Livre:Étude sur l’épître aux Galates/Chapitre 2

De mipe
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Le deuxième chapitre, qui nous informe d’abord de la suite des voies de Dieu envers Son serviteur, commence par ces mots : « Ensuite, au bout de quatorze ans » — comptés ici à partir de sa conversion comme au verset 18 du chapitre 1 — « je montai de nouveau à Jérusalem avec Barnabas, prenant aussi Tite avec moi. Or j’y montai selon une révélation » (v. 1, 2). Onze années s’étaient écoulées depuis son premier séjour à Jérusalem. Paul les avait passées d’abord à Tarse, sa ville natale, puis — ayant été cherché là par Barnabas — à Antioche, d’où plus tard ils avaient commencé ensemble leur premier voyage missionnaire. Les chapitres 11 à 14 des Actes des apôtres nous renseignent d’une façon plus détaillée sur cette période. La fin du chapitre 11 nous apprend que Barnabas et Saul allèrent en Judée pour apporter le produit d’une collecte à leurs frères dans la disette. Ce n’est probablement qu’en passant que Saul a été à cette occasion à Jérusalem. La fin du chapitre 12 mentionne cette visite sans aucun commentaire.

La visite dont notre chapitre nous entretient est commentée en détail dans le chapitre 15 des Actes ; là, les raisons extérieures qui engagèrent l’apôtre à entreprendre son voyage nous sont données, tandis que dans notre épître, nous apprenons que c’est selon une révélation, c’est-à-dire selon une direction précise d’en haut, qu’il y monta. Dieu agissait d’une manière directe dans cette affaire. Il ne voulait pas que la sérieuse question de la circoncision fût tranchée à Antioche, ni que Paul allât seul dans le chemin qu’Il lui avait ordonné. La question devait être traitée à Jérusalem pour maintenir l’unité dans le témoignage et dans le service. En même temps, Paul devait être amené dans une communion plus proche avec les autres apôtres.

Dans le chapitre 15 déjà cité, Luc écrit : « Et quelques-uns, étant descendus de Judée, enseignaient les frères, disant : Si vous n’avez pas été circoncis selon l’usage de Moïse, vous ne pouvez être sauvés. Une contestation s’étant donc élevée et une grande dispute, entre Paul et Barnabas et eux, ils résolurent que Paul et Barnabas et quelques autres d’entre eux monteraient à Jérusalem vers les apôtres et les anciens pour cette question » (v. 1, 2). Arrivés à Jérusalem, ils y trouvèrent la même discorde : « Et quelques-uns de la secte des pharisiens, qui avaient cru, s’élevèrent, disant qu’il faut les circoncire et leur enjoindre de garder la loi de Moïse » (v. 5). La question qui menaçait de conduire à une grande rupture devait nécessairement être résolue, et elle fut résolue. L’Esprit Saint dirigea les choses pour que les apôtres avec les anciens et toute l’assemblée se réunissent « pour examiner cette affaire ». Nous connaissons le résultat de ces débats, en partie assez agités. Les exigences des croyants qui inclinaient pour la loi furent repoussées et la vérité de l’évangile fut conservée aux chrétiens d’entre les nations.

Lors de cette rencontre importante, Tite, un Grec, se trouvait parmi les compagnons de l’apôtre. Paul, comme il l’écrit, le prit aussi avec lui. Nous pouvons supposer que cette décision hardie était en relation avec la révélation reçue d’en haut. Car c’était un fait qui devait contribuer grandement à résoudre la question : circoncision ou non. Tite, et Paul ne semble l’indiquer qu’en passant, « quoiqu’il fût Grec, ne fut pas contraint à être circoncis ». Timothée, « fils d’une femme juive croyante, mais d’un père grec », fut plus tard circoncis par l’apôtre, à cause des Juifs qui étaient dans ces lieux-là (Act. 16, 1-3). Tite ne le fut pas, car là il s’agissait de maintenir intactes la vérité de l’évangile et la liberté que nous possédons en Christ. Dieu justifie la façon de faire de Son serviteur. On reconnut Tite comme frère sans exiger sa circoncision. Par cela même l’importante question était déjà résolue.

