Traité:Le ministère
considéré dans sa nature, dans sa source, dans sa puissance et dans sa responsabilitéJ.N. Darby
L’état de l’Assemblée de Dieu rend assez utiles, il me semble, quelques observations sur le ministère, présentées non dans un but de controverse, mais dans celui d’éclaircir un sujet dont la controverse s’est beaucoup occupée ; sujet assez élevé et assez intéressant, d’ailleurs, pour nous faire monter au-dessus des brouillards des débats théologiques, et nous faire jouir de la douce lumière du ciel, d’où ce ministère nous vient.
Et, tout d’abord, il est bon de mettre l’idée du ministère à sa place et dans son vrai jour ; car il me paraît que l’on n’en a guère saisi toute l’importance. Les détails viendront plus tard.
De la nature du sacerdoce lévitique comparée à celle du ministère évangélique
L’existence d’un ministère tient à la nature de l’économie actuelle ; et, en disant cela, l’on monte très haut pour en trouver la source ; car la nature de cette économie n’est autre chose que la souveraine grâce de Dieu, l’activité de Son amour.
La position et le caractère que revêtent les serviteurs de Dieu, sont toujours et nécessairement en rapport avec les principes de la relation qui existe entre Dieu et les hommes. Lorsque Dieu reconnaissait seulement certaines familles, le chef de la famille était sacrificateur et prophète de sa famille. Abraham, Noé et d’autres patriarches en sont des exemples. Mais ce principe devient d’une application plus générale et plus importante, lorsqu’il s’agit de toute une économie, comme dans le cas des Juifs et du christianisme ; les voies de Dieu et les principes de Ses relations avec les pécheurs y sont développés avec beaucoup plus de détails pour la conscience, plus de clarté et de splendeur quant à l’accomplissement et à la révélation de la grâce.
Voici, sous ce rapport, la grande distinction entre ces deux économies. Dans le judaïsme, à la montagne de Sinaï, où la loi a été donnée, et où les ordonnances qui réglaient les relations entre Dieu et le peuple ont été établies, nous avons un peuple déjà formé et reconnu comme tel devant Dieu ; un peuple que Dieu avait déjà amené à Lui (Ex. 19), qu’Il avait délivré, qui tenait son existence et ses droits du titre d’enfants d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, et qui, à quelques exceptions près, se recrutait en vertu de ce principe généalogique. En un mot, le peuple était déjà formé quand Dieu établit des relations avec lui ; car Dieu a voulu essayer si l’homme, privilégié de la sorte, et mis en jouissance de tous les avantages possibles pour maintenir sa position, pouvait subsister devant Lui.
L’œuvre et le principe du christianisme sont tout autres. Le christianisme suppose l’homme perdu. Il suppose que l’essai que Dieu a fait de lui par le moyen de la loi, n’a servi qu’à démontrer plus clairement l’impossibilité où l’homme se trouve, quels que soient ses avantages et ses privilèges, de subsister devant Lui. Mais, cela démontré, le christianisme nous montre Dieu visitant dans Sa grâce cette race perdue. Il voit les Gentils enfoncés dans l’ignorance et l’idolâtrie, et dégradés par les souillures les plus révoltantes. Il trouve les Juifs plus coupables encore, comme ayant été infidèles à de plus grands privilèges ; et il les présente tous, Gentils et Juifs, comme la preuve terrible que la nature humaine est déchue et corrompue, et que, dans la chair, il n’existe aucun bien. Mais, s’il voit les hommes méchants, misérables, en révolte et perdus, il les voit selon ses compassions infinies. Il ne prend connaissance de ces misères de l’homme que pour lui rendre témoignage de Sa miséricorde. Il voit et vient appeler les hommes, par Jésus, pour qu’ils jouissent en Lui et par Lui de la délivrance et du salut, de Sa faveur et de Sa bénédiction.
La conséquence de la position du peuple juif était très simple : une loi pour diriger la conduite d’un peuple existant déjà comme tel devant Dieu, et une sacrificature pour maintenir les relations qui subsistaient entre ce peuple et son Dieu ; relations qui n’étaient pas d’un caractère propre à rapprocher le peuple de Lui sans intermédiaire. Il s’agissait non d’appeler et de chercher ceux de dehors, mais de régulariser les rapports avec Dieu d’un peuple déjà reconnu comme tel.
Comme nous l’avons vu, le christianisme a un caractère tout différent. Il considère tous les hommes comme universellement perdus, démontre qu’ils le sont en effet, et cherche, par la puissance d’une nouvelle vie, des adorateurs en esprit et en vérité. Aussi introduit-il les adorateurs eux-mêmes dans la présence du Dieu qui s’y révèle comme leur Père — un Père qui les a cherchés et sauvés ; et il les y introduit, non par l’intervention d’une classe intermédiaire de sacrificateurs qui se présentent à la place des adorateurs, parce que ceux-ci ne pourraient eux-mêmes s’approcher d’un Dieu terrible et imparfaitement connu, mais dans une entière confiance en un Dieu connu et aimé, parce qu’Il les a aimés, cherchés et lavés de tous leurs péchés, pour qu’ils fussent sans crainte en Sa présence.
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La conséquence de la différence marquée des relations des Juifs et des chrétiens avec Dieu est que les Juifs avaient une sacrificature, et non un ministère, qui agissait en dehors du peuple ; tandis que le christianisme a un ministère qui s’exerce dans la révélation active de ce que Dieu est, soit au-dedans de l’Église, soit au-dehors, et qu’il n’a point de sacrificature intermédiaire entre Dieu et Son peuple, sauf le grand Sacrificateur Lui-même. La sacrificature chrétienne est celle qui est composée de tous les vrais chrétiens ensemble, lesquels jouissent tous du droit d’entrer dans les lieux saints par le chemin nouveau et vivant qui leur a été consacré (Héb. 10, 19, 20) ; sacrificature dont les relations sont, du reste, essentiellement célestes.
Le ministère appartient donc indispensablement au christianisme, qui est l’activité de l’amour de Dieu pour tirer les âmes de la ruine et du péché, et les amener à Lui-même.
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Ainsi sur cette terre, sous le rapport des relations de Dieu avec les hommes, une sacrificature était le trait distinctif de l’économie judaïque, et un ministère est celui de l’économie chrétienne, parce que la sacrificature servait à maintenir les Juifs dans leurs relations avec Dieu, et que, par le ministère, le christianisme cherche dans le monde des adorateurs pour le Père. Je dis sur la terre ; car, en réalité, quand nous considérons le côté le plus élevé de la position chrétienne, c’est-à-dire ce qui se rapporte au ciel, le christianisme a ses « rois et sacrificateurs », savoir tous les saints. Le culte rendu à Dieu n’est pas un ministère ; c’est l’expression du cœur des enfants devant leur Père dans le ciel, et des sacrificateurs devant leur Dieu, dans l’intimité de la présence de Celui qui, dans Son amour, a déchiré le voile que Sa justice avait opposé au pécheur, et l’a déchiré par un coup qui a désarmé la justice et ne lui a laissé que l’heureuse tâche de revêtir de la plus belle robe ceux auxquels l’entrée était auparavant interdite. Supposer donc la nécessité d’une classe spéciale de sacrificateurs, c’est nier l’efficacité de l’œuvre de Christ, qui nous a acquis le privilège de nous présenter nous-mêmes devant Dieu ; c’est, de fait, nier le christianisme dans son application à la conscience et à la justification du pécheur ; c’est renverser toutes les relations que Dieu a établies pour se glorifier Lui-même, et pour placer l’homme dans la paix et la bénédiction. De l’autre côté, Dieu agissant dans le christianisme selon l’activité de Son amour envers les pécheurs, le ministère chrétien devient l’expression de cette activité ; il a sa source dans la puissance de cet amour, aussi bien en appelant les âmes qu’en nourrissant celles qui sont appelées et que Jésus aime.
C’est ainsi que Paul nous le présente comme une des choses qui caractérisent l’évangile de grâce.
Source du ministère
« Dieu était en Christ, réconciliant le monde avec lui-même, ne leur imputant pas leurs fautes et mettant en nous la parole de la réconciliation » (2 Cor. 5, 19). Voilà les trois choses qui découlent de la venue de Dieu en Christ : réconciliant, n’imputant pas, et mettant aussi en nous la parole de la réconciliation. Sans ce dernier point, l’œuvre de la grâce restait imparfaite dans son application ; car celui qui, dans sa venue ici-bas, réconciliait et n’imputait pas, ce Jésus a dû être fait péché pour nous (v. 21), mourir et s’en aller. L’œuvre achevée demeurait ainsi suspendue dans son application ; et le complément de cette œuvre glorieuse de la grâce de Dieu était de commettre aux hommes « la parole de la réconciliation », selon sa puissance et son bon plaisir. Il entrait ainsi deux éléments dans le ministère : 1° une profonde conviction, un sentiment puissant de l’amour manifesté dans cette œuvre de réconciliation ; et 2° les dons qui rendaient capable d’annoncer aux hommes, selon leurs besoins, les richesses de cette grâce qui animait les cœurs de ceux qui l’annonçaient.
