Écho du Témoignage:Remarques sur Ésaïe/Partie 2

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Chapitre 7. — Comme nous l’avons vu, le chapitre précédent renferme la révélation de la gloire de Christ et la promesse assurée d’une sainte semence après le jugement du pays et du peuple. Voici maintenant le récit important de faits survenus, non en l’année où mourut le roi Ozias, ni même sous le règne de son successeur, mais aux jours d’Achaz. On n’aurait pu autrement expliquer d’une manière claire comment la gloire de Christ était sur le point d’apparaître. Le chapitre que nous avons sous les yeux résout cette question et relie la révélation de Christ avec Son rejet et Son triomphe final et éternel (chap. 8 ; 9, 1-7) et le chapitre 7 ne traite que la première partie.

L’occasion fut l’alliance offensive de Retsin, roi de Syrie, avec Pékakh, fils de Remalia et roi d’Israël, contre Juda et contre Achaz : « Et on rapporta à la maison de David en disant : La Syrie s’est alliée à Éphraïm. Et le cœur d’Achaz et le cœur de son peuple furent ébranlés, comme les arbres des forêts sont ébranlés par le vent ». On fut en proie à une grande crainte, là où, hélas ! nulle crainte ne régnait, c’est-à-dire à Jérusalem et dans la maison de David. Il n’y avait à cela rien d’étonnant : l’héritier du trône de David, ne suivait pas les traces de David, son père ; il marchait dans les voies du roi d’Israël et pis encore ; il dépouillait Juda et péchait gravement contre l’Éternel. Saisi d’une terreur panique, et demeurant toujours éloigné de Dieu malgré son état de détresse, Achaz est rencontré par le prophète qu’accompagne son fils Shear-Jashub, et qui lui dit de la part de Dieu : « Prends garde à toi et demeure tranquille ; ne crains point, et que ton cœur ne devienne point lâche à cause des deux queues de ces tisons fumants ; à cause, dis-je, de l’ardeur de la colère de Retsin et de la Syrie, et du fils de Remalia — de ce que la Syrie a délibéré avec Éphraïm et le fils de Remalia de te faire du mal en disant : Montons en Judée, et la réveillons, et nous y faisons ouverture ; partageons-la entre nous, et établissons pour roi le fils de Tabeël, au milieu d’elle ». etc. (v. 1-6).

Combien folle et basse est l’incrédulité ! Elle se montre joyeuse et confiante sur les bords d’un volcan prêt à vomir des torrents de lave ; elle est saisie d’angoisse quand Dieu se dispose à dissiper les malheurs qu’elle redoute. Dans ce cas-ci, comment aurait-Il pu voir tranquillement un pacte entre Israël apostat et la Syrie païenne ? Ce n’était pas simplement que leur entreprise, menée à bonne fin, devait être une source d’ennuis pour Juda, mais elle devait surtout mettre de côté la race de David. C’était un coup porté au Messie, si peu que cette idée se fût présentée à leur esprit ; de sorte que la fidélité et la dignité même de Dieu se trouvaient directement engagées. Mais, « Ainsi a dit l’Éternel Dieu : Cela n’aura point d’effet et ne se fera pas ; car la capitale de la Syrie, c’est Damas ; et le chef de Damas, c’est Retsin ; et dans soixante-cinq ans Éphraïm sera froissé pour n’être plus un peuple. Et la capitale d’Éphraïm, c’est Samarie, et le chef de Samarie, c’est le fils de Remalia. Si vous ne croyez point, certainement vous ne serez point affermis » (v. 7-9).

Que les voies de Dieu sont merveilleuses ! Les efforts pour détruire, qui paraissaient si terribles à ceux contre lesquels ils étaient dirigés, alors surtout que leur conscience leur adressait des reproches, amenaient immédiatement la révélation de la ruine des destructeurs. Le chef syrien serait impuissant à protéger Éphraïm plus coupable, car sa sentence était déjà prononcée — il devait être brisé dans soixante-cinq ans de telle manière qu’il ne serait plus un peuple ; et il en fut ainsi à la lettre (2 Rois 18). Le chef de Samarie nous est également présenté dans toutes les formes ; mais qui étaient-ils l’un et l’autre pour discuter les conseils de Dieu au sujet de la race royale de David, bien qu’Achaz fût personnellement incrédule comme il l’était ? Dieu n’en est pas moins Dieu, et Sa parole subsistera éternellement, quoique, certainement, l’incrédule ne sera point affermi.

Cela n’était que le prélude de la prédiction beaucoup plus importante qui suit : « L’Éternel continua de parler avec Achaz, disant : Demande un signe pour toi de l’Éternel ton Dieu ; demande-le, soit dans le plus bas lieu, soit dans le plus haut. Et Achaz dit : Je n’en demanderai point et je ne tenterai point l’Éternel » (v. 10-12). Hélas ! que de fois l’incrédulité s’efforce de dissimuler ainsi sous des dehors hypocrites son mépris de Dieu ! Que de fois, dédaignant dans sa présomption les paroles de Sa grâce, elle revêt l’apparence du respect et de l’humilité ! Le prophète cependant discerne les mensonges de ce méchant cœur incrédule et invite la maison de David à entendre, non seulement sa répréhension, mais aussi l’annonce du signe que le Seigneur enverra : « Voici, une vierge sera enceinte, et elle enfantera un fils et on appellera son nom Emmanuel ». Quelle merveilleuse grâce que celle qui adresse une promesse semblable à un homme tel qu’Achaz ! Et pourtant la grâce condamne l’incrédulité ou tout autre péché comme jamais la loi ne l’a fait ni n’aurait pu le faire. Si Achaz avait demandé quelque signe dans ce que sa pensée pouvait embrasser, soit de la terre, soit du ciel, à quelle distance incommensurable ne serait-il pas encore resté au-dessous de ce qu’embrasse l’œil de Dieu ! Quoique l’homme refuse de demander à cause de son incrédulité, cela n’empêche pas Dieu d’accorder un signe pour Sa propre gloire, et ce signe c’est le Fils de la vierge, la postérité de la femme, Emmanuel ! Comme les pensées et les sentiments se pressent ici en foule ! La sécurité de la royale lignée de David et de ses droits, qu’était-elle de plus que la ruine prédite de l’intrigant Éphraïm, en la présence de ce signe — vérité des vérités — Dieu avec nous ? Il était toutefois l’assurance, si Sa grandeur annonçait d’autres gloires, et des gloires plus élevées, que nulle conspiration formée contré cette racine et cette postérité de David ne prospérerait.

Il est à peine nécessaire (et cependant cette remarque sera d’une grande utilité pour certains lecteurs) d’observer que le « Fils », Emmanuel, du verset 14, n’est pas « l’enfant » du verset 16 ; ce dernier indique Shear-Jashub, qui pour cette raison avait accompagné le prophète. « Mais avant que l’enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, la terre que tu as en abomination sera abandonnée par ses deux rois ». On remarquera qu’Ésaïe passe « de la maison de David », vous, à Achaz, toi (comparez v. 13, 14 avec 16, 17). Il est certain que l’enfant du prophète, Shear-Jashub, avait le caractère d’un « signe » (voyez 8, 18) bien que naturellement il fût très distinct du grand signe, le Fils de la vierge. D’après le verset 16, le roi devait apprendre que, avant que cet enfant alors présent, atteignît l’âge de discernement, les rois alliés disparaîtraient de la scène. C’est ce qui eut lieu : trois ans avaient à peine passé sur sa tête, que les rois d’Israël et de Syrie tombèrent sous les embûches ou les coups de leurs ennemis.

Le coupable Achaz et Juda devaient-ils pour cela demeurer impunis ? Nullement, ainsi que le prophète continue de le déclarer au premier : « L’Éternel fera venir sur toi et sur ton peuple, et sur la maison de ton père, par le roi d’Assur, des jours tels qu’il n’y en a pas eu de semblables depuis le jour qu’Éphraïm se sépara de Juda. Et il arrivera qu’en ce jour-là l’Éternel sifflera aux mouches qui sont au bout des ruisseaux d’Égypte, et aux abeilles qui sont au pays d’Assur. Et elles viendront et se poseront toutes dans les vallées désertes, et dans les trous des rochers, et par tous les buissons et par tous les halliers » (v. 17-19). La foi d’Ézéchias put arrêter l’exécution du jugement prononcé contre Juda, et le roi d’Assyrie fut repoussé pour un temps. Mais Josias lui-même, tout fidèle qu’il était, eut à souffrir de sa téméraire opposition « aux mouches qui sont au bout des ruisseaux d’Égypte » ; et « les abeilles du pays d’Assur », à l’appel de Jéhovah, firent sentir les piqûres de leurs aiguillons d’une manière encore plus cruelle. — « Et ce jour-là, le Seigneur rasera avec le rasoir pris à louage au-delà du fleuve, savoir, avec le roi d’Assur, la tête et les poils des pieds, et il achèvera aussi la barbe. Et il arrivera en ce temps-là qu’un homme nourrira une vache et deux brebis ; mais il arrivera que pour l’abondance du lait qu’elles rendront il mangera du beurre, car tout homme qui sera demeuré de reste dans le pays mangera du beurre et du miel. Et il arrivera en ce jour-là que tout lieu où il y aura eu mille vignes, de mille pièces d’argent, sera réduit en ronces et en épines. On y entrera avec des flèches et avec l’arc, car tout le pays ne sera que ronces et épines. Et dans toutes les montagnes qu’on essartait avec la serpe, là on ne craindra plus de voir des ronces et des épines, mais ce sera pour y jeter les bœufs, et pour y être foulées des brebis » (v. 20-25). La face du pays d’Israël devait de la sorte être entièrement transformée, et telle serait la désolation qui s’ensuivrait que le propriétaire d’une vache et de deux brebis trouverait la plus vaste étendue dans laquelle pourrait paître en liberté son maigre troupeau au milieu du désert qui devait remplacer les riches campagnes de la Palestine, et n’aurait lui-même d’autre nourriture que celle qui constitue l’aliment des hordes errantes. Quel tableau ! Oui, et les vignes les plus fertiles (comp. Cantique de Salomon, 8) devaient être réduites en champs de ronces et d’épines ; et nul ne pourrait y passer s’il n’avait pour se défendre un arc et des flèches ; et les collines dont la végétation était dirigée avec soin devaient servir de parc au gros et au menu bétail. Quels tristes détails renferment ces paroles qui annoncent à son roi le lamentable changement de la Judée !


Chapitre 8 ; 9, 1-7. — Nous connaissons déjà les deux grands sujets de la prophétie, Emmanuel et l’Assyrien : — La vierge devait enfanter un Fils, le Messie, Emmanuel ; Jéhovah devait faire venir contre l’infidèle descendant de David le roi d’Assyrie dévastateur, tout en se réservant dans Sa miséricorde un résidu.

