Écho du Témoignage:Notes sur l’épître aux Galates/Partie 6
Chapitre 6
La fin du dernier chapitre nous a montré les œuvres de la chair d’une part, et les fruits de l’Esprit de l’autre, avec l’injonction bien solennelle adressée aux enfants de Dieu, que, s’ils vivaient par l’Esprit (ce qui était nécessairement le cas, s’ils étaient enfants de Dieu), ils devaient aussi marcher par l’Esprit. C’était en vain qu’ils se vantaient de privilèges, s’il y avait indifférence quant à la marche pratique. Nous ne saurions avoir la vie par le Saint Esprit, sans être en même temps liés par les déclarations les plus solennelles, en sorte que le Saint Esprit soit aussi la grande force directrice de la marche. L’acte n’est que l’expression extérieure du principe au-dedans. La vie ne peut être connue d’une manière absolue que de Dieu : la marche est ce qui est manifesté devant les hommes. Mais maintenant, outre qu’il exhorte à se garder de vaine gloire, quelque forme qu’elle pût revêtir, soit de se provoquer les uns des autres, soit de se porter envie les uns aux autres (chap. 5, 26), nous voyons qu’il prend un nouveau terrain au commencement du chapitre 6.
« Frères, quand même un homme s’est laissé surprendre par quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez un tel homme dans un esprit de douceur, prenant garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté ». Supposons qu’un homme aille tout à fait mal, et se laisse positivement surprendre par ce qui est évidemment mauvais, que faire alors ? Encore le Saint Esprit insiste-t-Il sur ceci, que ceux qui sont spirituels redressent « un tel homme dans un esprit de douceur ». Expression, en effet, d’une bien grande importance ! Car d’abord, en cas de chute par un manque de vigilance et de dépendance à l’égard de Dieu, nous apprenons quels sont ceux le plus à même de faire face à la nécessité. C’est l’obligation de tous d’une manière générale ; mais quels sont ceux que le Saint Esprit presse d’agir convenablement à l’égard d’un tel cas ? « Vous qui êtes spirituels ». Or, il ne s’ensuit pas que celui qui est né de Dieu, soit spirituel. Vivre par l’Esprit est une chose bien différente que d’être spirituel. Un homme spirituel ne vit pas seulement par l’Esprit, mais marche par l’Esprit. Sans doute il a les mêmes infirmités que les autres hommes, et il se peut que de temps à autre il montre ce qui est de la nature ; mais à tout prendre, et d’une manière manifeste, par la grâce de Dieu, il a appris à juger le moi, à ne pas l’épargner, à discerner surtout en lui-même tout éloignement du Seigneur, et à le confesser franchement et humblement devant Dieu. En conséquence de ce jugement habituel de soi-même, il y aura une bien plus grande tendresse en s’occupant du péché dans les autres. De tels chrétiens peuvent avoir un discernement pénétrant, mais lorsqu’il s’agit de ce qui est réel et très sérieux — quelque chose peut-être dont plusieurs cesseraient de s’occuper comme rendant le cas sans espoir et qui les conduirait à penser que la personne n’est pas chrétienne du tout, ils peuvent, parce qu’ils connaissent mieux la subtilité de la chair aussi bien que la grâce de Dieu, ils peuvent, dis-je, compter sur Sa bonté ; et ce sont les personnes mêmes qui conviennent pour s’occuper du mal et pour rétablir cette âme. Ainsi donc vous trouverez toujours, dans les cas qui demandent à être traités avec douceur, que c’est à ceux qui sont spirituels d’agir, et non à ceux qui sont eux-mêmes les plus habitués à broncher, ni à ceux qui sont sujets à satisfaire la chair et à s’éloigner du Seigneur. Quelques-uns pourraient penser que de tels hommes sont probablement ceux qui agiront avec compassion à l’égard de ceux qui bronchent ; mais au contraire, ceux-là conviennent qui marchent soigneusement et en se jugeant eux-mêmes, en règle générale, et qui sont ainsi gardés de chute parce qu’ils s’appuient habituellement sur un Seigneur fidèle, parce que la présence même qui les préserve de s’égarer, est ce qui leur fait comprendre la grâce de Dieu et à user de cette grâce pour d’autres. D’après cela, il est dit à ceux-là de redresser « un tel homme dans un esprit de douceur ».
Il ajoute encore : « Prenant garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté ». Cela serait naturellement ce qui se présenterait moralement à l’œil d’un homme spirituel. Il a le plus profond sentiment de sa propre faiblesse ; et par conséquent il serait tout prêt à estimer les autres supérieurs à lui-même. Comment cela ? Ce n’est pas sans doute que celui qui a fait des progrès dans les voies de Dieu, doive regarder la connaissance d’un jeune enfant comme supérieure à la sienne. Ce n’est pas qu’il n’existe dans l’Église, d’une part, ceux qui sont peu estimés, et de l’autre, des hommes d’un jugement éprouvé et spirituel. Ce n’est pas que nous devions supposer que tous sont également sages, forts et honorables. Ce ne serait pas là de la foi, mais du fanatisme, quelque chose de contraire à toute pensée juste. Dans quel sens donc devons-nous estimer les autres supérieurs à nous-mêmes ? Lorsqu’une âme qui a quelque mesure de spiritualité pense à elle-même, ce qu’elle sent c’est combien elle est loin de réaliser Christ. Elle a habituellement devant elle combien ses manquements sont grands, même en ce qu’elle désire dans ses voies devant Dieu. Mais quand ce chrétien considère son frère, même le plus faible possible, et qu’il le voit comme un des bien-aimés de Christ, rendu pleinement agréable au Père et objet de Ses tendres affections, cela réveille à la fois l’amour et le dégoût de soi-même. Ainsi, si la grâce est à l’œuvre, ce qui, dans un autre saint, ressemble à Christ, se présente aussitôt devant le cœur, et ce qui ne ressemble point à Christ dans soi-même. De sorte que la question n’est pas de s’efforcer à entretenir des sentiments élevés à l’égard de ses voisins, et à penser qu’ils sont ce qu’ils ne sont pas ; mais de croire réellement ce qui est vrai à leur égard, et d’avoir aussi des sentiments justes à l’égard de nous-mêmes. Si on pense à ce qu’est un saint en Christ et pour Christ, et à ce qu’il sera par le moyen de Christ, alors le cœur sent la merveille de Son amour et de quel prix est un saint pour le Seigneur ; mais quand l’œil se retourne sur soi-même, toute l’indignité de nos voies, de nos sentiments, de nos manquements s’offre à notre mémoire de manière à nous humilier. Il en est de même quand c’est : « prenant garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté », avec cette différence, que ce n’est pas tant considérer ce que nous avons été, que ce que nous avons à craindre et contre quoi nous avons à veiller.
Mais il y a plus ; au verset suivant, il les exhorte à porter « les charges les uns des autres ». Il y a des difficultés, des épreuves, des sujets de tristesse ; il y a des choses qui ont la forme d’infirmités ; il y a des circonstances de la nature la plus variée et la plus pénible qui pèsent sur les enfants de Dieu. Et, si nous désirons montrer de quel prix un chrétien est à nos yeux, l’occasion peut être facilement trouvée. « Portez les charges les uns des autres, et ainsi accomplissez la loi du Christ ». Baissez-vous et portez la charge sous laquelle gémit votre frère. Les dix commandements peuvent ne pas l’exiger ; mais vous accomplirez ainsi la loi de Christ. C’est là la loi pour nous chrétiens. Il n’est pas question de la loi de Moïse ; parce que, quoique cette loi fût celle de Dieu et qu’elle soit toujours la mesure selon laquelle Dieu agit à l’égard de l’homme naturel, Dieu s’occupe ici de ceux qui vivent par l’Esprit ; or, à Sinaï la loi ne fut jamais donnée à l’homme spirituel, mais à un peuple charnel, savoir à Israël. La loi s’adresse à l’homme naturel, et par conséquent elle s’occupe de ce qui est mauvais en lui. Qui peut dire au nouvel homme : « Tu ne tueras pas » ; « tu ne déroberas pas » ? Le nouvel homme convoite-t-il jamais, ou commet-il adultère ? L’idée même présente évidemment en elle-même la preuve que toute la théorie est fausse. La loi des dix commandements ne fut jamais, en aucune façon, adressée au nouvel homme. Le nouvel homme peut en faire usage ; mais c’est là une chose bien différente que de la prendre comme l’expression de sa propre responsabilité devant Dieu. Si nous sommes des saints, nous ne sommes pas occupés à faire, pour avoir la vie, mais nous sommes vivants, pour faire la volonté de notre Seigneur, sans une telle pensée que la mort ou la malédiction.
Je vous le demande, à vous qui insistez en faveur d’une règle légale, qu’est-ce que cette « loi de Christ » ? Christ fut toujours occupé des autres. Il ne fit jamais Sa propre volonté — pas dans un seul acte de Sa vie. C’est là précisément être saint dans l’amour, et c’est ce que fut Christ : obéissant et vrai dans l’amour, c’est ce qui caractérise toute Son existence ici-bas. Supposons que nous accomplissions quelque devoir, ou même tous nos devoirs, simplement parce que nous croyons que cela est juste, ce serait toujours mal. Comme chrétien, j’aurais manqué dans ce qui est le plus près de Dieu, et cela par cette raison bien simple : — c’est que faire simplement son devoir parce que c’est son devoir, ne place pas l’âme dans une attitude d’obéissance, et peut bien, au contraire, n’être qu’orgueil et satisfaction de soi-même, et un hommage rendu à l’idole la plus cachée du cœur. Faire ce que je juge être bien, peut donc n’être au fond rien de mieux qu’une rébellion subtile contre Dieu. Je n’ai aucun droit de choisir mon propre sentier. Je suis appelé à l’obéissance, si je prends la place d’être Sa créature ; et encore plus, si je suis Son enfant et que je me reconnaisse comme tel. La question est donc : Quelle est la volonté de mon père ? De quelle manière infiniment excellente notre Seigneur le manifesta, même avant qu’Il fût entré dans la partie publique de Son ministère ! Il eut toujours, et cela dans le sens le plus élevé, le sentiment de Sa propre relation : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? ». Et il en fut ainsi dans chaque occasion. Considérez-le plus tard dans Son ministère. Même dans une chose qui en appelait avec tant de force à Ses affections comme homme, quand Lazare se mourait, pourquoi demeura-t-Il encore deux jours au lieu où Il était, après avoir appris qu’il était malade ? Il n’agit pas seulement sur le terrain de ce qui est simplement bon, ni même sur le terrain simplement de Son amour envers celui qu’Il aimait ; mais il Lui fallait l’ordre de Son Père avant d’aller.
