Livre:Sur le culte/Chapitre 4
En considérant les aspects variés sous lesquels le Seigneur Jésus nous est présenté, il est utile parfois de distinguer entre ce qu’Il est proprement en Sa personne, et ce qu’Il est en tant que constitué de Dieu.
Il est aussi utile que précieux de Le suivre de la crèche de Bethléhem jusqu’à Son arrivée sur les nuées du ciel, dans la plénitude de Sa gloire. Le Saint Esprit prend plaisir à traiter ce sujet en suivant les traces de l’humble rejeton du tronc d’Isaï, montant devant l’Éternel comme une faible plante, et comme une racine sortant d’une terre altérée, jusqu’à ce qu’Il devienne la branche magnifique en beauté (És. 11, 1 ; 53, 2 ; Jér. 33, 15 ; Zach. 3, 8 ; 6, 12 ; Luc 1, 78). De même encore, c’est maintenant l’office spécial du Saint Esprit de glorifier Jésus, en nous témoignant ce qu’Il est dans le ciel, pendant qu’Il est rejeté sur la terre. C’est dans la réception de ce témoignage que se trouve la grande force de l’Église, dans son état militant ici-bas, au milieu du monde.
Mais il y a autre chose à considérer avant tout. Il faut Le suivre du ciel à la terre, aussi bien que de la terre au ciel, d’où Il doit revenir dans Sa gloire manifestée. C’est ce caractère du témoignage rendu à Jésus que le Saint Esprit nous présente au commencement de l’épître aux Hébreux. Il est vrai que le sujet principal est la dignité d’office du Seigneur Jésus Christ, comme l’apôtre, le capitaine et le souverain sacrificateur de notre profession, élevé infiniment au-dessus de Moïse ou d’Aaron ou de Josué. Mais Son élévation, tout en étant vraie de Lui, considéré dans Ses offices, l’est beaucoup plus encore en raison de la dignité essentielle de Sa personne. Dieu, dans ces derniers jours, nous a parlé par le Fils. Ce n’est pas là un titre d’office ; c’est Sa condition propre, réelle, particulière, native ; c’est ce qui Lui appartient dans un sens dans lequel il n’appartient à aucun autre.
Et c’est ici la grande différence caractéristique entre le Seigneur Jésus et tous les autres. Ils sont nombreux, il est vrai, les hommes auxquels l’Éternel a jadis conféré de l’honneur, lesquels n’auraient rien été sans cet honneur, qui était ainsi mis sur eux. Ils étaient constitués et établis pour des offices divers, et refuser de les reconnaître dans ces offices eût été rejeter Dieu même. De même aussi, Dieu a fait Jésus et Christ et Seigneur. Mais qui est Celui qui est ainsi constitué ou établi de Dieu ? Il est le Fils. Ces dignités conférées ne peuvent pas surpasser Sa gloire réelle, celle qu’Il avait auprès du Père avant que le monde fût. Ses offices, de quelque dignité qu’ils fussent revêtus, ne peuvent dans ce sens L’exalter. Mais Il peut donner, et Il donne, en effet, la puissance et le caractère de Sa divine personne à tous les offices qu’Il remplit, et à toutes les œuvres qu’Il a faites. S’Il pouvait être dépouillé de toutes Ses gloires officielles, Sa propre excellence et Sa gloire personnelle n’en demeureraient pas moins intactes et entières. C’est là ce qui Le rend seul propre « à soutenir la gloire » que Dieu peut mettre sur Lui. Lorsque Dieu mit des gloires diverses sur d’autres, comme Il le fit sur Moïse, sur Aaron, sur David ou sur Salomon, l’incapacité où ils étaient de soutenir cette gloire fut manifestée en eux tous. Et pourquoi ? Ils n’étaient que des hommes, n’ayant absolument aucun pouvoir en eux-mêmes pour se soutenir. Mais Jésus est le Fils, et « en Lui était la vie ». Et rappelons, en passant, que la seule sécurité pour les saints, qui portent la gloire dont la grâce a fait leur gloire, est qu’ils sont unis à Lui, qui est ainsi en Sa personne au-dessus de toute gloire. « Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous d’un » (Héb. 2, 11).