Le chapitre à l’étude duquel nous passons contient de nouvelles et plus complètes révélations de la part du Seigneur. Le prophète reçoit l’ordre de prendre un rouleau et d’y écrire dessus au sujet d’un autre enfant qui doit lui naître et qui portera le nom mystique de Maher-Shalal-Hash-Baz. La signification en est donnée à Ésaïe : « Car avant que l’enfant sache crier : mon père ! et ma mère ! on enlèvera la puissance de Damas et le butin de Samarie, devant le roi à Assur » (v. 4), prophétie qui s’accomplit à la lettre, comme le prouvent les récits inspirés.

Mais il y a plus. « L’Éternel continua à me parler disant : Parce que ce peuple a rejeté les eaux de Siloé qui coulent doucement et qu’il s’est réjoui de Retsin et du fils de Remalia ; — pour cette cause, voici, le Seigneur s’en va faire venir sur eux les eaux du fleuve, fortes et grosses, savoir, le roi d’Assur et toute sa gloire ; et ce fleuve montera par-dessus tous ses affluents et ira par-dessus tous ses bords ; et il traversera en Juda et se débordera, et dépassera tellement qu’il atteindra jusqu’au cou, et l’étendue de ses ailes remplira la largeur de ton pays, ô Emmanuel » (v. 5-8). Nous sommes ici en présence des scènes du dernier jour, quelque type que l’on puisse supposer les avoir déjà reproduites. L’orgueilleux Assyrien remplit le pays, le pays d’Emmanuel, atteignant « jusqu’au cou » ; il est cependant non seulement arrêté et confondu, mais entièrement et pour jamais détruit.

Le peuple dans cette circonstance n’eut pas plus de foi que n’en avait eu le roi dans la scène précédente. L’un et l’autre méprisèrent les avertissements et les promesses de Dieu. C’était sur l’homme que reposait leur confiance en présence du danger. Si, d’un côté, Achaz fut saisi d’effroi à la vue des queues des deux tisons fumants, alors que l’Éternel l’engageait à dédaigner le courroux des rois alliés d’Israël et de Syrie ; de l’autre, le peuple rejeta les eaux de Siloé qui coulent doucement. Leur châtiment ne serait que justice. Le fleuve impétueux, l’Assyrien, se précipiterait sur le pays et l’inonderait. Mais n’est-ce pas « ton pays, ô Emmanuel » ? Assurément oui, et quel que soit le roi, quel que soit le peuple, quel que soit leur abaissement, Dieu ne vengera-t-Il pas l’insulte faite à Celui qui, lorsqu’Il est outragé, ne l’est pas une seconde fois ? Il ne reste pas sourd au cri de Ses élus, que ne sent-il pas pour Emmanuel ! Les peuples se sont-ils alliés ? Ils pouvaient s’en épargner la peine : ils seront brisés. Ceux des pays éloignés se sont-ils équipés ? Qu’ils prêtent l’oreille, s’ils n’ont pas peur ; qu’ils écoutent le Seigneur prononcer leur sentence : « Équipez-vous et vous serez froissés ; équipez-vous et vous serez mis en pièces. Prenez conseil, et il sera dissipé ; dites la parole et elle n’aura point d’effet, parce que Dieu est avec nous » (v. 9, 10). Ceci nous montre quel est le sentier de la foi pour l’homme pieux : le Seigneur est son unique et sûre ressource, le seul objet de sa vénération et de sa crainte au jour du malheur et à l’heure du danger présent. « Car ainsi m’a dit l’Éternel avec une main forte, et il m’a instruit de ne point aller par le chemin de ce peuple-ci, en me disant : Ne dites point : conjuration ! toutes les fois que ce peuple dit : conjuration ! et ne craignez point ce qu’il craint, et ne vous épouvantez point. Sanctifiez l’Éternel des armées lui-même, et qu’il soit votre crainte et votre épouvantement. Et Il vous sera pour sanctuaire ; mais Il sera une pierre d’achoppement et un rocher de trébuchement aux deux maisons d’Israël, en piège et en filet aux habitants de Jérusalem. Et plusieurs d’entre eux trébucheront et tomberont, et seront froissés, et seront enlacés, et seront pris. Empaquette le témoignage ; cachette la loi parmi mes disciples. J’attendrai donc l’Éternel qui cache sa face de la maison de Jacob, et je m’attendrai à lui. Me voici, avec les enfants que l’Éternel m’a donnés pour être un signe et un miracle en Israël, de par l’Éternel des armées qui habite en la montagne de Sion » (v. 11-18).

Sentir et confesser de la sorte sa faiblesse, et en conséquence se rejeter sur « l’Éternel des armées », c’est réellement, en dépit de toutes les apparences et de tous les raisonnements humains, être maître de la situation. D’une manière encore plus bénie, l’apôtre pouvait prendre plaisir dans les infirmités, dans les outrages, dans les besoins, dans les persécutions, dans les détresses qu’il endurait à cause de Christ. « Je me glorifierai donc très volontiers, avait-il dit auparavant, plutôt dans mes infirmités, afin que la vertu de Christ habite en moi ».

Ceci amène la délivrance finale, le triomphe d’Israël, bien qu’en rapport avec les événements présents et le spectacle douloureux qu’offrent les circonstances par lesquelles passe le résidu désolé, jusqu’à ce que le Seigneur se lève et opère le dénouement par la destruction de tous les ennemis. Les forces coalisées de ces derniers seront impuissantes. Ce dont avaient besoin ceux qui craignaient Jéhovah, ce n’était ni une confédération, ni un appel à tous ceux qui avaient confiance dans une semblable mesure, mais bien de rendre hommage à Jéhovah, d’en faire leur sanctuaire, bien qu’Il dût être une pierre d’achoppement aux deux maisons d’Israël, en piège et en filet aux habitants de Jérusalem elle-même.

Il est donc clair que ce qui nous est présenté ici, ce n’est pas seulement que les nations qui voulaient engloutir Israël sont condamnées à une ruine totale, mais qu’Israël lui-même vient trébucher contre la pierre d’achoppement — son propre Jéhovah le Messie. En même temps, cependant, on voit dans son sein un petit nombre d’hommes attachés au témoignage du Seigneur et reconnus comme Ses disciples, tandis qu’Il cache sa face loin du peuple pris dans son ensemble. Ils forment un résidu à part, tandis que la masse trébuche, tombe, est froissée, enlacée et prise. C’est pourquoi, dans l’épître aux Hébreux, l’Esprit Saint n’hésite pas à citer le verset 18 avec d’autres passages des Écritures (psaumes 16 et 22) pour faire voir que ceux qui sont sanctifiés sont reconnus avec Lui, non seulement avec Lui l’homme dépendant, mais aussi Celui qui sanctifie, quoiqu’Il puisse ne pas avoir honte de les appeler frères, et cela, maintenant, en plein christianisme, comme bientôt, aux derniers jours, alors que la nation est plongée dans l’aveuglement et l’incrédulité.

Les versets qui terminent le chapitre (v. 19-22) montrent l’iniquité croissante du peuple et son impie recours aux puissances de ténèbres, dans le manque de lumière où il se trouve après avoir méprisé la loi et le témoignage de l’Éternel. L’effet produit est une misère profonde, l’audace, la rage et le blasphème contre son Roi et son Dieu, enfin l’agonie du désespoir.


« Néanmoins, l’obscurité ne sera pas aussi épaisse que lorsqu’elle était affligée, au temps où il frappa d’abord légèrement le pays de Zabulon et le pays de Nephthali, et s’appesantit ensuite sur le chemin de la mer, au-deçà du Jourdain, dans la Galilée des Gentils. Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière, et la lumière a relui sur ceux qui habitaient au pays de l’ombre de la mort » (chap. 9, 1, 2). La citation de ces paroles au chapitre 4 de Matthieu projette une grande lumière ; leur accomplissement peut s’étendre jusqu’à un jour encore à venir, et sous une forme plus complète sous certains rapports, pour autant qu’il s’agit du peuple. Que l’oppression soit plus rude encore qu’elle n’a jamais été, il y aura toujours cette différence (et que de fois on a pu la vérifier pendant la première apparition de Jésus !) qu’une grande lumière doit resplendir sur ceux qui sont plongés dans les plus profondes ténèbres et dans la plus vile abjection. Ce fut en Galilée, non à Jérusalem, que brilla surtout la grâce de Jésus. Ainsi en sera-t-il aux derniers jours : le caractère galiléen est un trait du résidu futur. Jérusalem sera la proie des plus graves et des plus mortelles erreurs. Mais la nuit la plus sombre et la plus glacée précède une aurore de joie et de gloire. C’est ce qui aura lieu pour Israël quand Celui qui était un objet de mépris et une pierre d’achoppement, mais qui n’en était pas moins Jéhovah, le bouclier et le sanctuaire du faible résidu pieux, se lèvera et inondera Son peuple de Ses éblouissantes clartés.

« Tu as multiplié la nation, tu as accru sa joie ; ils se réjouiront devant toi comme on se réjouit en la moisson, comme on s’égaie quand on partage le butin. Car tu as mis en pièces le joug dont il était chargé et le bâton dont on lui battait ordinairement les épaules, et la verge de son exacteur, comme au jour de Madian. Parce que tout choc de ceux qui se battent se fait avec tumulte, et que les vêtements sont vautrés dans le sang ; mais ceci sera comme un embrasement quand le feu dévore quelque chose. Car l’enfant nous est né, le fils nous a été donné, et l’empire a été posé sur son épaule, et on appellera son nom l’Admirable, le Conseiller, le Dieu fort et puissant, le Père d’éternité, le Prince de paix. Il n’y aura point de fin à l’accroissement de l’empire et à la prospérité sur le trône de David et sur son règne, pour l’affermir et l’établir en jugement et en justice, dès maintenant et à jamais. La jalousie de l’Éternel des armées fera cela » (v. 3-7). L’heure de la liberté et de la victoire a sonné, et c’est l’Éternel qui a fait cela. Mais ce n’est pas comme une guerre ordinaire ; il n’y a ni le bruit des combats, ni l’effusion du sang. Cette bataille se distingue des autres par l’incendie et l’embrasement du feu. Et il n’y a rien d’étonnant puisqu’Il est là leur proche parent rédempteur, le vrai Fils de David, jadis rejeté par Son peuple dont Il est maintenant l’orgueil, avec tous Ses titres de puissance, de louanges et de bénédictions, la perspective d’un règne sans fin, établi en justice et en jugement dès maintenant et à jamais. Oui, certainement, « la jalousie de l’Éternel des armées fera cela ».

