Traité:Avons-nous une révélation de la part de Dieu

De mipe
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J.N. Darby

Voici évidemment une question de toute importance : Avons-nous une révélation de la part de Dieu ; une communication de Ses pensées sur laquelle nous puissions nous appuyer avec sécurité ? Existe-t-il quelque chose de positif, qui soit connu avec certitude et qui me permette de dire : J’ai la vérité de Dieu ? Ai-je de la part de Dieu une révélation de Sa pensée, authentique et revêtue d’autorité, une révélation par laquelle Dieu Lui-même me dise ce qu’Il est ?

Je ne puis avoir de confiance en l’homme. L’homme qui n’a pas eu une telle révélation, est plongé dans la dégradation la plus complète et la plus profonde. Je ne puis me fier à l’Église ou aux docteurs. Église et docteurs ont leur histoire, et l’on sait ce qu’elle est. De nos jours, ils sont comme un roseau qui se brise en perçant la main qui s’y appuie. De quel côté donc me tourner pour trouver la vérité que je puisse aimer, sur laquelle je puisse me reposer et dont je puisse dire : Voilà ce que Dieu m’a donné et qui me vient de Lui-même ? Pour cela deux choses sont nécessaires : d’abord une révélation de la part de Dieu, car si tout homme est menteur, là sera la vérité. Ensuite il faut que cette révélation soit communiquée d’une manière authentique, afin que je puisse compter sur elle.

C’est un fait que, sans une révélation, les hommes n’ont connu ni Dieu, ni Son caractère.

Le paganisme universel, civilisé ou non, en est la preuve. Les hommes n’ont pas aimé garder la connaissance de Dieu, quand Il leur a été révélé. On ne saurait prétendre que le culte de Lingam et de Yoni, des chats, des singes et des fétiches, soit une vraie connaissance de Dieu. Toutes ces religions diverses prouvent que l’homme a besoin d’un Dieu, qu’il ne peut s’en passer ; mais, en même temps, elles sont la démonstration qu’il lui est impossible de trouver Dieu, ou qu’il ne veut pas Le recevoir.

Voici donc comment la question se présente : Je regarde autour de moi pour trouver Dieu et Sa vérité. Le paganisme ne peut me conduire à Lui ; il déifie les passions de l’homme et le pousse à la dernière dégradation. Je ne vois parmi les païens aucun homme qui ne soit dépourvu de sens moral.

On objectera peut-être Platon et ce qu’il dit de Dieu. Qu’enseigne-t-il donc en réalité ? Le communisme le plus grossier. Ce qu’il veut, c’est la communauté des femmes et de tout ; pour lui, hommes et femmes ne sont destinés qu’à procréer des citoyens pour la république. Le Dieu suprême, suivant lui, ne peut entrer en communication directe avec la créature ; c’est par l’intermédiaire des démons, ou médiatement peut-être par le Logos. Chose étrange à dire, Platon a été, avec les rabbins, l’inventeur du purgatoire, et la dernière forme de sa doctrine a donné naissance à l’arianisme.

Trouverai-je la vérité parmi les mahométans avec leur paradis de houris là-haut et le glaive ici-bas ? Le Coran, même pour l’observateur le plus superficiel, n’est qu’une misérable imposture, un amas de prétendues révélations inventées suivant l’occasion qui les faisait naître. Le Coran ou « l’épée » n’est pas une révélation de Dieu, si ce n’est comme plaie judiciaire infligée à la chrétienté.

Les Juifs ne peuvent me parler de Dieu, rejetés de Lui comme ils le sont, suivant leurs propres Écritures. Apprendrai-je à Le connaître chez les jésuites, dont les intrigues troublent toutes les nations sous le ciel ? Sera-ce auprès du pape, dont l’infaillibilité n’est crue que par ses partisans les plus grossièrement ignorants, et à laquelle l’histoire donne le démenti le plus éclatant ? Irai-je me prosterner devant les idoles d’or qui représentent la mère de Dieu, comme l’on dit, et qui sont érigées en public partout où il y a possibilité de le faire ? Est-ce là que mon âme trouvera son lieu de repos ?

Me tournerai-je vers les protestants ? Mais le plus grand nombre de leurs docteurs, sur la plupart des points, ne suivent que leur raison. Du puseyisme au libéralisme, j’ai le choix, parmi eux, entre les opinions et les hérésies sans nombre qui se contredisent et se détruisent l’une l’autre. Me dira-t-on qu’il y a un accord réel entre les diverses professions de foi évangéliques des grands corps protestants ? Je ne l’admets pas entièrement ; Luther ne le pensait pas. Elles s’accordent presque toutes sur un point : la régénération baptismale. Mais quand je demande si les docteurs croient aux formulaires qu’ils signent, il n’y en a pas un ; ce sont pour eux des choses surannées.

Que dois-je faire ? Dire avec Pilate : Qu’est-ce que la vérité ? puis me laver les mains en désespoir de cause et abandonner Christ à Ses ennemis ? Non ; nous avons la Parole de Dieu sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

Ah ! enfin j’ai trouvé quelque chose : Dieu révélé d’une manière digne de Lui ! Mais voici le coup le plus cruel ; — ce n’est pas, me dit-on, la Parole de Dieu. C’est une compilation de diverses traditions et documents faite quelque sept ou huit siècles après le temps où elle prétend avoir été écrite ; documents et traditions tirés Dieu sait d’où (mais ne venant pas de Lui), et composés Dieu sait par qui. Ce livre, affirme-t-on, se compose en partie d’une loi mise au jour sept ou huit cents ans après l’époque où l’on dit qu’elle fut écrite, quelques-uns de ses documents étant reconnus comme existant peut-être déjà à cette date ; en partie de prétendues prophéties rassemblées par quelque compilateur et mises fréquemment sous le nom de quelqu’un auquel elles n’appartiennent pas. Un long conflit, dit-on, a subsisté entre l’élément moral et l’élément cérémoniel ou sacerdotal, mais le premier a triomphé au temps d’Esdras, et seulement alors, bien que, selon ce qu’on affirme, les Israélites n’eussent jamais eu la loi telle qu’elle est, avant le règne de Josias. Et cependant, chose étrange à dire, le parti qui remporte la victoire ne s’en sert que pour fixer la nation dans le cérémonialisme et sous l’autorité d’une tradition sacerdotale, comme elle ne l’avait jamais été auparavant ! De plus, outre les deux principaux documents d’après lesquels l’histoire des premiers temps aurait été compilée, et les autres fragments qui y auraient été adaptés par le compilateur, on prétend avoir découvert un autre auteur dont les écrits s’entremêlent avec ceux des deux principaux, et dont l’objet est de relever l’importance des ancêtres de l’Israël du nord. Les prophètes, ajoute-t-on, prétendent bien à une vue intuitive venant de Dieu ; mais leur grand objet n’était pas les événements à venir.

Telles sont les Écritures, si nous en croyons ces savants. Elles ne sont pas la Parole de Dieu, mais une compilation incertaine, fruit des progrès de l’histoire d’Israël ; provenant en partie des sacrificateurs, sous lesquels la loi parvint à sa maturité, sans être jamais complète jusqu’à Esdras ; en partie des prophètes luttant contre les principes sacerdotaux (non pas, remarquez-le, contre leurs péchés envers Dieu, ou contre leurs infractions à la loi qui alors n’était pas encore formulée) ; en partie enfin de la vie laïque au sein du peuple. Tels sont les facteurs (c’est l’expression consacrée) de l’Ancien Testament. Quant au Nouveau, on consent à admettre que quatre épîtres soient de Paul ; elles sont, dit-on, l’expression la plus élevée de la vie spirituelle chez le chrétien ; le reste est falsifié ou douteux, et en grande partie une tentative comparativement moderne, ayant pour but de concilier les factions de Paul et de Pierre dans l’Église, ou bien un fruit tardif de la philosophie et des rêveries alexandrines, ou du symbolisme juif.

