Écho du Témoignage:La loi
Ce qu’elle est, ce qu’elle n’est pas, quelle est la règle de conduire du chrétien
Mon cher frère,
Je ne suis pas fâché de savoir, d’une manière un peu précise, quelles sont réellement les vues de ceux qui soutiennent que la loi est la règle de conduite du chrétien, et par quels arguments ils appuient leur opinion. Je désire examiner ce sujet, dont l’importance est grande, en dehors de toute idée de controverse et avec tout le calme possible. Je tiens compte, ou je veux tâcher de le faire, des formes théologiques de la pensée. Enseigné moi-même exclusivement par l’Écriture, une foule d’expressions qu’on n’y trouve jamais me paraissent étranges, tandis qu’elles sont à la base même des habitudes d’esprit de ceux dont j’ai à considérer ici les vues. C’est ainsi, par exemple, que les expressions : « la loi morale » — « la justice de Christ », ne se rencontrent jamais dans l’Écriture. Mais il nous faut admettre ces habitudes et ces expressions théologiques, voir jusqu’à quel point elles sont scripturaires quant au fond, et tenir ferme le fond, tout en préférant les manières de s’exprimer scripturaires qui sont sûrement plus claires et meilleures. Je ne doute pas que l’usage d’expressions non scripturaires est le fruit et la cause d’habitudes d’esprit non scripturaires ; et, d’un autre côté, il n’est pas bon de compromettre des vérités réelles, en disputant sur les mots qui les expriment. Le mot « trinité » ne se trouve pas dans l’Écriture ; l’expression « justifié seulement par la foi », ne s’y trouve pas non plus. Cependant je n’ai pas besoin de les justifier auprès de vous, comme expressions humaines de vérités essentiellement fondamentales. Je n’ai pas de termes meilleurs, et je me sers de ceux que je trouve communément employés, pour exprimer ce que je crois du plus profond de mon âme ; et je ne voudrais point m’exposer à ébranler la foi de ceux qui retiennent ferme la vérité exprimée par ces mots, en disputant sur les mots par lesquels des milliers de saints l’ont exprimée avant moi. De même pour le mot « personne », appliqué à la divinité. Il n’est point scripturaire, mais je ne trouve pas de mot meilleur pour désigner un être qui envoie, est envoyé, vient, s’en va, veut, distribue et accomplit des actes distincts. Le Père envoie le Fils, le Fils n’envoie pas le Père. Je doute que qui que ce soit me fournisse un terme meilleur que celui dont se sont revêtues pendant des siècles les profondes et divines convictions de la foi chez les saints. Si quelqu’un fait la guerre au mot dont on s’est toujours servi pour exprimer une vérité sans en avoir un meilleur, je crains un peu que ce soit à la vérité que ce terme porte avec lui qu’il fait réellement la guerre.
Je dis cela pour que vous soyez bien convaincu que je ne cherche point à ébranler quelque âme simple, en soulevant des difficultés capricieuses sur des mots, ou par répulsion pour des expressions nées et en usage dans les écoles. Si un serviteur de Dieu cherchait simplement à insister sur le caractère dangereux de ce que l’on nomme vulgairement antinomianisme, mal qui consiste à se servir de la liberté comme d’un voile pour la méchanceté — et nous savons par l’Écriture que la chair est parfaitement capable de le faire — certainement il ne m’aurait pas pour adversaire. Si on appuyait fortement sur la piété comme étant le fruit d’une foi vivante, et qu’on donnât à cela le nom de loi morale, je pourrais regretter le vague d’une phraséologie non scripturaire, ainsi que le défaut de vue et de puissance spirituelles qu’il y a, à ne pas faire de Christ la substance même de l’enseignement moral aussi bien que de l’enseignement doctrinal, comme l’Écriture le fait sûrement d’une manière si bénie ; mais, quant au fond du sujet, je crois pouvoir dire que je m’associerais cordialement au but poursuivi. De semblables exhortations ont leur place et leur nécessité. Qu’un chrétien doive marcher conformément aux préceptes du Nouveau Testament, et à toute la lumière divine qu’il peut retirer pour sa conduite, de l’Ancien, soit des dix commandements, soit de toute autre partie, c’est ce qu’aucun chrétien conséquent et droit ne saurait nier un seul instant. Je ne pourrais reconnaître comme chrétien quelqu’un qui le nierait. Je puis ne pas le juger, lui, mais je suis tenu de juger ses principes. Mais je suppose que de tels cas sont rares, si même il s’en trouve : toujours est-il sûr que cette manière de voir n’aurait ni mon appui ni le vôtre. Il est superflu de s’y arrêter davantage, sauf pour la rejeter comme étant entièrement mauvaise et n’ayant rien de chrétien.
C’est un des caractères qui distinguent l’hérésie de tout progrès dans la vraie connaissance divine, que ce dernier retient toujours ferme le fondement moral, la différence entre le bien et le mal, immuable et fixe, comme il l’est dans la nature divine et dans la Parole révélée. L’hérétique, au contraire, en fait peu de cas, ou le perd de vue. Cela est montré d’une manière remarquable en Romains 2, 6-10, au début d’une épître qui traite de la justification sur le principe de la foi et de la grâce, avec tant d’étendue et d’une manière si méthodique et si bénie. L’apôtre ne s’arrête pas à rechercher là comment on peut arriver au bien, et n’a garde d’affaiblir les principes fondamentaux par des explications ayant pour but de prouver leur accord avec d’autres doctrines, et qui ne feraient que leur ôter de leur force. D’autres passages peuvent nous enseigner cela, et le font, je n’en doute certes pas, et nous avons à les comparer soigneusement ; mais celui-ci nous présente la grande vérité dans sa fermeté immuable et inaltérable, fondée sur la nature de Dieu et la responsabilité de l’homme. Les divines fines bonorum et malorum[1], si je puis me servir d’une expression païenne, ne doivent pas être franchies. Je puis bien voir que, en moi-même, dans mon état de nature, je dois être condamné sur ce fondement, et qu’il me faut réfugier dans l’espérance placée devant moi ; je puis voir qu’il me faut trouver une vie qui persévère dans les bonnes œuvres telle qu’elle est demandée ici, trouver aussi la justice en Christ, et que je ne puis les trouver nulle part ailleurs ; tout cela, je puis bien le voir, mais l’immuable justice est là qui le rend absolument nécessaire. Il faut que je trouve cette vie et cette justice, de quelque inexprimable degré que la grâce et la gloire que je trouve dépassent la mesure de la responsabilité qui m’a forcé de les trouver. Jamais ces vérités-ci ne détruiront ni n’affaibliront celle-là.
Ce que j’objecte à la manière dont on parle de la loi morale, partout où les chrétiens sont placés sous la loi, ne tient point au maintien des obligations morales, car elles sont parfaitement justes, mais à ce que, par l’usage que l’on fait de l’expression loi morale, et la manière dont ensuite on l’applique à la loi dans le sens que l’apôtre en parle, l’enseignement de l’apôtre est entièrement perverti et mis de côté, et cela dans les points pratiques les plus importants. Et comme ceci me mène à quelques vérités capitales, je désire reprendre la question, ce que je ne ferais pas s’il ne s’agissait que de controverse.
Si, en parlant de la loi, j’emploie l’expression de loi morale (ce que l’Écriture ne fait point), je présente, par l’expression même, comme une chose fatale, le fait d’en être délivré. Pourtant, Paul déclare que le chrétien est délivré de la loi. Si je fais de la loi une loi morale, comprenant là-dedans les préceptes du Nouveau Testament et toute la moralité qui se trouve dans le cœur et dans la conduite, dire qu’un chrétien en est délivré, c’est une chose absurde, ou bien le fait d’une méchanceté monstrueuse. Certainement ce n’est point là le christianisme. Marcher d’une manière conforme à la volonté divine, et cela dans l’esprit d’obéissance aux commandements, c’est à la fois la joie et le devoir d’un cœur renouvelé. Je dis obéissance aux commandements. Il y en a qui s’effraient de ce mot, comme s’il devait affaiblir l’amour et l’idée d’une nouvelle création. L’Écriture ne s’en effraie pas. L’obéissance à quelqu’un que l’on aime, et l’observation de ses commandements, sont la preuve de cet amour et font les délices de la nouvelle nature. Lors même que je pratiquerais toujours le bien, si je n’agissais pas dans l’esprit d’obéissance je ne ferais rien de bon, parce que ma véritable relation et ma relation de cœur avec Dieu seraient laissées entièrement de côté. C’est ici l’amour, que nous gardions Ses commandements. Nous sommes sanctifiés par l’obéissance de Christ ; Christ Lui-même dit : « Le chef du monde vient ; et il n’a rien en moi ; mais afin que le monde connaisse que j’aime le Père, et selon que le Père m’a commandé, ainsi je fais ». Son acte d’amour le plus éclatant est Son acte le plus éclatant d’obéissance.
Mais c’est justement la raison pour laquelle il est si fatal, si pernicieux de mettre le chrétien sous la loi, de changer les termes de l’Écriture pour d’autres, et de parler de la loi morale comme si elle était donnée pour règle de conduite ; et parce qu’on n’a pas de passage où soit employée l’expression de loi morale, de citer les déclarations de Paul relativement à la loi, de laquelle il déclare que nous sommes délivrés, en insistant sur cela comme l’un des points principaux de son enseignement. Il ne dit pas simplement, en effet, que nous ne sommes point justifiés par les œuvres (cependant nous le serions, si la loi morale était gardée, et il l’affirme ainsi : « Ceux qui accomplissent la loi seront justifiés »), mais que nous en sommes délivrés. Un chrétien en est délivré, parce qu’elle est d’un effet ruineux toutes les fois qu’elle s’applique aux hommes en état de chute. Et ce n’est pas évidemment de la loi cérémonielle que cela est vrai, car l’homme pouvait l’accomplir quelle qu’elle fût. C’est la loi morale qui est ruineuse dans ses effets pour tout fils d’Adam déchu. Mais est-ce la moralité qui est ruineuse, ou l’obéissance aux préceptes de Christ ? Ce serait un blasphème de le dire, et abominable pour tout cœur chrétien. Mais c’est de la loi que l’apôtre déclare que ce qui était donné pour la vie a été trouvé pour lui être pour la mort, Romains 7. Elle est un ministère de mort, et un ministère de condamnation, 2 Corinthiens 3, 7-9. Tous ceux qui sont sur le principe des œuvres de loi — et ce ne sont pas des œuvres mauvaises — sont sous la malédiction, Galates 3, 10. En d’autres termes, dans l’enseignement de l’apôtre, la loi signifie tout autre chose qu’une règle ou une mesure de conduite. Elle est un principe d’après lequel Dieu en agit avec les hommes, et qui les détruit et les condamne nécessairement.
Telle est la manière dont l’Esprit de Dieu fait usage de la loi. Dans l’enseignement chrétien, Il ne place jamais les hommes sous elle, mais Il montre soigneusement, au contraire, comment ils en sont délivrés, et ne sont plus sous elle. Jamais, non plus, l’Écriture ne songe à dire : Vous n’êtes pas sous la loi d’une certaine manière, mais vous y êtes d’une autre ; vous n’y êtes pas pour ce qui regarde la justification, mais vous y êtes envisagée comme règle de vie. Elle affirme que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce ; que si vous êtes sous la loi, vous êtes condamnés et sous une malédiction ; car il faut qu’elle ait toute sa force et son effet propre. Remarquez qu’elle la présente comme un principe en contraste avec la grâce. Mais on me dira peut-être : Vous êtes injuste à notre égard, en prétendant que nous tenons qu’un chrétien est sous la loi. Je réponds en demandant comment peut être obligatoire une chose sous laquelle on n’est pas, dont on est délivré. Non, l’apôtre a grand soin d’insister sur ceci, que la loi est bonne et que ce n’est pas la faute de la loi si nous sommes condamnés dans le cas où nous avons à faire avec elle ; mais il déclare avec autant de soin que nous le sommes si c’est réellement le cas ; et que, de fait, nous en sommes délivrés : il ajoute que si nous sommes conduits par l’Esprit, nous ne sommes pas sous la loi. Il s’en sert pour exprimer un principe, une manière d’agir de la part de Dieu en contraste avec la grâce. C’est dans ce sens qu’il parle de la loi.