Chapitre 9, 8 à chapitre 10. — Le prophète reprend maintenant le chant de jugement contre la nation en général, commencé au chapitre 5, et interrompu par le double épisode du chapitre 6 et des chapitres 7 ; 8 ; 9, 1-7. Ce dernier nous a présenté l’exposé particulier des voies de Jéhovah à l’égard de Son peuple ; la révélation de Sa gloire en Christ avec ses effets en jugement et en miséricorde ; l’incarnation, ou Emmanuel, le fils de la vierge, l’appui de la maison de David et l’espérance d’Israël, en dépit de la désolation du pays par les Assyriens ; la réapparition de l’Assyrien dans ce qui est maintenant le pays d’Emmanuel, et la destruction de tous les Gentils qui lui sont associés, quels qu’aient été leurs succès temporaires ; puis, une vue morale intérieure du peuple lorsque (chose étrange !) Jéhovah serait une pierre d’achoppement aux deux maisons d’Israël, mais un sanctuaire assuré pour un résidu pieux pour « ses disciples » qui devaient servir de signes et de prodiges à Israël pendant que Dieu cacherait Sa face, comme il est évident qu’Il le fait maintenant, à la maison de Jacob. Le tout se clôt pour la masse du peuple par une obscurité et un trouble tels qu’il n’y en a jamais eu ; il y a toutefois de la lumière pour les Galiléens méprisés, comme lors du premier avènement du Seigneur : ainsi, juste avant que la nation soit multipliée, l’oppression est détruite et la victoire est remportée, non par une épée humaine, mais par l’embrasement et par les flammes. Et Celui qui n’est assurément pas moins le Dieu puissant, le Prince de paix, que le Fils de la vierge, la semence de la femme, établit désormais de siècle en siècle Son règne béni.

Le verset 8 du chapitre 9 reprend la marche générale (comp. 5, 25), mais avec des allusions à quelques-unes des instructions qui font le sujet de la parenthèse, par exemple à celles qui concernent Retsin et l’Assyrien. Les versets 8-12 contiennent de nouveau l’annonce du déplaisir divin. « Le Seigneur a envoyé la parole en Jacob et elle est tombée en Israël. Et tout le peuple, Éphraïm et les enfants de Samarie le connaîtront ; ils diront néanmoins avec orgueil et avec un cœur hautain : Les briques sont tombées, mais nous bâtirons avec des pierres de taille ; les figuiers sauvages ont été coupés, mais nous les changerons en cèdres. Après que l’Éternel aura amené les ennemis de Retsin au-dessus de lui, il amènera aussi pêle-mêle les ennemis d’Israël, la Syrie du côté d’orient, et les Philistins du côté d’occident, qui dévoreront Israël à gueule ouverte ». Il est évident que jusqu’ici les dix tribus rebelles sont l’objet du jugement, et que l’orgueil de leur cœur se montre d’une manière expressive dans leur mépris des reproches de Dieu et dans la confiance qu’elles mettent en leurs propres forces. Car tel est leur ardent espoir et leur vaine arrogance, qu’elles prennent occasion de leur infraction à la volonté de Dieu pour déployer plus d’efforts que jamais : « Les briques sont tombées, mais nous bâtirons avec des pierres de taille ; les figuiers sauvages ont été coupés et nous les changerons en cèdres ». Mais la justice rétributive de Dieu a son tour. Le roi de Syrie, Retsin, se les était associées dans une ligue impie contre Juda : « Après que l’Éternel aura élevé les ennemis de Retsin au-dessus de lui, il amènera aussi pêle-mêle les ennemis d’Israël, la Syrie du côté d’orient, et les Philistins du côté d’occident, qui dévoreront Israël à gueule ouverte ». Ainsi en est-il toujours. L’infidélité recherche l’alliance du monde contre ceux qui gardent le témoignage de Dieu, mais elle ne tarde pas à prouver que l’amitié du monde est non seulement inimitié contre Dieu, mais aussi qu’elle cause la ruine de celui qui s’y attache. « Malgré tout cela, il ne fera point cesser sa colère, mais sa main sera encore étendue ».

Le tableau suivant de leur jugement (v. 13-17) présente moins une rétribution judiciaire extérieure, que l’abandon que Dieu fait d’Israël à sa démoralisation intérieure, pour avoir méprisé Ses châtiments. « Parce que le peuple ne sera point retourné à celui qui le frappait, et qu’ils n’auront pas recherché l’Éternel des armées, à cause de cela l’Éternel retranchera d’Israël en un seul jour la tête et la queue, le rameau et le jonc. L’ancien et l’homme d’autorité, c’est la tête ; et le prophète enseignant mensonge, c’est la queue. Ceux donc qui font accroire à ce peuple qu’il est heureux, se trouveront des séducteurs ; et ceux à qui on fait accroire qu’ils sont heureux, seront perdus ». Quel tableau ! La ruine d’Israël, en un seul jour, de toutes les classes, depuis ceux qui sont élevés en dignité jusqu’au plus bas peuple, « le rameau et le jonc » ! Les chefs et les administrés, tous plongés dans une ruine commune ! Et combien plus affreuse et désespérée sera cette situation, quand le Seigneur, juste juge, indigné à la vue de l’hypocrisie et de la méchanceté qui abonderont sous le voile de prétentions à la sainteté, « ne prendra point plaisir aux jeunes gens d’élite et n’aura pitié ni des orphelins, ni des veuves » ! Chez un peuple tellement dépravé, la vigueur ni la jeunesse ne Lui sont plus agréables, l’orphelinat ni le veuvage ne peuvent plus émouvoir Son cœur ; « car tous tant qu’ils sont, ce sont des hypocrites et des malins, et leur bouche ne profère que des infamies. À cause de tout cela, il ne fera point cesser sa colère, mais sa main sera encore étendue ».

Suit une description animée (v. 18, 19) de la méchanceté qui brûle comme le feu de la colère de l’Éternel obscurcissant la terre, et de la violence impitoyable du frère contre le frère. « Il ravira à main droite et il aura faim ; il mangera à main gauche et ils ne seront point rassasiés, chacun mangera la chair de son bras. Manassé dévorera Éphraïm et Éphraïm dévorera Manassé ; eux ensemble seront contre Juda. Malgré tout cela, il ne fera point cesser sa colère, mais sa main sera encore étendue » (v. 20, 21). Chaque tribu dévorera sa voisine, et toutes ensemble Juda.


Le dernier de ces châtiments infligés par voie de discipline à Israël est indiqué dans les quatre premiers versets du chapitre 10. Ici, c’est l’injustice des juges qui se mettaient à la place de Dieu Lui-même et se faisaient appeler Élohim, dieux (Ps. 82), mais qui dénaturaient de la manière la plus grave le caractère de Jéhovah et opprimaient Son peuple, surtout les personnes qui ne pouvaient se défendre. « Malheur à ceux qui font des ordonnances d’iniquité et qui dictent l’oppression qu’on leur a dictée, pour enlever aux chétifs leur droit, et pour ravir le droit des affligés de mon peuple, afin d’avoir les veuves pour leur butin et de piller les orphelins. Et que ferez-vous au jour de la visitation et de la ruine éclatante qui viendra de loin ? Vers qui recourrez-vous pour avoir du secours, et où laisserez-vous votre gloire ? ». Et voici Sa sentence contre eux : « Sans moi ils seront courbés sous les prisonniers, ils tomberont même sous ceux qui auront été tués ». Les plus élevés seront les plus abaissés, et ceux-là seront les plus maltraités qui auront abusé de leur haute position et de leur grande puissance pour exercer une avide oppression qui déshonore Dieu. « Malgré tout cela, il ne fera point cesser sa colère ; mais sa main sera encore étendue ».

Survient, au verset 5, un changement fort important. L’Assyrien désolateur apparaît une fois encore. C’est surtout son œuvre finale qui est dans la pensée de l’Esprit Saint, car c’est ici vraiment la grande catastrophe, la dernière épreuve de Jacob, en contraste avec la formule précédente si solennelle qui exprimait le sentiment que la colère de Jéhovah n’était pas épuisée. Maintenant, au contraire, le fier ennemi d’Israël est présenté comme la verge de cette colère. « Le jour de la visitation, de la ruine éclatante qui vient de loin » est arrivé. L’indignation et le courroux de l’Éternel prennent fin dans la destruction de cet ennemi. Désormais, Son irritation est détournée et Sa main n’est plus étendue.

Il est d’une extrême importance de bien comprendre que l’Antichrist, ou l’homme de péché, est un personnage entièrement distinct de celui que nous trouvons ici. Les commentateurs qui les confondent l’un avec l’autre, depuis Eusèbe jusqu’à Horsley, ne tiennent aucun compte des déclarations scripturaires. Il est clair, en effet, qu’il y aura dans la cité et le pays un roi qui fera selon sa volonté, qui siégera comme Messie et Jéhovah dans le temple de l’Éternel et sera reçu comme tel par les Juifs apostats ; et que, d’un autre côté, en opposition avec l’Antichrist qui se trouvera à Jérusalem et sera ligué avec la grande puissance occidentale, il y aura un autre chef, ennemi extérieur des Juifs, à savoir l’Assyrien, ou le roi du Nord, dont il est si souvent question dans les prophéties. Sankhérib était précisément un type de ce dernier.

C’est donc l’Assyrien qui servit le premier de verge pour châtier Israël. « Je l’enverrai contre la nation hypocrite et je le dépêcherai contre le peuple de ma fureur, afin qu’il fasse un grand butin et un grand pillage et qu’il le foule comme la boue des rues. Mais il ne l’estimera pas ainsi et son cœur ne le pensera pas ainsi ; mais il aura en son cœur de détruire et d’exterminer beaucoup de nations » (v. 6, 7). Mais il ne confessa pas Dieu en proférant ces orgueilleuses paroles : « Mes princes ne sont-ils pas autant de rois ? Calno n’est-elle pas comme Carkemish ? Hamath n’est-elle pas comme Arpad ? Samarie n’est-elle pas comme Damas ? Ainsi que ma main a soumis les royaumes qui avaient des idoles et desquels les images taillées valaient plus que celles de Jérusalem et de Samarie, ne ferai-je pas à Jérusalem et à ses dieux, comme j’ai fait à Samarie et à ses idoles ? » (v. 8-14). C’est pourquoi son arrêt fut prononcé : « Il arrivera que lorsque le Seigneur aura achevé toute son œuvre dans la montagne de Sion et à Jérusalem, j’examinerai le fruit de la grandeur du cœur du roi d’Assyrie et la gloire de la fierté de ses yeux. Parce qu’il aura dit : Je l’ai fait par la force de ma main et par ma sagesse, car je suis intelligent ; j’ai ôté les bornes des peuples et j’ai pillé ce qu’ils avaient de plus précieux, et comme puissant j’ai fait descendre ceux qui étaient assis ; et ma main a trouvé comme un nid les richesses des peuples ; et ainsi qu’on rassemble les œufs délaissés, ainsi ai-je rassemblé toute la terre ; et il n’y a eu personne qui ait remué l’aile, ou qui ait ouvert le bec, ou qui ait grommelé. La cognée se glorifiera-t-elle contre celui qui en coupe ? ou la scie se magnifiera-t-elle contre celui qui la remue ? Comme si la verge se remuait contre ceux qui la soulèvent, et que le bâton s’élevât comme s’il n’était pas du bois ! C’est pourquoi le Seigneur, l’Éternel des armées, enverra la maigreur sur ses hommes gras, et par le dessous de sa gloire il allumera un embrasement tel que l’embrasement d’un feu, car la lumière d’Israël sera un feu, et son Saint sera une flamme qui embrasera et consumera ses épines et ses ronces tout en un jour. Et il mettra fin à la gloire de sa forêt et de son Carmel, depuis l’âme jusqu’à la chair ; et il en sera comme quand le guidon est défait. Et le reste des arbres de sa forêt sera aisé à compter, tellement qu’un enfant les mettrait bien en écrit » (v. 12-19). C’est la scène finale. Le Seigneur n’a pas achevé, même à présent, toute Son œuvre sur le mont de Sion et à Jérusalem. Bien plus, Il ne l’aura pas terminée aussi longtemps que l’Antichrist sera là. Quand Il en aura fini avec lui par Son apparition du ciel, il Lui restera encore à punir l’Assyrien. « Et il arrivera en ce jour-là que le résidu d’Israël, et ceux qui seront réchappés de la maison de Jacob ne s’appuieront plus sur celui qui les frappait, mais ils s’appuieront en vérité sur l’Éternel, le Saint d’Israël. Le résidu sera converti au Dieu fort et puissant. Car, ô Israël, quand ton peuple serait comme le sable de la mer, un résidu en sera converti ; mais la consomption déterminée fera déborder la justice. Car le Seigneur, l’Éternel des armées, s’en va faire une consomption même déterminée, au milieu de toute la terre » (v. 20-23). C’est alors que l’incrédulité d’Israël disparaîtra pour toujours : il ne s’appuiera plus sur le bras de la chair, Assyrien, Égyptien, ou quoi que ce soit encore. La plaie de Madian et la manière d’Égypte indiquent les traits caractéristiques de la délivrance future (v. 26).

