Traité:Considérations sur les souffrances de Christ à la croix

De mipe
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J.L. Favez 1893

I

En offrant au lecteur des considérations sur les souffrances de Christ, nous croyons utile de les donner dans l’ordre des sacrifices institués de Dieu sous la première alliance. Nous apprenons par le psaume 40 que le Seigneur, en entrant dans le monde, s’est présenté à Dieu dans l’esprit du serviteur dévoué qui ferait toute Sa volonté. Il dit : « Au sacrifice et à l’offrande de gâteau tu n’as pas pris plaisir : tu m’as creusé des oreilles ; tu n’as pas demandé d’holocauste ni de sacrifice pour le péché. Alors j’ai dit : Voici je viens ; il est écrit de moi dans le rouleau du livre. C’est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon plaisir, et ta loi est au-dedans de mes entrailles » (v. 6-8). Les sacrifices offerts sous la loi, s’ils servaient à la relation du peuple Israël avec l’Éternel, laissaient néanmoins subsister le péché sans rien résoudre. Le moment vint où Dieu n’y trouvait pas de satisfaction ; mais Il interviendrait au milieu du mal.

Jésus, l’Agneau de Dieu, est le vrai serviteur qui accomplira toute la volonté de Dieu. Il s’offre quand Dieu Lui a donné un corps[2]. En entrant dans la scène où règne le péché, Son premier mouvement est de reconnaître la main de Dieu qui Lui a formé ce corps — et dans Son dévouement, sachant qu’Il sera Lui-même le vrai holocauste et le véritable sacrifice pour le péché, Il ajoute : « Voici, je viens… C’est mes délices, ô mon Dieu, de faire ce qui est ton bon plaisir ». — Il est remarquable de voir ici l’entière dépendance de Jésus. S’Il envisage l’œuvre pour laquelle Il venait, c’est en reconnaissant que c’est écrit dans le livre. Il vint pour accomplir les Écritures (Matt. 26, 54).

Les sacrifices de la loi lévitique formaient quatre classes. Il a fallu cet ensemble pour présenter l’étendue et la perfection du seul sacrifice de Christ. L’holocauste et le sacrifice pour le péché étaient les deux principaux et comme la base du culte et de tout le service. Nous aurons l’occasion d’en voir le rapport avec le sacrifice de la mort de Christ.

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L’holocauste (Lév. 1) était un sacrifice de bonne odeur offert à l’Éternel, et entièrement brûlé sur l’autel. Il présente Celui dont le service envers Dieu avait été une offrande de toute Sa vie, Jésus, conduit par dévouement à supporter dans Sa personne le jugement de Dieu jusqu’à la mort. Ce n’est pas encore l’expiation ; mais nous voyons le juste soumis à l’épreuve par le feu du jugement — épreuve qui a mis à découvert le trésor de piété fidèle concentré dans Sa personne. Le feu n’a révélé en Lui que des perfections ; aussi le sacrifice est-il un parfum qui monte vers Dieu.

À cause du péché, l’homme ne peut s’approcher de Dieu qu’en vertu d’un sacrifice sur lequel a passé le jugement et la mort. Venir à Dieu par ce moyen, a été la ressource des justes, depuis Abel. Plus tard, sont survenues les institutions de Moïse ; elles ont donné les divers sacrifices par lesquels les adorateurs rendent leur culte à l’Éternel. C’était bon pour alors, comme figure des choses réelles, en attendant le Christ.

Dans l’holocauste, la victime, choisie sans tare, était immolée, puis entièrement brûlée sur l’autel. Nous y reconnaissons le Christ à la croix. Certains sacrifices étaient brûlés sur l’autel en partie seulement ; le reste de la victime était la portion des sacrificateurs ou des adorateurs ; mais dans l’holocauste, tout était brûlé ; la victime entière était la part de l’Éternel. Dieu seul peut pénétrer l’étendue des perfections qui se sont déployées sous le feu de l’épreuve en Christ ; Il en garde pour Lui le mémorial.

Il est dit de l’adorateur qui offrait : « Il posera sa main sur la tête de l’holocauste, et il sera agréé pour lui, pour faire propitiation pour lui » (Lév. 1, 4). Il était ainsi agréé de l’Éternel. C’est autre chose s’il s’agit d’un pauvre pécheur encore dans son égarement. Se trouve-t-il en détresse, il peut crier au Dieu des miséricordes qui l’écoute et lui donnera du secours : « Les insensés… ont crié à l’Éternel dans leur détresse, et Il les a délivrés de leurs angoisses » (Ps. 107, 17-19). En cela, ce n’est pas s’approcher de Dieu ; si l’homme se présente, la médiation lui est nécessaire. Nous voyons qu’il la trouvait premièrement dans l’holocauste qui était agréé pour lui. C’est un premier effet, accompagné d’un second inséparable : « Faire la propitiation pour lui ». Lors même que l’holocauste n’est pas un sacrifice pour le péché, il est cependant d’un effet propitiatoire, en vertu du prix de la victime qui a glorifié Dieu lorsqu’elle passa par le feu du jugement. Pour nous qui, en vertu de l’œuvre accomplie de Christ, avons devant Dieu une position donnée, nous ne venons pas chaque fois avec un sacrifice spécial ; mais nous venons au Père, par la médiation de Christ, comme des enfants bien-aimés.

