Écho du Témoignage:Le cantique de Salomon/Partie 5

De mipe
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Chapitre 5

La belle et bien-aimée Sulamithe n’a pas plutôt invité son seigneur à venir dans son jardin, et à manger de ses fruits rafraîchissants, qu’il répond : « Je suis venu ». Il ne dit pas : « Je puis venir, ou je viendrai », mais « Je suis venu ». Pendant qu’elle l’invite encore, il est déjà présent. Son cœur est toujours prêt — faisant le guet pour ainsi dire, afin d’ouïr le cri de ses bien-aimés. Oh ! heureuse l’épouse — heureux le peuple qui se trouvent dans un cas pareil. Avoir le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, attendant, se tenant prêt à ouïr quand ils L’appellent ! Les fruits de l’Esprit Lui sont toujours agréables. Il les trouve maintenant riches et variés, et Il jouit vivement de ce banquet de l’amour.

Verset 1 — « Je suis venu dans mon jardin, ma sœur, mon épouse ; j’ai cueilli ma myrrhe avec mes drogues aromatiques ; j’ai mangé mes rayons de miel avec mon miel ; j’ai bu mon vin et mon lait ; mes amis, mangez, buvez, faites bonne chère, mes bien-aimés ».

Ces divers fruits peuvent représenter les divers résultats des opérations de l’Esprit dans les âmes par la vérité. De l’une peuvent couler des larmes aussi amères que la myrrhe, sous le sentiment profond d’une ancienne chute. L’Esprit de Dieu ayant appliqué avec puissance la vérité à la conscience, le cœur est brisé ; ses fontaines profondes sont ouvertes, et les larmes les plus amères de l’angoisse coulent comme un fleuve. Et maintenant, tout se produit devant Dieu dans une confession sans réserve. Dans la lumière pénétrante de la sainte présence de Dieu, on perd de vue les causes secondes. « J’ai péché contre toi, contre toi proprement, et j’ai fait ce qui déplaît à tes yeux ». Voilà les cabinets secrets où l’âme doit être avec Dieu. Quoique le péché de David eût été contre son prochain et contre la société, il n’en dit pas moins : « J’ai péché contre toi, contre toi proprement ». Tout péché est contre Dieu, et c’est une chose pénible d’avoir à faire avec Dieu au sujet de notre péché. Mais il nous faut aller tout droit dans le cabinet de la présence du Saint Esprit juste tels que nous sommes, si nous voulons être délivrés du fardeau du péché : ce n’est que là que nous serons pleinement soulagés. Il faut que le pénitent en pleurs dépose la multitude de ses péchés côte à côte avec la multitude des tendres compassions de Dieu. C’est ainsi seulement qu’il apprend tout ce que signifie cette parole : « Où le péché abondait, la grâce a surabondé ». Le Père rencontre Son enfant, béni soit Son nom, dans la grâce infinie de Son cœur, sur le fondement du sang précieux de Jésus. De même que le flot qui monte de l’immense océan, se hâte à la rencontre du flot qui descend, l’embrasse et le déborde de toute part, ainsi la grâce vient au-devant du pécheur repentant et efface pour toujours toute trace de son péché. Il se peut que, semblable à un fleuve, son cours ait été long et profond, mais désormais, impossible d’en saisir même la moindre trace.

Amour divin, tu as englouti mes péchés dans tes vastes et profonds abîmes ; mon iniquité est couverte ; je suis délivré de toute condamnation ; tandis que le sang de Jésus fait retentir la terre et les cieux de ce cri d’amour : Grâce ! Grâce entière ! Grâce illimitée !

Ayant passé par l’expérience décrite dans le psaume 51, David pouvait célébrer et adorer Dieu avec un cœur plein de joie dans les accents du 103 : « Mon âme, bénis l’Éternel, et que tout ce qui est au-dedans de moi bénisse le nom de sa sainteté. Mon âme, bénis l’Éternel, et n’oublie aucun de ses bienfaits. C’est lui qui te pardonne toutes tes iniquités, qui guérit toutes tes infirmités, qui garantit ta vie de la fosse, qui te couronne de gratuité et de compassions ». Ainsi la majesté, la sainteté, et la fidélité de Dieu avaient été maintenues, le péché avait été jugé dans la lumière, la conscience avait été purifiée, le cœur rendu heureux, la communion pleinement rétablie, et l’âme établie dans la grâce. Les larmes peuvent avoir été plus amères que la myrrhe, mais les résultats sont pour le cœur de Christ plus doux que le miel, et plus parfumés que toutes les drogues aromatiques.

Le Seigneur trouve toute sorte de fruits dans les assemblées des siens. Il a la plus entière communion avec tout ce qui est de l’Esprit, et en jouit avec délices. « J’ai cueilli… J’ai mangé… J’ai bu ». Il a communion avec toutes les espèces diverses. Il n’en dédaigne aucune. Dans le disciple avancé, Il peut trouver ce qui indique la force et la vigueur du vin, tandis que dans le petit enfant nouveau-né, il peut y avoir la douce simplicité du lait. Un incrédule, vexé et irrité de la charmante simplicité d’une enfant convertie qui parlait de la joie et du bonheur d’être avec Jésus pour toujours, lui dit : « Mais si Jésus est dans l’enfer ? ». « Ah ! » répliqua la chère petite, « ce ne serait pas l’enfer, s’il y était ». Combien cette parole est simple, et pourtant combien irréfutable ! Comme elle honore le nom de Jésus — qu’elle est rafraîchissante pour Son cœur ! Qu’as-tu pour ton Seigneur, ô mon âme ? Que peut-Il cueillir de toi — que peut-Il manger — que peut-Il boire chez toi ? Quoi de plus doux que l’humilité ? Qu’est-ce qui honore plus le Seigneur qu’une complète dépendance de Lui ? Quoi de plus agréable à Son cœur que le désir continuel, croissant, de glorifier Dieu ?

Des hôtes nombreux auront part à ce souper royal, et entreront dans ses joies. Nombreux, fort nombreux, sont les « amis » de l’Époux. Et au jour de Sa gloire, ils entreront tous dans Sa joie. Jour merveilleux, jour longtemps désiré de la gloire céleste et de la gloire terrestre ! Tous les cœurs seront atteints et émus de cette joyeuse invitation : « Mes amis, mangez, buvez, faites bonne chère, mes bien-aimés ». Les « branches naturelles » longtemps retranchées du tronc de la promesse, seront, comme dit l’apôtre, greffées de nouveau. « En ce jour-là » — le jour du rétablissement d’Israël — « l’Éternel fera que Jacob prendra racine, Israël boutonnera et s’épanouira, et ils rempliront de fruit le dessus de la terre habitable » (És. 27). Quel banquet sera alors préparé pour toutes les nations par Israël rétabli ! Le dessus de la terre habitable sera rempli de fruit. « Et l’Éternel des armées fera à tous les peuples, en cette montagne, un banquet de choses grasses, un banquet de vins purifiés, un banquet, dis-je, de choses grasses et moelleuses, et des vins sans aucune lie bien purifiés » (És. 25). Et encore : « et il arrivera, en ce temps-là, que je répondrai, dit l’Éternel, que je répondrai aux cieux, et les cieux répondront à la terre, et la terre répondra au froment, au bon vin et à l’huile, et eux répondront à Jizreël. Puis je la sèmerai pour moi en la terre » (Os. 2). Ici il y a un changement de figure : ce n’est plus de greffer, mais de semer, qu’il s’agit, comme si Dieu allait opérer sur la terre une chose entièrement nouvelle.