C’est ce que nous avons besoin de nous rappeler. Si vous prenez la loi donnée à Sinaï, vous trouvez Dieu qui requiert ce qui condamne un pécheur. Dieu ne s’y révélait pas comme Père. Supposez encore la souveraine de ce pays ; elle envoie son armée au-dehors pour attaquer quelque ennemi étranger, ou une parole d’autorité pour agir à l’égard de quelque province rebelle. Qui voudrait soutenir qu’elle agit comme mère dans de tels cas ? Qui voudrait conclure que nous la voyons ainsi dans ses rapports avec ses enfants ? C’est comme souveraine qu’elle agit, et à l’égard de sujets rebelles. À Sinaï, il y avait une nation, des sujets rebelles de Dieu ; et Il proclamait, au milieu des tonnerres et des éclairs, et d’une voix plus terrible que tout cela, ce qu’Il ne pouvait que demander d’Israël coupable. Mais lorsque Dieu, qui a autrefois parlé d’une manière si terrible, parle aujourd’hui, comment le fait-Il ? Par Son Fils. C’est le même Dieu, mais combien est différente Sa voix ! Dieu maintient toujours Son titre et Son droit : non seulement pour donner effet à ce qu’Il annonça par rapport à Israël jadis, mais pour introduire ce qui est nouveau. Que signifie une nouvelle alliance, si elle ne fait pas vieillir ce qui précédait ?
De même ici, nous avons la loi de Christ en contraste marqué avec la loi de Moïse, laquelle avait affaire à une chair rebelle. La loi de Christ dirige ceux qui vivent par l’Esprit, et qui devraient être trouvés marchant par l’Esprit, mais qui néanmoins ont encore une nature mauvaise. Et comment seront-ils fortifiés dans la nouvelle nature, et pour vaincre la vieille ? Il dirige aussitôt leurs regards sur Christ, et il dit : « Portez, etc. ». Telle est la manière aimante et désintéressée d’accomplir la loi de Christ. Que votre âme s’intéresse aux saints qui sont dans la nécessité et dans la détresse ; et quand même il y aurait ce qui est positivement mauvais, cela vous conduira à regarder à Dieu, vous attendant à Lui pour qu’Il présente quelque chose venant de Christ, capable de relever cette âme qui a glissé dans le bourbier. Il introduit d’abord le cas flagrant d’une personne qui tombe dans le péché, et ensuite il s’étend davantage. Si vous voulez savoir quel est le sentier de Christ maintenant, et quelle est la volonté de Dieu, voici ce que Christ faisait. Il vint dans un monde rempli de mal et d’opposition à Dieu — rempli d’orgueil et de vanité ; et qu’y faisait-Il ? Il passait « de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance, etc. ». Quoique nous ne puissions pas faire des miracles, toutefois dans tout ce qui, en son esprit, ressemble à Christ, le principe moral de la vie de Christ ici-bas est précisément ce que tout croyant possède. Si vous avez réellement Christ, vous avez Christ non seulement quant à l’expiation, mais comme votre vie : « Qui croit au Fils a la vie éternelle » ; c’est Christ, tout aussi réellement que par le fait que je suis né d’Adam en ce monde, j’ai une vieille vie naturelle, qui aime le mal, et qui, comme elle augmente en force, augmente en capacité pour accomplir sa volonté propre. De même aussi, si je crois en Christ, il y a cette nouvelle vie qui est produite et qui se développe, en proportion que l’âme se nourrit de Christ et regarde à Christ et qu’elle médite sur les paroles et les voies de Christ.
Il y a une puissance d’assimilation communiquée ainsi au croyant par le Saint Esprit. Les paroles de notre Seigneur sont Esprit et vie. Ce n’est pas seulement qu’elles produisent la vie en premier lieu, mais elles soutiennent la vie et sont le moyen de lui donner vigueur. Et c’est ce que l’apôtre Pierre nous montre (1 Pier. 1). Il parle de la sentence incorruptible — « la Parole de Dieu vivante et permanente ». Mais ensuite, il montre que cette même Parole de Dieu, qui est le moyen de communiquer d’abord la vie par la révélation de Christ, est aussi le moyen donné pour la fortifier et la rafraîchir. En conséquence, il les exhorte que, comme des enfants nouveau-nés, ils désirent ardemment le lait spirituel et pur. La Parole de Dieu, qui est d’abord employée pour introduire la vie dans l’âme, en faisant connaître Christ, est ce qui maintenant maintient la vie, l’amène à se manifester et à s’exercer d’une manière salutaire. Et voici un des moyens : « Portez les charges les uns des autres, et ainsi accomplissez la loi de Christ ». C’est là ce que Christ faisait, quand Il était ici-bas. Il n’y chercha pas Sa propre satisfaction. Il ne chercha jamais un sentier agréable et commode ; mais au contraire, tous les cas de misère, et de péché, et de douleur, c’était là ce qui occupait le Seigneur Jésus, pourvu que ce fût la volonté de Dieu. Quand Il prit Sa place comme homme sur la terre, il y eut un exercice continuel de communion entre le Seigneur Jésus et Son Père, cet esprit de dépendance à l’égard du Dieu vivant, qui n’agissait jamais sans la direction de Son Père. Et il devrait toujours en être ainsi de nos âmes. Si nous nous appliquons ainsi à porter les charges les uns des autres, nous avons besoin de regarder à Dieu à ce sujet afin de connaître quelle est la volonté du Seigneur. Il ne s’agit pas de la loi, ni d’ordonnances, mais : « Portez les charges les uns des autres, et ainsi accomplissez la loi de Christ ».
« Car si, n’étant rien, quelqu’un s’estime quelque chose, etc. ». C’est là l’effet invariable de la loi, lorsqu’elle agit sur l’esprit. Elle suppose que l’homme a de la puissance — dans tous les cas, qu’il est encore en vie comme un homme dans le monde. — Or, c’est là la chose même à l’égard de laquelle nous déclarons, dans notre baptême, que telle n’est plus notre confession. Qu’est-ce, en effet, que le baptême d’un homme chrétien annonce ? C’est la confession du Christ qui est mort et ressuscité, et que dans la mort de Christ, je suis mort au péché et au monde, et au jugement de Dieu. J’ai passé hors de la scène d’hommes en vie sur la terre, et je suis introduit dans une nouvelle condition devant Dieu ; j’ai commencé une nouvelle vie ; je suis mort aux choses pour lesquelles je vivais autrefois, et je suis vivant quant à celles à l’égard desquelles j’étais mort. C’est en tout cela que Christ fait entrer celui qui croit.
Évidemment donc, « si, n’étant rien quelqu’un s’estime quelque chose, il se séduit lui-même ». La loi n’écrase jamais l’orgueil de l’homme ; et l’homme supportera tout ce qui suppose qu’il peut faire quelque chose. La loi agit simplement sur la nature de l’homme, et elle l’enfle, à moins qu’elle ne soit employée par le Saint Esprit pour le tuer dans sa conscience. La nature pervertit la loi en y attachant l’idée qu’elle — la nature — peut faire quelque chose ; et les hommes aiment cela, et en sont d’autant plus satisfaits d’eux-mêmes. C’est là ce que l’évangile détruit en sa racine même. Et il en résulte que des personnes qui sont extrêmement satisfaites d’elles-mêmes lorsqu’on les place sur le terrain de faire de grandes choses pour Dieu, seraient profondément mortifiées et blessées si on leur disait nettement qu’elles ne sont pas capables de Le servir. Combien peu il y en a qui souffriraient qu’on leur dise qu’ils n’ont jamais adoré Dieu pendant toute leur vie, et qu’ils ne le peuvent jusqu’à ce qu’ils soient nés de Dieu. Ils sont blessés par une doctrine comme celle-ci, parce qu’elle fait que l’homme — le moi — n’est rien, et que Dieu est tout ; elle met devant eux à quel terrible péril ils sont exposés — qu’ils sont vraiment perdus. S’ils le croyaient, ils crieraient à Dieu à ce sujet, et ils regarderaient à Dieu pour qu’Il leur donnât une nouvelle vie. Mais aussi longtemps qu’on s’adresse aux hommes sur des principes légaux, la distinction entre le premier homme et le second est tout à fait perdue. On s’adresse à l’homme comme tel, et on ne le traite pas entièrement comme un pécheur, ni comme un saint ; mais les deux choses sont confondues : en sorte que les âmes ne savent pas clairement si elles sont sauvées ou perdues, si elles sont passées de la mort à la vie, ou si elles sont encore sous la colère de Dieu. Voilà la raison pour laquelle nous en trouvons tant, quelques-uns même qui sont de vrais croyants, qui sont souvent éprouvés par des nuages et des éclipses. La racine de la chose est dans l’abus de la loi. C’est ce qui travaillait dans les Galates ; c’est ce qui a retenu et lié par les chaînes de leurs péchés, tant de milliers des enfants de Dieu depuis ce temps-là. Cela agissait donc sur leur chair et leur faisait penser qu’ils étaient quelque chose, tandis qu’à vrai dire ils n’étaient rien ; et quand il en est ainsi d’un homme, il est évident, comme l’apôtre ajoute, que « il se séduit lui-même ». Rien ne peut être plus piquant que les paroles qu’il emploie ici.
Mais s’ils se soumettaient à la Parole, s’ils consentaient à ne rien être, mais à laisser agir Dieu, il ajoute : « Or, que chacun éprouve sa propre œuvre ». Dieu commence sur cette base que nous ne sommes rien ; qu’il faut que le sage devienne fou, pour qu’il apprenne à être sage. L’homme n’aime pas cela, et regimbe ; et la conséquence est qu’il demeure toujours dans sa propre impuissance. Au contraire, vous ne trouverez jamais un homme qui soit dans la vérité quant à sa propre ruine, sans trouver que Dieu est là, dans la réalité de Son amour, lui donnant la vie éternelle en Son Fils. Que dire ensuite ? Qu’il « éprouve sa propre œuvre », et alors il aura de quoi se glorifier, par rapport à lui-même seulement, et non par rapport aux autres. Ici l’apôtre porte un coup qui va au cœur : qu’il la mette à l’épreuve. Sans doute le Seigneur reconnaîtra le vrai service ; mais toutes les fois qu’un homme examine et éprouve droitement son œuvre, ce n’est jamais un sujet de se glorifier, mais une chose humiliante en toute manière possible. Mais au moins, quand la propre saison sera venue, il y aura la moisson, si nous ne défaillons pas.
