Écho du Témoignage:Notes sur l’épître aux Éphésiens

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W. Kelly

Chapitre 1

Il doit être évident, même pour le lecteur le plus indifférent de cette épître, que nous nous trouvons sur un terrain éminemment saint et élevé. Que personne ne suppose qu’en disant cela on porte atteinte à d’autres portions des Écritures inspirées. Mais qui peut nier que Dieu, en révélant Sa pensée, ait trouvé bon d’employer des instruments différents et de leur assigner des mesures différentes ? Il aurait pu, s’Il avait voulu, en employer un seul pour tout écrire. Il aurait pu se révéler par tous selon la plénitude de la hauteur de Sa propre gloire, et rien de plus. Mais nous pouvons être tout à fait sûrs que les voies de Dieu sont aussi admirables dans les formes que prend Sa révélation, que dans les autres choses qu’Il a faites à Sa louange. Ces manières diverses de développer Sa nature et Son caractère, Ses conseils et Ses voies, manifestent Sa gloire sous un jour infiniment plus béni que s’il n’y avait eu qu’un seul jet uniforme de lumière. Et la même sagesse qui agit de la manière qui contribue le plus à Sa majesté et à Sa louange, est précisément ce qui est adapté aux besoins de Ses enfants, et efficace pour leur bénédiction. Ai-je besoin de dire qu’une révélation, tandis qu’elle vient de Dieu, est pour Son peuple ? Sans doute elle Le glorifie en effet ; mais Dieu, quand Il parle, a un objet en vue, et Il pourvoit, dans Sa bonté, aux besoins de ceux auxquels Il s’adresse. Ainsi donc les révélations de Dieu, tandis qu’elles découlent de Dieu et sont dignes de Dieu, présupposent nécessairement la condition de l’homme, et s’y adaptent. Or tout cela, loin de diminuer au moindre degré la gloire divine qui se manifeste dans les parties successives de la Parole de Dieu, la rehausse au contraire infiniment, et montre qu’elle est de Lui, n’en donnant point de plus grande preuve que la manière merveilleuse dont elle convient à de pauvres pécheurs, retirés de leur état de misère, en Sa riche miséricorde, et adoptés en Sa faveur par la foi dans le Christ Jésus.

Or de toutes les épîtres de saint Paul, il n’en est aucune, que je sache, qui s’élève à la même hauteur que cette épître aux Éphésiens ; et l’on ne saurait douter qu’il y eût harmonie entre la condition de ces saints eux-mêmes, et la manière ainsi que la mesure des communications que leur fait l’Esprit. Nous trouvons la même chose ailleurs. Lorsqu’Il s’adresse aux saints à Rome, Il ne les appelle pas une église ; ils étaient même encore à l’état d’enfants. Il y avait là des saints de Dieu bénis ; mais l’assemblée n’avait pas été fondée par un apôtre. Des années s’écoulèrent, avant que jamais apôtre allât à Rome. Dieu voyait bien que cette cité même de Rome s’arrogerait des droits exorbitants d’un caractère spirituel. Il prit donc soin que des localités moins importantes, telles que Corinthe, etc., eussent un apôtre pour y fonder des églises et pour y travailler pendant un temps considérable ; tandis que le grand centre de la gloire du monde demeura sans être visité par un apôtre, jusqu’à ce que plusieurs s’y trouvassent rassemblés, par le moyen de personnes qui s’y étaient rendues pour une cause ou pour une autre. Quand nous considérons les circonstances des saints de Rome, nous pouvons comprendre la convenance qu’il y avait qu’une épître leur fût adressée, qui ressemble beaucoup à une exposition complète et succincte de la doctrine chrétienne depuis l’alphabet même de la vérité. Et par conséquent la toute première chose que nous y trouvons démontrée, après l’introduction, c’est la ruine totale de l’homme, et de l’homme envisagé sous tous les points de vue — de l’homme examiné, et pesé en la balance de Dieu, en commençant depuis le déluge. Après que l’homme eut possédé une connaissance de Dieu d’une nature extérieure, les hommes « ayant connu Dieu, ils ne l’ont point glorifié comme Dieu ». De fait, l’origine de l’idolâtrie nous y est montrée, et nous avons aussi le temps après le déluge avant l’entrée de l’idolâtrie. Les versets dans Romains 1, auxquels j’ai fait allusion, portent sur le temps où il y avait simplement la race qui possédait la connaissance de Dieu. Mais l’homme s’en éloigna et se corrompit ; et nous trouvons le terrible tableau de la dépravation humaine, tracé dans le premier chapitre. Puis nous avons l’homme philosophe ; et ensuite l’homme sous la loi — l’homme sous tous les points de vue — avant que le sujet de la rédemption soit traité, ou qu’il soit fait aucune mention de la manière dont on peut être justifié. Voici la raison : l’apôtre n’ayant jamais été à Rome, les saints qui s’y trouvaient, étaient comparativement ignorants, et leur état exigeait qu’ils fussent instruits quant à la nature de la chute et ses conséquences fatales. Ils avaient besoin d’apprendre ce qu’était l’histoire de l’homme, comme Dieu la voit, et selon les pensées de Dieu. Nous avons par conséquent l’homme présenté comme ruiné en toute manière, sans qu’il y ait de secours pour lui, ni dans la créature, ni dans la loi, ni dans aucune autre chose. Le résultat est donc qu’« ils se sont tous détournés (du droit chemin) » ; « il n’y a point de juste, non pas même un seul ». En un mot, toute bouche est fermée, et le monde entier est devenu coupable devant Dieu. Alors, et non auparavant, nous trouvons la provision que Dieu a faite pour l’homme, en Sa miséricorde et Sa justice, dans les chapitres 3 et 4 ; et depuis le chapitre 5, des conséquences sont présentées et des difficultés levées, et tout se termine par la conclusion triomphante du chapitre 8.

Quel sommaire important de la doctrine chrétienne, commençant par l’état actuel de l’homme, Juif ou Gentil, et conduisant jusqu’à la ferme position que Dieu a donnée à celui qui croit en Christ — mort et ressuscité ! Mais dans tout cela, quelle qu’en soit l’importance, vous n’avez que ce qui est individuel. Ce peut être l’homme perdu ou l’homme sauvé ; mais vous n’avez rien touchant l’Église. C’est ce qui appartient à ceux qui sont membres de l’Église, mais rien n’apparaît comme l’Assemblée de Dieu, envisagée comme telle. La ruine de l’homme et la rédemption, tel est le thème, avec les effets de la rédemption, et l’ordre des économies, et les devoirs pratiques qui découlent de tout cela. Mais dans l’épître aux Éphésiens, quelle différence totale ! Ici, pour parler comparativement, l’homme disparaît, et Dieu est envisagé comme agissant de Lui-même.

Dès lors il n’y a point de préface, ni aucune preuve de ce qu’est l’état de l’homme. Cela n’était pas nécessaire, et ce n’est pas le point de départ de l’enseignement dans cette épître ; il en est autrement dans celle aux Romains ; et rien ne peut être plus simple. Mais dans Éphésiens, au lieu de montrer que nous avons été retirés de l’abîme de corruption dans lequel l’homme demeure enseveli, la chose que l’apôtre fait tout premièrement, c’est de parler de Dieu dans le ciel. C’est Dieu, faisant pleuvoir des bénédictions sur l’homme, et non l’homme amené jusqu’à Dieu. C’est Dieu, manifesté dans les voies de Sa grâce et dans les pensées de Son cœur, avant même que le monde eût aucune existence, tout à fait en dehors de toute question de Juifs ou de Gentils. C’est Dieu, formant un plan de gloire et de béatitude, à Sa propre louange ; Dieu, trouvant Sa pleine satisfaction dans la manifestation de Sa bonté, et cela dans le dessein de répandre des bénédictions, et même la plus grande plénitude de bénédictions du caractère le plus élevé. Dès lors vous trouverez que ce n’est pas simplement Dieu, comme Dieu, agissant à l’égard de l’homme ; mais Il a Christ devant Lui, et par conséquent il n’y a aucune limite à la bénédiction. Il voulait avoir quelque canal de grâce envers nous pour le plein contentement de Son propre cœur. Or il n’y a aucun objet qui pût attirer et maintenir la pleine satisfaction de Dieu, aucun qui pût en soi-même être un objet propre à être contemplé avec délices, sauf un seul, savoir Christ. Quant aux anges, Il trouve à blâmer en eux, et pourtant ils sont saints. S’Il scrute ce qui est au-dessous des anges, qu’y a-t-il sinon un monde perdu dans le péché ? Ainsi il n’y a qu’un seul qui soit capable de satisfaire le cœur et les affections de Dieu — c’est Christ Lui-même.

Cette grande vérité ayant donc été présentée — Dieu bénissant, et Christ l’objet devant Dieu, par le moyen duquel Dieu va bénir, selon tout ce qui est dans Son cœur, nous trouvons aussi, que, comme Celui qui bénit, Dieu est nommé d’une double manière. « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ». Ces deux titres sont réellement la clef de l’épître. Et qu’on me permette d’insister fortement sur l’importance qu’il y a à peser les paroles que nous trouvons dans l’Écriture. Quand nous avons affaire aux hommes, nous ne devons pas tenir une personne pour coupable à cause d’un mot. Mais Dieu n’a aucun besoin d’excuses pour Sa Parole. Quelque indulgence que nous devions avoir pour les méprises les uns des autres, quand il s’agit de l’Écriture, l’occasion ne peut jamais se présenter. Quand nous nous approchons pour l’écouter, la seule attitude convenable, c’est de nous incliner et d’adorer. C’est pourquoi donc, dans cette épître, qui est une si pleine expression de Son amour, l’apôtre commence ainsi : « Béni soit le Dieu et le Père », etc. Il ne pouvait écrire aux Éphésiens sans éclater en louanges et en adoration envers Dieu. Vous le voyez ailleurs bénir Dieu, mais quand il le fait, comme dans 2 Corinthiens 2, 14, il y a des circonstances spéciales qui y donnent lieu. Mais ce n’est pas le cas ici. À Corinthe, il y avait eu une intervention bénie de la grâce de Dieu, abaissant les cœurs orgueilleux des disciples revêches qui s’y trouvaient, et les rendant honteux d’eux-mêmes. Mais dans Éphésiens, tout est en dehors de circonstances passagères, sinon que l’apôtre les voyait dans une telle condition d’âme, qu’ils étaient capables d’aller en avant avec Dieu et d’entrer dans Ses pensées et Ses conseils. « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ » : ce n’était pas à cause de quelque grâce ou consolation spéciale ; mais cela découle de ce que Dieu est toujours pour nous. Or c’est peut-être pour cela même que bien des chrétiens ne sauraient y entrer. Il en est qui sont disposés à être particulièrement frappés et touchés, de jour en jour, par des marques sensibles de la bonté de Dieu, et de temps à autre par des interventions extraordinaires de Sa providence. Peut-être sont-ils dans une grande épreuve, et Dieu en fait résulter aussi pour eux une nouvelle bénédiction. Mais ici les Éphésiens étaient si simples, et si prêts à aller en avant avec Dieu, que l’apôtre, au lieu d’être retenu par leur état, ne pouvait que s’exprimer en louanges et en actions de grâce. C’est une chose bien bénie quand une si heureuse communion nous est donnée dans nos rapports l’un avec l’autre.

Il est vrai, encore, qu’avant d’entrer dans ce que je vais tâcher de développer, il s’introduit lui-même comme apôtre. Il ne dit pas ici « serviteur » ou « esclave » ; il le fait en écrivant aux Romains : « Paul, esclave de Jésus Christ ». Il était vraiment l’esclave de Christ. Pourquoi Paul leur écrivait-il ? Il était Son esclave. N’appartenaient-ils pas à Jésus ? On ne sanctionnait dans ce temps-là aucune pensée comme « l’indépendance » moderne — rien qui ressemblât à la coutume d’avoir de petits districts ou de petites assemblées appartenant à tel ou tel homme ; mais c’était partout l’Église — l’objet des affections des serviteurs du Seigneur. Celui-là est un vrai serviteur qui est capable de réaliser qu’il est l’esclave de Jésus Christ ; et celui-là servira le mieux les âmes, qui réalise le plus ce que c’est que de servir le Seigneur. « Paul, esclave de Jésus Christ, apôtre appelé ». Il était apôtre par l’appel de Dieu. Dans ce temps-là, il n’y avait pas une telle chose qu’une congrégation adressant un appel ou vocation à un candidat. Paul était un apôtre appelé de Dieu ; et ils étaient des saints appelés de Dieu, et ils le savaient. Il leur était bien doux de penser qu’ils avaient été ainsi appelés. Selon leur mesure, ils marchaient dans le sentier de Christ, et l’apôtre était Son serviteur, et il était aussi apôtre. Son objet était de mettre en relief son apostolat. Mais ceux de Corinthe étaient en danger de commencer à douter de lui et de penser que c’était à Jérusalem qu’ils devaient regarder. Il reconnaît entièrement la position commune de frère ; mais si des personnes comme les Corinthiens levaient trop haut la tête, il dit simplement « apôtre », sans ajouter « esclave ». S’il s’élevait une dispute sur ce point, il prouve la réalité de son appel. J’ai montré ailleurs quelle force particulière il y a dans la manière dont il s’introduit lui-même en s’adressant aux Galates : « Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par le moyen de l’homme », etc. Ici vous trouvez tout d’abord de la controverse, mais d’un ton divin et d’une force divine. Il y avait de faux principes dans la Galatie, et, en conséquence, en écrivant aux saints, il emploie un langage énergique et pressant. Ils adoptaient des notions judaïques sur la succession terrestre. L’apôtre prend donc le terrain même le plus élevé, et montre que, tandis qu’il reconnaissait pleinement les douze à leur place, il ne voulait pas, pour ce qui touchait à la vérité de l’évangile, céder « par soumission, non pas même un moment » ; en sorte que l’épître entière porte l’empreinte de cette assertion, renouvelée de la manière la plus absolue, de l’appel de la grâce et de son caractère céleste, fondés sur la mort et la résurrection de Christ.

Dans Éphésiens, il n’a aucun but qui ait le caractère de controverse, ni de poser les fondements de la vérité chrétienne, comme dans le cas des saints de Rome. Toutefois il met en avant sa fonction apostolique : « Paul, apôtre de Jésus Christ ». Il montre pleinement quelle en était la source, savoir, cette même « volonté de Dieu » de laquelle découlait leur propre bénédiction. Il va retracer d’abord la bénédiction individuelle, puis celle qui concerne le corps. C’est tout à fait une méprise que de supposer que la dernière est une chose plus profonde que la première. Au contraire, nos bénédictions les plus élevées se rattachent à ce que nous avons comme individus. Tout en reconnaissant pleinement le caractère béni de ce qui se rapporte au corps, ce que nous avons individuellement est plus élevé encore ; et c’est la manière de l’Esprit de Dieu de commencer par cela, avant d’entrer dans ce qui est commun à tous. C’est pour cela, je pense, qu’il s’adresse ici aux saints comme tels : « Aux saints et fidèles qui sont à Éphèse dans (le) Christ Jésus ». Ils étaient l’Église à Éphèse, non seulement rassemblés d’une manière formelle, mais aussi d’une manière intelligente. Ils avaient eu l’apôtre Paul à Éphèse ; et il avait été l’instrument de Dieu dans cette œuvre. Il y avait douze hommes qui croyaient, avant que Paul y fût allé ; mais jusqu’à la visite de Paul, ils n’avaient jamais reçu le Saint Esprit après la Pentecôte. C’est la présence personnelle du Saint Esprit fondée sur notre foi en Christ mort et ressuscité, qui nous introduit dans le caractère propre à l’Église. Mais le Saint Esprit, outre qu’Il nous fait membres du corps de Christ, qui est l’Église, nous donne aussi la conscience de notre relation comme fils avec son Dieu et Père. Il s’adresse « à l’assemblée de Dieu qui est à Corinthe », comme telle, lorsqu’il parle de points qui concernent l’ordre et la discipline. Ici il va envisager l’Église sous un point de vue beaucoup plus élevé ; néanmoins il commence par ce qui est individuel : « Aux saints et fidèles qui sont à Éphèse dans (le) Christ Jésus, grâce et paix vous soient de la part de Dieu, notre Père, et de la part de notre Seigneur Jésus Christ ! ». Puis il introduit le double titre de Dieu auquel j’ai déjà fait allusion — le même que notre Seigneur annonça après qu’Il fut ressuscité d’entre les morts, et qu’Il envoya par Marie de Magdala, le premier message donné à Ses disciples : « Va vers mes frères, et leur dis : Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu » — non pas vers « le Dieu Tout-puissant », ni vers « Jéhovah ».

Notre Seigneur se trouvait dans une double relation envers Dieu ; Il était Fils de Dieu, non seulement comme personne divine, mais comme homme dans le monde (Luc 1), outre Sa gloire personnelle la plus élevée, qui brille partout dans l’évangile de Jean, etc. « La sainte chose qui naîtra (de toi) sera appelée Fils de Dieu ». Ce dernier titre se réfère à Christ, envisagé dans Son humanité en ce monde ; et par conséquent il n’est présenté que dans l’évangile de Luc, qui est d’une manière prééminente, la biographie humaine, si je puis le dire, de Christ. Mais on aurait pu ignorer, si Dieu ne nous l’avait dit, que dans Sa résurrection Il gardait cette même relation comme homme. Il nous enseigne que la mort et la résurrection Lui donnèrent le droit, selon la justice de Dieu, de nous placer dans Sa position. Ainsi donc Il put pour la première fois dire, dans la plénitude de signification que ces mots expriment : « Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu ». Il est maintenant non seulement « mon Père » et « mon Dieu », mais « votre Père » et « votre Dieu ».

La mort de Christ a complètement effacé tout ce qui était contre les enfants de Dieu ; la résurrection de Christ, après que la rédemption fut effectuée, Le mit à même de leur donner Sa place devant Dieu en résurrection et dans la relation de fils. Et quelle merveilleuse place que cela ! Quand nous pensons que maintenant, même pendant que nous sommes dans ce monde, notre Seigneur veut que nous sachions que nous sommes fils, en Lui et par Lui, devant notre Dieu, et que nous sommes doués d’une vie de résurrection — « vivants à Dieu dans (le) Christ Jésus » ; que nous sommes placés devant Dieu, sans une seule charge et sans aucune condamnation ; et cela parce qu’en grâce, Il s’est placé dans « la même condamnation » avec les coupables sur la croix ! Il était « la sainte chose » — nous étions sans sainteté, entièrement ruinés. Mais sur la croix Il a été fait péché pour nous, et Il est entré dans « la même condamnation » — la faisant sienne sur la croix ; et maintenant il n’y en a point pour moi. Je suis introduit dans la même place qu’Il prit comme l’homme ressuscité devant Dieu. Sans doute je ne parle pas maintenant de Sa gloire divine. L’idée que la créature, à quelque degré qu’elle fût bénie, pourrait être dans une position autre que celle d’élever ses yeux à Dieu et de L’adorer, ne saurait entrer dans un esprit renouvelé. Le Seigneur Jésus était Fils dans Sa nature divine de toute éternité ; mais comme homme aussi, Il était Fils ; et aussi comme ressuscité d’entre les morts. Et par Sa mort et Sa résurrection, Il nous introduit devant Dieu, devant Son Père, ayant la même position que Lui-même, tellement que nous sommes fils, absolument sans péché dans notre nouvelle nature, et affranchis de toute condamnation devant Dieu, parce que la vieille nature est déjà jugée. La nouvelle nature n’a pas besoin de quelqu’un qui meure pour elle ; mais la vieille nature en avait besoin ; et tout est fait. En Christ crucifié, Dieu condamne le péché en la chair, et, pour la foi, tout le mal a disparu. La bénédiction qui est à Christ est maintenant devenue la nôtre, et nous pouvons regarder en haut et dire : « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ». Une grande atteinte portée à la puissance pratique du christianisme vient de ce qu’on a reculé la bénédiction que le Saint Esprit nous attribue maintenant, jusqu’au moment de quitter le monde et d’entrer au ciel.

Supposez que vous disiez à la grande masse des enfants de Dieu sur la terre : Vous êtes « bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ », ils le regarderaient comme le plus haut degré de l’enthousiasme ou du mysticisme. Ils ne sont pas prêts pour recevoir de telles vérités, et il arrive, en général, ou bien qu’ils ne cherchent pas ce que le verset veut dire, ou bien qu’ils le réduisent à la simple expression de quelque sentiment d’émotion. Ils n’ont aucune idée que ce soit un fait actuel, vrai de tout chrétien. Quoique nous ne soyons pas encore manifestés dans cet état, ce n’est nullement une question de sentiment. Puissions-nous le croire ! Les sentiments peuvent me tromper, mais la foi ne le peut jamais. Si je vois une chose, c’est simplement mon œil qui voit. Si je crois une vérité, sur l’autorité de la Parole de Dieu, je la considère, en quelque mesure, pour ainsi dire, avec les yeux de Dieu. Le monde a une idée que la foi implique uniquement la confiance quant à une chose qui n’est pas sûre. Ce n’est pas le sens du mot « je crois », dans les choses de Dieu. Ma propre vision n’a qu’une pauvre portée de vue ; mais que dirons-nous de l’œil de Dieu ? Le croyant est placé sur le terrain le plus élevé ; il se repose sur la certitude de ce que Dieu dit. Le bonheur aussi en est le résultat ; car quand vous croyez, vous commencez bientôt à sentir. Si vous croyez que Dieu a effacé vos péchés, vous ne serez pas longtemps avant de commencer à en jouir, si même vous ne l’avez fait tout aussitôt. Si je me considère moi-même, je verrai toujours quelque chose de mal. Comment cela ? Mes péchés sont tous ôtés ; et pourtant, si je regarde au-dedans, je vois tant de ce qui est pénible, dégoûtant, humiliant. L’abolition du péché n’est pas une chose qui se passe dans mon cœur, mais une œuvre puissante que Dieu a opérée en la croix de Son Fils bien-aimé, une œuvre sur laquelle Il m’appelle à me reposer, parce qu’Il s’y repose Lui-même. Cherché-je quelque signe ou quelque marque en moi-même ? S’il en est ainsi, je n’en aurai jamais une assurance établie sur le vrai fondement. Si je pense que mes péchés sont nécessairement pardonnés, parce que je suis une personne changée (comme les hommes disent), puis-je jamais avoir une heure de paix réelle ? Le résultat est nécessairement, que plus une personne se juge elle-même, moins elle sera heureuse. Ce que Dieu met devant Ses enfants, c’est qu’ils devraient être entièrement heureux, dans la certitude que leurs péchés sont ôtés, par le moyen de l’effusion du sang de Christ, et pourtant qu’ils ne doivent rien épargner de ce qu’ils trouvent au-dedans d’eux-mêmes — se jugeant eux-mêmes jour par jour, parce que Christ a été jugé pour eux, et que Dieu a effacé leurs péchés, et qu’ils ne peuvent supporter de traiter légèrement ce qui a coûté le sang de Son Fils.

Ici pourtant, la première grande pensée, c’est que « le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ… nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ». Ce n’est pas la rédemption, quoique cela soit nécessairement basé sur elle. Je suis ici sur la terre, et pourtant je sais que je suis béni là où est Christ à la droite de Dieu. Ce n’est pas seulement que j’y ai des bénédictions ; mais je suis béni de « toute bénédiction spirituelle ». La bénédiction la plus élevée que Dieu puisse conférer, est ce qu’Il donne à chacun de Ses enfants dans les lieux célestes en Christ. Dans ces quelques mots nous contemplons la hauteur du merveilleux conseil de Dieu à notre égard et de Son merveilleux amour pour nous. Il nous a ainsi bénis selon la plénitude de la valeur de Christ à Ses yeux.

L’expression « les lieux célestes » est en contraste avec la portion des Juifs, qui étaient bénis dans les lieux terrestres. Si nous considérons Ézéchiel 36, cela pourra faire ressortir plus distinctement le caractère de nos bénédictions par opposition aux leurs. « Et je répandrai sur vous des eaux nettes, et vous serez nettoyés… Et vous demeurerez au pays que j’ai donné à vos pères, et vous serez mon peuple, et je serai votre Dieu ». Ainsi donc, il y a des grâces spirituelles mêlées à leurs bénédictions ; mais ils seront dans le pays de leurs pères, que Dieu fera posséder à la génération à venir. Ce sont surtout des hommes savants, mais sans spiritualité, qui font une confusion sur ces sujets. Si les lecteurs étaient seulement simples à l’égard de l’Écriture, ils ne tomberaient pas dans de telles méprises. Le prophète dit : « Vous demeurerez au pays que j’ai donné à vos pères ». Rien ne saurait être plus clair que cela. Il va bénir Israël sur la terre — dans leur âme aussi, sans doute ; mais la sphère de cette bénédiction, c’est la terre sainte. Il s’agit de Son peuple terrestre, et non de l’Église, comme nous le verrons plus bas. « Je multiplierai le fruit des arbres, et le revenu des champs, afin que vous ne portiez plus l’opprobre de la famine entre les nations ». La bénédiction est évidemment dans les lieux terrestres. Je ne trouverais pas à redire si des hommes pieux essayaient de donner à ces passages une tournure spirituelle, et de s’en servir pour prêcher l’évangile, pourvu qu’ils n’en effaçassent point les espérances prochaines d’Israël. En principe, le peuple dont il y est question, c’est Israël ; et ils doivent être bénis de cette manière-là. Nous voyons la terre de Palestine maintenant désolée comme un désert ; mais « le désert se réjouira… et fleurira comme une rose », en ce jour-là. Il y a certaines bénédictions, il est vrai, qui s’appliquent au croyant maintenant. Dans Jean 3, notre Seigneur fait ainsi allusion à « l’eau » et à « l’Esprit », avec une portée merveilleusement plus étendue et plus profonde. Mais je m’oppose à cette conclusion, que Dieu a abandonné Son peuple, et que cette prophétie touchant les lieux terrestres doit être confondue avec nos droits célestes. La terre et les bénédictions terrestres, voilà sur quoi l’Esprit de Dieu s’arrête ici. Pourquoi serions-nous jaloux, soit à l’égard des Juifs, soit à l’égard de la terre ? Dieu nous a montré une faveur tellement surabondante et souverainement excellente, que nous pouvons bien nous réjouir et Lui rendre grâces de ce que la terre est réservée pour Son ancienne nation.