Occuper un office de la part de Dieu est, en vérité, une responsabilité solennelle, soit pour celui qui est ainsi honoré, soit pour les autres, appelés à reconnaître l’honneur conféré de Dieu. C’est ainsi notre responsabilité de reconnaître l’office des magistrats, et de ne pas parler mal des dignités. Résister au pouvoir, c’est résister à Dieu. Ceux qui sont revêtus de la dignité peuvent n’être rien, ils peuvent être les plus vils des hommes, mais l’honneur est mis sur eux de la part de Dieu, et doit être reconnu par nous. S’il en est ainsi, combien ne doit pas être affreux aux yeux de Dieu le refus de reconnaître quelqu’un des offices, des titres, des dignités, que Dieu a conférés à Son propre Fils ! Combien n’est-il pas affreux d’empiéter, en quelque manière que ce soit, sur ces offices en nous les arrogeant à nous-mêmes. C’est là la dernière forme du mal qui se manifestera sous l’économie actuelle, et qui attirera l’épouvantable jugement de Dieu. C’est le reniement de Jésus Christ, le seul Seigneur Dieu, et notre Seigneur (Jude) ; c’est-à-dire le reniement de Jésus et quant à Sa gloire essentielle, et quand à Sa gloire conférée et médiatoriale. Gardons-nous donc bien de tout ce qui déroge à l’honneur dû à Jésus, le Fils de Dieu : car combien n’est-Il pas infiniment élevé au-dessus de tous les autres, à qui Dieu a conféré quelque dignité. Dieu dépouillera un jour les hommes de toutes les gloires qu’Il leur a conférées, puis que seront-ils ? Rien. L’homme élevé en dignité est semblable aux bêtes qui périssent. Mais lorsque l’homme sera ainsi abaissé, en ce jour-là, le Seigneur Jésus Christ seul sera exalté (És. 2).
Vu l’importance du sujet, je désire m’arrêter sur le psaume 82, pour appuyer de nouveaux arguments cette vérité, que tout honneur conféré aux hommes par Dieu les tire hors de l’obscurité ; mais que dès que cet honneur leur est ôté, ils retombent dans leur propre néant. Tandis que l’honneur conféré au Fils ne Lui ajoute réellement rien : si cet honneur Lui est ôté, ou s’il est méconnu par l’homme, cela ne fait qu’amener Son élévation par Dieu à tous les offices dans lesquels l’homme a manqué ; « afin qu’en toutes choses Il ait la prééminence ». « Dieu assiste dans l’assemblée des forts : Il juge au milieu des dieux. Jusques à quand jugerez-vous injustement et aurez-vous égard à l’apparence de la personne des méchants ?… J’ai dit : Vous êtes des dieux, et vous êtes tous enfants du Souverain : toutefois vous mourrez comme les hommes, et vous qui êtes les principaux, vous tomberez comme un autre. Ô Dieu, lève-toi, juge la terre ; car tu auras en héritage toutes les nations ».
La relation de ce psaume au Seigneur Jésus, telle qu’elle est indiquée dans le chapitre 10 de Jean, est très remarquable. Il avait affirmé, de la manière la plus claire, Sa propre divinité — « Moi et mon Père sommes un » (v. 30). Ce qui, dirent-ils, était se faire égal à Dieu (v. 33). Ensuite, au verset 38, Jésus affirme encore la même chose, et ils cherchent de nouveau à se saisir de Lui (v. 39). Mais Il avait auparavant (v. 34, 35) fait allusion à ce psaume, pour démontrer qu’ils auraient dû au moins Le reconnaître dans Son autorité et Son pouvoir d’office. Ses œuvres rendaient témoignage de Lui, qu’Il était l’envoyé du Père. Non pas seulement une personne « à qui la Parole de Dieu fût adressée », mais Celui que le Père avait sanctifié et envoyé dans le monde, Celui qui pouvait dire : « Je suis le Fils de Dieu ». Ils auraient dû Le croire à cause de Ses œuvres, car Il faisait les œuvres de Son Père, et Lui et le Père n’étaient qu’un. Quant aux autres, la Parole de Dieu leur est seulement adressée : — « J’ai dit, vous êtes des dieux ». Ils n’avaient point de dignité du tout en eux-mêmes ; ils étaient de la terre, terrestres, élevés en dignité d’office par Dieu. Mais Jésus était le Fils. Il avait été « sanctifié et envoyé dans le monde » ; Il était « le Seigneur du ciel ». Combien Jésus, le Fils de Dieu, n’est-Il donc pas infiniment distinct de tous ceux dont Dieu a dit : « Vous êtes des dieux » ! Dès le moment où leur dignité conférée leur est ôtée, ils doivent mourir comme la foule vulgaire des hommes. Ils n’ont point de puissance ou de dignité essentielle et inhérente. Mais Lui était un avec le Père. Il était au commencement avec Dieu ; aussi rien ne pouvait réellement affecter Sa dignité, parce qu’elle était intrinsèquement divine. Ce n’était pas la parole, à Lui adressée, qui Le faisait ce qu’Il était, quoiqu’Il eût été, il est vrai, sanctifié et envoyé dans le monde ; c’était ce qu’Il était toujours en Lui-même, qui Le rendait capable d’être envoyé et de soutenir, en lui donnant efficace, tout ce qui était mis sur Lui. Aussi, quoique, dans Son humiliation, Son jugement ait été ôté, toutefois Dieu Lui a donné Son partage parmi les grands, et Il partagera le butin avec les puissants. Cela sera manifestement vrai, quand tout pouvoir délégué et d’office sera repris des mains auxquelles Dieu l’avait confié, et que Jésus Lui-même l’exercera. Alors sera démontrée la vérité de cette parole dite de Lui : « Lève-toi, ô Dieu, juge la terre ; car tu auras en héritage toutes les nations ».
