Écho du Témoignage:Méditations sur le psaume 23/Partie 4
L’onction est d’un usage fréquent dans les Écritures, et nous voyons aussi que dans leurs pratiques et leur culte les Juifs faisaient un grand emploi de l’huile sainte. Les prophètes, les sacrificateurs et les rois étaient oints et consacrés par ce moyen ; et elle formait un ingrédient important dans les offrandes. Les ustensiles mêmes du tabernacle devaient être oints avec cette « huile de l’onction sainte ». Composée d’après les directions divines contenues en Exode 30, elle était évidemment une figure expressive du Saint Esprit dans Ses opérations nombreuses et variées ; son écoulement silencieux dans les tuyaux d’or (Zach. 4) peut représenter son travail tranquille et inaperçu dans l’âme.
Mais l’onction de la tête que signale notre magnifique psaume, est plutôt l’emblème d’une bénédiction personnelle qu’une observance cérémonielle. Au commencement du psaume, l’homme de Dieu présenté sous la similitude d’une brebis avec son berger, parle de sa confiance parfaite en Jéhovah, et cette confiance ne l’abandonne pas un instant ; elle caractérise le psaume entier. « L’Éternel est mon berger, je n’aurai point de disette ». Il est conduit par les soins de son berger dans de verts pâturages et auprès des eaux tranquilles ; mais un jour d’épaisses ténèbres survient et la scène entière est obscurcie. Le pèlerin doit traverser l’épreuve et la souffrance, bien que la main qui dispense les coups soit invisible. La mort passe sur son sentier laissant derrière elle une ombre terrible. La scène, naguère si paisible, si douce et si heureuse, est transformée en une vallée de larmes, et cependant le Seigneur est là et Sa présence est goûtée. « Tu es avec moi, ton bâton et ta houlette sont ceux qui me consolent ». Maintenant la figure change — nous passons de l’emblème d’une brebis reposant tranquillement sous les soins du berger à l’emblème d’un convive assis à la table du roi.
« Tu dresses la table devant moi, en face de mes adversaires ; tu oins ma tête d’huile, ma coupe est comble ». « La table » peut être considérée comme le symbole de la communion de l’âme avec le Seigneur Lui-même, et elle est, sans doute, présentée ici comme développant d’une manière plus riche et plus entière le caractère d’une intime communion avec Lui. Il l’exprime ailleurs en disant : « Voici, je me tiens à la porte, et je frappe : si quelqu’un entend ma voix et qu’il ouvre la porte, j’entrerai chez lui, et je souperai avec lui et lui avec moi » (Apoc. 3, 20).
L’onction de la tête semble être l’expression d’une faveur plus extérieure, plus publique, et cette bénédiction signalée amène celui qui en est l’objet dans une communion bénie avec le Maître Lui-même. Lui fut oint, non avec l’huile du sanctuaire, mais avec le Saint Esprit descendu du ciel. « Et Jésus ayant été baptisé, s’éloigna aussitôt de l’eau et monta ; et voici, les cieux lui furent ouverts, et il vit l’Esprit de Dieu, descendant comme une colombe, et venant sur lui » (Matt. 3, 16). Ailleurs nous lisons que « Dieu a oint Jésus de Nazareth de l’Esprit Saint et de puissance ». Et encore : « Tu as aimé la justice et haï l’iniquité ; c’est pourquoi, ô Dieu, ton Dieu t’a oint d’une huile de joie au-dessus de tes compagnons » (Act. 10, 38 ; Héb. 1, 9).
Elle est merveilleuse, en vérité, pour nos âmes cette vérité qui resplendit à travers l’emblème de l’onction. Ici, nous sommes appelés les « compagnons » de Christ ; et nous savons que, comme homme, Il est désigné par le nom de « compagnon » de l’Éternel des armées (Zach. 13) Quel lien ! tu as bien raison de t’écrier, ô mon âme, quel lien entre nous et le Dieu vivant ! Il est dit de tous les chrétiens : « Vous avez l’onction de la part du Saint » ; et aussi : « celui qui nous lie fermement avec vous à Christ et qui nous a oints, c’est Dieu » (1 Jean 2, 20 ; 2 Cor. 1, 21). Il est parfaitement vrai qu’Il est oint d’une huile de joie au-dessus de ses « compagnons » ; mais il est vrai aussi que nous sommes Ses « compagnons ». L’Esprit de vérité le déclare, nous le croyons et bientôt le jour manifestera la chose.
Comme rois et sacrificateurs de notre Dieu et Père, nous serons prochainement associés avec notre glorieux Seigneur dans Sa domination et dans Sa gloire. Nous serons alors publiquement reconnus comme les compagnons de Celui qui aura en Sa main le gouvernement des cieux et de la terre. « Et je vis des trônes ; et ils étaient assis dessus, et le jugement leur fut donné… ils seront sacrificateurs de Dieu et du Christ et ils régneront avec lui mille ans » (Apoc. 20). Mais ne pensons pas qu’à la fin des mille ans nous devrons cesser de régner avec Christ ou d’être Ses compagnons. Il est vrai que cette époque sera celle où Christ remettra le royaume à Dieu le Père et où Il déposera l’autorité et la puissance. « Car il faut qu’Il règne jusqu’à ce qu’Il ait mis tous Ses ennemis sous Ses pieds » (1 Cor. 15) Mais notre règne avec Christ commencera, pour ainsi dire, seulement alors ; car nous régnerons en vie par un seul, Jésus Christ (Rom. 5, 17). Notre vie éternelle et notre règne avec Christ doivent coexister à jamais.
Adorable Seigneur ! Quel amour que le tien ! Quelle perspective tu places devant nous ! Que dire en face de telles choses ? Oh ! donne-nous de marcher d’une manière digne de l’huile sainte que notre Dieu a répandue sur nous ! Pour le moment, nous ne pouvons que nous prosterner pour adorer en présence d’une semblable grâce, et c’est avec vérité que nous nous écrions : « Ma coupe est comble ».