L’apôtre conclut cette partie de son sujet par une autre parole — et une parole qui pourrait sembler paradoxale si on la compare avec le verset 2. « Car chacun portera son propre fardeau ». De fait, nous avons les deux grands principes pratiques du christianisme : l’un est l’amour, actif et énergique, qui porte les charges des autres ; et l’autre est la responsabilité personnelle. « Chacun portera son propre fardeau ». Remarquez bien ; il n’est pas question ici du salut. Si un homme avait à porter son propre fardeau quand il s’agit de justification devant Dieu, ce serait détruire tout espoir. « N’entre point en jugement avec ton serviteur », dit le psalmiste : « car nul homme vivant ne sera justifié devant toi ». Si dans cette question Dieu entre en jugement avec moi, je suis perdu. Il est dit : « N’entre point en jugement » (il n’est pas dit avec un homme pécheur, mais) « avec ton serviteur ». C’est un homme converti, ou régénéré. C’est pour cela que notre Seigneur, dans la question si un homme ne sera pas laissé pour périr de sa propre mort, ou s’il sera délivré par la puissance de la vie de Christ, présente un principe totalement différent. « En vérité, en vérité, je vous dis, que celui qui entend ma parole, et croit à celui qui m’a envoyé, a (la) vie éternelle et ne viendra pas en jugement ; mais il est passé de la mort à la vie ». Vous remarquerez que dans ce passage j’ai employé le mot (jugement) à la place de (condamnation), qu’on trouve dans plusieurs versions ; je l’ai fait avec réflexion, parce que c’est le seul vrai sens du mot. « Condamnation » est une méprise positive. Le mot qui est avec raison traduit par « condamnation » ailleurs, est totalement différent. Ainsi : « Il n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans (le) Christ Jésus » ; ce n’est pas du tout le même mot. Mais quelquefois, dans des endroits où notre Seigneur et le Saint Esprit disent « jugement », les traducteurs se sont hasardés à s’éloigner de la Parole de Dieu, et ont introduit le mot « condamnation ».
Et la chose n’est pas limitée à un passage seulement. Dans la révélation remarquable à l’égard de la cène du Seigneur dans 1 Corinthiens 11, il se rencontre une méprise bien semblable. Les traducteurs ont introduit un mot et une idée qui leur sont propres et qui renferment une erreur non équivoque : ils se sont hasardés à dire que « celui qui mange et qui boit indignement, mange et boit sa condamnation ». Cela n’est pas vrai. Dieu dit qu’il « mange et boit un jugement contre lui-même ». Il n’y a pas un juge compétent, pas un homme chrétien qui connaisse le langage du Saint Esprit, pas un qui pourrait le nier, s’il examinait convenablement les preuves. La tradition humaine nous explique le penchant des personnes à mettre de côté des principes clairs de vérité. Car ce n’est pas tant une question qu’il faille décider d’après des bases critiques ; mais un tel changement contredit le but entier du Saint Esprit dans le passage. Qu’est-ce que l’apôtre disait à ces Corinthiens ? Vous avez traité indignement la cène du Seigneur, en en faisant une chose ordinaire. Quelques-uns d’entre vous se sont même oubliés au point de commettre ouvertement un péché grossier. Il y a une solennité particulière dans la cène du Seigneur comme dans le jour du Seigneur. Celui qui prétend que le jour du Seigneur est le sabbat, et que la cène du Seigneur ressemble à une ordonnance judaïque, ne sait pas ce que signifient les deux institutions chrétiennes les plus caractéristiques. Le jour du Seigneur diffère de tout autre jour ; c’est le jour de la grâce et de la résurrection (le jour du sabbat étant le signe relatif à la création et à la loi). Il en est de même de la cène du Seigneur : en elle le Seigneur place devant le chrétien sa parfaite délivrance, le sang et le corps rompu de Christ, et donne le témoignage à son âme qu’il est affranchi de toute condamnation. Or, dit l’apôtre, vous avez mangé et bu comme à un repas ordinaire ; vous y avez participé indignement. Car il se pourrait qu’une personne convertie en mangeât et bût indignement. Ces saints de Corinthe la prenaient légèrement, et le diable avait pris de l’avantage sur eux, et quelques-uns même en étaient venus à s’enivrer. C’était là, dit l’apôtre, manger et boire un jugement contre eux-mêmes, et non la cène du Seigneur. La conséquence était que quelques-uns d’entre eux étaient malades, et d’autres se mouraient. Il leur donne à connaître que le Seigneur les jugeait, et mettait Sa main sur eux. Mais, bien indubitablement, c’était là un jugement, et non la condamnation ou damnation. Et quel était le but du Seigneur dans tout cela ? « Afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde ». Car si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés. Mais quand nous sommes jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, « afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde ». C’est afin que nous n’ayons pas la condamnation ; tandis que les versions ordinaires supposent que les Corinthiens étaient exposés à cette sentence même. Lisez le mot comme étant « jugement », et vous trouverez que cela jette une lumière toute nouvelle sur le passage. Introduisez l’expression impropre, et vous détruisez l’équilibre d’une manière tout à fait irréparable ; mais du moment que vous revenez au vrai sens, suggéré dans la marge de la version anglaise, tout est rendu clair. Ce qui auparavant, était obscur et troublait votre âme, vous le voyez maintenant comme étant simple et solennel, saint et en même temps consolant. Si vous avez traité légèrement ce qui rappelle le souvenir des souffrances du Seigneur, vous êtes en danger de vous trouver ainsi sous Sa main. Quelques-uns avaient été ôtés de ce monde ; mais c’est « afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde ». Ce qu’il donne à entendre, c’est qu’ils étaient de si méchants enfants, qu’ils ne pouvaient être laissés plus longtemps dans ce monde. C’est pourquoi Dieu leur avait envoyé des maladies, et les avait enlevés par la mort.
La signification du mot (Κριμα) dans 1 Corinthiens 11, a un rapport intime avec celui du mot dans Jean 5 (Κρισις). Ce que notre Seigneur enseigne dans l’évangile, c’est qu’il faut que les hommes reçoivent de Christ l’une de ces deux choses — ou la vie, ou le jugement. La principale différence, c’est que dans Jean 5, le jugement est l’acte de juger — final et éternel, tandis que 1 Corinthiens 11 parle de l’exercice de la discipline dans ce monde. Mais le mot propre c’est « jugement » et non « condamnation ». Notre Seigneur montre qu’Il est Lui-même Celui qui donne la vie en communion avec le Père, et Celui qui exclusivement exécutera le jugement. Maintenant Il donne la vie : quiconque croit en Lui, a la vie ; quiconque Le refuse, doit venir en jugement. Car personne ne saurait être à la fois l’objet et de la vie et du jugement. La raison pour laquelle il y en aura qui viendront en jugement, c’est qu’ils rejettent le Fils de Dieu et la vie éternelle en Lui. « Celui qui a le Fils a la vie ». C’est là la force des paroles de notre Seigneur. Ils pouvaient demander : Comment cette vie éternelle peut-elle être obtenue ? Est-ce par l’obéissance ? ou bien par une ordonnance ? Ni par l’une, ni par l’autre. « En vérité, en vérité, je vous dis, que celui qui entend ma parole, et croit en celui qui m’a envoyé, a (la) vie éternelle ». Celui qui entend ainsi et qui croit ainsi, sait que Dieu s’intéresse aux âmes — qu’Il désire les avoir heureuses et sans péché par le moyen du Seigneur Jésus Christ. Mais il y a plus : il « ne viendra pas en jugement ; mais il est passé de la mort à la vie ». C’est absolument la même chose dans Hébreux 9, 27 : « Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, et après cela d’être jugés ». C’est le même mot. Telle est la portion de l’homme, et il ne peut y échapper. L’homme, comme tel, doit mourir, et doit être jugé. Mais, remarquez-le bien, c’est celui qui vit et qui meurt comme homme purement naturel. Il n’est pas dit qu’il soit ainsi réservé, pour le chrétien. Au contraire, il y a beaucoup de chrétiens qui ne mourront jamais ; et il n’y a aucun saint qui sera jugé éternellement.
Je dois prouver ce que je dis ici, par d’autres passages. « Le Seigneur lui-même, avec un cri de commandement, et une voix d’archange, et la trompette de Dieu, descendra du ciel, et les morts en Christ ressusciteront premièrement ; puis nous les vivants qui demeurons, serons ravis ensemble, avec eux dans les nuées à la rencontre du Seigneur en l’air ». C’est-à-dire que les saints vivants seront ravis avec les morts qui sont déjà ressuscités. Mais prenez un autre passage. « Nous ne nous endormirons pas tous ». Il faut que les hommes meurent tous ; mais, nous, nous ne nous endormirons pas tous. Nous ne mourrons pas tous nécessairement ; « mais nous serons tous changés ». Qu’il s’agisse de chrétiens qui sont morts ou de chrétiens vivants, tous doivent être changés, rendus conformes à l’image du premier-né, glorifiés dans leurs corps. Mais tous les saints n’auront pas quitté cette vie ; tous n’auront pas besoin d’être ressuscités ; car ceux d’entre les chrétiens qui seront trouvés vivants lorsque Christ viendra, seront ravis pour être avec Christ et transformés à Son image glorieuse, sans du tout passer par la mort, comme autant d’Énochs, transformés aussitôt à la ressemblance de la gloire de Christ. C’est là ce que nous tous, comme chrétiens, nous devrions attendre constamment, sans savoir quand la chose pourra arriver. C’est pourquoi il est dit : « Nous ne nous endormirons pas tous, mais nous serons tous changés ».
Mais que deviendront ceux qui ont refusé Christ ? Il faut qu’ils soient tous jugés. « Il est réservé aux hommes de mourir une fois, et après cela d’être jugés ». Mais plus que cela : — « Et comme il est réservé aux hommes de mourir une fois, et après cela d’être jugés, ainsi le Christ ayant été offert une fois pour porter les péchés de plusieurs, apparaîtra une seconde fois, sans péché, à salut à ceux qui l’attendent ». Vous avez là les deux portions : celle de l’homme, la mort et le jugement ; celle des chrétiens, Christ, la seule offrande pour les péchés, et qui va revenir en gloire, pour leur salut final et complet, et non pour le jugement. La question du péché a été si complètement réglée à la première venue de Christ, qu’il ne peut plus jamais s’élever une seule question à cet égard. Quand Il reviendra, « il apparaîtra une seconde fois sans péché », c’est-à-dire, sans question de péché, n’ayant rien à faire à ce sujet, à salut. Il a Lui-même souffert pour le péché — Il l’a ôté Lui-même ; et la conséquence en est que tout croyant, peu importe où il est, peu importe ce que peut être son ignorance, a le droit d’attendre le Seigneur, qui viendra pour lui, qui viendra pour tous ceux qui se sont endormis en Christ avant lui ; il a le droit de savoir que Christ ne l’appellera jamais en jugement, parce que, ayant été jugé pour lui, et ayant pour toujours ôté le péché par le sacrifice de Lui-même, Il apparaîtra une seconde fois à ceux qui sont tels, sans péché, à salut. Mais quant à ceux qui refusent Christ, bien loin de ne pas venir en jugement, ils seront expressément ressuscités d’entre les morts pour le jugement plus tard. C’est la « résurrection de jugement ». Son effet, sans doute, sera la damnation, mais sa désignation scripturaire, c’est « le jugement ». C’est le même mot que plus haut. Le but en vue duquel les méchants seront ressuscités, c’est le jugement. Et quel est le caractère de la résurrection du croyant ? La vie — afin que la même vie qui est maintenant donnée à nos âmes ait son libre cours et son plein développement en nos corps — que nous soyons parfaitement remplis de la vie de Christ, corps et âme.