Le rapport qu’il y a entre les gloires personnelles et les gloire d’office du Seigneur Jésus Christ est le sujet principal de l’épître aux Hébreux. Dans le premier chapitre, le Fils nous est présenté comme étant, et quant à Sa personne et quant à Ses offices, infiniment au-dessus des anges. Et c’est le Fils qui est aussi l’apôtre de notre profession. Dans le second chapitre, Il nous est présenté comme notre souverain Sacrificateur, puis nous sommes exhortés, au chapitre troisième, à « considérer Jésus Christ, l’apôtre et le souverain sacrificateur de notre profession ». Moïse, il est vrai, était grand. — Dieu l’avait magnifié devant Pharaon ; cependant il n’était qu’un serviteur — un homme à qui la parole de Dieu était adressée, quoique Dieu eût humilié Marie et Aaron devant lui (Nomb. 12). Mais remarquez-le : ce n’était pas seulement Ses offices qui rendaient Jésus plus grand que Moïse ; mais c’est Sa grandeur personnelle qui Lui donne une supériorité infinie. Il a été jugé digne d’une gloire qui surpasse autant celle de Moïse, que celui qui a construit la maison la surpasse en honneur. Car toute maison est construite par quelqu’un, et celui qui a construit toutes choses est Dieu. Moïse fut fidèle, comme serviteur, dans la maison d’autrui, mais Christ, comme Fils, est sur Sa propre maison. Et de même encore, touchant la souveraine sacrificature : Aaron était le souverain sacrificateur, mais Jésus est le grand souverain sacrificateur — plus élevé ainsi qu’Aaron, même officiellement. Mais ce n’est pas tout : c’est « Jésus, le Fils de Dieu », infiniment plus élevé personnellement qu’Il ne l’est officiellement. « Puis donc que nous avons un grand souverain sacrificateur, Jésus le Fils de Dieu, qui est entré dans les cieux » (Héb. 4).
Après cette introduction générale, méditons sur les contrastes qui nous sont présentés dans le septième chapitre de l’épître aux Hébreux ; afin que, connaissant l’ordre de la sacrificature, nous puissions en déduire le caractère du culte.
Ici, c’est la personne du Sacrificateur qui nous est surtout présentée ; c’est le « Fils de Dieu » (Héb. 7, 3), en contraste avec toute personne remplissant un office. Cela eût pu suffire ; mais il y a des contrastes, résultant immédiatement de la personne du sacrificateur, qui doivent aussi être signalés. D’après l’ordre d’Aaron, les sacrificateurs étaient des hommes qui mouraient ; mais d’après l’ordre de Melchisédec, Il est Celui qui vit — qui vit, parce qu’Il est le Fils ; parce qu’Il a la vie en Lui-même. Il est vrai qu’Il l’a laissée et qu’Il l’a reprise, afin qu’Il pût entrer dans Sa sacrificature, après avoir fait par Lui-même la purification de nos péchés.