Il est intéressant de voir de quelle manière Paul expose aux Galates comment Dieu avait tiré une bénédiction durable de cette sérieuse rencontre. Monté selon une révélation, il avait utilisé cette occasion pour exposer à ceux qui étaient assemblés l’évangile qu’il prêchait parmi les nations. Il l’avait fait « dans le particulier, à ceux qui étaient considérés, de peur qu’en quelque manière » il ne courût ou n’eût couru en vain (v. 2). L’apôtre, qui avait reçu son évangile directement du Seigneur Lui-même, était responsable de le transmettre exactement comme il lui avait été confié. Or il s’était efforcé en tout temps d’aller à la rencontre des croyants, en parole et par écrit, dans les conditions où il les trouvait et de les aider avec amour à progresser ; il se servait donc également de cette occasion pour présenter en détail aux conducteurs de l’assemblée à Jérusalem, moins avancés peut-être que lui en connaissance, ce qui lui avait été confié. Une entente paisible avec ceux qui étaient « considérés » était d’importance, tant en ce qui concernait son propre travail que pour l’unité d’action de toute l’œuvre. Que serait-il arrivé si, par suite d’une action irréfléchie de sa part, une discorde était intervenue entre lui et les apôtres ou les autres ouvriers ? Comme Satan aurait triomphé !

Comme il est beau de rencontrer en cet homme, si digne d’être imité, les sentiments qui étaient ceux de Christ ! Ne cherchant jamais son propre intérêt, ne pensant qu’à glorifier le Seigneur, ne travaillant que pour l’avancement de Son œuvre et le bien de Son troupeau bien-aimé, il réalisait pratiquement ce qu’il déclarait : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ».

Cependant, si important que fût cet accord avec les autres apôtres, soit d’une manière générale, soit pour les Galates en particulier, le vrai motif du voyage de l’apôtre à Jérusalem et de son attitude énergique pour la vérité était autre. Nous le trouvons dans les versets 4 et 5 : « à cause des faux frères, furtivement introduits, qui s’étaient insinués pour épier la liberté que nous avons dans le christ Jésus, afin de nous réduire à la servitude ; auxquels nous n’avons pas cédé par soumission, non pas même un moment, afin que la vérité de l’évangile demeurât avec nous ». Paul ne songeait pas à disputer sur la vérité avec ces personnes égarées. Elles ne voulaient pas la vérité. Leur intention était d’épier perfidement la liberté que nous avons en Christ. C’est pour cela que Paul les appelle des « faux frères ». C’est un fait frappant, mais bien compréhensible, que l’acceptation de doctrines perverses va presque toujours de pair avec le manque de droiture, ou y conduit. S’il en est ainsi, à quoi bon disputer avec de telles personnes ? Il ne reste rien d’autre à faire que s’opposer à elles avec énergie, les repousser et se détourner d’elles, ce à quoi l’apôtre exhorte constamment dans ses épîtres et ce qu’il faisait précisément lui-même à cette occasion. Il ne leur avait pas cédé un seul moment par soumission. L’enjeu était digne d’une attitude aussi inflexible : « afin que la vérité de l’évangile demeurât avec vous ». Nous savons ce que ces personnes recherchaient ; elles voulaient remettre les croyants sous la servitude de la loi, qui ne pouvait apporter à l’homme que malédiction et perdition.

L’apôtre en revient maintenant aux hommes qui étaient considérés à Jérusalem. Ce qu’ils étaient et la place qu’ils avaient prise ne lui importait guère — car Dieu n’a point égard à l’apparence de l’homme ; en outre ces hommes considérés ne lui avaient « rien communiqué de plus ». Au contraire, ils avaient dû reconnaître que la grâce qui lui avait été donnée dépassait de beaucoup ce qu’ils avaient reçu eux-mêmes. Si l’apostolat de la circoncision, limité à Israël, avait été donné à Pierre, c’est à Paul que Dieu avait confié l’apostolat de l’incirconcision, englobant tous les peuples de la terre. C’est pourquoi, en ce qui concernait la sphère qui lui était dévolue, la grâce qui lui avait été donnée allait déjà bien au-delà du domaine des douze, sans tenir compte de la différence fondamentale qui existait entre eux quant aux vérités révélées. Le même Dieu avait opéré en Paul et en Pierre, et de telle manière que les douze ne pouvaient que reconnaître avec gratitude ce que Dieu avait produit sans eux par Paul. Il avait déjà derrière lui des années d’un service béni et fructueux, et des preuves évidentes de sa mission et de ses aptitudes exceptionnelles avaient été données. Il s’ensuivit que Jacques, et Céphas, et Jean, qui étaient considérés comme étant des colonnes, lui donnèrent, à lui et à Barnabas, la main d’association, afin que Paul et ses compagnons allassent « vers les nations, et eux vers la circoncision ». Ils lièrent à cela que Paul, avec les croyants d’entre les nations, se souviendrait des pauvres parmi les Israélites ; on sait qu’il le fit toujours en toute fidélité (v. 10). Ainsi, non seulement les efforts de l’ennemi en vue de placer les croyants sous le joug de la loi furent anéantis, mais aussi le lien de la communion dans le service entre les différents conducteurs fut affermi. Une fois encore, du mal que se proposait l’ennemi, Dieu fit sortir du bien.

