Traité:La grâce, puissance d’unité et de rassemblement

De mipe
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J.N. Darby

Bien-aimé frère,

J’ai eu à cœur de présenter quelques remarques sur un sujet qui, je crois, a de l’importance dans le moment actuel ; et en le faisant, j’ai présent à l’esprit un traité sur lequel les circonstances ont attiré l’attention, et je revois ce traité au point de vue pratique. Je me suis d’autant plus pressé de faire ainsi que j’ai lu, il y a quelque temps, dans le Present Testimony, si ma mémoire ne me trompe, un article qui plaçait le sujet sur un terrain que je n’ai pas trouvé tout à fait juste, en ce qu’il ne considérait, à ce qu’il m’a paru, qu’un seul côté de ce sujet. Je ne commenterai pas cet article, comprenant que vous puissiez édifier vos lecteurs bien mieux par d’autres moyens.

Ce que je crois qu’il est important de comprendre, c’est que la puissance active qui rassemble est toujours la grâce — l’amour. La séparation d’avec le mal peut devenir nécessaire. Il est des états particuliers de l’Église, alors que le mal est entré, où cette séparation peut caractériser, dans une grande mesure, le sentier des fidèles. Il peut arriver que, les mêmes convictions agissant en un même moment chez plusieurs, la séparation d’avec le mal forme un noyau de personnes rassemblées. Mais cette séparation n’est jamais, en soi, une puissance de rassemblement. La sainteté peut attirer une âme, quand cette âme est déjà en mouvement par elle-même. Mais la puissance pour rassembler est dans la grâce, dans l’amour vivant et agissant, dans « la foi opérante par l’amour ». L’histoire de l’Église de Dieu dans tous les temps est la démonstration de la vérité de ce principe. Rassembler est la puissance formative de l’unité là où celle-ci n’existe pas. Je tiens ici pour admis que Christ est reconnu comme centre. Si le mal existe, la puissance qui rassemble peut rassembler en retirant du mal ; mais la puissance qui rassemble, je le répète, c’est l’amour.

Le traité, auquel j’ai fait allusion plus haut, et sur lequel je désire revenir ici, n’est pas resté ignoré ; il était intitulé : « La séparation d’avec le mal est le principe divin de l’unité ». J’espère que j’aurais assez de grâce pour reconnaître l’erreur là où je croirais qu’il y en a, et je sais que je le doit au Seigneur ; mais le sujet qui m’occupe ici est un peu plus étendu. Le traité en question a trait à l’état de l’Église de Dieu en général, et non à une partie quelconque des membres de cette église ; mais comme une certaine partie de la vérité corrige un mal, de même une autre portion de cette vérité peut, par son opération sur l’âme, étendre la sphère et rendre plus forte l’énergie du bien.

Il y a, dans la nature de Dieu, deux grands principes reconnus de tous les saints, la sainteté et l’amour. L’une, je puis le dire hardiment, est la nécessité de Sa nature, impérative, en vertu de cette nature, pour tous ceux qui approchent Dieu ; l’autre en est l’énergie. L’une caractérise la nature de Dieu ; l’autre est Sa nature même et le mobile de l’activité de Sa nature. Dieu est saint ; — Il n’est pas aimant, mais Il est amour. Il l’est dans le principe essentiel et l’activité de Son être ; nous en faisons un juge par le péché, car Dieu est saint, et Il a de l’autorité ; mais Dieu est amour, et personne ne L’a rendu tel. S’il y a de l’amour quelque autre part qu’en Dieu, cet amour est de Dieu, car Dieu est amour : L’amour est la précieuse et active énergie de Son être. Dans l’exercice de cette énergie, Il rassemble auprès de Lui, pour la félicité éternelle de ceux qui sont rassemblés, le déploiement et la manifestation de cet amour en Christ, et Christ Lui-même étant la grande puissance et le centre du rassemblement. Les conseils de Dieu, sous ce rapport, sont « la gloire de sa grâce » ; l’application qu’Il en fait à des pécheurs et les moyens qu’Il emploie à cet effet, sont « les richesses de sa grâce » ; et dans les siècles à venir, Il montrera quelles sont « les immenses richesses de sa grâce dans sa bonté envers nous dans le Jésus Christ ».