De plus, l’ordre d’Aaron était continué par succession. Il en devait être nécessairement ainsi. Aaron était un homme dans la chair, et il fut pourvu à ce que, lors de sa mort, son fils fonctionnât en sa place, selon qu’il est écrit : « Et le sacrificateur qu’on aura oint, et qu’on aura consacré pour exercer la sacrificature en la place de son père, fera propitiation, s’étant revêtu des vêtements de lin, qui sont les saints vêtements » (Lév. 16, 32). C’était par « la loi du commandement charnel » que la sacrificature de l’ordre aaronique devait se continuer. La succession est le seul moyen que connaît l’homme, pour perpétuer quelque chose — c’est nécessairement là l’ordre humain. Le roi ne peut mourir, dit-on ; — pourquoi ? Parce que son dernier soupir place son successeur sur le trône, afin que les fonctions de la royauté ne soient jamais un seul instant interrompues. La succession est nécessairement d’après la loi d’un commandement charnel. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner que les hommes soient retournés à cet ordre, comme étant ce qui est le plus naturel et le plus humain. Mais Dieu a pourvu à autre chose pour Son Église. — Son Église ne connaît point de sacrificature par ordre de succession. Le Fils est fait sacrificateur, non selon la loi d’un commandement charnel, mais selon la puissance d’une vie impérissable. C’est encore ce qu’Il est en Lui-même qui donne le caractère particulier à Sa sacrificature. Et ce qui caractérise cette sacrificature caractérise également l’ordre entier de la sacrificature dans l’Église — elle n’est pas successive. La position de l’Église dans cette économie est en vie et en puissance. Il n’y a pas lieu à un commandement charnel en matière de sacrificature ou de culte, parce que la sacrificature de Christ dans le ciel se perpétue en Lui-même. Personne n’est Son successeur là. — Il est « souverain sacrificateur pour toujours » — et personne ne doit remplacer le Saint Esprit dans l’Église sur la terre : « Il demeurera avec vous éternellement ». Si l’homme devait remplacer l’homme comme chef dans l’Église, un commandement charnel serait nécessaire ; — l’ordre ne pourrait être maintenu sans cela. Et c’est ce que l’homme a introduit dans l’Église ; mettant ainsi l’Église sous un chef humain et sous une autorité charnellement établie. Combien cela est affreux, quand l’ordre de Dieu pour Son Église est la présence du Saint Esprit, distribuant des dons selon Son bon plaisir ! Sous cet ordre divin, où y a-t-il place pour un commandement charnel ?
Je ne m’étonne plus de la force du langage du chapitre précédent, relativement au péché qu’il y a à se détourner de l’ordre propre et de l’espérance de l’Église, et aux terribles conséquences qui en résultent nécessairement. C’est là une subversion de l’ordre tout entier de l’économie. C’est virtuellement dépouiller Jésus de Sa sacrificature, Le crucifier de nouveau et L’exposer à l’opprobre. Admettre une succession sur ce point, c’est, comme conséquence nécessaire, nier l’union des croyants avec Jésus dans la puissance d’une vie impérissable ; car une telle union est entièrement incompatible avec la loi d’un commandement charnel.
Et remarquez bien le contraste : ce n’est pas d’après la loi d’une vie impérissable, mais d’après la puissance d’une vie impérissable. Le royaume de Dieu est en puissance, l’Esprit que nous avons reçu est l’Esprit de puissance — l’apostasie des derniers jours, à l’égard de laquelle nous sommes avertis, consistera en ceci surtout : « ayant une forme de piété, en ayant renié la puissance ». Aujourd’hui, il ne s’agit pas d’opposer une forme à une forme, un ordre charnel à un ordre charnel — un lieu quelconque à un autre lieu ; mais il faut opposer la puissance, c’est-à-dire la vie, à tout autre chose. « Nous sommes la circoncision, nous qui rendons par l’Esprit notre culte à Dieu, et qui nous glorifions en Jésus Christ, et qui ne nous confions point en la chair ». Tel est l’Israël de Dieu, ceux qui ont le dessus avec Dieu et avec les hommes, et qui sont les plus forts.