« Ma coupe est comble ». Heureux état ! La bénédiction du convive du Roi ne connaît plus de mesure. Celui qui vient de traverser les sombres profondeurs de la vallée est maintenant introduit dans une scène de joie des plus élevées, et c’est là qu’il reçoit publiquement l’assurance de la faveur du Seigneur. Cependant nous ne devons pas perdre de vue que la vallée peut être un témoignage aussi expressif que le banquet de la faveur du Seigneur, bien que les résultats soient dans notre expérience si différents. Pour le moment, la coupe de joie est comble, mais cette joie est exclusivement dans le Seigneur. La scène en bas peut être aussi sombre que jamais. Ces deux choses sont parfaitement conséquentes dans l’expérience chrétienne et connues pratiquement de la plupart d’entre nous. Désormais les scènes terrestres peuvent être dépourvues de joie, bien que traversées par des témoignages nombreux de miséricorde, tandis que le cœur nage dans les joies immenses de son Seigneur. Il se peut que tout ce qui nous entoure porte l’empreinte de la déception et du deuil ou que nous soyons placés sous le poids de la plus cuisante épreuve, tandis que tout en haut demeure calme, serein, joie sans mélange. Être placés devant Dieu dans la pleine valeur de Christ et dans le précieux sentiment que nous sommes les enfants de Son amour, cela suffit pour faire déborder de nos cœurs la plus franche et la plus heureuse louange.
C’est là, ô mon âme, la conséquence naturelle du festin royal. Et comment pourrait-il en être autrement ? Être assis à la table du Roi — participer au repas que Lui-même a préparé — avoir la tête ointe d’une huile odoriférante et la coupe débordant de Son meilleur vin, je le demande, quelle autre exclamation convient mieux à l’âme que celle-ci : « Ma coupe est comble » ? Ma joie, ma bénédiction, mon bonheur est en son entier, oui, il jaillit même tellement au-dessus de sa mesure que je ne puis qu’aimer et louer.
Apprends, ô mon âme, de cette image si frappante ce qu’est l’adoration. Rien, sois-en sûre, n’est d’une importance plus grande pour le chrétien, car rien n’honore Dieu davantage. Sa gloire Lui est enlevée lorsque Ses enfants négligent de L’adorer. Le caractère vrai du culte et le seul principe sur lequel il puisse être rendu sont vus ici. Oh ! combien ce psaume est plein d’instruction et de beauté ; et en combien de points il s’applique à notre Seigneur Lui-même. Oh ! comme Sa coupe était pleine de joie, et de douleur aussi, lorsqu’Il était ici-bas comme l’homme parfaitement dépendant, se confiant dans les soins de Jéhovah ! Mais chez le pécheur sauvé par grâce, combien elle est merveilleuse cette expérience qui le rend capable de s’écrier au milieu des plus profondes eaux : « Ma coupe de joie est comble, ma coupe de larmes l’est aussi ». Telle fut toujours la mesure de la coupe du Seigneur comme l’homme de douleurs. Mais Il connut parfaitement les deux choses, cela est vrai. Quelle faveur d’avoir communion avec Lui ! Quel privilège, bien qu’il soit goûté maintenant dans les larmes, de participer à Sa coupe de souffrance aussi bien qu’à Sa coupe de joie — de connaître quelque chose de Ses angoisses terrestres aussi bien que de Ses délices célestes. Jamais nous ne pourrons toucher à la coupe de colère qu’Il but à notre place ; elle fut vidée jusqu’à la lie. « Tout est accompli ». Mais nous boirons à Sa coupe de joie durant toute l’éternité. Alléluia ! « Entre dans la joie de ton Seigneur ». Voilà quelle va être l’heureuse bienvenue que nous recevrons de Sa part prochainement. Et remarque, ô mon âme, qu’il ne s’agit pas seulement de la joie du ciel, ou de la joie des anges, mais de la joie de ton Seigneur.
Mais demanderas-tu peut-être, ô mon âme, quelle est la signification spirituelle de cet emblème ? Nous croyons qu’il dépeint une âme entrée dans le véritable esprit du culte. Nous ne nous souvenons pas d’avoir rencontré dans les Écritures quatre autres paroles qui donnent aussi entièrement la véritable idée du culte.
Le Maître a tellement rempli le vaisseau qu’il déborde. Lorsque le cœur est plein de la vérité, « de la vérité telle qu’elle est en Jésus », et que le Saint Esprit y habite, ce cœur déborde bientôt en actions de grâce et en louanges — il adore Dieu, qui est Esprit, en esprit et en vérité. Le cœur du convive répond, osons-nous dire, à la bonté de l’hôte, mais il est clair que c’est ce que Dieu répand dans l’âme par Sa grâce qui remonte de l’âme vers Lui en expressions de reconnaissance. C’était la fumée montant de l’autel comme un encens d’agréable odeur.
Il est évident qu’un vase plein ne peut rien contenir de plus. Tout ce qui lui est donné ensuite ne fait qu’augmenter son débordement. Mais de quelle nature, je le demande, sont les sentiments spirituels d’une âme qui répond à cette figure ? D’une nature et d’un caractère célestes — ils sont le fruit du Saint Esprit. Rien sur la terre ne se rapproche autant de l’occupation céleste que l’adoration. Ce sera notre heureux emploi durant les âges de l’éternité. Mais il faut que l’âme habite en esprit le ciel — oui, le saint des saints, avant d’atteindre cette condition, et c’est là que le chrétien devrait toujours se trouver. Il est en Christ, et Christ remplit le ciel de Sa gloire. Pour Dieu, il n’existe pas maintenant de culte se rattachant à un parvis extérieur ; il faut qu’il soit offert par des sacrificateurs et en dedans du voile. Lorsque le cœur de l’adorateur répond au débordement de la coupe, il est évidemment rempli — rempli de manière à ne laisser aucun vide. Il éprouve spirituellement un parfait rassasiement quant à tous ses désirs ; chaque souhait est réalisé et tous les soupirs de l’âme sont satisfaits. Il est vrai que l’adorateur n’est pas encore entré dans la gloire de la résurrection, mais il possède tout excepté la gloire et il en a conscience. Il est vrai que, pour cela, il est dans l’attente, mais sans aucune espèce d’incertitude. « Car nous par l’Esprit, sur le principe de la foi, nous attendons l’espérance de la justice » (Gal. 5, 5) L’espérance qui appartient proprement à la justice, c’est la gloire. Nous avons maintenant la justice en Christ et nous attendons la gloire, et cependant toutefois dans un sens, nous la possédons déjà, car le Seigneur dit Lui-même : « Et la gloire que tu m’as donnée, je la leur ai donnée ». Il est même un sens plus particulier encore dans lequel nous pouvons dire que nous la possédons déjà d’après ce qu’exprime l’apôtre dans l’épître aux Colossiens : « Christ en vous l’espérance de la gloire ». Mais nous attendons, cela est vrai, la gloire de Dieu dans sa pleine manifestation.