Le chapitre se termine par une description animée de la marche de l’Assyrien descendant du nord et venant jusqu’en face de Jérusalem. « Il est venu à Aïath, il est passé à Migron, et il a mis son bagage à Micmash. Ils ont passé le gué, ils ont fait leur gîte à Guéba ; Rama s’est effrayée ; Guibha de Saül s’est enfuie. Fille de Gallim, élève ta voix ; pauvre Anathoth, fais-toi ouïr vers Laïs. Madména s’est écartée, les habitants de Guébim se sont enfuis en foule. Encore un jour, il s’arrêtera à Nob ; il lèvera sa main contre la fille de Sion, contre le coteau de Jérusalem » (v. 27-32). Ce sera pourtant inutile ; car il sera détruit et nul ne lui viendra en aide. « Voici, le Seigneur, l’Éternel des armées, ébranchera les rameaux avec force, et ceux qui sont les plus haut élevés seront coupés, et les haut montés seront abaissés. Et il taillera avec le fer les lieux les plus épais de la forêt, et le Liban tombera avec impétuosité » (v. 33-34).


Chapitres 11 et 12. — En contraste avec la destruction du fier et arrogant Assyrien tombé sous les coups de Jéhovah, le onzième chapitre renferme une remarquable et complète description du Messie ; d’abord, au point de vue moral, puis dans Son royaume, Son caractère et Ses différents traits. Elle est suivie, au chapitre 12, d’un chant de louanges, placé sur les lèvres d’Israël désormais et pour toujours béni de l’Éternel, son Saint qui habite au milieu de lui.

Il serait oiseux de chercher l’accomplissement de cette prophétie dans la personne d’Ézéchias ou de Josias ; cela ne servirait qu’à constater une fois de plus l’embarras dans lequel se trouvent les ennemis rationalistes de la révélation. Nul roi, quelque pieux et illustre qu’il ait été, parmi les successeurs d’Achaz ; nul parmi ses prédécesseurs, ni David, ni Salomon, n’ont jamais approché des termes de la prophétie, pas plus personnellement que dans les circonstances de leur règne. « L’Esprit de l’Éternel » reposait-Il sur le meilleur de ces deux princes quand il disait : « Je périrai un jour par les mains de Saül ; ne vaut-il pas mieux que je me sauve au pays des Philistins » ? Était-ce « l’Esprit de sagesse et d’intelligence », lorsqu’il contrefaisait le fou, gribouillait les portes et faisait couler sa salive sur sa barbe ? Était-ce « l’Esprit de conseil et de force », lorsqu’il amusait son hôte crédule de Gath en lui faisant les récits d’excursions fictives contre le midi de Juda, alors qu’en réalité il désolait le pays des Gueshuriens et des Amalékites sans laisser en vie un seul être qui aurait pu découvrir la ruse ? Était-ce « l’Esprit de science » qui animait David vis-à-vis d’Absalom ? Et quand il faisait le dénombrement d’Israël, agissait-il « dans la crainte de l’Éternel ? » L’affaire d’Urie était-elle une preuve que « la justice était la ceinture de ses reins, et la fidélité la ceinture de ses flancs » ? Quel roi « a frappé la terre par la verge de sa bouche et fait mourir le méchant par l’esprit de ses lèvres » ? Qui a vu le merveilleux changement dépeint dans les versets 6-9, opéré chez les bêtes féroces comme chez les plus timides animaux, et la seigneurie de l’homme reconnue à la fin par tous, devenus doux et assujettis même à un petit enfant ? Il n’est pas moins impossible de soutenir que la dernière partie du chapitre ait rencontré l’ombre même de sa réalisation à aucune époque d’Israël. L’idée de son accomplissement sous Zorobabel est absurde.

Quelques-uns voudraient-ils démontrer peut-être que cette brillante peinture du grand Roi et de Son royaume soit spirituellement réalisée dans l’Église et les bénédictions de l’évangile ? Sans descendre aussi bas que les grossières prétentions de l’ambition papale, l’interprétation spirituelle, ou plutôt mystique, qui convient au christianisme mondanisé, nous est fournie par Théodoret, et même avant lui. Cet écrivain voit la doctrine des apôtres transformer la terre en ciel, et le tableau des versets 6-8 accompli dans le spectacle qu’offraient rois, gouverneurs, généraux, soldats, artisans, serviteurs, mendiants, s’entretenant ensemble et écoutant les mêmes discours ! Selon lui, Paul au milieu des philosophes d’Athènes, c’est le jeune enfant mettant sa main au trou du basilic ; de même que la promesse faite à Pierre (Matt. 16, 18) répond à la prédiction de la disparition de tout ce qui est nuisible ! La montagne de la sainteté du Seigneur, c’est encore la sublimité, la force et l’immutabilité de Ses enseignements. Théodoret s’élève avec juste raison contre la sotte explication qui rapporte la prophétie à Zorobabel, lequel n’était gouverneur que de quelques Juifs, et ne l’était pas dans tous les cas des Gentils ; mais il est difficile d’adopter le sens qu’il lui donne lui-même, en en appelant aux Actes des apôtres et à saint Paul en particulier.

Ce mode d’interprétation est, non seulement faux par le fait, mais injuste et funeste en principe. Il confond l’Église avec Israël ; il rabaisse le caractère de notre bénédiction en Christ, du ciel à la terre ; il altère la Parole de Dieu en y introduisant une obscurité nécessaire pour l’existence de semblables applications ; il sape par la base la miséricorde et la fidélité de Dieu parce qu’il suppose que les promesses les plus précieuses, les plus absolues que Dieu a faites à Israël, lui sont cependant retirées et reçoivent une direction toute différente. Si Dieu pouvait parler et agir de la sorte à l’égard d’Israël, quelles garanties posséderaient les chrétiens ou l’Église ? L’apôtre peut faire et il fait des citations des prophètes, et de ce chapitre même d’Ésaïe, pour justifier la bénédiction des Gentils et la gloire qu’ils rendent à Dieu à cause de Sa miséricorde ; mais le même apôtre déclare que maintenant a lieu la révélation d’un mystère caché dès les siècles, le mystère de Christ et de l’Église, dans laquelle il n’y a ni Juif, ni Gentil.

Dans cette prophétie cependant, comme dans l’Ancien Testament en général, nous voyons la bénédiction distincte d’Israël, quoiqu’il y ait espérance pour les nations aussi bien que jugement contre les ennemis. Tout ceci suppose un état de choses essentiellement différent des voies de Dieu avec Son Église, pendant lesquelles Israël cesse d’être le dépositaire de Son témoignage et de Ses promesses. Car de même que les branches naturelles juives furent retranchées de l’olivier et qu’en leur place fut enté l’olivier sauvage gentil ; de même, pour n’avoir pas persévéré dans la bonté de Dieu, celui-ci sera retranché à son tour, et les branches naturelles seront entées de nouveau sur leur propre olivier : « Ainsi tout Israël sera sauvé, selon ce qui est écrit : le libérateur viendra de Sion, et il détournera de Jacob les infidélités. Et c’est là l’alliance que je ferai avec eux, lorsque j’ôterai leurs péchés » (Rom. 11, 26, 27). Cependant, Israël est en partie aveuglé jusqu’à ce que la plénitude des Gentils soit entrée. Alors il saluera son Messie rejeté, et la bénédiction universelle de la terre suivra la destruction que Celui-ci fera de Ses ennemis comme début de Son règne. C’est de ce règne (et non de l’évangile, par rapport auquel les Juifs sont ennemis à cause de nous) que traitent nos deux chapitres, et, considérés à ce point de vue, tout se déroule en une harmonie parfaite dans l’ensemble comme dans les moindres détails.

Je ne puis que me joindre à la pensée de quelques autres pour trouver très significative l’allusion faite à la racine d’Isaï. Ailleurs le Messie est considéré comme fils de David, ou est même appelé David ; ici Il est un rameau du tronc d’Isaï, un jet, un bourgeon de ses racines, en vue, paraîtrait-il, d’attirer l’attention sur l’infime condition dans laquelle la race royale serait tombée à la naissance du Christ. C’est du sein de cette famille, alors qu’elle n’occupait aucun rang distingué en Israël, que David fut pris et oint pour occuper le trône. Le prophète désigne l’élévation d’un plus grand que David, non pas de la gloire qui avait été déjà conférée à la maison, mais d’une manière qui suggère plus tôt l’idée d’une condition obscure. De ce tronc humble et bas jadis, humble et bas une fois encore, surgit l’espérance d’Israël, Celui sur qui l’Esprit reposait sans mesure ; ou, comme Pierre le prêcha, Dieu oignit Jésus de Nazareth du Saint Esprit et de puissance. Ici cependant, ce n’est pas dans l’activité de la grâce parmi les infirmités des hommes et les oppressions du diable, mais en vue de Son gouvernement complètement soumis à Jéhovah. Il gouverne, non selon l’apparence mais avec équité, dans la crainte de l’Éternel. Tel est l’effet de la puissance qui reposait sur Lui. « Il lui fera sentir la crainte de l’Éternel, tellement qu’il ne jugera point sur la vue de ses yeux, et ne reprendra point sur l’ouïe de ses oreilles ; mais il jugera avec justice les chétifs, et il reprendra avec droiture pour maintenir les débonnaires de la terre » (v. 3-4). Le Saint Esprit dépeint la convenance morale du Messie pour Son règne terrestre. Je dis, Son règne terrestre, cela ne fait pas l’ombre d’un doute pour tout esprit libre de préjugés et de préventions. C’est d’ailleurs confirmé par la suite du verset 4 : « Il frappera la terre par la verge de sa bouche et fera mourir le méchant par l’esprit de ses lèvres ». Ici tout commentaire d’homme est superflu ; 2 Thessaloniciens 2, 8 jette sur ce passage une lumière divine. L’apôtre inspiré l’applique à la destruction future, par le Seigneur, de l’inique, l’homme de péché, produit de l’apostasie du christianisme, le même personnage, sans nul doute, que celui que l’apôtre bien-aimé décrit en 1 Jean 2, 22 : « Qui est le menteur, sinon celui qui nie que Jésus est le Christ ? Celui-là est l’Antichrist, qui nie le Père et le Fils ». Ce dernier témoignage nous aide à lier le tout. 2 Thessaloniciens 2 l’envisage spécialement comme le résultat qui doit être manifesté de ce mystère d’iniquité déjà à l’œuvre alors sans être vu. Ésaïe montre, non seulement le grand ennemi extérieur, l’Assyrien, jugé au chapitre 10 ; mais au chapitre 11, 4, il nous présente l’ennemi intérieur, « le méchant », que les apostats accepteront comme leur Messie, détruit par le vrai Messie apparaissant en gloire. 1 Jean 2 le décrit, d’abord, comme celui qui refuse de reconnaître la gloire messianique de Jésus, puis dans son plein caractère d’Antichrist (aussi bien que comme le menteur), niant le Père et le Fils, c’est-à-dire la gloire de Christ telle qu’elle est révélée dans le christianisme.

