Livre:Christ dans la gloire/Chapitre 10

De mipe
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Il est de la plus grande importance que le chrétien conserve une juste estimation du monde qu’il traverse, tout en gardant toujours devant les yeux la joie du monde vers lequel il se dirige.

Mais si nous sommes trop absorbés par le mal croissant d’un monde qui mûrit pour le jugement, par le grave état d’une chrétienté sur le point d’être vomie de la bouche de Christ, et par la confusion qui règne parmi les enfants de Dieu dispersés, nous aurons de la peine à échapper au découragement le plus complet.

Ce chapitre 12 reconnaît que le chrétien peut être abattu à cause des épreuves du chemin, mais il nous présente l’enseignement dont nous avons besoin pour être délivrés de ce piège. L’apôtre voyait évidemment que ceux à qui il écrivait risquaient de succomber sous le poids des épreuves et de reculer dans le combat avec l’Ennemi. Il parle du « fardeau » qui nous accable, du péché qui nous enveloppe, et des difficultés qui peuvent surgir dans le cercle chrétien.

En présence de ces épreuves, il craint que les croyants soient empêchés de courir la course qui est devant eux, qu’ils soient las et découragés dans la lutte avec l’Ennemi, qu’ils perdent courage sous la discipline du Seigneur, que leurs mains deviennent lasses dans le service du Seigneur, que leurs genoux défaillent, et que leurs mains fatiguées et leurs genoux affaiblis conduisent à des faux pas les entraînant dans un chemin tortueux.

Pour nous préserver d’être vaincus par le mal, l’apôtre place devant nous quelques grandes vérités. Si elles sont retenues dans leur puissance, elles nous soutiendront et nous encourageront, malgré toutes les épreuves et toute l’opposition, pour courir la course qui nous mène de la terre au ciel.

v. 1 — Nos pieds foulent le sentier qui conduit de ce monde, auquel nous avons tourné le dos, jusqu’au monde à venir, vers lequel nos yeux sont dirigés. Ce sentier est considéré comme « la course ». Plusieurs semblent penser que s’il n’y a qu’une seule manière d’être sauvé, il y a plusieurs manières de marcher dans ce monde ; et que chaque chrétien a la liberté de choisir celle qu’il préfère. L’Écriture montre que Dieu a Sa manière de retirer les hommes de ce monde et Sa manière de les conduire au travers de ce monde. À nous de discerner le sentier que Dieu a tracé pour les siens et ensuite de courir « la course qui est devant nous ».

Il est évident, lorsque nous lisons l’épître aux Hébreux, que le chemin de Dieu pour les siens est entièrement en dehors du camp juif. Il est également évident que la chrétienté est retournée à un ordre de choses qui font d’elle un camp ; aussi l’injonction à sortir hors du camp, au dernier chapitre, a-t-elle toujours son application. Mais, maintenant comme alors, sortir hors du camp religieux entraîne l’opprobre et peut-être la souffrance. Or, par nature, nous reculons devant l’opprobre et la souffrance.

Deux obstacles nous empêchent souvent de nous engager de cœur dans le chemin que Dieu a tracé. D’abord les fardeaux et ensuite le péché. Les fardeaux ne sont pas des choses moralement mauvaises. Tout ce qui nous empêche d’accepter le sentier de Dieu, ou de courir avec patience une fois que nous y sommes engagés, constitue un fardeau. Peut-être que la manière la plus rapide pour chacun de découvrir ce qui est un obstacle à son progrès spirituel, c’est de se mettre à courir. Un coureur se dépouillera de tout vêtement inutile. Ce qui, dans la vie ordinaire, ne serait pas un fardeau, en deviendra un dans la course. Nous sommes en outre exhortés à rejeter « tout fardeau », car nous sommes assez disposés à rejeter certains fardeaux, mais à en retenir d’autres.

L’autre grand obstacle, c’est le péché, dont le principe est l’iniquité, la propre volonté. Rien ne retient autant de prendre le chemin d’opprobre hors du camp que la propre volonté non jugée. Dans le sentier de Dieu, il ne doit pas y avoir de place pour la volonté de l’homme.

La présence de ces obstacles demande de l’énergie et de la patience pour les surmonter. Aussi l’apôtre dit : « Courons avec patience ». Courir suppose de l’énergie spirituelle, mais nous avons besoin d’y joindre de la patience. Il est facile de partir avec fougue ; il est difficile de poursuivre avec patience, jour après jour, en présence des difficultés et des occasions de découragement. L’Esprit de Dieu nous indique dans ce chapitre les différents moyens dont Dieu se sert pour que nous puissions vaincre ces obstacles et déployer l’énergie nécessaire pour courir avec patience la course qui est devant nous.