En outre des nombreux holocaustes offerts en diverses circonstances, il y en avait deux chaque jour, à l’heure du parfum : un le matin et un le soir, entre les deux vêpres. Le nombre en était augmenté le jour du sabbat et au commencement du mois. Par là, nous apprenons de quel prix était l’holocauste aux yeux de Dieu. Le parfum anticipé de la mort de Christ montait devant Dieu sans cesse, le jour et la nuit.

Loin que la souffrance de Jésus sous le jugement inflexible du Dieu saint, l’ait surmonté, c’est alors, à ce moment suprême, que Son dévouement sans limites envers Dieu et l’inébranlable perfection de Son être se sont montrés dans leur beauté. Il pouvait du sein de la souffrance et dans l’intégrité de Ses sentiments, associer son cœur aux louanges qui montent vers Dieu. « Et toi, tu es saint, toi qui habites au milieu des louanges d’Israël » (Ps. 22, 3).

L’holocauste est le sacrifice de la louange et du culte rendu à Dieu. Si le sacrifice pour le péché en est le fondement, l’holocauste en est la haute expression. Le Christ est la source et le sujet éternel de nos louanges ; elles se joignent devant Dieu au parfum de Sa mort, à l’holocauste : « Que ma prière vienne devant toi comme l’encens, l’élévation de mes mains comme l’offrande du soir » (Ps. 141, 2 ; 66, 13).

Adorer Dieu, Le célébrer, devraient tenir une plus grande place dans la vie des enfants de Dieu, soit quand ils sont réunis, soit en d’autres moments. La Parole nous y exhorte : « Offrons donc, par Lui, sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent[3] son nom » (Héb. 13, 15). C’est le moment délicieux de la vie chrétienne. Paul le connaissait, ce moment ; il nous l’apprend lui-même, quand il dit : « Je fléchis mes genoux devant le Père de notre Seigneur Jésus Christ » (Éph. 3, 14). Cela aussi concourt au bon état de l’âme, soit comme effet, soit premièrement comme encouragement à la vigilance, car comment adorer si le cœur n’est pas devant Dieu ?

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Les souffrances de Christ sur la terre, si l’on excepte les poursuites d’Hérode et la fuite en Égypte, ont suivi de près les premiers actes de Son ministère public. Il les a endurées de la part des hommes, dès ce moment jusqu’à Sa mort. Il y eut aussi la souffrance de Son âme devant l’heure de la croix qui approchait. Il portait déjà la mort au-dedans de Lui. Ce fut un sujet de Ses entretiens avec les disciples qui, hélas, comprenaient peu la situation. Gethsémané fut aussi une terrible anticipation de la mort ; mais Son dévouement fut vainqueur. Ses humiliations furent grandes aussi ; non seulement d’avoir été méconnu de Son peuple Israël ; mais d’avoir été traité comme Il le fut de la part de ceux qui Le rejetèrent. Jusque-là, ce n’était pas encore la propitiation ; cette œuvre devait être celle de Sa mort.

Le Christ est mort pour nos péchés, et nous a procuré par Sa mort le pardon et la paix avec Dieu — pardon assuré, prémices des autres bénédictions que le salut renferme. Nos cœurs y trouvent leur consolation. Nous en sommes débiteurs à Celui qui se livra Lui-même à Dieu pour nous.

À la croix, durant les premières heures, le Seigneur était encore sous le regard du Père. Il L’invoquait en faveur de Ses meurtriers. Comme on l’a exprimé, Il souffrait pour la justice. Il avait accompli la justice, durant Sa vie, au milieu des opprobres et de la contradiction. À la croix, Il essuyait les derniers outrages des hommes iniques ; Sa justice était consommée. Mais bientôt la douleur atteignit son intensité. Les ténèbres enveloppèrent la croix. Dieu Lui voilait Sa face. À la souffrance de Son corps, s’ajoutaient les souffrances de Son âme, sous le fardeau de nos péchés.

Éprouvant, sous l’anathème, l’abandon de Dieu, Jésus seul, sur la bouche du puits de la destruction, ressentait cet éloignement du Dieu saint, avec l’effroi de l’horrible condition du pécheur dans les liens du jugement. La mort seconde étendait ses ombres jusque sur Lui. Jésus ne se garantissait pas Lui-même ; Il s’était livré. Confiant dans la fidélité de Dieu, demeurant l’homme juste, criant à Son Dieu, Il attendait que vint Sa délivrance. Nous pénétrons peu cette souffrance ; mais l’expression de la douleur, recueillie dans les Écritures, nous donne à entendre qu’elle fut inouïe. Nous lisons : « Tous mes os se déjoignent ; mon cœur est comme de la cire, il est fondu au-dedans de mes entrailles » (Ps. 22, 14). « Que le courant des eaux ne me submerge pas, et que la profondeur ne m’engloutisse pas, et que le puits ne ferme pas sa gueule sur moi » (Ps. 69, 15). L’homme qui supportait ces douleurs était le Fils de l’homme (Ps. 60, 17), l’homme uni à la divinité. Tout homme, si ce n’est Christ, y aurait succombé ; mais Il put supporter le poids de la colère de Dieu. Il ne s’est pas soustrait à la douleur ; Il a pris la terrible coupe qui Lui était versée.

Cette douleur, qui eut son intensité, eut aussi son terme. Sa justice L’avait soutenu. Il vint le moment auquel Jésus, encore sur la croix, sut que toutes choses étaient déjà accomplies. Il lui restait à remettre Son esprit dans les mains de Son Père pour que le sacrifice fut consommé. Quand Il eut pris le vinaigre, « Il dit : C’est accompli. Et ayant baissé la tête, Il remit son esprit » (Jean 19, 30).