Il ne faut pas s’étonner qu’une très grande partie du clergé protestant en France ait déclaré ne vouloir rien signer, ni le symbole des apôtres, ni aucune confession de foi, admettant bien, sans doute, qu’il faut croire quelque chose, mais ne sachant pas encore quoi ; tandis que les pauvres laïques, moins savants, mais plus simples, s’écrient : « Pourtant, si nous sommes des chrétiens, il nous faut un Christ quelconque ». Voilà où nous a conduits ce que l’on nomme l’Église. Il n’y a pas maintenant « des cérémonies et des traditions sacerdotales combattues et corrigées par des prophètes prétendant à une intuition divine », mais nous voyons des cérémonies et des traditions sacerdotales et ecclésiastiques, qui apportent à l’âme le dégoût et l’ennui, quand elles ne la poussent pas à chercher dans le papisme un lieu de refuge ; ou bien qui aboutissent à une incrédulité froide et sans profondeur, se nourrissant de spéculations revêtues d’une fausse apparence historique, sans que ceux qui s’y livrent aient jamais pénétré au-dessous de la surface et saisi le moins du monde, d’une manière spirituelle, la substance de ce qui est à leur porte et devant leur cœur. Ces raisonnements, ces théories et hypothèses, qui se succèdent sans cesse et se remplacent les unes les autres, peuvent faire grand bruit et produire un certain effet, mais ceux qui les inventent et les soutiennent ne sont pas enseignés de Dieu. À un dogmatisme sans vie, ils n’ont pas substitué un système fondé sur la certitude, mais l’ont changé en une incrédulité et un scepticisme spéculatifs.

Où est donc la Parole de Dieu ? Là où elle a toujours été, comme la lumière dans le soleil. L’homme a pu observer dans cet astre des taches et des focules, ou espaces plus lumineux que le reste du disque ; on découvrira, peut-être, que les taches ont un rapport quelconque avec les aurores boréales et les perturbations magnétiques, mais ceux qui ont des yeux marchent, comme ils l’ont toujours fait, à cette pleine et brillante lumière du jour que Dieu nous a donnée. La Parole de Dieu brille aussi comme toujours, et l’entrée de cette Parole illumine et donne de l’intelligence aux simples. Ceux-là ont une nature qui peut estimer, dans la Parole de Dieu, le vrai caractère qu’Il lui a donné, nature que ces savants n’ont pas, car Il a caché ces choses aux sages et aux intelligents et les a révélées aux petits enfants. « Ils seront tous enseignés de Dieu », telle est la déclaration du Seigneur et du prophète pour ceux qui sont capables d’entendre.

Personne ne peut contester que le recueil des écritures de l’Ancien Testament n’existât sous la forme qu’il a actuellement, un certain temps avant que le Seigneur fût sur la terre. En effet, Christ reconnaît la division qui existe maintenant. Ce travail de collection a été attribué au grand sanhédrin ou à Esdras, mais, quoi qu’il en soit, le recueil a été formé. L’historien Josèphe est très explicite sur ce point. Il n’y a pas chez nous, dit-il, une multitude de livres ; nous n’en avons que vingt-deux[2]. Il ajoute qu’il y a eu des histoires et des écrits composés depuis le temps d’Artaxerxès, mais qu’ils n’avaient pas la même autorité, parce qu’il n’y avait point alors de prophètes. Nous pouvons rendre grâces à Dieu de ce que le recueil des Écritures a été formé. Que l’histoire de Ruth ait été réunie au livre des Juges ou les Lamentations à Jérémie, ou bien que ces deux livres aient été ensuite relégués parmi les Kétubim, ou écrits non prophétiques, cela n’a aucune importance. Leur place dans l’histoire est claire pour tout lecteur même superficiel. Pour le croyant, il n’importe pas de savoir qui a écrit Ruth. Il reçoit tous ces livres comme la Parole de Dieu ; c’est Dieu qui en est l’auteur. C’est, comme l’exprime Matthieu : « ce que le Seigneur a dit par le prophète ». Il est vrai aussi qu’en rassemblant ces livres, on peut y avoir ajouté de courtes notes, telles que : « Elles sont là jusqu’à ce jour » (Jos. 4, 9), ou autres semblables. Il y en a, et elles ont leur intérêt dans une histoire donnée de Dieu, mais elles n’affectent en rien la révélation. Le livre montre clairement que, comme ensemble, il est inspiré et ordonné dans sa structure par Dieu Lui-même, et quand les diverses parties en ont été réunies pour faire cet ensemble, l’ordre divin établi par la main et la sagesse de Dieu peut se trouver aussi bien dans ces notes que partout ailleurs. La question est celle-ci : Ce livre nous est-il donné de Dieu, comme une révélation ? A-t-il été donné tel que nous l’avons maintenant ? Ce qu’il contient est-il révélé de Dieu, ou bien sont-ce les pensées de l’homme ?

La Bible professe nous donner le récit de toutes les voies de Dieu depuis la création (et même, en conseil, dès avant la création), jusqu’à ce que le Seigneur vienne ; oui, jusqu’à la fin des temps, lorsque Dieu pourra dire : « C’est fait. Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le commencement et la fin » (Apoc. 21, 6). Il professe de plus nous donner une révélation du Père dans le Fils. Une entreprise aussi immense est-elle une révélation de Dieu, ou bien ne serait-ce que le résultat du développement de la vie nationale chez un petit peuple insignifiant, ainsi que le prétendent ces critiques qui ne savent pas y voir davantage ? « Personne ne vit jamais Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l’a fait connaître ». Cela est-il une révélation de Dieu ou non ? C’est-à-dire les écrits qui me le rapportent, sont-ils de Dieu, et les possédé-je tels que Dieu nous les a donnés ? Car autrement ce n’est une révélation ni pour moi, ni pour personne.

Ce sont là des questions sérieuses. L’entreprise elle-même démontre quel est son auteur. Si elle venait de l’homme, qu’aurions-nous ? Pour répondre, nous n’avons qu’à considérer ce qui existe en dehors de ce livre merveilleux. Et cependant, d’après les théories dont j’ai parlé, il n’est qu’une imposture, car quel autre nom donner à des récits composés des centaines d’années après la date qu’on leur assigne, comme s’ils avaient été écrits par inspiration à cette date ? Et cela viendrait de cette nation même qui était constamment emportée dans le courant de l’idolâtrie et que ces livres condamnent ! De plus (combien la race de ces savants n’est-elle pas crédule !), ceux que l’on prétend avoir forgé ces livres auraient persuadé au peuple juif que la loi qui le condamnait, il l’avait toujours eue comme loi venant de Dieu Lui-même, tandis que, s’il faut en croire nos modernes docteurs, et leurs allégations relatives à Josias[3], les Israélites n’auraient jamais eu la loi avant cette époque. C’était, suivant eux, une chose toute nouvelle, ou tout au plus arrangée pour l’occasion, d’après quelques vieilles traditions tirées de divers antiques documents. Remarquez ensuite, car il faut bien le dire, que Christ et Ses apôtres, envoyés de Dieu, confirmaient volontairement cette supercherie ou trompaient à dessein le peuple et tous ceux qu’ils enseignaient. Enfin, par-dessus tout, est-il croyable qu’une imposture soit la plus sainte production qui ait jamais apparu dans le monde, portant, pour tous ceux qui ont quelque sens moral, une empreinte divine que nul autre écrit ne possède ? Comme le dit Rousseau, inventer une vie telle que celle de Christ serait un plus grand miracle que d’être Christ.

Je toucherai à quelques-unes des raisons que l’on allègue pour établir ces théories, mais d’abord je m’occuperai du livre lui-même. En tout premier lieu, il faut remarquer que Christ et Ses apôtres le regardent comme formant un tout, ayant un caractère bien connu et qui lui est propre. « L’Écriture ne peut être anéantie » (Jean 10, 35). « Il leur ouvrit l’intelligence pour entendre les Écritures » (Luc 24, 45). « Sondez les Écritures » (Jean 5, 39). C’était donc un recueil, dont l’autorité était reconnue, et du Seigneur Lui-même et de ceux auxquels Il s’adressait. Et, pour parler avec plus de précision encore, Il le reconnaissait tel que nous l’avons maintenant, et tel que les Juifs l’avaient alors. « Il fallait, dit-il, que toutes les choses qui sont écrites de moi dans la loi de Moïse, et dans les prophètes, et dans les psaumes, fussent accomplies » (Luc 24, 44). Ici nous avons la Torah (la loi), les Nebaim (les prophètes), les Kétubim (les hagiographes) — ces trois divisions distinguées par les Juifs.