Je le répète, l’Écriture apporte le plus grand soin à faire voir que nous sommes délivrés de la loi en tant que ministère de mort et de malédiction, et à déclarer que nous ne sommes pas sous elle. Prenez le terme de loi morale, et parlez comme saint Paul, et voyez où vous nous amènerez. Mais pour que cela soit bien devant nos yeux, je citerai quelques passages qui montreront que ce n’est pas un sujet de peu d’importance, ni une assertion exagérée que ce qui est exprimé par ces paroles : « Tous ceux qui sont sur le principe des œuvres de loi, sont sous la malédiction ». « La loi est intervenue, afin que l’offense abondât ». Remarquez cette expression, est intervenue (pareisêlthé). C’était un principe, un système, une manière d’agir qui survenait. « Le péché n’aura pas d’empire sur vous, parce que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce ». « L’aiguillon de la mort c’est le péché, et la puissance du péché, c’est la loi ». — « Or, moi, étant autrefois sans loi, je vivais ; mais le commandement étant venu, le péché a repris la vie, et moi je mourus ». Est-ce de la loi cérémonielle que l’apôtre parle ? Loin de là, il parle de la loi dans sa nature et son essence morales. Je n’eusse pas eu conscience de la convoitise, dit-il, si la loi n’eût dit : Tu ne convoiteras point. Et, après avoir affirmé que le péché n’aurait point d’empire sur nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, il ajoute aussitôt : « Quoi donc ! pécherons-nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ? », faisant voir par là qu’il ne s’agit nullement ici de l’introduction de la loi cérémonielle. Et ce n’est pas non plus de la justification qu’il parle, mais du service du péché. Non, il traite toute la question de la loi d’une manière qui non seulement est tout à fait différente de celle dont la traite en général le parti évangélique dans son enseignement, mais qui lui est même complètement opposée. Je continue : « le péché, ayant trouvé une occasion par le commandement, a produit en moi toute convoitise ». — « Le péché, afin qu’il parût péché, m’a causé la mort par ce qui est bon, afin que le péché fût rendu par le commandement excessivement pécheur ». S’agit-il de la loi cérémonielle ? Ou bien n’est-ce pas plutôt un principe sur lequel Dieu plaça l’homme « quatre cent trente ans après la promesse », et qui « fut ajouté à cause des transgressions, jusqu’à ce que vînt la semence à laquelle la promesse est faite ». Mais maintenant la semence à laquelle la promesse fut faite est venue, et « désormais nous sommes délivrés de la loi ». Ce qui était impossible à la loi en ce qu’elle était faible par la chair, Dieu l’a fait d’une autre manière.
Je désire montrer un peu ici comment cette délivrance de la loi n’autorise nullement le péché. Ce que je cherche à faire voir, c’est que l’Écriture traite la question de la loi d’une manière bien différente de celle que j’examine. Avant que la foi vînt, nous étions gardés sous la loi. Mais depuis que la foi est venue nous ne sommes plus sous le conducteur (le pédagogue). Si l’héritage est sur le principe de la loi, il n’est plus sur le principe de promesse, mais Dieu a fait le don à Abraham par promesse. La loi a été ajoutée. De plus, s’il avait été donné une loi qui eût le pouvoir de vivifier, en réalité la justice serait sur le principe de la loi. « Mais l’Écriture a renfermé toutes choses sous le péché ». — « Pour moi, dit l’apôtre, par la loi je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu ». — « Si je suis conduit par l’Esprit, je ne suis pas sous la loi ». — « Vous êtes morts à la loi par le corps de Christ, pour être à un autre ». — « Elle est le ministère de la mort écrit en lettres, empreint sur des pierres ». S’il était permis de considérer la loi comme la loi morale qui oblige un chrétien, comment l’apôtre pourrait-il dire : « C’est pourquoi, mes frères, vous aussi, vous êtes morts à la loi par le corps de Christ » ? Ne serait-ce pas faire Christ ministre de péché, ainsi que l’exprime saint Paul ? Et qu’on n’essaie pas de dire qu’il parle de la justification par des œuvres de loi. Il ne fait rien de semblable. Voici ses paroles : — Vous êtes morts à la loi par le corps du Christ pour être à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les morts, afin que vous portiez du fruit pour Dieu. Être mort à la loi, est le véritable moyen de porter du fruit. De même, dans l’épître aux Galates : Pour moi, par la loi, je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu. Si je veux porter du fruit et vivre à Dieu, il faut que je sois mort à la loi. La loi est un principe sur lequel nous ne pouvons pas plus vivre à Dieu qu’être justifiés. Sans doute il est impossible que nous soyons justifiés par des œuvres de loi, mais il y a beaucoup plus encore. La loi nous condamne positivement si nous sommes sous elle. Elle « produit de la colère ». Elle ne saurait donner la vie, mais cela n’est pas tout. Elle est un ministère de mort — est trouvée être pour la mort. Elle est « la puissance du péché ». Par elle le péché, à qui elle fournit occasion pour cela, produit en nous toute convoitise — portant du fruit pour la mort. Les passions des péchés sont par la loi : enfin, elle rend le péché excessivement pécheur. Tout cela est-il enseigné par l’Écriture, ou non ? Alléguera-t-on que c’était là l’effet de la loi, hors de Christ et avant Christ ? Mais que le lecteur se souvienne que l’apôtre écrit à des chrétiens, et qu’il raisonne contre une tendance et des efforts qui assiégeaient partout les chrétiens en vue de les placer sous l’obligation de garder la loi après la venue de Christ. Il montre l’effet de la loi pour quiconque l’a prise dans la pensée de satisfaire aux obligations qu’elle impose, lorsque déjà il était chrétien, et il déclare que pour lui, qui avait été sous la loi, il en était délivré, et qu’elle était destinée uniquement à servir de pédagogue jusqu’à ce que la foi vînt ; mais que la foi étant venue, on n’était plus sous elle. Le sujet qu’il traite toujours, c’est la loi dans sa nature[2] ou spécialement la tentative de placer les gens sous l’obligation de l’observer après qu’ils avaient déjà reçu la foi. La loi a sa portée à elle, son effet propre.
Ceci m’amène au texte constamment cité : « Au contraire, nous établissons la loi ». Et ici, je voudrais vous prier de peser ce que j’avance. J’affirme, conformément à l’Écriture, que la loi doit avoir toujours son effet tel qu’il est présenté dans la Parole de Dieu, toujours, nécessairement, sur quiconque est placé sous elle ; mais que cet effet est toujours, selon l’Écriture, la condamnation et la mort, et rien d’autre, sur un être en qui il se trouve une convoitise ou une faute ; qu’elle ne connaît pas de miséricorde, mais prononce la malédiction contre quiconque ne persévère pas dans toutes les choses qui y sont écrites ; et que quiconque est sur le principe des œuvres de loi est sous la malédiction. Or, de fait, le chrétien, comme homme, a le péché en lui, et hélas ! il manque ; et si la loi s’applique à lui, il est sous la malédiction, car elle prononce la malédiction contre quiconque pèche. Est-ce que par là j’affaiblis son autorité ? Je la maintiens, au contraire, et l’établis de la manière la plus complète. Je demande si vous avez à faire avec la loi : dans ce cas vous êtes sous la malédiction. Pas moyen d’échapper, point d’exemption. Il faut que son autorité et ses droits soient maintenus, que ses justes exigences soient remplies. Avez-vous manqué ? Oui, certainement, vous avez manqué. Vous êtes alors sous la malédiction. Non, répondez-vous ; mais je suis chrétien : la loi m’oblige encore, mais je ne suis pas sous une malédiction. Est-ce que la loi n’a pas prononcé une malédiction contre celui qui vient à manquer ? Oui, elle le fait. Comment ! vous êtes sous la loi, vous avez failli, et vous n’êtes pas maudit après tout ! Dans ce cas, l’autorité de la loi n’est pas maintenue ; car vous êtes sous elle, elle vous a maudit, et vous n’êtes point maudit. Tandis que si vous tenez ce langage : J’étais sous la loi, et j’ai manqué ; mais Christ est mort et a porté la malédiction qu’elle prononçait ; et maintenant, comme racheté, je suis sur un autre fondement, et ne suis plus sous la loi, mais sous la grâce : alors l’autorité de la loi est maintenue. Mais si, après que Christ est mort et ressuscité, et que vous êtes en Christ, vous êtes placé de nouveau sous la loi, et que vous manquiez, et ne soyez point maudits, son autorité est détruite, car elle prononce une malédiction, et vous n’êtes nullement maudit. L’homme qui place un chrétien sous la loi, détruit l’autorité de la loi, ou bien il met le chrétien sous la malédiction ; car nous bronchons tous en plusieurs choses. Il s’imagine qu’il établit la loi, au lieu qu’il détruit son autorité. Celui-là seul établit pleinement l’immuable autorité de la loi, qui déclare qu’un chrétien n’est absolument pas sous elle, et que par conséquent il ne saurait être atteint par sa juste et sainte malédiction.
Je montrerai, par l’Écriture, avant de clore ces pages, quelle est la mesure de la conduite chrétienne. La seule chose que je désire faire remarquer maintenant, c’est que, de fait, ce dont nous avons tout particulièrement besoin, ce n’est pas tant la règle du bien et du mal, quoiqu’elle soit très utile, très nécessaire et fort à sa place, comme un motif et de la puissance pour notre nouvelle nature. La loi ne fournit ni l’une ni l’autre de ces deux choses. L’Écriture déclare qu’elle sert d’occasion au péché pour produire en moi la convoitise, que les passions des péchés existent par elle, qu’elle est la puissance du péché, et que le péché n’aura pas d’empire sur moi, parce que je ne suis pas sous la loi, mais sous la grâce. Mettez sur une table un vase renversé : qui est-ce qui s’en occupera ? Dites, « personne ne doit savoir ce qui est placé dessous » : qui ne désirera le savoir ? La loi donne occasion à la convoitise. Que seulement on veuille se souvenir que l’apôtre parle de la loi, de son effet sur quiconque est sous elle, et particulièrement sur les chrétiens qui prennent cette place après être devenus chrétiens ; et qu’il ne traite pas simplement (quoiqu’il le fasse d’une manière complète) de la justification par la loi, mais de son effet propre, qu’elle a nécessairement et dans tous les cas, et la question sera bientôt décidée si l’Écriture fait autorité.
Mais de quelle manière un homme consciencieux est-il délivré de la loi sans qu’il en résulte quelque tolérance pour le péché ? Premièrement, ceux qui pèchent sans la loi périront sans la loi, de sorte qu’il ne s’en trouverait pas mieux en mettant la loi de côté dans le but de pécher impunément. Secondement, la loi n’est pas un secours contre le péché. D’après l’apôtre, c’est parce que nous ne sommes pas sous la loi mais sous la grâce que le péché n’a point d’empire sur nous. Qu’est-ce donc qui délivre du péché et de la loi ? C’est la mort, et la nouveauté de vie dans la résurrection. Nous sommes en Christ, non en Adam. Voyons d’abord l’effet légitime de la loi, car elle est bonne, si quelqu’un en use légitimement. Elle condamne les péchés ; mais, connue dans sa puissance spirituelle, elle fait davantage : elle condamne le péché. En premier lieu, elle condamne toute transgression de ses propres commandements. Ici pour ce qui est de la conduite extérieure, un homme comme saint Paul peut éviter de lui donner prise sur sa conscience ; mais connue dans sa spiritualité, elle condamne la convoitise. Mais j’ai des convoitises. Néanmoins je vois que la loi est juste : je me condamne moi-même. Elle juge le travail de ma nature produisant la convoitise, mais elle n’en donne pas une nouvelle. Elle condamne ma volonté, réclamant une obéissance absolue comme due à Dieu ; et si ma volonté est pour le bien, je découvre que sous la loi je n’ai pas de puissance pour l’accomplir. Je ne trouve pas le moyen d’accomplir ce qui est bon. Actes, convoitises, volonté, tout ce que je suis moralement, est jugé et condamné à la mort, et je n’ai point de force pour accomplir le bien. Tel est l’effet que produit la loi sur un homme quand elle a prise dans la conscience. Elle me tue. Quant à ma conscience sous la loi, je suis mort devant Dieu. Mais la loi s’applique à l’homme comme enfant d’Adam vivant dans la chair. Sous ce rapport elle me condamne et produit la mort en moi, parce que je suis tel. À ce titre, je suis mort sous elle ; et il en résulte que ce à quoi elle s’appliquait est mort sous son efficace, et qu’elle n’a plus d’application. Un homme est mis en prison pour vol ou pour meurtre ; il y meurt ; la loi ne peut plus rien, car c’en est fait de la vie sur laquelle elle avait puissance. Par la loi, je suis mort à la loi afin que je vive à Dieu. Eu égard à ma conscience devant Dieu, la loi m’a tué ; elle ne peut rien faire de plus.