Il peut être à propos de signaler ici la différence qui existe entre la prière et l’adoration, quelque rapport qu’il y ait entre les deux choses et quelque convenable même que soit parfois leur mélange comme nous le lisons en 1 Timothée 2 : « des supplications, des prières, des intercessions, des actions de grâces ». Nous avons toujours d’abondants sujets d’être reconnaissants ; néanmoins les deux choses sont en elles-mêmes parfaitement distinctes. Nous apportons nos vaisseaux vides à une réunion de prières, suppliant notre Dieu et Père de les remplir ; cela montre notre connaissance de Dieu et notre confiance en Lui, de telle sorte que si la prière est faite avec foi, l’huile pourra couler jusqu’à ce que chacun des vaisseaux soit rempli (2 Rois 4). C’est ainsi que la prière peut conduire au culte comme le font aussi l’évangélisation et l’entretien ou l’enseignement des enfants de Dieu. Mais avec cela il est essentiel de comprendre la différence qui existe entre la prière, la prédication, l’enseignement et le culte. Toutes ces choses sont d’une importance très grande en elles-mêmes, elles sont toutes de Dieu et ne doivent pas être confondues. Dans la prédication de l’évangile Dieu s’adresse au monde ; dans l’enseignement Il parle à Ses saints ; mais dans le culte c’est nous qui nous adressons à Dieu, nous Lui rendons adoration. Le ministère s’exerce de la part de Dieu en faveur de l’homme, tandis que le culte part de l’homme pour monter vers Dieu. Il n’est peut-être pas deux choses qui soient plus distinctes ; et cependant il en est peu qui soient aussi ordinairement confondues. Une adoration vraie peut être produite par l’un des services dont nous avons parlé, et même l’esprit d’adoration peut être goûté (et c’est heureux s’il en est ainsi), tandis que nous sommes employés à l’un de ces services ; mais dans le culte chrétien, nous nous approchons de Dieu comme de notre Père en Jésus et nous nous adressons à Lui. Lorsque nous connaissons Dieu tel qu’Il s’est révélé dans la personne et dans l’œuvre de Christ, nous éprouvons une sainte liberté en Sa présence et nous Lui rendons la louange, l’adoration et les actions de grâces d’un cœur reconnaissant.
L’Écriture emploie fréquemment et d’une manière très variée le mot de « coupe ». Parfois, il symbolise la joie ; parfois, il exprime la douleur ; mais dans le verset qui est placé devant nous, la coupe comble dépeint une joie qui dépasse toute mesure et qui s’harmonise parfaitement avec la position du croyant qui participe au privilège béni de l’onction. La table que Jéhovah avait dressée pour Son pèlerin fatigué faisait plus que subvenir à tous ses besoins ; rien ne manquait. La provision était entière et divinement appropriée à sa condition. Nulle nécessité de rappeler à l’hôte quelque chose à quoi il eût oublié de pourvoir. Réclamer ou désirer ceci ou cela à une pareille table, serait contraire à tous les sentiments que peut éprouver le convive rassasié, à moins pourtant que son cœur ne soupirât après une gratitude plus entière et des actions de grâces plus convenables. Ne devrions-nous pas tous être animés de cet esprit lorsque nous nous asseyons à la cène du Seigneur ? Oh ! bien certainement, et dans le sens le plus élevé. Et n’est-il pas vrai que dans ce magnifique verset nous possédons au moins une illustration de la cène du Seigneur, de la présence du Saint Esprit, et du culte rendu par l’assemblée de Dieu ? Assurément, car l’idée du culte est plutôt en rapport avec l’assemblée qu’avec un chrétien individuellement. La joie des autres augmente la nôtre et fortifie notre culte.
Cette vérité est placée devant nous d’une manière si admirable et si touchante dans le chapitre 26 du Deutéronome, que je me sens pressé de le considérer un instant. L’adorateur déjà introduit dans le pays promis aux pères, présente sa corbeille de prémices — fruits de la terre sainte ; et le sacrificateur la place devant l’Éternel son Dieu. Il adore dans le pays et ne présente à Jéhovah que les fruits du pays. Canaan est le type du ciel et nous ne pouvons adorer Dieu que lorsque nous y sommes en esprit et que nous présentons les prémices de cet heureux pays. L’amour, la joie, la sainteté, la louange, l’adoration et les actions de grâces croissent en abondance dans notre céleste Canaan. Mais la joie qu’éprouvait dans le pays l’Israélite racheté était partagée par d’autres. Il n’oubliait pas la misérable condition dans laquelle il était autrefois en Égypte bien qu’il en eût été retiré. « Mon père était un pauvre, misérable Syrien ; il descendit en Égypte ». Dans la joie nouvelle qui était désormais son partage, il invite le Lévite, l’étranger, l’orphelin et la veuve à partager son abondance. Mais ce n’était pas tout : il maintenait une marche de sainteté pratique sans laquelle il ne saurait y avoir de culte. « Je n’en ai point mangé dans mon affliction, et je n’en ai rien ôté pour l’appliquer à quelque usage souillé, et je n’en ai point donné pour un mort ; j’ai obéi à la voix de l’Éternel mon Dieu ; j’ai fait selon tout ce que tu m’avais commandé ». Son cœur s’élargit ensuite et il embrasse tout Israël. « Regarde de ta sainte demeure, regarde des cieux, et bénis ton peuple d’Israël et la terre que tu nous as donnée comme tu avais juré à nos pères, qui est un pays découlant de lait et de miel ». La vraie bonté et la largesse de cœur accompagnent toujours un véritable esprit céleste d’adoration. « Offrons donc, par lui, sans cesse à Dieu un sacrifice de louanges, c’est-à-dire le fruit des lèvres qui confessent son nom. Mais n’oubliez pas la bienfaisance et de faire part de vos biens, car Dieu prend plaisir à de tels sacrifices » (Héb. 13, 15, 16).
Le sacrifice de Christ commémoré dans la fraction du pain est le seul fondement d’un culte vrai, et la présence du Saint Esprit dans l’assemblée est l’unique puissance par laquelle une adoration acceptable peut être offerte à Dieu. M’approcher de Dieu comme adorateur sans savoir que mon péché est ôté et que je suis une nouvelle créature dans le Christ Jésus, serait une présomption des plus audacieuses. Mais, lorsque nous savons que notre adorable Seigneur a, par le sang de Sa croix, pleinement glorifié Dieu, effacé tous nos péchés et nous a purifiés de toutes nos souillures, nous avons une sainte hardiesse pour nous approcher de Dieu comme de notre Père. Sans la croix, tout doit être jugement ; mais par le moyen de la croix tout est grâce, grâce illimitée. Le voile déchiré du haut en bas est pour nous un témoignage divin que Christ a aboli le péché par le sacrifice de Lui-même et nous a ouvert le chemin du lieu très saint. En vertu de Son sacrifice expiatoire, il n’est plus maintenant question de péché, que Dieu en soit loué, entre l’adorateur et Dieu. Cette question fut pleinement réglée à la croix ; réglée et mise de côté pour toujours. Le même coup qui frappa l’Agneau déchira le voile et fraya un chemin jusque dans la présence de la sainteté infinie où l’adorateur se tient maintenant sans conscience de péché et où il se réjouit dans la présence de l’Éternel son Dieu.