Mais pour poursuivre le contraste, observons que les sacrificateurs selon l’ordre d’Aaron étaient, il est vrai, appelés de Dieu ; mais que Jésus a été établi sacrificateur avec serment, par Celui qui Lui a dit : « Le Seigneur l’a juré et il ne se repentira point : Tu es sacrificateur selon l’ordre de Melchisédec ». La sacrificature en Israël sous la loi, comme tout le système auquel elle était liée, reposait sur le principe de la compétence des sacrificateurs pour maintenir leur position de fidélité envers Dieu. Elle était basée sur un commandement charnel, elle était conditionnelle. — Voici la parole adressée par l’Éternel à Éli : « J’avais dit certainement que ta maison et la maison de ton père marcheraient devant moi éternellement ; mais maintenant l’Éternel dit : Il ne sera pas dit que je fasse cela ; car j’honorerai ceux qui m’honorent, mais ceux qui me méprisent seront traités avec le dernier mépris » (1 Sam. 2, 30). Et le serment fait au sujet d’Éli fut le serment d’un jugement irrévocable sur sa maison (1 Sam. 3, 14). Et la maison d’Éli rejetée devait être remplacée par un sacrificateur assuré ou fidèle, que l’Éternel même établirait (1 Sam. 2, 35 ; Héb. 2, 17), qui ferait tout ce qui est dans le cœur et dans la pensée de Dieu ; c’est là le sacrificateur qui est établi avec serment.
Et comme la nouvelle alliance est en harmonie avec ce nouvel ordre de sacrificature ! — C’est une alliance de promesse — de promesse assurée, Dieu ayant engagé Sa propre puissance à la rendre effective. — Aussi, pour montrer l’immutabilité de Son conseil, Il l’a confirmée en faisant intervenir le serment (Héb. 6, 17). La nouvelle alliance se rattache donc à la sacrificature de Melchisédec — et toutes les deux sont établies avec serment. Ainsi qu’il est écrit : « Et par cela même que ce n’a point été sans serment qu’il a été fait sacrificateur… ainsi l’alliance dont Jésus a été fait le garant est plus excellente ».
De plus, comme nous en avons déjà dit quelque chose, sous l’ordre d’Aaron, il y avait « des sacrificateurs en grand nombre, parce que la mort les empêchait d’être permanents ».
La souveraine sacrificature passait de l’un à l’autre, il y avait succession. Dieu, par un jugement, avait mis de côté, il est vrai, une branche de la famille d’Aaron, et l’avait remplacée par une autre ; mais c’était toujours une série d’hommes par lesquels la souveraine sacrificature était continuée. « Mais Jésus, parce qu’il est permanent à toujours, possède un sacerdoce qui ne passe point de l’un à l’autre. C’est pourquoi aussi il peut sauver entièrement (depuis le commencement jusqu’à la fin de leur vie) ceux qui s’approchent de Dieu par Lui, étant toujours vivant pour intercéder pour eux ». Cela nécessairement, et de la manière la plus simple, perpétue la perfection de la souveraine sacrificature selon l’ordre de Melchisédec : un personnage divinement parfait y est consacré pour toujours.
Comme il est remarquable que, dans tout ce qui était sous la loi d’un commandement charnel, la perpétuité manquait ; — il en était ainsi, et quant aux personnes, et quant aux sacrifices, et quant à l’intercession. Mais maintenant qu’il y a perpétuité quant à la personne, il en résulte qu’il y a perpétuité aussi quant à la sacrificature, aux sacrifices et à l’intercession.
Assurément la sacrificature étant changée, il doit aussi nécessairement y avoir un changement dans toute la loi et dans tout l’ordre du culte. Retourner maintenant à l’ancienne forme, qu’est-ce sinon renier virtuellement la gloire personnelle du Fils, comme donnant efficace à Son œuvre et à Son office ? C’est, comme nous l’avons déjà dit, fouler aux pieds le Fils de Dieu ! Cela doit nécessairement détourner la pensée de Son ordre de sacrificature et la porter sur un autre ordre. C’est introduire des imitations humaines de figures et d’ombres autrefois données de Dieu, en donnant à ces choses une valeur qui n’est due qu’aux choses célestes elles-mêmes. — C’est abaisser du ciel à la terre le lieu du culte. C’est consacrer ce que Dieu a laissé de côté comme profane. C’est établir la forme, au lieu de laisser agir la puissance ; recherchant ainsi l’uniformité à laquelle la chair peut se plier, mais en reniant complètement l’unité dans l’Esprit, qui demeurera toujours étrangère à la chair.