Telle est l’attente du chrétien. Ainsi donc, dans ce verset 5 (« chacun portera son propre fardeau »), il n’est pas du tout question de porter chacun notre fardeau en jugement. S’il en était ainsi, pas une seule âme ne pourrait être sauvée ; — pas une ne mérite de l’être. Car qui n’a pas été coupable de péchés, de péchés graves et mortels ? — des péchés qu’il n’eût pas été possible pour Dieu de pardonner, à moins d’avoir Sa propre manière de le faire ; et c’est ce qu’Il a. Mais ce plan Lui coûta Son Fils, et la croix de Son Fils ; et la croix est le triomphe de Dieu. À la croix, Christ a pour toujours ôté le péché pour toute âme qui croit en Lui. C’est pourquoi quand il est dit : « chacun portera son propre fardeau », c’est simplement en vue des difficultés et des épreuves dans la vie pratique. Souvenez-vous, dit-il, de porter les charges les uns des autres ; — mais, après tout, il faut que chacun porte son propre fardeau. Il faut que chacun de nous ait affaire à Dieu pour lui-même. Nous ne pouvons trouver aucun autre qui réponde pour nous. Il y en a qui prétendent que les paroles de Hébreux 13, 17 : « ils veillent pour vos âmes, comme ayant à rendre compte », enseignent que les ministres répondent pour les âmes des autres ; mais c’est un non sens, ou quelque chose de pire. Le principe est faux. Il n’y a pas une telle chose qu’une personne rendant compte de l’âme d’une autre. « Chacun de nous rendra compte pour soi-même à Dieu ».
Il faut que le pécheur soit jugé ; mais chacun des saints, aussi bien que chaque pécheur, devra rendre compte pour tout à Dieu. Le Seigneur dit que le croyant ne viendra pas en jugement ; ce qui veut dire qu’un homme est mis en jugement pour qu’il soit décidé s’il sera sauvé ou non. Cela ne saurait jamais être le cas d’un homme qui est chrétien. Toutes choses seront manifestées devant le Seigneur — non seulement les péchés que nous avons pu commettre depuis que nous sommes des croyants, mais ce que nous avons commis quand nous étions inconvertis. Nous pourrions supposer que cela serait terrible au-delà de toute expression. Mais souvenons-nous que la condition dans laquelle le croyant rendra compte pour lui-même à Dieu, c’est après qu’il sera semblable à Christ — quand il n’aura pas un seul sentiment qui ne soit de Christ — pas un désir qui ne soit pour la gloire de Christ ; tout sentiment de honte aura disparu, et ce qui demeurera, c’est uniquement ce qui est selon Christ. La pensée que Christ nous établira tous parfaitement semblables à Lui-même, dans la gloire, est aussitôt une réponse à toute anxiété de l’âme. Mais tandis que tout cela est vrai, il est important de se rappeler qu’il se poursuit maintenant un jugement très actif. Le Père observe nos voies et agit avec nous ; et nous devrions examiner nos voies jour par jour. Chacun, qu’il soit un saint ou un pécheur, devra rendre compte pour soi-même à Dieu : la puissance de Dieu l’accomplira dans l’un et dans l’autre ; dans l’un pour son entière condamnation, dans l’autre afin qu’il apprenne de quelle manière absolue il est redevable à la grâce de Dieu. Mais c’est là une chose bien différente du jugement. Nous ne pouvons trop insister sur ce point, qu’« être manifesté devant le tribunal de Christ », ce n’est pas nécessairement le jugement. Aucune parole de l’Écriture ne peut jamais mettre de côté cette vérité que « celui qui… croit… ne viendra pas en jugement ». Dieu ne se contredit jamais. Que chacun doive porter son propre fardeau, cela a rapport à notre responsabilité. Quelle chose merveilleuse que celle-ci ! — que nous en avons fini avec notre responsabilité comme hommes ; et que, maintenant que nous avons Christ, une nouvelle responsabilité commence pour nous. Nous avons maintenant à nous conduire comme ceux qui ont la vie éternelle, qui n’appartiennent pas à eux-mêmes, mais à « celui qui est mort et ressuscité pour eux ». Maintenant commence notre responsabilité de vivre pour Christ — de Lui dévouer la nouvelle vie que Dieu nous a donnée, ayant en même temps le sentiment que le Seigneur sonde nos voies jour par jour.
Vient ensuite une autre chose, et il semblerait que ces saints l’avaient oubliée : « Que celui qui est enseigné dans la parole fasse participer celui qui enseigne à tous les biens (temporels) ». Je crois qu’il y a quelque danger pour nous-mêmes d’oublier cette sorte de relation avec tous ceux que le Seigneur a suscités pour le bien de l’Église. Il y a certains jalons qui ne doivent jamais s’oblitérer. De ce nombre est cette chose même — le privilège et l’obligation de la part de ceux qui sont enseignés de se souvenir des chrétiens qui enseignent dans l’amour. Il n’est pas dit : Celui qui l’enseigne ou les enseigne, mais « celui qui enseigne ». Quelle largeur bénie de sentiments nous voyons là ! Supposons que vous soyez exempts d’une telle nécessité dans la localité spéciale que vous habitez, devez-vous tellement manquer de prévoyance que vous perdiez de vue les droits du Seigneur sur vous ailleurs ? Ce serait vraiment de l’égoïsme. Rien ne saurait être plus dégradant pour des chrétiens, après avoir abandonné le mal qui existe dans un lieu ou un autre, et qu’ils ne font plus ce qui est à peu près forcé, que de prendre avantage du nom du Seigneur pour avoir ce qu’on pourrait appeler une église à bon marché, oubliant qu’ils appartiennent à l’Église de Dieu comme un tout. « Que celui qui est enseigné dans la parole fasse participer celui qui enseigne à tous les biens (temporels) ». Que personne n’aille supposer que ceci n’était donné que pour les premiers temps ; ou qu’il y ait aucune circonstance qui puisse changer la responsabilité des saints à cet égard. Il est bon pour nous de rappeler les uns aux autres que nous sommes membres du corps de Christ. Prenez le cas des ouvriers qui travaillent à l’étranger : la chose n’a-t-elle pas une voix pour nous ? Quels droits à notre amour et à notre sympathie ! Le Seigneur attend maintenant un bien plus grand renoncement à soi et un bien plus grand service d’amour, que lorsque c’était une question de loi. Ne nous contentons pas de cesser de mal faire ; mais apprenons aussi à bien faire.
« Ne vous séduisez pas ; on ne se moque pas de Dieu ; car ce que l’homme sème, il le moissonnera aussi. Car celui qui sème pour sa propre chair, moissonnera aussi de la chair (la) corruption ». Il y a évidemment ici une question de satisfaction de soi-même d’une manière ou d’une autre. S’il y a du cœur pour le Seigneur, on trouvera bien vite une manière de Le servir pleinement ; mais cette manière demande souvent beaucoup de renoncement à soi-même. Il n’y a point de circonstances qui mettent de côté cette vérité. « On ne se moque pas de Dieu ; car ce que l’homme sème, il le moissonnera aussi. Car celui qui sème pour sa propre chair, moissonnera aussi de la chair (la) corruption ; mais celui qui sème pour l’Esprit, moissonnera de l’Esprit (la) vie éternelle ». Ceci est bien fort, mais c’est vrai. Quelqu’un pourrait me dire : J’avais compris que vous enseigniez que ceux qui croient ont déjà la vie éternelle ; mais ici il est dit que « celui qui sème pour l’Esprit moissonnera de l’Esprit (la) vie éternelle ». Les deux déclarations ont la plus grande valeur ; mais le point de vue est totalement différent. Si Dieu exhorte Son peuple à une marche sainte, Il montre que la vie éternelle est la couronne de cette marche, et qu’elle en est la fin. Quel que soit le salut que la grâce introduit, elle ne met jamais de côté la valeur d’un saint dévouement à Dieu. Et par conséquent, ceux qui ont la vraie foi, manifestent aussi une sainteté réelle ; et ceux-là seuls. Les deux choses se tiennent ensemble. Celui qui croit en Christ reçoit la vie éternelle. Quelle en est la conséquence ? C’est qu’il sème à l’Esprit et moissonne la vie éternelle. La vie éternelle ici est évidemment ce que nous aurons dans la gloire. La vie éternelle dont il est parlé par Jean est ce que le saint possède sur la terre. Les deux sont vrais. Dans la gloire, il trouvera la vie éternelle sans alliage. Je la reçois maintenant, comme croyant, de Christ, et je la trouverai dans le ciel, suivant le sentier de la sainte volonté de Dieu. La résurrection de vie des croyants se composera de ceux qui auront pratiqué le bien ici-bas. « Or ne nous relâchons pas en faisant le bien, car nous moissonnerons en la propre saison, si nous ne défaillons pas ». Il y a souvent un grand danger de devenir lâches dans la course. Un homme commence bien et montre de la bonté ; mais après un certain temps, il trouve que tant de personnes ont pris avantage sur lui, qu’il devient réservé et soupçonneux. C’est là se relâcher en faisant le bien, ou l’effet de ce relâchement. Il est décidé à ne plus se laisser duper. La vérité est que la chair a une grande part dans un tel genre de langage et de sentiments. Lorsque les âmes sont occupées de la grâce de Dieu, elles ne sont pas si aisément fatiguées. De ce qu’un autre a été égoïste, est-ce une raison pour un saint de devenir égoïste aussi ? L’état convenable pour un chrétien, c’est d’avoir un cœur ouvert et généreux, et d’être actif à chercher des moyens convenables de faire le bien. Le Seigneur ne dit pas : Donnez ce qu’ils demandent, mais le principe demeure vrai, que le chrétien doit garder cet avantage béni de position, d’être celui qui donne. Si je suis sur le terrain de la loi, je ne ferai que marchander ; mais si je suis sur le terrain de la grâce et de la foi en Christ, j’aurai la place qui est plus bénie ; et « c’est plus heureux de donner que de recevoir ». Quand il est parlé ici de moissonner, il est clair que c’est dans la gloire. Nous ne devons pas nous y attendre ici. Nous pouvons rencontrer ce qui est doux et reconnaissant, mais nous ne devons pas être surpris s’il en est autrement, et s’il y a bien des choses qui sont pénibles de la part des hommes. Rappelons-nous que c’est au Seigneur que nous prêtons. Y a-t-il là quelque sujet de désappointement ? Celui qui regarde au Seigneur n’en éprouve jamais. « Ainsi donc, comme nous (en) avons l’occasion, faisons du bien à tous ». C’est là l’affaire du chrétien — de faire du bien, « mais principalement à ceux de la maison de la foi ». Il y a une connexion spéciale avec les saints ; mais nous ne devons pas nous arrêter là. « Comme nous (en) avons l’occasion, faisons du bien à tous, mais principalement à ceux de la maison de la foi ».