Elle est grande en elle-même et dans ses résultats, l’œuvre qui nous réconcilie avec Dieu. En outre de notre salut, duquel l’évangile est le témoignage, la mort de Christ intéresse le relèvement du peuple Israël, l’accomplissement des promesses faites aux pères (Act. 13, 32-34), et la nouvelle alliance, laquelle aussi est spéciale à ce peuple : « Le Libérateur viendra de Sion ; Il détournera de Jacob l’impiété. Et c’est là l’alliance de ma part pour eux, lorsque j’ôterai leurs péchés » (Rom. 11, 26-27). — Pareillement, les conseils de Dieu et en particulier celui de l’Assemblée de Dieu, le grand mystère dont Paul avait reçu la révélation, s’accomplissent en vertu de la mort de Christ : « L’assemblée de Dieu, laquelle Il a acquise par le sang de son propre [Fils] » (Act. 20, 28). À cela s’ajoute le propos de Dieu : « De réunir en un toutes choses dans le Christ, les choses qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre » (Éph. 1, 10) ; propos qui s’accomplit « par le sang de sa croix » (Col. 1, 20).

Mais ce qui domine tous ces effets de la mort de Christ, c’est l’œuvre d’avoir glorifié Dieu (Jean 13, 31-32), d’avoir présenté ce qui répond à la majesté de Dieu et à Son droit comme Dieu juste et saint qui abhorre le mal — et pour ainsi dire, d’avoir relevé Sa gloire atteinte par le péché de la créature. Dans Sa mort, le Christ a mis dans une pleine lumière l’immense amour de Dieu envers l’homme pécheur, et Sa sagesse qui a pu intervenir dans cette profonde misère pour en faire sortir à Sa gloire des résultats si grands. Toutes ces grandeurs et richesses qui allaient se déployer, étaient concentrées sur la personne de Christ.

Le sacrifice de Christ pour nos péchés a été décrit à l’avance par l’Esprit Saint, et en particulier dans le chapitre 16 du Lévitique. Un bouc était offert au jour des propitiations, jour de deuil en Israël. Après l’événement accompli de la mort de Christ, l’Esprit nous donne, dans les chapitres 9-10 de l’épître aux Hébreux, les développements comparatifs par lesquels nous apprenons la valeur de Son sacrifice, soit par la conformité avec son type, soit surtout par l’excellence qui dépasse le type de beaucoup. Ainsi, comme aux jours d’Aaron, la victime était brûlée hors du camp, et le sang, porté dans le sanctuaire ; de même aussi le Christ a souffert à la croix les douleurs du jugement de Dieu et de la mort. Il a souffert hors de la ville sainte, hors de la porte, comme un objet de réprobation. Mais bientôt, étant ressuscité, Il est entré dans les cieux, les vrais lieux saints, avec Son propre sang, ayant obtenu une rédemption éternelle. Le sang reçu sur le propitiatoire témoigne que la victime rejetée ici-bas est agréée en haut, auprès de Dieu, puisque le sang est admis jusque sur le trône de la Majesté. C’est à l’égard de Christ, donner la preuve de l’immense valeur du sacrifice et de l’entière satisfaction que Dieu y a trouvée. Il l’a montré en ressuscitant le Christ et Le recevant à sa droite sur Son trône.

Il y aurait lieu, à ce point où nous sommes du sujet, de remarquer de quel prix est pour nous le sang de Christ porté dans la présence de Dieu. Nous trouvons dans l’épître aux Hébreux (chap. 9) les déclarations suivantes : « Christ étant venu, souverain sacrificateur des biens à venir, par un tabernacle plus grand et plus parfait… est entré avec son propre sang une fois pour toutes dans les lieux saints, ayant obtenu une rédemption éternelle ». — « Si le sang de boucs et de taureaux… sanctifie pour la pureté de la chair, combien plus le sang du Christ qui, par l’Esprit éternel, s’est offert, lui-même, à Dieu sans tache, purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes pour que vous serviez le Dieu vivant » (v. 11-14).

L’œuvre de la croix est accomplie. Le Seigneur ressuscité a été enlevé auprès de Dieu. Il est entré dans le ciel avec Son sang, après avoir opéré la rédemption par Sa mort. Son sang est la rançon qu’Il a donnée, afin de nous racheter de toute iniquité ; il est pour Dieu le sang d’éternelle mémoire, le sang de Celui qui s’offrit à Lui sans tache ; auquel Dieu a répondu en justice, en élevant au-dessus de tout nom, comme Seigneur à la gloire de Dieu le Père, Celui qui fut obéissant jusqu’à la mort. — Et maintenant, le Seigneur a en mains l’administration de Sa grâce ici-bas. Par suite, Il a envoyé le Saint Esprit qui Lui rend témoignage et cherche les pécheurs pour les conduire au salut. C’est bien l’amour de Dieu toujours à l’œuvre envers les hommes, manifesté dans le don du Fils, et ensuite dans Sa mort ; mais en plus, c’est aujourd’hui, par l’évangile, la révélation d’une œuvre accomplie et d’un ordre de choses établi, préparé pour le salut de l’homme pécheur ; le ciel regarde l’homme avec amour.