Permettez-moi, avant que j’entre dans l’examen du sujet que j’ai maintenant directement en vue, de dire un mot en passant sur le beau passage de l’épître aux Éphésiens que je viens de rappeler, parce que ce passage révèle le fond des pensées de Dieu quand Il introduit dans l’unité dont parle cette épître. Nous sommes bénis en Christ ; et Dieu Lui-même est le centre de la bénédiction, et cela sous deux caractères, savoir dans Sa nature, et dans Sa relation avec ceux qui sont bénis. Il est à la fois « Dieu » et « Père » en relation avec Christ Lui-même, considéré comme homme devant Lui, bien qu’Il soit le Fils bien-aimé (voyez Éph. 1, 3-7). Dieu est le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, selon cette propre parole de Jésus pour Ses disciples, quand Il allait monter au ciel : « Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu », avec la différence seulement que, ici, dans l’épître aux Éphésiens, l’unité des saints en Christ est introduite, tandis que, dans Jean, Christ parle des disciples comme étant Ses « frères ». — C’est donc dans ce double caractère que Dieu revêt à l’égard de Christ Lui-même, qu’Il nous a bénis de toute bénédiction spirituelle, sans en excepter aucune, dans les lieux célestes, cette sphère de bénédiction la plus excellente et la plus élevée, là où Lui habite ; ce n’est pas seulement une bénédiction envoyée sur nous ici-bas sur la terre, mais nous-mêmes nous sommes élevés dans les lieux célestes, et nous le sommes de la manière la plus excellente et la plus glorieuse, dans le Christ Jésus, moins Son droit divin à être assis sur le trône du Père. Part merveilleuse, grâce excellente, qui devient simple pour nous à proportion que nous sommes habitués à demeurer dans la parfaite bonté de Dieu, auquel il est naturel d’être tout ce qu’Il est, et qui ne pourrait être autre chose !

Au verset 4 de l’épître aux Éphésiens, chapitre 1, nous avons : « le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ », selon la gloire de la nature divine, introduisant dans Sa propre présence en Christ ce qui sera le réfléchissement de cette gloire, selon Son dessein éternel ; car l’Église dans les pensées de Dieu (et, on peut ajouter, dans sa vie dans la Parole), est avant le monde dans lequel elle est manifestée. Ici, c’est de la nature de Dieu qu’il s’agit. Nous avons été « élus en Christ, avant la fondation du monde, afin que nous fussions saints et irréprochables devant lui en amour ». Dieu est saint, Dieu est amour, et dans Ses voies, quand Il agit, Il est irréprochable.

Puis, il y a une relation en Christ ; et la relation de Christ est celle de « Fils ». Ainsi, en Lui, nous sommes prédestinés à l’adoption comme fils pour Dieu Lui-même, selon Son bon plaisir, selon la joie et la bonté de Sa volonté. Il s’agit de relation ici. Dieu est le Père de notre Seigneur Jésus Christ, aussi bien qu’Il est Dieu. C’est ici la gloire de Sa grâce, ce sont Ses propres pensées et Ses propres desseins, à la louange desquels nous sommes. Il nous a manifesté Sa grâce dans « le Bien-aimé ». Mais, en fait, Il nous trouve dans la condition de pécheurs, et ce sont des pécheurs qu’Il amène à cette position. Quelle pensée ! Et ici Sa grâce brille d’une autre manière : en Lui, Christ, le Fils, « nous avons la rédemption par son sang, la rémission des fautes », ce dont nous avons besoin pour entrer dans cette position, dans laquelle nous serons à la louange de la gloire de Sa grâce, et cela, selon les richesses de Sa grâce ; car Dieu est manifesté dans la gloire de Sa grâce, et nos besoins trouvent leur satisfaction dans les richesses de Sa grâce.

Ainsi nous sommes devant Dieu. Ce qui suit dans le chapitre concerne « l’héritage » qui nous appartient par cette même grâce, savoir ce qui est au-dessus de nous. Je n’entre pas dans ce sujet, faisant remarquer seulement, comme je l’ai fait ailleurs, que le Saint Esprit est les arrhes de l’héritage, mais non pas de l’amour de Dieu : L’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné.

Ces deux relations avec Dieu et le Père de notre Seigneur Jésus Christ renferment et manifestent une abondante richesse de bénédiction ; on les retrouve fréquemment dans l’Écriture.

Mais quelque intéressant que soit ce sujet, je reviens maintenant à celui qui m’occupe directement. J’ai relu le traité dont j’ai parlé, et je puis dire qu’il me semble que celui qui nierait les principes abstraits qui y sont développés, ne serait pas sur le terrain chrétien du tout. Je ne peux rien concevoir de plus incontestablement vrai que ces principes, pour autant qu’on peut parler ainsi d’une exposition humaine de la vérité.