Maintenant si, après avoir considéré ces choses — les bénédictions prédites pour Israël sur la terre — nous tournons nos regards vers nos propres bénédictions dans Éphésiens, quelle différence totale il y a ! « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ». C’est Dieu, se révélant de la manière la plus pleine que l’on puisse concevoir. Qui est-ce qui connaissait Dieu d’une manière prééminente, qui était l’objet de l’amour de Dieu comme nul ne l’avait jamais été auparavant ? Si jamais il y en eut un qui sondât la pleine signification des mots : « Mon Père », ce fut le Seigneur Jésus. Et quel autre que Lui mesura les profondeurs des mots : « Mon Dieu » ? Et pourtant maintenant cet Être béni, par la rédemption et par le don de l’Esprit, a rendu celui qui croit en Lui capable de jouir du même privilège que Lui-même. Et dans la proportion même que nous les recevrons avec simplicité et que nous jugerons la vieille nature (qui ne peut jamais y entrer, mais qui vient seulement, comme un épais nuage, couvrir notre bénédiction), nous entrerons dans la réalisation de nos bénédictions.

L’espérance d’Israël n’est pas intérieure seulement, mais extérieure, dans les lieux terrestres — de devenir le peuple élevé à la plus haute position ici-bas. Au contraire, la scène de nos bénédictions est dans les lieux célestes, et nous sommes maintenant bénis en Christ. En un mot, le chrétien est une personne qui appartient à la famille du Souverain. Il peut y avoir des raisons d’état, qui rendent désirable que l’héritier de la reine traverse, comme étranger, une terre étrangère, inconnu et sans être remarqué. Il en est ainsi du chrétien. Il n’est ni de ce monde, ni de ce siècle. Son corps est de la terre, mais ce qui fait qu’il est ce qu’il est, comme fils de Dieu, n’a rien à faire avec la scène ou les circonstances présentes. Il appartient entièrement à un Christ glorifié. Quand Dieu commence à agir à l’égard d’Israël, ce sera tout autre chose. L’attention du monde entier sera dirigée sur eux. Il fut un temps où, même au milieu de tout leur péché, les enfants d’Israël exerçaient une influence énorme dans le monde, quoiqu’ils ne fussent qu’une petite nation, et qu’ils n’eussent pour habitation qu’une étroite langue de terre. Leurs sacrificateurs et leurs rois abandonnèrent le vrai Dieu, qui là-dessus fit d’Israël la triste évidence de Ses jugements. Mais le jour approche rapidement où ceux qui frappèrent Christ reconnaîtront leur Messie rejeté, et alors brillera toute la splendeur à laquelle Israël est destiné par Dieu. Il le couronnera de toute sorte de bénédictions ici-bas. Toutes les nations de la terre se prosterneront devant Israël ; les rois seront ses nourriciers, et les reines ses nourrices. La chrétienté, méprisée comme une machine politique orgueilleuse et usée, et dégénérant de plus en plus dans l’apostasie, sera mise de côté comme Vasthi ; Dieu bénira Son peuple d’Israël, l’Esther du grand Roi, de toute bénédiction extérieure dans les lieux terrestres, non pas en se révélant comme le Dieu et Père du Seigneur Jésus Christ, mais comme le Seigneur Dieu, Jéhovah, le Très-haut, identifié enfin avec l’humble Jésus de Nazareth.

Est-ce là la manière dont il est parlé de nous ici ? Nullement. « Le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ… nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ ». L’Ancien Testament ne donne nulle part à un Juif l’espérance d’être béni en leur Messie. Être cohéritiers avec Christ, non seulement bénis par Christ, mais bénis en Christ, c’est une idée qui ne pourrait absolument pas entrer dans la pensée de l’Israélite le plus intelligent. En un mot, leur portion sera toujours sous leur Messie, d’être gouvernés par Lui comme un peuple terrestre. Mais notre portion, quant à nous qui croyons en Christ maintenant, sera d’avoir la même bénédiction que Dieu le Père confère à Christ ressuscité d’entre les morts. Qu’a-t-Il fait pour Christ ? Il L’a ressuscité, « et Il a assujetti toutes choses sous ses pieds ». Cette gloire, Il ne la prendra pas seul. Il attend Son Épouse — ceux que Dieu appelle maintenant d’entre Juifs et Gentils pour les amener à la connaissance du nom de Christ. Ainsi notre Seigneur, tandis qu’Il est personnellement haut élevé, possède Sa gloire comme dans l’expectative, parce qu’Il attend que Ses compagnons la partagent avec Lui — héritiers, par Sa grâce, non des pères simplement, mais de Dieu, et cohéritiers avec Christ.

Rien ne saurait être plus étendu ni plus élevé que les bénédictions dont il est parlé ici. Christ aura Ses célestes en haut, et Ses terrestres ici-bas ; chaque classe sera pleinement bénie, quoique dans des sphères différentes. Qu’il me soit permis de recommander la vérité présentée dans Éphésiens 1, à l’étude sérieuse des enfants de Dieu. Si d’un côté il nous convient d’écouter la Parole de Dieu, de l’autre elle demande de nous de la ferveur de dessein, et que nous la sondions, comme y cherchant des trésors cachés. Nous ne devons pas nous attendre à être réellement et pleinement bénis, par le moyen de la Parole, s’il n’y a pas de diligence d’âme.

Nous avons déjà vu le double titre d’après lequel Dieu bénit maintenant Ses saints ; dans l’un et dans l’autre la forme de la bénédiction ne se trouvant qu’en Christ. Si Dieu s’était révélé seulement, par exemple, comme le Dieu d’Abraham ou d’Isaac, Il n’aurait pas assuré une bénédiction au-delà de celle promise aux pères. Mais Il le fait. Au lieu de voir simplement devant Lui les bénédictions judaïques, c’est Christ qu’Il a en vue ; Christ qu’Il a ressuscité d’entre les morts et placé à Sa propre main droite, où Il n’avait jamais mis, ni David, ni aucun autre. C’est une place qui Lui appartient, en vertu de Sa gloire personnelle, et de Ses souffrances jusqu’à la mort. Nous pourrons être assis avec Christ sur Son trône, mais c’est là une chose bien différente de la position de Christ assis à la droite de Dieu. Et maintenant, c’est comme Dieu du Seigneur Jésus Christ qu’Il bénit — c’est la pleine bénédiction qui siérait à Christ Lui-même en tant que l’objet de la bénédiction. La grâce nous lie avec Christ comme de communs objets, afin d’être bénis de Dieu, qui bénit de cette manière et dans cette mesure-là. Et ce n’est pas tout : Il est le Père du Seigneur Jésus, et comme tel aussi Il nous bénit. En sorte que ces deux caractères, les plus élevés dans lesquels il soit possible d’envisager Dieu, sont ceux selon lesquels nous sommes bénis. Les caractères de Dieu, et comme Dieu et comme Père, comme ils s’occupent de Christ, ont pour résultat une bénédiction, une bénédiction proportionnée, qu’Il nous donne. Ainsi il n’y a point de limites. Il « nous a bénis de toute bénédiction spirituelle » ; et en outre aussi, comme nous l’avons vu, ce n’est pas sur la terre, comparativement la partie la plus basse de l’univers, mais dans la scène la plus élevée de la puissance de Dieu, « dans les lieux célestes », et afin de tout couronner et compléter, c’est « en Christ » ; tout est assuré en Sa personne.

Le verset 4 appartient particulièrement au premier de ces caractères dans lesquels Dieu s’est révélé, comme le verset 5 appartient plutôt au second. « Selon qu’Il nous a élus en Lui », c’est-à-dire en Christ, « avant la fondation du monde, afin que nous soyons saints et irréprochables devant Lui en amour ». Or c’est comme le Dieu de Christ qu’Il nous bénit ainsi, non comme Père, mais comme Dieu. Dans le verset 5, c’est comme Père, parce que nous y lisons : « Nous ayant prédestinés pour nous adopter à Lui par Jésus Christ ». Le mode et le caractère de la chose répondent évidemment au caractère du Père. La relation spéciale avec Lui est introduite. « Nous ayant prédestinés pour nous adopter à Lui » — non seulement élus, mais « prédestinés pour nous adopter à Lui par Jésus Christ, selon le bon plaisir de sa volonté ». Or, ce langage n’est pas employé dans le verset 4. Il ne dit pas qu’Il nous a prédestinés pour être « saints et irréprochables devant Lui en amour ». Il ne dit pas non plus qu’Il nous a appelés à cette merveilleuse place « selon le bon plaisir de sa volonté ». Et la raison est des plus évidentes. Quand il nous est parlé du « bon plaisir de sa volonté », nous avons un langage en rapport avec Son amour souverain et spécial — ce qu’Il déploie afin de manifester Sa propre faveur. Mais quand il nous est parlé d’être « saints et irréprochables », c’est Dieu qui nous a élus pour cela : il ne pouvait pas en être autrement. Si Dieu veut que quelques-uns soient amenés dans une position de proximité à Son égard, et de proximité telle qu’ils soient dans Sa présence dans le ciel, du moment qu’ils sont élus en Christ, il faut, d’une manière ou d’une autre, qu’ils soient « saints et irréprochables » devant Lui en amour. Et tout vient réellement de Sa grâce.

L’une des bénédictions vient du caractère nécessaire de Dieu comme Dieu ; l’autre découle de la relation spéciale dans laquelle Il entre envers nous par notre Seigneur Jésus. Nous élire est un effet nécessaire, parce qu’il est évident qu’il n’y a que Dieu seul qui puisse élire. C’était avant la fondation du monde, lorsque Dieu seul avait Son être. L’homme n’avait ni voix, ni choix dans la chose. C’était uniquement Dieu agissant de Lui-même. C’était une affaire du propre choix de Dieu, qu’Il voulût qu’il y en eût d’autres que Lui-même dans le ciel. Mais ils devaient être près de Lui et devant Lui ; comment pourraient-ils y être avec le péché sur eux ? Impossible. Comment Dieu pourrait-Il sanctionner des âmes, même dans la partie la plus éloignée de Sa domination, avec le péché sur eux ? Encore moins pourrait-il en être ainsi dans le ciel, le trône de Sa majesté. Le jour vient où tout le mal devra être banni jusque dans l’étang de feu. Comment donc pourrait-Il tolérer le péché dans ceux qui doivent être introduits dans le cercle le plus intime de Sa présence ? C’est la nécessité positive de Son caractère et de Sa nature, que s’Il veut en avoir avec Lui dans le ciel, il faut qu’ils y soient « saints et irréprochables devant Lui ». Mais c’est bien loin d’être tout : il faut que ce soit « en amour » ; parce que rien ne pourrait être plus misérable, que s’ils n’étaient pas capables d’entrer dans Ses propres affections. Être simplement dans la place la plus bénie pour des créatures, sans tache, sans aucune chose qui pût souiller la présence de Dieu, ce ne serait pas assez. L’homme fut créé pour avoir un cœur, pour avoir des affections ; et il ne pourrait y avoir de bonheur dans des créatures qui savent ce qu’est l’affection, s’il n’y avait pas la chose sur laquelle l’affection pût se fixer. Si Dieu veut que de tels êtres soient introduits en Sa présence, et cela nécessairement sans péché, sous quelque forme que ce soit, il faut aussi que ce soit « en amour ». Il leur donnera une nature non seulement capable d’être devant Lui sans reproche et sans crainte, mais aussi qui réponde à Son propre amour. « Nous l’aimons parce qu’Il nous a aimés le premier ». En Christ seul cet amour est connu ; mais la manière dont saint Jean parle de Dieu et de Christ est telle, qu’il y a une grande difficulté à décider duquel il veut parler. Il emploie de cette manière le pronom « lui », non pas indistinctement, mais en passant insensiblement de l’un à l’autre. Cela vient de ce qu’ils sont un : « Moi et le Père, nous sommes un » ; et c’est Jean seul qui rapporte cela.

Nous avons ici le choix que Dieu fait de nous personnellement. Car ce n’est pas seulement pour avoir un peuple, comme si c’était quelque chose de vague — un certain nombre de niches dans le ciel, destinées à être remplies par un pareil nombre d’âmes. Il n’y a pas une telle notion dans la Bible. Ce sont des personnes qu’Il choisit. Il ne peut y avoir un tel amour sans avoir distinctement une personne devant soi. Et s’il est vrai même parmi les hommes, que l’amour n’est pas un sentiment incertain — ce qui serait plutôt un caprice — à combien plus forte raison la chose est-elle plus vraie quand il s’agit de Dieu. Il nous aime individuellement. Ainsi, Il nous a élus en Christ, avant la fondation du monde, pour montrer de quelle manière absolue c’est un choix indépendant de notre caractère et de nos voies ; et s’il en est ainsi, il faut que ce qui vient de Dieu retourne à Dieu, d’une manière qui soit selon Lui. Et c’est en effet ce qui a lieu ici. S’il y a ce choix de Dieu en Christ avant la fondation du monde, Il veut avoir les saints devant Lui d’une manière qui n’est possible qu’à Dieu. Il ne veut jamais avoir ce qui est indigne de Son amour et de Sa présence. Ainsi donc il est dit : « afin que nous fussions saints et irréprochables devant Lui en amour ». Ce n’est pas seulement de la sainteté, ou un état sans reproche, ou l’amour ; ce n’est ni l’une de ces choses, ni toutes ces choses, en partie. Dès lors cela n’a pas trait à ce que nous avons été. Si nous examinons quelqu’un, nous pouvons trouver en lui des défauts graves. Même comme chrétien, il est même bien loin d’être ce qui est dû à Dieu. Il a honte de lui-même ; il gémit en pensant combien peu son cœur répond à la faveur que Dieu lui a montrée. Est-ce là ce qui conviendrait en Sa présence ? Dieu sera-t-Il satisfait de ce en quoi un chrétien même trouve à blâmer ? Impossible. Le verset n’envisage pas ici l’homme complexe, mais ce que Dieu nous fait être en Christ, en Son Fils. Il y a maintenant dans les saints ce qui est bien contraire à leur caractère, ce qui ne ressemble pas à Dieu ni à Son Fils bien-aimé : l’orgueil, la vanité, la sottise, toute espèce de mauvaises voies et de mauvaises pensées qui ne découlent jamais de Christ, et n’ont pas la moindre ressemblance avec Lui. Mais malgré tout cela, ne sont-ils pas des saints ? Qu’ainsi n’advienne qu’ils ne le soient pas. Et pourtant c’est là la ferme pensée de Dieu. Il nous a élus en Christ, « afin que nous fussions saints et irréprochables devant Lui en amour ». Comment cela peut-il être ? La réponse est, parce que Dieu nous envisage ici selon ce qu’Il nous donne en Christ, et rien de moins. Tout est comme ignoré dans ce verset, sauf la nouvelle nature qui découle de Sa grâce pour les objets de Son choix. Il nous a élus pour être tels, et Il veut nous avoir parfaitement tels, et rien d’autre, quand le moment viendra pour nous d’être en Sa présence. Mais maintenant même cela est vrai quant à l’essence de la chose, en tant que nous sommes en Christ et que nous avons Sa vie en nous. Puis-je trouver aucun défaut en Christ ? Si Christ est irréprochable en amour, dans la propre nature de Dieu Lui-même, Il est précisément la vie de tout chrétien, quel que soit le nom qu’un homme puisse porter parmi les hommes.

Mais ce n’est pas même tout. Quelque bénédiction qu’il y ait à répondre à la sainteté du caractère et de la nature de Dieu — et c’est là ce que fera bientôt chaque saint dans la gloire, et ce que chaque saint possède réellement comme étant une nouvelle créature en Christ maintenant — ce n’est pourtant pas assez. Nous pourrions être « saints et irréprochables devant Lui en amour », et encore n’être simplement que serviteurs. Sa majesté la reine peut s’entourer de serviteurs pour faire sa volonté ; elle peut introduire en sa présence une personne et une autre, et ils devraient se regarder comme bien honorés d’avoir été ainsi faits les instruments de ses désirs, bien qu’il n’existe naturellement entre eux et elle aucune relation de famille. Mais rien au-dessous de cela ne peut suffire dans les choses célestes. Telle est la merveille de la grâce de Dieu. Dans le verset même qui suit nous trouvons ce fait, que Dieu n’agit pas seulement de Lui-même pour nous appeler et nous introduire en cette merveilleuse place : — pour être la reproduction de Sa propre nature morale et de Son propre caractère. Dieu est saint et irréprochable, et Il est amour dans Sa propre nature. Cela appartient à notre vie maintenant, et nous appartiendra entièrement quand nous serons introduits au ciel, bientôt, par la puissance et la grâce de notre Seigneur Jésus Christ. Mais ce n’est pas seulement comme serviteurs, mais comme fils que nous serons là — dans la conscience d’être fils ; n’y occupant pas même une position semblable à celle des anges, comme « ministres, faisant son bon plaisir », mais comme ceux qui prennent intérêt à tout ce à quoi Il s’intéresse. Ce que nous sentirons ne sera pas simplement pour Lui, mais 'avec Lui. Nous aurons un commun intérêt avec Lui — le même genre de sentiment, si je puis me servir de la même illustration, que les membres de la famille royale ont en commun avec la couronne.

C’est là ce que le Saint Esprit met devant nous dans le verset 5. Le chrétien est planté en Christ devant Dieu, et il a une nature sainte et aimante. Mais en outre, il y a une relation positive qui est formée ; et cette relation, dans laquelle nous sommes introduits envers le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, n’est rien moins que celle de fils selon le patron du Fils de Dieu ressuscité. En tant qu’Il est le Fils éternel du Père, nul ne pourrait avoir une telle place avec Lui. Cette pensée même répugnerait à une âme renouvelée. Mais il a plu à Christ de nous appeler Ses frères, après qu’Il fut ressuscité d’entre les morts, et non auparavant. Et c’est sur la terre, dans la terre où nous avons péché, où nous étions esclaves de Satan — c’est ici que, par la foi de Christ, nous laissons derrière nous tout ce que nous étions, et que nous entrons dans cette relation avec Dieu, si bénie, si glorieuse et si intime. « Nous ayant prédestinés pour nous adopter à Lui ». Le mot « prédestinés » est une expression plus spéciale que le mot « élus », qui signifie que Dieu nous a choisis du monde. Il n’y a que l’incrédule qui puisse s’imaginer que tous doivent être dans une place comme celle-là, ou que des hommes qui ont vécu toute leur vie dans le blasphème contre Dieu, doivent être « saints et irréprochables » quand ils meurent. Dieu a un choix, et notre affaire c’est de bénir Dieu pour Son grand amour — non de juger Ses voies, ni de les blâmer. « Qui es-tu, toi, qui contestes contre Dieu ? ». C’est là la réponse de Dieu à toutes les vaines pensées et à tous les vains raisonnements. Mais alors s’Il choisit selon Sa nature et Sa sainteté, Il nous a « prédestinés pour nous adopter à Lui par Jésus Christ ». Ainsi donc, nous trouvons maintenant le privilège spécial et la glorieuse relation de fils devant Dieu en Sa présence par Jésus Christ. Il aurait pu ne pas le faire, mais c’était « selon le bon plaisir de sa volonté ».

Non seulement Il voulait avoir des personnes, et par conséquent les choisir ; mais voici une manifestation particulière de Son bon plaisir, et en conséquence Il les met dans cette place bénie, « à (la) louange de (la) gloire de sa grâce dans laquelle Il nous a rendus agréables dans le Bien-aimé ». Le verset 6 nous montre ce qui répond aux deux versets qui le précèdent. La clause, « à (la) louange de (la) gloire de sa grâce », etc., comprend et le choix du verset 4, et la prédestination du verset 5 — le caractère du choix de Dieu, et la faveur spéciale de la prédestination du Père. « À (la) louange de (la) gloire de sa grâce dans laquelle Il nous a rendus agréables dans le Bien-aimé ». Acceptés, serait une expression un peu froide pour rendre le sens du verset. Ce n’est pas ce que les gens appellent, dans le langage de la doctrine, l’acceptation, ce qui est plutôt de la même nature que la réconciliation. Mais ici, il me semble, il y a la plénitude de la faveur divine, ce qui va bien au-delà de la simple acceptation. En un mot, Dieu fait de nous des objets de Sa faveur selon tout ce qu’il y a dans Son cœur ; et, afin que cela soit plus pleinement présenté, Il dit : « dans le Bien-aimé », et non simplement « en Christ ». Il y avait un seul objet dans lequel Dieu trouvait toute Sa satisfaction, qui répondait à toutes les pensées et à tous les désirs de Son cœur ; et cet objet était Christ, Celui qui était le Bien-aimé, et cela, sans doute, dans un sens où nulle créature, en elle-même, ne pourrait l’être. Afin de nous bénir pleinement, Dieu nous a faits les objets de Sa faveur dans ce Bien-aimé, et tout est « à (la) louange de (la) gloire de sa grâce ». Ceci comprend toutes les hauteurs et toutes les profondeurs de la grâce de Celui qui est le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous bénit en Christ. De fait, Il ne pouvait aller plus loin. Pouvait-Il montrer à qui que ce fût autant de faveur qu’à Christ ? C’est précisément ainsi qu’Il nous aime et qu’Il nous bénit. Il ne pouvait faire plus, et Il ne veut pas faire moins. Il s’est élevé jusqu’au plus riche caractère d’amour et de bénédiction dans la grâce selon laquelle Il nous envisage dans le Bien-aimé.

Mais alors, quel était notre état antérieur ? Le verset 7 dit : « En qui nous avons la rédemption par son sang, la rémission des péchés selon les richesses de sa grâce ». Il y est seulement fait allusion en passant ; mais cela suppose que nous étions les misérables esclaves de Satan. En la même personne, en qui nous devenons les objets d’une telle faveur, nous avons la rédemption. Dieu n’oublie pas au moindre degré ce qu’était notre condition lorsqu’Il nous a ainsi bénis. Il sait bien qu’il fallait nous retirer de l’état entier dans lequel nous étions, car en vérité nous n’avions que nos péchés. S’il n’y avait eu que les versets précédents, on aurait pu concevoir l’idée que de telles bénédictions et une telle gloire n’auraient pu être mêlées avec ce que nous étions. Mais en Christ, nous est-il dit, nous avons la rédemption. Toutefois l’apôtre ne touche jamais à la rédemption ni à la rémission des péchés, jusqu’à ce qu’il nous ait introduits dans la hauteur et dans la profondeur de tous les privilèges qui découlent de Dieu Lui-même ; ici toute question quant à ce que l’homme est, est si entièrement écartée, que ce n’est pour ainsi dire qu’incidemment que nous trouvons la triste vérité de sa condition. On aurait pu ignorer, d’après les quelques versets qui commencent l’épître, que des personnes ainsi bénies eussent jamais été coupables d’un seul péché. Mais nous voyons ici qu’elles avaient besoin d’être rachetées, d’avoir leurs péchés pardonnés ; et ce même Christ, en qui et par le moyen duquel nous avons toutes nos autres bénédictions, est Celui en qui nous avons aussi « la rédemption par son sang, la rémission des péchés selon les richesses de sa grâce ».

Nous pouvons remarquer ici qu’il y a une différence entre « (la) gloire de sa grâce » et « les richesses de sa grâce ». La « gloire de sa grâce » comprend tous ces privilèges dont il a déjà été question. Le Saint-Esprit a présenté dans le verset 7 « les richesses de sa grâce » — les moyens et les ressources pour nous comme pauvres pécheurs. Mais cela ne suffit pas pour Dieu, s’Il agit de manière à manifester non seulement Ses riches ressources dans Ses voies à l’égard des individus les plus misérables, mais la gloire de Sa grâce. Il veut manifester Son propre caractère — ce qu’Il est Lui-même, et ne peut se borner à pourvoir à ce que nous étions. La « louange de la gloire de sa grâce » découle de ce que Dieu sent et par conséquent fera, afin de se manifester pour nous.

Remarquez en outre, avant que nous quittions ce point, que plus loin nous trouvons une autre rédemption — celle « de la possession acquise », ce qui est une chose bien différente. Nous avons la rédemption en tant qu’il s’agit de la rémission des péchés ; nous attendons la rédemption quant à ce qui concerne l’héritage, ce qui dépend de la venue de Christ pour le prendre de fait sous Son gouvernement. La possession acquise a rapport à l’héritage, et non simplement à ce qui affecte nos âmes. Quant à l’âme, nous avons maintenant la rédemption aussi complètement que nous pouvons jamais l’avoir ; ce que nous ferons bien de ne pas perdre de vue. Le croyant ne peut être plus pardonné qu’il l’est maintenant ; et Dieu ne saurait faire plus pour ôter le péché que ce qu’Il a déjà fait. Il a donné Son Fils, et le sang de Son Fils a été répandu, et il est impossible que Dieu Lui-même fit davantage pour effacer le péché de devant Sa face. Quelle consolation pour nos âmes ! Si nous pensons à nos péchés, nous pouvons aussi entrer dans la consolante assurance que toute notre culpabilité est ôtée de devant Dieu. Nous pouvons tomber dans le péché, car il existe en effet ; mais il reste comme une source du jugement de soi-même, à la place d’une attente terrible du jugement prochain.