Le Christ auprès de Dieu est institué souverain Sacrificateur. Le ciel est ouvert maintenant. Il fut ouvert premièrement sur la personne de Christ, quand Il était sur la terre. Alors, le regard du Père s’abaissait sur le Fils de Sa dilection. Aujourd’hui, après l’œuvre de la croix, il est ouvert aux héritiers du salut. Ainsi l’a vu Étienne. La foi regarde à Christ, en haut, et pénètre dans les lieux saints jusqu’à Dieu, par le sang de Jésus, par le chemin nouveau et vivant qu’Il nous a consacré. Non seulement le ciel s’abaisse en amour jusqu’à l’homme par l’évangile, pour le sauver de la colère qui vient ; mais un libre accès est donné au croyant jusqu’à Dieu. Heureux en Lui, il approche de Dieu et pénètre dans les lieux saints pour offrir à Dieu des louanges et des actions de grâces.

Il y a un état spirituel qui correspond à cette bénédiction. La délivrance que nous procure la rédemption parfaite, a son retentissement dans l’âme. Le soulagement qu’elle donne est ce qui est appelé : « la conscience purifiée », ou « être rendus parfaits » quant à la conscience (Héb. 9, 14 ; 10, 14). En cet état, on approche de Dieu en réalité, dans la liberté de la foi, conformément à ce qui est dit : « Combien plus le sang de Christ… purifiera-t-il votre conscience des œuvres mortes pour que vous rendiez culte au Dieu vivant ». Avoir la conscience purifiée, c’est avoir l’assurance du pardon de ses péchés en vertu du sang de Christ. Or le sang qui est reçu dans le sanctuaire est celui qui a été versé et qui a ôté nos péchés de devant Dieu. Il a, pour la foi, le prix qu’il a pour Dieu. Quand cette vérité pénètre dans l’âme, aussitôt le croyant connaît qu’en vertu du sang de Christ, son pardon est définitif ; il a conscience que ses péchés n’existent plus devant Dieu. Le sang a ce prix pour la paix du croyant.

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Le sacrifice de Christ présente premièrement, ainsi que nous l’avons remarqué, la mort de Celui qui a glorifié Dieu en s’offrant à Lui sans tache, et en donnant à Sa majesté et à Son amour envers les hommes tout leur éclat. Il y a un côté spécial à considérer dans le même sacrifice : Celui qui s’est offert à Dieu, a porté nos péchés en Son corps sur le bois. Quelle consolation, quelle sûreté pour nous de savoir comment l’œuvre de la croix embrasse, à tous égards, nos nombreux péchés ! Créatures responsables, nous étions sous le poids de nos péchés ; mais par l’autorité de Dieu, en amour, et par le dévouement de Christ, ils ont été mis en compte au Sauveur qui les a portés sur la croix, dans Sa sainte personne. C’est ce qu’on a appelé la substitution. L’épître aux Hébreux, en divers passages, présente le sacrifice de Christ sous ce double rapport. Au chapitre 9, 14, on lit : Le Christ « s’est offert lui-même à Dieu sans tache ». L’offrande du corps de Jésus Christ répond au caractère de Dieu, à Son amour, à Sa sainteté. Plus loin (v. 28), nous trouvons : « Le Christ a été offert pour porter les péchés de plusieurs ». C’est plus spécial : le Sauveur a pris notre place sous le jugement de Dieu.

Nous retrouvons ici les traits que fournit le type du bouc azazel. Par l’imposition des mains d’Aaron, il y avait transmission des péchés du peuple sur la victime. Elle était conduite au désert, puis abandonnée. Elle avait porté loin de Dieu les péchés du peuple. Pareillement, nous remarquons dans le passage cité de l’épître aux Hébreux que « le Christ a porté les péchés de plusieurs ». — Dans l’étendue du sacrifice, le Christ est mort pour tous, selon l’amour de Dieu pour tous les hommes. Le sang porté devant Dieu est le gage de la valeur d’une œuvre accomplie dont le bienfait s’étend à tous ; mais comme substitut, c’est des plusieurs qu’Il a porté les péchés.

Nous examinons ces détails parce que la Parole de Dieu nous y conduit ; mais non sans nous souvenir de quelles douleurs a été pour l’âme du juste le fardeau de nos péchés. Écoutons ce qu’Il dit au psaume 40 : « Mes iniquités m’ont atteint, et je ne puis les regarder ; elles sont plus nombreuses que les cheveux de ma tête et mon cœur m’a abandonné » (v. 12). Il ne s’est point refusé à compter nos iniquités pour siennes en ce moment solennel du jugement ; Sa douleur paraissait dépasser Sa force ; mais non, Il a attendu patiemment l’Éternel qui s’est penché vers Lui et a mis fin à Sa douleur.

Le prophète Ésaïe, dans son chapitre 53, nous montre Jésus lorsqu’Il souffrait pour Son peuple Israël et que dans les mêmes douleurs, abandonné de Dieu, Il souffrait pour tous les siens. Le tableau parle à nos cœurs : « Il a été blessé pour nos transgressions. Il a été meurtri pour nos iniquités ; le châtiment de notre paix a été sur lui, et par ses meurtrissures nous sommes guéris » (v. 5). « L’Éternel a fait tomber sur lui l’iniquité de nous tous » (v. 6). « Il a été amené comme un agneau à la boucherie… et Il n’a pas ouvert sa bouche » (v. 7). « Mais il plut à l’Éternel de le meurtrir ; Il l’a soumis à la souffrance » (v. 10). Comment dire ce qu’elles furent, ces souffrances, pour Celui qui les endura ? Calme, selon la perfection de Son être, Jésus blessé, meurtri, restait soumis comme un agneau amené à la boucherie, supportant tout.