Considérons donc très sérieusement ce qu’est le culte chrétien en réalité. Soit que nous regardions à notre propre position, soit que nous prenions garde au changement qui a eu lieu dans la sacrificature, nous arrivons toujours à cette conclusion : un changement entier dans l’ordre du culte est devenu absolument nécessaire. Nous avons la sacrificature d’Aaron adaptée à la loi, et celle de Christ à la nouvelle alliance. La sacrificature d’Aaron était intercessionnelle, et celle de Christ l’est aussi. L’Église est soutenue uniquement par l’intercession continuelle de Christ, laquelle est telle que nos besoins l’exigent, laquelle répond à ces besoins d’une manière aussi admirable que miséricordieuse. Mais cette vérité bénie étant pleinement admise, n’est-ce pas aussi dans un sens tout différent qu’il est dit : « Un tel souverain sacrificateur nous convenait » ? L’intercession du grand souverain Sacrificateur pour nous ne durera qu’aussi longtemps que l’Église en aura besoin ; — en tant qu’elle concerne l’Église, elle doit avoir un terme ; et l’on peut bien dire que c’est un service d’Aaron continué selon l’ordre de Melchisédec. Mais si nous considérons la sacrificature de Jésus d’une manière plus générale, comme embrassant Sa personne et l’ordre entier de Melchisédec, ne trouvons-nous pas que Sa sacrificature nous est convenable, non seulement à cause de nos infirmités et de nos besoins, mais aussi à cause de cette position élevée dans laquelle Sa grâce nous a placés, afin que nous retenions ferme notre profession ?
Assurément, quand l’Église n’aura plus besoin d’une sacrificature d’intercession, comme ce sera le cas dans la gloire, elle jouira de tous les privilèges spéciaux, particuliers à l’ordre de Melchisédec, savoir d’une réciprocation incessante de bénédictions et de louanges. Mais notre position est, en réalité, aussi élevée dès à présent qu’elle le sera alors ! « Maintenant nous sommes enfants de Dieu » — et les saints doivent dès maintenant connaître le souverain Sacrificateur, convenable à leur haute dignité. Nous sommes « des frères saints, participants de l’appel céleste ». — Or ce n’est plus la sacrificature d’Aaron qu’il faut à de tels hommes : « car il nous convenait d’avoir un tel souverain sacrificateur ». Qu’est-ce qui nous a constitués des frères saints, participants de la vocation céleste ? Certainement ces deux choses — que le Fils a par Lui-même expié nos péchés, et que « Celui qui sanctifie, et ceux qui sont sanctifiés, sont tous d’un ; c’est pourquoi Il n’a pas honte de les appeler frères ». S’il n’y avait pas en eux la même vie qu’en Lui-même, Il ne pourrait pas les appeler frères. « Parce que je vis », dit-Il, « vous aussi vous vivrez ». Est-Il oint du Saint Esprit, eux aussi, en tant qu’ayant été purifiés par Son sang et unis à Lui comme ressuscité, sont oints du même Esprit. Lui, il est vrai, au-dessus de Ses semblables, mais eux, du même Esprit béni — car celui qui est uni au Seigneur est un seul Esprit. Or le souverain sacrificateur, convenable pour une position telle que celle-là, doit non seulement être pieux, sans méchanceté, sans souillure, séparé des pécheurs, mais aussi « élevé plus haut que les cieux ».
L’ordre ancien exclurait nécessairement les saints frères du saint lieu, faisant de ceux qui sont participants de la vocation céleste de simples adorateurs terrestres. Et n’est-ce pas là, en effet, ce qui se voit aujourd’hui ? Le culte devrait élever l’âme de l’adorateur à tel point, qu’elle ne connût rien entre elle et Dieu, sauf le grand souverain Sacrificateur ; mais au lieu de cela, le rituel auquel beaucoup de saints sont assujettis leur fait courber la tête comme un jonc.