Voilà précisément la différence réelle. Comme sujet du jugement divin, le péché est ôté en Christ ; comme sujet du jugement de soi-même, il doit toujours être confessé s’il nous arrive d’y tomber. Et le jugement de soi-même n’est jamais complet, jusqu’à ce que nous sachions que le jugement de Dieu à l’égard du péché est terminé pour nous à la croix. Sous l’Ancien Testament, il n’y avait pas un tel jugement de soi-même à cause du péché, qu’il doit y avoir sous le Nouveau. Nous trouvons en conséquence que (quoique Dieu n’ait jamais traité aucun péché avec indifférence, et ne pourrait jamais le faire), il est pourtant souvent laissé sans un seul mot de commentaire. Mais ce n’est pas traiter la chose légèrement : Dieu la laisse parler pour elle-même. Il exerce d’autant plus le cœur de Ses enfants. S’ils sont dans un état d’opiniâtreté, ils peuvent se servir de la mention faite du péché pour traiter légèrement le mal de leurs propres voies ; sinon, l’exercice de la conscience a lieu. Ce n’est qu’après que la vraie condition de l’homme fut pleinement mise en évidence en la croix de Christ, que nous voyons ce qu’est le jugement de Dieu à l’égard du péché. C’est depuis ce moment-là que nous commençons à entendre parler de « la chair », dans le sens où le Nouveau Testament en parle. Vous pouvez trouver l’expression dans l’Ancien Testament, mais elle ne revêt jamais le même caractère de méchanceté — aussi fort, aussi précis, aussi complet, que dans le Nouveau. La chair ne s’était jamais mise en évidence ; et Dieu attend toujours qu’une personne ou qu’une chose mette en évidence son caractère réel, avant de prononcer le jugement. Et nous devrions apprendre de Dieu à cet égard. La patience de Dieu en jugement est une des plus merveilleuses de Ses voies ; et nous devrions être à cet égard imitateurs de Dieu. Il attendit la croix de Son Fils, avant que le vrai caractère de l’iniquité de l’homme fût pleinement présenté. Sous l’Ancien Testament nous voyons des choses supportées à cause de l’endurcissement des cœurs des hommes ; mais dans le Nouveau Testament il y a une mesure différente, et nul mal n’est toléré pour un moment. La pensée de Dieu sur le mal est proclamée : « les ténèbres s’en vont, et la vraie lumière luit maintenant ». Ni Dieu, ni l’homme ne restent cachés. Tout est mis à nu. L’homme est perdu. Dieu est connu non pas comme un législateur simplement, mais comme un Dieu Sauveur ; et si je ne Le connais pas ainsi, je ne Le connais pas du tout. « Et c’est ici la vie éternelle, qu’ils te connaissent seul vrai Dieu, et Celui que tu as envoyé, Jésus Christ ».

De tout ceci nous apprenons que c’est maintenant seulement que le caractère final du mal a été manifesté. L’Ancien Testament commandait que le mal ne fût pas pratiqué ; mais, comme nous le verrons dans le chapitre suivant, le résultat complet de l’épreuve est manifesté ici : et quel est le verdict ? Que l’homme est mort — moralement, spirituellement — mort dans ses offenses et dans ses péchés. Dieu comprenait parfaitement auparavant le caractère de l’homme, mais Il veut que nous le comprenions. Nous avions besoin de la rédemption, et nous l’avons — de pardon, et nous l’avons. Mais nous attendons le moment où nous aurons « la rédemption de la possession acquise ». Ceci comprend toute la création de Dieu, y compris aussi, peut-être, nos corps, comme partie de la création de Dieu. Mais la rédemption du verset 7 est une chose plus intime, et nous sommes placés dans une position maintenant, où nous pouvons nous juger nous-mêmes entièrement, parce que nous savons que nous ne serons pas condamnés avec le monde. Dieu nous place ainsi dans une position où nous avons un même intérêt avec Lui-même ; Il nous met de Son côté, pour prendre Son parti contre nous-mêmes. Or c’est là ce que signifie la repentance, et à cause de cela elle est appelée « la repentance envers Dieu ».

Mais le verset suivant dévoile un autre sujet : « laquelle Il a fait abonder envers nous en toute sagesse et intelligence ». Il n’est pas dit : « fait abonder envers nous en nous pardonnant », parce que le plein pardon est un besoin positif. Mais quand nous entendons parler de toute « sagesse et intelligence », il est question des conseils de Dieu touchant Son Fils, au-dessus de toute pensée de besoins, et indépendamment d’une telle pensée. Il dit en quelque sorte : Vous êtes à même maintenant d’entrer dans mes pensées, et de les comprendre quand je parle. Vous êtes délivrés de toute anxiété au sujet de vos péchés, et vous êtes libres maintenant pour entrer dans mon dessein. « Nous ayant fait connaître le mystère de sa volonté selon son bon plaisir, lequel Il s’est proposé en Lui-même ». Et le secret de Sa volonté est, « pour l’administration de la plénitude des temps…, de réunir en un, toutes choses dans le Christ, tant les choses qui sont dans les cieux, que celles qui sont sur la terre, en Lui, en qui nous aussi nous avons été faits héritiers » (v. 9 à 11). Nous avons clairement ici, dans ces versets centraux, le fait que — la question du péché ayant été réglée dans nos âmes — nous sommes rendus capables d’entendre ce que Dieu a à nous dire sur toutes autres choses. Il n’a pas seulement à nous dire ce qu’Il va faire sur la terre, comme Il fit avec Abraham. La relation est plus élevée que celle qu’Il avait fait connaître aux patriarches. Au commencement, quand l’Éternel Dieu eut formé toutes les bêtes des champs et tous les oiseaux des cieux, Il les fit venir vers Adam, le seigneur de la création, « afin qu’il vit comment il les nommerait, et afin que le nom qu’Adam donnerait à tout animal fût son nom. Et Adam donna les noms à tout le bétail et aux oiseaux des cieux, et à toutes les bêtes des champs » (Gen. 2, 19, 20). C’était là une sagesse conférée dans le domaine de la nature. Mais maintenant c’est une chose beaucoup plus profonde et étendue ; car il est question de la suprématie du second homme et du discernement qui suffit et qui convient par rapport à ses hauteurs et profondeurs sans bornes. Dès lors, Dieu a fait abonder envers nous Sa grâce en toute sorte de sagesse et d’intelligence. Tout ce qui manifeste Son caractère et la gloire de Christ, Il nous le fait connaître. Il nous traite, non comme des serviteurs, mais comme des amis. Il a une chose plus près de Lui que toute autre chose — ce qu’Il va faire pour Son Fils : et Il nous fait part des secrets qui sont le plus près de Son cœur.

Si quelqu’un dit : Je n’ai pas besoin de comprendre des mystères, je réponds : Vous ne sentez pas le besoin de connaître ce que Dieu veut vous enseigner. L’incrédulité se montre toujours sous quelque caractère d’hostilité à Dieu. Dans Sa parfaite bonté, Il nous donne, Lui, la consolation du salut, et ensuite Il nous découvre ces autres vérités. « Nous ayant fait connaître le mystère de sa volonté ». Cela ne veut pas dire quelque chose que vous ne pouvez pas comprendre, mais ce que vous ne pourriez pas connaître avant que Dieu vous l’eût dit. Ne vous détournez pas en disant : Tout ce que je désire savoir c’est que je suis sauvé. Nous devrions désirer apprendre tout ce que Dieu daigne nous enseigner. Le mot « mystère » signifie ce qu’il a plu à Dieu de garder secret — quelque chose qu’Il n’avait pas encore révélé, mais qui est tout à fait intelligible quand il est dévoilé. Le mot « mystère », dans un sens populaire, est complètement différent de son emploi dans la Parole de Dieu. Il y a bien des choses très merveilleuses dans les prophéties, mais elles ne sont pas appelées des mystères. Ce qui est maintenant présenté pour la première fois, c’est le mystère de Sa volonté. Il y a bien des mystères expliqués dans le Nouveau Testament, comme ceux du royaume des cieux. Babylone aussi est appelée un mystère. Le mystère ici, c’est que Dieu veut réunir toutes choses dans les cieux et sur la terre sous Christ comme chef. Il ne veut pas seulement avoir les cieux, comme ils sont maintenant, complètement séparés de la terre, mais avoir un système de gloire céleste et terrestre réunies, tout étant sous notre Seigneur — c’est là le mystère de Sa volonté.

Mais il y a plus que cela. Il veut que nous participions à la gloire comme associés avec Christ. Ainsi, il y a deux grandes parties dans le mystère de Sa volonté. La première, c’est Christ, et la seconde, c’est l’Église ; c’est pourquoi il est dit dans cette épître même : « Ce mystère est grand ; mais moi je le dis par rapport a Christ et à l’assemblée ». Ce n’est pas « l’assemblée », sans doute, qui est le mystère, mais « Christ et… l’assemblée ». L’Église, quelque bénie qu’elle soit, n’en est qu’une partie subordonnée. Qu’elle fasse même partie du tout, cela vient uniquement de ce qu’elle appartient à Christ, le chef céleste de toutes choses. Le dessein de Dieu est « pour l’administration de la plénitude des temps ». Alors ces heures de honte et de douleur qui s’écoulent maintenant, auront achevé leur cours — le temps pendant lequel la création est assujettie à la vanité, le temps pour Israël d’un aveuglement auquel le livre le jugement de Dieu, le temps pour les Gentils de gouverner comme si Dieu ne devait ni intervenir ni prendre connaissance des choses, le temps où l’Église de Dieu demeure dans la faiblesse et divisée, le temps de la liberté de Satan pour séduire et tourmenter les hommes. Ces choses continuent maintenant — l’homme, le chef, par le moyen du péché, assujetti à la maladie et à la mort, et toute la création gémissant. Mais Dieu Lui-même mettra fin à tout ce qui porte un tel caractère. Il veut lier Satan et délivrer l’homme de sa séduction. Il veut avoir Israël béni et réuni sous son Messie — les Gentils bénissant Dieu, qui sera sanctifié parmi eux — la terre elle-même n’étant plus la scène pauvre, misérable, et gémissante qu’elle est aujourd’hui, mais la malédiction ôtée, et le désert se réjouissant et fleurissant comme une rose. Dieu accomplira un jour toutes ces choses ; et quand les temps convenables selon Dieu seront complets[1], Il changera tout, introduisant Christ comme le Chef, le centre et le moyen de toute bénédiction. Christ est l’homme plus fort qui doit lier l’homme fort, Celui qui brisera la tête du serpent — le Seigneur du ciel et de la terre — le Messie d’Israël, et le Fils de l’homme, gouverneur suprême sur toutes les nations. Toutes ces choses seront un jour accomplies de la manière la plus simple et la plus efficace, mais ce ne sera pas par la puissance de l’homme — pas même par la propagation de l’évangile. Christ Lui-même administrera et maintiendra la gloire de Dieu dans l’univers.

Si les hommes avaient un sentiment juste de l’état actuel de l’Église, ils se couvriraient de sac et de cendre, au lieu de sonner de la trompette. Ce que nous avons à faire, c’est de nous humilier devant Dieu, à cause de ce que nous sommes et de ce que nous voyons autour de nous, même chez les meilleurs. Il faut beaucoup de patience, non seulement pour supporter les autres et pour que les autres nous supportent, mais pour continuer à marcher dans l’amour. Si nous avons réellement du cœur pour Dieu et pour Ses enfants, nous sentirons profondément ces choses, et nous chercherons la bénédiction de ceux qui sont entraînés par cet état — et nous le ferons même entièrement et de tout notre cœur — nous rappelant que le jour béni est proche, où Christ sera haut élevé comme le chef de toutes choses, célestes et terrestres. Tandis qu’il est convenable pour nous de nous juger nous-mêmes, nous n’avons pas besoin d’être découragés. Nous savons que notre espérance est une espérance « qui ne rend pas honteux ». Elle n’est pas fondée sur ce que va faire l’Église ou une société quelconque, car notre espérance c’est Christ. Nous savons que Dieu nous a fait connaître le secret de Sa volonté. Lorsqu’il n’y a pas une conscience exercée, il se peut qu’on ne rejette pas cette vérité ; mais elle n’est pas réalisée, ni appliquée, dans un tel état. Le remède béni que Dieu apporte au désordre qui règne dans le monde, c’est Christ, amené hors de Sa position actuelle comme caché auprès de Dieu ; et du moment qu’Il en sort, quel changement ! Toutes choses, dans les cieux et sur la terre, seront réunies en Christ ; et quand ce jour arrivera, nous entrerons visiblement dans notre héritage. Nous avons déjà le titre, mais nous ne sommes pas en possession d’une manière manifeste. « En qui nous aussi nous avons été faits héritiers, ayant été prédestinés selon le propos arrêté de Celui qui opère toutes choses selon le conseil de sa volonté ; afin que nous soyons à (la) louange de sa gloire, nous qui avons préespéré dans le Christ ».

Nous avons, d’abord (v. 5), notre prédestination comme enfants. « Et si (nous sommes) enfants, (nous sommes) aussi héritiers » — héritiers d’un glorieux héritage, Christ ayant été fait le chef de l’univers (v. 10, 11). L’interprétation généralement reçue c’est d’appliquer le verset 10 à la position de Christ maintenant. On s’imagine que « la plénitude des temps » ici signifie la même chose que nous trouvons dans Galates 4. Mais « la plénitude des temps » diffère grandement de « l’accomplissement » (ou plénitude) « du temps », cette dernière expression signifiant l’intervalle qui s’est terminé par l’incarnation de Christ, ou qui a été complété par elle. La naissance de Christ est une chose bien différente de l’exaltation de Christ, comme le chef de toutes choses. Il y a une erreur mortelle à l’œuvre, quand les hommes mettent l’incarnation du Fils à la place de la rédemption. On fait dépendre notre union avec Christ du simple fait de Son incarnation, et non du fait qu’Il est ressuscité d’entre les morts, et qu’Il est entré ainsi dans Sa position de chef. Mais si notre union avec Christ est confondue avec le fait qu’Il était un homme, alors Il s’est uni avec la nature humaine, et il n’y a point d’union spéciale entre le chrétien et Christ, parce que l’humanité appartient à la race entière, c’est-à-dire à l’homme dans le péché. Ceci conduit naturellement plus loin — à l’hérésie qui fait prendre à Christ l’humanité dans Sa condition déchue.

Il est dit encore : « Afin que nous soyons à (la) louange de sa gloire, nous qui avons préespéré dans le Christ ». La pensée est : espéré en Christ, avant que les Juifs (dont il est spécialement parlé) contemplent Christ dans le temps et de la manière qui sont déterminés. « Ils regarderont vers moi, qu’ils auront percé ». Or, dit-il, nous sommes ceux qui ont « préespéré dans le Christ ». Notre espérance est fondée sur Christ, avant que le reste de la nation Le voie et croie en Lui. Le « nous » dans le verset 12, ne va pas au-delà des Juifs qui croyaient : « En qui vous aussi  » exprime une distinction. Le « nous », et le « vous » se rapportent, le premier à Paul et à ceux d’Israël qui, comme lui, avaient cru, le second aux croyants d’entre les Gentils, comme les Éphésiens. S’il en est ainsi, le sens est : « Afin que nous » — Juifs chrétiens — « soyons à (la) louange de sa gloire, nous qui avons préespéré dans le Christ ». Ceux qui composeront la nation d’Israël n’auront pas préespéré « à (la) louange de sa gloire ». Ils seront les objets de cette gloire. « Lève-toi, sois illuminée ; car ta lumière est venue, et la gloire de l’Éternel s’est levée sur toi ». Sa gloire comprendra leur salut ; mais ce qui est « à (la) louange de sa gloire », c’est qu’il y en a, du milieu de cette nation incrédule, qui ont reçu Christ avant de Le voir, et qui, par conséquent, seront « manifestés avec Lui en gloire ». Bienheureux ceux qui reçoivent Christ quand ils Le voient ; mais bienheureux encore plus ceux qui ne L’ont point vu, et qui pourtant ont cru (Jean 20, 29) !

Nous avons donc vu que l’apôtre, dans le verset 12, présente les Juifs croyants comme étant maintenant introduits dans toutes les bénédictions dont il est parlé dans la portion précédente du chapitre. Puis s’adressant aux saints d’entre les Gentils à Éphèse, il dit : « En qui vous aussi (vous avez espéré), ayant entendu la parole de la vérité, l’évangile de votre salut, auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse ».

Il peut être profitable ici d’entrer dans plus de développements quant à la présence et à l’action du Saint Esprit. Les hommes ne furent pas longtemps sans s’éloigner beaucoup de la vérité de Dieu. Nous savons qu’avant les trois derniers siècles, d’épaisses ténèbres s’étaient étendues comme un nuage sur la chrétienté. Mais même depuis la lumière qui brilla à l’époque de la Réformation, les chrétiens ont toujours eu à lutter pour réaliser en leur propre âme la vérité qu’ils étaient nés de Dieu et justifiés en Christ. Nous devons pleinement admettre l’immense importance qu’une âme soit entièrement établie. Mais la régénération et la justification étaient-elles destinées à être la somme et la substance de la recherche du chrétien, de ses efforts et de ses désirs ? Au contraire, sont-elles autres choses que le seuil même, ou au plus, la fondation sur laquelle un chrétien est appelé à bâtir ? N’est-ce pas ici ce que Dieu attend de nous, savoir, qu’étant nés de nouveau, au lieu de nous occuper à chercher des marques et des signes qui montrent que nous le sommes, nous fassions vraiment des progrès en Christ ? Être né de nouveau, c’est la première œuvre essentielle de l’Esprit de Dieu, sans laquelle il n’y a point de vie quant à Dieu, aucune possibilité d’avancer dans les choses de Dieu. C’est le besoin universel, la condition indispensable pour toute âme, afin d’avoir part aux bénédictions de Dieu, dans tous les temps, et sous toutes les économies.

Aussi, quand Nicodème vint à notre Seigneur, désirant d’être enseigné par Lui, notre Seigneur commence aussitôt par là. Le rabbin reconnaissait que Jésus était « un docteur venu de Dieu », par lequel il désirait être enseigné. Mais notre Seigneur l’arrête d’une manière particulièrement solennelle : « Si quelqu’un n’est né de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu ». Nicodème, étonné, demande comment une telle chose peut être. Notre Seigneur néanmoins répond à sa question inintelligente en renouvelant Son assertion, mais en des termes encore plus forts : « Si quelqu’un n’est né d’eau et de l’Esprit, il ne peut entrer dans le royaume de Dieu ». Nous avons là une explication bien claire quant à ce que c’est que d’être né de nouveau. C’est être né d’eau et de l’Esprit. Nicodème exprime encore son étonnement à cet égard — savoir qu’un Juif, un Juif moral et religieux, un homme qui n’était pas païen, qui avait la foi, et qui semblait avoir été spécialement honoré de Dieu, eût besoin d’être né une seconde fois ; que lui, docteur d’Israël, dans un sens prééminent, reçût ainsi une réponse qui était réellement un reproche pour lui, qui insistait sur la nécessité d’un changement vital, changement qu’il avait été si loin de réaliser, qu’il ne le jugeait pas même nécessaire ! C’était là, en effet, un coup qui arrêtait Nicodème dès le premier pas. Néanmoins notre Seigneur montre qu’il aurait dû connaître ces choses, c’est-à-dire les connaître naturellement par les prophètes. Remarquez bien cela, parce que c’est une réponse entièrement satisfaisante quant à ceux qui voudraient rattacher au baptême l’expression d’être né d’eau. Celui qui connaît bien les vues qui sont enseignées ici, ne peut raisonnablement penser qu’il y ait aucune dépréciation de cette institution de Christ. Car je maintiens que nul ne devrait être reconnu sur un terrain chrétien, jusqu’à ce qu’il ait été baptisé d’eau. Je ne veux pas dire qu’il ne puisse être un croyant ; mais s’il ne s’est pas soumis au baptême au nom du Seigneur, il n’a pas ostensiblement quitté un terrain, judaïque ou païen. Et notre Seigneur a insisté ailleurs sur la nécessité d’être baptisé, aussi bien que de croire (Marc 16).

Mais quelqu’important que soit le baptême, comme le signe institué de la mort et de la résurrection en Christ, notre Seigneur cependant ne fit point directement allusion à ce rite, en parlant avec Nicodème, car Il ne dit pas : Tu es disciple de Christ, mais : « Tu es le docteur d’Israël, et tu ne connais pas ces choses ? ». C’est-à-dire que, comme Juif, il aurait dû connaître ces choses. Comment pouvait-il comme Juif connaître le baptême chrétien ? Pour un tel homme c’était là une nouveauté ; et même la chose n’existait pas à cette époque. Comment ce qui n’était pas encore introduit, pouvait-il être connu ? Il aurait dû savoir ce que signifiait être né d’eau et de l’Esprit, et en sentir l’absolue nécessité. Que voulait donc dire le Seigneur ? Le voici : c’est que — peu importe le temps, ou le lieu, ou la personne — il fallait que tout homme fût né d’eau et de l’Esprit, pour pouvoir voir le royaume de Dieu ou y entrer, et qu’il reçût, par le Saint Esprit, la communication d’une nouvelle vie. Et comment cette vie est-elle produite ? Par une cérémonie ? Non. Par une marche chrétienne ? Non. Par quel moyen donc ? Par la prière ? Plus que cela ; par la réception de la Parole de Dieu révélant Christ. C’est pourquoi il est écrit que nous sommes nés de nouveau « non par une semence corruptible, mais (par une semence) incorruptible, par la Parole de Dieu, vivante et permanente ». À ce témoignage de Pierre se joint aussi celui de Jacques : « Il nous a de sa propre volonté engendrés par la Parole de la vérité, pour que nous soyons comme une sorte de prémices de ses créatures ». L’instrument employé pour que nous soyons engendrés de Dieu, c’est « la Parole de la vérité ». Ainsi donc, il est clair que l’eau est employée, dans ce passage de Jean 3, comme la figure de la Parole de Dieu appliquée par le Saint Esprit. Les deux sont joints ensemble, afin qu’on ne puisse pas supposer que c’est simplement une ordonnance, ou uniquement la Parole, et pour montrer qu’au contraire il s’agit de l’Esprit appliquant la Parole de Dieu à l’âme avec une puissance vivifiante. C’est pourquoi, quand il est parlé de croire, il est dit : « Et comment croiront-ils en Celui dont ils n’ont point entendu (parler) ? ». Il est nécessaire que la Parole soit prêchée. « Ainsi la foi est de ce qu’on entend, et ce qu’on entend par la Parole de Dieu ». Comparez aussi 1 Corinthiens 4, 15. Il importe peu quel passage positif de la Parole vous preniez ; tous enseignent la même chose. Notre Seigneur insiste sur ceci, que tout homme qui entre dans le royaume, doit nécessairement entrer par cette porte-là. Que deviennent donc Abraham et Isaac et Jacob ? Il en est peut-être qui diront que la circoncision est l’équivalent ; mais ne croyez pas à ce rêve, même pour un instant : s’il en était ainsi, que deviendrait cette foule de personnes qui ont existé avant la circoncision ou le baptême, ou en dehors de l’un et de l’autre ? Toutes ces explications ne sont que des conjectures maladroites quant à l’Écriture. Quand même il n’y aurait aucune différence réelle entre le baptême et la circoncision, lorsque notre Seigneur insiste sur la nouvelle naissance, Il ne fait allusion ni à l’un ni à l’autre. Il n’insiste pas sur un rite qui a de si nombreuses exceptions, mais sur une nécessité spirituelle — absolue et universelle. Il ne parle pas du baptême qui est un rite comparativement moderne — d’une chose qui, comme elle n’est entrée que tard dans le monde, n’y subsistera pas toujours. Car il n’y a point de fondement, que je sache, pour supposer que pendant le millénium les personnes continueront à être baptisées d’eau. C’est un rite particulier au moins à l’époque entre les deux avènements du Seigneur — le baptême pour la mort de Christ.

Mais Jean 3 parle d’une chose par laquelle il faut que toute personne passe, sans distinction ou exception, si elle doit voir le royaume de Dieu et y entrer — une chose vraie du brigand sur la croix comme de Saul de Tarse. Tous les enfants de Dieu, passés, présents ou à venir, sont nés de nouveau ; tous ont cette nouvelle vie qui leur est donnée. Ils reçoivent la communication de la vie divine. Mais pour ce qui regarde ceux qui entendent la Parole, il est clair que c’est par le moyen du Saint Esprit qui se sert de la Parole, comme d’un moyen pour communiquer la vie. Elle est emphatiquement la représentation de Christ. Dans Jean 4, nous trouvons une autre opération du Saint Esprit. « Si tu connaissais le don de Dieu, et qui est celui qui te dit : Donne-moi à boire, tu lui eusses demandé, et il t’eût donné de l’eau vive ». L’eau vive est évidemment le Saint Esprit, que Jésus donne. Ce n’est pas ici l’opération vivifiante de l’Esprit, indispensable dans tous les temps et dans toutes les circonstances, s’il y a des âmes qui doivent appartenir à Dieu ; mais c’est un privilège spécial que Christ confère personnellement. Et vous trouverez dans le discours du Seigneur qui vient ensuite, et qui est lié avec ce qu’Il avait déjà dit à la femme de Samarie, que le Saint Esprit est donné aux croyants maintenant comme le moyen pour adorer leur Dieu et Père « en esprit et en vérité ». Nous avons donc dans Jean 4 une opération de l’Esprit totalement différente de celle sur laquelle le Seigneur insiste dans Jean 3. Et à qui notre Seigneur découvre-t-Il cela ? À une pauvre femme abandonnée et misérable ; pas même à une Juive, mais à une Samaritaine. Notre Seigneur montre là la grâce qui s’adresse aux plus vils. Maintenant Dieu ne mettait plus en avant la loi, comme auparavant. Il se révèle comme donnant. Sous la loi, Dieu est plutôt comme recevant ; Il demande, Il requiert, Il insiste, pour que la créature Lui rende l’honneur dû à Sa majesté. Dans l’évangile, Dieu se présente comme donnant Son propre Fils. Au lieu d’exiger quelque chose de l’homme coupable et perdu, Il donne même ce qu’Il a de meilleur à celle qui au premier abord ne Lui demandait pas. « Si tu connaissais le don » (l’acte de donner gratuitement) « de Dieu » (quel nouveau son pour la Samaritaine !)… « tu Lui eusses demandé, et Il t’eût donné de l’eau vive ». C’est là ce qu’Il fait — Il donne l’Esprit, la puissance de la vie éternelle. La conséquence de cette manifestation si précieuse de la vérité, c’est que nous savons que le Saint Esprit est en nous comme la source de la communion et la puissance du culte. Ce n’est pas tant l’Esprit comme employant la Parole de Dieu dans son action à notre égard dans notre souillure naturelle, et pour communiquer une nouvelle vie qui s’attache à Dieu et qui hait le péché, avec de nouveaux sentiments, de nouveaux désirs, de nouveaux besoins, qui ne trouvent une réponse qu’en Christ, et que toute âme régénérée a nécessairement, ne fût-ce qu’une pauvre religieuse ou un prêtre superstitieux qui dit la messe. Toutefois si un homme est né de Dieu, il est impossible qu’il ne soupire pas en quelque mesure après ce qu’il n’a pas, et qu’à la longue il ne trouve Christ comme l’objet qui attire son âme — Christ en contraste avec tout ce qu’on trouve sur la terre ou ailleurs — Christ le seul qui lui convienne, et aussi comme Celui dont c’était la gloire de le bénir ainsi. Qu’est-ce que cela prouverait ? Qu’un tel homme est né de Dieu. Car il n’existe aucune preuve qui ne puisse se trouver être une illusion, excepté celle-ci — savoir que mes besoins me font regarder à Christ et trouver en Lui le seul qui puisse satisfaire l’âme.