Arrête-toi encore un moment ici, ô mon âme, pour que ton adoration puisse s’élever et s’approfondir à la vue de cette croix merveilleuse qui est le grand centre de l’univers moral de Dieu ! C’est vers ce centre que se dirigèrent toujours Ses regards, et c’est sur ce point aussi que se porta par anticipation l’œil de la foi jusqu’à ce que vint le Sauveur. Et maintenant, n’est-ce pas la croix qui doit fixer notre attention à jamais comme étant le centre de toute notre bénédiction et la base de tout notre culte sur la terre et dans les cieux, pour le temps et à travers les âges de l’éternité ? Le « cantique nouveau » n’eût jamais été chanté dans le ciel et l’hymne de la louange n’eût jamais pu être entonnée sur la terre par des hommes déchus et ruinés, sans la croix de Jésus ; et sans cette croix aussi notre coupe eût été à jamais une coupe de terreur et de souffrance au lieu d’une coupe débordant de joie.
Ayant considéré brièvement l’unique fondement du culte — le sacrifice de Christ, nous nous arrêterons maintenant sur la seule puissance du culte — le Saint Esprit. Lorsque nous naissons de nouveau nous recevons une nouvelle nature qui est sainte et appropriée à la présence de Dieu. Elle est aussi capable de jouir de Lui, vérité bénie qui sûrement nous donne l’idée la plus élevée du bonheur que peut posséder une créature ; et pourtant ce bienheureux état peut être connu, déjà maintenant, comme l’apôtre nous le dit : « Mais nous nous glorifions même en Dieu par notre Seigneur Jésus Christ » (Rom. 5, 11). Sans cette nouvelle nature il ne pourrait y avoir de culte. Le Père recherche l’adoration de Ses enfants. Être enfant, voilà la condition essentielle au culte ; mais le Père prend Ses délices dans le culte de Ses enfants ; Il ne l’accepte pas seulement, Il le recherche. Ô mon âme, qu’elle est étonnante et admirable cette vérité ! Notre Dieu et Père recherchant des adorateurs ! « Car aussi le Père en recherche de tels qui l’adorent ».
Mais en outre de l’œuvre de la rédemption, de la nouvelle naissance et de notre union avec un Christ ressuscité, le don du Saint Esprit est une chose indispensable au culte chrétien. Rien ne peut être plus simple que l’enseignement adressé à ce sujet par le Seigneur Lui-même à la femme de Samarie. « Mais l’heure vient et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car aussi le Père en cherche de tels qui l’adorent. Dieu est esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité ». Ici notre Seigneur insiste sur la nécessité morale de la présence et de la puissance du Saint Esprit dans le culte chrétien. Et n’est-ce pas Lui, en effet, qui connaît le mieux ce qui convient au Père, Lui qui était « au sein du Père » (Jean 1, 18) ? Bien qu’enfants, ce n’est que par l’Esprit que nous comprenons Dieu, que nous jouissons de Lui et que nous L’adorons. Dieu étant Esprit, il Lui faut un culte rendu dans Sa nature à Lui — « en Esprit ». Un fils est de la même nature que son père.
Comme enfants, nous sommes faibles et dépendants ; mais nous sommes « fortifiés en puissance par son Esprit dans l’homme intérieur ». Comme enfants, nous sommes ignorants et légers ; mais le Saint Esprit nous communique la pensée de Dieu et nous donne de l’intelligence dans les choses divines, de sorte que nous pouvons nous approcher de Lui dans des pensées et des sentiments qui conviennent à Sa sainte présence. C’est le Saint Esprit habitant en nous qui nous donne conscience de notre union avec Christ et de notre proximité de Dieu. Il est le sceau de la rédemption et les arrhes de l’héritage. L’onction de la tête avec de l’huile est comme cette « onction » que nous recevons de Dieu et par laquelle nous connaissons toutes choses (voyez 1 Jean 2, 20 ; 1 Cor. 2, 12). Et c’est par le même Esprit que l’amour de Dieu est répandu dans nos cœurs (Rom. 5, 5), amour qui est, pouvons-nous dire, la source de toute notre bénédiction et l’élan de toute notre adoration. Si donc le Saint Esprit est si absolument nécessaire au culte des chrétiens, il devient de la plus haute importance qu’Il ait la place qui Lui convient dans les assemblées des saints. « Car aussi nous avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit libres ; et nous avons tous été abreuvés pour l’unité d’un seul Esprit » (1 Cor. 12, 13). Comment rendre à Dieu la gloire due à Son nom si l’Esprit est en quelque sorte éteint ou mis pratiquement de côté ? C’est là une question solennelle qui nous rappelle, dans une certaine mesure, le contraste si fermement établi par l’apôtre lorsqu’il s’adresse aux Philippiens (chap. 3, 3) : « Car nous sommes la circoncision, nous qui servons Dieu en Esprit, et qui nous glorifions dans le Christ Jésus et n’avons aucune confiance en la chair ».
Dans ce cas, ce n’est pas contre le péché de la chair, mais contre la religion de la chair que l’apôtre met en garde. Les deux sont également mauvais aux yeux de Dieu. Les vrais adorateurs sont connus par ces deux caractères, servir Dieu en Esprit et se glorifier dans le Christ Jésus. La chair peut être très pieuse à sa manière et se dépenser beaucoup en bonnes œuvres, mais elle ne sera jamais capable de se glorifier dans le Christ Jésus. Elle ne connaît rien de Christ comme méprisé du monde et honoré dans le ciel ; elle ne sait rien non plus de ce que c’est que d’avoir ses affections aux choses qui sont en haut. Mais même lorsque Christ a Sa juste place dans le cœur, et que le Saint Esprit est reconnu comme seule puissance du culte, nous avons à veiller contre le mélange des pensées de la chair avec les directions de l’Esprit. Ce sera toujours le but de l’ennemi, s’il ne parvient pas à substituer la chair à l’Esprit, de chercher au moins à les mélanger.
Mais est-ce que je me glorifie dans le Christ Jésus seul ? C’est là une question solennelle et qui peut servir de pierre de touche à chacun de nous — c’est la pierre de touche du culte spirituel. Ô mon âme, est-ce que tu atteins à ce niveau ? Christ est-Il ton tout en tous ? T’approches-tu de Dieu et te tiens-tu en Sa sainte présence te glorifiant en Jésus Christ seul ? Il fait les délices du cœur du Père, Il est l’objet du témoignage de l’Esprit et c’est en Lui que les siens se réjouissent et se glorifient. Heureux, trois fois heureux, ceux qui dans ce jour de piété charnelle « servent Dieu en Esprit, se glorifient dans le Christ Jésus et n’ont aucune confiance en la chair ».