Après avoir assisté à la mise de côté de l’Antichrist à la fin de cette économie, nous voyons se déployer à nos regards le règne du vrai Christ et ses effets bienfaisants. « Et la justice sera la ceinture de ses reins, et la fidélité la ceinture de ses flancs. Le loup demeurera avec l’agneau et le léopard gîtera avec le chevreau, le veau, le lionceau et le bétail qu’on engraisse seront ensemble, et le lion mangera du fourrage comme le bœuf. Et l’enfant qui tette s’ébattra sur le trou de l’aspic, et l’enfant qu’on sèvre mettra sa main au trou du basilic. On ne nuira et on ne fera aucun dommage à personne dans toute la montagne de ma sainteté, parce que la terre aura été remplie de la connaissance de l’Éternel comme le fond de la mer des eaux qui le couvrent » (v. 5-9). C’est le monde ou la terre habitable à venir dont nous parlons (Héb. 2) — non les cieux, mais la terre, et en particulier, le pays d’Israël, sous Celui à qui il appartient de régner. Quel motif y a-t-il pour mettre en doute le parfait et littéral accomplissement de cette prophétie ? Je n’ai jamais entendu à son endroit d’objections sérieuses, si ce n’est de quelques esprits sadducéens qui ne connaissent ni les Écritures, ni la puissance de Dieu. Pourquoi trouverait-on incroyable que Dieu, pour honorer le règne de Jésus, changeât non seulement la face, mais les mœurs, les penchants de la nature animée, délivrant la créature des liens de la corruption sous lesquels elle gémit maintenant ?

Les Psaumes célèbrent ce grand jour avec des hymnes de joie ; les prophètes ne gardent pas le silence à son sujet ; à diverses reprises l’apôtre Paul en parle comme d’un événement attendu avec certitude par les chrétiens, prêt à arriver dès que Christ apparaîtra, et les enfants de Dieu avec Lui. Il y a un vide profond dans tout système comme dans tout cœur qui n’attend pas le jubilé du monde ; sans cela, la terre semblerait créée pour être ravagée par Satan ; tandis que, pour quiconque est là-dessus enseigné de Dieu, s’il y avait une simple créature qui ne fût pas ouvertement assujettie au Fils de l’homme exalté, l’ennemi pourrait Le frustrer de Sa juste récompense et de Ses droits suprêmes. En ce jour nous verrons (car nous ne le voyons pas encore) toutes choses placées sous Ses pieds : le jugement divin des vivants, exécuté par Christ, en sera la cause déterminante, ainsi que nous l’avons recueilli du verset 4 mis en regard de 2 Thessaloniciens 2.

Mais ce n’est pas tout : Israël doit être reçu de nouveau afin que le monde sache ce que sont des morts rendus à la vie : « En ce jour-là, il arrivera que les nations rechercheront la racine d’Isaï, dressée pour être l’enseigne des peuples, et son séjour ne sera que gloire. Et il arrivera encore ce jour-là que le Seigneur mettra sa main une seconde fois pour acquérir le résidu de son peuple qui sera demeuré de reste en Assyrie, en Égypte, à Pathros, à Cush, à Élam, à Shinhar, à Hamath, et dans les îles de la mer » (v. 11, 14). Ceux-là font l’œuvre de l’ennemi qui soutiennent que ces écritures sont accomplies, ou en voie de s’accomplir. Sauf le principe général (très apparent dans l’évangile) — que les Gentils cherchent, espèrent et trouvent une bénédiction éternelle en Christ, c’est une scène tout entière à venir. La personne du Messie a été révélée ; et nous savons combien véritablement l’Esprit a habité en Lui sur la terre et combien Son humiliation a manifesté toutes les grâces qui étaient convenables à l’homme à l’égard de Dieu, ou à Dieu à l’égard de l’homme, dans le Christ Jésus qui était d’ailleurs Dieu par-dessus toutes choses, béni éternellement. Mais Il n’est pas encore assis sur Son trône, et n’exerce pas non plus Sa royauté ici-bas ; et le résidu de Son peuple n’a pas encore été recueilli du nord, du midi, de l’orient et de l’occident. Supposerions-nous pour cela que Son bras est raccourci ? qu’Il a abandonné Ses desseins les plus chers, et que Ses dons et Sa vocation sont sujets à repentance ? Tel n’est pas notre Dieu. Est-Il le nôtre seulement, et non pas aussi celui des Juifs ? Oui, Il est également le leur : « Et il élèvera l’enseigne parmi les nations, et assemblera les Israélites qui auront été chassés, et recueillera des quatre coins de la terre ceux de Juda qui auront été dispersés. Et la jalousie d’Éphraïm sera ôtée, et les oppresseurs de Juda seront retranchés, Éphraïm ne sera plus jaloux de Juda et Juda n’opprimera plus Éphraïm » (v. 12, 13). L’histoire morale d’Israël sera retournée aussi complètement que l’histoire naturelle devra être refaite à nouveau pour la création inférieure. Les vieilles rancunes, les vieilles rivalités, trop bien connues après Salomon, disparaissent pour Israël rétabli. Quant à ses intrigants voisins, qu’ils se montrent, ils seront détruits à jamais, « ils voleront sur le collet aux Philistins vers la mer, ils pilleront ensemble les enfants d’orient ; Édom et Moab seront ceux sur lesquels ils jetteront leurs mains, et les enfants de Ammon leur obéiront ». Édom, Moab et le chef des enfants de Ammon parviendront à échapper à l’Assyrien, le roi puissant du nord (Dan. 11, 41), mais non aux mains d’Israël « de faible devenu fort ». Le Seigneur sera vu sur les enfants de Sion et Ses dards porteront comme l’éclair, et le Seigneur, l’Éternel, sonnera du cor et marchera avec les tourbillons du midi (Zach. 9, 14).

En conséquence, aux versets 15-16, nous voyons le Seigneur exercer une action surnaturelle sur la nature extérieure en faveur de Son peuple, alors qu’Il extermine à la façon de l’interdit la langue de la mer d’Égypte, qu’Il frappe le fleuve sur ses sept bras, au point qu’on peut le traverser à pied sec, et qu’il y a un chemin pour le résidu de Son peuple demeuré de reste en Assyrie, comme il y en eut un pour Israël, au temps qu’il remonta du pays d’Égypte. Dans toute cette dernière partie, l’interprétation mystique se trouve absolument en défaut ; des prodiges plus merveilleux que la destruction des troupes de Pharaon signalent la délivrance finale d’Israël, de l’Égypte et de l’Assyrie, sous les yeux d’une génération incrédule et contredisante.


Le chant du chapitre 12 clôt cette section. Il est divisé en deux parties : la première (v. 1-3) est la louange d’Israël pour ce que Dieu a été et est pour lui ; la seconde (v. 4-6) est l’extension de ses louanges par toute la terre, bien que Sion soit le centre où Dieu habite.

Deuxième division — Chapitres 13 à 27

Chapitres 13 à 14, 27. — Nous entrons ici dans l’étude d’une nouvelle section de notre prophète. Nous aurons moins à nous occuper d’Israël que précédemment, bien que, cela va sans dire, nous le rencontrions sur notre chemin. Il n’est pourtant pas l’objet direct de cette portion de la prophétie ; elle s’occupe plutôt des nations et de leur jugement amené par des circonstances alors imminentes pour « la fin des siècles ».

Cette dernière expression qui revient si fréquemment dans l’évangile de Matthieu, s’applique à cet état de choses durant lequel Israël se trouve sous la loi et sans son Messie. La nouvelle économie, au contraire, sera caractérisée par son entrée dans la nouvelle alliance. Son Messie régnera alors sur lui en gloire. L’Ancien Testament nous présente non seulement ces économies, mais aussi les temps qui les ont précédées, de même que le Nouveau révèle l’éternité qui doit les suivre. Pratiquement parlant, le Nouveau comme l’Ancien Testament parlent de ces deux économies en connexion avec Israël : celle dont le cours se poursuivait lors de la venue et du rejet de Christ, et celle qui doit commencer quand Il reviendra en gloire. « En ce siècle-ci » il y a un mélange de bien et de mal qui doit avoir pour dénouement une lutte terrible dans laquelle tomberont la bête et le faux prophète. Le siècle à venir part du moment où Satan est lié, alors que le Seigneur Jésus gouverne la terre avec un déploiement de puissance et de gloire.