L’issue a été grande comme la douleur aussi était grande et profonde. — Nous lisons dans les mêmes textes : « Il est ôté de l’angoisse et du jugement, et sa génération, qui la racontera ? » (v. 8). « Il verra une semence ; Il prolongera ses jours, et le plaisir de l’Éternel prospérera en sa main. Il verra du fruit du travail de son âme » (v. 10-11). « Je lui assignerai une part avec les grands » (v. 12). Ce sont les gloires de Christ ressuscité. Une de Ses gloires, selon Ésaïe, est qu’Il aura une part avec les grands ; mais dans le Nouveau Testament, nous en apprenons l’étendue : Dieu réunira, dans le Christ, toutes choses en un : les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre.

Ici se présente à l’attention le passage de 2 Corinthiens 5, 21 : « Celui qui n’a pas connu le péché, Il l’a fait péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en Lui ». Évidemment, pour une part, le passage présente Christ comme notre substitut : Dieu « l’a fait péché pour nous » ; tandis qu’ensuite, nous sommes devenus justice de Dieu en Lui. C’est Dieu qui L’a fait péché pour nous. On ne pourrait exprimer en termes plus sobres, semble-t-il, le profond abaissement dans lequel le Seigneur s’est trouvé, lorsqu’Il mourait pour nous. Non seulement Il portait nos péchés, mais Il était constitué de par Dieu le péché même, et traité comme tel. À cette lumière, on voit combien profondément a pénétré, dans la blessure du péché, la main qui s’avançait pour guérir.

Après la croix, Dieu a ressuscité Son Fils, et l’a exalté à Sa droite, en vertu de la justice. Christ, le premier, comme homme glorifié, est devenu « justice de Dieu » (1 Cor. 1, 30). Nous venons après, par un effet de la souveraine grâce. Quand Dieu nous a appelés, qu’Il a révélé Son Fils en nous et nous a donné le Saint Esprit, nous nous sommes trouvés en Christ et en Lui, « justice de Dieu ». Cette position nous est donnée par la justice ; elle est le prix de la mort que le Christ a dû endurer pour nous. — L’enchaînement du passage est à remarquer. En ce qui regarde le péché et le jugement, Christ a été substitué à notre place ; en ce qui regarde la justice, Il est Chef ; nous entrons dans Sa nouvelle position, nous prenons place en Lui. Tout découle de la souveraine grâce de Dieu et de la mort de Christ ; c’est une grâce dans laquelle Dieu fait tout, et Christ est tout. L’acte par lequel nous sommes devenus justice de Dieu en Christ, est aussi absolu que l’acte par lequel le Christ a été fait péché pour nous. Merveilleuse grâce ! Quand tout était perdu, Dieu a donné Son Fils et L’a livré pour nous ; quand tout était gagné, Dieu nous a associés à Son Fils pour partager Son bonheur. Et cette grâce est définitive, Dieu l’a fondée sur la justice.

On a pu remarquer, par le contexte, que le sujet fait suite à celui de la réconciliation avec Dieu. « Toutes choses sont faites nouvelles, et toutes sont du Dieu qui nous a réconciliés avec Lui-même par Christ, et qui nous a donné le service de la réconciliation » (v. 18). Celle-ci embrasse deux faits distincts : Dieu était en Christ invitant les hommes à la réconciliation, ne leur imputant pas leurs fautes. C’était quand le Christ était sur la terre. Sur ce pied, la rédemption n’était pas en vue, mais Dieu n’imputerait pas les fautes. Le monde n’a pas écouté ; il a répondu en faisant mourir le Christ. Néanmoins, la réconciliation ne cesse pas encore ; elle continue de la part du Dieu d’amour, mais sur un pied tout nouveau. La rédemption est opérée ; Christ est monté auprès de Dieu ; Il a Ses mandataires dans le monde pour inviter les hommes. Paul, auprès d’eux, était un ambassadeur de Christ : « Nous supplions pour Christ : Soyez réconciliés avec Dieu » (v. 20-21). C’est dans ces termes qu’il s’acquittait de son message, et qu’il l’avait fait jadis auprès des Corinthiens. Or, la réconciliation n’est plus proposée sur la non imputation du péché, l’abstention du jugement ; mais la rédemption ayant eu lieu, Dieu, en nous réconciliant avec Lui, donne un pardon effectif, fondé sur le jugement qui a eu cours à la croix et sur le prix de la mort de Christ (comp. Rom. 5, 10-11).

En outre du pardon des péchés compris dans la réconciliation, nous remarquons, dans cette même grâce, le don d’une vie nouvelle, la vivification : « Ceux qui vivent, ne vivent plus pour eux-mêmes » (v. 15) ; et le privilège d’être « en Christ », d’une nouvelle création (v. 17). « Être en Christ », c’est être uni à Lui ; c’est partager avec Lui une position dans laquelle il n’y a aucune condamnation, mais toutes les réalités du salut (Rom. 8).

À la suite, nous pouvons citer, comme un privilège qui accompagne la réconciliation, le don du Saint Esprit mentionné plus haut dans le contexte (v. 5). L’Esprit est le sceau de Dieu sur les saints. Il forme en eux le caractère moral ; Il est en eux une puissance de la piété et une source de saintes affections. Ainsi nous voyons que l’évangile a pris soin de régler, en tous points, notre position devant Dieu et notre condition morale. La lenteur des commencements, ou le manque de vigilance chez les chrétiens, peut réduire cette grâce à une moindre expression ; mais il n’est pas moins vrai qu’il y a en eux un renouvellement total, quelque chose qui n’avait pas existé auparavant ; non seulement la source d’une vraie joie et d’une grande tranquillité d’âme, mais le bonheur de connaître Dieu et d’approcher de Lui dans une heureuse liberté. Ces bénédictions sont celles de l’évangile. Elles portent le cachet de la justice de Dieu : nous sommes pardonnés en vertu de la justice, justifiés (Rom. 3, 26) ; l’Esprit est vie à cause de la justice (8, 10) ; nous attendons l’espérance de la justice (Gal. 5, 5) ; et enfin, nous sommes devenus nous-mêmes justice de Dieu en Christ.