Toutefois, il y a quelque chose de plus à considérer que la vérité, savoir l’usage de la vérité. Le fait que Dieu, par la grâce et la rédemption, n’impute pas de péché à l’Église, demeure toujours heureusement et éternellement vrai. À une conscience insouciante, je puis avoir à présenter quelque autre vérité. Mais je le répète, en relisant le traité qui m’occupe ici, je ne vois pas comment quiconque s’oppose aux principes qui y sont exposés peut être sur le terrain chrétien, en aucune manière. La sainteté n’est-elle pas le principe sur lequel la communion chrétienne est basée ? Le traité en question ne dit pas autre chose que cela. Mais il y a deux autres points que je crois important de présenter en même temps, l’un se rapportant à l’homme, l’autre au Dieu béni.

Le premier des deux points, dont je parle, consiste en ceci : la nature humaine, nous le reconnaissons tous, et nous le savons dans une certaine mesure, est une chose perfide. Or, la séparation d’avec le mal, si elle est juste, ce que je suppose maintenant, distingue celui qui se sépare de celui duquel il se sépare. Cela tend à donner de l’importance à la position de celui qui fait ainsi ; et cette position a de l’importance en effet ; mais avec des cœurs tels que les nôtres, la position que nous prenons se mêle avec le moi, non d’une manière grossière, mais d’une manière insidieuse. Il s’agit de ma position ; et de plus, mon esprit étant occupé d’une chose qui a été importante pour lui (et cela justement, en son lieu et place), tend à faire, en quelque mesure, de la séparation d’avec le mal, une puissance de rassemblement, aussi bien qu’un principe sur lequel le rassemblement a lieu. La séparation d’avec le mal n’est pas cela, sauf pour autant que la sainteté attire les âmes qui sont spirituelles, par un principe agissant en elles.

Il y a un autre danger : un chrétien se sépare du mal, je suppose encore, dans un cas où c’est de son devoir de le faire ; disons qu’il quitte, par exemple, le système le plus corrompu qui existe ; d’après le principe en question, c’est le mal agissant sur la conscience du nouvel homme et reconnu offensant pour Dieu, qui pousse le chrétien à sortir de ce système. Ainsi, le chrétien est occupé du mal. C’est là une position dangereuse. Celui qui s’y trouve rattache le mal, peut-être anxieusement, à ceux qu’il a quittés, pour donner une bonne raison de la position qu’il a prise. Ils cachent, ils cherchent à couvrir, ils commentent, ils expliquent, comme il arrive toujours là où le mal est maintenu. Lui cherche à prouver l’existence du mal, pour justifier sa position ; il est occupé du mal en prouvant l’existence du mal et en la prouvant contre les autres. C’est un terrain glissant pour le cœur, sans parler du danger qui menace l’amour. L’esprit est occupé du mal comme d’un objet que l’on a devant soi. Ce n’est pas là la sainteté, ni la séparation d’avec le mal, en puissance pratique intérieure : c’est un travail qui fatigue l’esprit et qui ne peut pas nourrir l’âme. Il y a des personnes qui courent presque le danger d’acquiescer au mal, par la fatigue qu’elles éprouvent à y penser. Dans tous les cas, la puissance ne se trouve pas ici. Dieu nous sépare certainement du mal, mais Dieu ne remplit pas l’âme de celui qui continue à s’en occuper, car Dieu n’est pas dans le mal. Il est très vrai qu’une âme peut se dire : Je veux penser au Seigneur et ne plus m’occuper du mal, et qu’ainsi elle obtienne une certaine mesure de tranquillité et de bien-être ; mais en pareil cas, la mesure et le ton général de la vie spirituelle baisseront infailliblement, je n’en ai pas l’ombre d’un doute. On n’acquiescera pas de fait au mal positif, mais on perd de vue l’horreur que Dieu a du mal, et dans la même proportion on perd la mesure de puissance et de communion divines ; la voie générale ne le montre que trop ; le témoignage manque et est abaissé. C’est là le mal le plus grand, quand la lutte avec le mal n’est pas maintenue dans la puissance spirituelle, et un mal qui crée les difficultés les plus sérieuses à une union étendue ; mais Dieu est au-dessus de tout. La nouvelle nature, quand elle est agissante, parce qu’elle est sainte et divine, s’élève contre le mal lorsqu’il paraît devant elle. La conscience aussi est réveillée et exercée comme responsable à Dieu. Mais ce n’est pas tout, même pour ce qui regarde la sainteté. Il y a une autre chose qui, dans beaucoup de cas (je pourrais dire, au fond, dans tous les cas) distingue la vraie sainteté de la conscience naturelle, ou du rejet conventionnel du mal. La sainteté n’est pas seulement la séparation d’avec le mal, mais la séparation pour Dieu d’avec le mal. La nouvelle nature n’a pas seulement une nature ou un caractère intrinsèque comme étant de Dieu ; elle a un objet, car elle ne peut pas vivre d’elle-même ; — elle a un objet positif, et cet objet est Dieu. Or, ce fait change tout, parce qu’il sépare d’avec le mal, que la nouvelle nature abhorre : en conséquence, lorsqu’elle le voit, parce qu’elle est remplie de ce qui est bon, au lieu d’affaiblir sa séparation, il rend plus vivante l’horreur que la nouvelle nature a du mal quand elle a à s’en occuper ; mais il donne un autre ton à ce qu’elle hait, il rend la possession de ce qui est bon suffisante, quand la nouvelle nature n’est pas obligée de penser au mal, pour bannir celui-ci complètement de l’esprit et de la vue. Ainsi elle est sainte, calme et a un caractère à elle, séparé du mal, aussi bien qu’opposé au mal. Pour nous, cela ne peut avoir lieu que dans la possession d’un objet (parce que nous sommes et devons être dépendants) — seulement pour autant que nous sommes positivement remplis de Dieu en Christ. Nous sommes occupés de ce qui est bon, et ainsi nous sommes saints, car c’est la sainteté ; et par conséquent nous avons, sans peine et intelligemment, le mal en horreur, sans nous en occuper. C’est la vraie nature de Dieu : Dieu est essentiellement bon ; Il trouve dans ce qui est bon Ses délices en Lui-même : et ainsi, en vertu de Sa bonté, Il a le mal en haine ; Sa nature est le bien ; et par conséquent dans Sa nature même Il rejette le mal. Il fera ainsi avec autorité, sans doute, en jugement, mais nous parlons maintenant de Sa nature.