Mais dans Jean 4, nous ne trouvons pas le cas d’un chef orgueilleux des pharisiens qui est amené à sentir la nécessité de la régénération, mais une femme dépravée, perdue de réputation, à qui personne ne se serait soucié de parler, un seul excepté — chose merveilleuse à dire ! — le Fils de Dieu. C’est à elle que le Seigneur fait connaître cette grande vérité, le don de l’Esprit ; non seulement maintenant comme agissant moralement sur l’âme, ou vivifiant, mais l’Esprit Lui-même habitant dans le cœur, le Saint Esprit comme la puissance de la communion divine et du culte. Quelle joie ! Le Saint Esprit habitant dans les croyants, le Père cherchant « de tels qui l’adorent » ! Connaissez-vous ces choses ? Ou bien, êtes-vous encore entravés par les choses qui sont maintenant passées, par ce qui existait autrefois, et qui avait alors la sanction de Dieu ? par les règles d’une économie qui est passée, données pour un peuple terrestre ? par des rites qui n’ont plus la moindre valeur aux yeux de Celui qui se révèle comme Père ? Le temps des formes et des cérémonies est entièrement passé. Que de fois on dit : Nous n’attachons aucune importance à de telles choses. La vérité est, qu’elles sont maintenant une chose très mauvaise, et contraire à l’ordre actuel établi par Dieu. Ce n’est pas seulement que de beaux spectacles et des sons qui frappent ne devraient pas être un objet dans le culte, mais c’est un péché positif que de les rechercher ou de les admettre. C’est, en principe, un retour à l’idolâtrie et à un monde condamné. C’est pourquoi, dans Jean 4, notre Seigneur introduit cette vérité : « L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité ». Dans ces mots nous trouvons l’énonciation de la vérité quant au culte. À Jérusalem la splendeur des cérémonies avait été à son comble ; mais maintenant tout cela est passé, et tous ceux qui combattent pour cela maintenant sont, sans le savoir, en rébellion contre Christ. Notre Seigneur montre que ce n’est plus sur cette montagne, ni à Jérusalem, que Dieu doit être adoré. Il y avait un nouvel état de choses qui était tout près de poindre. Et qu’est-ce qui a de la valeur aux yeux de Dieu maintenant ? Les vrais adorateurs adorant le Père en Esprit et en vérité. Quels sont-ils ? Ses enfants. « Le Père en cherche de tels qui l’adorent ». Il rassemble des enfants, les forme à Sa propre louange, met le Saint Esprit au-dedans d’eux pour donner la conscience de leur relation avec Lui-même, et afin que, réalisant cela, ils s’approchent de Lui comme de leur Dieu et Père.

Il est donc clair que de nos jours l’idée d’avoir un culte mélangé de la part de personnes dont les unes sont converties et les autres non, est une contradiction directe du christianisme. Avant la croix il ne pouvait en être autrement. C’était une chose qui n’existait pas alors en aucune façon, que Dieu séparât Ses enfants d’avec ceux qui n’étaient pas ainsi en relation avec Lui. C’eût été un péché pour un Israélite croyant de dire à un incrédule : Je ne puis adorer avec vous, parce que vous n’êtes pas né de Dieu. Mais maintenant le péché est de se réunir dans le culte de Dieu avec ceux qui ne sont pas Ses enfants ; et cela par cette simple raison, que le Père cherche de vrais adorateurs, et de tels seulement, pour l’adorer. Je ne veux pas dire que ce soit un péché que ceux qui sont inconvertis se trouvent dans le même lieu comme spectateurs et auditeurs. Mais la tentative de réunir tout le monde dans le culte de Dieu, est une illusion fatale, déshonorant Dieu et destructrice pour l’âme de ceux qui ne sont pas des vrais adorateurs. Mais on n’a pas de foi pour demeurer séparés du monde. On aime à avoir l’appui des hommes ; et c’est, sans doute, une épreuve que d’avoir à agir avec décision. Nous sommes avertis de Dieu, que, si nous cherchions à complaire aux hommes, nous ne serions pas serviteurs de Christ. Nous devons courir le risque de leur faire de la peine, mais « les plaies faites par celui qui aime sont fidèles ». Il y en a qui confondent ces deux choses : entendre l’évangile ou d’autres vérités, et le culte. Mais elles sont totalement différentes. En adorant Dieu, les chrétiens offrent à Dieu un service de louanges et d’actions de grâce. Le culte, c’est ce qui part du croyant et remonte à Dieu ; tandis que dans l’évangile ou tout autre ministère, c’est un message qui descend de Dieu pour le bien des âmes, pour l’instruction des croyants, ou pour convaincre les incrédules et pour leur salut. Mais que ce soit adressé aux uns ou aux autres, c’est toujours ce qui vient de Dieu pour eux, et non ce qui remonte à Dieu de leur part, de sorte que c’est un mal bien sérieux que de confondre ces deux choses. Chez plusieurs, ce qui les attache aux vieilles murailles et à la routine, ce n’est pas les prières, mais parce qu’ils espèrent entendre quelque chose de bon dans le sermon. Ils sortent ainsi entièrement de la condition d’adorateurs. Le culte est la vraie expression du cœur par le Saint Esprit en louanges et en actions de grâce, que ce soit ou non de la part d’un homme illettré. Nous savons dans le cas des apôtres, qu’ils ne pouvaient pas parler correctement (Act. 4) ; mais, malgré cela, ils étaient les vases choisis d’une puissance de Dieu telle, que jamais une pareille puissance, auparavant ou depuis, n’a visité cette terre, dans des hommes sujets aux mêmes passions que nous. Et je crois qu’il en est encore ainsi, et qu’il en sera toujours ainsi. Dieu choisit « les choses faibles de ce monde pour couvrir de honte les choses fortes ». Quoiqu’il puisse y avoir un Paul introduit dans l’occasion, c’est là l’exception, et Dieu ne veut jamais que les exceptions deviennent la règle.

Ainsi donc, outre la régénération, qui est la première opération de l’Esprit de Dieu, il y a de plus le don du Saint Esprit. « En qui vous aussi… ayant entendu la Parole de la vérité, l’évangile de votre salut ». Ils étaient nés « d’eau et de l’Esprit ». Ils avaient « entendu la Parole de la vérité », que nous trouvons présentée dans cette épître sous la figure de l’eau : « Afin qu’il la sanctifiât en la purifiant par le lavage d’eau par la Parole » (chap. 5, 26). Ce n’est pas seulement que l’Église est lavée par la Parole, mais le pauvre pécheur est engendré par la Parole quand il croit l’évangile — « né d’eau et de l’Esprit ». Mais était-ce uniquement qu’ils étaient nés « d’eau et de l’Esprit » ? « Auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse ». C’est une chose qui en arrête plusieurs, de trouver qu’il y a une telle chose, après qu’ils sont nés de nouveau, que d’être scellés de l’Esprit. D’autres encore, voyant les deux faits, ont inventé la confirmation. Ils ont senti, d’après l’Écriture, qu’il y a quelque chose qui est au-delà du fait d’être né d’eau. C’est ainsi qu’une religion de formes a d’abord présenté le baptême pour régénérer tout le monde, puis la confirmation pour couronner la chose. Mais les formes ne valent pas mieux que l’idolâtrie : c’est mettre quelque chose à la place de Christ. Après le départ des apôtres, ce mal fit de grands pas. On substitua des cérémonies, accomplies par la main des hommes, à la puissance du Saint Esprit agissant sur l’âme des hommes. Prouvant, d’après la Parole de Dieu, qu’il y avait ces deux choses, d’abord la régénération, puis le don subséquent du Saint Esprit, on adopta deux cérémonies différentes — dans un sens à juste titre, s’il doit y avoir en aucune manière une religion de formes. Mais c’est une erreur totale quant à la nature même du christianisme.

Néanmoins la vérité demeure, qu’il y avait deux opérations différentes du Saint Esprit. La première c’est quand un homme est amené à la conscience du péché. Qu’est-ce qui fait qu’un homme s’abhorre lui-même ? Il est né de Dieu. Il se peut qu’il ne soit nullement heureux, mais qu’il ait un sentiment réel de sa ruine ; et pourtant son âme s’attache à Dieu. Cet homme-là est né de Dieu — vraiment converti : il n’y a peut-être jusqu’à présent aucune consolation dans son âme, mais son cœur est ouvert pour écouter de plus en plus la Parole de la vérité, l’évangile du salut. Il la croit. Qu’en résulte-t-il ? Il est scellé du Saint Esprit, comme ayant cru, non seulement en Christ, mais à l’évangile de notre salut — à l’œuvre que Christ a accomplie. Car je ne crois pas que vous puissiez trouver une âme scellée du Saint Esprit, à moins qu’elle n’entre dans ce qui concerne l’œuvre aussi bien que la personne de Christ. Cela explique le fait qu’il y a eu des personnes nées du Saint Esprit, qui ne furent jamais scellées. Par exemple, les saints de l’Ancien Testament croyaient en Christ ; ils attendaient tous le Christ. Tous étaient nés de Dieu, mais pas un n’était scellé du Saint Esprit. Être né de l’Esprit et être scellé de l’Esprit, sont deux choses bien différentes, qui peuvent ou non se trouver réunies dans la même personne. Il faut que tous soient nés de l’Esprit ; mais il n’est jamais dit qu’il faut que tous soient scellés de l’Esprit pour entrer dans le royaume de Dieu. Partout où le Saint Esprit parle d’être scellés de l’Esprit, cela prouve absolument le contraire. Quelle est la première personne mentionnée comme ayant été scellée de l’Esprit ? Notre Seigneur béni Lui-même. Il avait ce sceau d’une manière particulière à Lui-même. Quand fut-Il scellé ? Après que la rédemption fut accomplie et qu’Il monta au ciel ? Non ; mais pendant qu’Il marchait sur la terre. « C’est Lui que le Père, Dieu, a scellé ». C’est comme Fils de l’homme qu’Il fut scellé, et comme Fils de l’homme sur la terre avant la rédemption — sans effusion de sang, parce qu’Il ne connaissait pas le péché, et que dans Sa bouche « il n’a pas été trouvé de fraude ». Il était absolument sans péché : Il pouvait avoir le Saint Esprit demeurant sur Lui, abstraction faite entièrement du sang, parce qu’Il était le saint — le Sauveur. Il n’avait besoin d’aucune œuvre — ni de sang — ni de rédemption ; mais pourtant Il mourut, et il y eut effusion de sang, et la rédemption fut effectuée. Pourquoi cela ? Afin que nous fussions scellés — afin que nous, qui n’avions aucun titre naturel pour être approchés de Dieu, afin que nous, dis-je, en qui le Saint Esprit n’aurait jamais pu établir Sa demeure, nous pussions recevoir le même Saint Esprit qui habitait en Lui, pour habiter en nous.

C’est là ce que notre Seigneur fait ressortir par degrés. « Tu lui eusses demandé, et Il t’eût donné de l’eau vive ». C’est pour cela que le Seigneur enseignait à Ses disciples à demander le Saint Esprit, et cela après qu’ils avaient été régénérés. Et pourtant Il leur dit de demander au Père le Saint Esprit (Luc 11). En est-il de même maintenant, vu qu’Il a donné l’Esprit ? Dois-je demander le Saint Esprit, quand je L’ai et qu’Il habite en moi ? C’eût été l’incrédulité la plus insigne, lorsque Christ était présent au milieu de Ses disciples, s’ils avaient demandé à Dieu d’envoyer Christ. Et maintenant, lorsque le Saint Esprit a été envoyé du ciel, et qu’Il a été donné pour être en nous « une fontaine d’eau jaillissante jusque dans la vie éternelle », convient-il à ceux qui L’ont de prier instamment que le Saint Esprit leur soit donné ? Convient-il à des chrétiens de prier pour une effusion du Saint Esprit ? C’est de fait nier que le Saint Esprit ait été envoyé du ciel, et qu’Il habite en nous. Il est tout à fait convenable de prier que nous ne L’attristions pas, et que nous ne L’éteignions pas. Prier que nous soyons « fortifiés en puissance par son Esprit dans l’homme intérieur », est selon la Parole de Dieu ; mais nous ne devrions pas dire une seule parole qui impliquât que le Saint Esprit n’est pas ici, quand Il y est en effet. Un nuage de ténèbres pèse d’une manière bien affligeante à ce sujet sur l’esprit de bien des enfants de Dieu. Ils ne croient pas à leurs privilèges ; ils ne savent pas que le Saint Esprit habite en eux. Est-ce que le Saint Esprit n’est pas attristé par cela ? Si vous aviez quelqu’un qui s’occupât de vous chaque jour, et qu’habituellement vous missiez en question votre relation avec lui, ou que vous doutassiez du soin qu’il prend de vous, cela montrerait que vous êtes dans un état morbide. Il y a un brouillard sur vos yeux, et vous demandez les faveurs mêmes qui ont déjà été données. Il n’y a là ni sagesse ni foi. Il est parfaitement vrai que nous pouvons demander à Dieu de bénir l’évangile pour les inconvertis et de les régénérer. Mais on prie pour une effusion de l’Esprit — chose bien différente de la conversion, et qui n’est mentionnée qu’en rapport avec le fait que le Saint Esprit fut donné, d’abord aux Juifs, puis aux Samaritains, et en troisième lieu aux Gentils. Depuis ce temps-là jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas le moindre fondement pour demander à Dieu une effusion du Saint Esprit. C’est une prière sans intelligence, fondée sur ce mal, que l’on ne croit pas la vérité que le Saint Esprit est envoyé ici-bas. Dieu Lui-même ne pourrait ajouter à la bénédiction qui consiste dans le don qu’Il a déjà fait. Il y avait une grande différence entre un Juif, un Gentil, et un Samaritain ; et c’est pour cela que la chose est expressément mentionnée par rapport à ces trois classes de personnes. Le Saint Esprit ne sera jamais répandu de nouveau sur l’Église. C’est ignorer les voies de Dieu que de s’y attendre. Il a été répandu pour l’Église, aussi réellement qu’il était possible pour Dieu de Le donner. Mais après que les saints célestes auront été enlevés pour être avec Christ, lorsqu’Il viendra, il y aura dans le temps convenable une effusion de Son Esprit sur un nouveau peuple, lorsque les Juifs et les Gentils, d’une manière distincte comme tels, seront amenés à la connaissance de Jésus. Mais tant que l’Église est sur la terre, il n’y aura jamais — et il ne saurait jamais y avoir — une telle chose. Elle ne peut être répétée — pas plus qu’il ne peut y avoir une nouvelle mission du Seigneur Jésus pour accomplir une nouvelle œuvre pour nous. Et ce n’est pas une pure affaire de spéculation. La chose se lie de la manière la plus intime possible à notre culte et même à notre paix.

Vous trouverez que la foi en la présence de l’Esprit de Dieu, ou l’incrédulité à cet égard, est ce qui met les saints à l’épreuve dans ce temps-ci. Il nous convient de bien examiner si nous entrons réellement dans la pensée de Dieu à ce sujet. Comprenons bien que ce qui nous constitue chrétiens, ce n’est pas seulement que nous croyons en Christ, mais que nous sommes maintenant scellés du Saint Esprit. Il régénère un inconverti par la foi en Christ ; Il ne scelle que les croyants. C’était la preuve décisive qu’un homme était un chrétien. Pierre allègue ainsi le fait : « Quelqu’un pourrait-il refuser l’eau, pour que ceux-ci ne soient pas baptisés, eux qui ont reçu comme nous l’Esprit Saint ? ». Ce n’était pas simplement qu’ils avaient cru ; mais Dieu leur avait donné le Saint Esprit, et comment pourrait-on oser refuser des personnes dans lesquelles habitait cette personne divine, auxquelles Dieu avait conféré une grâce aussi marquée ? Tel est aussi le fondement de toute unité chrétienne — la présence du Saint Esprit. La question n’est pas uniquement de savoir s’il y a la vie, mais si nous avons cru que le Saint Esprit habite en nous ? Ce qu’on faisait le pivot de l’affaire, c’était la possession — non de la vie seulement, mais — du Saint Esprit. Ce n’est qu’après qu’ils eurent reçu le Saint Esprit, que les Gentils furent reconnus comme faisant vraiment partie de l’Église de Dieu (Act. 11). L’Église n’est pas tenue seulement de s’assurer s’il y a la vie, et de croire qu’il y a la vie dans l’âme, mais elle est encore autorisée, d’après la Parole de Dieu, à attendre jusqu’à ce qu’il y en ait une telle manifestation, qu’il soit clairement manifeste que l’homme a le Saint Esprit habitant en lui. Il n’y eut jamais une telle chose que de reconnaître une assemblée comme telle, jusqu’à ce qu’on eût pleinement reconnu qu’elle était sur le même terrain que l’Église, par la réception du Saint Esprit.

Tout cela rend bien évidente la manière dont on doit agir avec les saints maintenant. L’Église a le droit de demander cette manifestation de la puissance de l’Esprit. Ce n’est pas la vraie charité que de ne pas la chercher. « Auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse, qui est les arrhes de notre héritage jusqu’à la rédemption de la possession acquise, à la louange de sa gloire ». Sans m’arrêter sur ce dernier verset, je désire faire de nouveau cette observation, que, comme le sceau de l’Esprit ne pouvait être jusqu’à ce que l’œuvre de Christ fût accomplie (le Fils seul avant été scellé sur la terre, Lui qui n’avait pas besoin de la rédemption, mais qui vint, au contraire, nous racheter pour Dieu), et comme nous, maintenant, sur le fondement de la rédemption, nous recevons le Saint Esprit pour habiter en nous, de même nous recevons les arrhes de l’héritage. Je crois que cette dernière vérité est aussi particulière à l’Église de Dieu, depuis la Pentecôte, que le sceau de l’Esprit. Comme les disciples n’étaient pas scellés de l’Esprit, de même ils n’avaient pas les arrhes de l’héritage, jusqu’à ce que le Saint Esprit fût envoyé du ciel. Ces arrhes, c’est la puissance du Saint Esprit donnant maintenant au croyant une joie actuelle, une anticipation actuelle de la gloire vers laquelle il marche. Il se peut que dans le cœur de bien des croyants la chose soit empêchée par un manque de connaissance de la vérité, ou par l’activité de la chair, la mondanité, etc. Mais il n’en demeure pas moins vrai que, maintenant que le Saint Esprit est donné, un croyant devrait regarder en haut et demander à Dieu que, s’il y a quelque chose qui l’empêche d’entrer dans la joie de son héritage béni, la chose soit découverte et mise de côté. Je suis tout à fait sûr que le fait qu’on se contente de savoir que l’on est né de Dieu, a grandement agi au détriment des enfants de Dieu ; cela les a arrêtés court, comme si leur seul objet était d’apprendre qu’ils étaient enfants de Dieu, et rien de plus. Mais notre affaire est, après avoir cru, d’aller en avant et d’apprendre d’autres vérités, et par-dessus tout, d’apprendre à connaître Christ Lui-même. C’est précisément pour cela que si le Saint Esprit a régénéré une âme, elle ne doit pourtant pas demeurer absorbée par le fait qu’elle est régénérée ; mais, étant nés de Dieu, nous avons à aller en avant, à entrer dans les vérités bénies que Dieu nous donne, vérités qui se groupent autour de notre rédemption et aussi autour de notre gloire future, et qui trouvent leur centre dans la personne et l’œuvre de Christ.

Comme le sceau, le Saint Esprit est le témoin de la manière parfaite dont nous avons été nettoyés de nos péchés — l’effet de l’œuvre de Christ. Cela signifie cette opération de l’Esprit qui suppose que l’œuvre est accomplie, et que nous sommes mis à part pour Dieu sur le fondement de la rédemption. Nous sommes scellés, parce que la rédemption est accomplie. Si je considère la gloire, elle n’est pas arrivée. C’est pourquoi la figure change quand il parle de notre héritage. « Sceller » ne serait pas en connexion avec l’héritage, parce qu’en fait nous ne le possédons pas ; nous attendons le moment où nous serons mis en possession de tout ce que nous devons avoir et que nous aurons avec Christ. C’est ainsi qu’il est dit du Saint Esprit qu’Il « est les arrhes de notre héritage ». Le même Esprit qui nous scelle est le gage de notre brillant avenir, « jusqu’à la rédemption de la possession acquise ». D’abord, avant tout, nous avons les privilèges de la grâce divine qui nous a élus en Christ, qui nous a prédestinés à la place de fils ; qui nous a faits les objets de la plénitude de Sa faveur, sans qu’il reste une seule question, dans « le Bien-aimé » ; qui nous a déjà donnés en Christ « la rédemption par son sang, la rémission des péchés ». Mais le Saint Esprit ne nous a pas plus tôt établis dans la pleine connaissance de l’amour de Dieu pour nous, et l’effet actuel de cet amour en ôtant nos péchés, qu’Il place devant nous l’héritage. En conséquence, la relation du Saint Esprit quant à ces deux choses, est introduite. Et, comme il y a deux grandes parties dans le choix que Dieu a fait de nous personnellement, ainsi le Saint Esprit prend une double relation. Il est le sceau de la grâce et de la bénédiction que nous avons en Christ, et Il est les arrhes de la gloire que nous allons avoir avec Christ. Telles sont les relations du Saint Esprit avec le croyant individuellement. Tous les actes de l’Esprit, quant à l’Église comme corps, ont une place secondaire, si on les compare avec Ses voies avec l’âme individuellement ; quant à ces dernières, bien qu’elles soient susceptibles d’un bien plus grand développement, je m’y suis arrêté assez longuement en vue de l’objet que je me propose ici.

Nous voyons maintenant le Saint Esprit conduisant l’apôtre à une prière remarquable, qui découle du sujet qui nous a déjà occupés, ou, du moins, d’une partie de ce sujet. On trouvera que tout est placé dans la connexion la plus régulière qu’il soit possible de concevoir, même quand les choses nous sont révélées ; dans un ordre que nous n’aurions jamais pu concevoir, si Dieu ne l’eût fait connaître, mais qui, une fois communiqué, se recommande tout aussitôt au jugement spirituel. Car la bénédiction qui s’était exhalée du cœur transporté de l’apôtre dans les premiers versets de l’épître, découle, comme nous l’avons vu, de ce double caractère de Dieu : « Le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ ».

En conséquence, dans cette épître, il y a deux prières qui répondent à ce double titre. La première prière est donnée dans la portion qui nous occupe maintenant, et se rattache au titre de Dieu comme le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ ; tandis qu’au verset 14 du chapitre 3, nous avons une prière correspondante, qui répond au second titre : le Père de notre Seigneur Jésus Christ. L’une et l’autre, il est clair, ont Christ pour leur fondement et leur centre ; mais alors, c’est Christ considéré sous un point de vue totalement différent. Dans la première des deux, Christ est envisagé comme homme, et comme Celui qui appelle Dieu Son Dieu ; dans la seconde, Christ est considéré dans Sa relation plus intime encore de Fils, comme Celui qui, par conséquent, place devant nous le Père. Nous aussi, nous avons communion avec Dieu sous ces deux rapports ; nous avons affaire à Lui comme Dieu et comme Père. Il est dit dans Jean 4 : « L’heure vient, et elle est maintenant, que les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité ». Mais alors notre Seigneur ajoute : « Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en Esprit et en vérité ». Il y a une immense différence entre les deux choses. Comme le Père, Il cherche des adorateurs, communiquant la faveur ineffable d’être amenés par Lui à la connaissance de Son amour. Il forme leurs cœurs selon la manifestation qu’Il a faite de Lui-même en Christ ; Il fait déborder leurs cœurs en actions de grâces et en louanges, et les constitue ainsi adorateurs en Esprit et en vérité. Mais alors, il est ajouté que « Dieu est Esprit », etc. Quelle que soit la forme sous laquelle Il a pu se manifester dans le judaïsme, pour des raisons spéciales — quelles que soient les manifestations de Sa majesté en jugement, d’une manière tangible, tout en demeurant Lui-même, à proprement parler, caché, Il est Esprit, et par conséquent il faut qu’on Lui rende un culte spirituel. Ainsi il ne s’agit pas seulement de cet amour immense, qui cherche des adorateurs, qui les fait, et qui les met à part et les rassemble, mais bien du caractère nécessaire du seul culte qu’Il admet maintenant. Du moment qu’Il se révèle pleinement, Il ne peut rien reconnaître sinon un culte réel dans l’Esprit. Le temps des formes, des rites et des cérémonies est totalement passé. Dès lors, ce n’est pas seulement qu’Il ne les demande pas, mais Il les dédaigne ; Il les traite comme une injure faite à Sa nature, une insulte à Son Fils, et comme ce que Satan substitue à la puissance du Saint Esprit. « Il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en Esprit et en vérité ». Je crois qu’il est important de faire ressortir la connexion qui se trouve dans la Parole bénie que Dieu a donnée, de manière à montrer que la distinction signalée n’est pas le fruit de l’imagination. Hélas ! que les hommes soient séduits jusqu’à inventer, en présence des trésors ignorés de la Bible ! Tout ce que nous avons à faire, c’est de nous incliner devant ce qui nous est donné. Sans doute nous pouvons avoir à apprendre ; mais quand la vérité est connue, quelle miséricorde d’être entièrement délivré du vain désir de quelque invention ou du besoin d’une telle chose ! Il est naturel pour l’homme, quand il n’est pas satisfait, de chercher à trouver des nouveautés qui l’excitent. Mais Dieu est infiniment au-dessus de l’homme, et Sa Parole est riche au-delà de toute pensée ; en sorte que tout ce que nous avons à faire, c’est de soumettre nos âmes à l’Écriture, étant bien assurés en même temps que la révélation de Dieu, tout ancienne qu’elle est, offre pratiquement ce qui est toujours nouveau pour le cœur.