Il est important de nous rappeler, en lisant toutes les parties de la Parole de Dieu, qu’il n’y a rien d’introduit sans l’inspiration directe du Saint Esprit. Il y a un passage spécial dans 1 Corinthiens 7, où l’apôtre affirme expressément que ce n’est pas le Seigneur, mais lui-même qui donne un certain jugement quant aux relations naturelles des croyants. Mais l’apôtre lui-même n’écrivait pas ainsi sans le Saint Esprit. Il était inspiré pour dire que ce n’était pas le Seigneur, mais lui-même. Dès lors il n’y a pas la moindre contradiction, même dans une manière de parler si exceptionnelle. Prenez encore le livre de Job, où vous trouvez Satan qui parle aussi bien qu’ailleurs. Mais alors, tandis qu’aucune personne intelligente ne voudrait soutenir que ce que Satan dit était inspiré, néanmoins l’écrivain du livre était inspiré pour nous le donner parfaitement ; l’écrivain était entièrement conduit par Dieu à nous présenter précisément assez, bon ou mauvais, de ce qu’avaient dit les personnes dont il s’agissait, l’homme, Satan, l’Éternel Lui-même, pour accomplir l’objet divin dans cet écrit. Ainsi il n’y a pas une exception quelconque dans la Bible à la grande vérité que « toute Écriture (est) divinement inspirée ». Ce n’est pas là une déduction purement humaine, mais la doctrine positive de Dieu Lui-même. Tout ce qui tombe sous cette désignation, « Écriture » (πασα γραη) est inspiré de Dieu. Telle est la déclaration expresse de l’apôtre Paul dans sa dernière épître (2 Timothée) ; et il ne la limite pas, je crois, à ce qui existait déjà, mais laisse la place pour ce qui devait être écrit, comme pour l’Apocalypse. « Toute Écriture (est) divinement inspirée », etc. Que ce fût ce qui avait été donné, ou le peu qui restait pour clore le canon de la Bible, tout était également de Dieu ; non pas que tout fût également élevé dans son caractère, ni que tout revêtît la forme de doctrine, ni même que tout fût révélation, car révélation et inspiration sont deux choses différentes. En donnant le récit de la vie de notre Seigneur, les écrivains rapportaient sans doute occasionnellement ce qu’ils avaient eux-mêmes vu et entendu. Cela était inspiré ; mais une révélation est ce que l’homme n’a jamais connu. Lorsque l’apôtre Paul dit que c’est par la parole du Seigneur qu’il déclare une chose : « Nous vous disons ceci par la parole du Seigneur », que « le Seigneur lui-même, avec un cri de commandement… descendra du ciel », ce n’est pas seulement une portion inspirée, mais une révélation. De même, sans doute, toute prophétie est nécessairement une révélation ; et c’était uniquement dans le cas d’une révélation positive qu’il y avait lieu d’arrêter une personne qui était en train de parler ; peu importe le degré d’importance de ce qu’elle communiquait, si quelque chose était révélé à un autre qui était assis, il avait le droit d’arrêter celui qui parlait. Ceci a nécessairement, il me semble, cessé d’avoir lieu maintenant. La révélation étant complète, toute tentative d’agir sur ce pied-là serait non seulement irrégulière et inconvenante, mais virtuellement une prétention à une nouvelle révélation, ce qui est positivement faux et un déshonneur fait à celle qui existe. Quand il restait encore à communiquer une partie de la pensée de Dieu, Dieu maintenait le droit souverain de Son Esprit pour introduire une révélation. Mais quand toute la pensée de Dieu eut été entièrement révélée dans Sa Parole, une telle manière d’agir a dû naturellement cesser. D’après cela, bien qu’une personne eût ce qui venait réellement de Dieu, son devoir serait d’attendre que le moment convenable fût venu ; la chair et Satan pourraient empêcher, mais Dieu est au-dessus de toutes les difficultés. Je fais ces remarques générales en rapport avec le verset que nous allons considérer.
Ce verset pourrait sembler un peu surprenant dans une épître si pleine de déclarations de doctrine et d’appels à la conscience et au cœur. Au milieu de tout cela, l’apôtre dit : « Vous voyez quelle longue lettre je vous ai écrite de ma propre main ». Ou bien, si vous prenez la phrase comme elle peut très bien être prise : « Vous voyez avec quelles grosses lettres », etc., la chose est encore plus frappante. Écrire était un peu inaccoutumé, même pour l’apôtre Paul. Écrire un document important, ce n’était pas une chose ordinaire, sinon par le moyen d’un secrétaire ; c’était un métier ou une occupation à part. En conséquence, c’était l’habitude de ceux qui étaient occupés activement et à une tâche difficile, d’employer quelqu’un à écrire pour eux. Cependant, dans le cas présent, l’apôtre écrivit lui-même ; et comme il n’était pas habitué à écrire, il appela l’attention sur le gros caractère de l’épître. C’était une lettre comparativement courte, mais elle était toute écrite par lui ; et comme il n’était pas habitué à écrire ses propres compositions, les lettres paraissent avoir été écrites en de gros caractère, et l’apôtre avait probablement éprouvé une difficulté considérable à l’exécuter. Car il faut nous rappeler qu’il y avait une grande différence entre les facilités qu’on avait alors pour écrire et celles dont on jouit à présent. Mais il y avait dans ce simple fait quelque chose qui était en rapport avec la manière et la portée de l’épître entière. Ce n’est pas une circonstance purement isolée ; mais l’apôtre appuie là-dessus à cause de l’état et des dangers des Galates auxquels il s’adressait. Le Saint Esprit le conduisit à l’expression du plus fort et du plus ardent désir pour leur délivrance. Il met donc de côté toute pensée d’employer un intermédiaire entre eux et lui ; peu importe la difficulté, il leur écrira lui-même. Dans d’autres occasions, il pouvait employer Tertius ; mais le cas qu’il avait en main était si urgent, la question dont il s’agissait si saisissante et si importante, que toute autre tâche devait céder le pas. C’était un moment si plein de graves dangers, qu’il ne tient aucun compte ni du temps, ni de la peine, ni d’aucune autre chose. C’était un témoignage de l’intense intérêt qu’il prenait à ces saints de la Galatie, et un témoignage d’autant plus frappant, à cause de l’absence marquée de ses salutations accoutumées, selon sa bienveillance personnelle et fraternelle. Nous avons là une confirmation bien belle de la manière remarquable dont le Saint Esprit mentionne des faits qui portent l’empreinte de la pensée même de Dieu, de Ses soins et de Son amour pour Son peuple, de Sa profonde sollicitude pour eux. L’apôtre lui-même appelle l’attention sur les circonstances de cette épître. Il avait écrit par d’autres, et à d’autres, beaucoup plus librement ; car, comme je l’ai dit auparavant, il n’y a pas une seule salutation dans l’épître. Ce n’est pas qu’il fût à l’étroit dans son désir devant Dieu ; mais il ne pouvait donner l’essor à ses affections chrétiennes envers eux. Il y avait dans leur conduite ce qui était si désastreux et si contraire à la gloire de Christ, quoiqu’il pût y avoir un certain mélange de bien, qu’il était en perplexité à leur sujet ; il espérait à leur égard, et c’était là tout. Il avait confiance à leur égard par le Seigneur, mais s’il regardait à eux-mêmes — à ce qu’ils faisaient et disaient — il ne pouvait en avoir aucune.
Ces deux faits, donc — l’absence de salutations personnelles, et le fait qu’il écrivit la lettre de sa propre main — fournissent l’un et l’autre un témoignage remarquable de la manière dont l’amour de Dieu agit par le moyen d’un cœur d’homme. Tout ce qui n’est qu’un échange d’aménité fraternelle a pris fin. On aurait pu dire : Quel manque d’affection de la part de Paul ! Mais l’affection fraternelle n’est pas l’amour, quoiqu’on les confonde souvent. Si l’apôtre, dans l’état où les choses étaient, avait envoyé un message bienveillant à l’un ou à l’autre, c’eût été une chose purement humaine, bien loin de venir de Dieu. Il pouvait le faire en écrivant aux Romains et même aux Corinthiens, mais non avec les Galates. Quelle idée cela donne de leur état ! Et pourtant, il devait y avoir des abominations plus grandes encore que celles-ci : des choses incomparablement pires devaient s’introduire furtivement ; mais il était réservé à Jean d’en parler. Et quoique avant tous les autres (puis-je le dire ?) Jean fût le champion le plus éminent de l’amour, toutefois Jean lui-même, dans sa première épître, est si loin de faire des allusions personnelles, qu’il ne l’adresse pas du tout à une assemblée, mais cette épître se présente sans une adresse spéciale et dans la forme la plus générale ; et c’est pour cela qu’elle est communément appelée une épître catholique ou générale. Elle fut peut-être écrite ainsi, afin qu’elle fût d’une manière prééminente une sorte de circulaire pour l’Église entière. J’apprends par là que lorsqu’il y a quelque chose qui touche à l’œuvre de Christ, comme chez les Galates, ou à la personne de Christ, comme dans Jean, il faut que toute considération personnelle cède la place. Comme le Seigneur, dans Sa mission finale à Israël (les soixante-dix — Luc 10), défendit aux disciples de saluer personne en chemin, de même ici le Saint Esprit agit d’une manière un peu analogue, parce que la gloire de Christ était compromise, et que le fondement de toute bénédiction était menacé. Une autre chose à remarquer, c’est que les enfants de Dieu généralement ne comprennent pas comment le mélange de la loi avec Christ se trouve la racine de mille difficultés. C’est une chose rare maintenant que de trouver un chrétien qui ne soit pas en principe où les Galates en étaient. Dans l’état présent de la chrétienté, nous avons tous été élevés à cela, depuis notre enfance. Nous ne le trouverons pas seulement dans des localités particulières, ici et là ; mais, sous une forme ou une autre, c’est la maladie qui prévaut universellement, la maladie enracinée, chronique et fatale dans la chrétienté, et qui s’insinue dans les pensées et les voies des hommes, et en toutes choses.