C’est pourquoi, quand l’amour est puissant et agissant, il précède, et il rend saint ; soit qu’il s’agisse de l’amour mutuel ou bien de la jouissance de l’amour dans la révélation de Dieu : « Que le Seigneur vous fasse abonder et surabonder en amour les uns envers les autres et envers tous, comme nous aussi envers vous, pour affermir vos cœurs sans reproche en sainteté devant notre Dieu et Père en la venue de notre Seigneur Jésus avec tous ses saints » (1 Thess. 3, 12-13). De même 1 Jean 1, 1-6 : « Ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, et que nos mains ont touché, concernant la parole de la vie (et la vie a été manifestée ; et nous avons vu et nous déclarons, et nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée) ; ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que vous aussi vous ayez communion avec nous : or notre communion est avec le Père et avec son Fils Jésus Christ. Et nous vous écrivons ces choses, afin que votre joie soit accomplie. Et c’est ici le message que nous avons entendu de lui et que nous vous annonçons, savoir que Dieu est lumière et qu’il n’y a en lui aucunes ténèbres. Si nous disons que nous avons communion avec lui, et que nous marchions dans les ténèbres, nous mentons et nous ne pratiquons pas la vérité ».

Or ici le Saint Esprit, en traits clairs et énergiques tels que Lui seul peut les tracer, insiste sur la séparation d’avec le mal dans une marche dans la lumière, selon le caractère de Dieu révélé en Christ, dans la vérité telle qu’elle est en Jésus, en qui la vie était la lumière des hommes. Celui qui prétend avoir communion avec Dieu et qui ne marche pas dans la connaissance de Dieu selon cette connaissance, est un menteur et la vérité n’est pas en lui. Mais qu’est-ce qui établit la communion ? Marcher dans la lumière la maintient pure ; — mais qu’est-ce qui la forme ? C’est la révélation de son glorieux objet et de son centre, en Christ. Jean parlait de quelqu’un qui avait gagné son cœur, de quelqu’un qui était la puissance qui rassemble dans la communion avec le Père et avec Son Fils Jésus Christ. Il avait connaissance par le Saint Esprit, et jouissait de ce que le Seigneur avait dit : « Celui qui m’a vu, a vu le Père ». C’était là l’amour, infini, divin ; et, par le Saint Esprit, celui qui en était témoin avait communion avec l’amour et le proclamait, afin que d’autres aient communion avec lui, et sa communion était véritablement avec le Père et avec Son Fils Jésus Christ. Ceux auxquels il s’adressait s’y associaient. Or, c’était là, je pense, la puissance qui rassemble. L’objet auquel on était amené et autour duquel on était rassemblé impliquait nécessairement ce qui suit, et Jean, en effet, termine ainsi son épître : « Nous savons que le Fils de Dieu est venu ; et il nous a donné une intelligence afin que nous connaissions le Véritable, et nous sommes dans le Véritable, savoir dans son Fils Jésus Christ : lui est le Dieu véritable et la vie éternelle. Enfants, gardez-vous des idoles », plaçant la puissance du bien qui rassemble avant l’avertissement. Ce fait que je signale est d’autant plus remarquable dans cette épître, que celle-ci s’occupe en un certain sens du mal, étant écrite touchant « ceux qui égaraient » (2, 26).