Nous avons donc dans notre épître ces deux prières ; en introduisant ici la première, l’apôtre dit : « C’est pourquoi moi aussi, ayant entendu (parler) de la foi que vous avez au Seigneur Jésus, et de l’amour que vous avez pour tous les saints ». Or, par cela même que notre amour donnerait lieu à la pensée de quelque chose de la part de l’homme qui nous donnerait de l’importance, bien qu’il soit sur le point de parler de l’amour pour les saints, il introduit le sujet par « la foi », parce que cela nous reporte sur Son amour pour nous plutôt que sur notre amour pour Lui. « C’est pourquoi », dit-il, « moi aussi, ayant entendu (parler) de la foi que vous avez au Seigneur Jésus » ; puis il en donne la conséquence : « et de l’amour que vous avez pour tous les saints ». C’est là une parole bien importante pour juger de notre amour. Nous sommes tous enclins à former un cercle même parmi les enfants de Dieu — à choisir ceux que nous préférons, ceux qui nous conviennent le mieux, dont les pensées, les sentiments et les habitudes sont plus ou moins les mêmes que les nôtres, ou ceux, au moins, qui ne nous éprouvent pas beaucoup. Mais alors, ce n’est pas là l’amour pour les saints. Il y a en cela plus d’amour pour nous-mêmes que d’amour manifesté envers eux. La chair aime ce qui est agréable à nous-mêmes — ce qui ne nous cause pas de peine, ce qui est peut-être une satisfaction donnée aux qualités aimables de la nature. Tout cela peut bien se rencontrer où il n’y a réellement aucun exercice de la nouvelle nature, aucune énergie puissante de l’Esprit de Dieu agissant dans nos cœurs. Nous avons toujours à éprouver nos âmes, et à nous demander où nous en sommes à cet égard. Le Seigneur Jésus est-Il le motif prédominant et l’objet principal dans nos cœurs ? Est-ce avec Lui et pour Lui que nous pensons à tous les saints et que nous sentons à leur égard ?

J’admets pleinement que l’amour envers les saints ne peut ni ne doit revêtir la même forme envers tous. Il faut que cela soit dans l’énergie et le discernement de l’Esprit, d’une manière différente selon ce qui appelle l’exercice de l’amour. Il est vrai que vous devez aimer même une personne qui est sous la discipline, mais ce serait une grande méprise que de supposer que votre amour dût être montré de la même manière que si elle n’y était pas. Vous ne cessez pas de l’aimer ; et même, s’il n’y a pas d’amour, vous n’êtes jamais dans une position ou un esprit convenable pour exercer la discipline avec le Seigneur, s’il n’y a pas une sainte haine du péché — de l’indignation peut-être — mais aussi une charité réelle envers la personne. Mieux vaudrait attendre en regardant à Dieu, s’il n’en est pas ainsi dans nos cœurs, jusqu’à ce que nous puissions nous occuper de la chose dans l’esprit de la grâce divine. Sans doute il faut agir en justice ; mais, même en agissant à l’égard de son enfant, il ne devrait pas y avoir une telle chose que de le châtier dans la colère. Tout ce qui n’est que le résultat d’une impulsion soudaine, n’est pas un sentiment qui glorifie Dieu à l’égard du mal. Ainsi donc, dans les cas de discipline, il devrait y avoir le jugement de soi-même, et une grande patience aussi, à moins qu’il ne s’agisse d’une chose tellement grave, que l’hésitation à ce sujet serait une faiblesse coupable, ou un manque de décision et de jalousie pour Dieu ; car il existe certains péchés qui sont tellement odieux à Dieu et aux hommes, qu’ils exigent, si nous avons le sentiment de Sa sainteté et si nous sommes obéissants, que nous agissions à leur égard avec une solennelle énergie et pour ainsi dire au moment même. Dieu veut que l’arène du péché devienne la scène du jugement de ce péché selon Sa volonté.

Supposons que quelque chose ait été fait dans l’assemblée publiquement, que de fausses doctrines soient annoncées au milieu du peuple de Dieu, si la puissance de Dieu était là, et s’il y avait du cœur pour les droits de Dieu, ce qui serait dû à Sa majesté serait peut-être d’agir à cet égard sans délai. C’est ce qui résulte assez clairement de la Parole de Dieu, où nous trouvons, dans un cas d’hypocrisie positive et de mensonge contre Dieu, la prompte action du Saint Esprit par le moyen de l’apôtre, en présence même de l’Église, pour le jugement immédiat de la fraude à laquelle on avait essayé d’associer Celui qui habitait dans l’Église. Je nie qu’il y eût en cela un manque d’amour : c’était plutôt ce qui devait nécessairement accompagner l’action de l’amour divin, par la puissance du Saint Esprit, dans l’assemblée, ou du moins par le moyen de Pierre, comme l’instrument spécial de Sa puissance au milieu d’elle. C’était sans doute un jugement sévère ; mais c’était le fruit d’un désir profond du bien des saints de Dieu, et d’un sentiment d’horreur dans la pensée qu’un tel péché pût trouver une place et un abri parmi eux, et dans la pensée que le Saint Esprit fût déshonoré d’une manière aussi vile, et contristé, ainsi que l’Église entière, si ce péché était toléré. Mais dans les cas ordinaires, ce même amour attendrait et permettrait qu’il fût donné du temps, afin que la faute fût avouée et qu’on s’en repentît. Dans neuf cas sur dix, les méprises viennent de la précipitation, parce que nous sommes enclins à être jaloux pour notre propre réputation. Oh ! combien peu nous avons réalisé que nous sommes crucifiés avec Christ et morts avec Lui ! Nous sentons qu’il y a du scandale et quelque chose qui affecte l’esprit de tous ; ce n’est pas là la puissance du Saint Esprit, mais l’égoïsme intéressé qui est à l’œuvre dans nos cœurs. Nous n’aimons pas perdre notre réputation, ni partager la douleur et la honte de Christ dans ceux qui portent Son nom. Ce n’est pas sans doute que l’on voudrait traiter légèrement ce qui est mal : c’est là une chose qui ne serait jamais convenable, qu’il s’agisse d’une affaire grave ou d’une affaire comparativement peu importante. Nous ne devrions jamais justifier le moindre mal, soit dans nous-mêmes, soit dans d’autres, mais exercer nos âmes à juger habituellement ce qui déshonore le nom du Seigneur, ne fût-ce qu’une parole dite avec précipitation. Si nous commençons par être insouciants au sujet de petites fautes, il n’y a rien qui puisse nous préserver de péchés graves, sinon la pure miséricorde de Dieu. Si l’amour envers tous les saints agissait dans nos cœurs, il y aurait moins de précipitation.

Quelquefois nous interprétons mal les choses, et nous tâchons de donner, ce nous semble, une bien sombre impression, lorsque le mal n’existait qu’en apparence. Prenons garde de juger d’après ce qui donne une première impression, tandis qu’il sera peut-être prouvé que la réalité est tout autre : ce n’est pas là un jugement juste. Nous devrions chercher à juger les choses d’après un patron plus élevé et en la lumière de Dieu. Dans ces matières sérieuses, nous sommes tenus de nous assurer des choses, et de ne jamais céder à nos soupçons. Tout jugement, s’il est selon Dieu, doit résulter de ce qui est connu et certain, et non de ce qui est une conjecture — trop souvent l’effet de prétentions mal fondées à une spiritualité supérieure. Nous en trouvons constamment l’importance ; et si nos âmes étaient plus simples à cet égard, on ferait moins de méprises.

Quand le cœur est vrai, Christ a la première place ; puis « tous les saints » deviennent les objets de notre amour. Supposez le cas de deux personnes en faute, l’une objet d’une prédilection spéciale, et l’autre peu aimée ; cette dernière, je n’ai guère besoin de le dire, est en grand danger d’être traitée avec défaveur. L’objet de mon aversion serait entouré d’un nuage qui obscurcirait la vérité, quelque évidente d’ailleurs qu’elle pût être pour ceux qui sont sans passion ; tandis qu’au contraire l’objet de prédilection trouverait de quoi contrebalancer les preuves de sa culpabilité par suite de la répugnance de la part de ses amis à reconnaître aucune faute en lui. Ces sentiments sont l’un et l’autre, dans de telles circonstances, entièrement opposés à la pensée de Dieu. Et même le favoritisme comme la prévention sont clairement condamnés par Sa Parole bénie. « La sagesse d’en haut est premièrement pure, ensuite paisible, modérée, traitable, pleine de miséricorde et de bons fruits, sans partialité, et sans hypocrisie » (Jacq. 3, 17).

L’amour « pour tous les saints » est enjoint parce qu’ils sont des saints. Les aimer, parce que Dieu les a mis à part et les a introduits dans une relation éternelle avec Lui-même, c’est là seulement le vrai amour — l’amour chrétien pour ceux qui sont tels. Notre grande difficulté est toujours de faire que nos pensées, nos sentiments et nos actions découlent de ce motif. Comprenez-moi bien. Je ne veux pas dire qu’il y ait du mal à avoir des amis. Notre Seigneur en avait. Il aimait Jean d’une manière dont Il n’aimait pas les autres, et il y avait un autre sens dans lequel Il les aimait tous pareillement ; comme Ses saints ils étaient tous précieux à Ses yeux, d’une manière qui excluait toute comparaison. Il pouvait apprécier la fidélité de quelques-uns de Ses serviteurs ; il pouvait y avoir dans tous ceux qui L’entouraient, ce qu’Il avait à encourager, à reprendre ou à corriger ; et nous devons laisser de la place pour toutes ces choses. Il y a la grande base de l’amour pour tous les saints ; mais il est clair que nous ne sommes pas tenus de communiquer à tous indistinctement des affaires d’une nature personnelle, par cela seul que ce sont des saints. Par exemple, les saints ne sont pas toujours les plus sages des hommes ; et, si d’un côté nous ne devons pas méconnaître leur position comme saints, nous ne sommes pas tenus de faire connaître nos difficultés à tous, ni de chercher un conseil dans ce qui peut demander un jugement spirituel et mûr, auprès de ceux qui ne peuvent être d’aucun secours quelconque dans l’affaire. Il faut qu’il y ait toujours de l’amour. Ceci conduit à la valeur de ce principe divin : « que… l’un estime l’autre supérieur à lui-même ». Je maintiens que cela est vrai de tous les saints. Il s’agit peut-être d’un homme qui n’a pas deux idées et qui pourtant a Christ devant son âme. Peut-être est-il bien ignorant et bien sot — d’un esprit prompt peut-être, ayant de forts préjugés, faible dans ses sympathies, et sans valeur comme conseiller ; mais s’il s’agit évidemment d’une âme qui demeure attachée à Christ et qui estime Christ par-dessus toutes choses, ne puis-je pas et ne dois-je pas l’estimer supérieur à moi-même ? Ne vois-je pas qu’il y a ce qui reprend mon âme — ce qui me rafraîchit, et m’édifie, bien plus que s’il s’agissait seulement de l’ami le plus fidèle et du plus sage conseiller ? Dans le moindre des saints de Dieu, il y a ce qui à la fois encourage et humilie le cœur. Je ne dois pas estimer une personne pour une qualité qu’elle ne possède peut-être pas : Dieu ne place pas devant nous un tel fantôme, et Il ne peut le faire. D’un autre côté, il est bon que nous nous rappelions combien sont précieux tous les saints comme tels. Montrez-moi le plus faible et le plus fatigant d’entre eux tous… nous pouvons néanmoins et nous devons cultiver envers lui, comme enfant de Dieu, un respect réel et vrai. Ce n’est pas seulement que Dieu est pour lui, mais il y a ce qui est de Christ en lui ; et cela parle assez haut, au-dessus de toute autre considération, pour le recommander à celui qui attache du prix à la communion avec le Père et le Fils.

Au contraire, quand nous pensons à nous-mêmes, ne devrions-nous pas sentir que de choses il y a en nous qui ne sont pas selon Christ ? Puissions-nous toujours nous rappeler spécialement ce en quoi nous manquons et attristons l’Esprit de Dieu ! Cela aurait pour effet de diminuer et de rabaisser l’estime que nous avons de nous-mêmes. Pourrions-nous entretenir une si haute opinion de nous-mêmes, si nous sentions, comme nous le devrions, nos manquements, hélas ! si fréquents, en face de la riche et parfaite grâce de Dieu envers nos âmes ? Tandis que, si nous avions devant nous dans les autres, non leurs manquements, mais l’amour de Christ pour eux et Sa vie en eux, et la gloire à laquelle ils appartiennent, quel en serait l’effet ? « L’amour… pour tous les saints ». Discerner Christ dans les saints, c’est la puissance de l’amour qu’Il veut que nous leur montrions. Dans certaines circonstances, s’il s’agit d’une personne à l’égard de laquelle vous espérez que Dieu pourra la manifester comme étant de Ses saints — pour laquelle vous avez prié et dont vous avez cherché le bien d’une manière ou d’une autre, il se pourrait pourtant que dans un temps donné, il y aurait du péché à vous associer avec elle comme avec un chrétien. Je suppose quelqu’un qui, par quelque souillure de chair ou d’esprit, a amené du déshonneur sur le nom du Seigneur. Mais quoique nous puissions, pour le moment, nous abstenir de tout ce qui exprimerait des relations d’affection, néanmoins l’amour trouve toujours l’occasion de se montrer, bien que ce ne soit quelquefois qu’en la présence de Dieu, et non d’une manière manifeste aux yeux des hommes. Ainsi donc, quant à la manière de montrer de l’amour, nous devons sonder la Parole de Dieu. Mais le principe général ne peut être mis en question, savoir que Dieu veut placer tous les saints sur nos cœurs. Il les porte tous sur Son propre cœur, et Il veut que nous cultivions cette étendue de l’affection de famille.

D’après cela, Paul qui entrait dans ces choses dans une mesure que même les saints auxquels il s’adressait connaissaient peu d’une manière pratique, ajoute : « C’est pourquoi moi aussi… je ne cesse pas de rendre grâces pour vous, faisant mention de vous dans mes prières, afin que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de gloire, vous donne l’esprit de sagesse et de révélation, dans sa connaissance ». Nous trouvons ici le titre dont il a été si souvent question — « le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ ». Il va parler des voies de Dieu avec l’homme et même avec Christ comme homme ; car nécessairement c’est uniquement dans ce sens qu’on peut parler ainsi. Mais s’Il agit avec nous sur ce pied-là, agissant en Sa miséricorde par le moyen de l’homme ressuscité, et donnant de nouvelles bénédictions en accord avec ce caractère, toutefois Il est « le Père de gloire », en ce qu’Il est le chef et la grande source de toute bénédiction céleste, Celui duquel tout découle pour la gloire de Son propre nom et pour Sa louange. Cela nous fait aussitôt entrer dans le secret de cette prière. La gloire est la pensée principale — non le seul trait, mais le trait saillant de la prière. Ainsi donc le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de gloire, se propose de nous donner, et agit pour nous donner, par Lui certaines bénédictions ; et on trouvera que la base de la brillante colonne de bénédictions, est Christ ressuscité et glorifié à la droite de Dieu. Si vous regardez la prière du chapitre 3, il n’y a pas un mot sur le fait qu’Il y a été haut élevé « au-dessus de toute principauté et autorité et puissance » ; car le sujet de cette prière n’est nullement la gloire, ni ce que Dieu a fait ; ce n’est pas quelque chose qui a été conféré à Christ, mais Christ Lui-même et Son amour, la somme et la substance de ma bénédiction ; ainsi qu’il y est dit : « de sorte que le Christ habite dans vos cœurs par la foi ». Ici, dans le chapitre 1, la prière est en toute manière le contraste de celle du chapitre 3 : Dans cette dernière, l’amour est l’idée mère, et non la gloire. Il est bon de nous rappeler toujours cette merveilleuse connexion entre l’amour et la gloire ; parce que l’un ne peut aller sans l’autre. Et quoique la gloire soit l’effet et la brillante manifestation de l’amour, toutefois l’amour est encore plus profond et n’est jamais pleinement connu sinon dans la présence immédiate de notre Père. Le royaume n’est pas, en notre cas, la preuve de l’amour de Dieu ; la preuve de cet amour, quant à nous, c’est que nous devons être avec le Fils dans la maison du Père, et que nous serons manifestés avec Christ en gloire. Qui est-ce qui nous amène là ? Le monde ne sait rien de la maison du Père. C’est une scène en dehors de cette terre, dans laquelle nul œil d’homme ici-bas ne saurait absolument pénétrer. Mais Il nous manifestera aussi devant le monde.

D’après cela, vous verrez que dans Jean 17, 22, quant à la gloire que le Père donne au Fils et que le Fils nous donne à cause de Son amour infiniment parfait — ce don est fait afin que le monde connaisse que le Père a envoyé le Fils, et qu’Il nous a aimés comme Il a aimé le Fils. Pour prouver cet amour, la gloire, là comme ici, est présentée d’une manière saillante. Comme nous avons la prière qui a rapport à la gloire dans Éphésiens 1, et la prière qui a rapport à l’amour dans Éphésiens 3, ainsi la gloire qui est donnée, dans Jean 17, a pour but de prouver ce qui sans cela n’aurait pas été si clairement donné à connaître au monde. Les hommes ici-bas peuvent voir la gloire, mais ils ne sauraient entrer dans la pensée de l’amour. Le monde pourra conclure du fait que nous sommes dans la gloire avec le Seigneur Jésus, que nous étions aimés du même amour dont le Seigneur Jésus était aimé. La gloire s’exprime extérieurement, mais l’amour pénètre plus profondément encore et nous introduit dans la scène où le Père se révèle en Son Fils bien-aimé. C’est là ce que je puis appeler une scène d’intimité, une scène de famille en dehors du monde, le repos et la demeure célestes. Ce n’est pas seulement l’éclat, la gloire, la majesté ou la puissance. Toutes ces choses recevront leur pleine manifestation ; mais il y a quelque chose de plus profond que tout le reste, et qui est à la racine de tout. C’est l’amour, qui, quoiqu’il soit ce dont il est le moins question, n’en est pas moins ce qui était réellement avant toutes choses, et ce à quoi toutes choses se rapporteront. C’est ce qu’il y a de plus élevé, et il est éternel. Le royaume peut avoir son terme — l’amour jamais. La manifestation devant le monde aura un commencement et une fin. Mais de même que l’amour ne finira jamais, ainsi il a toujours été dans le sein de Dieu le Père.

Ainsi nous avons cette prière « que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père de gloire, vous donne l’esprit de sagesse et de révélation, dans sa connaissance » ou plutôt dans la pleine connaissance de Lui. Il pourrait y avoir un peu de difficulté, si c’était seulement « sa connaissance ». La vraie signification du mot, c’est « la pleine connaissance de Lui ». Ils Le connaissaient déjà, mais Paul priait qu’ils Le connussent encore plus. Il désirait qu’ils devinssent des pères en Christ, et ce qui constitue un père, c’est une connaissance plus profonde et toujours croissante de Christ Lui-même. L’Esprit de Dieu pouvait seul leur en donner l’entrée ; mais c’était dans la pleine connaissance de Lui. « Afin que les yeux de votre cœur étant éclairés, vous sachiez quelle est l’espérance de sa vocation, et quelles sont les richesses de la gloire de son héritage dans les saints ; et quelle est l’excellente grandeur de sa puissance envers nous qui croyons ». Nous avons ici trois choses qui nous sont présentées, et qui demandent une considération spéciale.

Premièrement, il y a « l’espérance de sa vocation ». Or je comprends que là il fait allusion, dans une certaine mesure, à ce que nous avons déjà trouvé dans la première partie du chapitre. « Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ qui nous a bénis de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes en Christ, selon qu’Il nous a élus en Lui, avant la fondation du monde, afin que nous fussions saints et irréprochables devant Lui en amour ». Dans tous les cas, je crois que le verset 4 est ici dans la pensée de Paul. Le verset 5 présente Sa place comme Père. « L’espérance de sa vocation » est fondée sur la plénitude de bénédiction qui nous appartient selon ce dessein de Dieu qui est déjà nôtre en Christ — qui nous a été déjà donné à connaître et qui a été reçu dans nos cœurs — la vocation de Dieu « afin que nous fussions saints et irréprochables devant Lui en amour ». Mais alors si telle est « l’espérance de sa vocation » (car tout est présenté comme découlant de Dieu Lui-même), il ajoute : « et quelles sont les richesses de la gloire de son héritage dans les saints » (v. 18). Ici il fait clairement allusion à ce que nous avons trouvé dans le corps du chapitre : l’héritage, et non la vocation seulement. La vocation était l’œuvre efficace de la grâce de Dieu, et les richesses de l’héritage étaient plutôt la gloire qui convenait à une telle vocation. Mais, outre ce caractère de la gloire, il y a premièrement la portion cachée en harmonie avec le fait d’être élus « afin que nous fussions saints et irréprochables devant Lui en amour » — appelés à être le reflet de Sa propre nature, sainte et pleine d’amour, que nous possédons en effet dans la vie de Christ, et que nous aurons, dans son plein développement, quand nous serons transformés en Son image de gloire en gloire. Car Sa vocation a l’espérance qui lui est propre, l’espérance de ce dont nous jouirons en Sa présence.

Ainsi donc, il y a, en second lieu, l’héritage. Il désirait qu’ils connussent les richesses de la gloire de l’héritage, afin qu’ils connussent mieux l’héritage. Mais il emploie une expression remarquable — « les richesses de la gloire de son héritage dans les saints ». Vous devez vous prémunir soigneusement contre une erreur assez générale sur ce sujet, savoir, que les saints signifient l’héritage. Ce n’est nullement la force de l’expression : il y a plus, je n’ai aucune hésitation à dire que cela altérerait la bénédiction principale de la vocation de l’Église. Si nous examinons l’Ancien Testament, nous trouvons qu’Israël était l’héritage de Dieu et le peuple de Dieu ; et que Dieu, par le moyen d’Israël, prit possession de la terre. Lorsque le jour viendra où Dieu doit être roi, et plus que roi, lorsqu’Il prendra sous Son gouvernement l’univers entier, comment la chose s’accomplira-t-elle ? Sera-ce par Israël ? Non, mais par le moyen de Ses saints célestes — de l’Église de Dieu. L’expression semble être large à dessein. Bien positivement, elle signifie les saints changés ou ressuscités, de manière à être en la ressemblance de Christ, dans une condition entièrement céleste. Telle sera la manière dont Dieu réclamera bientôt l’héritage et le prendra en Ses propres mains. Quand Il prit Canaan, Il ne descendit pas pour en prendre possession par une puissance céleste, mais par le moyen de Son peuple. Mais quand Dieu expulsera les méchants esprits de toute connexion avec les lieux célestes, quand Il abolira toute puissance sur la terre — tout ce qui est en opposition à Lui-même, et qu’Il réduira l’univers entier à la soumission au nom de Christ, qui sont ceux qui sont destinés à le prendre en Son nom, comme Israël entra dans la terre de Canaan ? Les saints ressuscités. De là découle la signification de ces mots : « les richesses de la gloire de son héritage dans les saints ». L’idée commune que les saints constituent l’héritage, est antiscripturaire. Car dans tout le Nouveau Testament, les saints sont toujours représentés avec le plus grand soin comme — non pas l’héritage, mais — les héritiers, « héritiers de Dieu, cohéritiers de Christ ». Ils ne sont désignés nulle part comme l’héritage, mais, au contraire, ce qui est révélé comme l’héritage signifie les choses dans les cieux et les choses sur la terre ; et l’Église est toujours soigneusement séparée de ces choses. Je regarde ce point comme ne pouvant être laissé comme une question à discuter ; le témoignage de la Parole est trop abondant et trop précis. Nous ne devrions jamais permettre que ce qui est clairement révélé dans l’Écriture devienne un sujet de débat ou une chose incertaine, parce que le doute a toujours un effet nuisible à l’âme, en même temps qu’il insulte Dieu et attriste Son Esprit. La certitude qu’un autre possède ne peut nous suffire ; mais nous n’avons pas besoin d’hésiter à parler clairement, quand nous n’avons aucun doute quant à la pensée de Dieu sur un sujet. Et si nous envisageons ce qui vient d’être dit sous ce point de vue, la chose s’accorde pleinement avec la structure du chapitre. Comme nous avons trouvé « l’espérance de sa vocation » dans la première clause, répondant à ce que nous avons vu dans les premiers versets, de même « la gloire de son héritage » répond aux versets qui forment le milieu du chapitre. Dieu se propose d’avoir l’univers entier béni et heureux sous Christ ; non seulement la gloire qui Lui est donnée dans le ciel, ou un peuple qui Lui est soumis ici-bas. Nous avons ici une vue incomparablement plus vaste de ce qui est dans l’intention de Dieu. Christ aura la bénédiction et la gloire universelle, toutes les choses dans le ciel et sur la terre Lui étant assujetties ; et nous avons en Lui obtenu cet héritage.