Mais il y a plus encore, parce que je suis arrivé à l’intelligence de tout cela en étant chrétien, et qu’autrement je ne pourrais le voir ni en raisonner ainsi. De là vient que je suis mort à la loi par le corps de Christ. La mort, sous la sentence de laquelle la loi m’avait placé dans ma conscience, est tombée sur un autre ; je suis mort en Lui, en Christ ; de cette manière le péché a été ôté de ma conscience. Si la mort fût tombée sur moi, ma part eût été la misère éternelle. Mais Christ ayant pris cette place, c’est l’éternel amour ; et j’ai le droit de me tenir pour mort, parce que Christ est mort et que je l’ai reçu réellement dans mon cœur comme vie ; et Il est réellement ma vie, Lui qui mourut pour moi et ressuscita ensuite. Je vis par la vie de Celui qui est un esprit vivifiant ; et par conséquent, j’ai le droit, et j’y suis obligé, de me tenir moi-même pour mort, puisque Celui en qui je vis a souffert la mort. C’est sur ce fondement que l’apôtre appuie tous ses raisonnements et toutes ses exhortations relativement au péché et à la loi. Il considère le chrétien comme mort et ensuite ressuscité, parce que sa vie véritable, son « moi », la vie qu’il a reçue et dans laquelle il vit en tant que chrétien, c’est Christ qui mourut et qui de nouveau est en vie. Après avoir dit : « pour moi, par la loi je suis mort à la loi », il ajoute : « Je suis crucifié avec Christ, mais je vis ; non plus moi, mais Christ vit en moi ». — « Si vous êtes morts avec Christ aux éléments du monde, pourquoi établissez-vous des ordonnances, comme si vous étiez encore en vie dans le monde ». — Car vous êtes morts, et votre vie est cachée avec le Christ en Dieu.
Voyons de quelle manière il applique cette doctrine au péché et à la loi. En Romains 5, il avait appliqué la résurrection à la justification. Christ (4, 25) a été livré pour nos offenses et a été ressuscité pour notre justification. C’est une justification accompagnée de la vie ; nos péchés ne sont pas simplement ôtés, mais nous sommes placés dans une position entièrement nouvelle d’acceptation devant Dieu. Cette connexion de la vie, de la puissance de la vie en Christ, avec la justification en ce même Christ qui est ressuscité après être mort pour nous, est ce qui (et non point la loi) assurait aussi la piété dans la doctrine de l’apôtre, 6, 2. « Nous qui sommes morts au péché, comment y vivrons-nous encore ? ». Nous ne le pouvons, si nous y sommes morts. Or, telle est notre position en Christ, mort et ressuscité, et bien réellement notre position puisque nous avons une vie entièrement nouvelle en Christ qui est notre vie. « Sachant ceci, que notre vieil homme a été crucifié avec Lui, afin que le corps du péché soit annulé pour que nous ne servions plus le péché ; car celui qui est mort est quitte du péché ». Il montre ensuite comment Christ est mort et ressuscité et comment Il vit à Dieu ; puis il ajoute : « Vous aussi tout de même, tenez-vous vous-mêmes pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus ». — « Que le péché » continue-t-il « ne règne dons point dans votre corps mortel », ajoutant ce que j’ai déjà cité, « car le péché n’aura pas d’empire sur vous, parce que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce ». Il fait allusion alors à l’abus que la chair voudrait faire de cette doctrine ; mais au lieu d’insister sur la pensée que la loi morale les obligeait, il leur fait voir qu’ils sont affranchis du péché, et asservis à Dieu et à la justice, et qu’ils ont à livrer leurs membres comme esclaves à la justice pour la sanctification. C’est donc en vertu du fait que nous sommes morts et que nous vivons dans la vie de Christ, que nous sommes affranchis du péché.
Dans le chapitre 7, il applique la même vérité à la loi avec plus de soin encore. Vous ne pouvez, dit-il, et il insiste là-dessus, avoir deux maris en même temps. Vous ne pouvez être obligés à Christ et à la loi. Bien ; mais de quelle manière l’homme placé sous la loi en peut-il être délivré ? Ce sera en mourant à ce à quoi il était tenu. La loi n’avait de droit sur l’homme que comme vivant dans la vie d’un enfant d’Adam. « La loi a de l’autorité sur l’homme aussi longtemps qu’il vit » ; mais je suis mort à la loi par le corps de Christ ; le lien qui m’obligeait à la loi a pris fin d’une manière absolue, complètement et nécessairement ; car la personne est morte, et que la loi n’avait d’autorité sur elle qu’aussi longtemps qu’elle vivait. De là vient que Paul dit, dans un langage plein de force et de simplicité : lorsque nous étions dans la chair, les passions des péchés lesquelles sont par la loi. La loi s’applique à l’homme dans la chair ; mais nous sommes morts, nous ne sommes pas dans la chair. Quand nous y étions, elle s’appliquait à nous : elle s’appliquait à la chair, excitait le péché, et condamnait le pécheur. Mais il est mort sous son action lorsqu’il était placé sous elle — mort sous son effet dans la personne de Christ, et désormais il vit délivré d’elle, en possession d’une nouvelle vie, laquelle est Christ ressuscité, en dehors à toujours de la portée de la loi et de la condition qu’elle concerne. Il n’est point lié à l’ancien mari ; la mort a rompu le lien, sa propre mort et sa crucifixion en Christ ; car il a reconnu que c’était là ce qui était justement sa portion comme pécheur. Il est maintenant marié à un autre, savoir, à Christ qui est ressuscité d’entre les morts, afin de le rendre capable de porter du fruit pour Dieu. Il n’est point dans la chair, mais dans l’Esprit, si l’Esprit de Dieu habite en lui ; si non, il n’est point en Lui.
Oui, direz-vous, mais la chair est encore là, bien que le chrétien ait le droit, et qu’il doive le faire, de se tenir lui-même pour mort ; et, en conséquence, il a besoin de la loi, non point pour ôter le péché, mais pour faire qu’il n’ait pas d’empire. Je réponds par ces paroles déjà plusieurs fois cités : « Le péché n’aura pas d’empire sur vous, parce que vous n’êtes pas sous la loi ». Quand j’étais dans la chair, la loi était pour le péché l’occasion d’opérer dans mes membres. Or, je suis mort dans la chair et la loi ne peut aller au-delà de la mort. La piété se trouve dans la vie nouvelle qui vit par la foi du Fils de Dieu. C’est le fait béni et dont j’ai conscience, que je suis mort en Christ et que je suis en Lui, de telle sorte que je ne suis plus du tout dans la chair, mais que je l’ai, Lui, pour ma vie, qui est la voie scripturaire de la piété, de la justice avec son fruit en sanctification, et non point le fait d’être sous la loi. Vivre dans un Christ ressuscité, comme quelqu’un qui a été mis par la mort hors de la portée de la loi, voilà la vie chrétienne. La mesure de cette marche, c’est Christ, et rien d’autre. Celui qui dit qu’il demeure en Lui, doit lui-même aussi marcher comme Il a marché. Consultons l’Écriture sur ce point, la règle scripturaire de la conduite. Je viens de la donner. Nous devons marcher comme Christ a marché. Il est encore écrit : « Il nous a laissé un modèle afin que nous suivions ses traces ». Il est à la fois la vie, le motif, et aussi le modèle ; Il vit en nous, et la vie que nous vivons dans la chair nous la vivons par la foi en Lui. Il a foulé le sentier avant nous. Il est tout, et en tous. C’est comme contemplant en Sa face découverte la gloire du Seigneur (2 Cor. 3) que nous sommes transformés dans la même image de gloire en gloire ; et ainsi Christ étant empreint dans le cœur par l’Esprit du Dieu vivant, nous devenons l’épître de Christ (2 Cor. 3). Et remarquez que cela est présenté comme faisant contraste avec la loi écrite sur des tables de pierre. Nous devons revêtir Christ, revêtir le nouvel homme. C’est là une chose qui va si loin qu’il est dit (1 Jean 3) : « Par ceci nous avons connu l’amour, c’est que Lui a laissé sa vie pour nous, et nous devons laisser nos vies pour les frères ». La loi ne connaissait pas de principe tel, ni une telle obligation. Est-ce la loi qui a fait que Christ est venu et a laissé Sa vie pour nous ? Cet exemple ne démontre-t-il pas combien est fausse la pensée que la loi est la règle ou la mesure de notre conduite ?
À la vérité, il y a deux aspects dans la vie de Christ : l’obéissance de l’homme à la volonté de Dieu, à la loi si vous voulez, car Il est venu sous la loi ; et puis la manifestation de Dieu Lui-même dans Sa grâce et dans Sa bonté. Mais ceci ce n’est point la loi ; c’est Dieu en bonté et non pas l’homme dans sa responsabilité : c’est une chose funeste de confondre les deux points de vue. Dira-t-on que nous ne sommes pas appelés, et que nous ne saurions l’être, à suivre Christ dans Sa vie considérée sous son dernier aspect ? Je réponds que nous sommes expressément appelés à le faire, et que nous ne le sommes jamais à Se suivre sous la loi. Quant à ce dernier point l’Écriture déclare que si j’aime mon prochain comme moi-même, j’aurai accompli la loi, de sorte que je n’ai pas besoin d’être sous elle. Elle dit encore que si je marche selon l’Esprit, la justice de la loi sera accomplie en moi, et qu’ainsi sera effectué ce qui était impossible à la loi, en ce qu’elle était faible par la chair. L’Esprit produira des fruits contre lesquels il n’y a point de loi. C’est une nature nouvelle dirigée par l’Esprit, et formée par la Parole, croissant en toutes choses jusqu’à la tête (Christ) — qui marche d’une manière digne du Seigneur. Les commandements de la loi ne produisent rien de pareil ; mais c’est en regardant par grâce à Christ que nous sommes transformés dans la même image. Mais dans cette marche, par laquelle Il manifeste Dieu, Christ est expressément placé devant nous comme notre modèle. « Soyez imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants, et marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés, et s’est donné lui-même pour nous comme offrande et sacrifice à Dieu, en odeur de bonne senteur ». Nous sommes appelés à être remplis de la connaissance de Sa volonté en toute sagesse et intelligence spirituelle, pour marcher d’une manière digne du Seigneur pour Lui plaire à tous égards, et non point selon la loi. Nous sommes renouvelés en connaissance, selon l’image de Celui qui nous a créés. Lisez la description de ce caractère : « Revêtez-vous comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, d’entrailles de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de longanimité, vous supportant les uns les autres, et vous pardonnant les uns aux autres, si l’un a un sujet de plainte contre l’autre, comme aussi le Christ vous a pardonnés, vous aussi faites de même ». Si quelqu’un désire avoir un tableau complet de la vie chrétienne, de la vie en nous de Christ ressuscité, qu’il lise Colossiens 3, 1-17.