« Nous savons, par le Nouveau Testament », dit l’auteur d’un ouvrage récent, « qu’en ce jour-là » « les cieux » seront occupés par Christ et les saints glorifiés. Jéhovah répondra aux cieux, « et les cieux répondront à la terre ». Christ, en qui toutes choses, tant ce qui est aux cieux que ce qui est sur la terre, seront réunies, sera Celui auquel s’adressera la prière de tout ce qui sera sur la terre, comme ce sera par Lui et par Ses saints glorifiés que la bénédiction sera universellement administrée. « Et la terre répondra au froment, au bon vin et à l’huile ». Alors plus d’indigence, plus de disette. La voix de plainte aura cessé de se faire entendre dans les rues. Le gémissement universel de la création se sera tu, et à sa place retentiront de toutes parts les hymnes de la gratitude et de la louange. « Et eux répondront à Jizreël ». Or, Jizreël, comme les savants nous l’apprennent, signifie : « la semence de Dieu », et cette interprétation du mot est confirmée par ce qui suit immédiatement : « puis je la sèmerai (Israël) pour moi en la terre »… Il y aura une chaîne non interrompue de bénédiction, du trône de Jéhovah, la grande source de tout, à la terre pour la jouissance, par le genre humain, de toutes les bénédictions de cette vie ; et la place occupée dans cette merveilleuse chaîne par Israël restauré, est celle de Jizreël, la semence de Dieu, semée, par Jéhovah et pour Lui, en la terre, et remplissant de fruit la face du monde. Jéhovah — les cieux, occupés par Christ et l’Église dans la gloire — la terre — Israël rétabli, ou Jizreël, la semence de Dieu — la bénédiction universelle sur la terre, même jusqu’à l’abondance du froment, et du vin et de l’huile, pendant que la guerre et la violence ont pris fin. « Alors la gloire de l’Éternel sera manifestée, et toute chair ensemble la verra ». Louange, louange éternelle à Celui qui seul fait des choses merveilleuses ! Que toute la terre soit remplie de Sa gloire.

Oh ! quel cercle de bénédiction nous est présenté ici ! Considère-le bien, ô mon âme, et fais-en le sujet de tes méditations. Porte tes regards en avant sur le jour heureux où Celui qui a été si longtemps absent sera de retour, et dira aux oreilles de Ses saints qui l’attendent : « Je suis venu » — « Je suis venu dans mon jardin, ma sœur, mon épouse ». Alors les promesses faites aux pères seront accomplies dans leurs enfants, conformément à la parole du Seigneur. Jéhovah dans les plus hauts cieux — Christ et Ses saints glorifiés dans les cieux qui sont rattachés à la terre — puis Israël rétabli dans la terre sainte et toutes les nations de la terre, liés ainsi ensemble par une glorieuse chaîne de bénédiction universelle ! Oh ! quel cercle de gloire ! Quel cercle « d’amis » ! Quel banquet d’amour ! Et quel accueil de radieuse allégresse de la part de Celui qui est « le Seigneur de tous » ! — « Mes amis, mangez, buvez, faites bonne chère, mes bien-aimés ».

Verset 2 — « J’étais endormie, mais mon cœur veillait ; et voici la voix de mon bien-aimé qui heurtait en disant : Ouvre-moi, ma sœur, mon épouse, ma grande amie, ma colombe, ma parfaite ; car ma tête est pleine de rosée, et mes cheveux de l’humidité de la nuit ».

Dans cette triste confession de l’épouse, nous est présentée une expérience que font fréquemment beaucoup de croyants, parmi les chrétiens aussi bien que parmi les Juifs, et qui est bien digne de notre patiente méditation. La plupart des chrétiens sont beaucoup plus occupés d’eux-mêmes et de leurs sentiments variables que de la Parole de Dieu. C’est là pour l’âme une source abondante de troubles et de perplexités sans fin. Qu’il arrive souvent à des chrétiens de se hâter de conclure que Christ n’est plus à leur égard ce qu’Il était autrefois, lorsqu’ils éprouvent que leurs sentiments ont changé ! Ils jugent du Seigneur par leurs sentiments à eux, au lieu de croire en Lui conformément à Sa propre Parole. C’est là regarder au moi, au lieu de regarder à Christ, et être gouverné par les sentiments, au lieu de l’être par l’immuable vérité de Dieu.

Il y a à peine quelques heures, pouvons-nous dire, en suivant l’ordre de notre chapitre, l’épouse se trouvait dans la pleine joie de la présence de son seigneur. Elle était alors rayonnante et heureuse, comme certains chrétiens dans le plein courant d’une bonne réunion. Mais le souper fini, et les hôtes retirés, elle se retire aussi pour se reposer. Bientôt hélas, il survient dans ses sentiments un changement qui la trouble fort. « J’étais endormie, mais mon cœur veillait ». Elle est inquiète, triste, malheureuse. Son cœur soupire après Christ, mais elle n’est pas disposée à se donner de la peine pour Lui. Quel triste, déplorable état de choses, quand le bien-aimé Jésus doit frapper à la porte ! Mais c’est là un cas qui n’est pas rare, tout en étant généralement sincère de cœur. Le croyant peut être tombé dans un état d’assoupissement et de sommeil, où les devoirs spirituels deviennent un fardeau, et sont, ou bien entièrement négligés, ou bien accomplis avec nonchalance. Misérable état d’âme, que celui qu’exprime cette parole : « J’étais endormie, mais — mon cœur veillait » ! Il est bon de considérer les deux côtés de ce « mais ». Elle n’est ni endormie, ni éveillée : d’un côté, c’est une conscience endormie ; de l’autre, un cœur vigilant. Elle ne peut trouver ni paisible repos, ni rafraîchissement. Et il est bon qu’il en soit ainsi quand nous devenons indifférents aux choses du Seigneur. Mais quel tableau de milliers et de dix milliers de serviteurs qui devraient être sereins, heureux, et toujours prêts pour toute œuvre dans le service de Christ et des âmes immortelles !

Nous arrivons maintenant à l’heureux et brillant côté de cette scène remplie d’instruction. Le Seigneur a-t-Il changé parce qu’elle est changée ? Dans son aveuglement, l’incrédulité dirait hardiment que oui, et alors suivraient d’indignes pensées à l’égard de Christ, avec des doutes et des craintes sans fin ; quand on se laisse guider par ses pensées intimes, les paroles de Christ ne comptent pour rien. Mais la froideur et l’indifférence de l’épouse ne L’ont-elles réellement pas changé le moins du monde à son égard ? L’amour que Christ lui porte ne change jamais un instant, quelles que soient ses chutes et son inconstance. Mais impossible de faire à la question une meilleure réponse que celle que nous trouvons dans les paroles mêmes de l’épouse endormie. Toute assoupie qu’elle est, elle reconnaît son coup et discerne sa voix ; et en outre elle dit : « Mon bien-aimé ». Son âme possède une vie qui doit toujours répondre à cette voix, nonobstant la chute. « Et voici », dit-elle, « la voix de mon bien-aimé, qui heurtait, disant : Ouvre-moi, ma sœur, ma grande amie, ma colombe, ma parfaite ; car ma tête est pleine de rosée, et mes cheveux de l’humidité de la nuit ». Ici, ô mon âme, tu as devant toi, face à face, sur la page de la vérité éternelle, le pauvre croyant toujours si prompt à varier, et le Sauveur qui demeure toujours le même. Quel est ton avis ? Vaut-il mieux dans un cas pareil s’en rapporter, relativement à la pensée de Christ, aux suggestions de l’esprit humain, ou à la Parole de Dieu si positive et si claire ? Que pourrait-il y avoir de plus clair et de plus précis que les paroles que nous avons là ? Considère-les bien, ô mon âme, et médite-les ; et puissent ton cœur ou ta conscience en réfléchir toujours la lumière bénie dans tous tes rapports avec des âmes en chute et dans la perplexité !