Le point qui reste, c’est : « l’excellente grandeur de sa puissance envers nous qui croyons selon l’opération de la puissance de sa force ; qu’Il a opérée dans le Christ, en le ressuscitant d’entre (les) morts (et Il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux célestes, etc.) ». Voyez v. 20, etc. Pourquoi ne pas appeler l’attention sur la puissance qui fut déployée quand Il créa le monde ? Lorsque Dieu s’adresse à Israël, Il parle de Lui-même comme de Jéhovah-Dieu, qui fendit la mer Rouge et qui tira Son peuple hors d’Égypte « à main forte, et avec un bras étendu ».

Mais qu’y a-t-il pour nous dans le passage de la mer Rouge ? La résurrection de Christ ; non pas l’incarnation de Christ, ni même Sa croix, bien que nous ne puissions nous passer ni de l’une ni de l’autre. La croix, quoiqu’elle soit la chose la plus essentielle de toutes pour la gloire de Dieu et pour nos besoins, ne nous donne pas la puissance de Dieu. Elle nous montre ce que Dieu appelle sa faiblesse, et si je considère Christ à la croix, Il fut « crucifié en infirmité ». C’était Celui qui se soumettait à tout, qui se mettait au pouvoir de Ses créatures ; qui passa sous le jugement de Dieu et succomba sous la chétive main de l’homme. Mais quand nous considérons la résurrection, toute trace d’infirmité a disparu pour toujours, et nous ne voyons plus que la puissance de Dieu la plus triomphante ; une puissance bien au-delà de tout ce qui se lie soit avec la loi, soit avec la création. Il s’agissait de la descente au sépulcre, non d’un homme simplement, mais de cet homme-là qui avait porté en Sa personne les péchés de toute âme qui croit en Lui. Et Dieu a été si complètement glorifié au sujet de ces péchés, qu’Il relève l’homme méprisé, rejeté, abandonné, de dessous ce fardeau inouï, et le place à Sa droite dans les lieux célestes. Là nous avons le merveilleux contraste entre le sépulcre dans lequel Christ était couché, et la gloire dans laquelle Il est maintenant haut élevé, toujours comme homme — l’homme glorifié — infiniment au-dessus de toute créature, quelqu’élevée et bénie qu’elle soit : au-dessus de créatures qui, dans un sens, étaient bien au-dessus de l’homme, et qui n’avaient jamais connu ni corruption ni chute : « au-dessus de toute principauté, et autorité, et puissance, et domination », les puissances en haut, les dignités dans le ciel, « et (au-dessus) de tout nom qui se nomme, non seulement dans ce siècle, mais aussi dans celui qui est à venir » (v. 21). Il y aura alors le déploiement des armées angéliques, « quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, et tous les saints anges avec Lui ». Mais Il est maintenant élevé au-dessus d’eux tous. Il n’y aurait rien de nouveau qu’Il fût au-dessus d’eux comme Dieu ; Il l’est toujours. Mais Il a porté l’humanité au-dessus d’eux ; Il y est haut élevé en notre nature — ressuscité, sans doute, mais toujours dans la nature de l’homme. Il nous a donné une association actuelle avec le trône de Dieu. Car l’application de tout cela nous est donnée ici — « l’excellente grandeur de sa puissance envers nous qui croyons selon l’opération de la puissance de sa force ; qu’Il a opérée dans le Christ, en le ressuscitant d’entre (les) morts ». Ce n’est pas seulement « l’excellente grandeur de sa puissance » envers Christ, mais envers nous en Christ. La puissance qui opéra en nous délivrant de Satan, qui nous donna notre place, comme saints, devant Dieu, est identiquement la même puissance qui ressuscita Christ d’entre les morts et qui Le mit dans la place la plus glorieuse au ciel. Y a-t-il quelque chose qui soit trop difficile après ceci ? Si nous savions que nous avons à notre disposition la puissance qui appela le monde à l’existence, quel compte tiendrions-nous des impossibilités ?

Mais nous avons une énergie plus grande que celle qui fut déployée dans la création — rien moins que celle qui ressuscita Christ d’entre les morts. La Parole de Dieu nous le dit positivement. Pourquoi donc sommes-nous si faibles ? Parce que nous le croyons si faiblement. La grande masse des enfants de Dieu n’en ont jamais entendu un seul mot. Mais même ceux qui, par la miséricorde de Dieu, l’ont entendu, combien peu entrent-ils dans la chose ! Une chose est de ne pas la nier comme doctrine ; autre chose est de l’appliquer et d’y vivre, non seulement quand il s’agit de grandes difficultés et de fortes épreuves, mais encore quant au train ordinaire des devoirs de chaque jour, de ce qui est convenable — pour nous comme saints — nous soumettant à la volonté de Dieu. Nous oublions, si nous sommes dans des circonstances difficiles, si nous sommes au milieu d’adversaires, si nous avons affaire à des ennemis invisibles, ce que c’est que l’apôtre demande pour nous : que nous sachions « quelle est l’excellente grandeur de sa puissance envers nous qui croyons selon l’opération de la puissance de sa force ; qu’Il a opérée dans le Christ en le ressuscitant d’entre (les) morts ». Si la puissance du Saint Esprit opérait ainsi dans Paul, ce n’était que la réponse du serviteur au cœur du Maître, qui intercédait en haut, afin que nous connaissions la puissance qui est au-dessus de tous les obstacles. Nul saint n’aurait pu connaître cela avant que la résurrection fût accomplie. C’est « envers nous qui croyons », c’est-à-dire, strictement, envers les saints du Nouveau Testament, appelés et introduits après la mort et la résurrection du Seigneur.

Hélas ! « comment sont tombés les hommes forts » ! Combien peu ils réalisent maintenant leurs propres privilèges ! Ainsi, supposons qu’on attende un libérateur pour une chose quelconque ; il serait parfaitement convenable de demander instamment ce libérateur — de sentir qu’il tarde à venir. Mais après qu’il serait venu, croyez-vous qu’il serait bon et convenable de le presser de venir ? C’est la méprise que les gens font maintenant. Ils s’emparent du langage des Psaumes et l’appliquent à l’expérience chrétienne. Mais vous n’auriez pas pu avoir dans les Psaumes la révélation de ce que nous avons ici. Sans doute vous trouvez la miséricorde de Dieu avant la résurrection de Christ ; mais il n’y avait pas une telle chose que l’opération de cette puissance qui a ressuscité Christ d’entre les morts. C’est une profonde méprise, quand on pervertit l’Ancien Testament de manière à en faire le langage de notre expérience. Il y aurait du péché, si nous ne nous servions pas de l’Ancien Testament pour notre profit et pour notre bien ; mais ce dont nous parlons serait non en user, mais en abuser. Il y a de l’incrédulité à confondre aucune des choses d’autrefois avec la puissance céleste de la résurrection de Christ.

Voici donc la mesure de la puissance qui opère envers nous — c’est la même puissance qui a opéré en Christ. Comment aucune de ces choses peut-elle être connue selon Dieu ? « Dans la pleine connaissance de Lui ». Vous n’apprendrez jamais aucune vérité comme il faut, sinon dans la connaissance de plus en plus profonde de Christ. C’est dans le manque de cela que gît la cause de la faiblesse parmi nous : la doctrine toute nue n’est pas la connexion avec Christ ; quand la fleur est séparée de ce qui est sa source, son soutien et son appui, elle est dès ce moment-là condamnée à dépérir et à mourir. Nous avons en Christ ce qui est excellent et plein de bénédiction ; mais pour les connaître, ces choses comme telles, pour en éprouver la vérité, pour en jouir toujours, il est nécessaire que nous nous en occupions dans leur connexion avec Christ. Si je considère Christ, je vois en Lui la vie même que Dieu m’a donnée, et l’espérance aussi qui est propre à cette vie, même en ce qui concerne l’héritage. Qui oserait dire qu’il serait présomptueux pour Christ de l’avoir ? Bien au contraire, c’est ce qui Lui est dû. Tel est l’amour de Dieu pour Lui comme homme, et telles sont les délices que Dieu trouve en Lui, que Dieu ne pourrait priver Christ d’une seule des choses qu’Il a créées. Christ est héritier de tout ; et nous, cachés en Christ, nous pouvons entrer dans la plénitude de Sa vocation, et dans l’héritage, parce que nous sommes introduits dans une union réelle avec Christ. Et comme vous ne pouvez connaître la vocation et l’héritage, sinon dans la pleine connaissance de Christ, il en est de même aussi de « l’excellente grandeur de sa puissance ».

La hauteur de cette puissance, c’est ce que Dieu a déployé quand Il a ressuscité Christ d’entre les morts, et qu’Il « l’a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes », etc. Il lui a donné la place suprême de gloire. Imaginez tout ce qu’on peut concevoir de l’ange le plus élevé, ou de l’archange ; Christ a reçu une dignité plus élevée encore ; et Il occupe cette place en nous associant avec Lui maintenant, pendant que nous sommes ici. Il est Celui qui non seulement nous reconnaît et montre Sa bonté envers nous, et emploie pour notre bien la grandeur de Sa gloire, mais qui fait beaucoup plus encore. Celui qui est à la tête d’un vaste empire peut faire servir le trône au bien de Ses sujets et à la gloire de ceux qu’Il désire honorer ; mais il n’y a pas d’association positive, immédiate, personnelle avec Lui-même. C’est là ce que le chrétien possède avec Christ. Ce que nous avons ici, ce n’est rien moins que d’être un avec Lui.

C’est pourquoi il est ajouté que ce Sauveur béni, sous les pieds duquel Dieu a assujetti toutes choses, a été donné aussi pour être « Chef sur toutes choses à l’Église ». Il n’est pas dit : Chef sur l’Église, mais « Chef sur toutes choses à l’Église » (v. 22). L’Église partage Sa place comme Chef sur toutes choses ; mais elle le fait comme étant Son corps, dans une union inséparable avec Lui. L’homme glorifié est haut élevé pour avoir une suprématie universelle sur toutes les créatures de Dieu ; et c’est là ce qu’Il partage avec nous, et ce qu’Il manifestera bientôt comme notre portion avec Lui. Le chrétien est maintenant un membre du corps de Christ — maintenant donc, par le Saint Esprit, il est dans l’association la plus intime avec Christ, non seulement comme ayant la vie en Lui, mais comme jouissant du privilège d’être un avec Celui qui est haut élevé comme chef suprême sur toutes choses. Il est un membre de Son corps ; et quoique ce ne fût pas à Ève directement que Dieu donna la domination, toutefois par Sa volonté elle y avait part. La domination fut donnée à Adam, mais par association Ève la possédait avec Adam. C’est ainsi que l’Église la possède comme l’Ève — dépendante et associée — de l’homme céleste, du dernier Adam. Cela nous donne immédiatement une vue claire de ce qu’est notre vocation, et de la raison pour laquelle Dieu demande une séparation complète d’avec le monde. Au temps du Protecteur en Angleterre, il aurait été inconvenant pour ceux qui étaient attachés à la famille royale de rechercher ou même d’accepter un poste d’honneur. Il en est de même du chrétien maintenant. Nous appartenons à Celui qui est caché loin de la terre — maintenant haut élevé dans cette place de suprématie universelle. Le monde que nous voyons n’est pas encore assujetti à Christ d’une manière pratique, quoique pour la foi toutes choses le soient ; mais nous savons qu’Il est haut élevé, « Chef sur toutes choses à l’Église ».

Nous Lui appartenons, et Il voudrait que nos cœurs fussent élevés au-dessus de la scène présente. L’Église est « son corps, et la plénitude de Celui qui remplit tout en tous » (v. 23). Elle est le complément, ou ce qui complète Christ — envisagé comme l’homme ressuscité d’entre les morts. Comme Fils de Dieu, sans doute, Il ne demande rien pour compléter Sa gloire ; mais comme homme, Il le demande. Il ne serait pas complet dans Sa gloire de résurrection sans l’Église, pas plus qu’Adam n’aurait été complet sans Ève. Et, Dieu, dans les conseils de Sa gloire, l’a ainsi ordonné. De toute éternité, Son intention était que, lorsque Son Fils deviendrait cet homme béni et glorifié, Il partageât — pour Sa propre gloire et à Sa louange — toute la gloire qu’Il aurait comme l’homme ressuscité, avec ceux qui par leur nature étaient de pauvres pécheurs, entièrement morts, mais qui sont maintenant délivrés de leurs péchés, et qu’Il a fait un avec Christ en haut. Par l’Esprit qui est maintenant donné, Il leur en communique la connaissance, pendant qu’ils sont dans le monde, afin que, dans leur esprit et dans leurs voies, ils soient entièrement au-dessus du monde.

Chapitre 2

Nous entrons maintenant dans une nouvelle portion de notre épître ; elle n’est pas d’un ton aussi élevé que celle sur laquelle nous avons jeté un coup d’œil dans le chapitre 1 ; mais elle est également importante dans sa place, et de la plus grande valeur pour nous. Mais alors nous devons nous rappeler soigneusement que ce qui présente de l’intérêt pour nous n’est pas une mesure adéquate, quand nous considérons soit la Parole de Dieu, soit Ses voies. Dieu n’agit jamais dans un but moindre que Sa propre gloire. En conséquence, quoique nous trouvions bien des parties de la Parole de Dieu qui se rapportent à notre condition de la manière la plus étroite, à nos besoins, à nos bénédictions et à notre gloire, nous demeurons invariablement au-dessous de la vraie portée et de la vraie hauteur de la vérité de Dieu, si nous limitons nos pensées à son application à nous-mêmes. Nous n’atteignons jamais la pleine étendue d’une vérité quelconque, dans sa portée à notre égard, à moins que nous ne tenions aussi compte de sa sphère infiniment plus élevé comme étant la révélation du déploiement de la gloire de Dieu, de Son caractère et de Ses desseins. Et voici ce qui en résulte : bien que nous trouvions dans l’Écriture la grâce qui nous a été déjà montrée, et la gloire à laquelle nous devons bientôt participer, néanmoins quelle bénédiction infinie quand nous ne l’envisageons plus comme une chose qui se rapporte directement à des créatures si limitées et si faibles que nous-mêmes ! Quand nous réalisons le fait que c’est la grâce et la gloire de Dieu, de quelle manière complète tout est changé ! Nous entendons alors et nous découvrons cette grande vérité. — Il parle en effet de nous dans des manières, dans des formes, des profondeurs et des hauteurs qui sont dignes de Lui-même. Il entre dans nos plus petits besoins aussi bien que dans nos plus grands. Mais pourtant, même dans les plus petites choses, dont Il s’occupe en nous, ce qui répond à ce besoin découle de Celui qui ne connaît pas de limites ; et si la chose est adaptée à notre capacité pour le moment actuel, il n’en sera pas toujours ainsi. Dieu ne s’arrêtera jamais dans Son amour, jusqu’à ce qu’Il ait accompli Son dessein, non seulement de nous donner par le Saint Esprit, de goûter en une certaine mesure maintenant la douceur du déploiement de Son propre caractère, mais de nous en rendre dignes de toute manière. Il nous a appelé à être Ses enfants. Le jour vient où non seulement Son amour n’aura pas honte de nous appeler par ce nom, mais où il n’y aura aucune raison pour cela, lorsqu’au contraire tout ce qui appartient à la famille de Dieu manifestera tout autant la saveur de ce que Dieu est, que maintenant, hélas ! nos pauvres voies, misérables et mondaines, portent souvent la triste empreinte du moi et non de Dieu.

Dans ce chapitre donc, ce n’est pas le développement des conseils de Dieu et de Ses desseins magnifiques, tels qu’ils découlent de Sa propre pensée, remontant par conséquent même au commencement des temps, avant que la créature eût, de fait, aucune place, lorsque tout n’était que Dieu Lui-même dans l’éternité de Sa propre existence. Même alors, comme nous l’avons appris au chapitre 1, avant que Sa main eût opéré en quoi que ce soit, il y avait cette pensée bénie dans Son cœur : Il voulait avoir un peuple, bien plus, des fils, en dehors de la scène dont la création était encore à venir, rassemblés dans Sa propre grâce souveraine, ayant été retirés du péché, pour avoir part à Son amour et à Sa sainteté, avec Son Fils bien-aimé. C’était là Son conseil. Le chapitre 1 nous a montré cela, non seulement ce qui était dans la pensée de Dieu de toute éternité, mais ce qui y répond dans le jour de gloire à venir. Car deux grandes pensées nous y ont été présentées ; d’abord, la vocation de Dieu, puis l’héritage qui doit encore être manifesté dans l’éclatant déploiement de gloire, quand Christ prendra possession de tout ce que Dieu a fait, et en sera le Chef reconnu et glorifié (toutes choses, soit dans les cieux, soit sur la terre, Lui étant assujetties) ; et quand nous qui avons cru en Lui, nous serons appelés à cette position d’avoir part à l’héritage avec Lui notre Seigneur et notre Époux. En troisième lieu, nous avons vu qu’il est ajouté un point de la plus haute importance — que la même puissance de Dieu qui a ressuscité Christ d’entre les morts, opère maintenant envers ceux qui croient. Il n’y avait qu’une allusion à cela, en passant, dans la prière de l’apôtre, à la fin du chapitre 1. Ce que nous avons ici en est, jusqu’à un certain point, une sorte de développement. Le chapitre 2 est principalement basé sur Sa puissance en résurrection ; bien plus, ce n’est pas seulement cela, mais, si je puis le dire, Sa puissance en ascension. La puissance de Sa force qui a ressuscité Christ et L’a placé à la droite de Dieu, est maintenant déployée en faveur de ceux qui croient et agit en eux. Nous en verrons les conséquences. Mais maintenant, pesons pour un instant ce que le Saint Esprit présente ici. C’est l’application au croyant de cette puissance de la force de Dieu. Ce n’est donc pas simplement le dessein de la grâce, ni l’exécution de ce dessein en gloire bientôt, mais c’est l’exercice de Sa puissance, selon le modèle de Christ ressuscité et glorifié, et son application dès maintenant même au croyant.

Dès lors, nécessairement, nous trouvons d’abord présentée devant nous la condition de ceux en qui cette puissance opère, ce qu’ils étaient lorsqu’elle commença à agir en eux. D’après cela, c’est seulement dans le chapitre 2 que nous commençons à trouver un développement de la condition actuelle de ceux avec lesquels Dieu est si étroitement lié. Le chapitre 1 est principalement occupé de ce qui était dans la pensée de Dieu, et de ce qu’Il accomplira un jour. Maintenant nous voyons la question soulevée. Qui sont ces personnes, et quel était leur état, quand Dieu a pu ainsi agir à leur égard ? — et la réponse à cette question. Et c’est la chose la plus merveilleuse, que, quand nous venons à entendre Sa Parole, nous ne trouvons dans aucune autre épître une position quelconque qui nous donne un tableau si profond, si pénétrant, si humiliant de l’état désespéré et dégradé dans lequel étaient ceux que Dieu a destinés à être cohéritiers avec Christ. Nous trouvons dans l’épître aux Romains ce qui met à nu la corruption morale, prouvant pleinement ce qu’est l’homme, s’il veut se fonder sur quelque chose qui soit en lui-même. Qu’il s’agisse du Juif, favorisé de Dieu, sous la loi, ou du Gentil, quant à sa conscience, tout y est discuté à fond, et toute prétention de l’homme est réduite en poussière. Mais dans l’épître aux Éphésiens, la preuve de la culpabilité est inutile. L’homme est envisagé comme étant si complètement mort, que ce n’est que l’enlèvement du drap qui recouvre le cadavre. C’est pourquoi l’apôtre dit : Il vous a vivifiés lorsque vous étiez morts dans vos offenses et dans vos péchés. Ce n’est pas seulement : Comment un pécheur peut-il être pardonné, justifié ? Mais : Il vous a vivifiés lorsque vous étiez morts dans vos offenses et dans vos péchés ! Il est vrai que nous ajoutons ici en expliquant le passage, les mots : « Il vous a vivifiés » ; mais il est évident que c’est là nécessairement le sens ; sans cela, pour un lecteur ordinaire, la phrase serait embrouillée. Ce n’est qu’aux versets 4 et 5 que nous avons ce qui complète la pensée. Il est clair que l’action de vivifier affecte ceux qui sont appelés « vous », aussi bien que ceux qui sont désignés par le mot « nous ». J’espère montrer tout à l’heure ce que signifie cette distinction, mais j’y fais seulement allusion maintenant, afin de mettre le lecteur en garde contre l’idée qu’il n’y a pas de raison suffisante pour insérer dans l’explication l’expression : « Il vous a vivifiés » ; tandis qu’elle se trouve impliquée dans le langage que le Saint Esprit a employé, ou tout au moins dans le sens.

Le grand fait demeure. Il ne s’agit pas seulement d’un mal existant dans l’état moral de l’homme, mais ils étaient « morts ». Quel coup porté à toutes les pensées de l’homme — à l’idée qu’il est dans un état de probation — qu’il est seulement dans un état d’âme maladif, et que, si seulement vous le soulagez, le consolez et l’instruisez, il ne se trouvera pas si mauvais après tout ! Il y a des personnes qui pensent qu’il y a une différence entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas dans leur état d’inconversion : c’est ce que je nie. Quant à la pensée que parmi les hommes, les uns sont nés plus dignes de recevoir miséricorde que d’autres, elle est contraire à tous les passages de la Parole de Dieu qui traitent de ce sujet. Au contraire, la chose sur laquelle le Saint Esprit insiste, c’est la mort réelle de tous et la ruine commune à tous également. Dans l’épître aux Romains, il est dit que nous étions « sans force », mais ici, nous étions « morts ». La seule manière dont il soit parlé de la mort dans l’épître aux Romains, c’est comme un privilège, l’heureuse condition dans laquelle la foi nous introduit, lorsque nous avons été baptisés pour la mort de Christ. Nous sommes ainsi envisagés comme « morts au péché, mais vivants à Dieu ».

Dans l’épître aux Éphésiens, au contraire, la mort était notre misère. C’est l’expression de la pensée de Dieu touchant l’extrême ruine dans laquelle nous étions plongés. Nous avons et les Juifs et les Gentils (ni les uns ni les autres, ne sont maintenant les premiers ou les derniers) — l’homme comme tel — présentés comme étant moralement morts ; en sorte qu’il s’agit en conséquence de ce que Dieu peut faire. Dieu là-haut et l’homme ici-bas, sont en présence l’un de l’autre ; et si l’homme est mort, Dieu ressuscite les morts ; et Il peut vivifier les âmes et Il le fait : Grâces Lui en soient rendues ! L’immortalité de l’âme est certaine. Néanmoins, ce que l’Écriture appelle « la vie » n’est pas sa simple existence, mais une nature spirituelle et bénie, qui est donnée à un homme qui par nature ne l’avait pas, et qui ne faisait que sentir et agir d’après une nature qui était sous le péché. Telle est la condition de toute personne, jusqu’à ce que l’Esprit de Dieu ait accompli cette bonne œuvre en son âme.

Notre Seigneur reproche à Nicodème de ne pas comprendre ces choses. Même comme Juif, il aurait dû le faire ; mais pour lui, « le docteur d’Israël », n’était-ce pas une honte qu’il ne connût pas ces choses ? Quand il entendit parler de la nécessité d’être « né de nouveau » — ou sur un principe tout entièrement nouveau — il s’imagina que le Sauveur parlait peut-être d’une certaine répétition de sa naissance naturelle, ce qui, si la chose eût été possible, n’aurait été que recommencer ce qui avait eu lieu auparavant. Mais le mot « de nouveau » (ἄνωθεν) est excessivement emphatique ; et il en est de même de cette présentation de la vérité. Écoutez bien ceci : « Ce qui est né de la chair, est chair ; et ce qui est né de l’Esprit, est esprit ». La chair ne peut jamais devenir esprit. Il n’y a pas une telle chose que de rendre la vieille nature spirituelle, de la rendre nouvelle et sainte. Ce dont l’âme non régénérée a besoin, c’est une nouvelle nature, ou, comme le Seigneur l’explique, d’être « né d’eau et de l’Esprit ». Ce que ce passage signifie, c’est la Parole de Dieu, présentée sous cette figure, et appliquée à l’âme par la puissance du Saint Esprit. Le baptême peut bien mettre en évidence la chose qui y est exprimée ; mais c’est la figure d’une réalité. Notre Seigneur montre qu’il faut qu’il y ait la communication d’une nouvelle vie ; et, comme il nous est dit ailleurs : « Il nous a de sa propre volonté engendrés par la parole de la vérité ». Et ceci est présenté non seulement par Jacques, mais aussi par Pierre, lorsqu’il déclare, que nous sommes « régénérés non par une semence corruptible, mais (par une semence) incorruptible par la parole de Dieu, vivante et permanente ». Nous savons positivement par l’apôtre Paul, que « le lavage d’eau par la parole », est l’explication que Dieu Lui-même donne de la figure.

De plus, que pouvait savoir Nicodème du baptême chrétien ? Il n’était pas encore institué ; et le baptême des disciples n’était qu’une sorte de modification du rite de Jean, c’est-à-dire la confession d’un Messie vivant devant venir, ou venu, sur la terre. Mais le baptême chrétien proprement dit, est fondé sur la mort et la résurrection de notre Seigneur. « Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés pour (le) Christ Jésus, avons été baptisés pour sa mort ? ». Le baptême chrétien est la confession de la mort et de la résurrection de Christ, et fut institué par notre Seigneur après qu’Il fut ressuscité d’entre les morts. Alors — et non auparavant — Il leur dit d’aller et de baptiser toutes les nations, ou les Gentils, « au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit ». Il présenta la grande et pleine révélation de la divinité, base du christianisme, que le croyant est amené à confesser par son baptême.