L’apôtre, après avoir parlé de cette manière si remarquablement brusque qui distingue son caractère — car nous devons tous avoir observé cette excessive rapidité de transition d’un sujet à l’autre, qui caractérise si fréquemment les écrits de l’apôtre — Paul, dis-je, revient au sujet qui agitait son esprit, et résume dans ces derniers versets et le danger et la bénédiction. « Tous ceux qui veulent avoir une belle apparence dans (la) chair, ceux-là vous contraignent d’être circoncis. seulement afin qu’ils ne soient pas persécutés à cause de la croix de Christ ». Il ne s’arrête pas à ce qu’on pourra dire. On pourrait l’accuser d’imputer des motifs ; mais n’importe. On a beau nier que le légalisme fraternise avec le monde, qu’il aime ses aises, et qu’il aime une récompense présente, quelque parade qu’il fasse de piété ; il n’est, après tout, qu’un désir d’avoir « une belle apparence dans (la) chair ». Ceci est de toute importance ; car, je le demande, qu’est-ce que les hommes recherchent maintenant ? Qu’est-ce qui contenterait les hommes ? Si l’on voyait tout le monde fréquenter les églises et les chapelles — les personnes se conduisant d’ailleurs sobrement et d’une manière décente et régulière — quelles réjouissances universelles quant à l’amélioration dans l’état et la perspective de la chrétienté ! Et que serait tout cela aux yeux de Dieu ? Je n’hésite pas un instant à dire que, s’il n’y avait que cela, ce serait uniquement « une belle apparence dans (la) chair ». Ce que nous avons, comme chrétiens, le droit de chercher, et la chose sans laquelle nous ne devrions jamais demeurer satisfaits, c’est que les âmes passent de la mort à la vie — que les âmes soient délivrées de la puissance de Satan, et transportées dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu. Jusqu’à ce que les âmes aient passé les frontières, tirées des régions des hommes et amenées en la présence de Dieu, qu’y a-t-il eu de fait qui pût fournir au chrétien un fondement positif de joie et de reconnaissance ? Il n’est pas seulement question maintenant de la société ni du monde. Nous savons que le monde est sous la condamnation, que depuis la croix de Christ le jugement le menace toujours — d’une manière aussi certaine que dans le cas d’un criminel qui a été jugé et trouvé coupable ; de même que, comme condamné, il attend dans sa cellule que sa sentence soit exécutée — telle est la condition de l’homme. Les chrétiens la réalisent-ils ? Bien imparfaitement. S’ils le faisaient, pourraient-ils occuper un terrain commun avec le monde ? Une personne pourrait-elle entrer dans la cellule du condamné et lui parler comme s’il n’y avait rien de particulier ? Nous penserions nécessairement que celui qui parlerait ainsi serait dénué de tout sentiment convenable. Et il en est de même, mais d’une manière bien plus terrible encore que l’exécution d’un seul criminel. Nous savons bien que dans le jour qui s’approche, les hommes ne pourront échapper ni dans le moment même, ni pour l’éternité. « Et comme il arriva aux jours de Noé, il en sera de même aux jours du Fils de l’homme aussi ; on mangeait, on buvait, on se mariait, on donnait en mariage, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche ; et le déluge vint et les fit tous périr. Et ainsi qu’il arriva aux jours de Lot : on mangeait, on buvait, on achetait, on vendait, on plantait, on bâtissait ; mais au jour où Lot sortit de Sodome, il plut du feu et du soufre du ciel qui les fit tous périr ; il en sera de même au jour où le Fils de l’homme sera manifesté ». Dieu demande de tous Ses enfants qu’ils rendent leur témoignage dans le monde, savoir : qu’ils ont appris de Dieu Lui-même que tout est incertain et ne tient qu’à un fil ; que le jugement est suspendu sur le monde ; que Christ « est prêt à juger les vivants et les morts ». Il attend la volonté de Son Père. Tout dépend seulement de cela. Mais il nous est dit — et nous le savons — qu’Il va venir, et qu’Il vient bientôt ; et c’est là ce que nous attendons. Toutefois, au milieu de cette scène d’un monde condamné, et en même temps qu’il est sûr que le Seigneur va venir pour exécuter le jugement sur le monde, il y a une telle chose qu’un bon nombre d’âmes qui sont passées à la vie éternelle, par le moyen de la foi en Christ, et qui le savent — qui du moins devraient le savoir. Ils appartiennent à Celui qui va juger, et non à la scène qui va être jugée.
Quel est l’effet de tout cela ? Ils ont en esprit abandonné les circonstances dans lesquelles les hommes s’efforcent de maintenir une belle apparence ; ils se sont repentis envers Dieu ; ils se sont inclinés devant le Sauveur, le Seigneur Jésus, et ils ont trouvé en Lui la vie et la paix. Tout est réglé entre leurs âmes et Dieu. Devant Christ — la lumière, la vérité, la vie — la belle apparence a disparu. Et pendant que cette grande œuvre se poursuit, une grande partie du monde cherche à être aussi religieuse qu’elle le peut ; c’est-à-dire à réconcilier la religion avec le monde. Et beaucoup d’enfants de Dieu, par l’effet de cette stratégie de l’ennemi et de leur propre manque de vigilance, descendent au niveau du monde, parce qu’il y a là de grands noms, parce que les apparences sont là, et parce qu’on peut même citer la Parole de Dieu pour montrer qu’il est bien d’y marcher. C’est ce qu’on fait ordinairement en prenant ce que Dieu dit à Israël, qui était le peuple de Dieu selon la chair, gouverné par la loi, pour l’appliquer à ceux qui sont le peuple de Dieu maintenant, appelés à marcher sous la grâce et sous Christ seulement, qui ont le Saint Esprit afin qu’ils marchent par l’Esprit et qu’ils ne cèdent à rien de ce qui est de la chair. Le mélange de ces deux choses séduit les chrétiens et les entraîne dans ce qui n’est, après tout, que la religion de la chair. Ils pensent qu’un système terrestre de formes religieuses doit être bon maintenant, parce qu’il avait la sanction de Dieu dans l’Ancien Testament. Ils voient que Dieu reconnaissait autrefois « un sanctuaire terrestre », et ils en tirent un argument pour tous les temps et tous les lieux. Ainsi ils se trouvent entraînés dans « la belle apparence dans (la) chair » ; et cela d’autant plus aisément qu’elle est habituellement accompagnée de l’absence de la persécution, et donne même de la considération dans le monde. Les hommes sentent bien que vous ne pouvez élever le monde jusqu’à marcher avec vous au-dessus de son propre niveau — ce qui frappe la vue et la raison. Mais du moment que vous vous abaissez à vous unir au monde, vous quittez le terrain chrétien. Il faut une nouvelle nature. La foi est indispensable. Le monde n’a rien de cela. Vous pouvez descendre à prendre le sentier du monde, si vous voulez agir de concert avec le monde. Ce n’est pas que le monde par là devienne chrétien, mais que les chrétiens ainsi deviennent mondains. Tel est le seul résultat de cette tentative d’unir les chrétiens avec ceux qui ne sont pas chrétiens, dans le service et le culte de Dieu.
Écoutez la sentence solennelle : — « Tous ceux qui veulent avoir une belle apparence dans (la) chair, ceux-là vous contraignent d’être circoncis, seulement afin qu’ils ne soient pas persécutés à cause de la croix de Christ ». Ils veulent vous soumettre à ces formes religieuses. La raison, c’est qu’ils craignent de souffrir pour Christ. La croix est la fin du vieux monde, où la chair était reconnue ; et l’introduction du nouvel état de choses où rien, sinon ce qui est du Saint Esprit, n’a de valeur aux yeux de Dieu. L’apôtre fait voir que l’égoïsme, après tout, est au fond de la chose. Quand les personnes marchent avec le monde, il n’y a jamais une conscience tranquille. Rien ne plaît tant au monde que d’amener les vrais chrétiens à marcher avec lui. Combien est humiliant le succès de Satan en ceci ! Le but pour lequel Dieu a appelé les chrétiens hors du monde, c’est de manifester un peuple, heureux en Christ, et pourtant n’ayant rien que la tribulation dans le monde. Je ne parle pas maintenant de nos épreuves ordinaires, de nos épreuves de chaque jour. Si les saints font des choses folles et qu’ils en souffrent, comme d’autres, ils ont leur part dans les résultats de leur propre folie. Mais il y a des épreuves qui tombent sur un chrétien parce qu’il est chrétien — être méprisé et rejeté, décrié et calomnié, parce qu’il marche avec Dieu, et qu’il s’est mis du côté de Dieu contre le monde ; parce qu’il a part à la croix de Christ, et qu’il attend Sa gloire, refusant par conséquent non seulement les mauvaises choses du monde, mais ses meilleures : c’est là ce qui excite tant la colère du monde. Ils peuvent parler des fautes des chrétiens. Mais si les mêmes fautes étaient commises par le monde, avec quel empressement et quelle facilité on les oublierait ! Mais quand il s’agit d’un chrétien, il y a ce qui leur fait sentir que, quelle que soit la faiblesse et la folie de la personne, il y a quelque chose qui est au-dessus du monde ; et, en réalité, c’est là ce qui les trouble.