Ainsi la différence des siècles est d’une importance incalculable. Si vous ne distinguez pas le siècle actuel de celui qui est à venir, tout doit être confusion, non seulement dans vos pensées, mais dans votre marche. Présentement c’est une question de grâce et de foi, le mal ayant extérieurement la faculté de triompher, comme nous le voyons à la croix. Dans le monde à venir, le mal sera jugé ouvertement et subjugué, tandis que le bien sera exalté par toute la terre et remplira le monde entier de la connaissance de Jéhovah et de Sa gloire. La fin du siècle est donc évidemment future, et c’est bien ainsi que l’Écriture l’exprime. Par conséquent, c’est de « ce présent siècle mauvais » que la mort de Christ nous a délivrés ; le siècle nouveau sera bon, et non mauvais, aussi sûrement qu’il est à venir. Si de l’Église nous regardons à Israël, nous pouvons supposer que pour lui, le siècle a commencé avec sa mise sous la loi en l’absence de son Messie ; le siècle nouveau prendra naissance lorsque Israël recevra son Messie, non plus à venir, mais revenu et dans l’éclat de Son règne ; car la présence du Messie dans l’humiliation n’a pas interrompu le siècle ; encore moins le rejet qu’Israël a fait de Lui a-t-il amené le siècle nouveau. Seulement il y a maintenant en activité une autre œuvre puissante de Dieu, basée sur la gloire céleste de Christ et la présence personnelle du Saint Esprit, et marquée ici-bas par l’Église de Dieu. Pendant l’existence de cette dernière, la miséricorde découle sur les Gentils, à tel point que nous pouvons l’appeler la parenthèse gentile de miséricorde. Avant, et tout à fait distincts de l’Église, il y avait les temps des Gentils, alors que Dieu, dans Sa providence, donna aux Gentils de prendre le gouvernement du monde en commençant par Nebucadnetsar, la tête d’or de la grande statue ; cette dispensation peut être appelée la parenthèse gentile de jugement. Celle-ci, comme la précédente, est comprise dans « ce siècle-ci » ; et l’une et l’autre subsistent encore. Le siècle nouveau sera introduit par la venue du Seigneur sur les nuées du ciel.

Il en résulte dès l’abord un important changement, à savoir, la délivrance d’Israël repentant, et la comparution des nations pour le jugement des vivants dès que le Fils de l’homme sera entré dans Son règne (comp. Matt. 25 ; Apoc. 11 ; 20). Dans la première partie d’Ésaïe, nous avons vu le jugement d’Israël et ensuite sa bénédiction finale. C’est de cette manière que Dieu procède toujours : quand Il juge, Il commence par Sa propre maison. C’est ce qui fait dire à Pierre que « le temps est là où le jugement doit commencer par la maison de Dieu », d’où il démontre que « si le juste est difficilement sauvé, où paraîtra l’impie et le pécheur ? ». Mais Dieu a entrepris de sauver les justes, malgré toutes les difficultés, malgré la multitude prodigieuse d’oppositions et d’épreuves, malgré leur extrême faiblesse. Tout cela rend la tâche rude, il est vrai ; mais ce qui est pour nous insurmontable ne sert qu’à manifester la gloire de Dieu. Il a surmonté le grand obstacle, nos péchés. Y a-t-il un péché, un seul péché qui ait pu arrêter Christ ? N’a-t-Il pas pour le croyant effacé tous les péchés à la croix ? Mais s’il n’y a pas de difficultés pour Dieu, il y en a beaucoup pour nous, et ce mot, « le juste est difficilement sauvé », est en rapport avec les dangers auxquels nous sommes exposés. S’il en est ainsi, quelle sera la fin de l’impie ? L’apôtre Pierre applique cette parole au chrétien et regarde au monde à venir sous le jugement lorsque le Seigneur apparaîtra. Dans l’Ancien Testament, ce n’est pas l’Église, mais Israël qui est en question ; mais Dieu commence invariablement par ce qui Lui tient de plus près. En vertu de ce principe, dans les douze premiers chapitres Israël a paru sur le premier plan du tableau, bien que d’autres aient incidemment attiré l’attention.

Mais, à partir de cette section, pendant une douzaine de nouveaux chapitres, les Gentils sont placés à l’avant-scène, bien que nous rencontrions au milieu le jugement de Jérusalem ; cette partie se termine par la dissolution de la terre et la punition en haut de ceux qui sont le plus élevés. Dieu nous a montré le jugement de Sa propre maison ; maintenant arrive successivement le tour des nations qui sont en relation avec Son peuple.

En premier lieu vient Babylone, car c’était la grande puissance gentile à laquelle il avait été permis de prendre possession de Jérusalem ; et Dieu montre que s’Il peut se servir des étrangers pour châtier Son peuple, Il ne tardera pas à agir différemment et à leur demander compte de leur cruelle oppression, parce qu’au lieu de se borner à être des instruments de châtiment, ils ont pris leur plaisir à détruire. Babylone peut d’autant moins échapper qu’elle est orgueilleuse de sa puissance, sans conscience à l’égard de Dieu, et qu’elle est de plus aussi la principale source de l’idolâtrie. Elle doit, de toutes les nations, être la première appelée en jugement. Ainsi, l’étude dans laquelle nous entrons maintenant n’est pas l’examen de la maison de Dieu en Israël, mais le jugement du monde et des nations, en commençant par Babylone. Observons cependant que, si le Saint Esprit prend note de ce qui arrivait aux Juifs (mentionnant expressément la ruine du pays et du peuple qui était imminent, quand celui-ci serait emmené captif à Babylone), Il ne se borne jamais aux châtiments infligés, si graves soient-ils. Ceci indique précisément la différence entre ce qu’est Dieu et ce qu’est l’homme. Si l’homme parle, l’application de ses paroles est forcément limitée. Ce que Dieu dit renferme invariablement un sens fécond, qui ouvre de larges horizons, manifeste ce qu’Il a en vue pour se révéler et glorifier Christ. C’est là, je pense, la signification de la règle scripturaire établie par 2 Pierre 1, 20 : « Aucune prophétie de l’Écriture ne s’interprète elle-même ». Appliquez-la seulement à quelque événement particulier, et vous détruisez le plan de Dieu ; elle peut renfermer sans doute cet événement ; mais toute la prophétie a trait aux conseils de Dieu en rapport avec la gloire de Son Fils.

Et tel est le but du témoignage de l’Esprit. Cela est vrai de toute l’Écriture, car Christ est l’objet que Dieu s’est proposé en donnant l’Écriture tout entière. Dieu ne pense pas seulement à l’homme, à son salut, si béni qu’il soit. Il ne pense pas non plus simplement à Israël ou à l’Église. Dieu pense à Christ qui Lui est plus précieux que tout le reste. C’est en vertu de Christ qu’il peut y avoir un plan conçu et réalisé à l’égard d’un monde tel que celui-ci. Car il n’est pas possible que la créature puisse avoir par elle-même une valeur intrinsèque aux yeux de Dieu. Ce qui provient de la volonté souveraine ou de la toute-puissante main de Dieu, peut cesser d’être. Celui qui a créé a le pouvoir de détruire. Mais en Christ on a ce que rien, il nous est permis de le dire en toute vénération, n’est capable de détruire. Tous les efforts de l’homme ou de Satan pour Le renverser ou Le déshonorer n’ont servi, dans la suprême et gracieuse sagesse de Dieu, qu’à faire éclater Sa gloire qui surpasse toute intelligence. Ainsi nous arrivons à la grande vérité pour notre marche quotidienne : nous avons affaire avec quelqu’un dont rien ne peut épuiser l’amour, et dont les voies sont parfaites ; nous avons affaire avec Lui, jour après jour, à nous reposer sur Lui, à nous attendre à Lui, à compter sur Son admirable sollicitude pour nous. Christ est digne de la confiance de nos cœurs, et cette confiance ne peut Lui être accordée sans que la bénédiction en découle. Ainsi Dieu se montre plus grand que tout ce qui peut être contre nous. En dehors de Christ, il n’est rien, même de ce qu’Il a fait Lui-même, qui ne soit bientôt, en tant qu’ayant été rattaché à l’homme sur la terre, recouvert d’un nuage. Cela s’étend plus loin encore. Les anges ont abandonné leur premier état. Regardez les créatures les plus élevées, ou la beauté en dehors de Christ, qu’avez-vous ? La terre, jadis si belle, n’est-elle pas un désert ? L’homme n’a-t-il pas fait naufrage moralement ? Les Israélites avaient été conduits dans le désert pour célébrer une fête à l’Éternel ; mais, à Son grand déshonneur, ils firent et adorèrent un veau d’or. Dans l’Église de Dieu, appelée à manifester l’unité de l’Esprit et à refléter ici-bas la gloire céleste de Christ, que de brèches, de divisions, de sectes, d’hérésies, de confusions et toute espèce de mauvaises œuvres ! Quelle coupable ignorance du Père ! Quel hardi reniement du Fils ! Quel flagrant péché contre le Saint Esprit ! Et cet état de choses va s’aggravant et se développant de plus en plus, de sorte que bientôt aura lieu l’apostasie et la manifestation de l’homme de péché dans sa forme finale.

Nous sommes, pour ainsi dire, à la fin de l’histoire du christianisme, à la veille de ce jugement qui ne sommeille point ; mais, grâces à Dieu, avant tout nous attendons des cieux notre Sauveur, espérance bénie que la mondanité et l’incrédulité peuvent faire perdre de vue, mais qui ne s’évanouira jamais, parce qu’elle ne repose sur rien moins que le Seigneur Jésus. Il vient ; et aussi sûrement qu’Il vient, nous avons le centre de toute bénédiction atteint pour nos corps et pour toutes choses, absolument comme nous l’avons à présent par la foi pour nos âmes. Quelle découverte ç’a été pour quelques-uns de nous, que la prophétie a le même centre que le reste de l’Écriture, et que son centre en Christ est d’autant plus évident qu’elle ne peut se renfermer dans les limites d’un accomplissement passé, mais qu’elle regarde toujours en avant pour sa parfaite réalisation dans l’avenir ! Peu importe ce que c’est ; tout acquiert de l’importance dès l’instant que la pensée de Dieu est occupée de Son bien-aimé Fils. Et c’est Son Fils qui doit frapper les derniers coups de jugement ; Il en agira avec l’homme, d’abord par des moyens providentiels, et ensuite en personne.

Du chapitre que nous étudions en ce moment, nous pouvons recueillir ces deux choses : une application préparatoire aux temps du prophète ou à ceux qui les avoisinent, mais le seul accomplissement adéquat réservé pour le grand jour, qui est encore à venir. Il est facile, par exemple, de voir que les versets 6-10 parlent de signes plus grands que ceux qu’on a jamais vérifiés. On ne saurait franchement affirmer que ces choses aient eu lieu à la lettre ; cependant l’Esprit de Dieu n’hésite pas à les rattacher à la chute de Babylone. Parler d’hyperbole ou d’exagération, c’est faire preuve d’une profonde ignorance de l’Écriture et de la puissance de Dieu. Je comprendrai qu’un infidèle tînt un pareil langage ; mais du moment où vous vous mettez à supposer que l’Esprit de Dieu a pu volontairement tomber dans l’exagération, vous ébranlez l’autorité de toute la Parole. S’Il grossit outre mesure un jugement temporel, qui m’assure qu’Il ne met pas la même exagération dans les tableaux de la grâce et de la rédemption éternelle ? Et dans ce cas, où est le terrain pour une solide paix avec Dieu ? Admettez-vous, oui ou non, que le Saint Esprit dit toujours la vérité ? Ce principe reçu, il faut veiller à ce qu’il soit appliqué. Ainsi, restreindre la scène en question au jugement passé de Babylone, c’est limiter la Parole de Dieu et accuser le Saint Esprit d’exagérer. C’est simplement nous qui ne comprenons pas et nous égarons. Combien il importe par conséquent que nous soyons de petits enfants en malice et des hommes faits en intelligence ! Nous pouvons bien fuir avec horreur un chemin qui conduit à une fin aussi déshonorante pour la Parole de Dieu. D’un autre côté, que le Saint Esprit avait réellement en vue un accomplissement passé, c’est ce que je tiens pour non moins vrai que le fait qu’Il regardait en avant vers un autre accomplissement beaucoup plus éloigné.