Il nous reste à considérer les derniers moments de Jésus sur la croix. Dans Sa mort, Il ne fut point la proie de la mort, mais Il a donné librement Sa vie et l’a reprise Lui-même.

II

La mort de Christ était nécessaire. Sans elle, le sacrifice n’était pas accompli : le juste droit de Dieu contre le péché n’aurait pas eu de sanction, si ce n’est dans la condamnation des hommes pécheurs ; les choses vieilles, enveloppées par le péché de l’homme, subsisteraient sans solution ; rien ne serait fondé en justice et en nouvelle création, et le pardon de nos péchés, savoir notre justification, ne serait pas fondé sur la mort du juste.

« Il est réservé aux hommes de mourir une fois — et après cela le jugement » (Héb. 9). Pour ceux qui meurent dans cette condition, c’est fatal ; le jugement est la seule part qui leur reste. Le Christ, qui fut offert une fois pour porter les péchés de plusieurs, a rencontré dans un ordre inverse ces deux circonstances, le jugement d’abord, la mort ensuite.

Sur la croix, notre Seigneur était mis au rang des hommes iniques, cloué sur le bois maudit et dévoué à la mort. C’était le côté extérieur, Sa souffrance par l’homme, mais voulue de Dieu. Le fond était solennellement plus sérieux. Devant Dieu, Jésus portait nos péchés ; Il était fait péché pour nous ; Dieu Lui voilait Sa face. C’est le côté moral, plus spécialement judiciaire : le prévenu se trouvait devant son juge ; c’est la souffrance de Celui qui, étant fait péché, rencontrait Dieu en jugement — Sa souffrance durant les heures où Il était abandonné de Dieu.

Mais elle a eu son terme, cette souffrance unique sous le jugement de Dieu. Alors était venu ce moment duquel le Seigneur a dit : « C’est accompli ». Peu après, Il remit Son esprit entre les mains de Son Père. Évidemment un changement dans l’ordre moral était survenu dans cette circonstance solennelle ; ce n’est plus : « Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? », mais : « Père, entre tes mains je remets mon esprit ». Durant ces courts moments, Jésus était encore sur la croix, et la croix, c’est le jugement ; mais bien que ce ne fût pas encore la lumière de la face de Dieu, Il se retrouvait néanmoins avec le Père, avant de remettre Son esprit. Il n’est point mort loin de Dieu, bien qu’Il dût mourir pour que Son œuvre fût entière, le sacrifice accompli, et pour que Son obéissance à Dieu en toutes choses et jusqu’à la mort, fût manifestée, et que Lui fût connu comme Celui qui se livra Lui-même pour nous, « comme offrande et sacrifice à Dieu, en parfum de bonne odeur » (Éph. 5, 2). C’est pour cela que je dis qu’Il n’est point mort judiciairement.

Loin de moi la pensée d’atténuer en rien le mérite, la grandeur et le prix de la mort de Christ, ni les humiliations et les douleurs que mon Sauveur a endurées pour moi, sur la croix, jusqu’à la mort. En Lui, la mort du juste, fait péché pour nous, a répondu au juste droit de Dieu en jugement contre le péché. Est-Il mort sous le poids du jugement comme personnellement maudit et loin de Dieu, et c’est ce que veut dire « mourir judiciairement » ? Je ne crois pas que ce soit la teneur des termes de l’Écriture sur le sujet.

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Si nous disons que la souffrance du Seigneur, comme souffrance judiciaire, a eu son terme avant la mort, c’est en faisant allusion aux heures d’obscurité durant lesquelles Il était sous l’anathème et éprouvait l’abandon de Dieu. Nous apprenons de ces heures que tout y était judiciaire de la part de Dieu, et que le jugement avait moralement sa réalité solennelle sur la personne de Celui qui était en croix. Il restait la mort pour que le sacrifice fut consommé. C’était accompli jusque-là, lorsque la scène a changé pour l’âme de Jésus ; et cette souffrance, comme toutes celles de la croix, a eu lieu une fois pour toutes ; elle ne s’est plus renouvelée.

Le côté judiciaire de la croix se montre en ceci, que Dieu « n’a pas épargné son propre Fils, mais l’a livré pour nous tous ». « Il a porté nos péchés en son corps sur le bois ». « L’Éternel a fait venir sur Lui l’iniquité de nous tous ». « Il a livré son âme à la mort et a été compté parmi les iniques ». Tout cela est bien solennel, beau de majesté et de grandeurs divines. C’est d’un côté la juste sentence de Dieu que le péché mérite la mort ; de l’autre, c’est le dévouement et la profonde humiliation de Christ, le témoignage de la croix, c’est-à-dire la manifestation publique que Dieu est amour, et qu’en Son Fils, il y a la propitiation pour nos péchés (Jean 12, 32).