Premièrement, nous avons, pour nous encourager, une nuée de témoins dans le chemin de la foi. Si nous avons des ennemis devant nous, des épreuves à rencontrer et des difficultés à vaincre, souvenons-nous que d’autres ont marché avant nous dans ce chemin ; d’autres ont marché à la lumière des gloires à venir ; d’autres ont eu à rencontrer des épreuves plus grandes encore — les moqueries, les liens, la prison, la persécution, la mort — et par la foi, ils ont vaincu. Nous sommes ainsi entourés d’une nuée de témoins qui s’élève au-dessus de toutes les sortes d’épreuves d’ici-bas, et nous pouvons courir avec patience la course qui conduit là-haut.

v. 2 — Deuxièmement, bien au-dessus et au-delà de tous les témoins terrestres, il y a Jésus dans la gloire ; et pour nous encourager dans le chemin de la foi, l’apôtre dirige nos yeux vers Jésus, « le chef et le consommateur de la foi ». Il n’imagine pas qu’une fois engagés sur le chemin hors du camp, nous serons capables de nous y maintenir par notre propre force. Au contraire, son exhortation implique clairement qu’ayant vaincu les obstacles et commencé à courir, nous ne pourrons continuer qu’en fixant les yeux sur Jésus. Celui qui nous attire vers Lui hors du camp est le seul qui puisse nous soutenir lorsque nous sommes sortis vers Lui. D’autres ont foulé le sentier de la foi, mais ils n’ont pas atteint le but final ; ils n’ont pas encore atteint « la perfection » (11, 40). « Fixant les yeux sur Jésus », nous voyons Celui qui a parcouru toutes les étapes du chemin et qui est parvenu au but. Les saints de l’Ancien Testament sont de brillants exemples, mais ils ne sont ni des « chefs » ni des « consommateurs » ; Jésus est l’un et l’autre. Dans Son chemin de souffrance et de honte, Il a été soutenu par la joie qui était devant Lui. En parcourant le chemin, Il pouvait dire : « Ta face est un rassasiement de joie, il y a des plaisirs à ta droite pour toujours » (Ps. 16, 11).

Les témoins de Hébreux 11 nous encouragent par leur exemple, mais aucun d’eux ne saurait être un objet de foi, ni dispenser la grâce pour donner du secours au moment opportun. Jésus n’est pas seulement l’exemple parfait de quelqu’un qui a marché dans le sentier de la foi et qui est parvenu au but, mais Il est aussi Celui qui, du lieu de la puissance — à la droite de Dieu — peut dispenser le soutien de la grâce à ceux qui sont dans le chemin. La nuée de témoins a disparu de la scène : pour Dieu ils vivent, mais pour ce qui concerne le monde, ils sont morts. Jésus vit à jamais. Nous avons de magnifiques exemples derrière nous ; nous avons une personne vivante devant nous.

Il est à remarquer combien souvent dans cette épître le Seigneur est présenté par Son nom personnel de Jésus (voir 2, 9 ; 3, 1 ; 4, 14 ; 6, 20 ; 10, 19 ; 12, 2 ; 13, 12). C’est sans doute pour nous pénétrer du grand fait que Celui qui est couronné de gloire et d’honneur — qui est l’apôtre et le souverain sacrificateur de notre confession — est Celui même qui a été ici-bas un homme abaissé parmi les hommes. Aussi changées que soient Sa position et Ses circonstances, c’est sur ce même Jésus que nous sommes appelés à fixer les yeux. Il a les yeux sur nous, mais avons-nous les nôtres fixés sur Lui ?

v. 3, 4 — Troisièmement, nous sommes encouragés en contemplant le chemin parfait de Jésus. Nous ne sommes pas seulement exhortés à regarder à Jésus là où Il est, mais aussi à considérer Jésus là où Il a été. « Considérez bien » serait une meilleure traduction. Considérant Son chemin, nous verrons que du début à la fin, Il a enduré la « contradiction de la part des pécheurs contre lui-même ». Nous aussi, si nous nous engageons dans le chemin de la foi, hors du camp, pour courir la course qui est devant nous, nous éprouverons certainement que nous avons à rencontrer la méchanceté des hommes tout autour de nous, la contradiction de la part des pécheurs contre Christ, et même le refus du peuple de Dieu de porter Son opprobre. L’opposition continuelle est accablante pour nous, et lorsque nous sommes accablés, nous avons tendance à défaillir et à abandonner. Considérons-Le donc, de peur que nous ne défaillions. Nous ne pouvons rien rencontrer, que ce soit de la part de pécheurs qui s’opposent ou de croyants qui s’égarent, qu’Il n’ait déjà rencontré dans une pleine mesure. Il pouvait dire : « Tout le jour mes ennemis m’outragent ; ceux qui sont furieux contre moi jurent par moi » (Ps. 102, 8). Nous n’avons pas encore résisté jusqu’au sang en combattant contre le péché. Le Seigneur, Lui, a donné Son sang plutôt que de céder à la contradiction des pécheurs et de manquer dans l’obéissance à la volonté de Dieu. Les pécheurs qui étaient autour de la croix disaient : « Sauve-toi toi-même. Si tu es Fils de Dieu, descends de la croix ». S’Il en était descendu, Il n’aurait pas fait la volonté du Père, et n’aurait pas achevé l’œuvre qui Lui avait été donnée à faire.