Avant de terminer notre méditation sur la coupe de joie, il sera bon peut-être de nous arrêter un instant sur ce qui forme avec elle un contraste, c’est-à-dire sur la coupe de souffrance. Dans l’expérience chrétienne celle-ci précède et accompagne souvent l’autre. Comme l’une est naturelle et que l’autre est spirituelle, toutes deux peuvent être remplies à la fois ; mais ce n’est que pendant notre séjour temporel que nous pouvons avoir à faire avec la coupe de souffrance. Dans le ciel nous goûterons une joie pure et sans mélange et nous serons accueillis à l’entrée par ces paroles : « Entre dans la joie de ton Seigneur ». Nous boirons et pour jamais à la coupe même de notre Maître ; nous nous abreuverons à la même fontaine que Christ Lui-même. Possédant la même vie nous aurons le même goût pour les joies, les occupations et les bénédictions du ciel, quoique pas au même degré bien certainement.
En dehors de cette nature divine, il ne peut exister aucune disposition pour les choses divines. La nature purement humaine trouverait la lumière du ciel plus intolérable que les ténèbres de l’enfer. Oh ! quelle pensée ! Une âme immortelle amenée à un tel désespoir par le sentiment du péché, en présence de la sainteté, qu’elle cherche un abri dans les profondeurs des ténèbres et qu’elle crie « aux montagnes et aux rochers : Tombez sur nous, et nous cachez de devant la face de celui qui est assis sur le trône, et de devant la colère de l’Agneau ! » (Apoc. 6, 16). Déjà maintenant, l’évangile de la grâce de Dieu est prêché aux pécheurs en ces termes : « Or c’est ici le sujet du jugement, que la lumière est venue au monde et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs œuvres étaient mauvaises » (Jean 3, 19) Oh ! pourquoi ne sont-ils pas tous attirés maintenant à cette lumière — la lumière de l’amour éternel — la lumière de la croix de Jésus — la lumière de la grâce illimitée de Dieu ? Viens, oh ! viens pécheur ! Ne vaut-il pas mieux être manifesté à la lumière du glorieux évangile de grâce et d’amour où tes nombreux péchés te seront pardonnés et où tu recevras la vie éternelle comme un don de Dieu, que d’être révélé devant la face du Juge alors que la porte des compassions aura été fermée ? Pourquoi donc ne pas venir ? Le péché ne porte-t-il pas déjà maintenant avec lui un aiguillon terrible, alors que la jouissance en est passée ? N’en as-tu pas fait l’expérience, ô mon infortuné compagnon de péché ? Combien j’en ai vu se porter à des actes de violence et de folie à la suite de l’amertume et des remords laissés par le péché, après que ses jouissances s’étaient changées en fiel et en ver rongeur ! Mais quelle doit en être l’amertume dans ce lieu où le sombre et éternel désespoir s’empare de l’âme dans toute sa sinistre réalité ! Là, il ne reste que le péché et son aiguillon terrible, avec la conviction épouvantable qu’aucun soulagement ne pourra y être apporté.
Pourquoi donc ne te laisserais-tu pas convier, chère âme pécheresse, à venir à Jésus maintenant, oui précisément à ce moment même ? Si tu es assez coupable, assez descendue dans l’échelle sociale pour rougir de toi-même en présence d’autrui, tu peux cependant t’approcher en toute confiance de Jésus. Là, tu seras la bienvenue ; sois assurée d’un pardon immédiat, d’une acceptation et d’un salut parfaits au moyen de Son précieux sang. Ce fut l’expérience bénie de la femme pécheresse et du brigand converti sur la croix ; et elle peut devenir la tienne à l’instant. Celui qui mourut sur la croix pour toi et pour moi est bien digne de notre confiance. Et, dis, serait-Il mort pour nous s’Il ne nous eût pas aimés ? Oh ! lève les yeux sur cette croix et vois Son amour intarissable se donnant Lui-même et répandant là Son sang. Chercherais-tu un autre prodige que le prodige de la croix ? Dieu t’en préserve ! La plus grande réalité de l’univers, c’est l’amour de Jésus. Les cieux, la terre et l’enfer s’élevèrent une fois tous ensemble contre le substitut du pécheur. Tout refuge Lui manqua (Ps. 142, 4). Mais c’est alors que Son amour éclata, brisant tous les obstacles, pour se montrer dans toute Sa gloire et Sa puissance. Beaucoup d’eaux ne pourraient point éteindre Son amour et les fleuves mêmes ne le pourraient noyer, bien qu’Il ait pu dire en Esprit : « Les eaux m’ont environné jusqu’à l’âme ; l’abîme m’a environné tout à l’entour, les roseaux se sont entortillés autour de ma tête » (Jon. 2, 6). Encore, et encore, je te le demande : Veux-tu apprécier, apprécies-tu cet amour qui a volontairement enduré toute cette souffrance pour les plus grands pécheurs ? Et, dis-le, dans quel but penses-tu qu’il le fit ? Afin qu’ils pussent un jour partager avec Lui Son trône et Sa gloire. Décharge-toi de tout ton fardeau sur Jésus — confie-toi en Lui. Son œil ne s’obscurcit jamais, Son bras ne peut s’affaiblir, et Son cœur est incapable de se refroidir. Pour le temps et pour l’éternité tu trouveras le bonheur et la sécurité en te reposant sur Lui.
Mais regarde, ô mon âme, combien tu t’es écartée du sentier du troupeau — de ses joies et de ses peines. Eh bien, soit ! le bon Berger se plaisait à laisser les quatre-vingt-dix-neuf dans la bergerie, pour aller dans le désert chercher la brebis perdue, jusqu’à ce qu’Il l’eût trouvée.
Nous parlions tout à l’heure des deux faces de l’expérience chrétienne — la coupe des souffrances de la nature, et la coupe des joies spirituelles. Toutes deux peuvent déborder à la fois. Il arrive parfois que le pauvre cœur humain est tellement brisé par la douleur, qu’il ne peut regarder en haut ; sa force, sa vigueur, son objet quant à sa vie, tout semble disparu. Dans de pareils moments, il est comme affaissé et renversé sous le poids de l’épreuve, au point qu’il ne paraît plus pouvoir se relever. Et sûrement, sans la main miséricordieuse du Seigneur, il tomberait dans un état désespéré. Voilà quel est le poids accablant de la souffrance humaine — souffrance que les bien-aimés du Seigneur ont quelquefois expérimentée ; mais, plus qu’aucun des siens ne pourra le faire, notre Seigneur Lui-même est entré dans toute la profondeur de cette souffrance comme homme de douleurs. Et maintenant, comme la Tête vivante et le grand souverain Sacrificateur de Son peuple, Il est capable de secourir et de relever l’âme affligée et abattue.