La sainteté donc, si elle est réelle, est la séparation pour Dieu aussi bien que d’avec le mal ; car ainsi seulement nous sommes dans la lumière, car Dieu est lumière. Cela est vrai au début de la sanctification : nous sommes amenés à connaître Dieu, nous sommes amenés à Dieu. Si nous revenons à nous-mêmes, c’est pour dire : « Je me lèverai et je m’en irai vers mon père ». S’il s’agit de relèvement, il a lieu sur ce principe : « Si tu reviens… reviens à moi » (Jér. 4, 1). Une âme, en effet, n’est jamais réellement relevée jusqu’à ce qu’elle soit revenue à Dieu ; car jusque-là elle n’est pas dans la lumière de manière à se purifier de la chair, alors même que les œuvres de la chair auraient été confessées ; et le péché n’est pas vu non plus tel que Dieu le voit. C’est pourquoi l’amour, comme élément essentiel, entre dans toute vraie conversion et tout vrai relèvement d’âme, quelque faiblement qu’on le discerne, ou à travers n’importe quels sombres exercices de conscience. Nous avons besoin de revenir à Dieu : « Il y a pardon auprès de toi (Dieu), afin que tu sois craint » ; autrement, le désespoir vous chasse encore plus loin. En effet, que serait ou que pourrait être un relèvement s’il ne ramenait pas à Dieu ? Mais dans le sens plein et entier du mot, le rassemblement, c’est-à-dire le rassemblement pour une commune communion, est produit par l’objet qui révèle ce en quoi nous devons avoir communion. Il faut que nous ayons communion en quelque chose, savoir avec le Père et avec Son Fils Jésus Christ.

L’objet de la communion doit attirer les cœurs à lui, afin que, dans leur joie commune en lui, leur communion existe. Le principe du traité qui m’occupe est celui-ci, savoir que, en attirant les cœurs, l’objet qui les rassemble doit les séparer du mal : il répond à la seconde partie de la déclaration de l’apôtre (1 Jean 1, 5) : « c’est ici le message que nous avons entendu de lui… savoir que Dieu est lumière… ». Ainsi Christ dit : « Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi ». Or, la croix était l’amour parfait, la séparation absolue d’avec tout péché et la condamnation du péché : « car en ce qu’il est mort, il est mort une fois pour toutes au péché » (Rom. 6, 10) — la séparation d’avec le monde et la délivrance de toute la puissance de l’ennemi et de la scène où elle s’exerce. La croix, c’est l’amour parfait, détournant de tout autre objet pour attirer à lui-même ; montrant aux âmes que tout était mal en elles et ici-bas, les absorbant par ce qui est bon, d’une manière qui les délivre de ce mal. Mais quand nous le suivons dans la vie, tout ce dont il séparait a disparu : « En ce qu’il vit, il vit à Dieu » ; — c’est tout son être, si je puis m’exprimer ainsi. Or, il est, dans cette vie, élevé plus haut que les cieux. — Je ne parle pas ici de la gloire divine, mais de la vie. Il prend une position céleste et notre rassemblement par la croix nous amène à Lui, là où Il est maintenant, dans le lieu où le mal n’a pas d’entrée. Là est notre communion, quand nous entrons dans la maison du Père en esprit ; et c’est là, je pense, le vrai caractère de l’Assemblée, de l’Église, pour rendre culte dans le sens complet du mot.