Si les chrétiens dont il s’agit ici avaient seulement voulu consentir à être circoncis ! Mais tout homme peut être circoncis, encore qu’il soit inconverti. Soumettez-vous seulement à prendre un engagement de tempérance, vous associant à des hommes du monde, et ils seront contents, parce que vous descendez à un niveau où ils peuvent se placer avec vous. Je ne me mêle pas aux efforts du monde pour réformer le monde ; mais j’ai beaucoup à dire sur le péché et la honte des chrétiens en s’associant avec le monde dans ses efforts pour arrêter la plaie par le moyen des promesses et des vœux de l’homme. C’est un terrain absolument faux et contraire à l’évangile, dont le point de départ est la corruption totale de la nature de l’homme. Tandis que, du moment que vous faites une œuvre pour amender cette nature, ce que l’homme du monde peut également faire (et il peut signer l’engagement aussi bien que vous), il est clair que vous vous êtes placé sur un terrain où le chrétien abandonne Christ comme la seule arme — d’une trempe divine — dont il puisse user envers l’homme dans la chair, et pour retourner à l’arc et à la flèche, si je puis le dire, à la ressource de la contrainte morale. Et en vérité, je ne puis que le regarder comme une chose inférieure, même à la circoncision, qui était le type d’une vérité bien bénie — de l’entier dépouillement de la chair. Mais quand Christ mourut, toutes les choses qui n’étaient que des types, et qui avaient entièrement manqué en tant que remèdes efficaces, furent ensevelies dans Son tombeau ; et maintenant, Il est ressuscité et il y a une nouvelle vie en résurrection, qui n’a rien à dire à la vieille vie, sinon de la mortifier. La réalité de la vie a été manifestée, et c’est avec elle que le chrétien a affaire maintenant. Christ est devenu sa vie et aussi son objet. C’est le grand but du diable que d’amener les chrétiens à inscrire sur les enfants de Dieu quelqu’autre nom avec Christ : ainsi donc, il importe peu ce que c’est, que vous preniez la circoncision comme type de bénédiction spirituelle, ou les restrictions purement morales de nos jours, c’est tout à fait une méprise quant à l’objet pour lequel Dieu nous a appelés hors de ce monde. Le chrétien est en dehors de cette sphère ; il a été introduit dans la sphère de la grâce. La place du magistrat n’est pas une place de grâce, mais de gouvernement, ce qui naturellement demande la punition du mal. Ce n’est pas la grâce. La grâce n’est pas la loi ; mais, « à celui que te frappe sur une joue, présente aussi l’autre ». Il n’y aurait plus de justice, si les magistrats essayaient d’agir ainsi. Mais si d’un côté le chrétien n’a rien à faire en dehors de la sphère de la grâce, il est tenu, de l’autre, de respecter le gouvernement, et de ne jamais parler avec mépris des dignités de ce monde. Plus il connaît ses propres privilèges, plus il est à même de maintenir l’honneur du magistrat. Il le reconnaît d’autant plus, qu’il ne le convoite pas lui-même. Il a lui-même une bien meilleure place ; mais s’il connaît le secret de sa propre joie et de sa propre liberté dans ce monde, qu’il reconnaisse en même temps les autorités qui sont au-dessus de lui, et que Dieu a ordonnées pour le gouvernement terrestre. Lorsque des personnes sont dans la même sphère, il peut y avoir plus ou moins de rivalité ; car les hommes aiment mieux gouverner les autres que d’être gouvernés eux-mêmes. Mais quand une âme est entièrement délivrée du monde, elle peut d’autant plus cordialement reconnaître ce qui est de Dieu ici-bas, et voir la sagesse de l’ordre qu’Il y a établi. C’est sur ce fondement-là que le Saint Esprit insiste toujours sur l’obéissance du chrétien aux lois, et sur l’honneur qu’il doit rendre au roi ou à tout autre gouverneur auquel il peut se trouver assujetti.
Mais revenons à notre sujet. L’apôtre fait voir de plus, qu’après tout ces zélateurs de la circoncision ne gardaient pas la loi. Ils ne l’observaient qu’en partie, avec une bonne mesure d’inconséquence, quelque vifs que fussent leurs sentiments contre les défenseurs de la liberté chrétienne. C’est toujours le cas. Ceux qui insistent sur la perpétuité du sabbat, comment le gardent-ils ? Ce n’est pas seulement qu’ils ne distinguent jamais le vrai jour ; mais en supposant que le jour du Seigneur fût réellement le même que le sabbat, l’observent-ils selon la loi ? Pas du tout. Ils vous diront que le christianisme, outre qu’il a changé le jour, a modifié le mode de l’observer, que l’évangile mitige la sévérité de la loi de Dieu, etc. Si ce n’est pas là annuler la loi par incrédulité, il est difficile de dire ce que ce serait. Je nie leurs faits, leurs doctrines et leur conclusions. Le christianisme, bien loin d’atténuer la force de la loi, ou d’ôter quelque chose de ce qu’elle ordonne, est ce qui seul donne à la loi sa pleine valeur. — « Annulons-nous donc (la) loi par la foi ? Qu’ainsi n’advienne ! Au contraire nous établissons la loi » (Rom. 3, 31). La doctrine de la foi, au lieu d’affaiblir la force obligatoire de la loi, la prouve et la maintient au plus haut degré. Mais cet établissement de la loi, dont l’apôtre parle dans Romains 3, n’a aucun rapport quelconque à la question d’une règle d’après laquelle le chrétien a à marcher. Le chapitre parle de la ruine de l’homme et de la justice de Dieu, non pas de ce qui est pratique, et il démontre que la foi maintient l’autorité de la loi dans la croix de Christ, laquelle reconnaît la juste et totale condamnation des hommes, et devient la base de la justice divine qui justifie, qui est révélée au croyant et devient sa portion. La malédiction de la loi est tombée sur Christ ; et elle a ainsi été magnifiée au plus haut degré, sa pleine sentence ayant été complètement réalisée sur la tête du Fils de Dieu. Ainsi, que vous considériez Dieu, ou l’homme, ou le Sauveur, la foi établit la loi, comme aucune autre chose n’aurait pu le faire. Mais quant au jour du Seigneur, loin d’être le même que le sabbat, c’est le premier jour de la semaine, et non le septième, et il repose sur des bases toutes différentes. Quand vous en venez à mettre à l’épreuve ces hommes qui voudraient être docteurs de la loi, on voit bientôt leur zèle succomber dans la pratique ; et il est aisé de les convaincre d’introduire des changements et des modifications afin que tout puisse convenir aux temps, aux lieux, aux climats et aux gens, c’est-à-dire les arranger eux-mêmes dans les choses de Dieu. Cette théorie de mitigation, et d’une loi flexible, ne peut soutenir un examen réel. De l’autre côté, ceux qui maintiennent que le jour du Seigneur est une chose nouvelle, qui ne se rattache en aucune manière ni à la création, ni à la loi, n’éprouvent aucune difficulté, parce qu’ils voient que le même Dieu, qui, dans l’origine, sanctifia le sabbat, et qui donna la loi à Israël, a trouvé bon d’attacher un honneur spécial au premier jour de la semaine, en commémoration de la rédemption accomplie dans la mort et la résurrection de Christ ; mais ils voient ce jour comme ayant son propre caractère, et non comme étant confondu avec le sabbat. Le jour du Seigneur ne demande pas un simple repos que vous pouvez partager avec votre bœuf ou votre âne ; et il est si loin d’être vrai que l’honneur qui lui est dû consiste principalement dans le repos du corps, que je crois que, si un chrétien pouvait en ce jour-là marcher vingt fois le chemin d’un sabbat pour accomplir un service spécial pour le Seigneur, il n’aurait pas seulement la liberté de faire cette œuvre, mais que ce serait une chose très agréable au Seigneur. Chacun de ces jours est séparé des autres jours par l’autorité divine ; mais sous tout autre rapport, ils diffèrent aussi positivement que la loi et la grâce, ou la vieille et la nouvelle création.
« Car ceux-là même qui sont circoncis, ne gardent pas (la) loi ; mais ils veulent que vous soyez circoncis, afin de se glorifier en votre chair ». Cela est de la plus grande vérité aujourd’hui. La vérité n’est pas la pierre de touche dans le monde religieux, ni Christ Lui-même, ni Son service. Si vous refusez leur parti ou leurs idoles, attendez-vous à l’opprobre, à la calomnie, au mépris et à la haine. Cédez à leur système judaïsant, et vous pouvez retenir impunément des doctrines blasphématoires, pour ce qui les concerne. Touchez à leur abus de la loi, et il s’écrieront : « On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais où on l’a mis ». La loi est leur seigneur, plus encore que Christ. Je fais allusion ici à un fait littéralement existant dans l’organe le plus populaire du parti soi-disant évangélique, mais, à vrai dire, légal, de nos jours.
Et maintenant l’apôtre, après avoir parlé du mal, passe au côté béni du sujet : « Mais qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde ». Ils se glorifiaient dans ce qui pouvait exalter la nature humaine ; parce que de cette manière-là, ils amèneraient le monde et ses multitudes à s’unir avec eux. Dans le chapitre 3, la croix de Christ est envisagée comme délivrance de la loi, parce que Christ sur la croix est « devenu malédiction pour nous ». Si un homme croit en Christ, s’il Le confesse comme le Fils de Dieu, nieriez-vous qu’il ait la vie éternelle ? Mais à moins qu’un tel homme ne reçoive la doctrine de la croix d’une manière intelligente, et ne l’applique à sa position, il est toujours plus ou moins sous la loi, et ne comprend pas qu’il est complètement retiré du vieil état de choses et placé sur un nouveau terrain.
Dans le chapitre 5, l’apôtre applique la doctrine de la croix à la chair, et fait voir que « ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises ». Je trouve ici que ma chair est une chose que j’ai le droit de regarder, non moins que la loi, comme mise de côté devant Dieu.
Maintenant, dans le chapitre 6, se présente la troisième chose, le monde. Vous avez une gradation régulière. D’abord c’est l’affranchissement de la loi, qui affecterait la conscience d’une personne pieuse. Puis, quand un homme est affranchi de cette anxiété, se présente la question de la chair avec ses passions et ses convoitises. Mais il lui est dit que tout cela fut jugé à la croix de Christ. Ainsi donc comme une partie de la consolation que Dieu me donne, j’ai le droit, comme une affaire de foi, et non de simple sentiment, de savoir que « ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises ». Il n’est pas dit qu’ils la crucifient ; comme si c’était quelque chose qui se continuait, mais c’est une chose faite en recevant un Christ qui a été crucifié. Aux yeux de Dieu, et maintenant aussi pour la foi, leur nature avait été clouée au bois, et c’en est fait d’elle devant Dieu ; et maintenant il ont une nouvelle nature, comme dit Paul : « Je ne vis plus moi, mais Christ vit en moi ». Sans doute, la vieille nature que nous avons existe toujours ; mais pour la foi, Dieu en a déjà fini avec elle à la croix de Christ ; en sorte que l’affaire d’un homme chrétien n’est pas de s’occuper simplement de restrictions, mais de Christ. C’est là ce qui, par l’énergie de l’Esprit, remplit l’âme de ce qui est bon, qui l’appelle en activité dans ce qui est aimable, de ce qui est, en un mot, la vraie puissance de sainteté chrétienne. Si un homme est occupé de ce qui est bon, il haïra sa chair ; mais c’est uniquement d’être occupé de Christ, qui donne une puissance à l’âme pour appliquer ainsi à la chair la sentence de Dieu. Maintenant arrive la troisième et dernière chose dans l’expérience chrétienne ; car vous trouverez des hommes qui savent un peu ce que c’est que d’être mort à la loi et à la chair, mais qui croient encore que c’est le devoir du chrétien dans ce monde, de servir Dieu dans sa génération. Mais comment Dieu veut-Il qu’on Le serve maintenant ? Jamais par aucune chose qui soit en contradiction avec la croix de Christ. Le service du chrétien doit être fondé sur la croix, et qu’est-ce que la croix déclare concernant le monde ? Qu’il est maintenant en guerre ouverte avec Dieu. Depuis la croix de Christ, Dieu n’a jamais eu aucune alliance avec le monde. Avant cela, le monde était toléré : et par conséquent il n’y avait pas de mal pour Joseph d’être gouverneur en Égypte, ni pour Daniel d’être assis à la porte du roi de Babylone. Mais c’est pure ignorance que de raisonner d’après ce qui était toléré alors, pour en déduire ce qui est agréable à Dieu, maintenant que la croix de Son Fils est un fait.