Mais plus que cela. Dans les versets suivants, conduit manifestement par le Saint Esprit qui n’a aucun égard aux personnes lorsqu’il s’agit de maintenir la vérité, Paul raconte un épisode qui nous montre combien peu il considérait les hommes qui étaient apôtres avant lui comme des supérieurs dont il fallait chercher l’approbation. En même temps, cet épisode infligeait aux légalistes un coup d’autant plus sévère qu’il n’était pas prémédité et qu’il n’était nullement à la louange du très estimé apôtre de la circoncision. Qu’il est heureux que la Parole de Dieu soit, sous tous les rapports, pure, fidèle et sûre ! La balance juste n’épargne personne. Qu’il est beau d’autre part que Pierre n’ait jamais gardé rancune à son fidèle frère et co-esclave de l’avoir blâmé pour tous les temps, et en apparence sans ménagement ! Dans sa dernière épître, peu avant sa mort, il l’appelle « notre bien-aimé frère Paul » et recommande « toutes ses lettres » à l’attention particulière des croyants (2 Pier. 3, 15, 16). Précieux exemple que nous avons à suivre dans les choses moins importantes !

Suivons cependant le compte-rendu lui-même. « Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai en face, parce qu’il était condamné » (v. 11). À Jérusalem, Pierre avait donné la main d’association à Paul ; ici, à Antioche, l’apôtre lui résiste en face, c’est-à-dire sans avoir égard à sa personne. Pourquoi cela ? Écoutons. Il n’était pas permis à un Juif gardant fidèlement la loi d’entrer chez les incirconcis et de manger avec eux (comp. Act. 11, 3). Pierre, instruit par Dieu, n’était pas seulement entré autrefois chez Corneille, centurion romain, mais avait aussi mangé à Antioche chez des croyants d’entre les nations ; cependant, lorsque quelques-uns furent venus d’auprès de Jacques, généralement tenu comme le représentant d’un christianisme encore en relation avec la synagogue et la loi, il s’était de nouveau détourné d’eux par crainte de ceux de la circoncision (v. 12, 13). Il avait entraîné les autres Juifs par sa dissimulation, et même Barnabas, l’homme rempli du Saint Esprit (Act. 11, 24). Combien l’influence d’une opinion généralement admise peut être grande et pernicieuse, surtout lorsqu’il s’agit de principes charnels, de coutumes et d’usages religieux ! Combien il est difficile de se dégager de préjugés légaux et combien les conséquences sont graves si nous nous laissons dominer par eux et ne marchons pas droit selon la vérité de l’évangile (v. 14) ! Plus nous serons considérés au point de vue religieux, plus les conséquences en seront graves. Dans le cas qui nous occupe, c’est le premier et le plus en relief des douze apôtres qui agissait ainsi !