L’Assemblée se rappelle la croix, elle adore, laissant le monde dehors, tout étant connu dans le ciel devant Dieu. Il s’est livré, afin de « réunir en un ». Mais ici, j’anticipe un peu, car je ne parle jusqu’ici que de l’objet, non de la puissance active qui rassemble.

Je pense que ce qui sépare un saint du mal, ce qui le rend saint, c’est la révélation d’un objet (j’entends, cela va sans dire, par le Saint Esprit opérant) qui attire son âme vers cet objet comme étant bon, et par cela lui révèle le mal et le lui fait juger dans son esprit et dans son âme ; la connaissance qu’il a du bien et du mal n’est donc pas simplement une conscience mal à l’aise, mais la sanctification. Je veux dire par là que la sanctification repose, par l’illumination du Saint Esprit, sur un objet qui, par sa nature, purifie les affections en étant leur objet, les créant par la puissance de la grâce. Même sous la loi, la sanctification avait cette forme : « Soyez saints, car je suis saint » ; bien que, je l’admets, elle ait participé alors nécessairement du caractère de la dispensation. À la croix, ces deux principes sont mis en lumière parfaitement. L’amour, l’objet béni qui attire le cœur, est clairement manifesté ; en même temps que le jugement le plus solennel du mal et la séparation la plus absolue d’avec lui. Telle est la perfection de Dieu — la folie et la faiblesse de Dieu ! La sanctification donc, je le répète, repose sur cette divine attraction dans l’amour, le mal dans toute son horreur et sous toutes ses formes étant parfaitement haï par celui que cet amour attire et qui s’y attache ! L’âme va avec le péché, comme péché, à cet amour, et elle y va parce que l’amour ainsi manifesté lui a montré que le péché est péché, en ce que Lui a été fait péché pour nous.

Telle est la puissance objective qui sépare du mal et qui met fin à toute relation avec le mal ; car, alors, on meurt à toute la nature à laquelle on vivait. Le mal cesse d’exister, par la foi, comme on vit désormais dans la bienheureuse activité de l’amour.

Mais je me suis assez étendu peut-être sur ce qui rassemble objectivement et qui produit la communion ; et assurément notre communion est une communion dans ce qui est bon, une communion céleste en tant qu’elle n’admet pas le mal — une communion imparfaitement réalisée, sans doute, ici-bas, mais pour autant qu’elle ne l’est pas, une communion détruite, car la chair n’a pas de communion. C’est pourquoi nous lisons : « Si nous marchons dans la lumière, comme lui-même est dans la lumière, nous avons communion les uns avec les autres ». Mais nous ne pouvons pas marcher en dehors des ténèbres autrement qu’en marchant dans la lumière, c’est-à-dire avec Dieu : et Dieu est amour ; — et s’Il ne l’était pas, nous ne pourrions pas marcher là.

Mais nous avons d’autres privilèges. L’amour de Dieu en Christ n’est pas seulement un objet qui rassemble, mais il est une activité qui rassemble. L’amour est relatif ; il agit et se montre. Ainsi, Dieu a agi. Il n’est pas le dieu du pharisaïsme réduit aux silencieuses profondeurs de la conscience de soi-même, connue intellectuellement ; en même temps dans son erreur, le païen tenait la matière aussi, pour éternelle, recevant seulement sa forme de Dieu ; bien qu’alors elle devienne active en produisant des pensées, et que, Dieu étant réjoui par ces pensées, objectivement, elle devienne active en création pour les produire selon la vérité. Avec ce système, les païens faisaient justement, des ténèbres primitives, la mère de toutes choses. Mais tel n’est pas notre Dieu. Ces hommes, sauf par les jouissances que, par les sens, ils trouvaient dans la création, ne connaissaient pas l’amour en Dieu. Jésus L’a révélé ; et ainsi nous connaissons Dieu comme étant « amour », et aussi « lumière ». Bienheureuse connaissance ! Communiquée dans l’Écriture, elle est la vie éternelle ; et cette vie est occupée d’elle comme nous l’avons vu — occupée du Père et du Fils. Mais nous pouvons dire également que nous connaissons cette autre vérité précieuse et excellente : « Mon Père travaille jusqu’à maintenant, et moi je travaille » (Jean 5, 17). C’est l’activité de l’amour qui constitue la puissance de rassemblement. Il s’est donné Lui-même… « pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés » (Jean 11, 52). Même pour Israël : « Que de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous ne l’avez pas voulu » (Matt. 23, 37). Ici, ce n’est pas seulement un objet attrayant et sanctifiant, produisant la communion ; mais c’est l’activité de l’amour qui agit, qui se donne, pour rassembler ; et dans cette œuvre, nous pouvons avoir notre part. C’est là ce qui, tout en sanctifiant, et en maintenant la sainteté de Dieu, en nous en faisant participants, révèle Dieu et rassemble les âmes fatiguées.