Nous n’aurons pas de la croix une connaissance complète, si nous ne considérons les trois heures de ténèbres qui couvrirent la terre à ce moment. Elles correspondent moralement au fait public que le Christ a souffert hors de la porte. Il était la victime brûlée hors du camp — dans l’éloignement du sanctuaire où Dieu réside, souffrant la réprobation pour nos péchés ; mais ce qui s’est passé entre Dieu et Christ dans le secret de ces heures, donna à cet éloignement sa terrible réalité. Ce qu’elles furent et comment le caractère judiciaire de la croix eut son expression la plus haute et la plus solennelle à ce moment unique, ne peut que nous toucher profondément à la pensée que Jésus s’y est trouvé à notre place. Jésus, fait péché pour nous, était lié sur la croix, et pour ainsi dire pris à part et traduit devant Dieu, le juge de tous, qui avait reçu l’offense du péché. Dieu Lui voilait Sa face et Le laissait dans l’abandon sous le poids du péché. Jésus, seul et abandonné de Dieu, ressentit cet éloignement d’une manière profondément douloureuse. Du côté de Dieu, tout était judiciaire alors ; pour Jésus, c’était la souffrance intense d’un pareil moment ; Son cœur ne trouve aucune sympathie autour de Lui. Nous apprenons Sa douleur, dans ce cri : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » prononcé au sein de la désolation de ces ténèbres, et sous l’impression qu’Il était, quant à Dieu, dans l’éloignement qui sépare de Lui l’homme pécheur. Que Dieu ait abandonné le juste, c’est un fait inouï, sans précédent et jamais renouvelé, mais qui a pesé de tout son poids sur l’âme de Jésus. D’autre part, le jugement n’a trouvé en Jésus que des perfections. Conserver son intégrité au sein de la douleur la plus intense et de la plus profonde abjection ; honorer Dieu, en reconnaissant la gloire de Sa majesté : « Tu es saint — toi qui habites au milieu des louanges d’Israël » ; reconnaître, quoique dans l’abandon de Dieu, Sa fidèle protection envers les siens : « Nos pères se sont confiés en toi et n’ont pas été confus », telles sont, d’après le psaume 22, les expressions par lesquelles la perfection de Christ répondait au jugement de Dieu, alors qu’Il en portait le poids sur Son âme.

Ces heures, dans lesquelles se sont rencontrés Dieu et l’homme, le Dieu saint, juge de tous, et le juste fait anathème pour nos péchés — dans lesquelles Jésus a ressenti Sa plus grande douleur, ayant Dieu et tout contre Lui, ces heures ont eu une issue. Le moment est venu où elles étaient passées et, avec elles, le jugement direct et l’anathème de Dieu. Le Seigneur avait le soulagement de connaître « que toutes choses étaient déjà accomplies ». Ces paroles sont à remarquer : « toutes choses ». Il Lui restait la mort à traverser ; tout était accompli jusque-là. C’est alors, qu’après avoir recommandé Sa mère au disciple bien-aimé, Il dit : J’ai soif, et qu’Il a remis Son esprit en paix dans les mains de Son Père.

Comme je l’ai dit plus haut, la mort de Christ était nécessaire. Il la fallait pour l’expiation du péché et la mort du vieil homme ; il fallait, pour ôter le péché du monde, que l’Agneau de Dieu fût immolé, qu’Il connût l’humiliation de la mort et ses douleurs. Conformément à cela, la mort de Jésus répondait au droit de Dieu en jugement. La mort était ce qui Lui restait à accomplir pour achever la coupe que le Père Lui avait versée ; mais remarquons qu’Il n’aurait pu s’offrir aussi longtemps qu’Il était sous l’anathème de Dieu. On demande quelle est la différence entre Sa relation avec Dieu et avec le Père. Sans prétendre épuiser le sujet, je puis dire que, dans le premier cas, qui fut celui des heures d’abandon, c’était Dieu et l’homme, le Dieu juge de tous, et l’homme fait péché pour nous, traduit devant Dieu ; tandis qu’avec le Père, c’étaient les heureuses relations d’affection qui avaient cours entre le Père et le Fils. Elles étaient passées, ces heures qui ont fait jaillir de l’âme de Christ ce cri douloureux : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Il se trouvait sous le regard du Père, dans l’exercice de l’obéissance à Son commandement qui était qu’Il donnât Sa vie pour Ses brebis, et Il l’accomplissait dans la puissance du témoignage du Père. Jamais Il ne fut si grand qu’à ce moment des gloires de la croix !

Il est bon de rappeler que, même en mourant pour le péché, le Christ n’a pas fini sous le coup judiciaire. Il a donné librement Sa vie, et même il est dit de Lui, comme sacrifice pour le péché, « qu’Il s’est offert Lui-même à Dieu sans tâche » (Héb. 9, 14). Et ce qui donne à ceci un appui, peut-être inattendu, comme secret de l’autel, c’est que la graisse de la victime pour le péché, brûlée hors du camp, était jointe à l’holocauste qui accompagnait ce sacrifice et brûlait sur l’autel en bonne odeur à l’Éternel (Lév. 16, 25).

L’holocauste, en effet, comme sacrifice de bonne odeur à l’Éternel, brûlé entièrement sur l’autel, exprimait d’une manière complète le parfait dévouement de Christ jusqu’à la mort et dans la mort — cet ensemble de perfections de tout Son être qui se découvrirent dans leur beauté et dans leur grandeur, surtout à l’heure de la croix, et qui s’exhalent devant Dieu comme un parfum de suave odeur. Or, le sacrifice pour le péché entrait pour une part dans ce parfum de suave odeur.