C’est précisément alors que le Seigneur peut se révéler à l’âme et attirer les regards sur Lui de manière à les détourner de l’épreuve et à la rendre ainsi moins cuisante. Ce n’est pas que l’affliction soit retirée ou rendue moins profonde ; non, elle le devient peut-être davantage, et ce qui était seulement redouté peut même s’être transformé en une sombre réalité ; aussi, pouvons-nous dire, que l’âme occupe, à la fois, deux régions et qu’elle se trouve dans deux états différents. Dans la nature, elle traverse les désolations de la terre ; mais, par la foi, elle entre au milieu des réalités immuables du ciel. Les deux choses sont vraies, mais les joies spirituelles changent le caractère des afflictions terrestres et donnent la force de les supporter. Le repos étant goûté de nouveau, l’âme se rappelle que le bien-aimé qui nous a devancés attend auprès du Seigneur, dans une jouissance paisible avec Lui, que vienne le jour de la manifestation publique de Sa gloire. Mais quelle expérience et combien elle est vraie ! Les deux coupes sont combles au même moment, l’une de joie et l’autre de douleur. Celle-ci ne tardera pas à disparaître pour jamais, mais celle-là demeurera dans notre souvenir durant toute l’éternité, comme un témoignage des plus doux et des plus puissants de la compassion de l’amour et des tendres sympathies de notre Sauveur.
En Romains 5, 1-11, cette page de l’expérience chrétienne est tracée devant nous d’une manière très claire et il nous sera profitable, je n’en doute pas, d’y jeter un coup d’œil. Posséder une intelligence spirituelle et personnelle de ces versets, est une riche portion pour notre âme. « Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ, par lequel nous avons eu accès aussi par la foi à cette faveur dans laquelle nous sommes, et nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu ». La pleine bénédiction de l’âme en rapport avec le passé, le présent et l’avenir, est résumée dans ces deux versets. L’œuvre de Christ en est la base : « lequel a été livré pour nos offenses et a été ressuscité pour notre justification ».
Quant au passé, il est aboli pour tous les croyants — tout ce qui était en rapport avec le vieil homme a pris fin aux yeux de Dieu, à la croix. Le péché, dans sa racine et dans ses fruits, y a été jugé ; et ainsi tout ce qui devait être effacé, l’a été selon les exigences de la gloire de Dieu et selon les besoins du pécheur. Désormais le chrétien est un avec Christ en résurrection. La mort, le jugement, le monde, le péché et Satan sont derrière lui. Sur ce terrain — le terrain de la mort et de la résurrection, il y a paix parfaite pour le chrétien — paix avec Dieu. « Étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu ». Quant au présent, nous sommes introduits dans la pleine faveur de Dieu ; notre position est une position de faveur. « Nous avons eu accès aussi par la foi à cette faveur dans laquelle nous sommes ». Et quant à l’avenir, « nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu ». Nous sommes placés entre la croix et la couronne. Notre hier a été le Calvaire, notre demain sera la gloire.
C’est là la vraie condition du chrétien ; non pas dans son expérience, mais par la foi. Ayant été justifiés, possédant la paix, nous tenant dans la grâce, nous attendons la gloire. Sûrement, l’expérience découlera de cette condition. L’Esprit de Dieu ayant amené le chrétien au faîte de sa position comme homme nouveau en Christ, et lui ayant donné un aperçu de la gloire à travers le voile, Il le ramène, pour ainsi dire, à goûter par expérience les difficultés de la vie au milieu desquelles pourtant il peut encore se glorifier. Il se glorifie dans les profondeurs aussi bien que sur les hauteurs. Personne n’est capable de se réjouir dans les tribulations, comme celui qui se glorifie dans l’espérance immédiate de la gloire de Dieu, et c’est ce que nous trouvons chez le plus grand des apôtres, lorsqu’il fut « ravi jusqu’au troisième ciel ». Là, il ne put se glorifier qu’en Christ seul ; et lorsque descendu de nouveau au milieu des tribulations, il eut à supporter « l’écharde dans la chair », il rencontra le même Christ avec lui dans ces profondeurs. « Je me glorifierai donc très volontiers », dit-il, « plutôt dans mes infirmités, afin que la puissance de Christ repose sur moi ». Nous rencontrons la même expérience dans les onze versets placés devant nous. « Et non seulement cela, mais nous nous glorifions aussi dans les tribulations, sachant que la tribulation produit la patience, et la patience l’expérience, et l’expérience l’espérance, et l’espérance ne rend point honteux, parce que l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint Esprit qui nous a été donné ». Les cordes de son âme sont ainsi mises en vibration, et après être descendue jusque dans les profondeurs elle atteint de nouveau les sommités, car il possède la douce jouissance de l’amour de Dieu répandu dans son cœur, et puis le don du Saint Esprit. Quel état béni pour l’âme, même pour celle qui se trouve sous l’ombre de la mort ! Mais ce n’est pas tout ; il y a plus encore à apprendre dans cette vallée de larmes ; il reste une autre expérience à faire. Le chrétien est ramené, non pas à la tribulation, mais à une connaissance expérimentale de sa propre ruine morale. Il faut qu’il apprenne qu’il a été sans force, impie, pécheur et ennemi, mais ces vérités humiliantes sont apprises à la lumière de l’amour parfait de Dieu, de l’œuvre accomplie du Sauveur et de la présence du Saint Esprit. Mais remarque, ô mon âme, quel est le terme de cette progression ! Impossible d’en atteindre un plus élevé : « Nous nous glorifions même en Dieu par notre Seigneur Jésus Christ ». Sûrement, la joie que nous trouvons en Dieu Lui-même surpasse de beaucoup celle que nous goûtons dans les choses qu’Il nous donne.