Or c’est ce principe qui est le seul et vrai principe et la seule et vraie puissance de rassemblement : je ne dis pas le principe sur lequel les âmes sont rassemblées ; car il est clair qu’elles le sont sur le principe de la sainteté — de la séparation d’avec le mal, dans laquelle seule la communion est maintenue ; autrement, les ténèbres auraient communion avec la lumière ! Mais l’amour rassemble, et cette vérité est aussi évidente pour le chrétien qu’il est évident que c’est pour la sainteté et sur le principe de la sainteté qu’il rassemble ; car quand est-ce que l’esprit de l’homme se séparerait du mal et abandonnerait le mal dans lequel il vit, et qui est sa nature, hélas ! quant à ses désirs naturels et à la sphère dans laquelle il vit ? Jamais ! Non, ses volontés et ses convoitises sont là, sa pensée est inimitié contre Dieu. C’est ce fait, que la présentation de la grâce en Jésus, a démontré d’une manière si solennelle.

La loi ne fut jamais donnée pour rassembler ; elle était la règle de conduite d’un peuple déjà en rapport avec Dieu — pour convaincre de péché. Le péché ne rassemble pas vers Dieu, ni la loi non plus ; et l’un et l’autre sont tout ce qui constitue la position de l’homme, à moins que la grâce n’intervienne. En outre, c’est la grâce seule qui révèle pleinement Dieu, et ainsi sans la grâce, l’objet, autour duquel nous devons être rassemblés, n’est pas manifesté. La grâce seule atteint le cœur de manière à l’amener à Dieu : tout, en dehors de cela, n’est que responsabilité et chute.

C’est Christ qui rassemble, et par ceci, nous connaissons l’amour, c’est qu’Il a donné Sa vie pour nous. La vérité elle-même n’est, de fait, jamais connue jusqu’à ce que vienne la grâce. La loi a été donnée par Moïse, mais la grâce et la vérité sont venues par Jésus Christ. La loi disait à l’homme ce qu’il devait être. Elle ne lui disait pas ce qu’il était. Elle lui parlait de vie, s’il obéissait, et de malédiction, s’il désobéissait ; mais elle ne lui disait pas que Dieu est amour. La loi parlait de responsabilité ; elle disait : « Fais cela et tu vivras ». Elle était parfaite à sa place, mais ne disait ni ce que l’homme est, ni ce que Dieu est : cela restait caché ; mais cela est la vérité. La vérité n’est pas ce qui devrait être, mais ce qui est, la réalité de toutes les relations existantes telles qu’elles sont, et la révélation de Celui qui, s’il existe des relations, doit être le centre de ces relations. Or, il était impossible que ces choses fussent dites sans la grâce ; car l’homme est un pécheur perdu, et Dieu est amour. D’un autre côté, comment dire que toute relation était détruite[2] (car le jugement n’est pas une relation, mais la conséquence de la rupture d’une relation), comme la vérité d’une relation existante, autrement que par la révélation de cette grâce qui forme une relation sur ce principe même par la puissance divine ? C’est pourquoi nous lisons : « De sa propre volonté, il nous a engendrés[3] par la parole de la vérité, cette semence incorruptible de la parole, afin que nous fussions une sorte de prémices de ses créatures ». C’est pourquoi Christ est la vérité ; car le péché, la grâce, Dieu Lui-même, le Père, le Fils et le Saint Esprit même sont révélés tels qu’ils sont ; ce que l’homme est dans la perfection, en relation avec Dieu ; ce qu’est l’éloignement de Dieu, dans lequel l’homme est tombé ; ce qu’est l’obéissance, ce qu’est la désobéissance, ce qu’est la sainteté, ce qu’est le péché, ce qu’est Dieu, ce qu’est l’homme, ce qu’est le ciel, ce qu’est la terre : tout est remis à sa place relativement à Dieu, et avec la plus entière révélation de Lui-même, en même temps que de Ses conseils, dont Christ est le centre.