Aux versets 15-17, il est parlé d’un jugement temporel ; c’est une description, non de ce qui aura lieu quand le Seigneur jugera, mais de la manière inique dont l’homme assouvit sa colère sur son compagnon. Les versets 18 et 19 présentent le tableau d’une ruine complète : Babylone a été jugée ; un désastre et une destruction peut-être sans précédents ont frappé cette orgueilleuse cité ; et ceci, nous le savons, s’effectua sous l’influence de Dieu, par suite de la jonction des Mèdes et des Perses commandés par Cyrus.

Mais évidemment, le Seigneur emploie ici le langage le plus énergique pour montrer que c’est Son jour. Quand on lit le Nouveau Testament aussi bien que l’Ancien, il importe extrêmement de se faire une idée nette et précise du vrai caractère et de la signification de ces mots : « le jour du Seigneur ». Ce n’est pas la même chose que la « venue » du Seigneur pour nous prendre à Lui. Quand Il viendra, les saints morts ressusciteront et les saints vivants seront transmués ; ce n’est pas là « le jour du Seigneur », et jamais cet événement n’est ainsi nommé dans les Écritures. Il est un chapitre (2 Pier. 3) qui semble présenter quelque difficulté ; mais elle ne provient, en réalité, que de la confusion où l’on se trouve, car tout devient clair dès que l’on distingue les deux phrases et les pensées dans l’un comme dans l’autre passage. Ce que disent les moqueurs des derniers jours, c’est «  est la promesse de son avènement ? » etc. La réponse de l’Esprit de Dieu est celle-ci, que le jour du Seigneur viendra, qu’il viendra comme un voleur dans la nuit pour juger la méchanceté sur la terre. Ils ne font aucun cas des chrétiens qui nourrissent cette brillante espérance, la venue de leur Maître ; eh bien, le Saint Esprit les menace du terrible jour du Seigneur. Le Seigneur ne nous est jamais présenté sous l’image d’un voleur venant dans la nuit, excepté quand il est nettement question de jugement, comme c’est le cas à propos de Sardes (Apoc. 3). En 1 Thessaloniciens 5, l’Esprit se sert de la comparaison du voleur, en parlant du jour du Seigneur prêt à tomber sur le monde, et non par rapport aux saints qui attendent Christ.

La vérité vraie, c’est que l’expression « la venue du Seigneur » peut s’appliquer à Sa présence avant qu’Il soit manifesté à tout œil, tandis que « le jour du Seigneur » désigne cette parole et cet aspect de Son action qui inflige un juste châtiment au monde et nous Le présente comme jugeant en équité. C’est là le jour du Seigneur, jour de ténèbres et de ruine pour les pécheurs ; il n’y a pas un mot touchant la résurrection des justes qui sont morts, ni de la transmutation des vivants ; tous les traits propres au Nouveau Testament, vous les trouverez là et là seulement. Dans l’Ancien il y a la conduite du Seigneur vis-à-vis d’Israël, dont Il juge la méchanceté, mais qu’Il finit par bénir, et Son long support à l’égard des Gentils jusqu’à ce qu’arrive le jour de la visitation. Ceci explique le langage d’Ésaïe 13. L’Esprit de Dieu a en vue le jugement du monde entier par le Seigneur, c’est pourquoi ce jugement est appelé « la journée de l’Éternel ». Ce sera le terme de l’intervalle pendant lequel l’homme est laissé libre de faire sa propre volonté et de se glorifier. Ce sera la manifestation des voies morales de Dieu lorsque tout ce qui est élevé sera abaissé, et que le Seigneur et les humbles qu’Il aime seront exaltés à jamais. Dès l’instant que l’Esprit de Dieu entrevoyait ce jour, c’en était assez pour faire de Babylone vouée à la destruction, l’objet d’une intervention toute prochaine de Dieu. La vérité de la prophétie était de la sorte attestée par un accomplissement partiel à cette époque même. Babylone servait la première d’exemple comme auparavant Sodome et Gomorrhe. Si, physiquement, ce n’était pas d’une manière manifeste un jugement divin, moralement, c’était un événement prodigieux qui imprimait un cours tout nouveau à l’histoire du monde. La chute de la Perse n’était, en aucune manière, un type du jugement final réservé au monde ; la ruine de la Grèce n’avait non plus aucune signification à cet égard. Le jugement de Rome aura ce caractère, il est vrai, mais il est encore futur. Elle a passé comme les autres par des secousses répétées et a été à deux doigts de sa perte, mais elle s’est toujours relevée. Le jour vient où Rome reprendra sa splendeur et son prodigieux pouvoir, alors qu’elle sera le centre d’un empire restauré ; mais ce ne sera que pour recevoir son arrêt final des mains de Dieu. La destruction passée de Babylone est un type de celle de Rome. Quand Babylone tomba, les enfants d’Israël furent délivrés ; il n’y eut rien de semblable lorsque la Perse fut assujettie à la Grèce ou la Grèce à Rome.

Ainsi la chute de la première des grandes puissances gentiles typifie celle de la dernière, alors qu’Israël sera définitivement affranchi, converti, délivré spirituellement aussi bien que comme nation, et sera, par cela même, établi le représentant de la gloire de Jéhovah sur la terre.


Aussi, dans le chapitre suivant (14), l’Esprit de Dieu annonce-t-Il la délivrance d’Israël. La liaison est naturelle. Le renversement de Babylone implique l’émancipation d’Israël. Ce fait a donc beaucoup plus d’importance que l’histoire de toute autre puissance ; le passé de Babylone figure simplement la chute de ce vaste pouvoir qui lui a succédé, et qui tient jusqu’au bout les Juifs « dans l’esclavage et reste maître de la sainte cité ». Les Israélites doivent avoir pour serviteurs ceux-là mêmes auxquels ils obéissaient. Dès l’instant que cette gloire est réservée à Israël et cette merveilleuse délivrance aux Juifs, on comprend comment « elle se moquera du roi de Babylone ». Car il n’est question de nul autre que de la dernière tête de la bête, comme Nebucadnetsar était la première. Quoique le roi de Babylone représente le personnage qui à la fin tiendra les Juifs en captivité, ce serait se tromper gravement que de s’imaginer que ce sera un roi de la Babylone du pays de Shinhar. Je rappelle cette idée uniquement pour montrer qu’elle repose sur un principe erroné. Beaucoup de gens pensent que la Babylone d’autrefois sera rétablie aux derniers jours. Ils admettent qu’il y aura à la lettre une autre cité dans la plaine de Shinhar. Je crois cette opinion essentiellement fausse. Le Nouveau Testament nous décrit la physionomie de la Babylone à venir, et la ville de l’Apocalypse contraste étrangement avec la cité chaldéenne. Celle-ci était bâtie dans une plaine ; la Babylone future sera assise sur sept montagnes. Ainsi, tout homme d’une instruction ordinaire devrait comprendre quel sera l’emplacement de la Babylone à venir. Il n’y a qu’une ville qui réponde proverbialement à ce caractère, parmi les Gentils, les Juifs et les chrétiens. Partout elle a acquis une désignation d’après la circonstance, à tel point que si l’on parle de la cité aux sept collines, on trouverait difficilement un enfant tant soit peu bien élevé qui ne répondît : « Ce doit être la célèbre ville de Rome ». C’est là la cité qui doit aux derniers jours acquérir le même genre d’importance que Babylone possédait au commencement du siècle. Le siècle a commencé avec Babylone et finira avec le personnage appelé dans l’Apocalypse « la Bête ». Dans le livre de Daniel figurent quatre bêtes ; mais l’une d’elles est appelée « la Bête », comme étant la dernière qui existât ; et si elle a disparu, c’est pour reparaître une fois encore avant le jugement. Dieu fait du vieil ennemi le type de celui qui doit plus tard s’élever contre Son peuple. Le dernier représentant de la puissance de Babylone figure donc celui qui jouira d’un pouvoir analogue contre les saints de Dieu aux derniers jours. Au chapitre 17 de l’Apocalypse le principe général est excessivement clair, sans la supposition forcée d’une métropole en Chaldée où l’homme devrait non seulement bâtir la ville, mais avant tout créer sept collines. Un autre point que mentionne le Saint Esprit, c’est le gouvernement de la ville sur les rois de la terre, et non le contrôle exercé sur l’empire sous le symbole de la femme qui monte la Bête. — Enfin la Babylone apocalyptique est caractérisée par son passage du paganisme à l’anti-christianisme. Les déclarations d’Ésaïe nous donnent la clef de ce que nous rencontrons dans la Révélation de Jean. Il serait difficile de dire que le langage si expressif des versets 12-14 ait eu sa pleine et parfaite application dans la personne de Nebucadnetsar ou celle de Belshatsar. Il y avait chez l’un l’orgueil et une confiance illimitée en soi-même, et chez l’autre la dégradation et une luxure profane ; mais la description de ce passage ne se vérifiera bien qu’à la fin des jours et pas avant. Après avoir occupé une place si élevée, le superbe doit être abaissé comme jamais monarque babylonien ne l’a été (v. 15).

Je ne m’appesantis sur le reste du chapitre que pour noter la déclaration contenue dans les versets 24, 25. Quelques interprètes supposent que le roi de Babylone et l’Assyrien sont une seule et même personne ; c’est une erreur générale, surtout parmi les savants. Il est clair que le dernier état est quelque chose qui est ajouté à la chute de la Babylone déjà jugée. Vient alors l’Assyrien, avec lequel le Seigneur agit dans Son pays d’une manière sommaire. Ceci s’accorde parfaitement avec ce qu’on peut recueillir d’autres parties de la Parole de Dieu.