Quels sujets de ravissements, ô mon âme, dans ce qui peut être connu, expérimenté, savouré par le pauvre pèlerin dans le désert ! Il peut paraître aux yeux des hommes un être insensible, sans cœur et sans joie, en un mot, une créature indéfinissable ; mais dans quelles profondeurs il pénètre, sur quelles hauteurs il s’élève, quels coups d’œil il envisage, quelle puissance il possède et quelle gloire illumine son sentier ! Pour lui, c’est la gloire au ciel, et dans la vallée d’humiliation. Il connaît l’histoire de l’avenir mieux que celle du passé, et la lumière divine répand ses rayons sur le présent. Ah ! pauvre monde, monde aveugle et mort, tu ne connais pas cet homme mystérieux ! Oh ! si tu voulais seulement venir à Celui qui est la lumière de la vie et la lumière des hommes. La grâce est généreuse ; ce qu’elle possède, elle désire ardemment le partager avec toi. Elle te prie, te supplie de connaître et d’aimer le seul ami des pécheurs. Une chandelle qui en allume une douzaine ne perd par cela rien de sa clarté à elle, mais le faisceau de lumières brille d’un éclat beaucoup plus resplendissant. Prends dès maintenant ta portion parmi ceux qui marchent à la lumière du Seigneur, et que ton sentier puisse être comme la lumière resplendissante qui augmente son éclat jusqu’à ce que le jour soit en sa perfection.
« Oui, le bien et la grâce m’accompagnent tous les jours de ma vie, et mon habitation est dans la maison de l’Éternel pour toute la durée des jours ». Nous venons de voir que dans la richesse de l’expérience chrétienne, le pèlerin apprend à connaître intimement la joie et la souffrance. Ces choses nous ont été enseignées à la fois à l’école de Dieu et par Sa Parole écrite.
Considère soigneusement, ô mon âme, que le pèlerin n’est pas vu ici avec une coupe dans chaque main, mais avec un ange gardien de chaque côté. « Oui », ou plutôt Sûrement (vers. angl.) « le bien et la grâce m’accompagnent tous les jours de ma vie ». Remarque le premier mot qui échappe de son cœur : « Sûrement ». N’y a-t-il pas dans cette note de la foi quelque chose de triomphant, surtout après l’expérience profonde et variée qui vient d’être faite ? Pas de doutes, pas de craintes, pas d’incertitude ici ; une confiance heureuse et tranquille remplit l’âme, c’est la pleine assurance de la foi. Cela ne nous rappelle-t-il pas la dernière parole de notre Seigneur à Son Épouse avant Son départ ? « Oui », (ou Sûrement, vers. angl.) « je viens bientôt ». Oh ! pourquoi cette parole n’est-elle pas tombée dans son cœur et n’y est-elle pas demeurée à sa place jusqu’à Son retour ? La parole du Seigneur dans le cœur et Sa personne présente à l’esprit, voilà ce qui seul peut produire l’expérience, la foi et le triomphe du psaume 23.
Comme l’homme de Dieu a conscience durant son pèlerinage de la dignité de sa suite ! Il est entouré d’honneurs royaux : non pas, il est vrai, de l’éclat qui accompagne les puissants de cette terre et qui fascine l’œil de l’homme, mais il est environné du bien et de la grâce du Dieu vivant. Voilà, pouvons-nous dire, ce qui compose la garde du pèlerin durant sa traversée du désert. Et que peut ajouter la foi, lorsqu’elle s’est exprimée ainsi ? Le ciel lui-même ne saurait fournir un secours plus convenable pour la scène de deuil que nous venons de traverser. Oh ! impossible. Ce sont des compagnons toujours disponibles, toujours prêts, toujours à la hauteur du besoin, capables de rencontrer les ennemis les plus redoutables ; leur origine est céleste, ils sont nobles et invincibles ; et cependant ils sont aussi doux et paisibles que l’amour pur du ciel. Ce tableau n’est pas imaginaire, il n’existe rien de plus réel pour la foi. « Oui, le bien et la grâce m’accompagnent tous les jours de ma vie ».
Penses-y, ô mon âme ; arrête un instant tes pensées et ta méditation sur cette vérité bénie. Mais prends garde de considérer trop longtemps ta propre condition — tes propres circonstances ; songe plutôt à tes champions célestes, « le bien et la grâce » ; et surtout à Celui qui te les a envoyés pour demeurer avec toi si longtemps — tous les jours de ta vie. Peux-tu parler encore d’être solitaire dans ce monde ? La foi te présente ces deux messagers d’amour, descendus du ciel pour te garder et t’accompagner tous les jours de ton pèlerinage. Mais pourquoi, demandes-tu peut-être, ces deux-là sont-ils choisis de préférence à d’autres ? Parce que « le bien » (ou la bonté) pourvoit à tous nos besoins, et que « la grâce » pardonne tous nos manquements. Sans eux, comment poursuivre notre course ? Le bon Berger a Lui-même parcouru le premier le chemin que suivent les brebis ; aussi connaît-Il ce qui vaut le mieux pour elles. Ce n’est pas qu’Il eût besoin, sous tous les rapports, des choses dont nous avons besoin, car Il était « sans péché » ; mais comme homme Il a marché sous les soins de Jéhovah dans le sentier que traversent Ses brebis. Il marche devant elles et elles Le suivent.
Il y a trois choses en rapport avec le Seigneur notre Berger que nous devrions connaître en tant que le troupeau de Sa pâture : 1° qu’Il a fait l’expérience des épreuves les plus cuisantes du désert, de sorte qu’Il connaît chacun des pas, chacune des difficultés, chacun des dangers du chemin, parce qu’Il y a marché Lui-même ; 2° Il mourut pour les brebis. Ayant d’abord suivi le chemin qu’elles devaient parcourir, Il laissa Sa vie pour elles ; 3° Il ressuscita ensuite d’entre les morts, afin de conduire ce troupeau pour lequel Il mourut, afin de veiller sur lui et de le nourrir, de sorte qu’Il est qualifié de toutes manières pour être le Berger du troupeau de Dieu. De là cette doxologie admirable : « Or le Dieu de paix, qui a ramené d’entre les morts le grand pasteur des brebis dans la puissance du sang de l’alliance éternelle, notre Seigneur Jésus, vous rende accomplis en toute bonne œuvre pour faire sa volonté, faisant en vous ce qui est agréable devant lui par Jésus Christ, auquel soit gloire aux siècles des siècles ! Amen ! ».