Quel patient, quel touchant amour respirent les paroles de l’époux à sa faible et fervente épouse ! Au lieu de se laisser influencer par le triste état de son âme, et de l’accuser d’ingratitude et d’indifférence envers lui, il s’adresse a elle dans des termes plus tendres que jamais : « Ouvre-moi », dit-il, « à moi — ton propre Messie — ton Bien-aimé. — Je suis Jésus — pourquoi me fermer la porte ? ». « Ouvre-moi, ma sœur, ma grande amie, ma colombe, ma parfaite ». Jamais jusqu’ici il ne l’avait appelée sa « parfaite ». Cette expression d’une grâce et d’une signification merveilleuse était réservée pour le jour de sa chute profonde. Jamais non plus il n’avait fait auparavant allusion à la pesante « rosée », à « l’humidité de la nuit » plus pesante encore, par lesquelles il avait été surpris dans son sentier de dévouement, d’amour pour elle. Oh ! quel appel ! Ses accents profonds redisent, comme un écho des ténèbres de Gethsémané et des solitudes du Calvaire, la grandeur d’un amour que rien ne pourrait détourner de son but. Mais, hélas ! l’appel du Seigneur n’a que peu d’effet sur la conscience toute endormie de l’épouse.

Y a-t-il en tout cela, qu’on me permette de le demander, quelque chose qui ressemble à un changement dans l’amour de Christ pour Sa bien-aimée en chute ? Qui pourrait le dire ? À moins que ce ne soit ceci, qu’Il révèle plus pleinement Son amour et qu’Il s’adresse à elle avec plus de tendresse. Ne lui parle-t-Il pas d’une manière bien propre à disposer son cœur à L’écouter ? Ne parle-t-Il pas comme si ce devait être pour Lui une grande faveur qu’elle Le reçût sous son toit ? Or, tel qu’un voyageur fatigué qui a perdu son chemin par une sombre nuit d’orage, il sollicite un abri. Une circonstance digne aussi d’être particulièrement notée, c’est que jamais auparavant dans une occasion quelconque, il ne lui a donné autant de titres de tendresse : « Ouvre-moi, ma sœur, ma grande amie, ma colombe, ma parfaite ». Tel est, ô mon âme, l’amour de Christ — l’amour de Christ pour une pauvre égarée. Considère-le attentivement. Il n’y a qu’un seul cœur qui ne change jamais. Oh ! comme nous devrions apprécier ce cœur — nous confier en ce cœur — compter uniquement sur ce cœur — et nous tenir toujours près de ce cœur invariable dans son parfait amour ! L’épouse assoupie n’accueille ce patient, merveilleux amour, qu’avec une grande indifférence, et ne lui répond que par les plus vaines, les plus frivoles excuses.

Verset 3 — « J’ai dépouillé ma robe, comment la revêtirais-je ? J’ai lavé mes pieds, comment les souillerais-je ? ».

Hélas, hélas, pauvre fille de Sion ! Comme sa chute la rend insensible aux droits de son propre Messie — de son miséricordieux Seigneur ! Quelle puissance le péché possède pour endurcir — pour tuer ! « C’est une chose mauvaise et amère que tu aies abandonné l’Éternel ton Dieu ». Une fois loin de la présence du Seigneur, qui saurait dire jusqu’où nous pouvons nous éloigner de Lui, ou par combien de chemins de traverse nous pouvons nous égarer ? La pensée de toute la carrière qu’on peut fournir dans cette fatale direction est effrayante à contempler. Et plus nous aimons nos frères, plus il y a de spiritualité dans le sentiment que nous avons de ce mal terrible, plus aussi sera profonde notre douleur à la vue d’une âme en chute. Qui est-ce qui a souci des âmes et de la gloire du Seigneur, et n’a pas pleuré en secret sur le déclin trop manifeste du zèle, sur l’engourdissement d’un esprit jadis ardent et plein de ferveur ; sur la disparition de ce temps où le cœur du pasteur était si encouragé, si reconnaissant, si plein d’espérance, si réjoui de voir dans les âmes une telle fraîcheur d’affection, un tel zèle pour Jésus ? On était de bonne heure à toutes les réunions, l’air rayonnant — le cœur joyeux — chaque parole sur Christ faisant sur l’âme l’effet d’une huile de joie ; et on ne se retirait de la réunion publique que pour méditer sur quelque vérité nouvelle, et jouir en secret d’une plus intime communion avec le Seigneur !

Ceux qui ont ressenti la douleur que fait éprouver l’égarement d’une âme aussi heureuse, savent seuls ce qu’elle est. De même que le feuillage d’été tout vert et plein de fraîcheur apparaît flétri et languissant après une violente tempête — brûlé comme si un fer rouge eût passé sur lui — tel hélas ! apparaît celui qui s’est laissé prendre à quelque piège subtil de l’ennemi. Tout change dans ses manières et ses habitudes. Oh ! qu’il est changé ! Bientôt ce n’est plus qu’irrégulièrement qu’il assiste aux réunions. Il s’imagine que tout le monde a changé à son égard, lent à apprendre que c’est en lui-même que se trouve le changement. Il se blesse, peut-être, de quelque petite chose, et se retire. Désormais sa place est vide — il s’en est allé — allé où ? Dans la plupart des cas, le Seigneur seul peut répondre à cette question. Non que nous devions être indifférents à cet égard, mais il n’y a que le Seigneur qui puisse suivre la trace de ses égarements. Son œil vigilant suit partout le pauvre égaré, et le cœur qui fut jadis percé pour ses péchés, ne peut jamais, non jamais, cesser de s’occuper de lui. Dans la sagesse de Son amour, Il peut lui laisser goûter l’amertume et la douleur de ses propres voies, et il en sera ainsi bientôt d’Israël ; mais le Seigneur a toujours à Sa disposition le moyen d’amener à la repentance, et de rétablir pleinement l’âme dans la communion avec Lui-même.

Verset 4 — « Mon bien-aimé a avancé sa main par le trou de la porte, et mes entrailles ont été émues à cause de lui ».

C’est là un mouvement dans la bonne direction. Le Seigneur soit loué ! Sa propre main a fait cela. Nous avons maintenant comme une réponse à son amour, faible, il est vrai, mais réelle. Le cœur est ému à cause de lui. Elle n’a jamais cessé de l’appeler « mon bien-aimé ». Quoiqu’il y ait chute, il y a affection pour le Seigneur. Mais lorsque l’âme n’est pas attentive aux coups miséricordieux, pleins de douceur, que l’amour d’un Sauveur frappe à la porte, Il a recours à d’autres moyens. Il sait quel est l’état du cœur et ce qui sera efficace pour le tourner vers Lui. « Dieu ne s’en enquerrait-il point, vu que c’est lui qui connaît les secrets du cœur ? » (Ps. 44, 21). Quelquefois, c’est par des moyens inattendus qu’Il atteint la conscience. La lumière arrivant nous fait voir où nous sommes et ce que nous sommes. La grâce triomphe. L’âme recherche maintenant la présence du Seigneur et le bonheur qui ne se trouve qu’en Lui. Cependant, il est possible qu’il s’écoule quelque temps avant qu’elle soit pleinement relevée de sa chute ; elle peut passer par beaucoup de douleur, d’humiliation, d’abattement, avant d’arriver au parfait repos de la présence de Christ. Confus et agités, comme quelqu’un qui vient de se réveiller de son sommeil, nous pouvons nous mettre à courir et à chercher le Seigneur là où Il n’a jamais dit qu’on Le trouverait. C’est le sanctuaire et non la ville qui est le lieu de Sa bénie et réjouissante présence.

Verset 5 — « Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé, et la myrrhe a distillé de mes mains, et la myrrhe franche de mes doigts, sur les garnitures du verrou ».

