu appela des cieux Agar, et lui dit : Qu’as-tu, Agar ? Ne crains point, car Dieu a ouï la voix de l’enfant ». Dieu avait ouï, et c’était assez. C’est ainsi que Dieu agit à notre égard. Souvent nous sommes entourés de circonstances telles qu’il semble que notre foi soit sur le point d’être anéantie. Jetés sur une mer orageuse, battus par la tempête, environnés de bancs de sable et de rochers au milieu desquels nous ne pouvons diriger notre gouvernail, nous nous croyons perdus sans retour ; cependant, notre nacelle continue à avancer sans que nous puissions dire comment, si ce n’est que nous sentons que nous sommes secourus par une main toute-puissante, quoique invisible ; c’est ainsi que s’affermit notre espérance de « voir la bonté de l’Éternel dans la terre des vivants ». David aurait succombé s’il n’avait eu cette assurance. Il en sera toujours ainsi. Semblables au couteau d’Abraham, nos épreuves et nos tentations sont des messagers que le Seigneur envoie aux héritiers de la promesse. Recevons-les donc avec reconnaissance. Aimons la croix, car elle est toujours une amie fidèle, alors même qu’elle nous apporte les plus vives douleurs. Lorsque le tissu auquel le Seigneur travaille actuellement sera montré de son beau côté, nous ne regretterons pas d’avoir supporté toute espèce d’épreuves. En effet, plus elles sont douloureuses, plus nous pouvons être assurés que Sa bénédiction les accompagne, car Son cœur est avec Ses chers enfants. Quel sujet d’humiliation nous trouvons dans Ses paroles à Abraham : « Puisque tu n’as point épargné pour moi ton fils, ton unique » ; c’était comme s’Il lui eût dit : Je puis compter entièrement sur toi ; Je puis entrer avec toi dans les plus doux rapports d’intimité. Ami de Dieu, je puis me confier en toi ; je puis t’ouvrir tout mon cœur, « puisque tu n’as point épargné pour moi ton fils, ton unique ». Et pourrions-nous nous étonner, après cela, si Dieu compte que nous croirons qu’avec Jésus Il nous donnera toutes choses, Lui qui n’a point épargné Son Fils, Son unique, mais qui L’a livré pour nous ?

Veuillez m’excuser, cher Monsieur, si je me laisse aller à vous écrire aussi longuement. Vous savez que je ne pourrais vous envoyer du papier blanc. Ces choses pourraient ne pas être exactement en rapport avec vos besoins actuels, mais je sais qu’il nous est toujours bon d’entendre répéter que « celui qui a promis est fidèle ». Je puis affirmer par ma propre expérience qu’Il dit vrai, quand Il annonce que c’est par beaucoup de tribulations qu’il nous faut entrer dans le royaume de Dieu. Le temps de notre extrême misère est pour Lui le temps d’agir ; Il connaît notre affliction ; Il nous soutient dans nos détresses ; Il est une haute retraite dans le temps de l’angoisse ; et c’est lorsque notre âme est comme perdue, sans consolateur et sans libérateur, que Jésus s’approche, pour étendre sur elle les bras de Ses consolations et pour l’entourer de toutes parts. Quelques jours encore, et Ses messagers auront fini leur œuvre, la foi aura été rendue parfaite, et à Son commandement les soupirs et les larmes s’enfuiront pour jamais. « Hâte-toi, mon bien-aimé ! ». « L’espoir différé fait languir le cœur ». L’absence est toujours l’absence, et nous ne jouirons du repos que lorsque nous serons unis à Lui pour toujours. Ce n’est pas assez que nous soyons sûrs de Lui, sûrs qu’Il nous aime et qu’Il nous aimera jusqu’à la fin. Nous savons tout cela. Nous sentons le prix des témoignages de Son amour ; nous nous reposons sur Lui-même, sur Sa fidélité. Cependant nous ne pouvons nous passer de Lui ; c’est Sa présence dont nous avons besoin, et quoique la foi soit notre vie, il faut que nous soyons dans Ses bras pour dire : « Mon bien-aimé est à moi, et je suis à mon bien-aimé ».

Votre très affectionnée en lui

T.A. Powerscourt