Dans ce magnifique et dernier verset de notre psaume, le pèlerin que nous avons suivi d’une manière si intime dans ses joies et dans ses douleurs, atteint, pouvons-nous dire, une éminence de laquelle il contemple le passé, le présent et l’avenir. Il est placé, pour ainsi dire, au centre du cercle. S’il s’agit de la position chrétienne, nous savons que le chrétien est en Christ, et que, Lui, Il occupe le centre de la bénédiction et de la gloire. Du haut de cette place privilégiée, le croyant ne parle plus que du bien et de la grâce comme étant le résumé de la traversée du désert. Il connaît les joies et les larmes ; il en a fait une longue expérience. Il connaît les verts pâturages et les eaux tranquilles, mais il a goûté aussi les eaux amères de Mara, et il est entré dans leurs profondeurs. Les ombres de la mort ont obscurci son sentier et répandu leur lugubre obscurité sur tous les objets de la vallée. Il connaît aussi les riches provisions de la table du Roi — le banquet royal — l’onction de la tête et le débordement de la coupe. Cependant, en jetant un coup d’œil rétrospectif sur les jours d’autrefois, et en envisageant le présent, il peut s’écrier en toute vérité : « Le bien et la grâce m’ont accompagné tous les jours de ma vie ». Puis, en anticipant sur l’avenir, l’affection filiale et l’amour du chez-soi ne découvrent plus que la maison du Père : « Mon habitation est dans la maison de l’Éternel pour toute la durée des jours ».
Le cher compagnon de pèlerinage duquel nous allons nous séparer, attend avec calme et triomphe sa dernière transformation. Son cœur, dans cette perspective, déborde de joie et de louanges. Tout est brillant ; mais le moment même du départ surpasse tous les autres ; il est certainement le plus heureux et le plus triomphant. Il devrait en être ainsi de tous les chrétiens, mais d’une manière particulière de tous ceux qui ont été enseignés de Dieu à « attendre des cieux son Fils ». Voilà quelle est la vraie espérance de l’Église et non pas la mort, bien que quelques-uns la placent avant la venue du Seigneur. Lorsque la grande et glorieuse vérité du retour de Jésus a sa propre place dans le cœur, le désir du départ est produit par la puissance de l’affection plutôt que par la simple connaissance d’une doctrine. Le Seigneur Lui-même est personnellement connu et aimé, et le cœur soupire après le moment où il sera avec Lui. Peu importe qu’il faille passer par les portes de la mort ou être enlevé avec tous les saints sur la nuée au-devant du Seigneur (1 Thess. 1, 9, 10 ; 4, 13-18). Ceux qui ont atteint la maison du Père avant l’enlèvement des saints, possèdent l’avantage de connaître le Seigneur dans cette nouvelle position. Expérience précieuse et toute particulière !
La position d’attente, occupée par le chrétien dans ce monde, peut être d’un intérêt profond et d’une grande utilité, et il se peut que les liens qui l’y retiennent soient nombreux et puissants : mais lorsque l’œil de la foi franchit la distance et pénètre jusque dans le ciel pour contempler ceux qui y sont et pour considérer ce qu’ils y font, le cœur désire instinctivement se joindre à ces heureuses multitudes. Le bien-aimé ou les bien-aimés qui nous ont devancés sont présents à notre esprit, bien que là-haut la joie de l’un soit la joie de tous. Il y aura, cela est vrai, l’individualité — une identité parfaite, mais il y aura aussi une bénédiction commune à tous.
Mais quelle grâce, avons-nous lieu de dire, que malgré nos murmures et nos manquements, la dernière scène de notre pèlerinage soit heureuse, calme et brillante ! Ici l’âme est près du Seigneur et la grâce resplendit — la foi triomphe, la gloire brille, les louanges abondent. Placée, pour ainsi dire, sur la limite des deux mondes, l’âme voit tout à la lumière de la présence de Dieu et la bonté divine, la bonté sans mélange, couronne tout son sentier ; ses sombres journées mêmes ne sont plus pour elle que des témoignages de la bonté et de la miséricorde de Dieu. Tout est perdu de vue si ce n’est les soins constants et invariables du Seigneur notre Berger. L’âme ne parle que du bien qui a pourvu si admirablement à ses besoins journaliers, et de la grâce qui a pardonné ses chutes continuelles.
Mais maintenant la fin est venue — la scène se clôt et déjà la maison du Père est en vue. Un seul œil brille dans le cercle de famille, un seul cœur est dans la joie. « Mon habitation est dans la maison de 1’Éternel pour toute la durée des jours ». Cela me rappelle les dernières paroles d’une chère jeune fille de dix-neuf ans, adressées à un père tendrement affectionné, qui paraissait brisé de douleur sous le poids d’une séparation qui devait être prochaine : « Cher père… ne peux-tu pas — me laisser partir ?… Je vais seulement… auprès de Jésus… et tu me rejoindras… bientôt ». Qu’ils sont doux et consolants ces mots, n’est-ce pas ? Mais elle, elle seule était calme et heureuse dans cette touchante scène. Plusieurs autres paroles semblables exprimèrent encore le repos et le bonheur de son âme, mais celles-ci furent accompagnées du plus tendre regard de sympathie dirigé vers son père bien-aimé qui venait de se jeter sur une chaise, dans un coin de la chambre, pour y donner un libre cours à ses larmes. Et maintenant c’est elle qui cherche à consoler celui qui a si souvent lu et prié près de son lit. Quelle grâce ! Quelle miséricorde accordée à un père, à une famille ! À Dieu en soit toute la louange. Oh ! ne sont-ce pas là les tendres et profondes sympathies du bon Berger envers l’agneau qu’Il porte sur Son sein ?
Et maintenant, après avoir longtemps arrêté notre méditation sur le magnifique psaume 23, et cela dans des sentiments profonds et mélangés, nous nous voyons contraints de le laisser pour d’autres thèmes, mais les leçons que nous y avons apprises de notre Père demeureront. Il sait graver sur les tables du cœur de manière à ne laisser ni au temps, ni aux circonstances, la puissance d’effacer. Le souvenir du passé peut jeter une ombre sur le présent, mais il n’est pas capable d’obscurcir notre brillant avenir. La pensée dominante des dernières paroles de ce psaume, c’est la maison — le chez-soi. Toutes les vicissitudes du désert sont passées, et maintenant la seule pensée qui remplisse l’esprit, c’est la maison — l’éternelle et heureuse maison. « Mon habitation est dans la maison de l’Éternel pour toute la durée des jours ». C’est là que le pèlerin fatigué et épuisé trouve un parfait repos ; celui qui était étranger sur la terre y trouve une céleste patrie, et c’est là aussi que le serviteur qui a achevé son travail entre dans la joie de son Seigneur.
Que le Seigneur accorde, tant à celui qui lira ces lignes, qu’à celui qui les écrit, de pouvoir, au temps convenable, atteindre cet heureux chez-soi ! Quelle pensée est plus douce à nos cœurs que celle de nous trouver bientôt chez nous ? Oh ! puissent tous ceux qui nous ont suivis dans nos méditations sur ce psaume, faire l’heureuse expérience du sixième verset et être ainsi capables de s’écrier avec nous : « Oui, le bien et la grâce m’accompagnent tous les jours de ma vie, et mon habitation est dans la maison de l’Éternel pour toute la durée des jours ».