Y a-t-il des larmes douces aussi bien que des larmes amères ? Et peuvent-elles couler en même temps, mêlées les unes aux autres ? Quoi de plus amer au goût que la myrrhe ; quoi de plus embaumé à sentir que la myrrhe franche ? « La myrrhe a distillé de mes mains, et la myrrhe franche de mes doigts, sur les garnitures du verrou » (myrrhe signifie, qui coule, qui pleure). Maintenant l’épouse répond d’une manière nette et réelle au persévérant amour de son époux. « Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé ». Elle se relève de son état d’indolence spirituelle. Le sentiment du péché qu’elle a commis en n’ouvrant pas la porte quand il frappait, remplit son âme d’amertume, amertume mêlée toutefois du sentiment d’une affection profonde pour Celui qu’elle a méprisé. Arrivée à la porte à laquelle Il s’est tenu si longtemps, elle trouve tout embaumé du parfum de la personne du Seigneur ; elle saisit les garnitures du verrou, et « la myrrhe distille de ses mains, et la myrrhe franche de ses doigts »[1].

Maintenant qu’elle est réveillée, et qu’elle a un vif sentiment de ce qu’elle a été et de ce qu’elle a fait, la plus profonde douleur et les regrets les plus amers, mêlés à un amour tout pénétré d’adoration pour son Seigneur si miséricordieux et si bon, remplissent son âme et en débordent, comme quelqu’un qui, après une douloureuse chute, s’est décidé à revenir aux lieux de ses anciennes jouissances spirituelles. L’entrée bien connue — la vue de bien des visages si familiers — le son d’une voix non oubliée, et qui réveille encore un écho dans le cœur maintenant attendri — remplissent l’âme des plus profondes émotions. Tout rappelle à la pensée bien des jours écoulés du plus véritable bonheur. Et maintenant aussi, à l’abandon du cœur à l’amour de Jésus se mêlent les coups, les reproches de la conscience. Le cœur murmure en silence : « Seigneur Jésus, j’ai honte et je rougis devant toi. J’ai été misérable et malheureux toutes les heures de mes égarements. Oh ! que j’ai été ingrat ! Que j’ai été ingrat ! Est-il possible que j’aie mis cet opprobre sur ton nom béni ! Mon âme est toute honteuse d’elle-même, se fait les reproches les plus amers. Seigneur, puis-je être pardonné ? Mais, je t’en supplie ardemment, imprime plus profondément dans mon âme le sentiment du péché que j’ai commis en m’égarant, et celui de ta sainteté et de ta grâce à me ramener dans ton bercail. Rends-moi les joies de ton salut. Mon âme s’attache à toi ».

Verset 6 — « J’ai ouvert à mon bien-aimé ; mais mon bien-aimé s’était retiré, il avait passé ; mon âme se pâma de l’avoir ouï parler ; je le cherchai, mais je ne le trouvai point, je l’appelai, mais il ne me répondit point ».

Comme jadis Joseph chercha à exercer le cœur de ses frères de bien des manières, à cause du crime qu’ils avaient commis à son égard, ainsi dans les derniers jours, le vrai Joseph fera passer par des exercices profonds le cœur de Ses frères les Juifs, à cause de leur état devant Dieu. Mais pour avoir adopté envers eux une marche qui les éprouvait et les criblait douloureusement, Joseph n’avait pas moins d’amour pour ses frères. Son cœur était plein et prêt à éclater en expressions de l’affection la plus profonde, quand le moment convenable serait arrivé. Quel soulagement pour lui lorsque les écluses furent ouvertes et que l’amour longtemps contenu de son cœur put prendre son libre cours ! Il en sera ainsi du Seigneur, juste avant qu’Il se relève en puissance et en gloire pour la complète délivrance d’Israël, et la pleine manifestation de Son amour pour lui comme son propre Messie.

Cependant, l’analogie qui est ici si frappante entre Joseph et ses frères, et Christ et les Juifs, fait complètement défaut lorsqu’on l’applique à Israël et l’Église de Dieu. L’idée si répandue que Christ quelquefois se retire, ou cache Sa face aux chrétiens afin de les éprouver, n’a aucun fondement dans les épîtres. Avec les Juifs, sous la loi, les choses naturellement étaient toutes différentes ; Dieu habitait dans une épaisse obscurité. — Le chemin des lieux saints n’était pas encore manifesté — le parfait sacrifice n’avait pas été offert — la conscience du Juif n’avait pas été parfaitement purifiée, il ne pouvait donc pas avoir une pleine paix. Mais pour les chrétiens, la position est entièrement changée. « Les ténèbres s’en vont et la vraie lumière luit maintenant ». Nous sommes « agréables dans le Bien-aimé ». Nos péchés, selon le jugement de Dieu, furent tous et pour toujours, ôtés par l’offrande unique de Christ. Lorsque le plein jugement de Dieu contre le péché fut exprimé sur la croix, le voile fut déchiré, et le chemin des lieux saints fut ouvert. Nous, morts dans le péché, et Christ, mort pour le péché, fûmes vivifiés ensemble, ressuscités ensemble, et assis ensemble dans les lieux célestes, Dieu ayant pardonné toutes nos offenses. Il ne saurait y avoir de voile entre Dieu et Christ dans Sa gloire, et nous, étant en Christ, tous parfaits devant la face de Dieu, il ne saurait y avoir de voile entre Dieu et nous. Et de plus, le Saint Esprit est descendu comme le témoin et la puissance de notre union actuelle avec Christ ressuscité et exalté, et pour nous donner par Son habitation en nous la jouissance consciente de notre position et de notre portion avec Christ dans la présence de Dieu. L’idée même que le Seigneur veuille cacher Sa face à ceux qui sont dans la pleine lumière de Dieu avec Lui-même et comme Lui-même est assurément entièrement étrangère à toute la doctrine de l’Écriture concernant l’Église. Il est vrai — combien vrai, hélas ! — que nous pouvons oublier comme nous sommes richement bénis en Christ Jésus. — Nous pouvons oublier que nous sommes associés avec Lui comme ressuscité des morts et monté en haut — nous pouvons oublier que Sa vie est notre vie, et que Ses délices devraient être aussi les nôtres ; et oubliant ces choses, nous pouvons nous éloigner de Lui, et pécher contre Lui. Et nul péché, souvenons-nous en, ne saurait être aussi odieux à Dieu que le péché d’un chrétien, par la raison précisément que nous avons été amenés aussi près de Lui. Mais hélas, il faut que nous nous soyons éloignés de Lui, quand nous tombons dans le péché ; nul de nous ne pourrait pécher en Sa présence. , le péché nous est odieux, et nous avons puissance sur lui.

Il y a tant de dignité dans le langage du Saint Esprit quand Il fait allusion à ce point, qu’Il se borne à admettre uniquement la possibilité qu’un chrétien pèche. « Si », dit-Il — ce n’est que la possibilité d’une chose pareille qui est supposée — « si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus Christ, le juste, et lui est la propitiation pour nos péchés, et non pas seulement pour les nôtres, mais aussi pour le monde entier » (1 Jean 2, 1, 2). Nous avons là comment Dieu a pourvu à tous les besoins de notre marche de pèlerins. L’intercession de Christ fondée sur la justice et la propitiation garantit la purification de nos souillures, et nous maintient sans tache devant la face de Dieu. Comme l’idée tant répandue que quelquefois Dieu cache Sa face derrière un nuage pour mettre à l’épreuve la foi et l’amour de Ses enfants, est opposée à cette vérité bénie ! Nous pouvons manquer d’en jouir, ou nous pouvons l’ignorer, mais la vérité de Dieu demeure invariablement la même ; et la position de l’Église devant Lui, en Christ, est aussi invariable que la vérité qui la révèle.