v. 5-11 — Quatrièmement, pour garder nos pieds dans le chemin, nous avons les voies d’amour du Père en discipline. Si, en combattant contre le péché, nous étions appelés à souffrir une mort de martyr, nous serions délivrés pour toujours de la chair. Mais si nous ne sommes pas appelés à souffrir jusqu’au sang, le Père emploie un autre moyen pour nous délivrer de la puissance de la chair et nous faire participer à Sa sainteté. Il peut envoyer des épreuves pour nous châtier et, si nécessaire, pour nous corriger.

Devant ces voies du Père envers nous, il y a deux dangers contre lesquels nous sommes mis en garde. D’une part, nous sommes en danger de mépriser l’épreuve ; d’autre part nous pouvons perdre courage sous le poids de l’épreuve. Nous ne devons pas, dans un esprit d’orgueil, prendre l’épreuve d’une manière stoïque, comme étant le lot commun de l’humanité ; et nous ne devons pas non plus, sous l’épreuve, succomber dans le désespoir.

v. 6-8 — Après l’avertissement quant à ces deux dangers, il nous est rappelé deux vérités qui nous préserveront soit de mépriser les circonstances adverses, soit de nous laisser décourager par elles. Il nous est dit d’abord que l’amour accompagne toute épreuve, car il est écrit : « Celui que le Seigneur aime, il le discipline ». La main qui frappe est mue par un cœur qui aime. Comment alors pourrais-je mépriser ce que l’amour parfait trouve bon de faire ? Pourquoi perdrais-je courage ? L’amour ne peut-il pas soutenir dans l’épreuve que l’amour envoie ? Il nous est dit ensuite que dans nos épreuves, Dieu agit envers nous comme envers des fils. Nous voyons dans nos enfants la manifestation de leur volonté et de certaines tendances mauvaises qui doivent être réprimées. Pareillement, Dieu voit dans Ses enfants tout ce qui est contraire à Sa sainteté : les tendances et les habitudes mauvaises dont nous ne nous méfions pas toujours assez : l’impatience et l’irritabilité, la vanité et l’orgueil, la vanterie et la confiance en soi, la dureté et l’égoïsme, la convoitise et la cupidité. Et dans Son grand amour, Il agit envers nous afin que nous participions à Sa sainteté. Les soins dont le Père nous entoure pour nous éduquer et amener notre être moral à participer à la sainteté de Sa propre nature, sont la manifestation de Son grand amour pour Ses enfants. Amour qui n’est pas simplement passif ; il est actif en notre faveur. Trop souvent nous pensons que Son amour s’exerce envers nous lorsqu’une épreuve nous est épargnée ou que nous sommes secourus dans quelque difficulté. Nous pouvons très bien voir là l’effet de Son amour et de Sa miséricorde, mais nous apprenons ici que c’est aussi Son amour qui envoie l’épreuve.

L’apôtre parle de discipliner et de fouetter. Le fouet évoque peut-être davantage la manière d’agir gouvernementale de Dieu, qui reprend et corrige pour un manquement positif. La discipline, elle, ne s’exerce pas nécessairement à l’égard d’un péché, mais plutôt pour développer en nous ce qui est selon la nature de Dieu, afin que nous participions à Sa sainteté.

v. 9-11 — Deux choses nous sont ensuite présentées pour nous montrer comment nous pouvons tirer profit des voies de Dieu en discipline. Il nous est dit d’abord : « Ne serons-nous pas beaucoup plutôt soumis au Père des esprits, et nous vivrons ? ». Nos pères terrestres avaient affaire avec la chair ; le Père des esprits agit envers nous en discipline pour former au-dedans de nous un esprit droit, afin que nous vivions pour Lui. Pour recevoir la pleine bénédiction de cette discipline, nous devons nous soumettre entièrement à ce que Dieu permet. En nous inclinant devant Dieu dans l’épreuve, nous maintenons Dieu entre nous-mêmes et l’épreuve. Mais si nous nous rebellons et discutons les voies de Dieu, l’épreuve vient se placer entre nous et Dieu ; et alors, au lieu que nos âmes soient soutenues, nous tombons dans les ténèbres.