À ce sujet un autre a écrit : « Si bénigne qu’ait pu paraître la chose, elle était de toute importance aux yeux de Dieu et de Son serviteur. Paul discernait que par cet acte, à première vue insignifiant, la vérité de l’évangile était abandonnée. Nous oublions si facilement que dans telle circonstance de la vie journalière en apparence peu importante, il peut s’agir effectivement d’un abandon de Christ et de la vérité de l’évangile. Mais Dieu veut que nous considérions les choses selon leur relation avec Sa vérité et Sa grâce. Nous sommes enclins à traiter légèrement ce qui se rapporte à Dieu et à donner une grande importance aux choses qui nous concernent personnellement. Dieu désire cependant voir en nous un sentiment plus profond pour tout ce qui regarde Christ et l’évangile. Pourquoi Paul blâme-t-il si sévèrement l’apôtre de la circoncision ? Parce qu’il s’agissait des fondements de la grâce. Là, la sagesse humaine ou la crainte d’offenser n’étaient pas de mise ; là, il ne pouvait y avoir de ménagements ou de considération de personnes. C’était le moment pour Paul de ne rien céder du terrain sur lequel il était particulièrement responsable de maintenir la vérité. Si Pierre se dérobait et ne se montrait pas comme Pierre (une pierre) mais comme Simon, fils de Jonas, Paul devait intervenir d’une manière d’autant plus décidée. Ce qui donne à son blâme une énergie si particulière, c’est le fait que ce qui se passait à Antioche eut lieu peu après la solennelle rencontre de Jérusalem, au cours de laquelle Pierre était intervenu avec tant de hardiesse pour la liberté que Dieu avait donnée aux croyants des nations. C’est lui précisément que Dieu avait choisi, comme Pierre le dit lui-même, « afin que par ma bouche les nations ouïssent la parole de l’évangile, et qu’elles crussent ». Il avait terminé son discours par ces paroles : « Dieu… n’a fait aucune différence entre nous et eux… mais nous croyons être sauvés par la grâce du Seigneur Jésus, de la même manière qu’eux aussi ». Il n’aurait guère pu s’exprimer de façon plus forte ; l’orgueil juif n’aurait pu être touché de manière plus sensible que par la déclaration que le salut de ceux des nations était un modèle pour le salut des Juifs et non pas le contraire, comme on aurait pu s’y attendre. Et après tout cela, un tel errement ? Et avec Pierre, Barnabas aussi usa de dissimulation, lui le fidèle compagnon de Paul pendant son premier voyage missionnaire et qui avait été choisi avec lui pour « monter à Jérusalem vers les apôtres et les anciens pour cette question » (W. Kelly — The Bible Treasury, 1862).

Que dire de tout cela ? Involontairement nous nous rappelons cette parole : « Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ? » (És. 2, 22). « Un roseau agité par le vent » — tels sont les meilleurs, un Jean le baptiseur, un Simon Pierre et d’autres, lorsque l’œil ne demeure pas simple. Il n’y en eut qu’Un qui fut parfait dans Ses voies, un seul dont le pied n’a jamais bronché. Ces hommes, et nous avec eux, avaient cependant un grand prix pour Dieu et étaient richement bénis de Lui. Qu’est-ce que cela doit être aux yeux d’un tel Dieu lorsque les siens se détournent de Sa merveilleuse grâce pour retourner à leur misérable façon d’agir, à leur vanité !

Nous comprenons que Paul, dont la clairvoyance discernait ce mauvais penchant dans la conduite de son compagnon de service, l’interpelle devant tous, dans une sainte indignation : « Si toi qui es Juif, tu vis comme les nations et non pas comme les Juifs, comment contrains-tu les nations à judaïser ? » (v. 14). Pierre avait prouvé par ses relations avec les croyants des nations qu’il était libéré, avec ses frères juifs dans la foi, du joug intolérable de la loi. Voulait-il maintenant mettre les nations sous ce même joug et les obliger à judaïser ? À Jérusalem, le centre du judaïsme, il avait pris hardiment fait et cause pour la liberté qui appartient à tous en Christ ; à Antioche, la ville païenne, voulait-il retourner aux ordonnances juives et les imposer à d’autres comme condition d’une entière communion chrétienne ?

L’apôtre poursuit : « Nous qui, de nature, sommes Juifs et non point pécheurs d’entre les nations, sachant néanmoins que l’homme n’est pas justifié sur le principe des œuvres de loi, ni autrement que par la foi en Jésus Christ, nous aussi, nous avons cru au christ Jésus, afin que nous fussions justifiés sur le principe de la foi en Christ et non pas sur le principe des œuvres de loi : parce que sur le principe des œuvres de loi nulle chair ne sera justifiée » (v. 15, 16). Remarquons qu’ici Paul ne parle pas directement de la loi, de la loi du Sinaï, mais d’une manière générale « d’œuvres de loi ». Quelle que soit la loi que l’on puisse mettre en avant, tout principe légal détruit la grâce et rend toute justification impossible.

« Or si, en cherchant à être justifiés en Christ, nous-mêmes aussi nous avons été trouvés pécheurs, Christ donc est ministre de péché ? Qu’ainsi n’advienne ! » (v. 17).