Maintenant, si nous passons de l’Église à Israël comme tel, nous trouvons qu’il y a non pas analogie, mais contraste avec toute cette merveilleuse grâce. Car quoique « au temps de la fin » le résidu attende le Messie et soupire après Lui avec une sincère affection, il est encore sous la loi, et Dieu lui en laisse sentir la pression. Comme le meurtrier de jadis, il sera, pour ainsi dire, dans la ville de refuge jusqu’à ce qu’il survienne un changement dans la sacrificature (voir Nombres 35). L’apparition de l’oint du Seigneur, dans l’exercice de la sacrificature selon l’ordre de Melchisédec, sera le grand antitype de cette ancienne loi. Un changement dans la sacrificature, par la mort, procurait la liberté à ceux qui étaient prisonniers dans les villes de refuge. « Mais, après la mort du souverain sacrificateur, le meurtrier retournera dans la terre de sa possession ». Israël, dans le dernier jour, avant que le Seigneur apparaisse, passera par une opération sous la loi qui le criblera profondément, comme le montrent clairement de nombreux passages. Il faut que le jugement solennel de Dieu contre le crime de meurtre dont il est coupable soit senti et reconnu dans sa conscience. Et quand le Seigneur apparaîtra, cette œuvre bénie, quoique sévère, sera plus profonde encore, mais alors ce sera sous la grâce. C’est à ce sujet que le passage suivant se rapporte. « Et je répandrai sur la maison de David et sur les habitants de Jérusalem l’Esprit de grâce et de supplications ; et ils regarderont vers moi qu’ils auront percé, et ils en mèneront deuil, comme quand on mène deuil d’un fils unique ; et ils en seront en amertume, comme quand on est en amertume à cause d’un premier-né ». Lisez soigneusement Zacharie 12, aussi 13 et 14.

Mais n’est-ce pas véritablement beau, ô mon âme, de voir la réalité et l’ardeur d’affection que le Seigneur bien-aimé a créée dans les cœurs des siens, au milieu même de toutes leurs souffrances ? Avec quelle douceur le cœur de l’Épouse soupire après son Bien-aimé ! À la vérité, c’est là le caractère des Cantiques. Les Psaumes nous présentent davantage le travail de la conscience dans le résidu, les Cantiques essentiellement et par-dessus tout, les affections du cœur. Tel est le côté que nous avons ici, et c’est un côté précieux. L’amour d’époux de Jésus est manifesté ici, et il le réfléchit d’une manière douce et touchante dans le cœur plein de tendresse de Son épouse. « Mon âme se pâma de l’avoir ouï parler ». Elle put l’ouïr, mais ne put le voir, et son cœur se pâma en elle ; elle en avait fait peu de cas dans une heure mauvaise, et comme il était encore sur le principe de la justice, il s’était retiré et était parti. Mais il ne l’aimait pas moins pour avoir fait cela. Et si elle sentait vivement la douleur qu’il eût caché sa face, il sentait cela infiniment davantage. Jamais le cœur de Joseph ne brûla d’un amour aussi ardent pour ses frères que lorsqu’il se cachait d’eux. Mais il y en a ici un plus grand que Joseph ! « Jésus Christ le même hier, et aujourd’hui et éternellement ». Et remarquez-le, ce passage ne dit point : Dieu est le même hier, aujourd’hui, et éternellement ; naturellement Il est cela ; mais c’est de « Jésus Christ », Sauveur et Époux, qu’il affirme qu’Il ne change jamais. Apprends donc, ô mon âme, à te confier en Lui. Ne doute jamais de Son amour, quelles que soient les apparences, et te ne défie jamais de Sa grâce ; la grâce ne peut jamais faire défaut.

La scène qui suit est une pénible scène. Elle est hors de la communion, et tout est dans un état de confusion et de désordre. L’énergie même et l’ardeur de son amour l’amènent dans toutes sortes de troubles. Elle s’expose pour ainsi dire aux censures des disciples de profession au-dedans, et aux rudes traitements du monde au-dehors. Pour le moment, tout est hors de sa place pour ce qui est de ses voies, mais en général son cœur est droit et fidèle à son seigneur. « Filles de Jérusalem, je vous conjure, si vous trouvez mon bien-aimé, que vous lui rapportiez, et quoi ? Que je me pâme d’amour ». Oh, qu’il y en a peu parmi nous qui pourraient dire : « Je me pâme d’amour » ! Combien rarement il arrive que nous nous exposons à être persécutés pour la ferveur de nos affections ! Puissions-nous connaître davantage de cette communion qui fait que le cœur brûle, et que les paroles coulent en témoignage rempli de vie pour notre Seigneur absent !

Verset 9 — « Qu’est-ce que ton bien-aimé plus qu’un autre, ô la plus belle d’entre les femmes ? Qu’est-ce que ton bien-aimé plus que d’un autre, que tu nous aies ainsi conjurées ? ».

Quoi de plus agréable au cœur que de savoir que nous sommes plus beaux que tous les autres, pour celui que nous aimons le plus ? Être bien assuré que telle est la pensée du Seigneur, donne à l’âme un doux contentement. C’est aussi très agréable d’entendre que les autres, qui auraient pu être remplis de jalousie, parlent de nous et à nous, précisément comme Christ Lui-même. On ne saurait rien désirer de plus.

Eh bien, voilà ce qui est réservé pour un prochain avenir à la fille de Sion — la belle fiancée du vrai roi Salomon. Quand elle sera introduite dans la pleine bénédiction sous le règne du Messie et qu’elle sera hautement honorée par Lui, tous alors lui dirent avec joie : « Ô la plus belle d’entre les femmes ». Les « filles de Jérusalem » peuvent dans cette scène représenter les villes de Juda, qui auront une portion subordonnée à Jérusalem au jour prochain de sa gloire, quoique se trouvant néanmoins dans la même sphère de bénédiction. Jérusalem et les Juifs auront alors sur la terre la première place d’honneur et de gloire, et toutes les nations rechercheront leur faveur et l’abri de leur aile. « Ainsi a dit l’Éternel des armées : Il arrivera en ces jours-là, que dix hommes de toutes les langues des nations empoigneront et tiendront ferme le pan de la robe d’un Juif en disant : Nous irons avec vous, car nous avons entendu que Dieu est avec vous » (Zach. 8, 23). Évidemment, cela est encore futur. Mais, voici encore ce que dit l’Esprit de prophétie parlant du rétablissement des enfants de Sion : « Et les rois seront tes nourriciers, et les princesses leurs femmes tes nourrices ; ils se prosterneront devant toi le visage contre terre, et lécheront la poudre de tes pieds ; et tu sauras que je suis l’Éternel, et que ceux qui se confient en moi ne seront point honteux » (És. 49, 23).

Quel changement se fait alors pour les Juifs ! Quel heureux changement pour ce peuple longtemps foulé ! Quelle histoire que la sienne ! au moins, si nous embrassons le passé, le présent, et l’avenir. « Allez, messagers légers, » dit le prophète, « vers une nation dispersée et pillée, vers un peuple terrible depuis là où il est et par-delà ; une nation nivelée et foulée dont les fleuves ont ravagé le pays » (És. 18, vers. angl.).

Mais à présent, tout est heureusement changé. Il est parlé du résidu de Juda sous l’image d’une épouse, aimée, admirée, et dans laquelle le Roi prend ses délices. Le Seigneur Lui-même — le résidu épargné des autres tribus — et tous les Gentils, admirent sa beauté sans pareille. « Ô la plus belle d’entre les femmes ». Ainsi en sera-t-il en ce jour-là de la nation entière — les dix tribus et les deux tribus. Elles seront toutes réunies dans leur propre pays, et chaque tribu aura son propre lot.