Ensuite, nous étant soumis à ce que Dieu permet, nous devons être « exercés ». Dans le jour à venir, nous verrons comment Il nous a conduits dans tout notre chemin ; nous comprendrons alors pleinement les épreuves et les peines par lesquelles Il nous a instruits et bénis. Mais aussi vrai que cela soit, Dieu désire que nous retirions une bénédiction présente de Sa discipline envers nous, et pour cela nous avons besoin d’être exercés maintenant. Cette bénédiction consiste à participer à Sa sainteté et à jouir du fruit paisible de la justice. La sainteté dont l’apôtre parle au verset 10 a pour effet de nous conduire non seulement à nous abstenir de ce qui est impur, mais aussi à le haïr, comme Dieu le fait. La haine du mal conduit à la justice pratique, qui à son tour produit la paix, en contraste avec l’agitation du monde injuste que nous traversons.

v. 12-17 — Cinquièmement, nous avons, pour notre encouragement, quelques exhortations pratiques propres à nous permettre de faire face à des difficultés et des dangers spéciaux qui peuvent surgir parmi ceux qui suivent le chemin de la foi. En cherchant à marcher dans l’obéissance à la Parole, et en refusant d’abaisser le niveau qu’elle nous indique, ne nous imaginons pas que nous trouverons des compagnons exempts de toute faiblesse ou de tout manquement. Aspirer à trouver une compagnie de chrétiens composée des éléments les plus spirituels, n’aboutirait qu’à former un groupement prétentieux de croyants centrés sur eux-mêmes et satisfaits d’eux-mêmes.

Ainsi nous pouvons trouver dans le témoignage chrétien :

1° certaines personnes qui manquent d’énergie spirituelle — leurs mains sont lasses, leurs genoux défaillent ;

2° certaines qui marchent dans des sentiers tortueux ;

3° certaines qui suscitent des discordes ;

4° certaines qui manquent quant à la sainteté pratique ;

5° certaines qui manquent de la grâce de Dieu ;

6° certaines qui se souillent par des alliances avec le monde ;

7° certaines qui ne distinguent pas les choses divines des choses profanes.

Comment alors avons-nous à agir en présence de ces différents maux dans lesquels, sans la grâce de Dieu, chacun de nous pourrait tomber ?

v. 12 — Premièrement, il nous est dit : « Redressez les mains lassées et les genoux défaillants ». Si l’énergie spirituelle faiblit, encouragez les autres en élevant vos propres mains dans la prière. Écrivant à Timothée, l’apôtre Paul dit : « Je veux donc que les hommes prient en tout lieu, élevant des mains saintes » (1 Tim. 2, 8). Les mains pesantes et les genoux défaillants font bien penser à des mains rarement élevées vers Dieu et à des genoux rarement ployés dans la prière. Autrefois le prophète avait dit : « Les jeunes gens seront las et se fatigueront, et les jeunes hommes deviendront chancelants ; mais ceux qui s’attendent à l’Éternel renouvelleront leurs forces » (És. 40, 30, 31). Ne sommes-nous pas trop souvent sans force devant les hommes parce que nous prions peu dans le secret ?

v. 13 — Deuxièmement, la pratique doit suivre la prière ; aussi lisons-nous : « Faites des sentiers droits à vos pieds ». Dans un jour où beaucoup sont enclins à marcher dans des sentiers tortueux, veillons à faire des sentiers droits à nos pieds, afin que personne ne s’égare. Beaucoup peuvent être boiteux et hésitants dans leur marche ; ils ne sont pas fondés quant au chemin dans lequel ils sont engagés et ne sont pas au clair quant à la position qu’ils occupent. Un rien suffit à les détourner. Combien il importe, alors, que nous ne soyons pas une occasion de chute pour eux en suivant un chemin équivoque. Il peut arriver facilement qu’un croyant plus âgé ouvre, par un acte dépourvu de sagesse, une porte par laquelle d’autres plus jeunes peuvent passer et être ainsi détournés du chemin.

v. 14 — Troisièmement, s’il y en a qui tendent à provoquer la discorde, veillons à poursuivre la paix avec tous. Le chrétien doit chercher à marcher ici-bas paisiblement, sans se mêler de la politique de ce monde, ni exprimer des opinions sur des choses qui, puisqu’il est étranger sur la terre, ne le concernent pas. Il y a, dans la nature humaine déchue, un penchant inné à s’engager dans la contestation. Le chrétien n’a pas seulement à s’abstenir de tout ce qui la susciterait, mais aussi à poursuivre la paix en suivant une voie qui la procure.