Combien Jésus, notre grand souverain Sacrificateur, est différent d’Aaron ! Tout Son ministère sacerdotal actuel est basé sur le sacrifice, une fois accompli, de Lui-même. Cela influe sur l’ordre du culte, et le change entièrement ; car notre culte, tout aussi bien que la sacrificature de Christ, est précisément basé sur le sacrifice déjà accompli. C’est notre point de départ comme adorateurs. Nous ne sommes encore que dans le lieu profane, si nous ne nous approchons pas de Dieu, fondés sur l’expiation de nos péchés faite pour toujours par Jésus : nous ne pouvons nous prévaloir de Sa sacrificature, tant que cela n’est pas reconnu. La grande sacrificature ne concerne que ceux qui se sont approchés de Dieu par Lui. Dans quelle haute position ce sacrifice unique nous a donc placés ! Aucune place sous le ciel n’est convenable pour le ministère de Christ ou pour notre culte. L’un et l’autre sont proprement célestes. C’est pourquoi le culte devrait toujours nous élever là où est Jésus — le grand souverain sacrificateur qui a traversé les cieux. Aaron fut appelé de Dieu à exercer sa sacrificature dans le tabernacle fait de main ; mais Jésus a été appelé de Dieu à Sa sacrificature dans les cieux, le vrai tabernacle, et nous sommes faits participants de la vocation céleste. La dignité de Sa personne, l’essence de Son ministère sacerdotal, et le lieu où Il l’exerce, se réunissent pour proclamer la nécessité d’un changement dans la loi et dans l’ordre du culte. La loi est parfaitement en harmonie avec son rituel et son culte, mais elle n’a rien amené à la perfection ; — elle portait sur son front des marques évidentes d’infirmité. Il y a une grande force de contraste dans le dernier verset ; ce ne sont pas simplement des hommes en contraste avec le Fils, mais des hommes sujets à l’infirmité. Ainsi la parole du serment est aussi dans une admirable harmonie avec Sa sacrificature et son ordre ; mais entremêler les deux choses comme l’église l’a fait et le fait encore, c’est introduire la plus affreuse confusion. Par là Jésus est privé de l’honneur qui Lui appartient, et les saints de leur privilège.
Rappelons que, sous la sacrificature lévitique, il n’y avait rien qui pût autoriser personne, ni sacrificateur ni homme du peuple, à suivre Aaron au-dedans du voile. Aaron, sous ce rapport, n’avait point de compagnons. Maintenant le Fils aussi prend cette place d’Aaron. — Lui seul porte le sang dans le sanctuaire. Il n’a point de compagnons en aucune partie de l’œuvre de Son sacrifice, ni pour offrir le parfum. Mais Il a des compagnons dans le lieu de Son ministère. Sous la sacrificature lévitique, il n’y avait aucune communion, même quant à la place, entre le peuple et les sacrificateurs ; — ils adoraient dans des lieux différents ; mais maintenant tout est changé, car l’ordre actuellement introduit est celui dont il est dit : « Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés, sont tous d’un ». Nous sommes un en vie, et par conséquent identifiés, quant à notre position, avec Jésus Christ. Il peut dire dans le ciel même : « Me voici, moi et les enfants que Dieu m’a donnés ». Il y avait, il est vrai, le grand principe de représentation dans la sacrificature lévitique. — Aaron portait les noms des tribus d’Israël sur ses épaules et sur son cœur ; mais il n’y avait pas une union véritable. Elle ne pouvait pas exister ; et même en supposant qu’elle eût pu avoir lieu, de quel avantage aurait-elle été — cette union avec un homme sujet à l’infirmité ? Mais maintenant que nous avons un souverain sacrificateur tel que le Fils, dans la puissance d’une vie impérissable, et que Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous d’un, il est évident que le privilège d’avoir Jésus non seulement comme notre représentant, mais comme Celui avec lequel nous sommes unis — doit apporter un changement complet quant à l’ordre tout entier du culte.
Pouvons-nous trouver un langage qui dépeigne mieux le danger de retourner aux ordonnances, ou de rétablir sur la terre une sacrificature entre le grand souverain Sacrificateur et Ses compagnons, que celui qui se trouve dans les chapitres 6 et 10 de l’épître aux Hébreux ? Ces passages ne sont-ils pas de nature à faire impression sur ceux qui les entendent de nos jours ? Et pendant notre pèlerinage à travers le désert, peut-il y avoir pour nous une occupation plus bénie, plus propre à élever nos âmes au-dessus de la poussière, et à nous faire marcher en esprit dans les parvis célestes — que de considérer l’apôtre et le souverain sacrificateur de notre profession, Christ Jésus ?
Frères saints, le traité que vous venez de lire se rattache beaucoup plus directement au sujet du culte que vous ne le pensez peut-être ; car nous ne pouvons rendre un culte réel et acceptable, qu’autant que nous ne laissons rien se placer entre nos âmes et notre grand souverain Sacrificateur. C’est ce qu’Il est, et non ce que nous sommes, que nous avons à considérer. Et sommes-nous jamais plus véritablement élevés nous-mêmes, que lorsque nous L’exaltons ? N’est-il pas des plus pratiquement vrai dans ce sens aussi, que celui qui s’abaisse sera élevé ?