En réponse à la question des filles de Jérusalem : « Qu’est-ce que ton bien-aimé plus que d’un autre, que tu nous aies ainsi conjurées ? », elle réplique immédiatement et trace le portrait fidèle de son bien-aimé. Il s’y trouve tout ce brillant de l’esquisse, et toute cette délicatesse des détails que peut seule donner une passion ardente et partagée. La force de son affection est rendue doublement puissante par les reproches qu’elle se fait elle-même. Le souvenir qu’elle conserve de lui est vivifié par la pensée de l’avoir dédaigné, et tous ses sentiments reçoivent une énergie nouvelle du fait qu’elle ne le trouve point. C’est dans un état de cœur pareil qu’elle le décrit aux filles de Jérusalem de la tête aux pieds. Oh, si nous étions prêts — toujours prêts, sous l’impulsion du moment, à parler de Jésus ! Il ne lui faut point de temps pour se préparer ; elle n’en demande pas. Toute heureuse de l’occasion, elle n’a besoin que d’oreilles qui veuillent écouter et de cœurs qui veuillent croire. Telle que la femme du puits de Sichar, son propre cœur débordait. Le désappointement avait transformé son amour en passion. C’est un soulagement pour son cœur de parler de lui. Elle ne pouvait pas s’empêcher d’être éloquente. L’amour est le don le meilleur de l’évangéliste — l’amour pour Jésus — l’amour pour le pécheur. Mais quand cet amour s’élève à la hauteur d’une passion, il doit y avoir une réelle, une brûlante éloquence. Jamais, jamais, ô mon âme, ne te contente de moins que cela. L’amour pour le Sauveur — l’amour pour les âmes, c’est certes une bonne chose, mais il faut plus à l’évangéliste. Tends à ce que ton amour s’élève en une ardente flamme. L’œuvre l’exige. Es-tu évangéliste ? Que tout ce qui ferait obstacle à ton œuvre soit consumé sur l’autel d’une entière consécration. Prêcher, ne l’oublie pas, ce n’est point enseigner ; et enseigner, ce n’est pas davantage prêcher. Fais appel aux âmes, lutte avec elles, empare-toi d’elles, martyrise-toi pour elles. C’est une affaire de vie ou de mort — d’ineffable, éternelle félicité, ou d’indicible ruine. Réalise l’avenir dans le présent, et crie au Dieu de toute grâce afin qu’aucune âme ne se retire non impressionnée, non bénie, non sauvée.

Des cœurs plus calmes, et plus sages aussi en bien des choses, c’est possible, diront peut-être : « La nature entre pour beaucoup dans un tel zèle, et il n’y a pas peu d’incrédulité ; souvenez-vous que l’œuvre est l’œuvre du Seigneur ». Admets pleinement, ô mon âme, que, quant à toi, tu ne fais que faillir, et que l’œuvre est l’œuvre de Dieu du commencement à la fin ; mais que rien ne ralentisse ton zèle, ou n’abatte ton énergie. Puisse la flamme de ton amour être inextinguible. Oh ! sois sérieuse ; le ciel et l’enfer sont des choses bien sérieuses, sois aussi profondément, profondément sérieuse. Le Maître pleura sur une ville, tu as un monde sur qui pleurer. Aime de Son amour, et que tes yeux pleurent Ses larmes.

Oh ! parle de Jésus — parle de cet amour dépassant toutes les limites de la pensée humaine, qui Lui a fait quitter Son trône du ciel, le cœur plein d’une profonde compassion divine, pour sauver de la mort notre race ruinée, nous purifier de nos crimes, tracer notre chemin.

Oh ! parle de Jésus — parle de Sa mort, car Il mourut pour des pécheurs tels que moi. « C’est accompli », s’écria de Son dernier souffle le Seigneur, Jéhovah Jésus. Cette mort de honte et d’angoisse m’ouvrit le chemin de la vie.



Verset 10 — « Mon bien-aimé est blanc et vermeil, un porte-enseigne entre dix mille ».

Il est dit de David qu’il était « vermeil et beau de visage » (vers. angl.), paroles relatives, sans doute, à l’éclat et à la fraîcheur de sa jeunesse. Mais dans la description qu’il nous donne ici du vrai David, l’Esprit de prophétie peut faire allusion à la pureté sans tache de Sa personne, et au caractère de Son sacrifice. Ce sont des termes significatifs que ces mots : « blanc et vermeil ». Le Saint Esprit se plaît à présenter, soit en types, soit sous forme d’allégories, les gloires de la personne de Christ, et l’infinie valeur de Son sang. « Pourriez-vous me nommer quelque chose qui soit plus blanc que la neige ? » demandait quelqu’un dans une école du dimanche. « L’âme qui a été lavée dans le sang de Jésus », répondit justement une petite fille. Mais si un tison arraché du feu noirci et consumé, pour ainsi dire, par le péché, peut être ainsi rendu plus blanc que la neige — pur comme la lumière du ciel, en vertu de ce sang précieux, quelles ne doivent pas être, pouvons-nous demander, la pureté essentielle, et la dignité infinie de Celui par l’effusion du sang duquel cette œuvre merveilleuse est accomplie ! Oui, certes, une seule âme ainsi bénie prouverait l’étonnante efficace du sacrifice ; mais que diras-tu, ô mon âme, lorsque dans le ciel tu verras des myriades de myriades d’âmes rachetées, chantant le cantique toujours nouveau : « À Lui qui nous aime et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang, et nous a faits un royaume de sacrificateurs pour son Dieu et Père, à Lui gloire et force aux siècles des siècles. Amen ». Oh ! quelles sublimes pensées toutes pénétrées d’adoration nous aurons alors de Celui qui fut jadis l’humble Fils de l’homme, mais qui est maintenant le Christ de Dieu souverainement exalté.

Ce que tu verras alors de tes yeux, ô mon âme, tu dois maintenant le croire dans ton cœur. Oh ! médite là-dessus, glorifie-toi dans la vérité ; « Mon bien-aimé est blanc et vermeil, un porte-enseigne entre dix mille ». Quoi d’aussi « blanc » — d’aussi pur — d’aussi saint, que la personne bénie du Fils de l’homme — Jéhovah — Jésus — la racine et la postérité de David ? Quoi d’aussi « vermeil » que le sang qui coula sur le calvaire de Ses veines immaculées ? Qui est digne d’être le capitaine de toutes les armées de Dieu, sinon le capitaine de notre salut ?

Ainsi, connaître Jésus, c’est le salut, la paix et le bonheur dès à présent. Savoir que mes péchés sont effacés par ces gouttes « vermeilles » — oui, effacés — je dis effacés pour toujours, c’est la félicité parfaite. Ils n’ont pas d’existence maintenant devant Dieu, le juge du péché. Pardonné, je le suis — je sais que je le suis, Dieu le déclare. Mais savoir que les péchés sont effacés, c’est une pensée plus profonde encore. Christ a aboli le péché par le sacrifice de Lui-même. Comme le caillou qui a été jeté dans les profondeurs de la mer, nos péchés ne peuvent plus se retrouver — ils sont ensevelis dans les profondes eaux de l’oubli de Dieu. Et Dieu a été tellement glorifié dans l’œuvre de Son précieux Fils, que désormais c’est pour Dieu une affaire de justice aussi bien que de miséricorde, de bénir tous ceux qui croient en Jésus. Il peut maintenant satisfaire Son amour en rencontrant en grâce le premier des pécheurs qui se prosterne devant le nom du Fils de l’homme jadis abaissé, mais maintenant souverainement exalté.

Verset 11 — « Sa tête est un or très fin ; ses cheveux sont crépus, noirs comme un corbeau ».

Après avoir répondu aux filles de Jérusalem d’une manière générale relativement à son bien-aimé, elle se met maintenant à en faire une description plus détaillée. Guidée par l’Esprit de Dieu, elle se plaît à s’arrêter sur ses perfections et ses gloires diverses, sous des figures prises des traits humains. Un mot, ô mon âme, dès l’entrée de ce sujet ; ne cherche pas, je t’en prie, le sens mystique de chacun de ces traits en dehors des limites de la Sainte Écriture. « Le lieu où tu es arrêté est une terre sainte ». Car, quoique l’Éternel ne défendît point à Moïse de s’approcher du buisson ardent, Il lui déclara nettement que ce devait être avec des pieds déchaussés. Que ce soit donc l’œil oint et le cœur en adoration que tu médites sur le Roi glorieux de Sion.