Quatrièmement, veillons à poursuivre la sainteté pratique, sans laquelle nul ne verra le Seigneur. « Nous voyons Jésus… couronné de gloire et d’honneur », dit l’apôtre ; mais cela suppose une marche habituelle dans la sainteté. Si nous tolérons le mal dans la moindre mesure, notre vision sera obscurcie. Sans la sainteté nous ne verrons pas le Seigneur. La paix et la sainteté doivent être maintenues ensemble, comme dans ce passage. Sinon nous pouvons poursuivre la paix aux dépens de la sainteté, ou la sainteté sans la paix.

v. 15 — Cinquièmement, nous sommes exhortés à veiller de peur que quelqu’un ne manque de la grâce de Dieu. Manquer de la grâce de Dieu, c’est perdre notre confiance en cette grâce et la jouissance pratique de ce que Dieu est pour nous. Une racine d’amertume risque alors de bourgeonner et de troubler les saints, de sorte que plusieurs peuvent être souillés en nourrissant des pensées amères les uns à l’égard des autres.

v. 16, 17 — Sixièmement, nous devons nous garder de toute alliance impie avec le monde, typifiée par la fornication. Enfin nous sommes avertis de ne pas traiter les choses divines comme des choses ordinaires. Ce serait les profaner. Ésaü en donne un exemple solennel, lui qui, pour un avantage passager, a traité avec légèreté son droit d’aînesse — comme s’il était de peu d’importance. C’était pour ces Hébreux, comme pour tout professant, un avertissement solennel à ne pas rejeter à la légère les bénédictions du christianisme. Hélas ! la chrétienté progresse rapidement dans ce chemin profane suivi par Ésaü. Comme Ésaü, elle sera rejetée. Ce n’est pas, remarquons-le bien, la repentance, qu’Ésaü a recherchée avec larmes, mais la bénédiction, alors que c’était trop tard. La chrétienté découvrira qu’il n’y a pas de repentance pour l’apostasie.

Mais souvenons-nous que, sans aller jusqu’à l’apostasie, nous pouvons tomber dans la profanation en traitant les privilèges divins comme étant de peu d’importance. Des hommes n’ont-ils pas mis de côté la cène du Seigneur comme étant de moindre importance, puisque nous ne sommes pas sauvés par elle ? N’est-ce pas là un exemple de profanation, aux temps actuels ?

v. 18-21 — Pour élever nos âmes au-dessus des épreuves, des tristesses et des exercices de ce présent siècle, l’Esprit de Dieu expose devant nous la joie du monde à venir.

Pour le moment, tout, dans ce bienheureux monde à venir, est en dehors du domaine de la vue et des sens. Ainsi, lorsque l’apôtre affirme que nous sommes venus à ces grandes réalités, cela signifie que nous y sommes venus par l’intelligence de la foi. Au chapitre 2 (v. 5), il parle explicitement du « monde habité à venir », expression qui désigne le vaste héritage de Christ dans les jours du millénium. Elle embrasse tout ce sur quoi Christ dominera comme homme, soit dans le ciel, soit sur la terre ; car il y a le côté céleste du monde à venir aussi bien que le côté terrestre.

Mais avant d’aborder ces réalités, l’Esprit, pour établir le contraste, parle, dans les versets 18 à 21, des choses auxquelles Israël était venu — et auxquelles le chrétien n’est pas venu. À Sinaï, Dieu avait fait connaître Son alliance au peuple d’Israël et leur avait présenté ce qu’Il leur commandait de pratiquer, les dix paroles (Deut. 4, 10-13). Pour cette raison, la présence de Dieu sur la terre était accompagnée des symboles de Sa majesté, et de Son jugement en destruction contre la désobéissance et le péché. Ces symboles — le feu, l’obscurité, les ténèbres et la tempête — frappaient les hommes de terreur. Tout, à Sinaï, était contre nous. En outre, tout, à cette première montagne, faisait appel à la vue et aux sens. Nous, chrétiens, nous ne sommes pas venus à la montagne qui « peut être touchée » (v. 18) ; ni à des choses qui peuvent être entendues, telles que le son de la trompette et la voix de paroles (v. 19) ; nous ne sommes pas non plus venus à des choses qui peuvent être vues (v. 21). L’homme naturel ne peut pas supporter la présence de Dieu. Le moindre éclat de Sa gloire est accablant lorsqu’il est accompagné d’une exigence. Israël ne put supporter cela, et même Moïse le trouva terrible et dit : « Je suis épouvanté et tout tremblant ».

Les grandes réalités auxquelles nous sommes venus dans le christianisme ne peuvent être ni touchées, ni entendues, ni vues par l’homme naturel ; elles ne peuvent être connues que par la foi. Ce fait doit avoir été particulièrement difficile pour les croyants hébreux ; en effet, ils étaient habitués à un système religieux dans lequel tout était conçu pour s’adresser à l’homme dans la chair. Ils se trouvaient maintenant introduits dans quelque chose d’entièrement nouveau, qui mettait de côté tout ce qui était pour la vue. Ils devaient apprendre que les choses du judaïsme n’étaient que les ombres tandis que les choses invisibles du christianisme sont la substance. Tout ce qui était pour la vue avait passé, et ils étaient introduits, comme nous le sommes, dans un cercle merveilleux de bénédictions que seule la foi peut saisir.

v. 22-24 — Dans ce panorama de bénédictions déployé devant nous, huit points sont mentionnés ; il est dit que nous sommes venus

1° à la montagne de Sion ;

2° à la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste ;

3° à des myriades d’anges, l’assemblée universelle ;

4° à l’assemblée des premiers-nés écrits dans les cieux ;

5° à Dieu, juge de tous ;

6° aux esprits des justes consommés ;

7° à Jésus, médiateur d’une nouvelle alliance ;

8° au sang d’aspersion qui parle mieux qu’Abel.

La montagne de Sion : Regardant par la foi au monde à venir, nous sommes d’abord amenés par l’Esprit de Dieu à la montagne de Sion, la Jérusalem terrestre, représentant les saints terrestres. La montagne de Sion représente symboliquement le terrain sur lequel tous les saints, terrestres et célestes, entreront dans la bénédiction. Deux psaumes, les psaumes 78 et 132, nous éclairent quant à la signification spirituelle de la montagne de Sion.

Dans le psaume 78, nous avons le récit de la faillite totale d’Israël sur le terrain de la responsabilité. Sur la base de leurs propres œuvres, tout est perdu. Le tabernacle est abandonné (v. 60) ; l’arche est livrée à la captivité (v. 61) ; le pays tombe sous le jugement et le peuple est consumé (v. 62-64). Puis, comme cela est rapporté au verset 65, un grand changement s’effectue dans les circonstances du peuple, changement opéré entièrement par l’Éternel ; nous lisons : « Le Seigneur s’éveilla comme un homme qui dort » et se mit à agir « comme un homme puissant ».

Jusque-là Dieu avait agi envers Israël sur le terrain de leurs œuvres ; mais lorsqu’ils se sont plongés dans une ruine totale, Dieu fait intervenir Sa souveraineté et agit de Lui-même pour leur bénédiction. Ainsi nous lisons : « Il choisit la tribu de Juda, la montagne de Sion qu’il aima » (v. 68) ; et encore : « Il choisit David » (v. 70). C’est la souveraineté de la miséricorde divine : Dieu effectue un choix souverain pour la bénédiction de l’homme. Une montagne est le symbole de la puissance ; la montagne de Sion est le symbole d’une grande puissance exercée en grâce souveraine.

Le psaume 132 présente une autre grande vérité en relation avec la montagne de Sion. Ce psaume célèbre l’occasion où David amène l’arche en Sion. L’arche est non seulement reprise des mains de l’ennemi, mais elle est mise à la place qui lui appartient de droit sur la montagne de Sion. Le psalmiste dit : « Car l’Éternel a choisi Sion ; il l’a désirée pour être son habitation : C’est ici mon repos à perpétuité ; ici j’habiterai, car je l’ai désirée » (v. 13, 14). À peine l’arche est-elle établie en Sion que la bénédiction se déverse sur le peuple. « Je bénirai abondamment ses vivres, je rassasierai de pain ses pauvres ; et je revêtirai de salut ses sacrificateurs, et ses saints exulteront en chantant de joie » (v. 15, 16). Ici de nouveau nous avons la pensée du choix souverain qui se rattache à Sion, mais avec ceci en plus qu’il est en relation avec l’arche. L’arche, avec son propitiatoire, parle de Christ, et nous apprenons ainsi que la pleine signification symbolique de la montagne de Sion est la puissance de la grâce souveraine de Dieu exercée pour la bénédiction de l’homme par Christ. Quand tout a été perdu pour l’homme à cause de sa chute, la plénitude de la bénédiction est assurée par la grâce de Dieu, se déversant sur nous avec justice, sur le terrain de tout ce que Christ est et a fait. Telle est la base solide de la bénédiction pour le monde à venir, et c’est à cela que nos âmes sont venues par la foi.

La cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste : Ayant considéré d’abord la grâce souveraine de Dieu qui rencontre l’homme dans sa ruine totale, notre foi est maintenant introduite dans les scènes du ciel : nous nous trouvons dans la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste. Cette cité symbolise à la fois les saints célestes et leur habitation, dans le monde à venir. La bénédiction terrestre dans le millénium sera administrée par cette cité — les nations marcheront à sa lumière. En contraste avec les cités terrestres, elle est appelée la cité du Dieu vivant. Les cités terrestres sont composées d’hommes mortels ; et par conséquent, comme eux-mêmes, leurs cités sont sujettes à la mort et à la ruine. Cette cité tire sa vie du Dieu vivant et est par conséquent au-delà du pouvoir de la mort et de la ruine. La foi présente cette cité glorieuse à nos âmes ; elle nous annonce ce qui va venir. Nous promenons nos regards autour de nous et nous voyons la misère, la souillure, la violence et la corruption des cités des hommes ; par la foi, nous levons les yeux et voyons cette cité glorieuse que des pieds souillés par le péché n’ont jamais foulée. Nos cœurs sont consolés de savoir que, quand les nations marcheront à la lumière de cette cité, la misère aura disparu et la bénédiction du monde à venir sera établie.

Les myriades d’anges, l’assemblée universelle : Arrivés au ciel, nous nous trouvons en présence de myriades d’anges. Ce sera le rassemblement universel de ces êtres spirituels. Toutes les classes et tous les ordres de ces êtres glorieux seront là. Ces myriades d’anges existent déjà, et par la foi nous sommes venus à la connaissance de leur existence.

Les anges sont les protecteurs divins du peuple de Dieu et ils conserveront ce service spécial dans le monde à venir. Le psaume 34 (v. 7) évoque cette garde. Nous y lisons : « L’ange de l’Éternel campe autour de ceux qui le craignent, et les délivre ». L’histoire d’Élisée illustre cette protection. Lorsqu’il se trouva encerclé par ses ennemis à Dothan, son jeune homme fut saisi de frayeur, mais Élisée lui dit : « Ne crains pas ; car ceux qui sont avec nous sont en plus grand nombre que ceux qui sont avec eux ». L’Éternel, en réponse à sa prière, ouvrit les yeux du jeune homme pour qu’il voie que la montagne était pleine de chevaux et de chars de feu autour d’Élisée (2 Rois 6, 17). Élisée les avait discernés par la foi ; le jeune homme les discerna par la vue. Daniel, en son temps, éprouva la protection angélique : un ange fut envoyé pour fermer la gueule les lions afin qu’il ne subisse aucun mal (Dan. 6).

Le Seigneur, comme homme, était l’objet de cette protection des anges ; nous lisons : « Il commandera à ses anges à ton sujet, de te garder en toutes tes voies » (Ps. 91, 9-12). Des anges étaient présents à Sa naissance, des anges Le servirent lors de la tentation, un ange Le fortifia au jardin de Gethsémané, des anges gardaient Son sépulcre et assistèrent à Son ascension.

Aujourd’hui les croyants sont au bénéfice de ce service des anges ; nous lisons : « Ne sont-ils pas tous des esprits administrateurs, envoyés pour servir en faveur de ceux qui vont hériter du salut ? ». Dans le monde à venir, ils exerceront encore ce service, car ils se tiennent aux portes de la cité céleste, et ils uniront le ciel et la terre, montant et descendant sur le Fils de l’homme.

L’assemblée des premiers-nés écrits dans les cieux : Pénétrant plus avant dans ces hauteurs de gloire, nous venons par la foi à l’assemblée des premiers-nés écrits dans les cieux. Dans ce vaste système de gloire céleste, il y a ceux qui ont une place spéciale et distincte. Ils sont appelés les premiers-nés, et ce terme indique leur prééminence. Sept fois dans les Écritures, Christ est appelé le premier-né, car Il doit toujours avoir la suprématie. Ici le mot est au pluriel et se réfère aux saints qui composent l’Église. Ils auront une place prééminente parmi les saints célestes, de même qu’Israël est appelé le premier-né de l’Éternel, comme ayant une place prééminente parmi les nations (Ex. 4, 22). Les noms de ces premiers-nés sont écrits dans les cieux, car c’est là qu’est leur demeure ; nous appartenons au lieu où nos noms sont écrits. Comme étant la Jérusalem céleste, l’Église est vue administrant la bénédiction en relation avec la terre ; en tant qu’assemblée des premiers-nés, l’Église est vue comme adorant en relation avec les cieux.

Dieu juge de tous : Montant encore plus haut, par la foi, nos âmes viennent « à Dieu, juge de tous ». Dieu est vu, comme l’a dit quelqu’un, « regardant d’en haut pour juger tout ce qui est en bas ». Il ne s’agit assurément pas ici de Dieu exerçant un jugement judiciaire, comme au grand trône blanc, mais de Celui qui gouvernera la terre en justice. Ainsi Abraham parle de Dieu comme juge, quand il dit : « Le juge de toute la terre ne fera-t-il pas ce qui est juste ? » (Gen. 18, 25). De même, dans le monde à venir, les hommes diront : « Certainement il y a un fruit pour le juste, certainement il y a un Dieu qui juge la terre ». Et encore : « Élève-toi, juge de la terre ! Rends la récompense aux orgueilleux » (Ps. 58, 11 ; 94, 2). Sous le gouvernement de l’homme, trop souvent le jugement ne correspond pas à la justice ; sous celui de Dieu, juge de tous, « le jugement retournera à la justice » (Ps. 94, 15), car « il jugera avec justice les misérables, et reprendra avec droiture les débonnaires de la terre » (És. 11, 3-5).

Les esprits des justes consommés : Le monde à venir ne serait pas complet sans les saints de l’Ancien Testament. Il y aura les saints terrestres, ayant leur centre dans la montagne de Sion ; il y aura l’assemblée, prééminente parmi les saints célestes ; et il y aura les saints de tous les âges avant la croix. Il en est parlé comme des esprits des justes consommés, ce qui laisse entendre qu’ils ont tous passé par la mort et qu’ils ont maintenant revêtu leur corps de gloire après avoir été dépouillés de leur tente terrestre (cf. 2 Cor. 5, 4).

Jésus, médiateur d’une nouvelle alliance : Par la foi nos âmes sont venues à Jésus, celui par qui toute la bénédiction du monde à venir est assurée, qu’elle soit terrestre ou céleste. Que serait le monde à venir sans Jésus ? Il est le centre de cette vaste scène de bénédictions. C’est Lui qui remplira et satisfera le cœur de tous les saints et qui administrera Son royaume pour la gloire de Dieu.

Le sang d’aspersion : Enfin nous sommes venus au sang d’aspersion qui parle mieux qu’Abel. C’est la base juste et éternelle de toute bénédiction pour le monde à venir. Le sang d’Abel avait été versé sur la terre, et criait à Dieu en appelant la vengeance sur celui qui l’avait répandu. Le sang de Christ a été mis sur le propitiatoire, sous les yeux de Dieu, et au lieu de crier vengeance, il proclame le pardon pour ceux qui l’ont répandu. Comme le dit un cantique anglais : « L’épée même qui a percé Son côté a fait couler le sang qui sauve ». Tous ceux qui croient que Dieu a accepté le sang sont placés sous la bénédiction que le sang assure et auront leur part dans le monde à venir.

Ainsi un magnifique panorama de la plénitude des temps est déployé devant nos âmes, du jour où les conseils de Dieu pour la gloire de Christ et la bénédiction de tous Ses saints auront leur accomplissement. Et notre foi a le privilège de voir les saints terrestres, les saints célestes, les saints de l’Ancien Testament, les myriades d’êtres angéliques, Dieu au-dessus de tous, et Jésus médiateur de toutes les bénédictions, Son sang précieux étant la base de chacune d’elles.

v. 25-29 — Après avoir placé devant nous la perspective glorieuse à laquelle le croyant est déjà venu par la foi, l’apôtre avertit solennellement ceux qui seraient en danger de se détourner de Celui qui parle ainsi des cieux. S’il n’y avait aucune possibilité d’échapper au jugement pour celui qui désobéissait à la voix de Dieu lorsqu’Il parlait sur la terre, demandant à l’homme la justice, combien moins pourront échapper au jugement ceux qui refusent la voix de Dieu, maintenant qu’Il parle des cieux, dans la grâce qui apporte la bénédiction à l’homme ! Comme l’a dit Samuel Rutherford : « La vengeance de l’évangile est plus redoutable que la vengeance de la loi ». En outre, nous sommes avertis de ce qui est impliqué dans ce jugement à venir. La solennité du jugement de Dieu a été symboliquement présentée par l’ébranlement de la terre au Sinaï. Le jugement futur n’ébranlera pas seulement la terre, mais aussi les cieux. Il nous est alors clairement annoncé que cet ébranlement signifie le renversement de ce qui est ébranlé. Tout ce qui n’est pas le résultat de la grâce souveraine de Dieu sera ôté par le jugement. L’ancienne création souillée par le péché sera finalement ôtée, pour ne laisser que la nouvelle création de Dieu, résultat de Sa propre grâce. Le royaume qui est reçu par les chrétiens est établi en justice, par la grâce, et par conséquent, il ne peut pas être ébranlé. Servons donc Dieu avec révérence et avec une sainte crainte ; ne traitant pas, comme Ésaü, les choses divines comme si elles étaient profanes, mais réalisant la sainteté des choses de Dieu et marchant dans la vraie piété. N’oublions pas que, bien que nous connaissions Dieu en grâce, néanmoins « notre Dieu est un feu consumant ». Il brûlera tout ce qui n’est pas de Lui-même, que ce soit la chair dans les siens ou une création souillée par le péché.