Je crois que j’en ai dit assez et que j’ai fait assez de citations pour montrer la pensée de l’Écriture sur le point qui nous occupe, c’est-à-dire la manière dont elle envisage la loi, son action et ses effets, et aussi ce qu’elle enseigne sur la règle de conduite du chrétien comme quelqu’un qui est mort et qui est associé avec Christ ressuscité, et qui vit par lui. La loi est la mesure de la responsabilité de l’homme considéré comme tel vis-à-vis de Dieu. Elle est parfaite comme telle et pas davantage, et elle n’aurait pu être plus que la mesure de la marche de l’homme. Christ fut parfait en cela comme en toute chose ; mais Il alla plus loin, et manifesta Dieu Lui-même dans Sa souveraine grâce et dans Sa bonté ; et nous devons Le suivre en cela, aussi bien que dans Sa parfaite obéissance à Dieu. C’est Lui, et Lui seul, qui est notre modèle et notre exemple ; ce n’est rien d’autre. C’est Lui, et rien d’autre, qui est l’objet dans lequel le cœur a à se reposer, qui doit gouverner le cœur, et à la ressemblance duquel il doit se développer et croître. Il est le motif et le ressort de la conduite en nous, aussi bien que son parfait modèle, ce que la loi ne saurait être, car elle n’est pas la vie, ne la donne pas ni ne la nourrit.
Mais il se rattache à ce sujet d’autres points sur lesquels l’enseignement de ce que l’on nomme le parti évangélique me semble manquer en grande partie de l’appui de l’Écriture, et ne pas être d’accord avec ce qu’elle enseigne ; tout cela sur des sujets pratiques importants. Et d’abord, relativement à l’unité essentielle de l’Église dans tous les âges et sous toutes les dispensations. Que dans tous les temps, depuis la chute, un pécheur soit sauvé de la même manière, aucun chrétien ne saurait en douter un instant. Mais le salut n’est pas l’Église, ni l’Église le salut. Si on dit, ne faut-il pas maintenant qu’un homme appartienne à l’Église de Dieu pour être sauvé ? Je réponds, sûrement. Ce qui veut dire que, s’il est sauvé, il lui appartient, parce que c’est l’ordre divin maintenant ; mais ce qui le sauve c’est Christ, et non pas l’Église. Christ sauvait un Juif, qui ainsi était sauvé ; mais il appartenait à Israël, qui était l’ordre de Dieu en ce temps-là, et n’appartenait pas à l’Église. La notion de l’église juive, comme on parle, n’a rien absolument de scripturaire. Tout autant qu’un individu était sauvé, toujours il était sauvé par Christ ; mais ce n’est point cela qui constituait l’Assemblée. Il n’y a eu jamais d’église juive. Il a existé une nation juive, et l’homme qui était appelé par la grâce en tant que juif appartenait à cette nation par la foi, et était tenu d’y demeurer attaché. Maintenant il n’y est point tenu, parce que dans l’Église il n’y a ni Juif ni Grec. Un homme était juif par le fait de la naissance, et quand il était circoncis c’était un Juif en communion régulière. L’Église, au contraire, même envisagée simplement dans sa profession extérieure, est debout par la foi ; jamais elle n’est composée de branches naturelles. Les Juifs étaient des branches naturelles. Dans la position qui leur avait été désignée de Dieu comme Juifs, ils n’étaient pas debout par la foi. Une église juive est une fausseté ; rien dans l’Écriture n’en autorise l’idée. Christ s’est donné pour la nation, mais Il ne s’est pas donné pour la nation seulement, mais aussi afin de rassembler en un les enfants de Dieu dispersés, et c’est là ce qui a formé l’Église. L’Église ou l’Assemblée, est le rassemblement de « ceux qui devaient être sauvés ». Cela n’avait jamais lieu dans le judaïsme. L’unité des Juifs était une unité nationale, et pas autre chose. Ils étaient un peuple saint par leur vocation comme peuple. Quand le christianisme fut fondé, le Seigneur ajouta à l’Église ceux qui devaient être sauvés : Il ne fit jamais cela auparavant. C’était là l’Église, l’Assemblée de Dieu dans le monde. Auparavant si un Juif venait à croire, il n’était ajouté à rien, c’était un Juif pieux, au lieu d’être un Juif impie, mais il appartenait à ce à quoi il appartenait avant ; il n’y avait rien à quoi il fût ajouté par la foi. Nous, nous sommes baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps. Mais il est déclaré positivement que le baptême du Saint Esprit a eu lieu après l’ascension de Christ, en un mot, le jour de la Pentecôte.
Pour ce qui est de l’Église invisible, c’est une idée qui n’est ni scripturaire, ni saisissable. Elle fut inventée notamment par saint Augustin dans le but de concilier la triste corruption de l’Église professante, avec la fidélité et la piété nécessaires à un vrai chrétien. Une ville située sur une montagne ne peut point être cachée : vous êtes la lumière du monde. Qu’est la valeur, l’utilité d’une lumière invisible, d’une Église sous un boisseau ? Il n’existe pas de communauté dans l’Église invisible. Que l’Église soit devenue invisible, je l’admets pleinement, mais je l’admets comme fruit du péché de l’homme. Dans tous les cas, cela ne s’applique point au judaïsme. Dans ce système, la nation — les enfants de Jacob — constituait le corps visible public, et que Dieu entendait être tel ; et jamais les individus saints (croyants) n’étaient rassemblés d’une autre manière. Dans le christianisme ils le furent. Christ s’est donné Lui-même pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés. S’ils étaient rassemblés avant comme une Église — une Assemblée, comment pouvait-Il rassembler ce qui était dispersé ? Pourtant l’Écriture le déclare, Christ s’est donné Lui-même pour rassembler les enfants de Dieu qui étaient dispersés. Ils étaient enfants de Dieu, mais ils ne formaient point une Église, une Assemblée. Ils étaient dispersés, et Christ vint introduire un autre état de chose. S’ils formaient déjà auparavant une Église rassemblée, comment Christ vint-Il pour rassembler les dispersés ? Si cela signifie que Christ devait sauver en un corps tous les rachetés à la fin du temps, alors ils ne furent jamais dispersés. Mais dans ce passage, la nation est mise en contraste avec les enfants de Dieu, et Christ vint pour changer cet état de choses, pour rassembler les enfants de Dieu dispersés, en d’autres termes pour fonder l’Église, l’Assemblée. C’est pour cela qu’Il dit : « sur ce rocher » — la confession qu’Il était le Fils du Dieu vivant — « je fonderai mon assemblée ». Avait-Il fait cela avant qu’il eût été confessé, et qu’il pût l’être, que Jésus était le Fils du Dieu vivant ? Tant Christ que les apôtres parlent de l’Église et du rassemblement des enfants de Dieu comme d’une chose distincte et nouvellement introduite. Tous les raisonnements relatifs à une prétendue église juive prennent leur source dans un christianisme judaïsant, ou reposent sur l’idée entièrement fausse, que, parce qu’on est sauvé de la même manière, on forme une communauté visible, et même la même communauté. Mais pourquoi cela ? Les hommes pouvaient être sauvés sans former une communauté. L’individualité est tout aussi importante que la communauté ; plus encore quand il s’agit de choses divines. La conscience et la foi sont toutes deux individuelles, l’adoption est individuelle. Les Juifs formaient une communauté, mais non de personnes sauvées ; c’était une communauté nationale des fils de Jacob. L’Église constitue une communauté, mais en aucune manière une communauté de même espèce, qu’il s’agisse de simple profession ou de réalité : elle est debout par la foi. Le salut individuel n’implique nullement l’existence d’une communauté, et il peut y avoir communauté religieuse sans que le salut soit nécessairement impliqué. Telle était la nation juive.
Toute la théorie sur laquelle repose l’idée d’une Église ayant existé dans tous les âges et sous toutes les dispensations, est complètement fausse. Les faits manquent également. Jusqu’au temps de la nation juive, il n’a pas existé de communauté de personnes liées par une profession qui les obligeât. Abel offre son sacrifice par la foi ; mais on ne voit nulle trace de l’existence d’une communauté de gens faisant une profession à laquelle on fût tenu ; pas davantage au temps d’Hénoc ni dans celui de Noé. L’idée d’une communauté visible avant le déluge n’est absolument qu’un rêve. Venant ensuite à l’époque qui lui succède, je trouve Job tout seul, et pas de communauté visible quelconque ; et quant à Abraham, il est expressément dit à son égard : « je l’ai appelé, lui étant tout seul, et je l’ai béni » (És. 51, 2), le point sur lequel ce passage insiste étant précisément, qu’Abraham était tout seul, et que le nombre n’était pas nécessaire pour la bénédiction. Lorsque j’arrive à la première communauté religieuse, je la trouve fondée sur un principe tout autre qu’une profession de foi qui obligeât ses membres. Un homme en faisait partie par sa naissance, avant d’être capable de faire quelque profession. Il en était, ipso facto, et ne pouvait être autre chose ; seulement ses parents étaient obligés de le circoncire le huitième jour. La foi constitue le principe sur lequel l’Église visible est debout (Rom. 11). Celui sur lequel reposait le judaïsme était le droit de la naissance, quoique non pas de manière à annuler les droits souverains de Dieu. Si l’Écriture dit vrai, quoique toujours le salut ait été le même, l’Église, ou la communauté, l’unité des croyants, n’a jamais existé jusqu’à la Pentecôte. Son Chef n’existait pas non plus, dans cette condition dans laquelle Il pouvait être son Chef, c’est-à-dire, comme l’homme exalté, qui avait accompli la rédemption. Après avoir été ainsi exalté, Dieu L’a donné pour Chef sur toutes choses à l’Église, la plénitude de Celui qui remplit tout en tous (Éph. 1, 20-23). Il a fait des deux un homme nouveau, édifiés ensemble pour être une habitation de Dieu par l’Esprit (Éph. 2, 14-22). Autrefois, dans la nation d’Israël, Dieu habitait dans le temple ; maintenant, Il demeure par l’Esprit dans une habitation formée, par la foi, de Juifs et de Gentils comme un homme nouveau, et cela seul est l’Église ; mystère, qui, depuis le commencement du monde avait été caché en Dieu dans l’intention que la sagesse de Dieu, si diversifiée dans ses formes, fût maintenant donnée à connaître par l’assemblée, aux principautés et aux autorités dans les lieux célestes (Éph. 3). Visible ou invisible, en tous cas, les autorités célestes ne pouvaient pas voir le mystère. Le silence avait été gardé à son égard dès les temps éternels (Rom. 16), et il n’avait pas été auparavant manifesté ni révélé aux enfants des hommes. Les hommes n’étaient point édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l’Esprit. C’était un mystère caché dès les siècles et dès les générations. Il n’existait pas de fait. Il a pour fondement la destruction du mur mitoyen de clôture, et possède un homme nouveau ; la vieille chose au contraire, reposait sur le maintien strict du mur mitoyen de clôture, et n’avait que le vieil homme. Si l’Écriture signifie quelque chose, l’Église n’a pas eu d’existence jusqu’au jour de la Pentecôte, où Christ, après avoir été exalté comme Chef sur toutes choses, à la droite de Dieu, envoya le Saint Esprit, afin de rassembler en un corps sur la base de la foi. Tous sont sauvés de la même manière, mais tous ne sont pas également assemblés. Or, Église signifie Assemblée.