Dans le chapitre quatrième, l’époux, en décrivant les attraits de son épouse, fait l’énumération de sept traits. Ici, elle en signale dix dans la description de son bien-aimé. Les nombres significatifs, trois et sept sont réunis en lui. Maintenant nous méditerons brièvement sur chacun de ces traits séparément.

« Sa tête est un or très fin ». La majesté suprême peut être indiquée par « l’or très fin » comme en Daniel 2, 38 : « Tu es la tête d’or ». Il est aussi fréquemment employé dans l’Écriture pour représenter la justice divine en rapport avec la personne de Christ ; comme en Ésaïe 11, 5 et Apocalypse 1, 13. Nous lisons de ce même Jésus : « Voici, un roi régnera en justice, et les princes présideront avec équité. Et ce personnage sera comme le lieu auquel on se retire à couvert du vent, et comme un asile contre la tempête ; comme sont les ruisseaux d’eau dans un pays sec, et l’ombre d’un gros rocher en une terre altérée » (És. 32, 1, 2).

« Ses cheveux sont crépus, noirs comme un corbeau ». Les cheveux crépus, noirs de l’époux, font évidemment contraste avec les longs cheveux flottants de l’épouse qu’il compare « à un troupeau de chèvres qui apparaissent de la montagne de Galaad ». Une riche et abondante chevelure peut aussi indiquer la vigueur et la force de la jeunesse. Il est dit d’Éphraïm, Osée 7, 9 : « Les étrangers ont dévoré sa force, et il ne l’a point connu ; les cheveux blancs sont déjà parsemés en lui, et il n’en n’a rien connu ». Mais on ne verra jamais de signe de déclin dans le Seigneur et le Roi d’Éphraïm. Il est le même hier, aujourd’hui, et éternellement. Quelques-uns pensent que « l’or très fin » se rapporte à la divinité de Jésus, et les « cheveux crépus » à Son humanité. Il n’est pas de vérité qui soit plus chère à la foi que l’humanité parfaite de notre bien-aimé Sauveur, et cela en connexion avec Sa divinité éternelle. « Christ qui est Dieu sur toutes choses, béni éternellement. Amen » (Rom. 9, 5 et Col. 1, 15-19).

« Admire, adore ce Dieu immuable, à qui seul il appartient de dire : « Je suis vivant aux siècles des siècles » ! Et à la vaste pensée duquel l’ombre même d’un changement est inconnue ».



Verset 12 — « Ses yeux sont comme ceux des colombes sur les ruisseaux des eaux courantes, lavés dans du lait, et comme enchâssés dans des chatons d’anneau ».

La note marginale de la version anglaise traduit : qui sont au complet. Dans Apocalypse 5, 6, saint Jean parle de « l’Agneau » qu’il voit au milieu du trône comme ayant « sept yeux qui sont les sept Esprits de Dieu envoyés sur toute la terre ». Le nombre sept, nous le savons, indique la plénitude, la perfection, qui ici signifie l’intelligence. « Car les yeux de l’Éternel regardent çà et là par toute la terre, afin qu’il se montre puissant en faveur de ceux qui sont d’un cœur intègre envers lui » (2 Chron. 16, 9). Mais le croyant n’a rien à craindre du regard vif et pénétrant de cet œil d’un éclat septuple ; il est pour lui plein de douceur, de tendresse, de profonde affection, « comme les yeux des colombes sur les ruisseaux des eaux courantes ». C’est son heureux privilège d’en épier la direction. « Je te guiderai de mon œil ». Quel trait aussi expressif que l’œil ! Et, oh ! quel œil que celui qui se trouve maintenant devant l’œil de la foi ! Tendre comme celui de la colombe — rayonnant et éclatant comme lorsqu’il s’est baigné dans le ruisseau ; ou brillant comme d’une larme rapide de profonde compassion. La partie blanche de l’œil, pure comme du lait, l’œil lui-même « bien enchâssé comme dans ses chatons d’anneau ». Ni trop saillant, ni trop enfoncé, mais pareil à la pierre précieuse qui est parfaitement enchâssée dans son chaton.

Verset 13 — « Ses joues sont comme un carreau de drogues aromatiques et comme des fleurs parfumées ».

La note marginale anglaise, dit : comme des tours de parfum ; d’autres traduisent : des remparts de baume. Ces comparaisons représentent quelque chose d’une douceur, d’une fleur de beauté, d’un parfum extrêmes. C’est le visage, en général, que l’on peut voir sous ce trait. Seulement, pense à la différence entre le jour écoulé de la grâce en humiliation avec Jésus et le jour prochain de gloire merveilleuse. La fille de Sion, dans son aveuglement, Le méprisa et Le rejeta à cause de Son humilité ; et en grâce parfaite, Il se soumit à la volonté de l’homme qui est inimitié contre Dieu. « J’ai exposé mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui me tiraient le poil ; je n’ai point caché mon visage en arrière des opprobres et des crachats » (És. 50, 6). Et encore : « On frappera le gouverneur d’Israël avec la verge sur la joue » (Mich. 5, 1). Mais la fille de Sion sera alors affligée de tout son cœur, pour toute cette haine, toute cette cruauté dont elle s’est rendue coupable envers son Messie. Le voile sera ôté. Comme il disparaissait de dessus le visage de Moïse quand il retournait au tabernacle, de même il disparaîtra de dessus le cœur d’Israël, quand ils regarderont à Celui qu’ils ont percé. Et alors, au lieu de dire de Lui : « Il n’y a rien en lui à le voir qui fasse que nous le désirions », ce sera : « Tout en lui est aimable ». La joue, autrefois souillée, outragée et frappée, est pour le cœur de la nation comme des carreaux de drogues aromatiques — des fleurs parfumées — des tours de parfums — des remparts de baume. Oh ! quelle œuvre la grâce a accomplie ! Quelles merveilles ont effectuées les opérations de l’Esprit ! Quel triomphe ont remporté l’amour et le pardon de Dieu ! Hâte-toi, oh ! hâte-toi de luire, jour prochain — jour heureux du millénium !

« Ses lèvres sont comme du muguet, elles distillent la myrrhe franche ». La comparaison peut être prise du magnifique lis rouge de l’Orient (la version anglaise traduit : lis), mais le croyant connaît la vérité de cette parole bénie : « la grâce est répandue sur tes lèvres », non pas distillant pauvrement, mais répandue avec abondance. Les lèvres de Jésus, et seulement les siennes, peuvent parler de paix à une âme troublée. Jusqu’à ce qu’Il soit écouté, et écouté Lui seul, la véritable paix ne saurait être connue. « Le Seigneur, l’Éternel », dit-Il Lui-même par le prophète, « m’a donné la langue des savants pour savoir assaisonner la parole à celui qui est accablé de maux ».

« Oh ! répands-la bientôt, Dieu grand, Dieu de sainteté, répands-la dans les peuples les plus lointains ; dispose les cœurs les plus endurcis à l’accueillir avec joie et bonheur cette myrrhe franche des saintes lèvres de Jésus, dont le parfum porte partout où il pénètre la consolation, la pureté et la paix. Tu l’as promis, et quel bras de chair interviendra pour faire obstacle à l’accomplissement assuré de tes desseins éternels ? »



Verset 14 — « Ses mains sont comme des anneaux d’or où il y a des chrysolites enchâssées ».

Généralement, nous pouvons comprendre dans ce trait toutes les œuvres de la nature, de la providence, et de la grâce. Leur beauté, leur gloire, leur durée peuvent être représentées par l’or, l’anneau, et les pierres précieuses. « Les œuvres de ses mains ne sont que vérité et équité ; tous ses commandements sont véritables, appuyés à perpétuité et pour toujours, et sont faits avec fidélité et droiture » (Ps. 111, 7, 8). Mais la foi peut maintenant dire de ces mains ornées de pierreries : « Sa main gauche est sous ma tête et sa droite m’embrasse » (vers. angl.). Oh ! quel embrassement ! Heureux, trois fois heureux, ceux qui sont ainsi entourés de Ses bras éternels ! C’est une étreinte sans fin, comme l’anneau lui-même. « L’amour ne périt jamais ».