Si nous jetons maintenant un regard sur l’histoire passée d’Israël, nous verrons l’Assyrien venir le premier, son armée détruite, et lui-même renvoyé dans son pays pour y être massacré par ses fils rebelles dans la maison de son dieu. L’étonnante destruction de ses troupes symbolisait la chute de « l’Assyrien » aux derniers jours, et pas autre chose. C’était longtemps avant que Dieu eût permis à Babylone d’occuper le premier rang. Ce fut après la disparition de Ninive que Babylone obtint la suprématie. L’Assyrien n’était jamais parvenu à la domination du monde, mais Babylone l’obtint, en qualité de chef établi de Dieu, après que la royale maison de David fut devenue un appui de l’idolâtrie, suivant le peuple de Dieu dans ce qu’il aimait, l’abomination des païens. Dieu invita le roi de Babylone à prendre le sceptre du monde, ce qu’il fit. Babylone fut toujours renommée pour ses nombreuses idoles ; et puisque celui que Dieu s’était choisi pour témoin était devenu idolâtre, le plus méchant pouvait bien avoir la suprématie aussi bien que le meilleur. C’est ainsi que Babylone fut élevée au gouvernement du monde. Cela arriva, de fait, postérieurement à la destruction de l’Assyrien, que nous avons vue dans d’autres chapitres (8 et 10). Ici, au contraire, Babylone est jugée en premier lieu ; puis vient l’Assyrien qui est frappé dans le pays du peuple de Dieu. Pourquoi cela ? Parce que le Saint Esprit prend ici les circonstances de l’Assyrien aussi bien que celles du roi de Babylone, non comme une histoire des temps passés, mais comme un tableau de ce qui doit avoir lieu aux derniers jours ; or, aux derniers jours, le pouvoir représenté par Babylone sera détruit le premier, après quoi celui que figure l’Assyrien sera renversé à son tour. Ceci est en complète harmonie avec la description typique ou prophétique des derniers jours ; au lieu que si vous le limitez au passé, il ne s’y adapte qu’imparfaitement et on ne peut le bien comprendre. Tandis que l’Esprit de Dieu fait passer l’Assyrien après Babylone, il est certain qu’autrefois l’Assyrien fut le premier en date, Babylone ne vint qu’ensuite. Bientôt Babylone sera frappée sous le règne du dernier représentant de la puissance de la Bête, et cela en rapport avec les Juifs ; la puissance qui répond au roi d’Assyrie viendra après, alors que Dieu s’occupera des dix tribus d’Israël.

Que le Seigneur daigne nous rendre capables de mettre à profit toute l’Écriture, en usant pour notre instruction et notre affermissement, aussi bien que pour notre rafraîchissement et pour notre joie ! Tout contribue à nous montrer que les jouissances et les honneurs mondains auront pour dénouement la destruction et un amer désappointement. Notre affaire est de travailler à l’œuvre que le Seigneur nous confie. Il sauve les âmes pour qu’elles soient unies à Christ dans le ciel. Notre responsabilité consiste à poursuivre dans le sens de Ses pensées de miséricorde envers les pécheurs, et de Son amour pour ceux qui sont attachés au nom de Son Fils.

Chapitres 14, 28 à 16. — La division des chapitres est ici singulièrement malheureuse ; les cinq derniers versets du chapitre 14 forment une section à part, et les deux chapitres suivants embrassent le même sujet. Ce qui ajoute à la confusion, c’est l’insertion du signe du nouveau paragraphe au verset 29 du chapitre 14[1], tandis que le verset 28 fait partie réellement de la nouvelle charge, non contre Babylone ou l’Assyrien, mais du jugement de Dieu contre les Philistins.

« L’année en laquelle mourut le roi Achaz, cette charge-ci fut mise en avant. Toi, toute la contrée des Philistins, ne te réjouis point de ce que la verge de celui qui te frappait a été brisée, car de la racine du serpent sortira un basilic et son fruit sera un serpent brûlant qui vole ». La mort d’Achaz pouvait naturellement exciter les espérances des Philistins qui avaient été tenus assujettis sous la forte main de son grand-père Ozias. Il est écrit de celui-ci en 2 Chroniques 26, 4, qu’« il fit ce qui est droit devant l’Éternel, comme avait fait Amatsia son père. Il s’appliqua à rechercher Dieu pendant les jours de Zacharie, homme intelligent dans les visions de Dieu : et pendant les jours qu’il rechercha l’Éternel, Dieu le fit prospérer ; car il sortit et fit la guerre contre les Philistins, et fit une brèche à la muraille de Gath et à la muraille de Jabné et à la muraille d’Asdod ; et il bâtit des villes dans le pays d’Asdod et parmi les autres Philistins. Et Dieu lui donna du secours contre les Philistins et les Arabes qui habitaient à Gur-Baal, et contre les Maonites. Et même les Ammonites donnaient des présents à Ozias ; de sorte que sa réputation se répandit jusqu’à l’entrée d’Égypte, car il s’était rendu fort et puissant ». — Or, maintenant, non seulement Ozias mais Achaz étaient morts. « La verge de celui qui frappait » le pays des Philistins était brisée. L’ennemi avait appris à mépriser Juda pendant les jours de l’infidèle Achaz. « Car le Seigneur avait humilié Juda à cause d’Achaz roi d’Israël, parce qu’il avait dépouillé Juda et avait transgressé les commandements de l’Éternel ». Qui était son fils pour qu’ils eussent peur de lui ? Qu’ils ne se hâtent pourtant pas trop de triompher, car « de la racine du serpent sortira un basilic et son fruit sera un serpent brûlant qui vole ». Cette menace commença à s’accomplir sous le règne d’Ézéchias dont il est rapporté (2 Rois 18, 8) qu’« il frappa les Philistins jusqu’à Gaza et ses confins depuis les tours des gardes jusqu’à la forteresse ».

Mais je ne vois pas pour quel motif on supposerait que cette charge fait exception au reste, alors surtout que l’énergie du langage désigne une destruction plus terrible que celle infligée par ce pieux roi de Juda. Son parfait accomplissement aura lieu par conséquent aux derniers jours. C’est alors réellement qu’on verra la double application du pouvoir divin, quand, d’un côté, les plus misérables seront repus et les pauvres reposeront en assurance, et que, de l’autre, Jéhovah non seulement brisera la verge, mais tuera la racine de la Philistie par la famine, et détruira ce qui sera resté en elle. Au verset suivant (31), le prophète éclate avec une ardente animation ; il invite la porte à hurler et la ville à crier : « Toi, tout le pays des Philistins, sois comme une chose qui s’écoule ; car une fumée viendra de l’aquilon, et il ne restera pas un seul homme dans ses habitations ». Ainsi, voilà les Philistins sous le coup de la menace d’une force écrasante, extraordinaire, qui balaiera tout sur son passage. Ici encore, la fin est une promesse de délivrance pour les Juifs pieux : « Que répondra-t-on aux ambassadeurs de cette nation ? On répondra que l’Éternel a fondé Sion, et que les affligés de son peuple se retireront vers elle ».


Les chapitre 15 et 16 renferment la charge de Moab. Quel tableau de désolation et de malheur d’autant plus senti qu’il est inattendu et soudain ! Les Philistins n’avaient pas plus offensé Dieu en se réjouissant des calamités survenues à Israël, que les Moabites par leur suprême arrogance et leur confiance illimitée dans leurs propres forces. « Parce que Ar de Moab a été ravagée de nuit, il (Moab) a été défait, parce que Kir de Moab a été ravagée de nuit, il a été défait » (15, 1). Telle me paraît être la portée exacte de ce verset. Ainsi affaiblis par la perte de leurs places fortes, surprises l’une après l’autre à leur grande consternation, les Moabites sont supposés monter dans leurs hauts lieux pour y pleurer, avec les signes d’une profonde et universelle affliction, tant en public qu’en particulier, et cela à tel point que, aux confins du pays, les soldats eux-mêmes jettent des cris lamentables tout comme le sexe le plus faible (v. 2-4). Le prophète ou celui qu’il personnifie ne peut s’empêcher d’être attristé à l’aspect des malheurs de Moab, et il continue à décrire la désolation, la misère et le carnage jusqu’à la fin du chapitre.


Au commencement du chapitre 16, Moab est engagé à envoyer l’agneau au dominateur de la terre, du rocher du désert à la montagne de la fille de Sion. Ceci semble se rapporter au tribut qu’il payait autrefois. Après que David l’eut subjugué, il envoyait des présents à ce roi. « Il battit aussi les Moabites, et les mesura au cordeau, les faisant coucher par terre : et il en mesura deux cordeaux pour les faire mourir, et un plein cordeau pour leur donner la vie sauve ; et le pays des Moabites fut à David, sous cette condition qu’ils lui seraient sujets et tributaires » (2 Sam. 8, 2). En avançant dans leur histoire, nous trouvons que le roi de Moab possédait de grands troupeaux, et avait coutume de payer au roi d’Israël un tribut de cent mille agneaux, et d’autant de moutons avec leur laine. Le prophète semble vouloir rappeler à Moab cette obligation, le menaçant autrement de calamités plus grandes encore prêtes à fondre sur ses filles (v. 2). « Mets en avant le conseil, fais l’ordonnance, sers d’ombre comme une nuit au milieu du midi ; cache ceux qui ont été chassés et ne décèle point ceux qui sont errants. Que ceux de mon peuple qui ont été chassés séjournent chez toi, ô Moab ! Sois-leur une retraite contre celui qui fait le dégât ; car celui qui usait d’extorsion a cessé, le dégât à pris fin ; ceux qui foulaient sont consumés de dessus la terre. Et le trône sera établi par la gratuité, et sur ce trône sera assis en vérité, dans le tabernacle de David, quelqu’un qui jugera, qui recherchera le droit, et qui se hâtera de faire justice » (v. 3-5). Le prophète dans son second avertissement touche à l’horrible péché par lequel Moab a offensé l’Éternel. Avait-il donné un refuge à ceux qui avaient été chassés d’Israël ? Ou bien avait-il pris avantage de leur état de détresse pour les frapper et les trahir ? L’esprit prophétique contemple à travers Ézéchias, le vrai fils de David, lequel régnera en justice alors que le dernier oppresseur et spoliateur sera venu à sa fin.

Les versets qui suivent (6-12) décrivent une fois de plus l’orgueil de Moab et sa chute humiliante, lorsque, en dépit de sa fierté, « Moab hurlera sur Moab, chacun hurlera » et que la campagne rivalisera avec les villes, en étendue de dévastation. Le prophète pleure de nouveau à l’aspect de l’infortune de l’ennemi autrefois superbe, qui prie dans son sanctuaire, et qui « ne peut rien obtenir ».

Le verset suivant montre que, quelle que soit la pesanteur de cette charge sur Moab, « dans trois ans, tels que sont les ans d’un mercenaire (c’est-à-dire, je suppose, exactement comptés, comme on le ferait dans une position semblable), la gloire de Moab sera avilie, avec cette grande multitude, et le résidu sera petit, ce sera peu de chose ». Que ceci ait été accompli à la lettre, c’est ce que ne saurait mettre en doute le croyant, bien que nous ignorions de quelle manière le fait s’est opéré, si ça été par le moyen du roi de Juda, ou par l’Assyrien.

Il est inutile d’ajouter que l’accomplissement littéral de la prophétie aura lieu lors de la grande crise future ; il est certain en effet que le dernier roi du Nord tombera sur Moab, et que les enfants d’Israël sous leur Messie mettront les mains sur lui. Comparez Ésaïe 11, 14, avec Daniel 11, 41. Rien ne prouve plus clairement que, tout ignorés ou peu connus qu’ils soient maintenant, il restera des représentants de cette nation à la fin du siècle pour prendre part à la suprême catastrophe, humiliante pour l’homme, mais qui tournera à la gloire de Dieu, lorsque le peuple élu sera en entier sauvé, rétabli par la miséricorde divine dans le pays de son héritage, et jouira de la suprématie qui lui a été promise.



  1. Cela a été corrigé dans la traduction actuelle de la Bible. (Éd.)