Certainement, Jésus n’est point mort sous le coup du jugement. Il a donné de Lui-même Sa vie. Fût-Il mort frappé par une puissance hors de Lui, Il ne se serait plus donné Lui-même. Il ne serait pas Celui qui était invulnérable au pouvoir de la mort, et qui, s’Il a goûté la mort, l’a fait par Sa propre puissance, selon ce pouvoir qu’Il avait de laisser Sa vie et de la reprendre. Quelle main aurait porté le coup judiciaire à Celui qui ne mourait que par un effet de Sa propre puissance ? En serait-il aujourd’hui, parmi nous, de même qu’aux mauvais jours de nos luttes avec Béthesda, où l’irrévérence de ce parti avait prétendu que, sous l’effet d’une cause mortelle, le Seigneur aurait succombé comme un autre homme ? Loin de nous ce rationalisme et ce mépris de la personne de notre glorieux Sauveur.

À l’appui de ce qui précède, je prie le lecteur de prêter attention à la voix d’un bienheureux frère, maintenant auprès du Seigneur, mais qui nous parle encore après sa mort : « Étant dans l’angoisse du combat, Il (Jésus) priait plus instamment. Pour Lui, la coupe venait de la part de Son Père. Une fois entièrement sorti de tout cela, Il s’offre. Lorsque la chose arrive, Il peut en parler, n’y étant plus. « C’est votre heure et la puissance des ténèbres ». Puis, Il passe outre, et va subir une autre chose : la colère immédiate de Dieu. Il a bu cette coupe terrible pour nous, cher frère ; mais Il en est aussi sorti complètement, et a remis Lui-même Son âme en paix à Dieu, Son Père, ayant compris que tout était accompli. La mort est maintenant le droit d’aller vers Lui dans cette sphère nouvelle, où Il a laissé pour toujours en arrière toute la puissance de l’ennemi, et où il n’y a que bénédiction, loin de la puissance de celui qui l’a employée contre Christ. »

J.N.D. (Fragments de lettres, p. 93)



« À la croix, Jésus fut abandonné. Ayant pris la place du péché, Il eut affaire d’une manière immédiate avec Dieu et Sa juste colère contre le péché, tellement qu’il n’y eut nulle part dans l’amour un refuge pour Son âme. Là aussi, Il se montre parfait, et ayant achevé cette œuvre ineffable, Son âme ayant bu la coupe sans mélange, l’expiation étant accomplie, Il sort de là comme ayant été exaucé, et Sa mort est simplement l’acte par lequel Il remet Lui-même Son esprit à Son Père. C’est ce qu’Il avait exprimé en un temps de paix, mais Il devait passer par la mort dans Son âme, et Il l’a fait comme offrande pour le péché — mais alors, qu’était-ce que la mort ? Elle était l’acte de Celui qui avait vaincu la mort, qui l’avait subie dans toute son infinie efficacité expiatoire, par laquelle le péché avait été ôté, et qui remettait entre les mains de Dieu, Son Père, Son âme plus que pure. Qu’est la mort ici, si la victoire sur Satan l’a fait être un acte d’obéissance ? Avoir enduré la colère, Lui donnait le droit de livrer Sa vie pour être reçu justement dans la faveur infinie. La mort était à Lui. Ce n’était pas encore la puissance en résurrection, mais Son âme était remise à Son Père. C’était la mort, mais la mort terminant une vie parfaite d’obéissance dans la souffrance, et l’introduction dans cette faveur infinie de la vie au-delà de toute relation de promesse ici-bas, et où Le plaçait l’œuvre par laquelle Il avait glorifié le Père…

Il était sorti de toute cette douleur de l’heure la plus terrible, et pouvait dire au brigand qu’il irait avec Lui dans le paradis ; Il pouvait en paix parler de Sa mère à Jean — Son heure était venue pour cela — et sachant que toutes choses étaient déjà accomplies, après avoir dit : « J’ai soif », Il remet Son âme dans les mains de Son Père. »

(Letters of J.N.D. Part II, p. 208)



Fragment. — « Lorsque Christ souffrit de la part des hommes, au travers de tout Son témoignage au milieu d’eux, jusqu’à la mort même, Il souffrait pour la justice, car Lui, dans Sa personne, n’avait point de péché pour lequel Il eut à souffrir. Il n’était point, aux yeux des hommes, une victime substituée, et ce qu’Il a ainsi souffert, de la part de la puissance de l’homme, amène le jugement, un jugement qui sera accompli lors de Son retour, et qui l’a été providentiellement déjà, lors de la destruction de Jérusalem, mais qui le sera pleinement quand Christ reviendra. À ceci se rattache un contraste bien important pour nous : Christ a souffert pour le péché, afin que nous, nous ne souffrions jamais pour le péché. Nous avons été guéris par Ses meurtrissures ; nous ne les avons pas souffertes. La colère que Christ a soufferte, dans l’abandon de Dieu, Il la porta Lui seul, et précisément, afin que nous n’eussions jamais à goûter de cette coupe d’amertume et d’épouvantement que nous ne pourrions supporter ; si nous la buvions, ce serait comme des pécheurs condamnés. »

J.N.D. (Les souffrances de Christ, p. 41)



  1. La seconde partie de cet écrit est une réimpression du traité de 1891 intitulé : « Quelques mots sur les souffrances de Christ à la croix ». Dans cette nouvelle édition, nous ajoutons les préliminaires qui lui donnent sa forme actuelle.
  2. Ces mots : « Tu m’as creusé des oreilles », sont rendus dans l’épître aux Hébreux, d’après les LXX, par ceux-ci : « Tu m’as formé un corps ».
  3. ou, bénissent.