C’est ce que nous présente la parabole des talents (Matt. 25). Celui qui avait cinq talents, de même que celui qui en avait deux, était poussé par la confiance que donne la grâce, par la connaissance du caractère de son maître, et par l’assurance que faisaient naître en lui et cette connaissance de son maître et cette confiance dont il se voyait l’objet de sa part. Leurs capacités et leurs dons n’étaient pas égaux. Dieu est souverain à cet égard. Celui qui n’avait qu’un talent proportionné à sa capacité, manquait de cette confiance qu’inspire la connaissance de Dieu en Christ. Il se méprenait sur le caractère de son maître. Il était inactif à cause de l’état de son âme, comme les deux autres étaient actifs par la même raison.
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Nous voyons ainsi que le principe du ministère est l’active énergie de l’amour, de la grâce, découlant de la foi qui nous fait connaître Dieu. Toucher à cela, c’est tout renverser dans son principe fondamental. Dans son essence, le ministère découle de la connaissance individuelle du caractère du Maître. La grâce connue, vivement sentie, devient la grâce active dans nos cœurs, seule vraie source, seule source possible, dans la nature des choses, d’un ministère selon Dieu.
Nous voyons, de plus, que c’est la souveraineté de Dieu qui donne, comme bon lui semble, soit la capacité naturelle comme vase pour contenir le don, soit le don, selon la mesure du don de Christ, tiré de ces trésors qui se trouvent en Lui et qu’Il a reçus pour les hommes.
Nous trouvons le ministère basé sur le même principe, quand le Seigneur dit à Pierre : « Simon Pierre, m’aimes-tu ? » et, sur sa réponse, ajoute : « Pais mes brebis. — Pais mes agneaux ». Cela conduit à deux parties essentielles du ministère, savoir : 1° la libre activité de l’amour qui pousse à appeler les âmes ; et, 2° le service d’amour qui ne se lasse pas dans ses efforts pour les édifier, quand elles ont été appelées.
Quant au ministère de la Parole (car il y a d’autres dons), ces deux parties nous sont distinctement présentées dans le premier chapitre de l’épître de Paul aux Colossiens. Au verset 23, Paul est serviteur de l’évangile « prêché dans toute la création qui est sous le ciel » ; et, au verset 25, serviteur de l’Assemblée « pour compléter la parole de Dieu ».
Comme ressorts et sources de tout ministère, il y a donc ces deux choses : l’amour que produit la grâce dans le cœur, l’amour qui pousse à l’activité, et la souveraineté de Dieu qui communique des dons comme bon lui semble, et appelle à tel ou tel ministère ; appel qui fait du ministère une affaire de fidélité et de devoir de la part de celui qui est appelé. Ces deux principes, on doit le remarquer, supposent l’un et l’autre une entière liberté par rapport aux hommes, qui ne sauraient intervenir, comme source ou autorisation du ministère, sans, d’un côté, neutraliser l’amour comme source d’activité, ou, de l’autre, sans empiéter sur la souveraineté de Dieu qui appelle, qui envoie, et dont l’appel fait devoir. La coopération et la discipline selon la Parole restent toujours à leur place.
Tout ministère qui n’est pas fondé sur les deux principes que nous venons d’énoncer, n’est pas en réalité un ministère. Il n’y a aucune source chrétienne d’activité que l’amour de Christ et l’appel de Dieu.
De la puissance du ministère et de sa responsabilité
Ayant ainsi touché la question de la source du ministère, qui se lie aux premiers principes mêmes et à l’existence du christianisme, et qui a son être dans l’activité de l’amour de Dieu, examinons quelle est la puissance qui agit dans ce ministère, et sous quelle responsabilité ceux qui en sont chargés l’exercent.
Puissance du ministère
Le chapitre 3 de la seconde épître aux Corinthiens indique son caractère général : c’est le ministère de l’Esprit.
Deux grands traits caractérisent l’œuvre de Christ dans le monde. Il est l’Agneau de Dieu qui ôte le péché, et Il baptise de l’Esprit Saint. Je laisse de côté le premier point, tout plein d’intérêt qu’il soit, comme n’appartenant pas à notre sujet, sauf comme un objet dont s’occupe le ministère. Je m’arrête à la seconde des choses par laquelle Jean le baptiseur désigne l’œuvre et la gloire de Christ : « Lui vous baptisera de l’Esprit Saint » (Matt. 3, 11), point évidement de toute importance, source de toute la puissance, de toute l’énergie spirituelle qui se trouve dans l’Assemblée. Et il faut de l’énergie spirituelle pour que Satan soit combattu avec succès, et que ces pauvres corps, la chair étant mortifiée, deviennent des vases du témoignage et de la puissance de Dieu. Cela, pour le fond de la chose, a eu lieu pour le Seigneur Jésus Lui-même. Aussi, est-ce une vérité de toute importance, que cette puissance du Saint Esprit dans l’homme. Jésus Lui-même fut oint de l’Esprit Saint et de puissance. « Comment », dit Pierre à Corneille, « Dieu a oint de l’Esprit Saint et de puissance Jésus de Nazareth, qui a passé de lieu en lieu faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance ; car Dieu était avec lui » (Act. 10, 38). Il ne s’agit pas ici de Sa divinité, car Il était Dieu avant la fondation du monde ; ni de Sa perfection comme homme, car c’était une chair sainte qui était née de la vierge Marie. Il était Fils de Dieu, non seulement quand Il créa le monde, mais aussi dans le monde, comme homme né de Marie par la puissance du Saint Esprit. Il en avait la conscience quand Il répondait à Sa mère qui Le cherchait dans le temple : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? » (Luc 2, 49). Cela ne se rapportait pas à Son amour : Sa présence dans le monde, c’était l’amour même. — Mais, outre tout cela, Jean le baptiseur voit le Saint Esprit descendre comme une colombe, et demeurer sur Lui. « Dieu a oint Jésus de Nazareth de l’Esprit Saint et de puissance ». C’est alors seulement que, rempli de l’Esprit Saint (Luc 4, 1), Il commence Son ministère, agit officiellement comme Fils de l’homme dans le monde, et subit les tentations par lesquelles le dernier Adam devait être éprouvé, pour pouvoir affirmer Son droit au-dessus de la puissance de Satan, tandis que le premier Adam était tombé sous cette puissance. C’est alors que nous Le voyons chasser les démons par l’Esprit de Dieu, et dire à Sa mère : « Qu’y a-t-il entre moi et toi ? » (Jean 2, 4). Sa vie était tout entière la puissance du Saint Esprit en ministère. Par l’Esprit éternel, Il s’est offert sans tache à Dieu (Héb. 9, 14). Il était bien plus qu’un homme ; et Il était pourtant un homme, ce « Jésus de Nazareth, que Dieu avait oint du Saint Esprit et de puissance ».
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Notre part en tout cela a un autre élément différent. Dans le cas du Seigneur Jésus, c’était l’homme, le dernier Adam sur la terre, accomplissant Lui-même, à la face de Satan, tout ce que l’homme spirituel pouvait offrir à Dieu dans sa vie. Sa voix n’était pas entendue dans la rue (Matt. 12, 19). Il a dû être parfait, et, comme homme, vaincre Satan dans ce monde où l’homme avait manqué, et dans les circonstances mêmes où l’homme se trouvait par sa chute. C’est ce que ce précieux Sauveur a parfaitement accompli.
Toutefois, jusque-là, Il n’était pas devenu le commencement d’un nouvel ordre de choses.
Le premier Adam a failli dans le jardin d’Éden, là où il était entouré de bénédictions. C’est quand il en a été chassé que, dans son état de chute, il est devenu le chef d’une race déchue, dans ce monde de péché et de ruine. Jésus, le dernier Adam, devait d’abord être parfait, et remporter personnellement la victoire sur Satan au milieu de la ruine ; victoire si complète et si parfaite qu’Il pouvait, ayant lié l’homme fort, piller ses biens, et que, dans la bouche de ceux qu’Il envoyait, Son nom suffisait pour chasser les démons. Mais, pour commencer un nouveau monde de gloire et de bénédiction, pour racheter Son Assemblée et la rendre semblable à Lui-même, selon la puissance par laquelle Il peut s’assujettir toutes choses, Il a dû remporter la victoire sur Satan dans la dernière forteresse où Il tenait l’homme captif, par le jugement et sous la sentence de Dieu Lui-même, c’est-à-dire dans la mort. Christ a dû subir en plein la dernière conséquence du péché, comme résultat de la colère de Dieu, de la puissance de Satan, ainsi que de la faiblesse de l’homme. C’est ce qu’Il a fait.