« Son ventre est comme d’un ivoire bien poli, couvert de saphirs ». Ici nous pouvons voir une allusion aux entrailles de ses profondes et tendres compassions. « Mon cœur est comme de la cire, s’étant fondu dans mes entrailles » (Ps. 22, 14). Une allusion aux entrailles suggère l’idée de la profondeur, et la couleur bleue du saphir celle du caractère céleste des tendres sympathies de Jésus. « Et sous ses pieds comme un ouvrage de carreaux de saphir qui ressemblait au ciel lorsqu’il est serein » (Ex. 24, 10). Purs comme « l’ivoire bien poli », profonds comme les entrailles, élevés comme les cieux, tels sont l’amour, la tendresse, la pitié, les compassions de notre précieux Seigneur Jésus Christ. « Si donc il y a quelque consolation en Christ, s’il y a quelque soulagement d’amour, s’il y a quelque communion de l’Esprit, s’il y a quelque tendresse et quelques compassions, rendez ma joie accomplie (en ceci) que vous ayez une même pensée, ayant un même amour, un même sentiment, pensant à une seule (et même chose) » (Phil. 2, 1, 2).

Verset 15 — « Ses jambes sont comme des piliers de marbre, fondés sur des soubassements de fin or ».

C’est la marche en général, qui d’ordinaire est représentée par ce trait. « Éternel, fais-moi connaître tes voies, enseigne-moi tes sentiers… Tous les sentiers de l’Éternel sont gratuité et vérité ». Les « piliers de marbre » peuvent exprimer la force, la fermeté, la permanence de son règne ; et les « soubassements d’or fin », la justice divine comme caractérisant toutes les voies de son gouvernement. La justice divine — la toute-puissance — les voies de « gratuité et de vérité » appartiennent au Roi de Sion — au puissant Roi de la terre. « L’empire a été posé sur son épaule ». « Mais quant au Fils, il dit : ton trône, ô Dieu, (demeure) aux siècles des siècles ; le sceptre de ton règne est un sceptre de droiture. Tu as aimé la justice et haï l’iniquité. C’est pourquoi, Dieu, ton Dieu, t’a oint d’une huile de joie au-dessus de tes compagnons » (Héb. 1, 8, 9). « Et au temps de ces rois, le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais dissipé ; et ce royaume ne sera point laissé à un autre peuple, et il sera établi éternellement » (Dan. 2, 44).

« Son port est comme le Liban ; il est exquis comme les cèdres ». Ayant déjà décrit son bien-aimé de la tête aux pieds, l’épouse considère maintenant, nous n’en doutons pas, l’ensemble général de son aspect — tous ses traits glorieux réunis — sa parfaite stature. Et sa stature « est comme le Liban, exquise comme les cèdres ». Cette image exprime, évidemment, Sa glorieuse majesté, comme Messie. Les hauts cèdres « de cette bonne montagne du Liban » sont dans l’Écriture le type ordinaire de l’exaltation, de la gloire, de la majesté. Resplendissante comme « l’or très fin » de la tête aux pieds — ornée de toutes les grâces — embaumée de tous les parfums — glorieuse et majestueuse comme les cèdres du Liban, est la personne de son bien bien-aimé.

Verset 16 — « Son palais n’est que douceur ».

Les « lèvres » ayant déjà été mentionnées, ce trait-ci doit indiquer quelque chose autre que les paroles. Il me paraît se rapporter plus particulièrement à la grâce de Jésus — à l’expression de Sa bonté, des témoignages de Sa bienveillance — à Ses communications affectueuses. L’épouse a goûté souvent de sa grâce, c’est pourquoi elle pouvait dire par expérience : « son palais n’est que douceur ». La grâce et la bonté avec lesquelles il vient au-devant d’elle, même après ses égarements, suffisent pour pénétrer son cœur à jamais de la douceur de la grâce de son Seigneur. « Si toutefois vous avez goûté », dit l’apôtre, « que le Seigneur est bon ». Il en est qui pensent que c’est à la mélodie de sa voix qu’il est fait allusion. Mais elle continue en disant :

« Tout en lui est aimable. Tel est mon bien-aimé, tel est mon ami, filles de Jérusalem ». L’expression lui manque. Elle n’est pas lasse de parler de lui, mais elle est incapable de dire tout ce qu’il est. En conséquence, elle clôt sa description par cette parole : « Tout en lui est aimable ». Comme si elle eut dit : tout ce qu’il y a d’aimable habite en lui — toute chose désirable se trouve en lui — et toute beauté non spécifiée lui appartient. — En Lui habitent toute la plénitude de la divinité et toutes les grâces de l’humanité. Il est aimable dans Son humiliation — aimable dans Son exaltation — « Tout en lui est aimable ».

Mais, n’est-ce pas la dernière note de ce délicieux cantique, qui est la plus riche de toutes, celle qui a le plus de douceur : « Mon bien-aimé… mon ami » ? Quelques-uns disent peut-être : « quelle description est cela » ! Mais toi, ô mon âme, dis : Quelle conclusion que celle-là ! « Tel est mon bien-aimé… mon ami ». Lui, lui-même est à moi. Elle est heureuse de s’arrêter sur ses qualités, mais elle est plus heureuse encore de pouvoir dire : Celui en qui toutes ces qualités brillent d’un si vif éclat est à moi ! Toutes ses qualités sont donc miennes aussi. Mais les qualités se trouvent dans la personne de Christ. Les trônes, les couronnes, les royaumes, les gloires, les félicités sont à Lui, et appartiennent au croyant, en Lui ; mais après tout, ces choses ne sont point Sa personne même. Quelle valeur auraient-elles toutes sans la personne du Bien-aimé ? Quelques précieuses qu’elles soient, elles ne seraient qu’une dérision pour les affections renouvelées. Il en serait comme d’une jeune mariée, délaissée par son mari, et dont le cœur a été brisé sur le seuil même de sa nouvelle demeure quand elle a vu aller à une autre les affections de celui sur lequel elle comptait. La maison, il est vrai, reste avec son riche ameublement, mais hélas ! il est évident que le cœur de son époux — auquel seul elle attachait du prix — est ailleurs. Elle le voit ; et tout est changé pour elle dans le fiel et l’absinthe du plus amer désappointement. L’ombre d’un épais nuage s’étend sur tout ce qui l’environne ; désormais tout porte l’empreinte de sa propre misère : c’en est fait de son bonheur ! C’est là, ô mon âme, une chose qui n’est pas rare avec les affections de la terre. Plus d’un cœur aimant et plein de confiance a été ainsi brisé et broyé par la lâcheté de celui auquel il se confiait. Mais jamais, non, jamais, il n’en est ainsi des affections du ciel. Bienheureux sont tous ceux qui ont mis leur confiance en Jésus. C’est le ciel sur la terre que de Le connaître — que de connaître Son amour, Son immuable amour : Son amour n’est pas en paroles seulement, mais en action et en vérité : il ne consiste point dans de simples et pauvres vœux où souvent même le cœur n’est pour rien, mais dans l’alliance éternelle de Sa grâce qu’Il a même scellée de Son sang précieux.



  1. L’histoire nous fait connaître une coutume orientale qui jette du jour sur la comparaison que nous trouvons ici. Lorsque la personne aimée persiste à repousser les vœux de celui qui l’aime, celui-ci se dirige durant la nuit vers la maison de son père ou celle où elle demeure. Il suspend des guirlandes de fleurs tout autour de la porte, et en jonche le seuil de fleurs odorantes. Il oint aussi d’huiles parfumées la serrure et la poignée de la porte. Il avoue par là à toute la famille, que son affection, quoique méprisée, est une affection réelle.