Dieu n’ignore pas la croix, si les chrétiens l’ignorent. Cette même croix de Christ, qui est mon salut, ma délivrance de la loi et de la chair, me montre que je n’ai aucune part avec ce monde, sinon comme un étranger béni qui le traverse. Nous pouvons avoir des occupations, qui soient toutes bien convenables ; mais ce n’est pas là du tout ce que vous pouvez appeler une chose du monde. Le Seigneur vécut ici-bas ; Il mourut ici, Il ressuscita ici, mangea et but dans ce monde ; mais Il ne fut jamais de ce monde, et il en est de même du chrétien, et il devrait en être ainsi. Notre Seigneur ne formait pas tellement une part et portion de ce monde, que Son apparition dans le monde, ou Son départ du monde, pût pour un moment en troubler le courant. On n’aurait pas senti Son absence dans le monde ; et du moment que le chrétien devient une partie intégrante de la puissance d’action qui fait mouvoir les rouages du monde, tout est dérangé pour ce qui regarde sa sujétion à Christ. Un chrétien devrait constamment être un moyen de bénédiction dans le monde. Mais comment ? Et quel est le caractère de son action ? Il rend témoignage à Christ, à son Sauveur ; mais Christ ne chercha jamais Son intérêt particulier — faisait toujours du bien, mais le faisait pourtant comme étant la volonté de Son Père — agissait toujours par des motifs qui n’étaient pas de ce monde, mais d’en haut — ne s’associant jamais aux plans des hommes pour améliorer la condition de l’homme, mais réalisant le fait que le monde était l’ennemi de Dieu, et pourtant que l’amour de Dieu L’avait envoyé dans ce monde pour lui faire du bien : tel était Christ, et il en devrait être de même du chrétien. L’affaire du chrétien, c’est d’être l’épître de Christ. Ainsi donc, voici le guide et la pierre de touche quant à tout ce qui se présente devant quelqu’un : en faisant ceci ou cela, sera-ce agir comme une épître de Christ ? Mais afin de savoir ce qui convient à une épître de Christ, il faut que je recherche Ses voies dans les paroles du Saint Esprit. Il y a toujours de la lumière dans l’Écriture, pour montrer quelle est Sa pensée pour le moment présent, et quelles sont les choses qui ont disparu avec les temps anciens — ce qui appartenait à la loi, et au monde, et à Israël, et qui constituait autrefois le témoignage de Dieu dans le monde. Mais aujourd’hui, le chrétien est le témoin de Christ, et il n’est pas du monde, quoiqu’il soit dans le monde. C’est là le grand moyen pour éprouver nos voies, et pour trouver ainsi jusqu’à quel point nous nous glorifions en la croix : c’est-à-dire que vous trouvez que le chrétien et le monde sont placés sur des principes totalement opposés. La croix de Christ est ce qui tout d’abord crucifie le chrétien au monde, le place entièrement en dehors du monde, comme quelqu’un qui est sauvé du monde : mais en même temps le monde lui est crucifié. Vous voyez là le monde avec toute sa culpabilité qui n’est pas ôtée, ne connaissant pas le Père malgré la venue du Fils. Ainsi, il ne saurait y avoir aucun terrain commun entre le chrétien et le monde ; pas plus que la chose serait possible dans ce pays, s’il était en guerre ouverte avec quelqu’un de ses voisins. Or si cela est vrai, cela ne montre-t-il pas combien peu les enfants de Dieu réalisent leur position chrétienne, telle que nous la voyons ainsi définie par la croix de Christ ?
On prêche plus ou moins que la paix est faite par le sang de la croix, mais quant à la puissance morale de la croix et ses effets quant à la loi, la chair et le monde, il y en a à peine un atome, sinon comme motif. La conséquence est que de tels chrétiens peuvent, en bonne conscience, parler de la croix, et en même temps maintenir encore ce que Dieu a déjà jugé et mis de côté pour toujours. Ainsi donc l’importance de la pleine délivrance du chrétien est inconnue — les vérités fondamentales qui devraient être comprises par les jeunes enfants. Car l’épître aux Galates ne présente pas la branche la plus élevée de la vérité chrétienne, mais plutôt les fondements indispensables du christianisme.
L’apôtre introduit maintenant un autre point. Ce n’eût pas été assez de parler simplement d’être crucifié au monde. Il y a plus que cela en Christ « car dans (le) Christ Jésus ni la circoncision, ni l’incirconcision ne sont rien, mais une nouvelle création ». Les gens peuvent se vanter de leurs formes, ou de ne pas avoir de formes ; mais, quoiqu’il en soit, tout est faux, à moins que vous n’ayez reçu de Dieu des bénédictions positives et substantielles, à moins que vous n’ayez la croix et la nouvelle création. Comme chrétien, j’appartiens à un système déjà établi en Christ, dans la présence de Dieu : je sais ce qu’est la nouvelle nature, quand je pense à Christ. Je Le vois ressuscité d’entre les morts et dans la gloire ; Il fait, d’une manière parfaite, les délices de Dieu et de tous ceux qui entourent Dieu. Et c’est là que seront un jour tous les chrétiens ; et c’est là en substance ce qu’ils ont maintenant, le Saint Esprit Lui-même étant les arrhes de la gloire. Car ce n’est pas seulement la gloire dans laquelle ils brilleront, mais ils ont la bénédiction avant que la bénédiction soit manifestée. Le chrétien possède en Christ la « nouvelle création » dans la perfection. « Celui qui a le Fils a la vie ». Elle est appelée ici la « nouvelle création » ; parce qu’elle n’est pas seulement envisagée comme une vie acquise, mais elle est mise en contraste avec la vieille vie qui avait affaire avec le monde. Ceci implique non seulement la personne de Christ, mais Son œuvre. La grande œuvre de la rédemption est accomplie ; la loi de Dieu a eu son libre cours, et la justice est établie ; la voix de la condamnation ne doit plus jamais être entendue en vertu de la croix du juste, qui a souffert pour nous. Mais ensuite, Il est ressuscité d’entre les morts, et Il est entré dans une existence nouvelle et bénie comme homme ressuscité devant Dieu. Et c’est là la nature qu’Il nous communique. « À moins que le grain de froment ne tombe en terre et ne meure, il demeure seul ; mais s’il meurt il porte beaucoup de fruit ». La conséquence est qu’étant mort et étant ressuscité, Il communique cette même vie qui était en Lui. En parlant de Ses brebis, Il dit : « Je suis venu afin qu’elles aient (la) vie, et qu’elles (l’)aient en abondance ». La vie « en abondance », c’est cette « nouvelle création », ou la vie en résurrection.
« Et à l’égard de tous ceux qui marcheront selon cette règle, paix et miséricorde sur eux et sur l’Israël de Dieu ! ». Dans la première expression, « tous ceux qui marcheront selon cette règle », il envisage spécialement, je crois, les croyants d’entre les Gentils, tels qu’étaient les Galates. Cette règle, c’est la règle de la nouvelle création — Christ Lui-même. Il ajoute : « Paix et miséricorde sur eux et sur l’Israël de Dieu ! ». La seule portion d’Israël qui soit reconnue, se compose des Juifs qui étaient réellement des croyants. L’expression, « l’Israël de Dieu », semble être employée ici, non comme une phrase générale pour indiquer tous les saints, mais pour désigner les croyants qui étaient en Israël — ceux-là d’entre les Juifs qui avaient répudié leurs propres œuvres, et trouvé leur refuge uniquement en Christ. Il est parlé de deux classes de personnes, et non d’une classe seulement : « Tous ceux qui marcheront selon cette règle », sont plutôt les croyants d’entre les Gentils ; et « l’Israël de Dieu » désigne les saints d’entre les Juifs, non pas l’Israël purement littéral, mais « l’Israël de Dieu », ceux qui étaient vraiment Israélites, dont la grâce avait disposé le cœur pour recevoir le Sauveur.
Il ajoute : « Désormais, que personne ne vienne me troubler, car je porte en mon corps les marques du Seigneur Jésus ». Leur sagesse charnelle avait introduit « du désordre et (toute espèce) de mauvaises actions », la loi au lieu de l’amour, des questions sur son ministère, etc. « Je porte en mon corps les marques du Seigneur Jésus ». Il avait été fouetté et mis en prison. De quelles marques d’indignité n’avait-il pas été flétri ? Ce sont là — et non la circoncision — « les marques du Seigneur Jésus ». Tout comme un esclave, dans les temps anciens, avait coutume de porter le nom de son maître empreint sur sa chair avec un fer chaud, Paul veut dire qu’il portait en son corps les marques du Seigneur Jésus. Comme s’il disait : que d’autres portent et cherchent ce qu’ils voudront, voilà les marques qui ont du prix pour moi. C’étaient les souffrances qu’il avait endurées pour l’amour de Christ et de l’évangile. Rien de plus doux, ni de plus touchant ; mais, en même temps, quelle condamnation complète de ces hommes qui s’élevaient eux-mêmes, qui prenaient leurs aises, en présence d’un homme dont la vie était une vie de souffrances pour Christ !
« Que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec votre esprit, frères ! Amen ! ». Ceci est vraiment plein de grâce et de dignité ! Il ne demande pas qu’ils sentent les terreurs de cette loi sous laquelle ils désiraient se placer ; mais, dit-il, « que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ soit avec votre esprit » ; il montre combien il sentait complètement l’avantage de la position que la grâce lui donnait — de quelle manière il pouvait répondre aux attaques dont il était l’objet — comment il pouvait appeler leur attention sur les cicatrices de sa glorieuse guerre, si, de leur côté, ils voulaient parler de leur circoncision, bien qu’il ne voulût se glorifier en rien, sinon en la croix de Christ. Notre sagesse, c’est Christ, comme notre folie, c’est nous-mêmes. Que le Seigneur veuille nous accorder de mieux apprendre notre vraie sagesse, et d’y marcher ; et, tout en retenant fermement la vérité, de désirer ardemment la bénédiction de ceux qui lui sont opposés, et de chercher la délivrance de toute âme autour de nous. L’épître aux Galates est le coup de mort pour le monde religieux — racine et branches — comme il l’est aussi pour le réveil ou la continuation du même système que l’apôtre Paul dénonçait alors avec autant de force, et qu’il démasque comme étant l’ennemi, non des saints seulement, mais de la croix de Christ.