Être trouvé lui-même pécheur et faire Christ ministre de péché — cela Pierre ne l’avait certainement pas voulu ! Il n’avait pas pensé à cela. Mais Paul n’avait-il pas raison ? Si Pierre, et d’autres avec lui, après avoir renoncé à la loi comme moyen de justification et s’être réfugiés en Christ, commençaient maintenant à réédifier le système de la loi autrefois abandonné, ils déclaraient de la sorte condamner leur première manière de faire. Ils étaient ainsi trouvés pécheurs et transgresseurs (v. 18). Et Christ, qui les avait incités à tourner le dos à la loi et à ne chercher la justification qu’en Lui, était devenu ainsi un ministre de péché, car c’était sur la base de Ses enseignements qu’ils avaient quitté le terrain de la loi. Quel résultat ! Combien Pierre a dû être effrayé !

Puissent tous ceux qui, aujourd’hui encore, sont en danger de se reposer sur des ordonnances religieuses extérieures, reconnaître que, sur ce chemin, ils ne font rien d’autre que mettre la chair, l’homme, à la place de Christ ! Dans le christianisme il n’y a que deux institutions religieuses ordonnées du Seigneur : le baptême et la cène. Mais combien l’on a cherché à faire précisément d’elles un oreiller pour la conscience et, par leur emploi extérieur, à détourner les yeux de la personne et de l’œuvre de Christ ! Être baptisé et participer occasionnellement à la cène, voilà les deux grands points d’appui pour d’innombrables chrétiens professants. Ils ne possèdent rien de plus. Mais comme nous venons de le dire, se reposer sur des ordonnances signifie se reposer sur la chair. Cela est particulièrement sérieux dans ce cas ! Le baptême et la cène témoignent précisément de l’état désespéré de l’homme dans la chair, de la mort dans laquelle il se trouve et de l’œuvre qui a été nécessaire pour le délivrer de cet état. Pauvre chrétienté ! Elle tient ferme aux ordonnances extérieures, mais nie la vérité qu’elles représentent.

L’apôtre continue : « Car moi, par la loi, je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu » (v. 19). La loi était sainte, juste et bonne (Rom. 7, 12), mais, faible par la chair, elle ne pouvait apporter que la mort et la perdition à l’homme dans son état de chute et d’impuissance. Paul, qui autrefois avait été sous la loi, avait fait l’expérience de tous ses effets ; il les avait réalisés en lui-même. Il était mort par la loi, elle avait prononcé sa sentence de mort sur lui et cette sentence s’était exécutée sur lui en Christ. Mort et ressuscité avec Christ, il ne vivait plus maintenant selon son ancien état d’homme dans la chair. C’est pourquoi la loi n’avait plus aucun droit sur lui, il était mort à la loi et de ce fait délivré pour toujours de sa domination et de sa puissance. Un parfait substitut avait accompli pour toujours les justes exigences de la loi ; délivré maintenant de la loi par la mort, Paul appartenait à un autre, au ressuscité d’entre les morts, pour « vivre à Dieu » désormais.

Quel homme bienheureux ! Mais avec quelles peines, quelles contradictions, quelles persécutions il avait à lutter, en cherchant à vivre lui-même ces précieuses vérités et à les communiquer à d’autres ! Hélas la chair ne veut pas mourir. Se voir entièrement corrompue et impuissante, condamnée à l’inaction, et même à la mort, n’être que péché, est insupportable à la vieille nature. Dans le croyant aussi, elle cherche toujours à revivre et à agir ; et quand cela arrive il ne peut en résulter que péché et profonde humiliation pour lui. Dieu soit loué, comme morts et ressuscités avec Christ nous avons le droit de nous tenir pour morts, et comme vivants en Lui, nous en avons aussi la puissance. Appelés à suivre le grand apôtre dans son sentier, nous en sommes rendus capables. Que le Seigneur fasse de nous de zélés « imitateurs » de cet homme heureux !

Remarquons que Paul ne parle que de lui personnellement dans tout ce passage. Non pas que les vérités exprimées ne concernent pas tous les croyants et ne soient pas valables pour eux, mais il les présente comme sa possession personnelle, comme il les avait saisies pour lui-même par la foi et comme il les réalisait. De la même manière qu’il dit en Romains 8, 2 : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus, m’a affranchi de la loi du péché et de la mort », nous l’entendons répéter ici : « Je suis mort…, je suis crucifié…, je vis, etc. ». Ce n’est pas sans intention. La manière de s’exprimer de l’apôtre provoque d’elle-même en chaque lecteur sincère cette question : Ceci est-il vrai de moi ? Puis-je parler de cette façon ? Bonne et utile question ! Que tous les croyants soient morts et ressuscités avec Christ et affranchis de la loi du péché et de la mort est un fait, Dieu en soit béni ! Mais c’est une autre affaire de savoir dans quelle mesure chacun d’entre nous a personnellement saisi ce fait par la foi et dans quelle mesure il le réalise dans la vie pratique. Ce n’est pourtant que dans ce chemin que nous serons heureux comme l’était l’apôtre.

« Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi » (v. 20). Que Christ ait porté tous les péchés de l’apôtre sur la croix, cela est évident, mais ce n’est pas ce dont il parle ici. Il s’agit ici de la manière dont il était mort à la loi. Comment cela avait-il eu lieu ? Nous l’avons déjà dit plus haut. Dieu l’avait identifié avec Christ dans Sa mort à la croix, il était « crucifié avec Christ », et il réalisait ce fait par la foi. Celui qui avait subi à la croix la condamnation de la loi, après avoir achevé Son œuvre, vivait maintenant là-haut, à la droite de Dieu, et Paul vivait en Lui. En tant que vieux Paul, il n’existait plus ; il avait été devant Dieu comme un pécheur justement condamné ; en son substitut, la mort avait mis fin à la vie dans laquelle il avait vécu autrefois. C’est pourquoi il pouvait dire, bien qu’il se trouvât encore dans ce corps sur la terre : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Son moi, son vieil homme, tout ce qu’il avait été jadis moralement, tout ce qui concernait son être dans sa relation précédente avec la loi, et sous la loi, avait trouvé sa fin dans la mort de Christ, tout cela n’existait plus devant Dieu. Il possédait maintenant une vie nouvelle et cette vie était Christ. En d’autres termes : Christ vivait maintenant en lui, de la vie dans laquelle Il était ressuscité d’entre les morts, comme vainqueur du péché, de la mort et de Satan, après avoir porté la malédiction de la loi.

Comme cela a déjà été mentionné plus haut, ce que Paul dit ici de lui-même est vrai en principe pour tous les croyants. Ils ont tous été crucifiés avec Christ, ils sont tous morts et ressuscités avec Lui. Christ a été pour tous la fin de la loi et le commencement d’une toute nouvelle existence, d’une vie entièrement nouvelle. À cet égard il n’y a aucune différence, l’un n’a rien de plus ni rien de moins que l’autre. Le même don a été fait à tous. La différence, et elle est grande, n’existe que dans la manière de saisir cette vérité par la foi et de la réaliser pratiquement. Paul ne dit pas : « Nous ne vivons plus, nous », ou « Christ vit en nous », mais, comme nous l’avons déjà dit, il parle d’une manière toute personnelle, il ne parle que de lui. Depuis qu’il avait vu Jésus sur le chemin de Damas, il n’y avait plus pour lui que ce seul but, que ce seul objet : vivre Christ, Le représenter et être transformé à Son image. Il pouvait dire en vérité : « Pour moi, vivre c’est Christ ». Le début, le centre et la fin, le sommaire et la raison d’être de sa vie n’étaient plus que Christ ; c’est pourquoi aussi la mort était pour lui un gain, elle le conduisait vers Christ ; et être avec Christ, libéré de ce corps, est de beaucoup meilleur que de L’attendre étant encore dans ce corps.

Pour l’apôtre, Christ était ainsi la source de la vie, une vie qui l’avait séparé du passé et qui l’avait placé sur un terrain tout nouveau. Mais dans une créature cette vie ne peut subsister par elle-même et être indépendante. Elle a besoin d’un objet qui l’attire et l’entretienne, pour lequel elle vit et d’après lequel elle se forme. Cet objet, c’est de nouveau Christ. C’est pourquoi, après avoir dit : « Christ vit en moi », l’apôtre ajoute aussitôt : « Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (v. 20).