Ainsi, la colère de Dieu étant passée, sauf pour ceux qui rejettent Jésus, toute la puissance de Satan est détruite dans le siège de cette puissance par rapport à l’homme, la mort étant vaincue, ses portes d’airain brisées et ouvertes — Jésus, dernier Adam, vainqueur de Satan et de la mort, héritier, comme Fils de l’homme et par la justice de Dieu, de tout ce qu’Adam possédait et de beaucoup plus qu’Adam n’avait perdu, tandis que, comme Fils de Dieu, Il soutient toutes choses par la parole de Sa puissance, image du Dieu invisible et expression de Sa gloire, Jésus, selon les conseils de Dieu quant à l’homme, commence à agir comme chef d’un nouveau monde et d’une nouvelle création. Cependant, quoiqu’Il eût aboli tout ce qui était contre nous, quoiqu’Il eût triomphé de Satan sur la croix et emmené captive la captivité (Éph. 4, 8), le temps de la délivrance de la création n’était pas encore venu. Le temps présent n’était que la période pour un témoignage de la puissance de Jésus au milieu de la création encore déchue et d’où Satan n’était pas encore chassé ; pour le rassemblement de l’Assemblée de Ses élus en dehors du monde, pour les nourrir et les chérir jusqu’à ce qu’ils Lui fussent présentés en gloire ; enfin, pour faire de cette Assemblée, sur la terre, le vase[1] de la puissance possédée par le Fils de l’homme assis à la droite de Dieu ; Lui qui remplissait maintenant toutes choses, étant descendu d’abord dans les parties les plus basses de la terre, et remonté ensuite au-dessus de tous les cieux, Il avait reçu des dons pour les hommes (Éph. 4, 8-10).
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La Pentecôte n’a été ni un changement moral des affections, ni le souffle de vie de Jésus ressuscité ; tout cela avait déjà eu lieu. Les disciples attendaient à Jérusalem qu’ils fussent revêtus de puissance d’en haut. Et nul doute que, lorsqu’ils en furent revêtus, cela n’agît puissamment sur leurs affections, parce que cela révélait Jésus avec puissance ; mais la vie et les affections étaient déjà là, de même que, dans un sens bien plus élevé, la vie et les affections du Fils de Dieu étaient en Jésus, avant que l’Esprit Saint descendît sur Lui comme une colombe. Jésus prit place, selon les conseils de Dieu, avec les fidèles d’Israël dans le baptême de Jean, « accomplissant toute justice » ; et ensuite Il fut oint pour Son service au milieu d’eux. En vertu de Sa mort et de Sa résurrection, Il place Ses disciples dans la relation avec Dieu où Il est Lui-même, s’en allant vers Son Père et leur Père, Son Dieu et leur Dieu ; et Il les baptise du Saint Esprit, comme le témoin de Sa gloire dans les lieux célestes, et comme la puissance qui identifie Ses disciples avec Lui-même dans cette gloire. Il est très certain, d’après les paroles de Jésus Lui-même (Act. 1), que le don du Saint Esprit le jour de la Pentecôte a été ce baptême du Saint Esprit, et que rien de ce que les apôtres avaient reçu auparavant n’était l’accomplissement de cette promesse, car Il leur dit : « Vous serez baptisés de l’Esprit Saint, dans peu de jours ».
L’évangile de Luc, dont les Actes des apôtres ne sont qu’une continuation (les Actes reprenant ce sujet en des termes qui sont presque les mêmes que ceux de son évangile), nous présente le Seigneur Jésus particulièrement comme Fils de l’homme, Chef d’un nouvel ordre de choses. Cet évangile présente cette vérité moralement ; les Actes, en puissance.
L’évangile de Jean, quoique touchant le même sujet, Le présente sous une autre forme. Le Saint Esprit est l’Esprit de vérité, l’avocat ou le Consolateur, envoyé du Père en Son nom, ou de Jésus Lui-même de la part du Père. Il conduit dans toute la vérité, montre les choses à venir, et fait connaître que Jésus est dans le Père, les disciples en Jésus, et Lui en eux. Si je traitais le sujet du Saint Esprit, il me faudrait parler de la fin de cet évangile, où Il est présenté comme l’Esprit de vérité, rendant témoignage contre le monde par Sa présence, et conduisant les fidèles dans toute la vérité ; il faudrait considérer tous les passages où Il est présenté comme sceau de la rédemption, arrhes de l’héritage et Esprit d’adoption, tels que 2 Corinthiens 1, Éphésiens 1, Galates 4, Romains 8, et plusieurs autres ; mais rappelons-nous, si la pensée de la présence du Saint Esprit, de ce puissant Consolateur entraîne nos cœurs, que notre sujet est le ministère, sujet assez important pour glorifier l’Esprit en en parlant.
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Pour en revenir à notre sujet, c’est à cause de la relation qui existe entre l’exaltation de Jésus à la droite de Dieu et l’envoi de l’Esprit Saint dont nous venons de parler, que nous trouvons en Jean que l’Esprit n’avait pas encore été donné, parce que Jésus n’était pas encore glorifié (Jean 7, 39) ; car la présence de l’Esprit Saint ici-bas était la conséquence de la glorification de Celui qui ici-bas avait accompli toute l’œuvre de Dieu, et qui remplit toutes choses.
Nous pouvons remarquer ici, en rapport avec le point qui nous a occupés, la suite des idées que nous présentent les chapitres 3, 4 et 7 de l’évangile de Jean. Au chapitre 3, le Saint Esprit opère la nouvelle naissance ; au chapitre 4, Il est la puissance de communion, de vraie communion ; au chapitre 7, le Fils de l’homme, ne pouvant pas encore se manifester au monde, déclare que des fleuves d’eau vive découleront du ventre de ceux qui croiraient ; car l’Esprit n’était pas encore, parce que Jésus n’était pas encore glorifié, et c’était alors qu’Il (l’Esprit) devait être le témoin de la gloire du Fils de l’homme, et rendre sur la terre témoignage à cette gloire.
Quelle source du ministère nous est maintenant ouverte ! L’amour de Dieu en Christ envers de pauvres pécheurs, mais cet amour accompli[2] dans la gloire qui était la conséquence de la mort du Fils de l’homme, lequel était entré dans le plus profond de la misère de l’homme, y avait glorifié Dieu, et était maintenant glorifié Lui-même, comme homme. Dans quelle position le ministère est placé ! Quelle fonction glorieuse, et comme l’homme est réduit à néant devant elle ! C’est en réalité le ministère de l’Esprit et de la justice. Car, si l’amour de Dieu en est la source et le sujet, la justice de Dieu accomplie dans la glorification du Fils de l’homme, qui L’avait glorifié sur la terre et qui avait plus que rétabli toute cette gloire de Dieu atteinte et renversée en apparence par la victoire de Satan et la ruine qu’il avait introduite dans la création de Dieu, cette justice en devient aussi la base. Et c’est à cause de cette glorification du Christ en puissance qu’il y avait aussi des guérisons et des miracles attachés à ce ministère, du moins en est-ce une des raisons[3] ; car les miracles étaient aussi une confirmation de sa partie la plus importante, savoir de la parole vivifiante. Mais ils étaient aussi un témoignage rendu à la victoire du Fils de l’homme sur Satan, et à Son droit de bénédiction sur la création malgré tout le mal qui s’y trouvait. Un temps devait venir où tout ce mal serait ôté, mais le moment n’en était pas encore arrivé. Seulement Celui qui devait l’accomplir était exalté, et manifestait au milieu du mal cette puissance dans l’homme. Ainsi, le prince de ce monde, celui qui était le moteur de tout le mal qui s’y trouve, était montré comme jugé ; et c’est pourquoi aussi les miracles sont appelés les puissances ou les miracles du siècle à venir (Héb. 6, 5) ; parce qu’alors, durant le millénium, tout ce mal sera subjugué et arrêté par la présence du Fils de l’homme. Et les miracles étaient un échantillon de ce bienheureux résultat, échantillon opéré par l’Esprit Saint venu d’en haut. Sous ce rapport, c’est vraiment un triste spectacle que nous présentons actuellement au monde quant à la manifestation de la gloire du Fils de l’homme. Ayons au moins la sagesse de le reconnaître et de le confesser.
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Mais ces choses n’étaient, il est vrai, que des accessoires. La chose principale était le témoignage rendu à l’amour de Dieu, à la victoire du dernier Adam et à l’œuvre qu’Il avait accomplie comme homme ; témoignage rendu par la Parole, par cette Parole qui a créé, qui soutient, qui vivifie pour la vie éternelle, qui nourrit l’âme renouvelée, et qui révèle toute la gloire de Dieu ; la Parole dont Jésus est la plénitude vivante.
Considéré comme ministère de la Parole, le ministère, qui manifestait la présence du Saint Esprit, manifestait en même temps la souveraineté de Dieu, la miraculeuse puissance de Celui qui était envoyé, l’étendue et l’activité de la grâce.
Ce ministère s’exerçait soit parmi les Juifs, soit, dans le cas de Corneille, parmi les Gentils, par le don des langues. Des Galiléens, des Romains parlent toutes sortes de langues. L’homme n’est qu’un instrument dans la main de Dieu, un instrument du Saint Esprit envoyé d’en haut. C’est Lui qui gouverne, qui guide, qui agit ; mais Il le fait afin d’adresser le témoignage de la gloire du Fils de l’homme à tous les hommes, et afin, en leur parlant des œuvres merveilleuses de Dieu dans la langue du pays où ils étaient nés, d’attirer leurs cœurs, par une grâce qui descendait jusqu’à eux, vers la puissance qui se manifestait, et, en même temps, d’affirmer les droits du dernier Adam en grâce sur tous les hommes. Cela, évidemment, tout en commençant par les Juifs, s’adressait à toute l’économie des Gentils. Le jugement de Dieu avait séparé les nations en confondant leurs langues, de sorte qu’elles étaient comptées par langues, familles et nations (Gen. 10 et 11) ; et, en les séparant ainsi, Il avait établi les bornes des peuples selon le nombre des enfants d’Israël (Deut. 32, 8). Le temps de mettre fin à tout cela n’était pas encore venu, mais la grâce est introduite et domine, dans cet état de choses, au milieu des Juifs, de toutes les nations la plus méchante, après tout. Un témoignage apparaît qui se sert du fruit même du péché pour démontrer que la grâce atteignait les hommes justement là où le jugement de ce péché les avait placés. Le Saint Esprit rend des Juifs capables de parler toutes les langues par lesquelles les hommes et les cœurs étaient divisés, en vertu du jugement de Dieu sur l’orgueil d’une terre renouvelée.
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Le sujet de ce ministère, bien que les circonstances qui accompagnaient son exercice manifestassent à l’œil exercé la souveraineté de Dieu, les droits du Fils de l’homme sur les nations, ainsi que Sa grâce envers les Juifs qui L’avaient rejeté, le sujet de ce ministère était, au commencement, uniquement la gloire de l’homme Jésus ressuscité d’entre les morts, gloire qui devait être le centre et le point de ralliement des âmes sauvées par l’opération de la grâce, et formées en un corps, l’Assemblée qui devait dès lors être instruite et gouvernée par ce même Esprit.
Jérusalem, qui avait été si longtemps la cité bien-aimée, ne s’étant pas soumise à ce témoignage de la gloire de Christ, perd la gloire d’être plus longtemps le centre et la source féconde de l’administration évangélique. Ses citoyens ont envoyé un message après le Roi qui était allé recevoir son royaume (Luc 19, 12-14), pour dire qu’ils ne voulaient point qu’il régnât sur eux ; et, à l’occasion de la mort d’Étienne, toute l’Assemblée est dispersée, « excepté les apôtres ». Là-dessus, Dieu, qui trouve toujours dans le mal l’occasion de déployer quelque grâce plus glorieuse que ce qui a été gâté, Dieu suscite, indépendamment de l’œuvre à Jérusalem, un apôtre né avant le temps, qui n’était « ni de la part des hommes, ni par l’homme », et révèle, en même temps, cette vérité infiniment précieuse, dont l’apôtre ainsi appelé devient le grand témoin, que l’Assemblée est une avec Christ glorifié dans le ciel, qu’elle est Son corps qu’Il nourrit et chérit comme Sa propre chair. Ainsi disparaît ce que Pierre avait annoncé aux Juifs, c’est-à-dire que Christ reviendrait vers eux en grâce comme à un peuple subsistant devant Lui. Il s’agit dès lors pour nous des espérances qui se rattachent à Christ dans le ciel, à Sa venue pour nous prendre à Lui, aux noces de l’Agneau, à l’union de l’Épouse avec l’Époux dans le ciel. L’apparition de Christ au monde est entièrement en jugement, quoique pour la délivrance d’un résidu. Cela est, quant au ministère et à l’administration de l’Assemblée, un point de progrès dont les résultats se font bien voir à nous.
À la suite de la pleine révélation de l’union de Christ et de l’Assemblée, nous trouvons dans les écrits de l’apôtre Paul un développement beaucoup plus grand des dons de l’Esprit Saint, en rapport avec la position de celui qui, comme membre du corps de Christ, possédait tel ou tel don. Toutefois, les mêmes principes sont exposés pratiquement dans les écrits de l’apôtre Pierre.
De l’élection et des dons comme puissance du ministère
Nous avons déjà vu, et nous en avons en Paul un exemple très frappant, que la souveraineté de Dieu se manifeste dans le ministère comme dans le salut. « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi », dit le Seigneur, « mais c’est moi qui vous ai choisis et qui vous ai établis, afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure » (Jean 15, 16). « Cet homme m’est un vase d’élection », dit Jésus à Ananias, « pour porter mon nom devant les nations » (Act. 9, 15). De sorte que, comme cette souveraineté de Dieu exclut le choix de l’homme, de même aussi celui qui nie l’existence d’un ministère ayant une diversité de dons, se trouve en opposition avec cette souveraineté. Mais ici, en examinant la Parole, nous trouverons cette souveraineté exercée par le Saint Esprit au milieu de l’Assemblée ; et nous trouverons aussi que c’est Christ qui donne, et que c’est Dieu qui opère tout en tous.
La première chose sur laquelle l’apôtre insiste quant à son ministère, à la suite de la position remarquable que le Seigneur lui avait donnée, c’est qu’il n’était ni par l’homme, ni par l’intermédiaire des hommes, mais par Jésus Christ et Dieu le Père (Gal. 1, 1).
On lui objectait souvent qu’il n’était pas des douze, qu’il n’était pas un apôtre régulièrement établi ; ce sujet est fréquemment discuté dans les épîtres aux Corinthiens et aux Galates. L’apôtre prend soin de les assurer que son ministère était indépendant de l’homme, qu’il n’avait pas consulté le sang et la chair, mais qu’il avait prêché Christ aussitôt que Dieu l’avait révélé en lui dans ce but. Il fonde son autorité sur les preuves de puissance spirituelle qu’il avait données. Plus tard, il confère avec les autres apôtres ; il leur expose son évangile, mais il ne reçoit rien. Dieu prend soin qu’il y ait unité entre Antioche, alors centre d’évangélisation pour les Gentils, et Jérusalem, anciennement le seul siège, peut-on dire, de l’Assemblée ; nous voyons une coopération[4] selon les besoins ; Barnabas cherche Saul qui s’était retiré à Tarse ; et Silas se décide à rester à Antioche, y trouvant une œuvre à faire. Paul s’associe plus tard plusieurs ouvriers, et engage Apollos à aller à Corinthe ; Apollos ne le veut pas. Mais, au milieu de toutes ces circonstances variées, Paul répudie d’une manière positive toutes les prétentions de ce judaïsme qui réclamait, en même temps que l’établissement d’autres principes judaïques, ou pour les faire valoir plus facilement, une mission humaine qui autorisât son ministère. En effet, ce n’a été ni la sagesse, ni l’arrangement des hommes qui ont porté l’évangile au-delà de Jérusalem ; ç’a été la dispersion de l’Assemblée tout entière à l’exception des apôtres. Tous ceux qui avaient été dispersés, allaient partout prêchant la Parole ; la main du Seigneur était avec eux et plusieurs crurent ; leur mission était celle que leur donnaient la persécution et leur propre zèle[5].
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En réalité, l’Assemblée ne peut pas être une source de ministère ; car cette expression de la puissance du Saint Esprit, laquelle est le ministère, précède nécessairement, en plusieurs choses, l’existence de l’Assemblée ; elle est créée, appelée, formée par son moyen. Le ministère apostolique, ou au moins celui d’évangéliste, précède nécessairement, par la nature même de la chose, l’existence de l’Assemblée (quoique, l’Assemblée une fois formée, ses membres puissent devenir des évangélistes) ; et la mission de ces apôtres, ou évangélistes, doit être directement de la part de Christ et du Saint Esprit ; sans cela, leur mission est absolument nulle. Les douze apôtres avaient déjà mission de la part de Christ pendant Sa vie, quoique, après Sa résurrection, ils aient été spécialement doués. Paul, quant à son appel, avait mission de la part de Christ en gloire, ayant vu le Juste et entendu une voix de Sa bouche ; quant à sa séparation pour une œuvre spéciale, il avait reçu la direction immédiate du Saint Esprit à Antioche. Les évangélistes partaient quelquefois du sein d’une assemblée, comme Paul d’Antioche ; ils rapportaient à l’assemblée avec joie ce que Dieu avait fait par leur moyen ; mais ils tenaient leur ministère de Dieu et de Jésus Christ ; c’était au nom, et par l’autorité de Dieu et du Seigneur Jésus, qu’ils agissaient ; et ils n’en reconnaissaient aucune autre. Ils ne pouvaient plaire aux hommes et être les serviteurs de Jésus Christ. C’était, et Paul ne le cachait pas, peu de chose pour eux d’être jugés d’un jugement d’homme ; Celui qui les jugeait était le Seigneur. Les pharisiens, il est vrai, mettent en question la conduite de Pierre dans le cas de Corneille ; mais le Dieu de toute grâce n’avait pas attendu leur décision. L’Esprit Saint venant sur les Gentils avait justifié les fruits de la grâce et de l’obéissance dans l’apôtre accusé, et fermait la bouche à ceux qui se plaignaient de l’étendue et de la puissance de cette grâce.
Je vois deux choses dans l’exercice de ce ministère dans l’Assemblée comme corps : 1° l’ensemble de ce corps dont Christ, l’homme glorifié, est le Chef et la tête, et ainsi la position de ce corps comme de la part de Dieu dans le monde, pour y représenter la gloire de son Chef ; et 2° ce corps considéré comme le corps de Christ Lui-même, l’objet chéri de Ses affections, l’Épouse qu’Il a aimée, pour laquelle Il s’est donné, qu’Il nourrit comme Sa propre chair. — L’Assemblée, instrument de la gloire et de la puissance de Dieu dans le monde, et l’Assemblée, objet chéri des affections de Christ.
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Les caractères des dons dépendent, il me semble, de ces deux relations. La première de ces positions est beaucoup plus générale, et, en même temps, elle tient plus à la responsabilité de l’Assemblée ; l’autre renferme ce que Christ fait, et, au fond, ne peut pas manquer de faire pour Son Assemblée, Son Épouse. Dans les deux cas, l’unité du corps uni à Christ est toujours en vue. Dans l’un, nous avons le Seigneur Jésus, son Chef dans le ciel, mais qui, en même temps, nourrit Son corps sur la terre jusqu’à ce que tous parviennent à Sa stature parfaite. Dans l’autre, quoique, personnellement, Jésus soit nécessairement en dehors du ministère, Lui et l’Assemblée sont néanmoins vus comme un ensemble où Dieu agit devant le monde en Son nom, comme il est dit en 1 Corinthiens 12, 12 : « Ainsi aussi est le Christ ». C’est pourquoi dans ce cas (voir le même chapitre), la puissance spirituelle du christianisme est mise en contraste avec l’idolâtrie. Premièrement, nous avons ce qui distinguait le Saint Esprit des démons (car il s’agit de puissances spirituelles) : ainsi « nul homme parlant par l’Esprit de Dieu ne dit : « anathème à Jésus » ; et nul ne peut dire : « Seigneur Jésus », si ce n’est par l’Esprit Saint ». Secondement, il y avait diversité de dons, mais le même Esprit ; diversité de services, mais le même Seigneur ; diversité d’opérations, mais le même Dieu qui opérait tout en tous. Ainsi l’Esprit, le Seigneur et Dieu sont présentés en rapport avec les dons, et il est ajouté, afin que nous voyions la source immédiate de ces choses dans l’Assemblée : « Le seul et même Esprit opère toutes ces choses, distribuant à chacun en particulier comme il lui plaît ».
La puissance du don venait du Saint Esprit (par la comparaison des versets 6 et 11, nous voyons la divinité du Saint Esprit) ; mais puisque l’Esprit agissait en chacun en vue de la gloire du Fils, comme le Fils l’a fait en vue de celle du Père, chacun devenait par son don serviteur de Christ, comme Christ est devenu Lui-même serviteur dans Son ministère. Le Saint Esprit agit souverainement, mais toujours dans l’accomplissement des conseils de Dieu (ainsi que le Fils vivifie ceux qu’Il veut) (Jean 5, 21) ; et l’Esprit étant témoin de la gloire de Jésus, Fils de l’homme et Seigneur, chacun de ceux en qui Il agit devient l’instrument obéissant de ce Seigneur. Ces opérations ne proviennent cependant pas d’une cause seconde ni d’aucun esprit inférieur, ni d’aucun ange ; ce sont les opérations de Dieu Lui-même, et les serviteurs ont affaire avec Lui. Ainsi l’apôtre, doué pour son apostolat par le Saint Esprit, s’appelle apôtre non de la part des hommes, ni par l’homme, mais par Jésus Christ et Dieu le Père. Il se nomme lui-même apôtre de Jésus Christ, serviteur de Dieu, et, en général, « par la volonté de Dieu ».
Dans la liste qui nous est donnée dans ce chapitre 12 de la première épître aux Corinthiens, nous avons, en général, tous les dons, qui sont, pour l’établissement du christianisme, des signes pour le monde, et des preuves de la gloire et de la victoire de Christ homme, et de Ses droits de gouvernement dans l’Assemblée. Les évangélistes et les pasteurs, ce qui s’appellerait maintenant ministère, ne s’y trouvent pas. C’est l’ensemble d’opération divine et de capacité dans le corps, plutôt que le soin que Christ prend du corps comme étant sien. Ainsi, sauf le don de docteur qui se rattache à celui de pasteur, tous les dons qui se trouvent ici sont maintenant perdus, au moins dans leur forme et dans leur caractère primitifs. Je parle simplement du fait. Je laisse à d’autres la tâche de dire pourquoi cela est arrivé, et jusqu’à quel point cela peut se justifier ou devrait l’être.
C’est un sujet très sérieux pour les âmes qui apprécient la gloire de Christ et de Son Assemblée, et qui reconnaissent la puissance du Saint Esprit.
Toutes ces choses, quoiqu’elles fussent dans un certain sens un témoignage de l’amour de Dieu, pouvaient s’exercer sans amour ; il s’agissait plutôt de puissance. Aussi l’apôtre nous présente-t-il une voie plus excellente. L’amour ou l’édification auraient dû en diriger l’exercice ; et, à Corinthe, ce n’était pas alors le cas. La discipline devait intervenir, comme l’apôtre nous l’enseigne dans ces chapitres. Les dons en eux-mêmes étaient plutôt l’expression de la puissance ; c’est pourquoi l’Esprit, en tant qu’Il exerce l’autorité de Christ dans l’Assemblée, règle et contrôle l’exercice des dons qu’Il a confiés à tel ou tel individu, et en réprime même l’exercice, quand on ne s’en sert pas en amour pour l’édification du corps. Voilà ce qui se trouve dans l’épître aux Corinthiens.
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Dans l’épître aux Éphésiens, ce n’est pas autant Dieu que nous voyons opérer dans le corps comme ensemble, et en employer les membres pour Son service afin de manifester Sa puissance ; c’est plutôt Christ descendu jusque dans les parties les plus basses de la terre, et remonté ensuite, afin qu’Il remplît toutes choses, ayant emmené captive la captivité et reçu des dons pour les hommes, dons par lesquels Il forme et nourrit Son Assemblée sur la terre pour se la présenter parfaite à la fin. Ainsi son unité, quoique au fond la même, est ici présentée comme le résultat de la grâce qui appelle ceux qui sont loin et ceux qui sont près, afin que Dieu fasse d’eux Son habitation par l’Esprit. C’est une unité de relation et de bénédiction, un seul corps, un seul Esprit, un seul Dieu et Père de tous, etc. (Éph. 4, 3-6) ; tandis que, dans l’épître aux Corinthiens, l’attention des chrétiens est dirigée sur leur condition comme tels, en contraste avec leur état dans l’idolâtrie, où il y avait plusieurs dieux et plusieurs seigneurs et, en réalité, plusieurs démons. C’était maintenant un Esprit qui faisait tout, un Seigneur, et un Dieu qui opérait tout en tous, et non pas des idoles muettes.
L’épître aux Éphésiens nous présente spécialement les privilèges de l’Assemblée unie à Christ. Dieu est le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, et aussi le Père de notre Seigneur Jésus Christ. À la fin du premier chapitre, Paul demande pour les croyants les bénédictions qui découlaient de ce titre de Dieu de Jésus Christ, savoir l’intelligence de la gloire de l’héritage de Dieu dans les saints, et de la puissance qui nous y a placés avec Christ, comme elle y a placé notre Chef Lui-même. Au chapitre 3, ayant développé « le mystère » qui lui avait été confié, savoir l’union des Juifs et des Gentils en un seul corps en Christ, afin qu’ils fussent l’habitation de Dieu par l’Esprit, étant sauvés et lavés par Christ et unis à Lui dans la gloire, il demande les bénédictions qui découlent du titre de Père de Jésus Christ, savoir : la connaissance de l’amour de Christ par la puissance de l’Esprit Saint, fortifiant l’homme intérieur, pour le rendre capable de jouir de ces choses afin d’être rempli jusqu’à toute la plénitude de Dieu. Voilà les sources infinies et fécondes de la bénédiction de l’Assemblée, et cela à la gloire de Celui qui opère en nous dans l’Assemblée pour toutes les générations du siècle des siècles. Mais, jusqu’à ce que nous soyons amenés à la perfection, ces bénédictions s’accomplissent par le Saint Esprit agissant en nous dans l’unité du corps, selon ce que Christ a reçu pour les membres de ce corps. Ayant tout accompli, Il est monté en haut, et Il a reçu des dons pour les hommes ; et Il a donné les uns pour être apôtres, les autres pour être prophètes, les autres pour être évangélistes, les autres pour être pasteurs et docteurs. On voit que les dons, présentés ici comme le fruit de l’ascension de Christ, ne sont pas la puissance agissant au-dedans dans le corps, et agissant au-dehors pour manifester la gloire de Dieu ; mais ils sont ce qui servait à établir et à édifier l’Assemblée, comme « habitation de Dieu » et objet de l’amour de Christ, afin que tous parvinssent à la mesure de Sa stature.
L’humilité, l’amour, les liens de la paix, voilà ce qui est présenté, tout premièrement, comme la marche digne de notre appel à être l’habitation de Dieu dans l’unité. Puis suivent les dons individuels : « À chacun… la grâce a été donnée selon la mesure du don de Christ », chef exalté de ce corps.
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Les dons dont il est question ici, sont proprement ce qui est ordinairement appelé ministère. L’apôtre ne parle pas de miracles, de guérisons, de langues. Ces choses, signes de la puissance devant le monde, n’étaient pas les canaux directs de l’amour de Christ pour l’Assemblée. Tout don est un ministère ; car, comme il y a diversité de dons, mais un seul Esprit, ainsi il y a diversité de ministères, mais un seul Seigneur. Par la possession d’un don, je deviens le serviteur de Christ, de qui, par l’Esprit, je tiens le don, et que l’Esprit révèle comme Seigneur.
Ainsi, tout don en exercice est un ministère, un service accompli sous une responsabilité envers Christ. Mais les dons, mentionnés au chapitre 4 des Éphésiens, sont plus spécialement ceux du ministère, du service rendu à Christ dans Son corps, « en vue du perfectionnement des saints, pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps de Christ ». C’était une œuvre, et non pas simplement des signes de puissance.
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Nous avons, en Éphésiens 4, cette énumération des dons : apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et docteurs. Les deux premiers, dans l’exercice de leurs fonctions les plus élevées, ont posé les fondements de l’Assemblée, soit par des révélations, soit par l’autorité de Christ qui leur était confiée ; c’est par cette dernière que les apôtres se distinguaient des prophètes. Un prophète révélait la pensée de Dieu, et Son œuvre, à cet égard, était accomplie. Un apôtre était envoyé directement, comme un architecte autorisé par Christ à bâtir Son Assemblée. Ils ordonnaient, exécutaient, surveillaient, gouvernaient, établissaient des autorités dans les assemblées, et prenaient connaissance, avec autorité, de ce qui s’y passait pour y mettre ordre. En un mot, ils étaient autorisés, de la part de Christ, à fonder et à bâtir Son Assemblée, à y établir des règles. Dans ce sens, il n’y a plus d’apôtres. Paul savait qu’après son départ il s’introduirait des loups ravissants. Pierre a soin, dans son épître, de leur rappeler ce qu’il leur avait dit.
Mais il me semble que, dans un sens inférieur, il peut y avoir des apôtres et des prophètes dans tous les temps. Barnabas est appelé apôtre ; Junias et Andronique sont appelés apôtres ; et il est dit d’eux qu’ils étaient distingués parmi les apôtres (Rom. 16, 7) ; de sorte qu’il y en avait d’autres qui ne sont pas nommés.
Quant à la Parole révélée de Dieu, elle est complète ; quant à l’autorité de fonder l’Assemblée, elle n’existe plus. Ni les douze, ni Paul, n’ont eu de successeurs. On ne peut pas fonder deux fois ; mais on peut agir dans une responsabilité extraordinaire comme envoyé de Dieu, et par une foi qui tient à des communications données à celui-là seul qui en jouit (quoiqu’il n’y ait point de nouvelle vérité qui ne se trouverait pas dans la Parole), une ligne de conduite qui ne se justifie aux autres que par ses résultats pour la bénédiction des enfants de Dieu ; voilà ce qui peut encore se trouver. On peut citer comme exemples, sans prétendre justifier tout ce qu’ils ont fait, un Luther, un Calvin, un Zwingli, et d’autres peut-être. De même quant aux prophètes, quoiqu’il n’y ait point de nouvelles révélations de la vérité, il peut y avoir, comme procédant de Dieu Lui-même, une puissance d’application, aux circonstances de l’Assemblée ou du monde, de vérités cachées dans la Parole, telle qu’en pratique, ce ministère devient prophétique. D’ailleurs, tous ceux qui exprimaient la pensée de Dieu pour « l’édification » étaient appelés prophètes, ou au moins ils prophétisaient. Mais les apôtres ne parlent jamais comme si l’Assemblée devait subsister longtemps, ou comme si les fidèles auraient à attendre longtemps la venue de Christ.
Les pasteurs et docteurs, pour guider les brebis et les instruire, sont réunis dans un seul don (car l’Esprit Saint parle de l’édification), quoique le don de docteur soit présenté séparément ailleurs. C’est par ces dons que Christ nourrit, soigne et fortifie les brebis, comme c’est par les évangélistes qu’Il les appelle et les amène à Lui. La distinction entre docteur et pasteur se voit aisément, bien qu’ils soient réunis ; car l’un s’occupe de la doctrine, l’autre des brebis ; distinction évidente, mais très importante, parce qu’il y a un intérêt d’affection dans les progrès des brebis, un exercice de cœur dans le don de pasteur, un soin des brebis que le simple fait d’enseigner ne suppose pas. C’est ainsi que ce don devient l’occasion des plus douces affections et des plus forts liens, comme celui d’apôtre l’était aussi, et comme l’est encore celui d’évangéliste à l’égard de ceux qui sont convertis par son moyen.
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J’ajoute que l’apôtre ne parle pas ici des dons, mais des personnes qui les possèdent. Lui a donné les uns comme pasteurs et docteurs, etc. Le don, sans doute, était dans le vase ; mais Dieu l’attachait à la personne, et cette personne, connue par son don, était donnée à l’Assemblée. On ne peut pas être uni à un don, mais à une personne. Dieu n’a pas donné simplement un apostolat, mais un apôtre. On peut, sans doute, concevoir que celui qui possède le don soit infidèle, et même que le don soit retiré, ou que du moins il ne soit pas exercé ; mais, en général, il est question d’une personne ayant une certaine fonction qui lui est confiée d’une manière permanente ; il s’agit d’une jointure dans le corps, ce que cette jointure reste toujours.
Responsabilité du ministère
De plus, l’exercice du don, quoique assujetti aux directions de la Parole, ne dépend nullement de la volonté du corps, mais de celle du Chef. Il a donné, Il a placé telle et telle jointure dans le corps ; et elles sont responsables au Chef de l’accomplissement de leurs fonctions. On conteste la sagesse du Chef, si l’on conteste l’emploi du don. Cette responsabilité doit s’exercer en amour et pour l’édification — non autrement ; mais on ne peut mettre de côté la responsabilité envers Christ, ni toucher aux droits de Christ quant au service de Son serviteur.
Les circonstances de l’Assemblée peuvent occasionner des difficultés à cet égard ; mais l’humilité et la fidélité au Seigneur sauront toujours que faire. L’amour et l’obéissance trouvent toujours un chemin. L’Esprit sera toujours avec celui qui obéit à Christ dans un esprit d’amour. Cette responsabilité de l’individu envers Christ est de toute importance ; aussi importante à sa place, quant au service découlant d’un don, que quant à la conduite morale. Tout ce qui porte atteinte à cela, porte atteinte aux droits de Christ et à la responsabilité à laquelle personne ne peut se soustraire. On voit quelquefois les deux choses détruites ensemble par l’esprit du christianisme corrompu. On soustrait les hommes à leur responsabilité individuelle en fait de devoirs moraux, ainsi qu’à leur responsabilité envers Christ dans l’exercice de leur don ; mais Dieu n’abandonne jamais Ses droits sur eux.
Empêcher ce service n’empêche pas les hérétiques ni les faux docteurs. La chair dans le plus vrai chrétien doit être réprimée partout ; elle doit l’être dans l’emploi ou l’abus des dons réels ou supposés aussi bien qu’en d’autres choses. La chair n’est jamais un don de Dieu. Je ne saurais penser que fortifier le sentiment de responsabilité individuelle, soit ouvrir la porte à la chair.
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Ces dons placés dans l’Assemblée comme un tout, deviennent, dans le corps de Christ, des jointures et des liens ; et c’est dans l’Assemblée, dans le corps, qu’ils sont placés. Un don est un don dans le corps, et pour tout le corps, comme un membre du corps humain fonctionne pour l’ensemble. Mon œil voit pour tout mon corps ; mon pied marche pour tout mon corps. Les donner comme charge dans ce qui n’est pas le corps, c’est les disloquer. Ils peuvent, il est vrai, être exercés dans une localité donnée, mais comme l’expression de la grâce et des droits de Christ ; et cette grâce et ces droits de Christ s’étendent à tout le corps. Souvenons-nous qu’ils ne doivent jamais s’exercer par la volonté de l’homme. Où cette volonté entre, le péché entre aussi. Cela peut arriver comme tout autre péché, mais c’est un sujet de discipline comme tout autre péché ; on le voit dans l’abus du don des langues à Corinthe. D’un autre côté, l’esprit étroit de l’homme est corrigé souvent par les droits universels et inaliénables de l’Esprit de Dieu, suprême et un dans tout le corps. Nul arrangement d’homme ne peut se substituer à Ses droits ; mais Lui, comme nous l’avons vu, a le droit de diriger l’exercice de tout don individuel. C’est Lui qui exerce le gouvernement de Dieu dans l’Assemblée.
Ajoutons qu’il est bon de se souvenir que les dons ne s’exercent pas nécessairement dans une assemblée. Placés dans le corps, c’est dans le corps qu’ils s’exercent, bien que ce soit souvent sans doute dans une assemblée ; mais ils s’exercent aussi en d’autres occasions.
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Outre les deux que nous venons de considérer, il y a d’autres passages pratiques très précieux, qui traitent le sujet du ministère dans ses rapports les plus élevés avec la gloire de Christ et de Dieu. Nous ne voulons pas les passer sous silence.
Le premier de ces passages (Rom. 12) insiste particulièrement sur la modestie qui conduit le serviteur de Dieu à se renfermer dans l’emploi assidu et fidèle du don qui lui a été confié.
Le second (1 Pier. 4) demande que, si quelqu’un parle, il parle comme de la part de Dieu, afin que la gloire en revienne à Dieu.
« Je dis à chacun de ceux qui sont parmi vous », telles sont les paroles de l’apôtre Paul, « de ne pas avoir une haute pensée de lui-même » (que la Parole de Dieu est douce et bonne, encourageante et en même temps saine pour le cœur !), « au-dessus de celle qu’il convient d’avoir… selon la mesure de foi que Dieu a départie à chacun… Or ayant des dons de grâce différents, selon la grâce qui nous a été donnée, soit la prophétie, prophétisons selon la proportion de la foi ; soit le service, soyons occupés du service ; soit celui qui enseigne, qu’il s’applique à l’enseignement ; soit celui qui exhorte, à l’exhortation ». Ici, remarquons aussi que nous ne trouvons pas seulement des dons spéciaux comme jointures dans le corps, mais en général l’emploi humble et fidèle du talent confié au serviteur, talent avec lequel il trafique selon sa responsabilité envers le Maître duquel il l’a reçu.
Dans 1 Pierre 4, 10, même responsabilité agissant en amour envers les autres. « Suivant que chacun de vous a reçu quelque don de grâce, employez-le les uns pour les autres, comme bons dispensateurs de la grâce variée de Dieu. Si quelqu’un parle, qu’il le fasse comme oracle de Dieu ». — Je sais que bien des personnes craignent un tel principe ; mais cela ne change pas la vérité. Si quelqu’un ne me parle pas comme annonçant la vérité de Dieu, je ne sais pas du tout pourquoi il me parle. C’est du reste ce que l’apôtre dit ; non pas : Selon la parole de Dieu, comme quelques-uns traduisent, mais : Comme oracle de Dieu, comme annonçant la parole de Dieu. C’est ce que fait tout homme qui prêche l’évangile ; il ne doute pas de la certitude de ce qu’il dit. Si l’on n’a pas cette certitude, on ne doit pas enseigner. Autre chose la prétention à l’infaillibilité, autre chose la certitude que nous possédons les pensées de Dieu, et que, en telle ou telle occasion, nous les annonçons de Sa part et selon Sa volonté.
Cette responsabilité empêcherait souvent de parler quand on n’est pas enseigné de Dieu. Et si, comme les Béréens, on juge par la Parole ce qu’un apôtre même dit, il n’y a point de danger. Il ne s’agit pas de nouvelles révélations, ni de recevoir sans examen les choses que l’on entend ; mais celui qui parle doit avoir l’assurance que ce qu’il dit est la pensée de Dieu, et que ce ne sont pas simplement ses propres pensées. Si quelqu’un entreprend de m’enseigner, et que je lui demande : Êtes-vous sûr que cela vient de Dieu, que c’est la vérité de Dieu, et que Dieu veut que vous me l’enseigniez ? et qu’il me dise qu’il n’en est pas sûr, quelle confiance puis-je avoir en lui ? Supposons même qu’il réponde qu’il en est sûr, je dois toujours l’examiner par la Parole. Plus on place celui qui parle sous une telle responsabilité, plus il y aura de sérieux et de sobriété dans son enseignement ; et, s’il y a de l’amour et un vrai don, il ne reculera pas devant cette responsabilité. S’il le fait, qu’il réfléchisse à la parabole du serviteur qui enterra son talent. S’il n’y a pas chez lui assez d’amour pour trafiquer à cause de la responsabilité, il est exactement dans le cas de ce méchant serviteur ; il n’agit pas selon la grâce. Cela nous rappelle ce grand principe : responsabilité directe à Christ qui nous a confié le talent ; responsabilité à laquelle nulle relation humaine ne peut nous soustraire. Les droits de Christ et Son jugement sont toujours là.
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Responsabilité, puissance, liberté selon l’Esprit, et la chair bridée, tels sont les grands principes de la marche chrétienne à l’égard du ministère, marche dont l’amour sera toujours le ressort, le mobile et le but. — Un service qui se rapporte à Christ comme entièrement au-dessus de l’homme, sans quoi la responsabilité à Christ est détruite ; un service qui agit dans l’unité de tout le corps, autrement l’unité d’un seul Esprit est niée ; tel est l’ordre que l’Esprit Saint seul peut produire, parce que Lui seul peut faire disparaître l’homme et soumettre sa volonté, en lui communiquant une liberté qui n’est pas la liberté du moi, mais celle de l’Esprit de Dieu ; liberté qui reconnaît toujours avec joie, et comme sa félicité, l’autorité du Seigneur et une soumission entière à Sa volonté ; liberté qui n’existe que pour Le servir, et qui considère l’indépendance comme le misérable orgueil du péché.
Celui qui parle des droits des hommes, soit d’un individu, soit de l’humanité, ne parle que de péché. Celui qui ne reconnaît pas les droits du Saint Esprit résiste à la souveraineté de Dieu, qui, par le moyen de ces dons, exalte sur la terre ce Jésus qui l’a autrefois visitée dans l’humiliation. L’Assemblée, demeure du Saint Esprit Lui-même sur la terre, voilà la grande vérité du ministère, et de la gloire de Christ, et de Son service sur la terre. La présence de Dieu donne la joie, la liberté, la responsabilité et le sérieux. L’homme, dans la présence de Dieu, est mis de côté quant à sa vanité et à son orgueil, et il est fortifié dans son service et sa fidélité.
Conclusion
Tels sont la source, la puissance et l’ordre du ministère, comme il nous est présenté dans la Parole de Dieu.
Essentiel au christianisme, parce que le christianisme, selon l’activité de l’amour de Dieu, cherche ce qui était perdu, rendant témoignage à l’œuvre et à la victoire de Jésus, par lesquelles les perdus peuvent être sauvés — ce ministère de Jésus qui seul est digne d’être ainsi glorifié, reçoit toute sa puissance et a sa seule source dans l’Esprit Saint envoyé du ciel. C’est le ministère de l’Esprit Saint dans le choix et l’emploi des serviteurs de Christ. En tout cela, Dieu est souverain. L’exercice des dons qu’Il dispense est réglé par le Saint Esprit agissant d’une manière souveraine dans l’Assemblée. La Parole nous en fournit les preuves et les exemples. Comme source ou comme autorité du ministère, l’homme n’entre pour rien dans son exercice que par le péché.
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On verra que je n’ai pas touché la question des charges locales, comme ne ressortissant pas exactement à mon sujet. Il est évident que l’apôtre Paul et ses délégués établirent, sous sa direction, plusieurs anciens dans les assemblées qu’il avait réunies, et que des serviteurs et même des servantes des assemblées, avaient été, au moins dans quelques cas, établis pour les affaires temporelles et pour les besoins auxquels la charité de ces assemblées pourvoyait. Pierre parle des anciens d’une manière beaucoup plus vague. Il n’y a point de preuves que des anciens aient été nommés parmi les Hébreux convertis. Il paraît plutôt que les hommes graves et considérés y agissaient sous leur propre responsabilité, responsabilité placée sur eux par l’amour. Dans l’épître aux Corinthiens, où les détails de la discipline sont donnés, il n’est pas fait mention d’anciens. Le Saint Esprit a peut-être permis cela pour que nous ayons ces choses directement de la main de l’apôtre. C’est dans la seule épître aux Philippiens, je crois, que nous avons ces mots : « avec les surveillants et les serviteurs ».
L’état de ruine où se trouve aujourd’hui l’Assemblée agit plus directement sur l’ordre apparent du côté des charges que sur le ministère même, parce que l’homme peut entrer plus facilement dans ces matières par des arrangements extérieurs ; mais il ne faut pas confondre les dons, et le service qui en découle, avec des charges. Au reste, le Saint Esprit suffit pour l’Assemblée à cet égard comme pour tout autre besoin, pourvu qu’elle prenne la position où le Saint Esprit la voit. L’amour suffit alors à tout ce que Dieu demande, et fera le meilleur profit de tous les moyens de bénédiction que Dieu accorde ; et Il accorde toujours ce qui convient à Sa gloire, et au vrai bien-être de Son peuple fidèle.
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Je ne vois pas plus de difficulté réelle, quant à l’autorité, que pour ce qui regarde le ministère de la Parole, parce que l’autorité dans l’Assemblée n’est pas une place avec certaines attributions limitées par une loi écrite, ni quelque chose de confié par les hommes, jaloux de voir dépasser l’autorité qu’ils ont donnée par la convoitise du pouvoir, par l’ambition du dépositaire. L’autorité dans l’Assemblée est toujours, comme le ministère de la Parole, le fruit de la puissance du Saint Esprit sur la conscience, puissance qui, du reste, ne manquera pas. Là où elle existe, Dieu légitimera, même par des châtiments, l’autorité de Son Esprit qu’Il a placé dans un homme, si cette autorité est méprisée. La discipline de l’Assemblée la légitime aussi dans certains cas ; on peut en voir des exemples dans l’épître aux Corinthiens. Si l’on croyait seulement à la présence de Dieu dans l’Assemblée, on ne douterait pas qu’Il ne pût la forcer au respect qui Lui est dû, et cela par l’autorité qu’Il a confiée à qui que ce soit.
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Quant à l’esprit dans lequel ce ministère devrait être exercé, je n’en dis rien, parce qu’il ne convient pas que j’en parle. Un renoncement entier à soi-même (et cela va très loin quand on connaît la subtilité du cœur) est le seul moyen de marcher avec la pleine bénédiction qui appartient à cette heureuse position de service envers Dieu, nos frères et les hommes. Souvenons-nous toujours que si, par la puissance de Dieu, nous sommes libres à l’égard de tous les hommes, et responsables à Dieu seul de l’emploi du don qu’Il nous a confié, c’est afin que nous soyons les serviteurs de tous. Souvenons-nous que personne ne peut s’affranchir lui-même ; et, si l’amour de Dieu nous a donné la liberté, c’est afin que, par cet amour en nous, nous soyons les serviteurs les uns des autres. Il nous a délivrés de l’égoïsme, de l’indépendance, de notre propre volonté, pour agir comme Dieu agit, comme Il a agi en Christ : « non pour nous complaire à nous-mêmes, mais pour nous servir l’un l’autre en amour ».
Il n’y a rien de plus précieux dans ce monde[6] qu’un tel ministère. On saura bientôt combien de foi cela demande, et combien de cette sainteté qui nous tient près de Dieu, pour que nous y puisions de la force. Que Dieu nous enseigne à nous tenir près de Lui à tout moment, afin que, dans les détails, nous ne suivions pas notre propre volonté, lors même que dans l’ensemble, nous chercherions à faire la sienne !
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Il se présente ici une remarque. Il faut de la grâce, dans ces temps-ci, pour réaliser en même temps les deux principes de la fraternité et de l’exercice des dons, parce que ceux-ci nécessairement donnent, extérieurement, une apparence de supériorité. La chair, il est vrai, peut se servir de ces dons pour chercher une supériorité terrestre, au lieu de l’amour et du service d’autrui. L’humanité, qui ne cherche que le bien de tous, rend tout facile. Dans le culte, il y a une entière égalité de position. Plus de sainteté peut donner une proximité de Dieu dans laquelle le culte sera plus vrai et sera l’expression plus juste, et en même temps plus rapprochée de Dieu, des besoins de l’assemblée. L’Esprit de Dieu agira plus immédiatement, et produira un développement plus intelligent des rapports des âmes avec Dieu ; de sorte qu’il peut y avoir une différence de capacité. Ce qu’il y a à chercher, c’est la spiritualité. C’est la principale chose. Le sacrificateur avait une place plus élevée que le Lévite, et tous les sacrificateurs étaient un, sauf le souverain sacrificateur. C’est notre position comme adorateurs. Il y avait une autre position très bénie, et où Dieu, comme souverain, assignait l’occupation : c’était celle des Lévites. La gloire du Lévite était de faire ce que Dieu lui avait donné à faire. Un Merarite n’avait pas à toucher aux vaisseaux du sanctuaire, ni un Kehathite les différentes parties du tabernacle. Les Guershonites et les Merarites avaient une charge plus étendue, plus de bœufs et de chariots ; mais il ne leur était pas confié des choses aussi précieuses qu’aux Kehathites.
C’est ainsi que l’apôtre raisonne relativement aux dons, en les comparant aux membres du corps. Tous les services, tous les dons sont inférieurs au culte. Dans la distribution des dons, Dieu est souverain, et met plus d’honneur extérieur sur ce qui est moins honorable. Les dons qui ne sont pas parés de tant de choses extérieures, sont quelquefois les plus précieux. Si l’on est dans un état peu spirituel, on regardera à l’apparence, et ainsi aux dons plus extérieurs : les Guershonites et les Merarites, avec leurs bœufs et leurs chariots, auront plus d’importance à nos yeux. Si nous sommes plus près du sanctuaire, nous discernerons que les Kehathites, qui portaient sur leurs épaules tous les objets renfermés dans les lieux saints, étaient autant, si ce n’est plus, honorés que les autres. Dans tous les cas, chacun sera estimé heureux, selon qu’il accomplira la tâche que Dieu lui a donnée à faire. En Éphésiens 4, nous voyons en première ligne ce qui est commun à tous ; ce qui est spécial à chacun vient ensuite, et ces dernières choses ne sont que pour effectuer les premières. Que la fraternité ne déplace pas les dons ; mais que les dons servent à la fraternité. Le sentiment de la présence de Dieu met toute chose à sa place.
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Le même Seigneur a dit : « Vous êtes tous frères », et : « Fortifie tes frères ». Pour pouvoir vraiment les fortifier, quelque expérience pénible de soi-même sera toujours nécessaire, comme dans le cas de Pierre. Ce n’est pas ainsi que l’homme l’arrangerait, mais c’est ainsi que Dieu l’a ordonné. Renier le Sauveur qu’il avait accompagné pendant trois ou quatre ans ; détruire, s’il l’avait pu, Son nom de dessus la face de la terre, voilà, quant à notre importance, la préparation par laquelle Dieu fait passer, quand Il veut mettre quelqu’un en avant dans Son service. Peut-être, de plus, une écharde dans la chair, parce que l’autre ne suffit pas. Car que sommes-nous, et qui est suffisant pour ces choses ?
Que Dieu Lui-même dirige Son Assemblée selon ses besoins, selon l’amour et les richesses de grâce qui sont en Jésus, par la puissance du Saint Esprit qui demeure en elle !
- ↑ Christ ayant remporté la victoire sur Satan et racheté l’Assemblée, Il a pu l’associer à Lui-même, assis dans les lieux célestes, et en faire le vase de la manifestation de cette puissance qui avait vaincu Satan, quoique Satan ne fût pas encore chassé. C’est ce que l’Assemblée aurait dû être en pratique ; c’est ce qu’elle a été au commencement.
- ↑ Voyez 1 Jean 4, 9, 17.
- ↑ Mais ici aussi, en général, c’étaient des manifestations de la puissance bienfaisante, qui, portant remède aux maux perceptibles à nos facultés naturelles, attiraient l’attention sur ce qui, dans la puissance de la résurrection de Jésus, ce grand miracle de l’intervention divine dans la misère humaine, portait remède à la racine du mal, au péché. J’ai dit : en général ; parce que nous avons des exemples des jugements du Saint Esprit au-dedans de l’Assemblée, comme dans le cas d’Ananias et de Sapphira, et sur le judaïsme apostat, comme dans le cas d’Élymas le magicien (Act. 5 ; 13).
- ↑ L’œuvre spéciale de Pierre et celle de Paul ont été reconnues de part et d’autre ; l’un étant, selon la volonté de Dieu, l’apôtre de la circoncision, l’autre de l’incirconcision. Remarquez ici que la mission générale des apôtres aux nations (Matt. 28), n’est pas même mentionnée dans cet arrangement.
- ↑ Lisez Galates 2, 1-10 ; Actes 8, 1-4 ; 11, 19-26 ; 15 ; 1 Corinthiens 16, 12.
- ↑ Nous ne parlons pas ici de la communion avec Dieu, mais des diverses positions dans lesquelles un homme peut se trouver.