Ainsi la grâce est la puissance agissante dans la révélation de la vérité et qui seule est capable de révéler la vérité ; car la présence de Christ ici-bas est la grâce, Son activité, la grâce efficace. Or, l’existence même d’un pareil objet et d’une pareille puissance doit se faire sentir comme puissance qui rassemble, rassemblant dans l’unité, car elle doit, étant divine, rassembler autour d’elle-même.

Mais nous ne sommes pas abandonnés seulement à des conséquences abstraites, quelque familières qu’elles soient pratiquement à toute âme renouvelée, qui sait et doit savoir que tous ceux qui sont nés de nouveau sont attirés ensemble vers Christ. La Parole de Dieu est claire : « Il est mort pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés ». Je parle de ces choses comme caractérisant la puissance qui rassemble. Christ, bien qu’Il fût la vérité elle-même, pendant qu’Il était ici-bas, était la vérité isolée ; aucune nouvelle relation n’était établie sur un fondement divin pour d’autres hommes. La grâce offerte fut la grâce rejetée ; le grain de froment demeurait seul ; mais par Sa mort, la rédemption fut accomplie et l’expiation fut faite. Il n’était plus « à l’étroit » désormais ; la grâce et la vérité renfermées, pour ainsi dire, dans Son propre cœur, pouvaient se répandre librement. L’amour le plus grand était manifesté, et le péché dans l’homme, au lieu d’empêcher l’application de l’amour et de mettre une barrière à toute relation, devint son objet, au moins ce à l’égard de quoi il se déployait ; et ainsi, par conséquent, il rassemble. La justice de Dieu prend la place de ce qui, quoique requis, n’a de fait jamais existé, savoir, la justice de l’homme ; la vie divine prend la place de la vie purement humaine ; et Dieu trouve Sa gloire dans le salut. La grâce règne par la justice. Or, c’est ici ce qui, en unissant les âmes, dans la puissance du Saint Esprit, à Jésus, rassemble, par la croix d’où la vérité est proclamée pendant que nous sommes ici-bas, autour de Christ dans le ciel, qui fait connaître à la foi notre vraie place dans le ciel, sauf toujours, cela va sans dire, Son titre divin personnel. L’épître aux Éphésiens développe ce sujet. Seulement, comme elle commence par la gloire divine, la vraie source de tout, cette épître commence par le dessein de l’amour, relativement à nous, dans le ciel en gloire, et introduit la rédemption elle-même comme chose qui vient après pour nous amener là. Mais il est clair que cela ne change pas l’amour qui est et qui est actif pour nous amener dans cette bienheureuse et céleste unité, qui ainsi est céleste, et, en rapport avec la gloire de Dieu, est sainte selon la sainteté de la présence de Dieu. La voie de Christ sur la terre en est le modèle ici-bas, dans sa pleine mesure, sur la croix. Le ciel et la croix sont ainsi corrélatifs. Quand le sang était porté dans le lieu très saint, le corps était brûlé hors du camp — dehors, déniant toute relation de Dieu avec l’homme tel qu’il était. Alors le rassemblement « en un » commença. Il tua l’inimitié, celle qui existait entre Juif et Gentil, et les réconcilia tous les deux en un seul corps à Dieu ; et ainsi, les uns et les autres, nous avons accès auprès du Père par un seul Esprit. Les ordonnances séparent toujours selon la sainteté humaine ; la grâce unit selon la sainteté divine.

Je crois en avoir dit assez maintenant pour rendre claire ma pensée ; et j’ai plus à cœur ici de l’établir que d’insister sur elle. Dans le sens divin complet, sans la grâce, il n’y a ni vérité, ni sainteté (en dehors de Dieu, j’entends, cela va sans dire), sauf pour autant que la sainteté peut être attribuée aux anges élus, et il ne peut y en avoir, parce qu’il est impossible qu’un pécheur puisse être avec Dieu autrement que sur le principe et par la puissance et l’activité de la grâce. La puissance de l’unité, c’est la grâce ; et comme l’homme est pécheur et éloigné de Dieu, la puissance de rassemblement, c’est la grâce — la grâce manifestée en Jésus sur la croix et nous amenant à Dieu dans le ciel et nous donnant une place en Lui qui est monté au ciel. C’est là de la sainteté : bien certainement la croix n’est pas un acquiescement au péché !

Votre affectionné dans le Seigneur



  1. Publié dans le Messager Évangélique de 1870.
  2. Moralement, je veux dire ; car il est évident que nous sommes toujours des créatures.
  3. La loi n’a rien engendré en moi ; elle supposait que l’homme était et qu’il appartenait à Dieu et elle lui traçait un chemin.