Christ reconnaissait donc ce que nous nommons l’Ancien Testament, tel que nous l’avons et tel que les Juifs le possèdent aussi. Mais Il va plus loin, Il le reconnaît dans son caractère actuel et dans ses auteurs. « Moïse ne vous a-t-il pas donné la loi ? Et nul d’entre vous n’observe la loi » (Jean 7, 19). « C’est pourquoi Moïse vous a donné la circoncision (non qu’elle soit de Moïse, mais elle est des pères) » (v. 22). « Il y en a un qui vous accuse, Moïse en qui vous espérez. Car si vous croyiez Moïse, vous me croiriez aussi ; car lui a écrit de moi. Mais si vous ne croyez pas ses écrits, comment croirez-vous mes paroles ? » (Jean 5, 45-47). Et encore : « Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les prophètes ; qu’ils les écoutent. Mais il dit : Non, père Abraham ; mais si quelqu’un va des morts vers eux, ils se repentiront. Et il lui dit : S’ils n’écoutent pas Moïse et les prophètes, ils ne seront pas persuadés non plus si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts » (Luc 16, 29-31). Combien cela a été vrai des pauvres Juifs et combien ce l’est aussi des malheureux incrédules ! Le christianisme et la résurrection du Seigneur ne servent de rien si l’on ne croit pas Moïse et les prophètes, c’est-à-dire leurs écrits, car les Juifs les avaient certainement. « Lui a écrit de moi. Mais si vous ne croyez pas ses écrits, comment croirez-vous mes paroles ? » (Jean 5, 46, 47).

Et remarquez encore ici que tout ce dont on fait aujourd’hui une difficulté : la version des Septante, les additions du « compilateur »[4], tout cela existait alors. C’était la même collection, telle que nous l’avons, dont Christ reconnaît l’autorité, sur laquelle Il insiste, et qui pour Lui sont les écrits de Moïse.

Mais de plus, après Sa résurrection, non plus lorsqu’Il avait affaire avec les Juifs qui reconnaissaient ces Écritures, mais parlant de Lui-même à Ses disciples, le Seigneur, « commençant par Moïse et par tous les prophètes, leur expliquait, dans toutes les Écritures, les choses qui le regardent » (Luc 24, 27). Pouvez-vous vous représenter le Christ ressuscité expliquant à Ses disciples une collection de vieux documents mal compilés et contradictoires, que l’on prétendait à faux être Moïse et les prophètes ? Ce n’est pas tout. On dira peut-être (car jusqu’où la folie de l’incrédulité savante ne va-t-elle point ?) qu’Il ne leur expliquait que les choses qui Le concernaient. « Ce sont ici, dit-il, les paroles que je vous disais quand j’étais encore avec vous, qu’il fallait que toutes les choses qui sont écrites de moi dans la loi de Moïse, et dans les prophètes, et dans les psaumes, fussent accomplies. Alors il leur ouvrit l’intelligence pour entendre les Écritures. Et il leur dit : Il est ainsi écrit » (Luc 24, 44-46). Ah ! la Parole écrite, voilà ce à quoi Il attachait de la valeur. Est-il possible de s’imaginer le Seigneur ressuscité, ouvrant avec une puissance divine l’esprit des disciples, afin qu’ils comprissent une compilation faussement attribuée à Moïse et à d’autres ! Qu’Il ouvre l’esprit afin que nous puissions comprendre la Parole divine, on le conçoit aisément, et, si nous sommes enseignés de Dieu, nous savons combien cela nous est nécessaire ; mais le faire pour une imposture, pour des écrits qui prétendent être ce qu’ils ne sont pas, c’est ce qui ne peut être admis que par un rationalisme qui se nourrit de vaines spéculations. Mais « l’inique ne connaît pas la honte » (Soph. 3, 5).

Comme nous l’avons vu, le Seigneur reconnaît les prophètes ; bien plus, Il nomme spécialement celui qui, de tous, est le plus mis en question : Daniel. « L’abomination de la désolation, dont il a été parlé par Daniel le prophète » (Matt. 24, 15). Ces mots sont contestés dans Marc, mais non pas dans Matthieu, et la variante de Marc confirme l’authenticité du texte de Matthieu. En outre, le Seigneur affirme que les commandements donnés par Moïse ont été prononcés par Dieu : « Car Dieu a commandé, disant : Honore ton père et ta mère » (Matt. 15, 4). Il cite aussi Ésaïe : « Ésaïe a bien prophétisé de vous, disant : Ce peuple m’honore des lèvres » (v. 7). Ces paroles se trouvent dans la première partie de la prophétie, mais le Seigneur cite aussi la seconde partie, celle du « grand innommé », comme disent ces critiques[5]. « On lui donna le livre du prophète Ésaïe ; et ayant déployé le livre, il trouva le passage où il est écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi… Et il se mit à leur dire : Aujourd’hui cette écriture est accomplie, vous l’entendant ». Il accepte ce livre comme étant Ésaïe, et affirme, ce qui est de beaucoup plus grande importance, ce qui, en réalité, est seul important, que ce livre est de Dieu Lui-même (Luc 4, 17-21). Dans le même chapitre, nous voyons le Seigneur reconnaître comme authentique le livre des Rois et l’histoire d’Élie et d’Élisée. Plus loin, Il met de nouveau directement Son sceau sur l’authenticité de la dernière partie d’Ésaïe, en citant la prophétie relative à Jean le baptiseur (Luc 7, 27 ; És. 40, 3). J’ai à peine besoin d’appeler l’attention sur d’autres passages.

Les discours, la vie et tout ce qui était l’expression de l’âme du Seigneur, va nécessairement bien au-delà de ces écritures, et montre que ce qui appartenait à l’ancienne alliance devait être mis de côté pour l’accomplissement de conseils infiniment plus glorieux : Lui-même nous dit que la loi et les prophètes ont été jusqu’à Jean, et que, dès lors, le royaume de Dieu était annoncé ; mais, en lisant les évangiles avec simplicité, on trouvera que tous les discours et la vie entière de Jésus sont imprégnés de la vérité que présentent la loi et les prophètes, comme nous les avons dans les Bibles ordinaires, rendant ainsi témoignage à leur authenticité, tels qu’ils sont actuellement, tellement qu’il faudrait en arracher toute la révélation de Christ pour ébranler l’autorité de la loi et des prophètes. Il n’était pas venu, dit-Il, pour les abolir, mais pour les accomplir. Pour accomplir quoi ? Une misérable compilation du temps d’Esdras, ou des documents fragmentaires réunis par un homme et ayant acquis graduellement l’autorité d’une loi inconnue au commencement ? Ou bien est-ce pour accomplir la Parole de Dieu, donnée par inspiration à Moïse et à ceux que Jéhovah avait envoyés ? Jésus naquit à Bethléhem, parce que, par la volonté de Dieu, le prophète l’avait ainsi annoncé. Il est mort, parce que sans cela, comment auraient été accomplies les Écritures qui disent qu’il en devait être ainsi ? Jusqu’à ce que le ciel et la terre passent, un seul iota ou un seul trait de lettre ne passera point de la loi que tout ne soit accompli.

Examinons maintenant ce que disent les serviteurs de Christ après qu’Il eut été rejeté, je veux dire les apôtres et les écrivains du Nouveau Testament. Les apôtres, ceux qui avaient été revêtus d’autorité et envoyés par Lui pour annoncer la vérité chrétienne, et qui, pour ce service, étaient inspirés par le Saint Esprit, les apôtres et les autres écrivains inspirés du Nouveau Testament affirment, ou, ce qui dans un certain sens est plus fort, supposent partout que l’Ancien Testament — tel que nous l’avons, en commun avec les Juifs, ennemis du christianisme, mais, en cela, témoins avec lui — est un livre inspiré, écrit par ceux auxquels il est attribué, et donné de Dieu.

Je prendrai d’abord les grandes épîtres de Paul, comme on les nomme, celles que l’un des principaux chefs du rationalisme moderne admet comme le sûr fondement du christianisme historique, et je commencerai par l’épître aux Romains, quoique, dans l’ordre chronologique, elle soit la dernière des quatre. L’apôtre Paul, comme il nous le dit lui-même, avait été mis à part pour l’évangile de Dieu, lequel Il avait auparavant promis par Ses prophètes dans de saintes Écritures, touchant Son Fils, Jésus Christ notre Seigneur, né de la semence de David selon la chair (Rom. 1). Ici, de saintes Écritures, de saints écrits sont reconnus ; les prophètes sont des prophètes de Dieu, et tout le système annoncé par eux relativement à la promesse faite à la semence de David, et qui se déroule à travers les écrits prophétiques et les Psaumes, depuis Samuel, et dans tous les prophètes, ce système entier, dis-je, est pleinement et clairement admis. Paul fonde sur ces écrits son propre enseignement, en ajoutant nécessairement le fait de la résurrection. « Quel est donc l’avantage du Juif ? » demande Paul. « Grand de toute manière », répond-il. Et en quoi principalement ? — « D’abord en ce que les oracles de Dieu leur ont été confiés ». Tels étaient ces saints écrits. La bénédiction spéciale des Juifs, c’est qu’ils possédaient les oracles de Dieu. — Pauvre Paul ! être ignorant à ce point ; c’est qu’il n’avait pas, comme je l’ai entendu dire à quelques-uns, « les lumières de la science moderne ». Mais quelle était la portée de cette déclaration relative aux Juifs ? C’est que l’incrédulité de l’homme ne peut pas anéantir la fidélité de Dieu. Ces oracles étaient si entièrement de Lui, que Sa fidélité se trouvait engagée dans leur accomplissement. Ensuite, Paul montre que Juifs et Gentils sont tous sous le péché. Comment le fait-il ? « Il est écrit » lisons-nous (3, 10). Les Psaumes et Ésaïe sont cités pour prouver cette assertion, et, quand au dernier, le passage est tiré précisément de la partie qu’on nie être de ce prophète, pour l’attribuer au « grand innommé » (És. 59). Il peut sembler fastidieux de citer tant de textes ; je le fais pour montrer qu’il ne s’agit pas simplement d’une citation destinée à soutenir une thèse, mais que les apôtres vivaient dans ce que les rationalistes modernes nient être la Parole inspirée de Dieu, et qu’ils en faisaient la base de leur enseignement.

« Que dit l’Écriture ? » (Rom. 4). « Et Abraham crut Dieu, et cela lui fut compté à justice ». Ici, la Genèse est reconnue comme étant l’Écriture, la Parole de Dieu. Ensuite, Paul montre David exprimant la béatitude de l’homme à qui Dieu compte la justice sans les œuvres, et ainsi il reconnaît l’authenticité des Psaumes. Au verset 17, c’est de nouveau la Genèse qui est citée avec les mots « il est écrit ». Prenons le chapitre 5, depuis le verset 13 : « Jusqu’à la loi le péché était dans le monde… mais la mort régna depuis Adam jusqu’à Moïse », c’est-à-dire jusqu’à la loi. Nous voyons donc ici toute l’histoire de la Genèse, relative à la chute d’Adam, placé sous une loi (celle qui lui défendait de manger du fruit de l’arbre), puis le temps qui s’écoula jusqu’à Moïse, durant lequel il n’y avait pas de loi exprimée, mais où la mort a régné par le péché d’Adam ; ensuite, la loi donnée par Moïse changeant le terrain sur lequel l’homme se trouvait, non quant au péché et à la mort, mais quant à la transgression, alors qu’il y eut une loi formelle (cela eut donc lieu dans les deux cas d’Adam et de Moïse) ; nous voyons, dis-je, toute cette histoire envisagée non pas comme une compilation de documents élohistiques et jéhovistiques, mais comme l’exposé fait par Dieu même de l’état moral tout entier de l’homme devant Lui, jusqu’à ce que la grâce eut été rejetée ; grâce annoncée en effet dans l’évangile, et qui, maintenant, enseignée par l’apôtre, dans cette épître, répond effectivement aux besoins de l’homme. Quelque précieux qu’il soit, je n’ai pas à m’occuper ici de ce sujet.

Je passe par-dessus quelques passages qui confirment cet emploi de l’Ancien Testament, et je m’arrêterai un moment sur le chapitre 9. Paul y déclare combien les Israélites lui sont chers, comme ayant la loi et les promesses, et même Christ selon la chair. Mais où voit-on qu’il en est ainsi, tandis qu’ils sont un peuple rejeté ? « Ce n’est pas cependant comme si la parole de Dieu avait été sans effet », dit Paul ; et il cite toute l’histoire de la Genèse, montrant ainsi que pour lui elle est la Parole de Dieu ; puis il cite l’Exode, premièrement en déclarant que Dieu parla à Moïse, et ensuite dans ce qui se rapporte à Pharaon. Dans ce dernier cas, Paul emploie ces paroles : « L’Écriture dit au Pharaon : C’est pour cela même que je t’ai suscité » ; pour Paul, ce que disait l’Écriture était ce que Dieu prononçait. Plus loin, c’est Dieu qui parle en Osée : « Il dit en Osée ». Puis c’est Ésaïe, dont il emprunte les paroles, qui ont pour lui la même autorité que celles que Dieu prononce en Osée. Partout nous trouvons cette même autorité attribuée à l’Écriture. Si Paul parle de la loi (chap. 10), c’est Moïse qui « décrit la justice qui vient de la loi » ; et remarquez que les paroles citées sont tirées du Deutéronome, que l’apôtre regarde donc comme écrit par Moïse. Pour nos critiques modernes, au contraire, ce livre est la loi deutéronomique, reconnue pour la première fois par Jérémie, au temps de Josias ; peut-être même, si l’on en croit d’autres, provient-elle de la dernière main de toutes celles qui ont écrit ce recueil. Pour l’apôtre Paul, le Deutéronome était de Moïse, de même que le « grand innommé », qu’il cite plus loin, était aussi pour lui Ésaïe même. « Car Ésaïe dit : Seigneur, qui est-ce qui a cru à ce qu’il a entendu de nous ? » (Rom. 10, 16 ; És. 53, 1). Puis il revient encore au Deutéronome (v. 19) et à la seconde partie d’Ésaïe (v. 20), qu’il nomme de nouveau. Au chapitre 11, c’est le livre des Rois dont Paul reconnaît l’authenticité. « Dieu n’a point rejeté son peuple », dit-il. Comment saurai-je que c’est bien la pensée de Dieu ? « Ne savez-vous pas », répond l’apôtre, « ce que l’Écriture dit dans l’histoire d’Élie ?… Mais que lui dit la réponse divine ? ». Je puis donc compter sur l’Écriture comme me donnant la pensée et le dessein de Dieu. Si Israël a été aveuglé pour un temps (11, 8), c’est, dit Paul, « selon qu’il est écrit », et il cite Ésaïe 29. Puis il ajoute : « Et David dit » ; les Psaumes étaient donc un vrai témoignage de Dieu relativement aux choses qui allaient arriver. Au chapitre 15, le Deutéronome est encore cité comme la Parole de Dieu, avec la formule : « Il dit » ; il en est de même des Psaumes et d’Ésaïe.

Les citations sont moins nombreuses dans les épîtres aux Corinthiens, qui traitent les questions de détail relatives à la marche de l’Église, mais l’Ancien Testament y est aussi tenu pour un livre divin. La loi est la loi de Moïse (9, 9), et ce qui y est dit exprime la pensée de Dieu : « Dieu s’occupe-t-il des bœufs ? ». Ce que Moïse enseignait était de Dieu. L’histoire rapportée dans l’Exode et celle du désert, sont le récit que Dieu donne de Ses voies envers Son peuple pour servir à notre instruction (1 Cor. 10, 1-14). Au chapitre suivant, verset 9, la création d’Adam et d’Ève (Gen. 2) est rappelée comme un récit divin, propre à servir de base à des devoirs moraux. Le chapitre 15, 54, 55 emploie les paroles d’Ésaïe et celles d’un autre prophète, en rapport avec la résurrection. En 2 Corinthiens 3, le fait de Moïse voilant sa face est tiré de l’Exode, pour montrer le vrai caractère de la loi et l’état d’Israël.

Nous trouvons la même chose dans l’épître aux Galates. Prenez le chapitre 3 ; l’apôtre en appelle au Pentateuque, comme à un témoignage sûr et certain pour la foi, et l’Écriture est présentée comme la Parole même de Dieu. « L’Écriture, prévoyant que Dieu justifierait les nations sur le principe de la foi, a d’avance annoncé la bonne nouvelle à Abraham : En toi toutes les nations seront bénies ». L’Écriture a parlé ; rien ne peut être plus fort pour l’apôtre inspiré. Et ce n’est pas tout. Ce qu’enseigne la Genèse, ainsi que les promesses qui y sont faites et confirmées (Gen. 12 et 22), puis l’histoire de ce qui s’est passé au mont Sinaï, toutes ces choses sont prises dans leur ordre chronologique comme la base des voies de Dieu. Une promesse faite sans conditions ne peut être annulée ni modifiée par aucune addition, telle que la loi, donnée quatre cent trente ans plus tard. Après avoir posé ce principe, Paul fait voir que tout ce qui a été dit à ce sujet a été accompli en Christ au temps convenable. La place que la loi tient dans les voies de Dieu et les diverses époques de ces voies, sont prises par l’apôtre pour base de son argumentation et du vrai caractère du christianisme. La promesse fut donnée de Dieu, et Christ en est l’accomplissement ; la loi vint entre deux, quatre cent trente ans après la promesse, et fut ajoutée à cause des transgressions, jusqu’à ce que fût venue la semence à qui la promesse avait été faite. Ce qui pour un rationaliste n’est qu’une compilation incertaine de fragments sans authenticité, et un résultat du développement de la vie nationale chez les Hébreux, est pour l’apôtre inspiré la révélation régulière et méthodique des voies de Dieu, telle que nous l’avons actuellement dans nos Bibles ; c’est la propre révélation que Dieu donne Lui-même historiquement de Ses voies, de manière à en former la base, sur laquelle repose le vrai caractère du christianisme qui était en question chez les Galates. Paul considère aussi les récits relatifs à Agar et Sara, comme un sûr fondement pour appuyer son argumentation. Il n’a jamais une autre pensée. S’il fait son apologie devant le roi Agrippa, il déclare ne dire rien autre que ce que les prophètes et Moïse ont annoncé devoir arriver. Enfin, dans 2 Timothée 3, nous trouvons un témoignage formel rendu aux saintes Écritures, pour le temps où l’Église aurait bien encore la forme de la piété, mais en aurait renié la puissance, et l’apôtre y ajoute la déclaration positive que toute Écriture a été donnée par l’inspiration de Dieu.

Jean affirme d’une manière formelle que la loi a été donnée par Moïse. Il rapporte la déclaration que fit Jean-Baptiste à ceux qui avaient été envoyés de Jérusalem, et dans laquelle celui-ci cite un passage de la dernière partie d’Ésaïe, comme étant bien de ce prophète, et comme accompli en lui. C’est pour lui une prophétie certaine venant de Dieu. Ce qu’a écrit Moïse dans la loi, de même que les paroles des prophètes, est tenu dans l’évangile de Jean pour une vérité connue et reçue ; il en est de même des Psaumes. Au chapitre 2, nous lisons : « Le zèle de ta maison me dévore » (Ps. 69, 9) ; au chapitre 3, c’est Moïse qui éleva le serpent dans le désert, conformément à ce qui est rapporté dans les Nombres (chap. 21). La manne donnée par Moïse n’était pas le vrai pain du ciel (Jean 6) ; en prononçant ces paroles, le Seigneur reconnaît à la fois comme authentiques l’Exode et les Psaumes (Ex. 16 ; Ps. 78). Pour Jésus Lui-même, « il est écrit dans les prophètes » est une parole suffisante pour décider souverainement. « Pas un de ses os ne sera cassé », afin que l’Écriture fût accomplie ; Son côté a été percé pour la même raison : « Et encore une autre écriture dit : Ils regarderont vers celui qu’ils ont percé » (Zach. 12, 10).

Pierre, dans le discours qu’il prononça le jour de la Pentecôte (Act. 2), s’appuie sur l’autorité de Joël (chap. 2) et de David dans le psaume 16. Moïse est celui qui avait promis un prophète tel que lui (Act. 3 ; Deut. 18), et même Samuel et tous les prophètes avaient parlé de ces jours. Pierre montre les saints prophètes de tout temps, déclarant la bénédiction qui était encore à venir, les cieux ayant reçu Jésus jusqu’à ce moment. Le psaume 2 s’accomplissait (Act. 4, 25). Dans sa première épître, Pierre déclare d’une manière formelle que l’Esprit de Christ était dans les prophètes, qui étudiaient leurs propres prophéties pour savoir ce que Dieu voulait dire par elles (chap. 1, 11), et il cite Ésaïe, ce « qu’on trouve dans l’Écriture », comme une autorité sûre, attestant ce qui avait lieu alors (chap. 2, 6). Le même apôtre confirme le récit du déluge au temps de Noé (chap. 3, 20). L’évangile de Matthieu, qui présente spécialement Christ comme le Messie des promesses, Emmanuel, et, quand Il a été rejeté, la substitution en Sa place du royaume en mystère (chap. 13), de l’Église (chap. 16), et du royaume en gloire (chap. 17), cet évangile base tout ce qu’il avance sur le témoignage des anciens prophètes. Christ y est fils de David, fils d’Abraham. Les citations sont si nombreuses que je dois me borner à en mentionner le caractère formel, et une ou deux en particulier. Ce caractère est indiqué par l’expression « upo » (par) le Seigneur, « dia » (au moyen du) prophète, ce qui affirme d’une manière claire et définie la vraie portée des citations. Quelques-unes présentent les événements qui arrivaient ; nous trouvons alors « ina », afin que la prophétie fût accomplie ; d’autres fois c’est « oste » — de sorte qu’il y eut un accomplissement ; ou encore « tote » — alors fut accompli, quand il y a seulement une application de la prophétie. Dans Matthieu, la dernière partie d’Ésaïe est « Ésaïe le prophète » (chap. 3, 3 ; 8, 17 ; 12, 17-21).

Je n’ai pas besoin de multiplier davantage les citations des écrivains du Nouveau Testament, outre une multitude d’allusions qui se trouvent dans ceux dont j’ai parlé, pour montrer que Christ et les apôtres acceptaient la Bible telle que nous l’avons (je veux dire la collection des livres de l’Ancien Testament dans son ensemble), et qu’ils l’acceptaient comme revêtue d’une autorité divine, comme la Parole de Dieu inspirée, et ayant pour eux une autorité absolue. C’est par elle que le Seigneur vainquit Satan ; c’est à elle que Satan eut recours pour couvrir sa ruse. L’homme devait vivre « de toute parole qui sort de la bouche de Dieu »[6]. Telle est l’Écriture pour le croyant, par sa propre autorité intrinsèque. Les paroles de Christ et des apôtres portent avec elles une évidence que toutes les subtilités des rationalistes ne sauraient ébranler, quoiqu’ils se disent eux-mêmes chrétiens. L’autorité de Christ et des apôtres a plus de poids que les spéculations des hommes, basées par chacun sur quelque nouvelle imagination de son propre esprit, et qui, bien que servant en passant aux progrès de l’incrédulité, et ainsi à la ruine des espérances de l’homme, s’évanouissent avec l’influence de l’énergie intellectuelle qui les a créées.

Pour résumer, je prierai seulement le lecteur de remarquer que ces citations prouvent en même temps l’authenticité des écrits et celle des écrivains ; elles montrent que les écrits sont bien de l’écrivain dont ils portent le nom ; que les vérités qu’ils renferment sont données de Dieu, et enfin, que la démonstration de ce que j’avance repose sur l’autorité de Christ et de Ses apôtres. S’il nous fallait accepter le système des rationalistes, nous n’aurions absolument point de certitude relativement à aucune vérité de Dieu. Ceux qui objectent ont subtilement parlé d’autorité, mais il s’agit de certitude ; et si les affirmations du Seigneur Jésus et des apôtres ne nous en donnent aucune, si elles sont incertaines et sans autorité, nous sommes donc abandonnés aux sombres brouillards de l’incrédulité, et un monde que l’histoire nous montre méchant et aveugle est laissé sans aucune communication certaine venant de Dieu.

J’en viens maintenant à la théorie d’Astruc[7] et de ses partisans ; celle des documents élohistes et jéhovistes. Selon l’un de ces docteurs, on peut les séparer dans le récit par un moyen mécanique, une paire de ciseaux, par exemple. En cela, je tombe d’accord avec lui ; il n’y a en effet aucun autre moyen de les séparer. Mais ces savants hommes sont-ils donc incapables de voir la différence qu’il y a entre Dieu, se révélant d’une manière abstraite comme l’Être suprême existant par Lui-même (c’est ce que comporte le nom d’Élohim), et Dieu prenant un nom de relation (Jéhovah), sous lequel Il se fait connaître aux hommes quand Il entre avec eux dans une relation spéciale ? Mon père est un homme ; mais, outre cela, il est mon père sans cesser d’être un homme. On serait tout aussi fondé à dire que le Nouveau Testament doit se composer de deux documents, que l’on pourrait séparer l’un de l’autre avec des ciseaux, parce que Dieu y est appelé tantôt Dieu et tantôt Père. Or Père est un nom de relation dans le Nouveau Testament, tout comme Jéhovah dans l’Ancien.

Voyons maintenant comment l’Écriture présente le sujet. Dieu est Dieu, mais Il est entré en relation avec l’homme. Cette relation est quadruple, selon l’Écriture, et les noms qui l’expriment se rapportent toujours à Dieu, pris abstraitement comme tel : El Shaddaï (Dieu Tout-puissant) ; Jéhovah (l’Éternel) ; Père, nom qui, sauf comme emploi figuré, appartient entièrement au Nouveau Testament ; et Élion (Très-haut ou Souverain), qui, bien que révélé dans les promesses, est le nom de Dieu dans la période millénaire, quand Il sera reconnu comme possesseur des cieux et de la terre, toute puissance ennemis ou qui s’oppose étant mise de côté. Et ces noms sont clairement manifestés ainsi dans l’Écriture, le dernier avec moins d’évidence comme étant encore à venir.

Les deux premiers sont expressément distingués. Ainsi, dans Exode 6, 2, 3, nous lisons : « Et Dieu (Élohim) parla à Moïse, et lui dit : Je suis l’Éternel (Jéhovah). Je suis apparu à Abraham, à Isaac, et à Jacob, comme le Dieu Tout-puissant (El Shaddaï) ; mais je n’ai pas été connu d’eux par mon nom d’Éternel (Jéhovah) ». Non qu’Il ne fût point Jéhovah, mais Il ne prenait pas ce nom dans Ses voies avec eux (voyez Gen. 17 ; 28 et 32). Avec Israël Il était donc Jéhovah, comme nous le voyons quand la grande question de savoir qui était Dieu fut réglée sur le mont Carmel : « L’Éternel (Jéhovah), c’est lui qui est Dieu (Élohim) ! » (1 Rois 18, 39).

Lorsqu’il s’agit de ce que Dieu, comme Dieu, était ou faisait, Il est nommé Dieu, Élohim ; si le récit est donné par ceux qui connaissaient Jéhovah, ils parlent de Dieu sous ce nom ; et, quand la solennité du nom de Dieu comme tel doit être ajoutée à Dieu connu comme étant en relation avec l’homme, on a Jéhovah Élohim ; enfin, quand c’est en rapport spécial avec Israël, on trouve Jéhovah ton Dieu ou notre Dieu. Il en est constamment ainsi dans le Deutéronome, où Moïse s’adresse personnellement à Israël. Toute personne douée d’intelligence spirituelle sentira toujours la différence entre les deux noms. Quelquefois c’est le simple état des sentiments qui est ainsi exprimé ; d’autres fois, c’est d’une importance réelle, quand la gloire de Dieu, comme tel, y est intéressée.

On peut voir une différence analogue dans le Nouveau Testament. Non seulement il est dit : Sortez du monde, et vous serez mes fils et mes filles, dit Jéhovah Shaddaï ; mais dans l’épître aux Hébreux, où est traitée la question de savoir comment l’homme peut approcher de Dieu comme tel, nous ne trouvons jamais le nom de « Père », mais toujours « Dieu ». Nous ne le rencontrons pas non plus dans l’Apocalypse, sauf au chapitre 14, où Son nom (celui de l’Agneau) et le nom de Son Père sont écrits sur le front d’un résidu spécial qui s’y trouve mentionné, mais c’est le nom de « Son Père » (voyez aussi 1, 6). C’est du trône du gouvernement du monde qu’il est question dans ce livre, aussi Dieu y est-Il nommé Jéhovah, Élohim, Shaddaï — le Seigneur, Dieu, Tout-puissant, comme nous le voyons aux chapitres 4 ; 11 ; 15.

Dans les écrits de Jean, quand il s’agit de ce qui tient à la nature de Dieu, c’est le mot « Dieu » qui est employé, comme « Dieu a tant aimé », « Dieu est amour », « Dieu est lumière », et il en est de même pour ce qui regarde notre responsabilité relativement à Dieu dans Sa nature ; mais du moment qu’il est question de l’action divine en grâce, nous trouvons le nom de « Père ». Ainsi, au chapitre 4 de l’évangile, quand nous lisons : « Dieu est esprit », c’est Sa nature, « et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité », mais plus loin, le Seigneur dit : « Car aussi le Père en cherche de tels qui l’adorent » ; c’est l’action de Sa grâce. C’est ce qui ressort aussi d’une manière frappante, en comparant les quatre premiers versets du premier chapitre de la première épître de Jean, avec le reste du chapitre. On voit la même chose dans l’évangile, 1, 18, et on le retrouverait dans tout ce que cet apôtre a écrit. Si je disais : Jean a composé ses écrits d’après deux documents, l’un patristique, l’autre théistique, que je puis séparer l’un de l’autre avec des ciseaux, qu’est-ce que cela prouverait, sinon mon incapacité morale et mon éloignement de Dieu ? C’est exactement le même principe pour l’Ancien Testament.

Maintenant, je placerai de nouveau devant le cœur de chaque lecteur la question telle qu’elle se présente à nous : Y a-t-il une révélation de la part de Dieu ?

L’homme est séparé de Dieu. Dieu a-t-Il donné une révélation par laquelle, aussi loin que va cette révélation de Lui-même, l’homme peut Le connaître ? Nous savons ce que l’homme est devenu sans elle. Sommes-nous laissés comme les païens desquels Paul disait : « Ils cherchent Dieu » pour voir « s’ils pourraient en quelque sorte le toucher en tâtonnant et le trouver » ? Ou bien y a-t-il réellement une loi donnée par Moïse, et la grâce et la vérité sont-elles venues par Jésus Christ ? Nous avons vu le Seigneur déclarer que les écrits reçus par les Juifs sont bien les écrits de Moïse, et Il le dit non seulement aux Juifs, mais aussi à Ses disciples, dont Il ouvre l’intelligence pour qu’ils les comprennent. Les apôtres, à l’exemple du Seigneur, basent leurs enseignements sur la vérité de ces écrits et leur contenu, et en tirent leurs arguments. Pour quelqu’un qui n’est pas foncièrement incrédule, cela est suffisant.

Pour ceux qui affirment qu’une narration qui rapporte des miracles ne peut être historique, que Dieu ne peut ou ne veut plus agir, maintenant qu’Il a établi une fois pour toutes l’ordre de la nature, pour ceux qui ont ainsi décidé la question avant de l’avoir examinée, il est évident que les affirmations de Christ et des apôtres n’ont point de valeur. Mais, dans ce cas, c’est ne montrer aucune pudeur que de prendre le nom de chrétiens ; c’est manquer d’une manière flagrante à la loyauté que de se prévaloir d’un titre, quand on rejette tout ce que ce titre suppose. Tout ce que nous pouvons faire, c’est de désirer sérieusement la conversion de telles gens. Ils se donnent de la peine pour ce qu’ils estiment être une imposture, ils professent en être les sectateurs ; et ils voudraient nous faire croire que la communication de la connaissance de Dieu la plus sainte, la plus remplie de grâce, la plus profonde, et en même temps la plus vraie et la plus complète, n’est que le produit d’une imposture. On a peine à se l’imaginer ; c’est pourtant à cela que nous avons affaire.

Il en est d’autres qui croient bien qu’il y a une révélation, mais non pas une communication divinement inspirée de cette révélation. Quelques-uns allèguent que la Bible n’a pas même la prétention d’être cela. Or voyez comme cela est rationnel. Dieu aurait trouvé bon de donner tout au long une révélation de ce qu’Il est, de Sa vérité, de Sa grâce ; de la donner aux hommes pour leur bien ; mais Il l’aurait fait de telle manière que, dans sa perfection, cette révélation ne pût pas aller plus loin que la personne qui la reçoit. Elle est donnée pour le bien de tous, donnée d’une manière parfaite ; mais cela s’arrête à la première personne à qui elle est communiquée et qui la reçoit. Quant aux autres, elle ne leur parvient que dans l’imperfection où l’homme l’a saisie et la communique. Il y aurait donc une communication divine pour les hommes, mais, par un arrangement divin, elle serait communiquée de manière à ne jamais arriver aux hommes comme telle. Rien ne leur serait communiqué en quoi ils pussent se confier comme étant divin. Peut-on concevoir quelque chose de plus absurde ?

Mais voici ce que dit Paul : « Quand il plut à Dieu, qui m’a mis à part dès le ventre de ma mère et qui m’a appelé par sa grâce, de révéler son Fils en moi, afin que je l’annonçasse parmi les nations ». Dieu lui avait donc fait une révélation pour qu’il annonçât Son Fils, mais, suivant la théorie dont je parle, Paul ne le pouvait pas ; quoique cette révélation fût pour d’autres, elle ne leur parvenait pas ; elle était positivement donnée pour eux, mais de telle manière qu’ils ne pouvaient en profiter. Ce n’est pas ce que dit l’apôtre. Il ne falsifiait pas la Parole de Dieu — remarquez bien comment il l’appelle — il ne frelatait pas le vin pur ; mais, par la manifestation de la vérité, il se recommandait à toute conscience d’homme devant Dieu (2 Cor. 4). C’est ainsi que les Thessaloniciens la recevaient, non comme la parole de l’homme, mais (ainsi qu’elle l’est véritablement) comme la parole de Dieu (1 Thess. 2, 13) ; de sorte que si son évangile était voilé, il l’était en ceux qui périssent (2 Cor. 4), et dont les pensées étaient aveuglées par le dieu de ce siècle. En 1 Corinthiens 2, il établit d’une façon positive la vérité quant à la manière dont les choses révélées sont communiquées : « Desquelles aussi nous parlons », dit-il, « non point en paroles enseignées de sagesse humaine, mais en paroles enseignées de l’Esprit… Or l’homme animal ne reçoit pas les choses qui sont de l’Esprit de Dieu… elles se discernent spirituellement ». Elles sont révélées par l’Esprit (v. 10-12) ; communiquées en paroles que le Saint Esprit enseigne, afin que les autres puissent les avoir telles que Dieu les avait révélées à Paul (v. 13), et, enfin, elles sont discernées par l’Esprit (v. 14 ; comp. v. 4-5). Et c’est là ce que Paul affirme partout. Les choses qu’il écrivait devaient être reçues, et l’étaient, en effet, comme « les commandements du Seigneur ». Les prophètes de l’Ancien Testament et Moïse déclarent que ce qu’ils communiquaient était les paroles de Jéhovah ; l’apôtre ne fait pas autrement.

Ainsi, non seulement la Bible est une révélation venant de Dieu, mais la communication de cette révélation est aussi Son œuvre. « Ainsi a dit l’Éternel », « l’Éternel dit », voilà ce que nous trouvons dans l’Ancien Testament ; et, dans le Nouveau, ce sont des paroles que le Saint Esprit enseigne, de sorte que ce que nous possédons est la Parole de Dieu. C’est « du Seigneur par les prophètes », ou « en paroles enseignées de l’Esprit ». Dieu ne nous a pas laissés flottant çà et là dans l’incertitude. Mais quand cette Parole est présentée, elle se discerne spirituellement ; ou, si elle est rejetée, elle est voilée en ceux qui périssent. Et, pour ce qui concerne la partie historique, nous voyons d’une part, qu’elle est rédigée par les prophètes, et d’un autre côté, qu’elle est sanctionnée par le Seigneur et par les apôtres.

On dira qu’il y a des erreurs ; on objectera que nous n’avons que des traductions. Je reconnais que cette Parole a été confiée à la responsabilité de l’homme, précisément de la même manière que le salut personnel de l’homme, dans un certain sens. Cependant l’homme est gardé par la puissance de Dieu, et la Parole l’est aussi, exposée toutefois aux effets de l’infirmité humaine. Elle est citée, affirmée et reconnue authentique par le Seigneur et par les apôtres, et il est constamment fait allusion à la loi dans les plus anciens écrits des prophètes. Pour ce qui est des traductions, personne n’en donne aucune comme un critère de la vérité ; elles sont un moyen de la communiquer, et le critère reste tel qu’il était, providentiellement préservé par Dieu. L’authenticité du Nouveau Testament, comme on l’admet généralement, étant complètement établie, l’authenticité de l’Ancien Testament se trouve prouvée, comme ne l’est celle d’aucun livre dans le monde, par le Nouveau Testament, c’est-à-dire par le Seigneur et Ses apôtres. On allègue qu’il y a des citations tirées de la version grecque dite des Septante. C’est une traduction, il est vrai ; et, si elle est citée, c’est parce qu’elle était très répandue et d’un usage général ; mais elle ne l’est pas quand les écrivains du Nouveau Testament, enseignés de Dieu, avaient une raison de faire autrement. Ils établissent seulement l’authenticité des portions qu’ils citent.

J’en viens maintenant à l’unité de pensée qui se trouve dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Quelque controverse que l’on puisse soulever quant aux dates, on ne met pas en question que la Bible ne se compose de livres écrits à des époques différentes et séparées par des intervalles de temps considérables. Les incrédules même ne le contestent pas. À certains égards, la littérature juive a commencé avec Moïse. On peut prétendre que l’on a compilé des documents élohistiques et jéhovistiques, mais en tout cas, ces documents existaient. Il y eut des prophètes plusieurs siècles avant Christ ; des psaumes furent composés par David, l’auteur des doux cantiques d’Israël, ainsi que par d’autres qui furent ses contemporains ou qui vécurent plus tard, comme il y en eut assurément plusieurs. Les auteurs sont différents, de même que leur style et l’époque où ils écrivirent. La grammaire même a subi quelques changements dans la suite des âges. En un mot, divers auteurs et divers styles se sont succédé durant une période d’environ quinze cents années. Dans le Nouveau Testament, se trouve un développement de la vérité et des conseils divins, dont une partie, comme cela est déclaré, n’avait jamais été révélée auparavant, et qui, selon la nature des choses, n’aurait pu l’être : je veux dire le mystère dont Paul, et Paul seul, parle — l’union des Juifs et des Gentils, sans distinction, en un seul corps, pour les lieux célestes. C’était une chose impossible à révéler aussi longtemps que le judaïsme subsistait, parce qu’en soi, cela le mettait absolument de côté. Le judaïsme avait élevé le mur de séparation que le christianisme détruisait.

Or si, avec tous ces auteurs d’époques diverses (le système qui existait auparavant étant mis de côté dans la dernière période, bien que pleinement sanctionné comme divin), auteurs vivant en divers lieux et en divers temps — si, à travers le jugement, la promesse, la loi, l’évangile et la révélation de l’Église complétant la Parole de Dieu, je trouve un plan unique, une même pensée dans tout l’ensemble, de qui cela vient-il ? Inconscients de la part qu’ils avaient dans l’ensemble, chacun étant occupé de la portée morale actuelle de ce qui lui était confié, ignorant en grande mesure ce que d’autres pouvaient avoir à dire, ou même employés à mettre de côté de qui avait existé et ce dont d’autres avaient été occupés, je les vois cependant tous concourant à l’exécution d’un seul et même plan. J’ai ainsi la preuve la plus forte et la plus claire qu’une pensée unique, une unique puissance d’inspiration, qui connaissait la fin depuis le commencement, et qui avait ce plan devant elle, est le véritable auteur de ce que nous nommons la Bible. J’insiste sur le fait qu’elle se compose d’un grand nombre de livres de différentes époques et de caractères divers ; que l’on se soit servi de documents élohistiques ou jéhovistiques, si l’on veut, quoique pour moi je ne l’accepte nullement. Prophétie, histoire, poésie, leçons morales ; l’homme avant la loi, et l’homme sous la loi ; un système étroit pour conserver la vraie unité de la divinité quand l’idolâtrie régnait partout ailleurs, puis un système large embrasant toute créature sous le ciel, système qui, tout en maintenant l’autorité de la loi, la mettait de côté comme moyen de relation avec Dieu ; mais, à travers toutes ces choses si diverses, un seul et même dessein divin qui fait servir chaque partie à sa place à la construction de l’ensemble, et forme de soixante livres (ou quarante-neuf, suivant la manière de compter des Juifs) un tout unique, un seul et même livre — la Bible !

Pour démontrer cette unité de la Bible, qu’il suffise ici d’établir d’après l’Écriture quel est le dessein de Dieu, en indiquant seulement ce qu’il y a de plus important ; que ce n’est pas simplement le dessein d’exposer les faits accomplis, mais que ceux-ci forment la base morale tout entière des relations de l’homme avec Dieu. Nous y voyons l’état d’innocence de l’homme, la perte de cette innocence, la responsabilité morale, la loi donnée avec une autorité divine comme mesure parfaite de la responsabilité, l’homme doublement coupable en violant la loi, le moyen d’y porter remède dans le témoignage des prophètes et dans la venue du Fils de Dieu Lui-même, mais tout cela en vain et se terminant par le jugement du monde. Toute bouche étant alors fermée et tout le monde reconnu coupable devant Dieu, un salut parfait est annoncé par grâce de la part de Dieu, salut selon Sa propre nature et Sa gloire, saisi dans la promesse à travers tous les siècles et enfin pleinement révélé ; puis finalement la gloire céleste et une terre restaurée sous la première et la nouvelle alliance, et ensuite l’éternité. À cela, je puis ajouter la place spéciale de l’Église au milieu de tout ce que je viens de mentionner, place tout à fait particulière. Tout est ainsi rendu manifeste et déroulé successivement, à mesure que se développe le dessein de Dieu, et se termine dans la plénitude de la gloire divine, et dans l’infinie et éternelle bénédiction de ceux qui croient.

Le dessein de Dieu, tel que l’établit l’Écriture (Éph. 1), est celui-ci : « Pour l’administration de la plénitude des temps », Dieu s’est proposé de réunir en un toutes choses dans le Christ (Fils de Dieu et Fils de l’homme), les choses qui sont dans les cieux et les choses qui sont sur la terre ; en Christ, en qui nous avons été faits héritiers. Ceci nous présente deux grandes scènes, les cieux et la terre, et, en rapport avec l’une et l’autre, deux grands objets nous sont révélés comme étant placés sous l’autorité de Christ : l’Église et les saints glorifiés dans les lieux célestes, et les Juifs sur la terre ; l’Église régnant avec Christ, les Juifs, ainsi que le monde entier, gouvernés par Lui comme Fils de l’homme, ressuscité et glorifié ; à côté de cela la maison du Père, où Il est allé, et qui est notre demeure. L’une de ces scènes présente la souveraine grâce qui nous a placés dans la même gloire que le Fils de Dieu ; l’autre, le gouvernement de ce monde. Voyez Éphésiens 1, 22, 23 et 9-11 ; puis Deutéronome 32, 8, 9, où nous trouvons un court exposé de la partie juive de la scène terrestre (v. 8, 43). Tous sont sous le Fils de l’homme ou unis à Lui.

Quant à l’Ancien Testament, voici le jugement du rationaliste Eichhorn : « 1° Personne, si ce n’est des docteurs ignorants et irréfléchis, ne peut supposer que l’Ancien Testament ait été fabriqué par un imposteur. 2° Les écrits de l’Ancien Testament ne sont pas l’œuvre de plusieurs imposteurs… Comment auraient-ils pu inventer d’une manière aussi entièrement conforme aux progrès de l’intelligence humaine ; et était-il possible dans des temps postérieurs de créer le langage de Moïse ? ». Il continue en disant : « Comment une nation tout entière aurait-elle pu si souvent et en différentes périodes de son existence, être déçue et trompée par des imposteurs, et par ce qui la rendait elle-même méprisable ?… Tous les écrivains citent, dit-il encore, ce qui avait été écrit auparavant, ou y font allusion ».

L’histoire profane présente Moïse comme le législateur d’Israël. Ce serait une sérieuse difficulté, s’il y en avait pour des gens qui se nourrissent de théories, que d’expliquer comment ou pourquoi on aurait donné le récit de tout le système si minutieusement élaboré de l’arrangement du tabernacle, présenté comme venant directement de Dieu, alors que le peuple d’Israël en avait un entièrement différent sous les yeux. Il n’y a personne qui, lisant l’Ancien Testament sans préjugés, n’y doive voir une succession claire et ordonnée d’événements historiques — quoiqu’il y ait beaucoup plus que cela. Il se compose d’écrits réunis plus tard en un seul volume, sans doute, mais l’effort fait pour l’invalider est plus absurde qu’aucune autre théorie. Il forme historiquement un faisceau beaucoup trop serré. Tout y est faux, si l’ensemble n’est pas substantiellement vrai tel qu’il est, car tout s’y tient et partout une des parties suppose l’autre. Mais la foi dans l’âme dépend d’autre chose que de ces preuves externes. On peut aisément faire naître des doutes, mais ces raisonneurs nous ont-ils jamais présenté une seule vérité certaine et solide ?

Attaquer l’inspiration de la Bible, telle que nous l’avons, c’est répandre l’incrédulité. Fausser la vraie origine des livres, c’est dire que Christ et Ses apôtres ont mis leur sanction sur une imposture.

La question est donc : Les âmes ont-elles avec évidence la Parole de Dieu, ce « qui sort de la bouche de Dieu », cité comme tel par le Seigneur et Ses apôtres ? Ont-elles le christianisme communiqué en paroles enseignées de l’Esprit ? Ou bien, est-ce ce qu’ont imaginé les Astruc, les Baur, etc., sans qu’il y ait aucune réelle communication de la part de Dieu Lui-même ? Sur quoi mon âme s’appuiera-t-elle ?

Heureusement que, lorsque eut lieu le grand combat entre l’homme, dans le second Adam, et Satan, les paroles sorties de la bouche de Dieu suffirent au Seigneur pour réduire l’adversaire ; et il en sera toujours ainsi. De même, à l’heure de Sa profonde agonie, quand Il expiait les péchés, c’était par ces paroles qu’Il exprimait ce qui était dans Son cœur, ce que nul autre cœur ne pourra jamais sonder ni exprimer. S’il y a au monde une bénédiction, outre celle d’avoir le Seigneur Lui-même en grâce, c’est de posséder la Parole de Dieu comme Lui-même nous l’a donnée, semblable au Seigneur Lui-même ; c’est-à-dire ce qui est divin et céleste, mais ce qui, en même temps, convient et est parfaitement adapté à l’homme, dans le cœur de l’homme : l’Ancien Testament étant comme un canal qui l’apporte, et où puisaient, mais en partie seulement, ceux qui le transmettaient ; dans le Nouveau Testament, le cœur lui-même, c’est-à-dire le vase de la communication, étanchant d’abord sa propre soif, puis l’eau découlant de l’homme intérieur. « Quand il plut à Dieu, qui m’a mis à part dès le ventre de ma mère et qui m’a appelé par sa grâce », dit Paul, « de révéler son Fils en moi, afin que je l’annonçasse parmi les nations ». Tout dans l’Écriture est cette Parole de Dieu qui agit efficacement en ceux qui croient.

« Si ce que vous avez entendu dès le commencement demeure en vous, vous aussi vous demeurerez dans le Fils et dans le Père ».



  1. Voir le traité.
  2. Les Juifs, à l’époque du Seigneur, partageaient l’Ancien Testament en vingt-deux livres, de la manière suivante : 1° Les cinq livres de Moïse ou la Loi ; 2° treize livres des prophètes, savoir : Josué, les Juges et Ruth ; les deux livres de Samuel, les Rois et les Chroniques ; Ésaïe, Jérémie et les Lamentations, Ézéchiel, Daniel, les douze petits prophètes ; Job, Esdras, Néhémie, Esther ; 3° les Hagiographes, ou écrits saints, savoir : les Psaumes, les Proverbes, l’Ecclésiaste et le Cantique des cantiques. Ces quatre derniers portaient le nom général de Psaumes. En disant la loi, les prophètes et les psaumes (Luc 24, 44), on disait toute l’Écriture.
  3. De Wette conclut du fait qu’il est rapporté en 2 Chroniques 34, 14, que le livre de la loi pourrait bien avoir été fabriqué par le parti sacerdotal.
  4. La version des Septante, traduction grecque du texte hébreu, souvent citée par le Seigneur et les apôtres inspirés. On fait une difficulté de ce qu’elle ne rend pas toujours littéralement le texte hébreu. — Le « compilateur », l’auteur inconnu qui, suivant les rationalistes, aurait rassemblé et fondu divers documents pour en former le Pentateuque, en y ajoutant ce qui lui semblait nécessaire, puis faisant passer le tout pour écrits de Moïse.
  5. Ils prétendent que les derniers chapitres à partie du 40 ne sont pas d’Ésaïe, mais d’un auteur inconnu.
  6. Toutes les répliques du Seigneur à Satan, sont tirées du Deutéronome, cité comme la Parole de Dieu — paroles sortant de Sa bouche, suffisantes pour le Seigneur, suffisantes aussi pour réduire Satan au silence.
  7. Astruc, médecin français, qui vivait au milieu du dix-huitième siècle, est le premier qui ait imaginé que la Genèse est un amalgame de deux documents, distingués en ce que l’un emploie le mot d’Élohim (Dieu), et l’autre celui de Jéhovah (Éternel).