Dans les passages de l’Écriture auxquels il vient d’être fait allusion, nous voyons clairement que, lorsqu’un langage non figuré est employé, il est dit que le moyen par lequel la vie nouvelle est donnée, c’est la Parole de Dieu appliquée par le Saint Esprit ; et que, lorsque des figures sont employées, l’eau est celle qui est choisie. Mais la somme et la substance de tout l’enseignement, c’est que le témoignage de Dieu est le moyen divin pour communiquer la vie à l’âme quand il est appliqué par le Saint Esprit — c’est-à-dire par la foi. Et si nous désirons savoir en outre quelle portion spéciale de la vérité de Dieu est employée pour vivifier ceux qui sont morts dans leurs péchés, c’est toujours, plus ou moins, la révélation de Christ. Le fait que je crois que les créatures furent créées par Dieu, ne vivifiera pas mon âme. Je pourrais croire des faits quelconques dans l’Ancien Testament, et avoir toute certitude quant à tous les miracles, tous les discours, et toutes les voies de Jésus dans le Nouveau, et pourtant mon âme pourrait encore rester sans être vivifié. Mais croire en Christ Lui-même, est une chose bien différente que de ne pas douter des choses qui Le concernent. Cela suppose que je suis arrivé plus ou moins à ce point, d’en avoir fini avec moi-même ; que je me suis incliné devant la sentence humiliante de l’Écriture sur ma nature, et que je confesse que je ne suis qu’une pauvre créature, perdue et morte, aux yeux de Dieu.

Tout cela est au-delà de la nature. Il est des hommes qui sont fiers des affections que nous avons en commun avec les bêtes brutes, et d’autres vont jusqu’à se déifier à cause de la conscience ; mais la conscience elle-même fut acquise par le moyen du péché. Adam, avant la chute, n’aurait pas pu dire ce qu’était le bien ou le mal. S’il avait évité de manger du fruit défendu, ce n’eût pas été parce qu’il aurait su que c’était mauvais en soi ; et en effet, dans la nature même de la chose, il n’y avait pas de mal à manger du fruit de cet arbre. Mais par le moyen du commandement de Dieu la chose devint une pierre de touche — une pierre de touche moralement, à l’égard de laquelle Adam n’aurait rien connu, si Dieu ne lui eût dit : « Tu n’en mangeras point ». C’est ainsi que, dans le but d’exercer l’obéissance dans un enfant, on pourrait lui dire : Il ne faut pas que tu sortes de cette chambre ; avant cette défense, il n’y aurait pas du mal à le faire. Ce ne fut qu’après avoir mangé du fruit défendu, qu’Adam acquit la connaissance pour distinguer et discerner le bien et le mal. Ainsi il ne connut le mal qu’en tombant sous le pouvoir du mal. Si on avait dit à Adam avant la chute : « Tu ne convoiteras point », il aurait pu dire : Qu’est-ce que cela signifie ? Je ne comprends pas. Mais du moment qu’il eut écouté le diable et qu’il eut pris le fruit que Dieu avait défendu, il y eut un autre élément qui pénétra la nature d’Adam, et qui ne s’y trouvait pas auparavant. Avant sa chute, Adam avait le corps, l’âme et l’esprit ; après qu’il fut tombé, il acquit ce que l’Écriture appelle « la chair ». Ce n’est pas seulement « la chair et le sang » ; notre Seigneur avait cela (autrement Il n’aurait pas été réellement un homme), mais Il n’avait pas « la chair » qui est le principe de la propre volonté — ou aimer nos propres voies, et non celles de Dieu. C’est là le péché, et ce que l’Écriture veut dire par le mot péché, ce grand désir, ce désir inquiet qui ne cesse de soupirer après ce que nous souhaitons, que ce soit ou non selon la volonté de Dieu. Satan aveugle l’âme quant à ce qui est la volonté de Dieu, la pensée de Dieu. L’amour de sa propre volonté n’existait pas dans la nature primitive de l’homme. « La chair » fut acquise par la chute, et elle se montre dans l’amour de notre propre volonté et l’indépendance à l’égard de Dieu. Paul insiste constamment sur cela, et c’est aussi ce que Jean (1 Jean 3, 4) appelle « l’iniquité » ; littéralement : « une marche sans loi », et non comme on le traduit souvent : « la transgression de la loi ». C’est le désir de suivre notre propre voie, en dépit de la volonté et de la voie de Dieu, soit exprimées, soit impliquées. C’est là l’essence du péché, le triste héritage des pécheurs dont, grâces à Dieu, le croyant est délivré. Ainsi donc, lorsqu’un homme a reçu Christ, il a encore sa vieille nature ; non seulement le corps, l’âme et l’esprit, mais même « la chair » — car il a encore cette dernière aussi, et elle peut devenir, hélas ! l’occasion de bien des fautes et de bien des chagrins, s’il ne veille pas constamment. En dehors de tout cela, il y a pour le croyant une nouvelle nature qu’il n’avait pas auparavant.

Dieu nous a donné une nouvelle vie, et celle-ci est aussi distincte dans ses mouvements que la vieille dans les siens. Mais Dieu nous a vivifiés, et nous a donné une nouvelle vie. Considérez un homme : qu’y a-t-il en lui ? L’amour-propre ; un peu d’orgueil ici, un peu de vanité là ; partout l’amour de sa propre volonté — ce qui est la marque caractéristique du pécheur dans toutes les circonstances. Cherchez et voyez ; et vous n’aurez pas à chercher longtemps avant de trouver ce qui décèle non pas Christ mais Adam. Considérez l’histoire de l’homme, comme elle nous est donnée dans la Genèse ; et voyez là ce qu’il est. Il pouvait être attiré par ses affections ; mais pourquoi permettre à ces affections d’agir de manière à l’entraîner à la désobéissance à l’égard de Dieu ? Dieu lui avait-Il dit d’écouter sa femme ? Il aurait dû agir comme le chef, et rappeler à la femme ce que Dieu leur avait dit. L’on n’oublie jamais impunément l’ordre établi de Dieu. Ainsi l’homme, ayant permis à la femme de prendre la direction, en moissonna bientôt les tristes conséquences. Mais en Christ, je trouve précisément le contraire. Quel trait plus remarquable, moralement, peut-il y avoir que celui-ci ? — Un homme qui, tandis qu’Il était tout, était content de n’être rien ; qui, tandis qu’Il était homme ici-bas, n’agissait jamais d’après le droit indépendant qui Lui était propre ; qui, toujours, dans toutes les circonstances, importantes ou non, recherchait la volonté de Son Père et y était soumis. « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? » — c’est ce qu’Il dit quand Il n’était qu’un enfant (Luc 2). Ce n’était pas seulement lorsqu’Il se présentait pour agir publiquement ; mais Il en avait toujours la conscience. Et si je désire savoir ce qu’était notre Seigneur lorsqu’Il eut atteint un âge mûr, je trouve encore là la même chose. Et partout où je Le contemple, ce trait qui couronne tout se montre dans tous les temps et dans toutes les circonstances — Celui qui ne chercha jamais et ne fit jamais Sa propre volonté.

Ne voyez-vous pas qu’il y a là un homme tout entièrement d’une autre sorte ? Il n’est pas étonnant que le Saint Esprit dise de Lui, et de Lui seul, « le second homme ». Tous les autres hommes ne furent absolument qu’autant de reproductions d’Adam, autant de fils à sa propre ressemblance, d’après sa propre image. En tant qu’ils étaient hommes, envisagés simplement comme tels, ils portaient en commun un seul et même caractère, celui d’Adam. Mais maintenant se présente un autre homme, et par cet homme, mort et ressuscité, une nouvelle souche ; et en Lui, nous devenons de nouvelles créatures, recevant la communication de Sa vie, par la foi en Lui. Comme par la naissance naturelle, nous avons la vie d’Adam, il en résulte que nous avons ce qui doit naturellement découler d’un si affreux commencement — la même volonté propre, la même faiblesse, la même disposition à se glorifier, la même frayeur de Dieu, le même manque de droiture et la même insolence à Son égard, etc. Tel est l’homme ; tel est aussi précisément ce que je trouve en moi-même ; et si je lis la Bible comme il convient, Dieu me forcera de le reconnaître. Lorsqu’Il vivifie une âme, Il l’oblige toujours à prendre le tableau et à dire : C’est moi-même, quelque noir que soit le tableau. Alors, lorsqu’une personne est brisée sous la terrible découverte du péché au-dedans, et qu’elle se juge selon Dieu, c’est là ce que l’Écriture appelle la repentance. C’est reconnaître non seulement ce que nous avons fait, mais aussi ce que nous sommes. Comment y porter remède ? « Ce qui est né de la chair, est chair ; et ce qui est né de l’Esprit est esprit ». L’Esprit a donné une nouvelle vie, et cela dans ce monde, par le moyen de la connaissance de Christ. Ainsi donc, c’est par la Parole de Dieu (« la foi est de ce qu’on entend », etc.), et non par le baptême, ni par aucune autre institution du Seigneur, quelques précieuses qu’elles soient. Nous devons être attentifs à mettre toutes choses à leur propre place. C’est la Parole, appliquée à l’âme par le Saint Esprit, qui produit la foi, et cela, non en raccommodant le premier Adam, mais en révélant le dernier Adam. Dieu est descendu du ciel pour accomplir ce grand dessein — pour me donner cette nouvelle vie — pour me délivrer du péché et du moi : et comment la chose est-elle effectuée ? C’est le Saint Esprit qui le fait par la Parole de Dieu, laquelle fait connaître Christ à l’âme.

Mais ici l’apôtre n’entre pas dans le détail de la chose ; il ne fait qu’énoncer les grands faits : « Et vous », il vous a vivifiés, « lorsque vous étiez morts dans vos offenses et dans vos péchés » — la pire de toutes les morts ; — « dans lesquels vous avez marché autrefois, selon le train de ce monde, selon le prince de l’autorité de l’air, de l’esprit qui opère maintenant dans les fils de la désobéissance ». Cela ne montre-t-il pas combien cette sorte de mort était active dans le mal ? Ceux qui étaient ainsi morts, vivaient en même temps selon le train (litt. siècle) de ce monde, ce qui était en effet la preuve de leur mort morale. Ils n’avaient aucun désir de former leur marche d’après la Parole de Dieu. Comme le dit Job (chap. 21, 14) : « Cependant ils ont dit au (Dieu) fort : Retire-toi de nous ; car nous ne nous soucions pas de la science de tes voies ». Et n’était-ce pas là la condition de notre propre âme ? Ne pouvons-nous pas nous rappeler le temps où c’était une chose pénible de nous trouver en face de Dieu au sujet de nos péchés ? Il faut que j’aie affaire à Dieu. Or voici ce qu’il y a de solennel dans la chose. Si je ne vais pas trouver Dieu maintenant au sujet du Sauveur, j’aurai à me trouver en face de Lui au sujet de mes péchés. Et si je dédaigne d’aller trouver le Sauveur au sujet de mes péchés, il faudra nécessairement que je me trouve en face de Dieu dans mes péchés — pour être à jamais perdu. Vous honorez en quelque sorte un ennemi en ayant de l’attention pour lui ; mais vous ne sauriez faire à un ami une insulte plus profonde que de n’avoir pour lui ni attentions ni égards. Il en est de même de l’indifférence à l’égard de Christ. Nous essayons peut-être de régler nos comptes avec Dieu une fois ou deux par jour — quelle injure faite à Dieu, et une injure aussi à ma propre âme ! Si j’ai mes péchés sur moi — et c’est dans cette position que nous sommes tous naturellement, ou que nous avons été — qu’y a-t-il à faire ? Il est facile de dire ce que nous avons fait — marchant « selon le train de ce monde ». Il ne s’agit pas ici seulement de choses grossièrement mauvaises. Supposez que les hommes fussent tous aussi aimables et bienveillants que possible — qu’il n’existât point de telles choses que des prisons et des juges, ni des condamnés subissant leur peine ; supposez qu’on pût retirer les hommes de leur méchanceté en raisonnant avec eux, quelle serait pourtant encore la condition des hommes ? « Ce qui est né de la chair, est chair ». L’homme, comme tel, ne peut jamais « voir le royaume de Dieu ». Le seul moyen par lequel je puis être introduit dans Son royaume, c’est en étant né de nouveau, et en ayant une nouvelle nature qui est de Christ et non d’Adam. Le baptême en est le signe. Paul avait déjà cru au Seigneur, lorsqu’Ananias lui dit : « Lève-toi et sois baptisé, et te lave de tes péchés ». Il y a la figure du lavage ; mais le seul moyen efficace ou instrument efficace aux yeux de Dieu, c’est le sang de Christ. « À lui qui nous aime, et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang ».

Ainsi donc la pensée que Dieu les a vivifiés, conduit l’apôtre à exposer la condition de laquelle ils avaient été délivrés. Ils marchaient selon le train (litt. siècle) de ce monde ; et non seulement cela, mais selon l’ennemi en chef. Le titre « prince de l’autorité de l’air » a pour but de montrer son influence qui pénètre partout. De même que l’air environne et pénètre toutes choses, ainsi fait le diable quant au règne de la nature — « l’esprit qui opère maintenant dans les fils de la désobéissance ». C’était la manière dont ils montraient qu’ils étaient sous sa puissance — savoir, leur désobéissance. « Entre lesquels nous aussi avons tous conversé autrefois ». Pourquoi dit-il « nous » ? Pourquoi ce changement du « vous » en « nous » ? Quand il s’adresse aux Éphésiens, qui avaient été des Gentils, il se sert du mot « vous » ; mais maintenant il comprend dans cette sentence morale : morts dans les offenses et dans les péchés, les Juifs aussi bien que les Gentils. Lorsque Dieu mesurait l’homme par Christ, tel était leur état — pas un seul être qui ne fût mort. Et dans la mort, il ne peut y avoir différents degrés. Si un homme est mort, c’en est fait de lui. Ainsi donc, si vous considérez les hommes moralement, quoique vous puissiez établir des distinctions, et dire : Voilà un homme qui va plus loin et plus vite, dans le sentier de la ruine, que d’autres, toutefois si vous entrez plus profondément au fond des choses, ces distinctions disparaissent, et ils sont tous ruinés, sans qu’il y ait de différence, et même morts aux yeux de Dieu. Il dit donc, pour le prouver : « entre lesquels nous aussi avons tous conversé autrefois dans les convoitises de notre chair, accomplissant les volontés de la chair et des pensées ». Il importe peu qui nous étions, ou ce que nous étions, il appelle tout cela « les convoitises de notre chair ». Or il se peut que quelques-uns d’entre eux eussent été des philosophes, d’autres des hommes moraux et pleins de bonté, d’autres enfin des gens grossiers vivant ouvertement dans le mal le plus affreux. Mais prenez les meilleurs d’entre eux, et jugez-les d’après cette pierre de touche : — était-ce la vie de leur âme et le motif qui les gouvernait de faire la volonté de Dieu ? Nullement. Il se peut qu’ils aient satisfait leur propre nature bienveillante ; mais Dieu n’était pas dans leurs pensées ; ou bien s’ils pensaient à Lui, c’était comme pour Le gagner, afin qu’Il les tînt quittes. Car dans le paganisme il y avait une tradition qu’un sacrifice était nécessaire ; mais elle fut corrompue, affaiblie et pervertie de toutes sortes de manières.

Nous avons donc ici la condition commune dans laquelle tous, Juifs et Gentils, se trouvaient par nature. Toutefois il distingue les désirs ou « volontés de la chair et des pensées » ; il veut par là désigner les tendances grossières, et l’activité plus raffinée — intellectuelle. Supposons qu’un homme se consacre à la science, et qu’il en fasse son objet, est-ce là faire la volonté de Dieu ? Loin de là ; c’est plutôt donner satisfaction aux volontés des pensées, et c’est aussi complètement le moi que lorsqu’il s’agit de ceux qui peuvent se livrer aux appétits plus grossiers de la nature. Voici la grande chose, c’est que je n’ai aucun droit sur moi-même — j’appartiens à un autre. Suis-je occupé à faire Sa volonté ? Puis, quand nous entrons dans les relations de la foi, nous ne sommes plus les créatures de Dieu, seulement, responsables quant à l’accomplissement de ce qu’Il prescrit comme un devoir naturel, mais achetés par le sang de Christ, et, en Lui, étant faits vivants d’entre les morts, afin que nous ne vivions plus pour nous-mêmes, mais pour Celui qui est mort et ressuscité pour nous. Qu’il s’agisse des meilleurs hommes dont le monde puisse se vanter ; voici leur état : « Enfants de colère comme les autres ». Quelle parole ! Même les Juifs, qui avaient la lumière de Dieu en tant qu’il s’agissait de lumière extérieure, étaient par nature, « enfants de colère », tout autant que les Gentils — dégradés, idolâtres, qui adoraient la pierre et le bois. Ainsi donc, il ne saurait y avoir une plus complète annihilation de tous les privilèges religieux de l’homme, aussi bien que de la position de la créature, que ce que nous trouvons dans ce verset. Ce n’est pas seulement que les hommes ont fait le mal, mais ils sont par nature des enfants de colère. Dieu n’avait pas créé l’homme ainsi : c’est l’homme qui choisit le sentier de la désobéissance, qui abandonna Dieu pour le diable. Ce n’était pas, sans doute, son intention ; car Satan se présente comme un ange de justice ; mais de quelque manière qu’il agisse, il y a un seul résultat auquel tous sont réduits, sans exception — « par nature des enfants de colère ». Or que fait Dieu ? Car il y a une nécessité absolue que Dieu agisse, afin d’introduire un seul rayon de lumière au milieu de cette scène sans espoir, de ruine et de perdition, Mais les hommes ne veulent pas croire qu’ils sont ruinés ; ils s’obstinent à penser qu’après tout, ce monde est bon, et que c’est un état de choses que Dieu a donné à l’homme pour le cultiver ; ils oublient que Dieu « chassa l’homme », et que toutes les inventions de l’homme ne sont que des expédients pour couvrir sa nudité, et pour le conduire à oublier qu’il est exilé du paradis. Nous pouvons sans doute user de ces inventions, pourvu que nous n’en abusions pas ; mais rappelons-nous bien que, comme chrétiens, notre vie et notre demeure ne sont point ici ; nous appartenons à une autre scène, où Christ se trouve. Nous ne sommes pas du monde, nous sommes achetés à prix pour faire la volonté de Dieu, sanctifiés pour l’obéissance, pour la même sorte d’obéissance que celle de notre Seigneur. Pesons-nous ces choses, les appliquons-nous, au sein même de la famille de Dieu, et partout où nous pouvons être placés ? Le faisons-nous sérieusement, assidûment, consciencieusement ? En notre Seigneur était la vie, et Il était toujours heureux dans la conscience de l’amour de Son Père. Le croyant aussi, a la vie en Lui, et est aimé comme Lui fut aimé. Dieu peut se servir des dix commandements pour écraser l’homme dans la chair ; mais comme chrétien il est appelé à obéir comme Christ a obéi ; à « marcher comme lui a marché », car Il nous a laissé un modèle, afin que nous suivions ses traces.

Ici donc nous avons cette puissante intervention de Dieu, qui, étant « riche en miséricorde, à cause de son grand amour dont il nous a aimés, alors même que nous étions morts dans nos fautes, nous a vivifiés avec le Christ (vous êtes sauvés par (la) grâce), et nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans (le) Christ Jésus, afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans (le) Christ Jésus ». Ce n’est pas seulement que nous sommes vivifiés — ce qui aurait été vrai, en considérant tous les saints qui aient jamais existé sur la face de la terre. Mais auriez-vous pu dire que tous avaient été ressuscités avec Christ — que Dieu les avait fait asseoir dans les lieux célestes dans le Christ Jésus ? N’est-ce pas là une déclaration plus complète de la bénédiction qui nous appartient comme chrétiens maintenant, et qui n’aurait pu être affirmée à l’égard de qui que ce soit avant que la résurrection et l’ascension de Christ fussent devenues des faits accomplis ? Notre Seigneur dit : « Moi, je suis venu afin qu’elles » — les brebis — « aient (la) vie, et qu’elles (l’)aient en abondance ». Pourquoi pose-t-Il la distinction entre la vie, et la vie « en abondance » ?

Sur quel principe est-ce donc que le Seigneur vivifie, à quelque degré que ce soit ? C’est qu’en Lui, le Fils, est la vie ; et cette vie devient la portion de ceux qui croient en Lui. « En vérité, en vérité je vous dis que l’heure vient, et elle est maintenant, que les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et (l’)ayant entendue, ils vivront ». Il fut toujours la source de vie pour l’âme, n’importe à quelle époque ou en quel lieu, bien que, nécessairement, ce fût seulement en vertu de la prévision de la rédemption que des hommes pécheurs pussent la recevoir. Toutefois, avant Sa mort et Sa résurrection, c’était simplement la vie. Mais notre Seigneur ajouta qu’Il la donnerait « en abondance ». Les disciples qui L’entouraient avaient déjà la vie, parce qu’ils croyaient en Lui. Mais après que notre Seigneur fut ressuscité d’entre les morts, la première fois qu’Il apparut parmi Ses disciples, « il souffla en eux, et leur dit : Recevez l’Esprit Saint ». Qu’est-ce que cela ? L’Esprit comme la puissance de la vie en abondance — non encore comme don. Il leur donna la vie pendant qu’Il était ici-bas, et quand Il fut ressuscité, Il la leur donna en abondance, la vie en résurrection.

Quelle est donc la différence pour nous, pourra-t-on demander ? Elle est immense. Mais la différence, dans les pensées de Dieu, est la grande chose, et la manière dont cette différence porte sur Sa gloire. C’est pourquoi, que je le comprenne ou non, je désire m’incliner et bénir Dieu, étant parfaitement assuré qu’il existe une bonne et sage raison pour tout ce qu’Il fait et tout ce qu’Il dit. Nous serons bientôt ressuscités d’entre les morts : nos corps n’ont point encore été transmués. Le corps du croyant se décompose et tombe en poussière comme celui de l’incrédule, et pourtant il possède la vie de Christ, la vie de résurrection, cette vie « en abondance ». « Comme mon Père m’a envoyé, ainsi moi je vous envoie » ; ce n’était pas une parole pour les douze seulement. Sans doute ils avaient une mission que nul d’entre nous n’a reçue. Mais, tandis que cela est vrai, tandis que nul aujourd’hui ne peut être mis sur le même niveau qu’eux comme apôtres, toutefois je soutiens en même temps qu’ils avaient aussi des fonctions administratives, indépendamment de leur caractère spécial et apostolique, et que dans ces fonctions, mais non dans ce caractère, ils ont des successeurs. Notre Seigneur, au jour où Il ressuscita, se présenta « au milieu des disciples », ce qui embrasse une pensée bien plus étendue. C’était la compagnie chrétienne de ce temps-là, tous ceux qui étaient là, hommes ou femmes, s’ils étaient des disciples. Ce fut en eux qu’Il souffla. Ils devaient tous avoir Sa vie « en abondance ». L’effet de cela, c’est que tous sont introduits dans la liberté (comparez Rom. 8, 1-2).

Je n’entre pas davantage dans les conséquences si bénies qui accompagnent cette nouvelle vie ; mais je remarquerai seulement que, quant au fait d’être ressuscité et d’être assis ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus, tout cela est dit comme étant maintenant vrai de tout croyant. Cela n’implique aucune idée mystique, comme celle-ci, par exemple, que nous ne sommes pas ici sur la terre ou dans nos corps. Dans les Écritures tout est absolument l’opposé de l’extravagance. Le mysticisme est l’imitation, de la part du diable, des mystères de Dieu, et les simples vapeurs de l’imagination de l’homme. Le mot « mystère », dans l’Écriture, ne signifie pas quelque chose de vague, mais des vérités que l’intelligence humaine ne découvrirait jamais, et qui, lorsqu’elles sont présentées par le Saint Esprit à la nouvelle nature, sont parfaitement intelligibles. Il y a des choses dont le caractère est plus profond que dans d’autres, et il peut y avoir aussi ce qui est au-delà de toute connaissance, comme, par exemple, la nature du Fils de Dieu. « Personne ne connaît le Fils, sinon le Père » ; et il n’est pas dit du Fils : « Celui à qui le Père voudra le révéler ». Mais, à part cela, les mystères de l’Écriture sont des vérités qui autrefois étaient scellées, mais qui maintenant sont révélées et destinées à être connues, et qui, de fait, sont la portion et la joie du croyant.

Nous avons déjà jeté un coup d’œil sur le contraste présenté avec tant de force entre la condition de l’homme dans les trois premiers versets, et la puissante intervention de la grâce de Dieu qui les suit. Nous avons vu le Gentil présenté dans le sombre tableau de la corruption morale et abjecte et de l’idolâtrie insensée, le Saint Esprit mettant tout à nu par quelques touches puissantes. Ils étaient « morts » dans leurs offenses et dans leurs péchés, entièrement assujettis au prince de ce monde. Ils ne faisaient que suivre le train de ce monde ; ils étaient des fils de la désobéissance, n’ayant aucun égard à Dieu dans leurs voies. Il n’y a aucune pensée de faire ressortir en détail les formes affreuses de l’impiété humaine, ni la dépravation et la dégradation dans lesquelles l’homme était tombé, à l’instigation de Satan. Néanmoins nous avons ici une vue bien plus profonde de la condition où l’homme était plongé — un mal qui n’offrait aucun espoir — que dans les passages qui entrent pleinement dans tous les détails de l’impureté, de la superstition et de la rébellion. Dans la Parole de Dieu, combien peu la force dépend d’une énergie apparente de langage ! Encore moins est-ce ce que nous trouvons chez les hommes, lorsqu’ils veulent exprimer une chose avec force. L’Écriture ne contient rien, en fait d’expressions violentes ou exagérées.