J’en viens maintenant à ce que l’on dit d’une justification commune à tous les saints, leur donnant à tous une même place avec Christ. On prétend, d’après Romains 3, 20, et on affirme, que la justice de Christ est l’unique fondement de notre justification. Ceci manque d’exactitude. L’apôtre a établi le fait, que sur leur propre terrain, tous, Juifs et Gentils, sont sous le péché, et que nulle chair ne sera justifiée devant Dieu par des œuvres de loi. Il ne parle nullement de la justice de Christ ; mais il déclare que Dieu L’a présenté pour propitiatoire, par la foi en Son sang, afin de montrer Sa justice (la justice de Dieu) dans le support des péchés précédents, dans la patience de Dieu, pour montrer, dis-je, Sa justice dans le temps présent en sorte qu’Il (Dieu) soit juste et justifiant celui qui est de la foi de Jésus. Qu’il s’agit de la justice de Dieu par laquelle Il justifie, c’est ce que les versets 21 et 22 déclarent d’une manière positive en distinguant cela de Christ. C’est la justice de Dieu qui est manifestée, la justice de Dieu par la foi de Jésus Christ envers tous et sur tous ceux qui croient. Dieu était démontré juste dans le pardon accordé aux saints de l’Ancien Testament envers lesquels Il avait usé de patience, et cette justice était maintenant manifestée pour que nos âmes s’appuyassent sur elle. Bien plus, nous la sommes en Christ. Dire que tous les saints depuis la chute sont justes de la même manière, c’est parler selon l’Écriture ; — mais c’est contraire à l’Écriture, que de prétendre qu’ils sont tous l’Église. Dieu a usé de support avec eux, sachant ce qu’Il voulait faire ; mais la justice n’était pas manifestée. Maintenant, en ce temps-ci elle l’est, en sorte qu’Il soit juste et justifiant celui qui est de la foi de Jésus. La différence que fait la manifestation de la justice, est une différence sérieuse pour ce qui concerne notre état pratique.
J’arrive à un autre point, celui de la règle de conduite. Prétendre que dans tous les temps, Dieu doit donner aux hommes la même règle de conduite, n’est qu’une théorie basée sur une autre théorie. Sans doute Dieu est immuable dans Sa nature, et il y a, dans celui qui est participant de la nature divine, certains principes qui sont aussi d’une vérité immuable. Mais dire que la loi est telle, ou qu’elle est la règle que Dieu nous a donnée à suivre, c’est avancer une chose fausse. Cela provient d’un usage non scripturaire de l’expression de « loi morale ». Dieu a donné une autre règle à Ses créatures pour leur obéissance. Est-ce qu’Il n’a pas donné la loi de Moïse ? la seule loi, remarquez-le, qu’Il ait jamais donnée (sauf la défense de manger le fruit défendu). En d’autres termes, la seule loi pour laquelle Dieu ait jamais réclamé l’obéissance de Ses créatures, est différente de la règle actuelle de conduite. Elle consiste en des commandements qui avaient été donnés aux Juifs à cause de la dureté de leurs cœurs, ce que le Seigneur a abrogé. « La loi n’a rien amené à la perfection » (Héb. 7, 19) ; et en conséquence, « il y a abrogation du commandement qui a précédé ». « Il a été dit aux anciens »… « mais moi je vous dis » ; c’est ainsi que le Seigneur s’exprime. Prétendre qu’un Dieu saint, juste, bon et parfait ne peut nous donner qu’une seule règle de vie, c’est avancer une chose contredite par les faits et les déclarations les plus simples de l’Écriture. Dieu en a donné une autre qu’Il a abrogée parce qu’elle n’avait rien amené à la perfection, et il y a introduction d’une meilleure espérance, par laquelle nous approchons de Dieu. Il est vrai que Christ sut faire jaillir de cette loi les deux grands principes dont tout dépend, et qui présentent la perfection de la créature — l’amour suprême pour Dieu, et l’amour de notre prochain à l’égal de nous-mêmes. Mais même ces deux traits ne sont point « l’expression du caractère divin », et c’est pure déception que de dire que l’amour, dans son caractère abstrait, s’y trouve prescrit. Je nie absolument que la loi soit l’expression du caractère divin. Elle est l’expression tout à fait parfaite de ce que doit être la créature ; et c’est évidemment ce qui devait être donné comme loi à la créature. Je crois que les anges l’accomplissent dans le ciel, qu’ils sont heureux et bénis en l’accomplissant. Mais par cela même qu’elle constitue la perfection d’une créature, elle n’est point l’expression du caractère divin. Dieu peut-Il — c’est avec révérence que je parle — Dieu peut-Il aimer Son prochain comme Lui-même ? Ou même peut-Il s’aimer, dans le sens que la chose est dite avec raison d’une créature, de tout Son cœur, de toute Sa pensée et de toute Sa force ? Ces deux commandements expriment la perfection d’une créature dans un état de bénédiction, et ne présentent nullement le type du caractère de Dieu. L’idée est essentiellement fausse.
En outre, ce n’est point dans la loi que l’amour divin se montre dans sa perfection, ni dans sa nature, en tant que constaté envers nous dans toute son excellence. L’amour requis, commandé par la loi, est un devoir qui découle de la relation dans laquelle les objets à aimer sont placés à notre égard, et en vertu de laquelle ils ont droit à notre amour : — Dieu d’une manière suprême, et mon prochain comme moi-même. C’est l’accomplissement dans une mesure adéquate, d’après un motif adéquat, d’un devoir qui est le bonheur parfait. L’excellence de l’amour de Dieu, comme il s’est particulièrement manifesté et constaté envers nous, consiste en ce qu’il n’y a ni motif, ni droit, ni objet digne d’être aimé, mais que l’objet de cet amour au contraire en est entièrement indigne. Dieu a aimé des pécheurs, Il a envoyé Son Fils lorsque nous étions morts dans le péché, afin que nous vécussions par Lui. En ceci est l’amour ; non que nous ayons aimé Dieu — ce que la loi exigeait, mais en ce que Lui nous a aimés, et qu’Il a envoyé Son Fils pour être la propitiation pour nos péchés. En un mot, Dieu constate Son amour envers nous, en ce que lorsque nous étions encore pécheurs Christ est mort pour nous. L’amour légal est basé, ainsi qu’une loi doit le faire, sur l’existence d’un droit. L’essence de l’amour divin, tel qu’il s’est révélé envers nous, consiste en ceci, qu’il n’existe pas de droit — bien plus, qu’il y a tout le contraire d’un droit. La seule analogie qu’il soit possible de voir à un tel amour, et qu’il ne convient pas d’introduire dans ce dont nous parlons ici, est celle que présentent ces paroles : « le Père aime le Fils » ou celles-ci : « c’est pour cela que le Père m’aime » ; mais cela est infiniment au-dessus de notre condition et de toutes nos pensées, et si dans un sens nous y sommes admis, comme, Dieu en soit béni, c’est le cas en effet, c’est uniquement par un effet de la grâce souveraine qui nous a donné place en Christ et avec Christ.
La loi n’est point l’expression du caractère divin. Elle est la règle parfaite d’une créature, et en conséquence elle ne peut, d’après la nature des choses, s’appliquer à Dieu Lui-même, parce qu’Il n’est pas dans la relation d’une créature, et que la loi est l’expression de ce qui convient à de telles relations. Si elle est l’expression de ce que nous devons à Dieu, elle ne peut être celle du caractère de Dieu. Adam fut placé sous une loi qui n’exigeait pas dans son esprit la connaissance du bien et du mal en soi, du juste et de l’injuste. Il n’y avait pas de mal à manger du fruit défendu, sauf en ce qu’il était défendu ; en lui-même l’acte n’était ni bon, ni mauvais. C’est en en mangeant que l’homme acquit la connaissance du bien et du mal : le péché et la conscience arrivèrent ensemble. Dieu ne permit pas que l’homme sortît du paradis comme pécheur, pour commencer ce monde, sans emporter avec lui la conscience : il a pu la corrompre, l’endurcir ; mais elle était là, puisqu’elle a été corrompue et endurcie. C’est ce qui fait que par rapport aux Gentils, l’apôtre raisonne sur le terrain de la conscience, quoiqu’il ne se borne pas seulement à cela ; mais il dit qu’il n’y a pas de loi écrite dans le cœur des Gentils ; s’il y en avait eu, ils seraient sous la nouvelle alliance. Ce qui est écrit dans leur cœur, ce n’est point la loi, mais ce sont les œuvres particulières que leur conscience naturelle approuve ou condamne, œuvres trouvées aussi dans la loi. On dit souvent qu’Adam fut créé dans la justice et la sainteté. C’est une erreur complète. Il fut créé dans l’innocence. C’est le nouvel homme qui fut créé en justice et en vraie sainteté, que nous sommes appelés à revêtir — Christ, non pas Adam (Éph. 4, 24). Il est entièrement nouveau — Kainon, créé. Nous sommes là créés de nouveau dans le Christ Jésus ; au moins, l’Écriture s’exprime de cette manière. Ainsi, en Colossiens 3, 10 : « Ayant revêtu le nouvel homme qui est renouvelé en connaissance selon l’image de Celui qui l’a créé ». En général, dans ce que l’on dit sur ce sujet, on confond Christ et Adam, la nouvelle création et l’ancienne. Adam était innocent, il n’avait pas la connaissance du bien et du mal : là-dessus le témoignage de l’Écriture est formel, c’est le fond même de l’histoire de la chute ; et il en résulte qu’il ne pouvait avoir la justice ou la sainteté qui impliquent la connaissance du bien et du mal. Si Dieu dit : « L’homme est devenu comme l’un de nous, sachant le bien et le mal », il est bien évident qu’il ne connaissait pas le bien et le mal auparavant. Il en résulte aussi que c’est également erroné que de dire, comme on le fait d’ordinaire, qu’Adam était juste et saint, fait à l’image de Dieu dans la justice et la sainteté. Par la chute, l’homme acquit une connaissance du bien et du mal qui lui donna, ou plutôt, qui est un sentiment du bien et du mal, approprié à l’état dans lequel il se trouve, à ses devoirs dans les diverses relations qu’il soutient. En général, la loi mosaïque maintient ces relations, quoique non dans tous leurs détails selon l’institution originelle de Dieu. D’Adam à Moïse les hommes ne furent point placés sous une loi, mais ils avaient la connaissance du bien et du mal, et ainsi ils étaient loi à eux-mêmes. Mais il ne nous faut pas confondre cela avec une loi révélée ou donnée, par la raison qu’une loi révélée ou donnée de Dieu implique l’autorité expresse du législateur, et que celui qui y désobéit est coupable d’une transgression expresse de l’autorité du législateur. Néanmoins le péché était là, d’Adam à Moïse, mais non la transgression ; car où il n’y a pas de loi il ne saurait y avoir de transgression. De là vient qu’il est dit (par allusion à Osée qui dit, en parlant d’Israël, « ils ont transgressé l’alliance comme des hommes », dans l’hébreu comme Adam) : « La mort régna depuis Adam jusqu’à Moïse, même sur ceux qui ne péchèrent pas selon la ressemblance de la transgression d’Adam ». Israël avait enfreint la loi, comme l’avait fait Adam ; et il n’avait pas péché seulement, fait ce que la conscience condamnait, mais il avait violé l’autorité de Dieu qui s’était exercée en imposant la loi. Mais c’est se méprendre énormément sur l’argumentation de saint Paul ou sur la relation du chrétien avec la loi, que d’insister sur la différence qu’il y a entre les commandements moraux et les ordonnances cérémonielles. Il y a assurément une différence : ce que la conscience naturelle condamne comme mauvais, constitue coupable, si on le fait, quand même il n’y ait point de loi ; il est évident qu’il ne saurait en être ainsi pour le cas d’une cérémonie. Mais l’apôtre va beaucoup plus profondément dans la question, et présente l’effet de toute loi comme un principe de relation avec Dieu, lorsqu’elle concerne un pécheur. Aussi, le voyons-nous mêler ensemble la partie morale de la loi et sa partie cérémonielle, non pas comme indifférent à leur distinction, car il ne l’est pas, mais parce qu’il traite une question tout autre ! Il se sert de la loi pour convaincre de péché et tuer l’âme, lorsqu’on l’envisage moralement et qu’on la connaît dans sa portée spirituelle, et il délivre de la loi ainsi connue par la mort et la résurrection ; faisant voir aussi que si on l’applique après la rédemption, elle place l’homme sous une responsabilité fatale. Elle constitue, considérée dans son ensemble, un système dont la circoncision était le sceau initiateur, et il faut que l’homme accomplisse tout, ou qu’il soit maudit, car les termes de la loi étaient tels.
La loi, d’après l’enseignement et la manière de raisonner des apôtres, était une dispensation spéciale et déterminée de Dieu, en vertu de laquelle la vie était promise à la condition de l’obéissance, et où tout tirait son caractère d’une justice reposant sur ce principe : l’obéissance d’abord, puis la vie là-dedans, la justice. L’évangile repose sur un principe opposé. Il ne donne pas la vie comme un résultat de l’obéissance ; et il ne nous présente pas non plus la justice comme obtenue de cette manière, ou d’après ce principe. Présenter la chose de cette manière après que la justice divine est devenue nôtre par la foi, c’est renverser et annuler la justice divine : c’est à cela, comme nous l’avons vu, à la tentative de ramener la loi, après Christ, que l’apôtre résiste. Ce ne sont pas simplement les cérémonies qu’il met de côté. Sans doute qu’elles disparaissent comme ombres des biens à venir dont le corps est Christ, mais l’apôtre argumente sur l’application ou l’usage de ce que l’on nomme la loi morale, l’usage des dix commandements, ou tables de pierre, et les présente comme étant ruineux pour le chrétien — sauf s’il s’agit de convaincre de péché et de condamner. Il met de côté la dispensation de la loi, se référant d’une manière toute spéciale aux dix commandements auxquels pourtant il associe l’ensemble du système, qu’il considère comme en étant inséparable, vu qu’il forme avec eux un grand tout indivisible sur la consommation duquel Israël ne pouvait pas arrêter ses regards, et qui devait prendre fin. Il avait été donné pour qu’on eût la vie par son moyen, mais par suite de l’état de péché de l’homme il s’était trouvé être pour la mort. Placer l’homme sous ce système après la rédemption, c’est détruire non pas l’homme, mais la rédemption, et amener une ruine définitive. Écoutez maintenant ce qu’il dit, 2 Corinthiens 3 : « Or, si le ministère de la mort écrit en lettres, empreint sur des pierres, a été introduit avec gloire, de sorte que les fils d’Israël ne pouvaient arrêter leurs yeux sur la face de Moïse à cause de la gloire de sa face, laquelle devait prendre fin, combien plus le ministère de l’Esprit ne sera-t-il pas avec gloire. Car si ce qui devait prendre fin a été introduit avec gloire, beaucoup plus ce qui demeure subsistera-t-il en gloire. Et nous ne sommes pas comme Moïse qui mettait un voile sur sa face, afin que les fils d’Israël n’arrêtassent pas leurs yeux sur la consommation de ce qui devait prendre fin ». Outre le contraste établi entre la loi et l’évangile, je trouve ici deux choses qui vont ensemble. L’apôtre nie la distinction entre les tables de pierre, les dix commandements comme dispensation de Dieu, et toutes les autres institutions de Moïse ; et il parle des tables de pierre comme d’un ministère de mort, et de l’ensemble du système que Moïse reçut et qui était accompagné de la gloire qui resplendissait sur sa face, comme d’un tout. Toute distinction qu’on voudrait faire entre les premières tables qui furent brisées, et les secondes que Moïse plaça dans l’arche, est entièrement futile. Ce fut lorsque Moïse descendit la seconde fois que sa face resplendissait et non pas la première. La première fois Israël ne reçut jamais les tables de pierre. En d’autres termes ce qui a pris fin, parce que c’était un ministère de mort, c’est ce qui fut placé dans l’arche. Que le lecteur consulte 2 Corinthiens 3.
Ce n’est pas là un fait de petite importance, car quoique l’apôtre se réfère nettement à la loi, cependant le ministère de la grâce ne lève pas la difficulté si l’homme est placé ensuite sous la loi. Dieu avait révélé la grâce (je ne dis pas la rédemption) lorsque Moïse monta pour la seconde fois, mais Il avait replacé Israël sous la loi parce que Moïse ne pouvait pas faire propitiation (voir Ex. 32, 32-33). Et c’est précisément cette dispensation par laquelle l’homme fut ainsi placé sous la loi après la révélation de la grâce, lorsque la loi était dans l’arche, que l’apôtre appelle une dispensation de condamnation et de mort. Car Israël fut ainsi seulement placé d’une manière précise sous la loi, accompagnée d’une miséricordieuse patience en grâce souveraine, avec la promesse de la vie comme résultat de l’obéissance, ou menace dans le cas contraire d’être effacé du livre de Dieu ; — cela était condamnation et mort. Israël ne reçut jamais les tables la première fois : elles n’entrèrent jamais dans le camp. Quand Israël fit le veau d’or, Dieu lui avait déjà parlé du milieu du feu, et la face de Moïse ne resplendissait nullement la première fois qu’il était descendu de la montagne. Si la loi intervient après que la grâce a été révélée et que le pardon a été provisoirement accordé, elle n’a pour effet que la mort et la condamnation. Quant à la manière d’obtenir la vie par la loi telle que l’a donnée Moïse, voici ce que l’apôtre déclare : « Car Moïse décrit ainsi la justice qui vient de la loi : l’homme qui aura pratiqué ces choses vivra par elles » (Rom. 10), c’est-à-dire que Moïse proposait la justice et la vie par la loi. De là, en Romains 7, l’apôtre, parlant d’après son expérience, déclare que « le commandement qui était donné pour la vie a été trouvé pour moi pour la mort ». Le lecteur peut consulter aussi Hébreux 7 déjà cité et Hébreux 8, où l’apôtre insiste sur l’abrogation du commandement qui a précédé, à cause de sa faiblesse et de son inutilité, et parce qu’il « n’a rien amené à la perfection ». De sorte que la première alliance, celle de Sinaï, car c’était une alliance, n’était pas sans défauts, et, en conséquence, il fallait qu’il en fût fait une nouvelle avec Israël. Aucun chrétien ne suppose qu’il est libre de tuer ou de voler : ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Mais s’abstient-il de ces actes parce qu’ils sont défendus par la loi ? Tout vrai chrétien, j’en suis persuadé, répondra, non ; quoiqu’il reconnaisse que la défense est parfaitement juste. Celui qui s’abstiendrait du meurtre, simplement parce qu’il est défendu dans la loi, ne serait pas du tout chrétien. J’ajouterai seulement que les apôtres ne se réfèrent point à la loi comme au grand modèle, et que tous les devoirs qu’ils prescrivent n’en sont pas des portions, car ils prescrivent des devoirs qui découlent de la grâce, et la grâce n’est point la loi. Il ne nous faut donc pas confondre la loi avec les devoirs envers Dieu et envers le prochain, présentés imparfaitement dans la loi et parfaitement présentés dans l’évangile, non plus qu’avec les devoirs que la connaissance de l’amour de Dieu en Christ a ajoutés aux autres, le devoir d’être imitateur de Dieu, en tant qu’Il s’est manifesté en grâce dans la personne de Christ. Le fait que j’étais sous la loi donnait au péché empire sur moi. La grâce de Dieu — est-ce là la loi ? — est apparue et m’enseigne à vivre sobrement, et justement, et pieusement. Mais c’est précisément la raison pourquoi je n’ai pas besoin de la loi, parce que je suis mieux enseigné par la grâce qui me donne la puissance aussi bien que la règle. Sous la grâce, nous sommes enseignés de Dieu à nous aimer les uns les autres dans la nature même et dans l’esprit que nous avons ; d’où il résulte que c’est en aimant mon prochain comme moi-même que j’accomplis la loi, et non pas en l’ayant. Je l’accomplis parce que l’amour est produit en moi par la grâce, et non parce que je suis sous la loi. Que d’un bout à l’autre la Parole écrite guide et dirige cette nouvelle nature dans les sentiers de l’obéissance, c’est une chose parfaitement et heureusement vraie. Que, après que je suis né de Dieu, ce que je ne suis pas en vertu de la loi, car une loi ne peut donner la vie, cette vie est formée, dirigée, instruite, prescrite même par toute parole qui sort de la bouche de Dieu, et tout particulièrement par les paroles de Christ, comme expression actuelle de cette vie dans sa perfection dans l’homme, c’est ce que je reconnais de tout mon cœur. Mais cela n’est point la loi ; et ce que j’y apprends, c’est que je suis ressuscité avec Christ et que je dois chercher les choses qui sont en haut où Christ est assis ; que je suis une épître de Christ empreinte dans mon cœur par l’Esprit du Dieu vivant, en contraste avec la loi gravée sur des tables de pierre.
Mais il est une autre portion de l’Écriture sur laquelle on s’appuie pour placer les chrétiens sous la loi ; je veux parler du discours sur la montagne, et en particulier du passage Matthieu 5, 17 ; mais je pense qu’on se méprend complètement sur ces paroles du Seigneur. Je ne crois pas que la loi ni son autorité soient détruites. Je crois que ceux qui ont péché étant sous la loi seront jugés par elle ; et par la suite elle sera écrite dans le cœur de Juda et d’Israël sous la nouvelle alliance de laquelle nous avons la substance dans l’Esprit, quoique non pas dans la lettre. Elle ne passera point jusqu’à ce qu’elle soit accomplie. Mais Christ en est la fin — le telos, l’achèvement, et le terme pour quiconque croit. Nous ne sommes point sous elle parce que nous sommes morts et ressuscités en Lui, et que la loi a de l’autorité sur l’homme aussi longtemps qu’il vit, qu’elle s’applique à l’homme dans la chair, et que nous ne sommes pas dans la chair, mais dans l’Esprit en Christ ressuscité. — « Si vous êtes morts avec Christ… pourquoi comme si vous étiez encore en vie dans le monde », etc., dit l’apôtre. Un homme dans la chair doit être sous la loi (ce qui est, à vrai dire, la mort et la malédiction parce que la chair est asservie au péché), ou sans loi, ce qui sûrement ne vaut pas mieux ; mais celui qui est en Christ n’est ni dans l’une ni dans l’autre de ces positions : il est conduit par l’Esprit dans l’obéissance de Christ. Mais il faut nous rappeler que le royaume des cieux n’était pas venu lorsque le discours sur la montagne fut prononcé. Il n’y est point touché à la rédemption. Le royaume des cieux était proche, et le Seigneur donne là le caractère de ceux qui y entreraient, sans parler en aucune manière de la révélation accordée à un chrétien en tant que dans l’Église. Le lecteur se convaincra, sur-le-champ, que ce n’est pas là une idée simplement de moi, s’il lit le verset qui suit le passage cité où le Seigneur fait l’application de ce qu’Il a dit : « Car je vous dis que si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux ». Le royaume allait être établi : il n’était ni pour les hommes sans loi ni pour les pharisiens, mais pour les pauvres en esprit et personnes semblables. Mais ce n’est point là la description de l’état et de la position de responsabilité de ceux qui sont morts et ressuscités en Christ. Ce n’est point le langage de l’évangile à un pécheur que de dire : « si votre justice ne surpasse, etc., vous n’entrerez pas », quoique cela demeure toujours vrai en principe. Alors c’était le résidu humble, pieux, converti, qui devait entrer ; non les injustes, ni les orgueilleux. Lorsque le royaume est établi, c’est la grâce souveraine qui est prêchée aux pécheurs. Il est certain néanmoins que celui qui entre réellement, aura une piété pratique du caractère qui est décrit ici, parce qu’il reçoit une nouvelle nature, et que les préceptes contenus dans ce discours lui seront appropriés et le dirigeront, parce qu’ils conviennent à Christ et sont Sa pensée ; mais non comme le plaçant sous la loi. Il suit de là que lorsqu’il est dit : « Je ne suis pas venu pour abolir, mais pour accomplir », c’est une déduction fausse que de faire signifier à ces paroles : Je suis venu pour appeler les chrétiens à l’accomplir. Les chrétiens sont associés avec Christ là où Il est maintenant. L’apôtre déclare que Christ est la fin de la loi en justice à tout croyant. La loi elle-même n’est point abrogée ; mais nous ne sommes pas sous elle. Elle est bonne si quelqu’un en use légitimement ; mais elle n’est point faite pour le juste, mais pour les gens sans piété et pour les profanes. Ce n’est pas pour les chrétiens sûrement. Elle est utile pour convaincre de péché, pour amener la mort et la condamnation sur le pécheur, pour faire abonder l’offense et rendre le péché excessivement pécheur. Christ est tout pour le croyant ; en même temps que toute parole de Dieu est bonne, bien appliquée.
J’ai parlé du chapitre 7 de l’épître aux Romains. L’apôtre met en contraste l’état du chrétien avec celui d’un homme sous la loi. Je suis charnel, vendu au péché, ne faisant pas une seule fois ce que je voudrais, faisant toujours ce que je hais. Dire « le vouloir est avec moi, mais je ne trouve pas le moyen d’accomplir le bien », n’appartient pas certainement à la position chrétienne. Et n’est-ce pas plutôt l’état chrétien que décrit l’apôtre quand il dit : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ Jésus m’a affranchi de la loi du péché et de la mort » ? Il compare l’une avec l’autre la position sous deux maris, la loi et Christ ; et il déclare qu’étant morts par le corps de Christ, nous sommes délivrés de la loi et ne sommes plus liés par elle. Le septième chapitre présente l’expérience, dans la pratique, de l’assujettissement au premier mari, quoique envisagée d’un point de vue plus haut, quand on en est dehors ; le huitième est l’expérience de quelqu’un qui est marié à celui qui est ressuscité d’entre les morts, afin de porter du fruit pour Dieu. Faites attention : je ne dis pas que la personne dont il s’agit dans le chapitre 7 n’est pas convertie ; mais que c’est quelqu’un qui a encore à dire : Qui me délivrera. Celle du chapitre 8 est une personne délivrée. En conséquence, l’Esprit n’est pas nommé dans le septième ; le huitième en est rempli.
J’arrive à quelques citations. Le passage 1 Corinthiens 9, 21 : Ennomos Christô, signifie « justement sous Christ ». — « Accomplissez la loi du Christ », Galates 6, 2, est un appel manifeste contre la loi. Les Galates voulaient avoir la loi après Christ, et l’apôtre ne voulait pas en entendre parler. Il sait à peine s’il doit les reconnaître comme chrétiens ; il ne veut pas en saluer un seul à la fin ou au commencement de sa lettre, et se montre plus sévère envers eux qu’à l’égard des Corinthiens avec toutes leurs abominations. Ils se mordaient, semble-t-il, et se dévoraient les uns les autres touchant cela. Et il leur dit : « Portez les charges les uns des autres ». Si vous avez besoin d’une loi, voilà celle de Christ ; voilà ce qu’Il faisait ; celle-là vous conviendra mieux. C’est-à-dire que loin de les ramener à la loi, il fait précisément le contraire. La même négligence de l’original a seule été cause qu’on a fait du péché la transgression de la loi. Le péché est anomia, l’iniquité, marche sans loi, et non parabasis nomou, transgression de la loi (1 Jean 3, 4). C’est certainement avoir de Christ une vue bien défectueuse que de ne voir dans Sa marche que l’accomplissement de la loi. La grâce de Dieu, et les obligations de l’homme comme telles, ne sont pas la même chose ; et même l’obéissance de Christ n’était pas limitée à l’accomplissement de la loi. La loi défendait le péché, mais elle ne pouvait commander au Fils de Dieu de se donner Lui-même pour les pécheurs. Toute cette manière de considérer la vie de Christ est, à ce qu’il me semble, extrêmement mesquine. Il est vrai qu’il y a du péché chez celui qui sait faire le bien et qui ne le fait pas. Mais dire que suivre Christ en laissant nos vies pour les frères c’est accomplir la loi morale, constitue une malheureuse confusion de termes qui n’a rien de scripturaire.
On alléguera que le psaume 119 parle de la loi d’une manière générale (et je désire peser toute l’Écriture, autant que j’en puis être capable, pour le bien de nos âmes et non argumenter simplement comme un controversiste) au point de vue de ce qu’on peut appeler la loi morale, et du plaisir que les saints y prennent. Ce terrain me paraît le plus solide que l’on puisse prendre. On peut aussi se référer au psaume 19. Or, je pense que ce que nous avons dans ces psaumes est beaucoup plus que la loi règle de conduite. Le psaume 19 présente toute l’efficace de la Parole de Dieu, comme moyen de conversion donnant la lumière aux simples. Il fait allusion, dans quelques passages, à la loi écrite dans le cœur, ce qui était le désir sincère de tout Israélite pieux ; on s’y confie dans les promesses, les menaces de la Parole de Dieu ; ses jugements y sont envisagés dans le monde, et on compte sur eux — la Parole, comme fournissant une réponse à l’opprobre des hommes. — Elle est considérée comme vivifiant l’âme. C’est la Parole de Dieu, l’objet de la confiance et le guide du saint en Israël, et non la règle de conduite d’un chrétien sauvé, que nous avons là. La pensée sur laquelle je voudrais insister est celle-ci : non pas que Dieu ne se sert pas maintenant de Sa Parole en vue de toute efficace dans l’âme, mais qu’Il ne l’emploie point comme loi. C’est une chose bien différente que de faire de la loi la règle de conduite. Ici la Parole de Dieu est désignée sous le nom de loi. Cela est manifeste si nous regardons au psaume 19. La loi de l’Éternel est parfaite, restaurant l’âme. Il est de toute évidence qu’il s’agit de la Parole de Dieu, selon qu’elle était connue alors, comme la loi dans un sens beaucoup plus large qu’une simple règle de conduite. Christ s’exprime de la même manière lorsqu’Il dit : « Il est écrit dans votre loi », quand le passage qu’Il cite se trouvait dans les prophètes. C’était la Parole de Dieu connue sous sa désignation principale et qui la caractérisait. Si quelqu’un objecte, en se plaignant, que je parle de la Parole dans sa forme et son caractère comme donnée alors à Israël (tout en admettant de la manière la plus complète, et même en insistant vivement là-dessus, l’inspiration et l’autorité divine de la Parole tout entière), je réponds sans hésiter que je la considère, en prenant garde d’être guidé par l’Esprit, comme appropriée à Israël, parce qu’elle a été donnée à Israël. Il faut que j’expose justement la parole de la vérité : et je crois qu’il est très important que nous l’envisagions de cette manière. Dois-je dire, « selon ta miséricorde, tue mes ennemis » — « Heureux celui qui saisira tes petits enfants, et qui les froissera contre les pierres » (Ps. 137, 9), « Afin que ton pied et la langue de tes chiens s’enfoncent dans le sang des ennemis, dans le sang de chacun d’eux » (Ps. 68, 23) ? Cela aura lieu quand le gouvernement terrestre de Dieu sera en cours d’exécution ; et moi, chrétien, j’en vois la justice, comme vérité générale, et, pour ce qui regarde ce gouvernement, je puis me réjouir de ce que la méchanceté a été ôtée après que la patience de Dieu a été pleinement manifestée, comme ce sera le cas. Cependant, ce n’est point là, et il n’est pas non plus considéré comme l’étant, le langage actuel du chrétien. Dans le psaume 69, Christ est présenté comme demandant la vengeance et le jugement le plus terrible contre Ses ennemis (v. 22-28). Exprima-t-Il jamais un désir semblable dans les évangiles où Il nous est révélé comme un modèle pour nous, conformément à la grâce ? Dans le temps même dont le psaume parle, Ses paroles furent : « Pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ». Est-ce là la demande que nous lisons dans le psaume : « Répands ton indignation sur eux, et que l’ardeur de ta colère les saisisse » ? Elles seront accomplies toutes deux. L’une est l’expression du miséricordieux désir personnel de Christ, tel que nous le connaissons comme révélé dans les évangiles : et c’est à ce désir que répond le Saint Esprit par ces paroles de Pierre : « Et maintenant, frères, je sais que vous l’avez fait par ignorance, de même que vos chefs aussi. Repentez-vous, et vous convertissez pour que vos péchés soient effacés : en sorte que viennent des temps de rafraîchissement de devant la présence du Seigneur, et qu’il envoie Jésus Christ ». Et cela sera certainement accompli à la fin des jours. L’autre demande est l’expression de l’association de Christ par l’esprit prophétique avec le résidu juif en rapport avec le gouvernement de Dieu, ce qui amènera une légitime et juste vengeance sur la nation qui L’a rejeté, et avec tous ceux qui se sont attachés et s’attacheront à la parole de Ses serviteurs. Cela aussi sera accompli pleinement, comme l’avant-goût en est déjà venu sur eux — la colère au dernier terme eis telos (1 Thess. 2, 16). Mais si nous confondons l’esprit juif des Psaumes avec l’évangile, et que nous le prenions comme l’expression de nos sentiments, nous fausserons le christianisme. Sans doute, nous y trouverons une délicieuse confiance dans l’Éternel sous le rapport de Son gouvernement de ce monde, la consolation du pardon, l’heureuse confiance d’un cœur intègre, et de remarquables prophéties au sujet de Christ ; mais où trouverons-nous les espérances célestes, l’union de l’Église avec un Christ glorifié, ou même les effets précieux découlant de la grâce divine, en tant que manifestée dans Sa personne sur la terre, ou les affections bénies qui jaillissent de cœurs qui en sont nourris ? Où trouver aussi le précieux esprit d’adoption ?
Il n’est pas de saint qui ne connaisse les touchantes expressions de la piété que nous fournissent les Psaumes ; mais nul chrétien intelligent ne peut passer des écrits de Jean aux Psaumes, sans se sentir dans une atmosphère différente. C’est une chose monstrueuse de supposer que, si les disciples en voyant Jésus étaient bénis comme aucun prophète, ou aucun roi ne l’avait été, et que néanmoins il leur était avantageux que Jésus s’en allât, parce que dans le cas contraire le Consolateur ne serait point venu, lorsque le Consolateur est venu Il ne nous aurait pas donné en fait de joie, de piété, d’intelligence, de motifs, de connaissance de Dieu, de connaissance du Père, et du Fils, de l’Esprit d’adoption, en fait de conscience d’être en Christ, et d’avoir Christ en nous, et de communion avec le Père et avec le Fils, ce que les saints de l’Ancien Testament ne possédaient pas. Aussi longtemps que l’héritier était en bas âge, il ne différait en rien d’un esclave, quoiqu’il fût seigneur de tout. C’est là, ainsi que l’apôtre a bien soin de l’enseigner, ce qui fait la différence de l’état des saints de l’Ancien Testament — Dieu ayant en vue quelque chose de meilleur pour nous afin qu’ils ne parvinssent pas à la perfection sans nous, de telle sorte que le plus petit dans le royaume des cieux serait plus grand que le plus grand de tous ceux qui sont nés de femmes avant. La vie et l’incorruptibilité ont été mises en lumière par l’évangile. Je ne trouve pas qu’il y ait de la piété ou du respect pour la Parole à nier ou à peu priser les dons révélés de Dieu que le Nouveau Testament déploie devant nous. N’est-ce rien que le Consolateur soit venu ? Dans quel endroit de l’Ancien Testament les saints sont-ils invités à se livrer eux-mêmes à Dieu, comme d’entre les morts étant faits vivants ? N’est-ce pas là une règle de conduite ? Et cela est-il la loi ? Le dire, n’est tout simplement qu’un abus des mots.
Je n’ai, en terminant, que quelques paroles à ajouter. Je suis parfaitement sûr qu’on dira, et on le dit en effet, que ce n’est pas juste de confondre la doctrine qui enseigne à chercher la justice et la vie par la loi, avec celle qui fait de la loi, la règle de la conduite ; mais toute cette théorie sur laquelle on base cette distinction n’est qu’une erreur et une déception. Qui nous a donné le droit de prendre la loi pour une chose et de la laisser pour une autre, lorsque Dieu l’a présentée spécialement pour une ? L’apôtre déclare que si nous avons à faire avec la loi, elle nous prend, elle nous place sous une malédiction, et amène sur nous la mort et la condamnation. Elle ne nous demande point comment nous la prenons. Elle prononce sa propre sentence sur nous. Est-elle transgressée ? Elle maudit. L’effet de la loi sur tous ceux qui sont placés sous elle, est la malédiction. Je ne trouve dans l’Écriture rien qui autorise à dire : Je ne me place pas sous la loi de cette manière. L’Écriture vous y place ainsi, si vous êtes sous elle. À la vérité, si la loi est venue, nous ne sommes plus naturellement sous le pédagogue ni sous sa malédiction. Quant à être sous la loi et ne pas être sous la malédiction lorsqu’on l’a enfreinte, c’est une imagination et une prétention des hommes qui n’a rien de scripturaire. Marchez dans l’Esprit et vous n’accomplirez pas les convoitises de la chair. Si vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes point sous la loi. Tel est le langage de la Parole de Dieu.
Mais avant de finir, j’ai à toucher un aspect encore plus heureux du sujet qui m’occupe : son côté positif. Quelle est la règle de la vie ? Je réponds, Christ. Christ est notre vie, notre règle, notre modèle, notre exemple, et notre tout ; l’Esprit, notre vivant principe de vie et notre puissance pour suivre Christ ; la Parole de Dieu, ce en quoi Il est révélé, et Sa pensée manifestée pleinement. Mais, tandis que toute l’Écriture justement exposée est notre lumière comme étant la Parole inspirée de Dieu, au moins pour ceux qui ont l’onction de la part du Saint, Christ et l’Esprit sont placés devant nous comme modèle, vie et guide, en contraste avec la loi, et Christ comme étant exclusivement toute chose. Et cela est accompagné d’efficace (2 Cor. 3) : « Nous sommes manifestés comme étant la lettre de Christ, dressée par notre ministère, écrite non avec de l’encre, mais par l’Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre mais sur les tables de chair du cœur… Mais, nous tous, contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, nous sommes transformés dans la même image de gloire en gloire, comme par le Seigneur en Esprit ». Je demande si Christ n’est pas mis là en contraste avec la loi, si ce n’est pas exactement ce que je dois être, une épître de Christ, et s’il n’y a pas puissance dans la contemplation de Christ pour produire ce qui ne peut être dans une loi. Il en est de même en Galates 2, 20 ; 5, 16, où, en contraste avec la loi, Paul fait voir que l’Esprit constitue la puissance de la piété ; que si nous sommes conduits par lui nous ne sommes pas sous la loi, et que, contre les fruits qu’Il produit, il n’existe pas de loi. Nous devons marcher par l’Esprit ; mais cela n’est point la loi. Pareillement en Romains 13 : « Mais revêtez le Seigneur Jésus Christ et ne prenez pas soin de la chair pour satisfaire à ses convoitises ». Ce qui est la vie et en même temps l’objet de la vie, c’est un objet qui a prise sur le cœur et le gouverne, un être à qui il nous a été promis d’être rendus conformes et à qui nous avons le plus ardent désir d’être aussi conformes que possible dès à présent — un être qui absorbe notre attention et la fixe, à l’exclusion de tout autre chose. Nous sommes prédestinés à être rendus conformes à l’image de Son Fils, afin qu’Il soit le premier-né entre plusieurs frères. Le plaisir que je prends en Lui est le ressort de mon activité, et le motif qui me gouverne. Je ne puis séparer la personne qui est mon modèle, et le motif qui me conduit. Mon amour pour la personne et la beauté que je vois en elle sont la source du plaisir que je prends à Lui ressembler.
Ce n’est pas une règle couchée par écrit, mais une vivante manifestation d’un Être qui étant ma vie doit être reproduit par moi : portant toujours en mon corps la mort du Seigneur Jésus, afin que la vie du Seigneur Jésus soit manifestée dans notre corps mortel. Sans doute c’est par le moyen de la Parole écrite que j’apprends à connaître ce qu’est Sa pensée, ce qu’est Sa volonté. Mais cela n’est pas une loi qui soit une règle, Christ n’étant qu’un exemple pour montrer comment on doit la suivre. C’est la Parole qui me fait voir quelle est la perfection de ce modèle qui gouverne le cœur. « Tel qu’est celui qui est poussière, tels aussi sont ceux qui sont tirés de la poussière ; et tel le céleste, tels aussi les célestes. Et comme nous avons porté l’image de celui qui est poussière, nous porterons aussi l’image du céleste ». — « Nous savons que lorsqu’il sera manifesté, nous lui serons semblables, car nous le verrons comme il est. Et quiconque a cette espérance en lui se purifie comme lui est pur ». Il est donc pour moi une source de tout ce en quoi j’ai un ardent désir de Lui ressembler. Contemplant à face découverte la gloire du Seigneur, je suis transformé dans la même image. Il n’y a pas de règle de conduite qui puisse faire cela. De Sa plénitude nous avons reçu grâce sur grâce : une règle de conduite n’a pas de plénitude à communiquer. C’est pourquoi Il dit : « Sanctifie-les par ta vérité ; ta parole est la vérité. Je me sanctifie moi-même pour eux afin qu’eux aussi soient sanctifiés par la vérité ». C’est l’Esprit qui, prenant les choses de Christ, nous forme ainsi à Sa ressemblance. Quelle vérité bénie est cela ! Comme toutes les affections du cœur sont par là engagées dans ce qui constitue la sainteté, lorsque je la vois dans Celui qui non seulement m’a aimé, mais qui est entièrement aimable ! De là vient que je suis appelé à « marcher d’une manière digne du Seigneur pour lui plaire à tous égards », « à croître en toutes choses jusqu’à Lui qui est le Chef ». Paul cherche à présenter tout homme parfait en Christ Jésus. Christ est tout, et Il est dans tous les saints comme vie pour réaliser tout ce qui se trouve en Lui.
De plus, je suis appelé par la gloire et par la vertu. L’objet que maintenant j’ai en vue, n’est pas sur la terre à présent : c’est Christ ressuscité ; et cela fait que ma conversation est dans le ciel. Aussi l’apôtre dit-il : « Si vous êtes ressuscités avec Christ, cherchez les choses qui sont en haut, où Christ est assis à la droite de Dieu. Pensez aux choses qui sont en haut, et non pas à celles qui sont sur la terre ». C’est en regardant à Christ en haut, que nous arrivons à Lui ressembler comme Il était sur la terre, et à marcher d’une manière digne de Lui, car Il a marché ainsi. Nous nous élevons au-dessus des motifs qui nous lieraient à la terre. Nous devons être remplis de la connaissance de Sa volonté en toute sagesse, et intelligence spirituelle pour marcher d’une manière digne du Seigneur. Une simple règle ne peut point donner cela. La loi n’a pas de rapport avec cette vie céleste. C’est ainsi que nous devons discerner ce qui est le plus excellent. Abraham lui-même dans la partie la meilleure de sa vie ne marcha point en vertu d’une règle. Il attendait la cité qui a des fondements, et était étranger et pèlerin dans le pays de la promesse. Réduisez-moi à une simple règle de conduite, et vous me faites perdre le ressort de l’activité. Le discernement d’un chrétien dépend de son état spirituel et moral, et Dieu entend qu’il en soit ainsi. Il ne veut pas être un simple directeur comme on dit. Il nous fait dépendre de la spiritualité, même pour savoir en quoi consiste Sa volonté. Ce n’est pas qu’il y ait des conseils de perfection, car le discernement de la vie extérieure fait de ce qu’elle discerne, à la fois un plaisir et un devoir ; et très vraisemblablement nous n’arriverons pas en haut à la perfection de Christ. Néanmoins voilà ce qui est placé devant nous comme but à poursuivre : la mesure de la stature de la plénitude du Christ, notre mesure, notre règle, notre force et notre secours en grâce ; l’objet de nos délices, et notre motif dans la marche, l’Être béni qui possède un droit absolu sur nos cœurs.
En relisant cet article, je vois qu’il y manque une pensée qui peut jeter plus de clarté sur un point. Il ne faut pas confondre l’obéissance avec la loi. L’obéissance de Christ était d’un caractère différent de l’obéissance légale. Si mon enfant désire quelque chose, comme d’aller quelque part, que je le lui défende, et qu’il obéisse aussitôt, je parle de la promptitude de son obéissance. Christ n’a jamais obéi de cette manière ; jamais Il n’a eu un désir réprimé par une loi imposée. Il n’a jamais été nécessaire de Lui dire : Tu ne le feras pas, quand Il voulait faire quelque chose. Il agissait parce que Son Père le voulait. C’était là Son motif, l’unique cause de Son activité. Il vivait de toute parole qui sortait de la bouche de Dieu : lorsqu’il n’y en avait pas, Il n’avait rien à faire. Ainsi la volonté de Dieu, quelle qu’elle fût, était Sa règle ; l’obéissance à la volonté souveraine n’est point l’obéissance à une loi limitée. Il peut ne pas y avoir pour nous de révélation de devoirs particuliers, mais de telles choses sont consignées dans l’Écriture, et la promptitude à faire la volonté de Dieu, quelle qu’elle soit, est une bonne chose ; et le discernement spirituel devient un commandement. Saint Paul ne devait pas aller en Mysie et en Bithynie. Il se servait aussi du chapitre 49 d’Ésaïe, et l’appelait un commandement quand il était appliqué. Il se peut que nous n’ayons aucune révélation comme il en eut, et que nous ayons beaucoup moins de discernement que lui ; mais la promptitude à faire toute volonté de Dieu est toujours un principe juste. Ensuite, il y a la production active de fruits pour Dieu qui caractérise le christianisme en contraste avec la loi. Les fruits de l’Esprit, la production de fruits et de beaucoup de fruits, Galates 5, 22, toutes choses qu’il est impossible de rapporter à la loi. Romains 7, Jean 15 ; de même Philippiens 1, 11 : « Étant remplis du fruit de la justice qui est par Jésus Christ, à la gloire et à la louange de Dieu ». Sûrement tout cela n’est point en vertu d’une règle de loi.
Je voudrais précisément me référer d’une manière plus précise à Galates 2. Voici le raisonnement de Paul : Si je rebâtis ces mêmes choses que j’ai renversées, je me constitue moi-même transgresseur pour les avoir renversées. Or, j’ai laissé la loi, poursuit l’apôtre, pour venir à Christ. Si je l’établis de nouveau, j’ai eu tort en la renversant ; mais Christ m’a conduit à le faire, et ainsi Il m’a conduit à ce qui est mal. Ainsi, en établissant de nouveau la loi, vous faites Christ ministre de péché. C’est la tentative d’établir de nouveau la loi après Christ, que l’apôtre a à combattre partout. Nous avons vu qu’il ne s’agissait pas seulement de la justification. On avait abandonné la loi parce qu’elle ne pouvait pas justifier, mais on l’avait laissée complètement ; et on était accusé d’antinomianisme. Là-dessus, l’apôtre répond non point en établissant de nouveau la loi sous une autre forme, mais en déclarant qu’il y a une nouvelle nature, une marche selon cette règle, Christ, en regardant à Lui, et en marchant comme Il a marché, et qu’il y a aussi l’Esprit en suivant lequel les chrétiens n’étaient point sous la loi, mais produisaient des fruits contre lesquels il n’y a pas de loi. Avec les âmes sincères qui sont sous la loi il est juste d’avoir de la patience. Dieu seul peut délivrer ; mais il est de toute importance pour la gloire de Christ, et même pour ceux qui sont sous la loi, que la vérité selon l’Écriture soit maintenue dans toute sa clarté.
- ↑ Extrêmes du bien et du mal. (NdE)
- ↑ Le lecteur qui connaît le grec verra que, dans une multitude d’exemples où l’expression « la » loi, semblerait se rapporter à la loi juive, l’apôtre parle de la loi comme d’un principe. De fait, ce n’est que dans le judaïsme que Dieu avait mis ce principe à l’épreuve, de sorte qu’au fond cela revient au même.