C’est de nouveau la même manière personnelle de s’exprimer. À plusieurs reprises la Parole nous dit que Christ nous a aimés et s’est livré Lui-même pour nous (voir Éph. 5, 2, 25). Mais ici l’âme de l’écrivain jouit d’une manière si vive et si personnelle de l’amour et du dévouement du Seigneur que le cœur du lecteur s’en trouve inconsciemment réchauffé. « Qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » — celui-là seul peut parler ainsi, qui vit d’une manière habituelle dans la proximité du Seigneur et qui, comme Jean jadis, jouit d’une relation intime et cachée avec Lui. Paul était un apôtre, un vase d’élection, mais, considéré simplement comme croyant, il faisait partie de ceux qui ont les commandements du Seigneur et qui les gardent, et ainsi le Seigneur pouvait l’aimer et se manifester à lui (Jean 14, 21). Nous pouvons tous le suivre dans ce chemin ; heureux quiconque le réalise ! C’est ainsi que la vie de Christ se manifeste en nous. Il deviendra Lui-même, toujours plus, le seul objet, Celui qui dominera toutes choses en nous. Bienheureux celui qui fait des expériences semblables à celles de l’apôtre et qui est à même de répéter ses paroles ! Connaissons-nous quelque chose de cette vie ?

Le souvenir de Celui qui dans Son amour pour nous, pour moi, est mort, qui m’a ainsi tiré de l’état misérable dans lequel je me trouvais et m’a fait don de Sa vie, si bien que maintenant je peux Le vivre et Le servir — ce souvenir délivre de Satan et de la puissance du péché. De plus, la pensée que c’est le Fils de Dieu qui a accompli cela saisit le cœur d’une énergie toujours plus vive et l’unit toujours plus intimement à Lui, le seul objet de la foi. L’œil ne se lasse pas dans l’admiration et l’adoration en contemplant Celui qui a pu aimer, et aime, un être tel que j’étais et que je suis. C’est ainsi que nous aussi, tant qu’il plaît à Dieu de nous laisser ici-bas, « ce que nous vivons dans la chair », nous le vivons dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui nous a aimés et qui s’est livré Lui-même pour nous. Christ comme source de cette vie et Christ comme objet des intimes inclinations de l’âme renouvelée — en vérité voilà une vie désirable, précieuse, digne d’être vécue ! Celui qui vit ainsi « n’annule pas la grâce de Dieu » (v. 21). En cela au contraire, Dieu est glorifié. N’est-ce pas Sa grâce seule qui a pu amener un tel changement et produire par ce moyen une nouvelle création dans laquelle les choses vieilles sont passées (2 Cor. 5, 17) ?

« Car si la justice est par la loi, Christ est donc mort pour rien » (v. 21). Par ces paroles l’apôtre termine son enseignement. Pauvres docteurs de la loi ! Où conduisaient leurs efforts ? C’est eux précisément qui annulaient la grâce de Dieu, qui privaient Dieu de Sa gloire, en mettant les œuvres de l’homme à côté des opérations merveilleuses de Dieu, et par là dépouillaient la mort de Christ de toute signification, de toute valeur. Car si un être humain peut être justifié par des œuvres de loi, par ses propres actions, pourquoi Christ est-Il mort ? Ses souffrances amères et Sa mort ont été pour rien. Il y aurait donc un autre chemin par lequel l’homme pourrait arriver au but et obtenir la justice. Ce qu’il en est de ce chemin et où il conduit, la dernière partie du chapitre 7 de l’épître aux Romains nous le montre. Son aboutissement est le cri désespéré : « Misérable homme que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ? ». Un chrétien lui-même, conscient de son salut et de sa qualité d’enfant de Dieu, s’il s’engage dans ce chemin, devra faire les mêmes expériences terrassantes. Il y a dans ses membres une loi qui combat contre la loi de son entendement renouvelé et qui le rend captif de la loi du péché !

Combien différentes étaient les expériences de l’apôtre ! En vérité, pour lui Christ n’était pas mort en vain. Nous ferons ces mêmes expériences si nous avons compris la signification de la mort de Christ et l’avons appliquée à nous-mêmes par la foi. Délivrés de la loi du péché et de la mort, nous pouvons nous tenir fermement dans la liberté pour laquelle Christ nous a affranchis et, vivants à Dieu, produire le fruit de l’Esprit à Sa gloire (chap. 5). Rendant grâces à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur, en qui nous sommes morts au péché, nous servons de notre entendement la loi de Dieu. Quant à la chair, elle sert la loi du péché ; elle ne peut faire autrement.

Souvenons-nous donc constamment de cette précieuse parole : « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ». Il est tout : notre part, notre vie, notre force. Et que le Dieu de toute grâce accorde à l’auteur comme au lecteur de ces lignes la grâce personnelle de pouvoir dire encore avec l’apôtre : « Et ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » !