Traité:L’intercession de Christ
(Lisez l’épître aux Hébreux et 1 Jean 2, 1 et 2)J.N. Darby
La doctrine de l’intercession de Christ semble entourée, dans l’esprit de beaucoup de chrétiens, d’une certaine obscurité qu’il serait utile de chercher à dissiper. Les uns en effet, et c’est le plus grand nombre, faussent cette doctrine en en faisant le moyen d’obtenir la justice et la paix, et affaiblissent ainsi le vrai caractère de la rédemption qu’ils paraissent ignorer ; les autres, comprenant que la rédemption est parfaite et complète, suppriment l’intercession comme étant incompatible avec cette perfection qu’à leurs yeux elle affaiblit ou renie.
Tous ces chrétiens sont dans l’erreur, et méconnaissent le vrai caractère de l’intercession de Christ. Cette intercession, en effet, n’est pas le moyen d’obtenir la justice et la paix. En user à cette fin est funeste et nous empêche de comprendre que nous sommes faits justice de Dieu en Christ. Il est également funeste de supprimer l’intercession quand nous avons connu Christ comme notre justice parfaite : on fait ainsi de cette justice une froide sécurité dans laquelle le cœur n’entre pour rien, et on détruit dans l’âme le profond et doux sentiment du constant amour de Christ pour nous et de notre dépendance de l’exercice journalier de cet amour.
Le plus grand nombre des chrétiens, je viens de le dire, n’étant pas assurés de l’amour parfait de Dieu en justice, vont à Christ pour obtenir de Lui qu’Il se charge de leur cause et intercède auprès de Dieu pour eux, afin de mettre toutes choses en règle. Sans qu’ils s’en rendent compte et qu’ils veuillent l’avouer, ils voient de fait l’amour en Christ et le jugement en Dieu ; et ils vont à Christ pour qu’Il émeuve Dieu à avoir compassion, miséricorde et pardon. Il est très naturel que nous passions par un tel état d’âme, particulièrement avec l’enseignement que nous entendons habituellement autour de nous : mais dans cet état, nous ne sommes pas réellement dans notre position de chrétiens. L’amour de Dieu est la source de tous nos privilèges et des espérances de notre salut, et cet amour s’exerce pleinement en justice, à cause de l’œuvre de Christ dans laquelle Dieu a été glorifié. La grâce règne par la justice (Rom. 5, 21) ; nous sommes la justice de Dieu en Christ (2 Cor. 5, 21), nous n’avons pas à la chercher. Christ est notre justice, toujours et constamment. Cette justice est aussi parfaite qu’elle est constante et perpétuelle, et aussi constante et perpétuelle qu’elle est parfaite. Dieu a été — Il est parfaitement glorifié à cet égard, et Son amour se répand librement et justement sur le chrétien comme sur Christ Lui-même. La position est une position ferme et établie devant Dieu, une position et une relation qui ne changent pas. L’intercession de Christ est fondée sur elle. En parlant, un peu plus bas, de l’épître aux Hébreux, nous verrons jusqu’à quel point l’acte qui a complété ce fondement de notre place devant Dieu a été l’acte du sacrificateur.
D’un autre côté, il est également vrai que nous sommes de pauvres, faibles créatures sur la terre, qui faillissons souvent (Jacq. 3, 2). Notre place, notre seule place devant Dieu est dans la lumière, comme Lui est dans la lumière, par la justice divine dont j’ai parlé plus haut, et c’est là que nous sommes acceptés dans cette justice ; mais notre place actuelle est dans un monde de tentation, dans un corps qui n’est pas racheté ; nous sommes des êtres faibles et dépendants, sujets à faillir, vivant dans un monde où nous avons besoin de grâce — de miséricorde et de grâce pour avoir du secours au temps opportun. Les meilleures affections aussi sont éveillées et mises en jeu par nos besoins journaliers, par la confiance de chaque jour et le sentiment journalier de la fidélité du Seigneur, non pas par le sentiment de notre sécurité, quoique celui-ci soit le fondement et la base de l’autre, et qu’il lui soit nécessaire et provoque par lui-même l’action de grâce et la louange. Mais il est évident que la dépendance et tout ce qui s’y rattache n’est pas provoquée et entretenue par le fait que nous sommes parfaits et parfaits à perpétuité. Si je perds le sentiment que je suis ainsi parfait devant Dieu à perpétuité, mes craintes seront serviles, je ne regarderai à Christ que pour ma sécurité, lorsque Dieu est un juste juge. Si je perds le sentiment de ma dépendance dans la faiblesse, je suis satisfait de me savoir en sûreté ; c’est mon aspiration la plus haute, que je n’atteins même jamais après tout ; et les meilleures affections et les grâces les plus excellentes restent endormies.
Considérons maintenant en quoi consiste réellement l’intercession, et quelle est la place qui lui appartient dans le système chrétien.
L’intercession de notre Seigneur revêt deux caractères différents : Christ est Sacrificateur devant Dieu, et Avocat auprès du Père. Sous ces deux caractères, Il comparaît devant Dieu ou devant le Père pour nous, afin que nous recevions la bénédiction dont nous avons besoin ; mais le premier de ces caractères est plus général que l’autre. Comme Sacrificateur, Christ est devant Dieu, en sorte que nous approchons de Dieu et que nous pouvons nous approcher, Il intercède en même temps pour nos besoins. Comme Avocat auprès du Père, Il intervient davantage en vue du rétablissement de la communion.
Quelques difficultés préliminaires se présentent ici. Il y a des personnes qui nient que le mot d’intercession implique l’intercession ou l’intervention active en notre faveur ; ils veulent que l’expression grecque « ἐντυγχάνω » désigne seulement la présence personnelle ou l’apparition du Seigneur devant Dieu et notre Père pour nous. Mais c’est là une erreur. Ce verbe est employé pour exprimer l’intervention ou l’intercession active. Ainsi nous lisons dans l’Écriture que Christ est toujours vivant pour faire cette œuvre (Héb. 7, 25). Assurément, Il n’est pas toujours vivant, afin d’être présent seulement entre Dieu et nous. L’épître aux Romains, chapitre 8, 34 ne nous dit-elle pas aussi : « Qui aussi est à la droite de Dieu, qui aussi intercède pour nous » ? Et ce qu’elle dit un peu plus haut dans le même chapitre, relativement au Saint Esprit, versets 26-27, montre clairement que l’expression dont il s’agit est employée dans le sens simple et ordinaire d’une intercession active en notre faveur : « Il intercède (ὑπερεντυγχάνει) pour nous par des soupirs inexprimables ». Or le Saint Esprit n’apparaît en aucune manière dans la présence de Dieu pour nous ; mais Il intercède, Il plaide en nous par des soupirs inexprimables. Cet emploi du mot « ἐντυγχάνω » est donc incontestable.
D’autres personnes n’ont pas craint, quelque étrange que cela puisse paraître, d’avancer que l’épître aux Hébreux ne s’appliquait pas aux chrétiens, mais au résidu juif. Sans doute, il y a dans cette épître des déclarations qui peuvent, comme les branches d’un arbre fertile qui s’étendent par-dessus le mur, atteindre jusqu’à ces fidèles-là, pour leur profit et leur bénédiction ; mais l’épître est adressée à des chrétiens. En effet (et c’est là un argument qui suffit par lui-même, car l’épître en question est une lettre et non une prophétie), à qui l’épître fut-elle adressée lorsqu’elle fut écrite… à des chrétiens ou non ? Il n’y a pas d’hésitation possible : elle fut adressée à des chrétiens. Il n’y avait pas alors d’autre résidu juif à qui l’adresser que les chrétiens. L’erreur, dans laquelle on est tombé à cet égard, est venue de ce que l’épître ne se place pas sur le terrain ecclésiastique proprement dit, c’est-à-dire sur le terrain de l’union des saints avec Christ, mais qu’elle voit les saints sur la terre et Christ dans le ciel pour eux, à part, séparé d’eux, dans la présence de Dieu pour eux individuellement — non pas les saints assis dans les lieux célestes (comp. Éph. 1, 3-6, 22 ; 2, 5-7), mais les saints affligés, exercés et éprouvés dans le désert. L’épître est adressée aux saints frères d’alors, alors participants de l’appel céleste, Christ étant l’apôtre et le souverain sacrificateur de leur profession (Héb. 3, 1). Elle ne s’appliquait donc alors qu’aux chrétiens, car eux seuls jouissaient de cette position, et ne s’applique réellement jamais directement à qui que ce soit d’autre. Dieu amenait « plusieurs enfants à la gloire », et Christ est le capitaine et le chef de leur salut (Héb. 2, 10-11) : d’un bout à l’autre de l’épître nous retrouvons cette même vérité. Elle se rapporte à ceux qui furent alors faits participants du Saint Esprit et goûtèrent du don céleste (Héb. 6, 4-5) ; — ils avaient alors servi les saints ; alors accepté joyeusement l’enlèvement de leurs biens, sachant qu’ils avaient pour eux-mêmes dans les cieux des biens meilleurs et permanents (Héb. 6, 10 ; 10, 32-34). Je ne pense pas que personne puisse mettre en doute que ceux dont on pouvait alors dire ces choses, étaient des chrétiens, c’est-à-dire que c’est aux chrétiens et à eux seuls que l’épître s’adresse directement. Leur espérance était au-dedans du voile, où Christ était entré comme précurseur de l’écrivain et de ceux auxquels il écrivait (Héb. 6, 18-20). L’écrivain n’était-il pas un chrétien ? — Ils s’approchaient alors de Dieu, je suppose, comme croyants, c’est-à-dire comme chrétiens, et un souverain Sacrificateur élevé plus haut que les cieux leur convenait (Héb. 7, 26 ; 8, 2), parce qu’ils entraient là en esprit. Le chapitre 9 tout entier suppose une rédemption alors éternelle, un héritage éternel, les choses célestes elles-mêmes, et la comparution au temps d’alors de Christ dans le ciel, lorsque l’épître fut écrite, pour ceux à qui elle était alors adressée. Leurs consciences étaient purifiées (Héb. 9, 11-14), tandis que celles du résidu juif ne le seront que lorsqu’ils verront Christ apparaître de nouveau. Christ est assis à perpétuité à la droite de Dieu (Héb. 10, 12) ; et le chemin des lieux saints était ouvert pour eux alors par le chemin nouveau et vivant (Héb. 10, 19-22). Ils avaient à tenir ferme le commencement de leur profession sans chanceler (Héb. 3, 6, 14 ; 4, 14 ; 6, 11 ; 10, 23). Ils étaient des croyants, c’est-à-dire ceux qui avaient accès dans le saint des saints.
L’épître tout entière suppose que ceux à qui elle s’adresse étaient des croyants alors, qu’ils avaient une part connue dans les lieux célestes et que c’était là leur appel. Elle ne parle pas seulement de quelques-uns qui, ayant été mis à mort, auront une place dans le ciel (comp. Apoc. 6, 9-11 ; 20, 4) ; le ciel est la vocation de tous ceux à qui l’épître est adressée : c’étaient donc des chrétiens, des chrétiens juifs sans doute, mais des chrétiens. L’épître ne s’adresse qu’à ceux qui sont tels, alors même que, par le langage dont elle se sert, elle s’étende à ceux qui seront épargnés sur la terre, car il reste un repos pour eux.
Il est réellement incroyable qu’on puisse lire l’épître aux Hébreux et ne pas s’apercevoir qu’elle parle à des chrétiens ; et en m’exprimant ainsi je ne veux pas dire que les chrétiens puissent seulement profiter de ce qui était adressé à d’autres, comme nous faisons de l’Ancien Testament ; mais je veux dire que l’épître a été adressée à des chrétiens et seulement à des chrétiens, seulement à des personnes alors appelées au ciel et dont la profession était telle. J’admets volontiers que l’épître n’est pas adressée à l’Église comme telle : elle y perdrait toute sa valeur et l’Église également, parce que l’Église est unie à Christ dans le ciel, et qu’ici les chrétiens ne sont pas envisagés à ce point de vue et que l’épître ainsi serait hors de place, puisqu’elle enseigne que Christ est pour nous dans le ciel pendant que nous marchons et combattons sur la terre, faisant de notre condition terrestre l’occasion de la grâce céleste. Mais la grâce d’en haut qui nous trouve dans une condition terrestre, tandis que nous sommes appelés au ciel, nous initie à la connaissance de l’amour, de la tendresse, de la sympathie, de la fidélité, qui se trouvent en Christ, et de l’intérêt qu’Il nous porte dans la condition et les circonstances où nous sommes placés ici-bas, ce que ne fait pas notre perfection en Lui. La grâce nous forme ainsi à la dépendance, à la confiance en Lui ; elle nous apprend à compter sur Sa fidélité, nous fait saisir l’intérêt qu’Il nous porte à chaque moment, et nous fait entrevoir le temps où nous Le verrons comme Il est, ce que ne fait pas notre présence en Lui dans le ciel.
Quant au passage de l’épître de Jean (1 Jean 2, 1-2) et à celui de l’épître aux Romains (chap. 8, 34), ils s’appliquent incontestablement aux chrétiens : la communion avec le Père et le Fils est assurément la part des chrétiens, et le chapitre 8 de l’épître aux Romains n’a pas besoin de commentaire à cet égard. Si on appliquait le passage, 1 Jean 2, 2, à d’autres qu’à des chrétiens, il s’appliquerait aux incrédules, mais on tomberait ainsi dans une vue tout à fait fausse de l’intercession. L’intervention du Seigneur comme avocat est donc fondée sur le fait que Jésus Christ le juste est l’Avocat, et qu’Il est la propitiation pour nos péchés. La divine et parfaite justice et la parfaite propitiation pour nos péchés nous ont placés dans la lumière, comme Dieu est dans la lumière, afin que nous marchions là ; et comme nous manquons — « si quelqu’un a péché » — cette justice et cette propitiation étant toujours devant Dieu, il n’y a et ne peut y avoir aucune pensée d’imputation ; la chose est impossible ; les péchés ont été portés et la justice subsiste. Toutefois Dieu ne peut pas tolérer le péché dans ceux qu’Il aime ; et ainsi, en vertu de Son œuvre et de ce qu’Il est notre justice devant Dieu, Christ intercède pour nous et l’âme est restaurée.
Ce fondement de l’œuvre de Christ comme avocat m’amène à parler du fondement analogue ou réellement pareil de la sacrificature. Sur la terre, Christ ne pouvait pas être sacrificateur ; mais il y avait une œuvre que le souverain sacrificateur accomplissait, en dehors, à proprement parler, de l’exercice de sa sacrificature qui avait lieu dans le sanctuaire, une œuvre qui posait le fondement pour cet exercice, une œuvre dans laquelle il était substitut et représentant du peuple, et qui constituait le fondement de ce qui était proprement son service sacerdotal pendant l’année, je veux dire le sacrifice du grand jour des expiations dans lequel le sang était placé sur le propitiatoire et les péchés confessés sur la tête du bouc azazel (voyez Lév. 16). Le réconciliation ou la propitiation pour les péchés du peuple était faite ainsi, et sur cette base reposait tout l’exercice de la sacrificature ; et à cette base, aussi bien qu’à la sacrificature, l’épître aux Hébreux se rapporte. Sa vie terrestre mettait Christ à même de sympathiser, quoiqu’Il soit maintenant dans le ciel ; et le sacrifice accompli sur la terre (en ôtant pour toujours, quant à la culpabilité, les péchés qu’Il avait portés) formait la base de l’intercession pour la bénédiction journalière et l’accès journalier auprès de Dieu par Lui. C’est pourquoi, en même temps qu’elle déclare expressément que, s’Il était sur la terre, Christ ne serait pas sacrificateur (chap. 8, 4), l’épître aux Hébreux dit (chap. 2, 17) : « Il a dû, en toutes choses, être rendu semblable à ses frères, afin qu’il fût un miséricordieux et fidèle souverain sacrificateur dans les choses qui concernent Dieu, pour faire propitiation pour les péchés du peuple ». Sur cette base reposent Sa miséricordieuse et continuelle sacrificature et Son intercession. Il est devenu impossible, à cause du sacrifice de Christ, que le péché nous soit imputé ; et Sa vie de souffrance et de tentation met Christ à même (parce qu’Il sait ce que c’est que de souffrir et d’être éprouvé) de secourir ceux qui sont tentés (Héb. 2, 17-18 ; 4, 15). C’est pourquoi, au chapitre 4, nous chrétiens, nous sommes exhortés à tenir ferme notre profession[2], « car nous n’avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse sympathiser à nos infirmités, mais nous en avons un qui a été tenté en toutes choses comme nous, à part le péché ».
Nous avons donc un sacrificateur auprès de Dieu et un avocat auprès du Père — qui est là, en vertu d’un sacrifice dans lequel Il a, une fois pour toutes, porté nos péchés, et est apparu pour abolir le péché par le sacrifice de Lui-même ; qui est là dans une « acceptation » parfaite, à laquelle nous avons part, Lui Jésus Christ le juste, la propitiation pour nos péchés, capable de sauver entièrement (litt. : jusqu’à l’achèvement) ceux qui s’approchent de Dieu par Lui, étant toujours vivant pour intercéder pour eux, qui même est à la droite de Dieu après qu’Il a fait la purification de nos péchés, un grand souverain Sacrificateur assis à la droite de la Majesté dans les cieux (Héb. 8, 1-2 ; 9, 11-14, 24-28 ; 10, 5-22 ; 1 Jean 2, 1-2) !
Ceci nous conduit à un autre point : Nous ne nous approchons pas du souverain sacrificateur, mais nous venons à Dieu par Lui, devant un trône de grâce. Je ne doute pas que la condescendante bonté de Dieu a pu user de patience envers la faible foi qui, en sincérité de cœur, s’approchait de Christ comme sacrificateur ; mais tel n’est pas l’enseignement de la Parole de Dieu. Christ apparaît dans la présence de Dieu pour nous ; nous nous approchons de Dieu par Lui. Il n’y a à cet égard ni incertitude, ni exception dans l’Écriture. Ce n’est pas davantage à la suite de notre retour vers Dieu ou de notre repentance, que Christ intercède ; mais Il intercède pour nos infirmités, nos besoins et nos péchés. Sa grâce est en exercice, Son activité ayant cette grâce pour source, et ayant Son œuvre et Sa position auprès de Dieu en justice pour base, comme nous l’avons vu.
Si nous nous approchons de Christ comme nous venons de dire, nous n’avons jamais encore appris l’amour de Dieu, ni notre place, ni notre relation avec Dieu dans la lumière, comme Lui est dans la lumière, pour parler le langage de Jean, ni la pleine liberté d’entrer dans les lieux saints par le voile déchiré, pour parler comme l’épître aux Hébreux ; nous n’avons pas appris encore le « aucune condamnation » pour ceux qui sont en Jésus Christ, ni de séparation, du chapitre 8 de l’épître aux Romains.
La sacrificature de Christ, Son intercession et Son œuvre comme avocat, supposent que nous avons notre place dans le ciel, et que nous avons été ou que nous sommes en danger d’être inconséquents à ce privilège sur la terre. Or d’un côté, Dieu ne peut tolérer aucun mal dans ceux qui sont en relation avec Lui, quelque agréables qu’ils soient d’ailleurs devant Lui ; il faut qu’Il les ait devant Lui avec leurs pieds et leurs cœurs nets, parce qu’ils sont tels. D’un autre côté, Il les exerce ici-bas ; et Christ, d’une manière particulière, entre dans toutes leurs souffrances et leurs infirmités, recherchant leur progrès, pourvoyant à leur faiblesse et obtenant miséricorde, purification et restauration pour leurs fautes. Toute cette intervention de Christ n’a rien à faire avec notre acceptation devant Dieu, mais elle a pour but de nous garder ou de nous ramener à la jouissance actuelle de la communion avec Dieu, dans cette relation dans laquelle nous nous trouvons vis-à-vis de Lui. La sécurité n’est pas la fin, mais le commencement du christianisme. Le christianisme nous place en relation et en communion avec Dieu, tel qu’Il est, et avec notre Père et Son Fils Jésus Christ. La sacrificature et l’œuvre d’avocat nous maintiennent, nous aident, nous ramènent là, alors que notre relation, selon la justice divine, subsiste déjà, mais que nous nous trouvons dans une scène de tentations et d’épreuves qui tend, par notre faiblesse et par les exercices d’âme, par lesquels nous devons y être formés plus intimement, à interrompre cette communion. Mais ce n’est pas nous qui obtenons que notre grand souverain Sacrificateur intervienne pour nous : c’est Lui qui le fait dans Sa grâce, de Son propre mouvement. Ainsi, dans un cas où Il anticipait Sa sacrificature, mais où Il la manifestait dans ses principes, lors de la chute de Pierre, nous voyons Christ prier pour Pierre avant que celui-ci eût même commis le péché, et demander exactement ce dont Pierre avait besoin, non pas qu’il ne fût pas criblé, mais que sa foi ne défaillît pas et qu’il ne tombât pas dans le désespoir. Au moment convenable, par la propre grâce et l’action de Christ, le cœur de Pierre est touché, et Pierre pleure amèrement sur sa faute. Or ce retour de Pierre n’est pas la cause, mais l’effet de l’action de Christ. Plus tard, le Sauveur restaure entièrement l’âme de Son disciple. Pareillement, quand il s’agit de l’œuvre d’avocat, nous lisons dans la première épître de Jean : « Si quelqu’un a péché », non pas : Si quelqu’un se repent, « nous avons un avocat auprès du Père ». Il en est de même au chapitre 13 de l’évangile du même apôtre, où l’application du principe nous est présentée : Christ, déjà reconnu Fils de Dieu, Fils de David, Fils de l’homme, prend maintenant Sa place en haut dans le ciel, et montre qu’Il est encore notre serviteur pour nous rendre nets, afin que nous ayons une part avec Lui là où Il est, puisqu’Il ne pouvait pas demeurer avec nous ici-bas. C’est de l’action de Christ qu’il est question, non pas de quelque chose que les disciples recherchent : ceux-ci, nets en tant que lavés par la Parole, sont l’objet du service de Christ ; Il lave leurs pieds (étant mû par Sa propre grâce) de la boue qui s’y est attachée dans leur marche.
Remarquez de plus que l’intercession de Christ s’exerce en faveur de ceux qui sont en relation avec Lui : « Je ne fais pas des demandes pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés », et Il ajoute : « Je ne fais pas seulement des demandes pour ceux-ci, mais aussi pour ceux qui croient en moi par leur parole ». Dans l’épître aux Hébreux, il est également évident que Christ est sacrificateur pour ceux qui sont en relation avec Dieu, seulement tout se rapporte davantage à la profession ou au peuple que dans l’épître aux Romains ou dans les écrits de Jean : toutefois l’épître aux Hébreux parle de nous. Dans ce qu’elle nous dit de l’activité de Christ pour nous, elle parle moins de nos manquements que Jean. Son grand objet est de présenter la nature et le caractère particuliers de la sacrificature, mise en contraste avec ce à quoi la loi se rattachait, savoir la disparition de la sacrificature terrestre et l’établissement de la sacrificature céleste. Toutefois il n’est pas question de la pensée que ce soit au sacrificateur qu’on aille. Nous allons à Dieu par Lui ; nous nous approchons avec une pleine liberté du trône de la grâce, en vertu de ce que Christ est devant ce trône ; mais il n’y a pas trace de la pensée que nous allions à Lui, mais bien que nous nous approchons avec confiance de Dieu Lui-même. Il n’y a pas trace davantage, dans toute l’épître, de la pensée que nous obtenions la justice par le moyen de la sacrificature ; elle ne laisse à ce sujet aucune incertitude : « Par une seule offrande, il a rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés », et ils sont sanctifiés par l’offrande également (Héb. 10, 14, 10). Il s’est offert une fois pour toutes (Héb. 7, 27 ; 9, 25-26). Sa sacrificature est pour ceux qui sont tentés. Il est à même de les secourir, étant toujours vivant pour intercéder pour eux (Héb. 7, 23-25). Il est touché par le sentiment de nos infirmités, ayant été tenté comme nous, à part le péché (Héb. 2, 17-18 ; 4, 15-16). Il vient en aide à ceux qui sont sanctifiés (qui sont rendus parfaits par l’offrande de Christ une fois pour toutes) pendant qu’ils traversent le désert ; Il est Celui par qui ils s’approchent de Dieu.
La sacrificature de Christ s’exerce donc afin de nous faire trouver miséricorde et secours devant le trône de la grâce. Ce besoin, que nous avons individuellement de la miséricorde, ressort d’une manière remarquable du fait bien connu que les épîtres, adressées à une personne individuellement, font mention de la miséricorde, tandis que celles qui sont adressées à des assemblées n’en parlent pas (comp. Rom. 1, 7 ; 16, 24 ; 1 Cor. 1, 3 ; 2 Cor. 1, 2 ; etc. ; 1 Tim. 1, 2 ; 2 Tim. 1, 2 ; Tite 1, 4 ; etc.).
Tout cela rend très simple pour nous le caractère de l’intercession de Christ, de Sa sacrificature et de Son intervention comme avocat. Elles s’exercent toutes en faveur de ceux qui sont en relation avec Dieu, et ne sont pas là pour les y amener. Elles s’exercent pour ceux qui sont déjà la justice de Dieu en Christ, et qui sont assis dans les lieux célestes en Lui. Christ intervient comme avocat en faveur de ceux qui marchent dans la lumière, comme Dieu est dans la lumière. Son intercession est pour ceux qui ont Dieu pour eux, et à la charge desquels nul ne peut rien mettre ; elle est là pour leurs chutes et leurs infirmités dans leur sentier ici-bas, non pas pour leur obtenir une place dans les lieux célestes, mais pour faire face, lorsque nous sommes là, à toutes nos inconséquences dans notre marche au travers du désert, pour nous secourir dans nos infirmités, et nous mettre à même, pauvres et inconséquents que nous sommes de fait ici-bas, de nous approcher avec confiance du trône de la grâce pour trouver miséricorde et secours au temps opportun (Héb. 4, 16).
Ainsi l’intercession maintient vivant en nous le sentiment de notre dépendance et en même temps d’une confiance entière. Si Christ n’était pas là devant le trône, nous ne pourrions pas nous en approcher avec cette confiance. S’il s’agissait encore d’obtenir la justice, il s’agirait de culpabilité et d’acceptation, non pas de secours. Si nous venions à Christ, le Sacrificateur, cela impliquerait que nous ne pouvons pas aller à Dieu, ce qui serait exactement le contraire de ce que le christianisme enseigne. Mais il ne s’agit de rien de tout cela. Nous allons hardiment à Dieu (Héb. 7, 19), parce que Christ est devant Lui comme notre souverain Sacrificateur. Nous n’avons aucune pensée que rien puisse nous être imputé ; mais le fait que nous sommes la justice de Dieu en Lui, ne nous fait pas tenir peu de compte de nos inconséquences dans le chemin que nous traversons. Lui en prend connaissance et est notre Avocat, en vertu de ce qu’Il est le Juste et la propitiation pour nous. Le sentiment personnel de la faute est ainsi maintenu, renforçant, non pas affaiblissant le sentiment de la grâce, et cependant notre acceptation devant Dieu n’est jamais mise en question, de manière à nous ramener en arrière et à nous replacer sous la loi, ou à mettre jamais en question la justice de Dieu, ou à affaiblir jamais en nous la conscience de notre relation avec Dieu. Tout est fondé sur ces choses ; et en même temps la sainteté de Dieu est pleinement maintenue en rapport avec notre conduite, et nous sommes gardés dans un vrai esprit de confession quand il nous arrive de faillir ; notre jugement intérieur quant au bien et au mal est conservé vivant, et croît sans la moindre trace de crainte servile, et une bienheureuse confiance est maintenue dans l’âme à cet égard.
J’ai déjà fait remarquer la différence qu’il y a entre l’intervention de Christ comme avocat, en vue de nous ramener ou de nous maintenir dans la communion avec le Père, et la sacrificature qui s’exerce en vue du privilège que nous avons de nous approcher de Dieu, et du secours dont nous avons besoin comme hommes. Mais relativement à leur fondement et à leur nature, les deux offices, l’œuvre d’avocat et la sacrificature, sont les mêmes, ayant pour base la relation positive dans laquelle nous nous trouvons avec Dieu en justice, et s’appliquant à notre marche dans la faiblesse ici-bas, quand nous sommes dans cette relation. Si Jean nous montre l’Avocat auprès du Père lorsque nous avons péché, l’épître aux Hébreux nous présente Celui qui sait sympathiser à toutes nos infirmités, qui peut être touché par le sentiment de ce qu’elles sont, quoique maintenant toute puissance dans le ciel et sur la terre Lui soit donnée. Il est continuellement occupé de nous et de notre état, et ainsi le saint jugement du péché est maintenu dans notre âme, et en même temps le sentiment de la grâce reste intact, la confiance dans l’invariable amour de Celui qui a été rendu en toutes choses semblable à Ses frères, afin qu’Il fût un miséricordieux et fidèle souverain sacrificateur. Les affections de la dépendance et de la confiance sont ainsi maintenues et cultivées, et cela, non pas comme si nous recourrions au sacrificateur dans une difficulté, en nous précipitant vers Lui pour avoir du secours, mais dans la libre et bienheureuse activité et l’exercice plein de sollicitude de Son propre amour : non pas qu’il se ralentisse quand nous revenons dans un juste sentiment d’humiliation ; car si nous nous sentons justes, c’est le fruit de Sa précieuse activité en grâce.
Je n’ajoute rien de plus. Mon but n’était pas de m’étendre sur cette grâce et sur les fruits qu’elle produit en nous, mais de faire ressortir la place scripturaire de la sacrificature de Christ et de Son œuvre d’avocat. J’ai voulu montrer que toutes deux sont fondées sur l’établissement de la justice divine et l’accomplissement de la propitiation, et sur la place que celles-ci nous ont faite devant Dieu, ni l’un ni l’autre de ces offices ne voilant ces choses, mais au contraire étant fondés sur elles, et ayant pour objet de concilier notre faiblesse et nos manquements d’ici-bas avec cette place glorieuse, en sorte qu’elle ne soit pas incertaine en grâce, et qu’en même temps rien ne soit toléré qui soit incompatible avec elle, bien que rien ne puisse être imputé. Ainsi, au lieu d’une froide et insensible certitude quant au salut, les sentiments de dépendance, de confiance et d’affection s’unissent dans le cœur à la sécurité en Lui qui est notre objet, jusqu’à ce que nous entrions là où l’exercice de ces deux offices ne sera plus nécessaire.
- ↑ Publié dans le Messager Évangélique de 1869.
- ↑ Et remarquez ici, comme toute l’épître le démontre, que ceci est en contraste avec retourner au judaïsme, tant est éloignée la pensée que l’épître soit seulement applicable au résidu juif.