Ce que nous trouvons (et quel fait que celui-là !) c’est Dieu Lui-même, sondant la condition de l’homme, ne regardant plus à son cœur, comme s’il s’agissait d’en réprimer les désirs, ce qu’Il avait fait sous la loi. Mais maintenant c’est l’état complet de mort où se trouve la nature humaine dans la présence de Dieu — la puissance de Satan substituée au gouvernement de Dieu — l’homme lui-même évidemment ruiné et sans espoir. Mais c’est dans cette scène de ruine que Dieu entre — Dieu qui est riche en miséricorde. Et il est sérieusement fait allusion à Son grand amour dont Il nous a aimés comme étant la source de tout ce qu’Il a fait. « Dieu qui est riche en miséricorde, à cause de son grand amour dont il nous a aimés, alors même que nous étions morts dans nos fautes » — « nous », soit Juifs, soit Gentils, quoique cela se rapporte ici plus particulièrement aux Juifs. Du moins il avait présenté le contraste entre les deux dans les versets 2 et 3. Il se peut que dans le verset 5 il les introduise tous les deux ; mais s’il en est un auquel il soit fait particulièrement allusion, c’est le Juif, car il est aussi mort que le Gentil — il n’y a point de différence quant à cela. « Alors même que nous étions morts dans nos fautes », « Dieu nous a vivifiés avec le Christ (vous êtes sauvés par [la] grâce), et nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ». Étant déjà entré dans le sujet général de la régénération, je désire seulement ajouter que, maintenant que le christianisme est proclamé, quoique la régénération se poursuive au moins autant que jamais, nous voyons, de fait, que le Saint Esprit imprime un caractère plus profond à la régénération du temps présent. Car ce n’est pas seulement que la vie est donnée, ni que des âmes soient nées de nouveau, mais elles sont vivifiées ensemble avec Christ. Un langage comme celui-ci n’aurait pu être employé avant la mort et la résurrection de Christ. Il ne peut y avoir aucune hésitation à dire que toute la vie que les saints, quels qu’ils soient, ont jamais reçue depuis le commencement du monde, venait de Christ et était par Christ. En Lui « était la vie ». Il est la vie éternelle qui était avec le Père, et il n’y a pas d’autre vie pour le pécheur. Il y avait un arbre de vie avant la chute de l’homme ; non seulement un « arbre de la science du bien et du mal », mais un « arbre de vie ». Mais ce n’était là qu’une vie de créature, qui aurait pu faire subsister jusqu’à la fin une créature innocente. Mais si la créature est tombée, quel en est le résultat ? Qu’arriva-t-il lorsqu’Adam devint un homme pécheur ? L’arbre de vie pouvait-il alors lui profiter ? Pas pour un moment. « Ainsi il chassa l’homme ». Dieu ne voulut point permettre que l’homme touchât le simple arbre naturel de la vie. Car en supposant qu’il en eût mangé après avoir péché, qu’en serait-il résulté ? Uniquement une perpétuation du mal dans une condition de péché misérable et sans remède — une existence éternelle dans une condition d’éloignement à l’égard de Dieu à laquelle il n’y aurait eu aucun moyen de se soustraire. Ainsi donc, bien que la mort soit intervenue comme la sentence sur l’homme coupable, il y a, en un certain sens, de la miséricorde en cela, maintenant que l’homme entre par sa naissance dans un monde pécheur, et qu’il est sujet à toute sorte de misères qu’un ennemi a introduites, et qu’on peut regarder, si vous considérez la mort comme en faisant partie, comme la juste sentence de Dieu sur l’iniquité de l’homme. Mais Satan s’empare de tout cela, et le fait servir à ses desseins, à quoi se joint une mauvaise conscience sur laquelle Satan agit, en sorte qu’un homme est rempli de terreur et d’horreur par rapport à Dieu. C’est de cela que Dieu, en présentant Christ, délivre l’âme. Ce n’est pas seulement que l’âme trouve une vie qui est adaptée à tous ses besoins ; ce n’est en aucune façon une simple perpétuation de l’existence de l’homme dans la misère ; mais la vie en Christ assure la délivrance du mal et de tous ses effets, et de la malédiction qui s’y rattache, une délivrance qui découle de Dieu en Sa grâce et qui est fondée sur Sa sainteté ; et une sainte position de bénédiction en la présence de Dieu, se trouve en ce même Christ qui introduit cette vie. Il y a aussi ceci — que l’âme retrouve Dieu, aussi sûrement que Dieu retrouve l’âme pour Lui-même. Ce n’était pas seulement que l’homme par le péché avait perdu sa vie naturelle ; mais il avait perdu Dieu ; et ce n’est pas seulement que Christ me donne maintenant une nouvelle vie et une vie meilleure que celle qu’aurait pu donner l’arbre de vie, mais Il me donne Dieu ; Il m’amène à Dieu et me place dans la présence de Dieu. Il fait connaître Dieu à mon âme, et me donne d’être assuré de Son amour, de l’intérêt qu’Il prend à moi, de Sa profonde pitié et même de Sa satisfaction ; car Dieu ne saurait seulement aimer d’une manière naturelle, mais Il aime d’un amour qu’accompagne Sa satisfaction, et une relation spéciale.

Voilà donc ce que nous trouvons en Christ, et quoiqu’il pût être parlé de la vie, par rapport à tous les saints de l’Ancien Testament, avant que Christ fût mort et ressuscité, toutefois je doute fort que l’Esprit de Dieu eût pu parler de la vie qu’ils ont reçue, comme étant la vie avec Christ. Impossible que ce ne fût pas la vie par Christ et en Christ ; mais vivifier avec Christ va beaucoup plus loin. Or, c’est ce que nous avons maintenant. Car Dieu dirige nos regards vers Christ sous le poids de nos péchés, sous toutes les conséquences de ce que méritait notre nature à cause de son éloignement de Dieu et de son inimitié contre Lui — à cause de son esprit de désobéissance et de volonté propre. Tout le mal fut placé sur Lui, et Il fut traité comme s’Il eût été tout cela ; comme si Lui, souffrant pour nous sur la croix, avait en Sa propre personne la somme et la substance du mal de la nature humaine. Sans doute, s’il y en avait eu en Lui la moindre parcelle, Il n’aurait pu faire propitiation pour d’autres — le jugement de Dieu devait nécessairement frapper cette nature ; mais l’absence totale de cette nature en Sa propre personne, c’est ce qui indiquait qu’Il était parfaitement capable d’être la victime. En la personne de Christ sur la croix, Dieu agissait à l’égard de toute la hauteur, et la longueur, et la profondeur et la largeur du péché. Mais Dieu ressuscita ce même être béni, qui était descendu sous la colère de Dieu, et qui, après avoir goûté ce que c’était que d’être abandonné, et d’avoir la face de Dieu cachée arrière de Lui, ne quitta pas cette vie — et ne pouvait la quitter — sans dire : « Père ! entre tes mains je remettrai mon esprit », montrant ainsi la parfaite confiance et les parfaites délices de Son cœur en Dieu. « Nos pères se sont confiés en toi — ils ont crié vers toi, et ils ont été délivrés ». Mais Il ne pouvait être exaucé avant que l’épreuve complète fût terminée. Il fut exaucé seulement « d’entre les cornes des licornes ». Il a dû traverser tout cela — une tristesse et une angoisse inexprimables, que nul que Lui n’aurait pu endurer ; et pour Lui, néanmoins, que n’était-ce pas ? — Toute la colère de Dieu, si la délivrance devait être complète et selon Dieu. Mais Il l’a fait ; et Il nous fait connaître, en quittant la scène, que, quoi qu’Il souffrît, toutefois Son cœur se confiait vraiment en Dieu ; et Il confessa sans aucune hésitation, non seulement que Dieu était toujours saint, mais que le Père était plein d’amour. « Père ! entre tes mains je remettrai mon esprit ».

Mais maintenant nous avons une tout autre chose — c’est Dieu qui intervient pour délivrer entièrement. L’apôtre ne pouvait pas dire que Dieu a vivifié Christ d’une manière absolue. L’expression est toujours modifiée d’une manière ou d’une autre, parce que Christ était Lui-même la vie. Il était la vie éternelle avec le Père — au temps convenable manifestée sur la terre ; et comment dire aucune chose qui supposerait qu’Il dût Sa vie a un autre ? Il pouvait être dit que, comme homme « mis à mort en chair », Il fut « vivifié par l’Esprit », mais Sa gloire intrinsèque et personnelle demeure, et c’est elle qui en effet donna à toute l’étendue de Son humiliation et de Ses souffrances jusqu’à la mort leur vraie valeur. Le Père aussi Lui donna (comme homme) « d’avoir la vie en lui-même ». C’était là la perfection de Christ ici-bas ; Il ne voulut pas s’emparer de la vie comme étant Son propre droit ; Il ne voulut ni dire une parole, ni faire une œuvre, qu’Il n’eût entendue de la part de Dieu et en Dieu. Il fut l’homme parfaitement dépendant. Le même évangile qui insiste, comme aucun des autres ne le fait, sur Sa gloire divine, nous montre aussi Son absolue dépendance à l’égard de Dieu. D’un autre côté, qu’il est doux de voir dans les Écritures comment Dieu le Père veille sur la gloire de Christ ! Il ne voulait pas dire un seul mot qui pût en aucune manière porter atteinte à la gloire de Son Fils.

C’est pourquoi il est dit ici qu’Il « nous a vivifiés avec Christ ». C’est nous qui avions besoin de la vie. Christ avait pu descendre jusque dans la mort, mais Dieu nous a vivifiés ensemble avec Lui. Christ était mort d’une manière infiniment plus solennelle qu’aucun être qui serait simplement un homme ne pourrait mourir. Il était emphatiquement le saint de Dieu, le seul homme qui fût saint, et pourtant ce fut même ainsi qu’Il mourut. Sans doute aucun être qui n’eût pas été saint n’aurait pu mourir comme Il mourut. Il sut ce que c’était que de goûter la mort dans toute son amertume, le jugement et la colère de Dieu, comme nul autre ne l’aurait pu ; et pourtant Il était Celui qui le sentit d’autant plus, parce qu’Il était essentiellement au sein du Père. Mais ce Sauveur béni étant descendu complètement sous la mort, comme étant le jugement de Dieu sur notre nature et sur nos péchés, c’est alors qu’intervient la puissance de la force de Dieu, qui nous a vivifiés ensemble avec Christ. En un mot, cette vie est dans l’association la plus intime avec Christ, et nous sommes dans l’union avec Christ Lui-même, avec Christ « mis à mort en chair », mais maintenant « vivifié par l’Esprit ». Quant à la vie qu’Il avait ici-bas, elle fut laissée et quittée ; et maintenant Il ressuscite dans une nouvelle condition de vie, en résurrection. C’est pourquoi il est ajouté immédiatement après, que Dieu nous a non seulement vivifiés ensemble avec Christ, mais ressuscités ensemble ; et plus encore que cela, qu’Il nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus. Ainsi la pleine valeur qui appartient à la vie, telle qu’elle est maintenant en Christ, nous est aussi donnée ; en sorte qu’il peut être parlé de nous, même pendant que nous sommes dans ce monde, selon la complète béatitude de vie telle qu’elle est maintenant vue en Christ à la droite de Dieu.

Considérons quelles sont les choses comprises dans une si merveilleuse pensée — quelles sont celles avec lesquelles elle nous met en association. Nous savons ce qu’est notre vieille nature, ce qu’elle aime et fait ; nous savons trop bien quelles sont les choses dans lesquelles nous a plongés la vie ou plutôt la mort d’Adam. Qu’avons-nous reçu de notre premier père — qu’avons-nous mérité et attiré sur nous-mêmes, sinon le péché, la tristesse, la souffrance, la maladie, la mort, une mauvaise conscience et une attente terrible de jugement ? Nous avons toutes ces choses comme les mouvements et les effets de cette existence que nous avons héritée, le triste héritage que nous a laissé le premier homme. Mais maintenant vient la source de vie — nouvelle et surnaturelle — dans le second homme ; et où apprendrons-nous le mieux à en connaître le caractère ? Portons nos yeux en haut, sur Christ. Comment Dieu le Père Le regarde-t-Il ? Trouve-t-Il Ses délices en Lui ? Il en fut toujours ainsi ; et jamais plus assurément, que lorsqu’Il contemplait la vie de Christ, lorsqu’Il marchait comme homme parmi les hommes. Mais il y avait la terrible question du péché — de notre péché. Est-ce maintenant là une question encore à régler ? ou bien, est-ce que Christ y a réellement répondu de fait et pour toujours en la croix ? Oui ; Il l’a fait ; et c’est la chose même qui a fourni à Dieu l’occasion de nous montrer Son amour, comme nulle autre ne le pouvait. Comment aurais-je pu savoir combien Dieu m’aime, si je ne m’étais trouvé dans un tel abîme de détresse, comme ennemi de Dieu, abîme insondable sinon pour Sa miséricorde en Christ, qui apporte le salut ? Je ne dis pas cela pour atténuer le péché de mon inimitié contre Dieu, ni pour laisser subsister l’idée qu’il y avait ou qu’il pouvait y avoir le moindre titre à la faveur de Dieu. Mais mon mal sans ressource devient la mesure de la profondeur de Son amour ; et cela, parce que c’est ce qui amène Christ sur la scène, et même, Christ comme Rédempteur et Sauveur de la part de Dieu — Christ, le don infini de la grâce de Dieu — Christ, que rien ne pouvait détourner — Christ, qui souffrit tout de la main de l’homme et de Satan, et du juste jugement de Dieu, afin que nous fussions sauvés selon un mode divin. Et en réalité nous le sommes ainsi. Et que ne devons-nous pas au Sauveur et au Dieu qui L’a donné ? Mais qu’est-ce que Christ n’a pas porté ? Notre affreuse ruine et notre horrible péché ont précisément manifesté ce que Dieu est dans Son grand amour envers nous, et ce que Christ est en Sa valeur aux yeux de Dieu, et la puissance de la force de la vie, dans laquelle Il est ressuscité et monté en haut, et est assis — et nous-mêmes en Lui — dans les lieux célestes. Demandez-vous encore quel est le caractère de la vie que le chrétien possède maintenant ? Regardez Christ, et voyez combien Il est précieux à Dieu — combien il est impossible à Dieu de ne pas avoir ce Sauveur béni, qui est la pleine expression de cette vie, placé tout près de Lui-même ! Il L’a ressuscité, et « l’a fait asseoir à sa droite dans les lieux célestes ». Dans Éphésiens 2 c’est simplement : « Il nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ». Il n’est pas ajouté ici, comme dans Éphésiens 1, « à sa droite ». De telles paroles ne sont jamais, que je sache, employées à l’égard des enfants de Dieu ; et je ne crois pas non plus qu’elles pourraient l’être. Ne semblent-elles pas plutôt indiquer la place personnelle de Christ ? Mais il est dit : « Dans les lieux célestes », parce que c’est à eux, et non à la terre, que nous appartenons. Israël, comme tel, dans ses meilleurs jours, appartenait à la terre (comme nous y appartenions — loin de Dieu — dans nos plus mauvais jours) ; mais maintenant, ce n’est pas seulement que nos « noms sont écrits dans les cieux », bien que cette expression même montre le merveilleux amour de Dieu qui nous destine à être en haut et nous enregistre pour cela — qui nous lie avec le ciel pendant que nous sommes sur la terre : tout cela est vrai ; mais nous avons beaucoup plus dans l’épître aux Éphésiens. Là nous trouvons qu’en vertu de notre union avec Christ, il est dit de nous, non seulement que nous sommes ressuscités avec Lui, mais assis avec Lui dans les lieux célestes. En un mot, tout ce qui est dit de Christ Lui-même, est (par la grâce) vrai de nous, à la seule exception de ce qui peut être personnel en Lui, comme Dieu le Fils, ou exprimé à l’égard du Seigneur à un degré prééminent. Car après tout, il y a une distinction entre la tête et le corps, même comme tel ; quoique d’un autre côté, cette différence elle-même montre l’association la plus étroite possible : nous sommes Sa plénitude ou Son complément.

Nous apprenons donc par là, que nous possédons le titre même de Christ, pendant que nous sommes dans ce monde — il y a même plus que cela : la vie même de Christ est la nôtre, en vertu de quoi il est dit de nous que nous sommes vivifiés avec Lui, et même ressuscités, et assis dans les lieux célestes en Lui. Mais rappelons-nous soigneusement que tout cela n’est jamais dit de personne, par rapport au dessein et à l’élection de Dieu, mais seulement où existe la foi. Cela ne nous est pas applicable avant que nous croyions : cela ne serait vrai de personne, avant qu’il y ait une association positive et vivante avec Christ. Ce qu’on appelle vulgairement théologie calviniste, quoiqu’elle renferme bien des vérités, est totalement fausse sur ce chef. Un de ses principaux traits, ce sont les efforts pour établir que, l’amour de Dieu demeurant d’âge en âge, notre relation est toujours précisément la même ; que Dieu, parce qu’Il a le dessein de faire de nous Ses enfants, nous regarde toujours comme Ses enfants ; qu’en supposant qu’un homme est un élu, s’il est encore un incrédule ou un blasphémateur, il est tout autant un enfant de Dieu, que s’il était régénéré par le Saint Esprit, et marchant dans les voies de Dieu. Elle soutient que Dieu l’aime exactement du même amour (tandis qu’il est par exemple, un buveur ou un jureur) qu’après. Que peut-on imaginer, parmi des croyants, de plus déshonorant pour Dieu, de plus destructeur pour l’homme que cette doctrine-là ? Il est évident que l’apôtre parle ici, non de personnes simplement élues, bien que, naturellement, elles fussent élues, mais de personnes vivifiées. C’est-à-dire qu’elles avaient actuellement la vie. Non seulement il y avait un dessein de Dieu à leur égard, mais elles étaient alors vivantes à Dieu, comme étant ceux qui avaient foi en Christ : vous ne pourriez pas dire qu’un homme a la vie, avant qu’il ait la foi. C’est la réception de Christ par le Saint Esprit, qui est appelée d’une part la foi, et de l’autre la vie. Vous ne pourriez pas avec raison mettre l’une de ces deux choses avant l’autre. S’il est vrai que vous ne pourriez guère dire que la foi existait avant la vie, il est certain que la vie n’existe pas avant la foi. Le premier exercice de la foi, est aussi le premier exercice de la vie. C’est la puissance de l’Esprit de Dieu, présentant Christ à l’âme ; c’est pourquoi il est dit : « L’heure vient, et elle est maintenant, que les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et [l’]ayant entendue, ils vivront ». Le fait de vivre, ici, est plutôt, s’il y a aucune différence, l’effet de l’ouïe, que l’ouïe ne serait l’effet de la vie. Cela est bien important ; parce que nul ne peut affirmer que des personnes sont vivifiées avec Christ, avant qu’elles soient ici pour être appelées ; et il est impossible de dire qu’elles ont la vie, avant qu’elles aient entendu la voix du Fils de Dieu. La première preuve qu’un homme est une brebis du Seigneur, c’est qu’il entend la voix du bon Berger. Il n’est pas laissé à certaines indications (ou plutôt à des indications incertaines) de la vie au-dedans de lui-même, mais ce qui est placé devant lui, c’est la grande pierre de touche objective, la grande preuve objective, que Dieu demande ; — non pas simplement ce que je fais, ou ce que je ne fais pas (c’est ce que la loi demandait), mais si je reçois le Fils de Dieu, et si je me repose sur Lui. Suis-je arraché à tous les vains sons qui se font entendre dans le monde ? Et la voix de Christ attire-t-elle mon âme ? S’il en est réellement ainsi, vous avez assurément la vie. « Qui croit au Fils a la vie éternelle ». « Celui qui a le Fils a la vie ». Je prouve que je l’ai par le fait bien simple, bien certain, et béni, que j’entends la voix du Fils de Dieu. Ce n’est qu’ainsi que j’ai la vie — ce n’est qu’alors que je suis assuré d’être vivifié et ressuscité avec Christ. Remarquez-le bien : ce qui constitue le caractère chrétien du fait d’être vivifié, c’est l’association avec Christ après qu’Il a enduré la mort pour nos péchés. Il est dit aussi de nous que nous sommes assis dans les lieux célestes, parce que nous avons la vie de Christ qui est là, et il est parlé de nous selon la place dans laquelle est entré Celui qui est notre vie. Ainsi donc l’Écriture ne veut pas seulement dire que nous sommes tels selon le décret ou la pensée de Dieu, lorsqu’elle dit que Dieu nous a ressuscités et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes. Cela ne se réfère pas à notre résurrection future, mais expressément à l’association présente du croyant en vertu de son union avec Christ, qui est en la présence de Dieu. Et en faisant allusion à la première chose, le fait d’être vivifiés, l’apôtre dit : « Vous êtes sauvés par [la] grâce ». C’est là la source de toute la bénédiction. En conséquence l’expression est très forte. Car ce qu’implique la forme de l’expression, c’est que le salut était complet, et qu’ils jouissaient maintenant de son résultat actuel. Il n’est pas toujours parlé ainsi du salut dans l’Écriture ; il y a des épîtres entières où le sujet n’est jamais traité de cette manière. Ainsi, particulièrement dans l’épître aux Philippiens, le salut est envisagé comme une chose future — comme n’étant pas complète jusqu’à ce que nous voyions Christ en gloire. Dans cette épître le salut est une chose solennelle qui se poursuit maintenant (quoiqu’elle ne soit nullement précaire), parce qu’il est clair que nous ne sommes pas avec Christ dans la gloire, mais dans nos corps naturels. D’après cela, Christ y est présenté comme un Sauveur, non seulement parce qu’Il est mort et ressuscité, mais parce qu’Il va revenir pour ma pleine délivrance et pour ma parfaite joie. C’est ce qui explique la signification de ce texte qui a tant embarrassé quelques personnes. — « Travaillez à votre propre salut avec crainte et tremblement » ; parce que dans le sens que la Parole a en vue ici, nous ne posséderons le salut que lorsque nous serons glorifiés avec Christ. En attendant, nous y travaillons avec crainte et tremblement, nous rappelant que Satan nous hait parce que nous devons être en gloire avec Christ. Nous sommes envisagés comme des personnes en ce monde, qui savons que nous devons avoir le prix, mais nous avons à combattre et à courir pour l’avoir, quoique nous devions retenir ferme l’assurance que nous l’aurons quand nous verrons Christ venir d’en haut pour nous.

Mais quand nous examinons le langage de l’épître aux Éphésiens, tout est différent. Là le salut est regardé comme une chose absolument passée : « Vous êtes sauvés par [la] grâce » — ce n’est pas seulement que la chose se poursuit, et doit bientôt être complétée ; mais nous sommes sauvés et, en Christ, nous ne pouvons l’être plus que nous ne le sommes. Tandis que d’après l’épître aux Philippiens, Paul ne possédait pas encore son salut : « Non que j’aie déjà atteint [le but], ou que je sois déjà parfait ». La perfection dont il y est parlé se rapporte entièrement et uniquement au temps où nous serons transformés à la glorieuse ressemblance de Christ. Alors nous serons sauvés, et non auparavant. Si vous appliquez le même sens du mot salut aux deux épîtres, vous rendez la doctrine contradictoire. Prenez encore l’épître aux Hébreux. Là aussi, le salut est toujours représenté comme une chose future. « C’est pourquoi aussi », y est-il dit, « il peut sauver entièrement ceux qui s’approchent de Dieu par lui ». Il s’agit ici du peuple de Dieu, et non des inconvertis, quand il est dit qu’ils s’approchent de Dieu par Christ. Pour qui est-Il sacrificateur ? Pour le croyant seulement. Ainsi donc c’est le saint qui a besoin d’être sauvé dans l’épître aux Hébreux ; parce que le salut dans cette épître s’applique à toutes les difficultés de notre voyage à travers le désert. Toute la doctrine est fondée sur ce type, que nous, maintenant, comme Israël jadis, nous traversons le désert, et que nous ne sommes pas encore entrés dans Canaan ; tandis que l’enseignement caractéristique de l’épître aux Éphésiens, c’est que Christ est entré en Canaan, et que nous sommes là en Lui. C’est parce que nous sommes occupés d’une portion de la Parole de Dieu, et non de toute la Parole, parce que nous saisissons fortement une certaine vérité, et non la vérité généralement, que nous parvenons à des vues confuses et fautives qui mènent à une pratique vicieuse.

La raison de ces différences est extrêmement intéressante. Vous avez dans chaque épître précisément ce qui convient à son caractère propre. Dans celle aux Éphésiens ce n’est pas la révélation de Christ comme Celui qui intercède pour nous devant Dieu : c’est ce que nous avons dans les Hébreux. Pourquoi est-Il sacrificateur ? Afin qu’Il ait « de l’indulgence pour les ignorants et les errants ». C’est là exactement notre danger, pendant que nous sommes voyageurs ici-bas : nous sommes ignorants, et toujours exposés à la tentation de nous détourner, par le moyen d’un méchant cœur d’incrédulité, c’est pourquoi nous avons besoin de l’épître aux Hébreux. La doctrine de celle aux Éphésiens ne suffirait pas à elle seule pour répondre à ma faiblesse, à mes difficultés, à mes tristesses. Supposons que je me sois égaré, que trouvé-je dans les Éphésiens pour rappeler et consoler mon âme ? J’y lis : « Afin que nous fussions saints et irréprochables devant lui en amour ». Mais alors je me suis égaré, et je ne peux trouver là aucun soulagement pour mon angoisse. Je puis essayer d’affermir mon cœur en m’appuyant sur l’élection de Dieu et sur Ses conseils si élevés, mais, si j’ai une conscience tendre, ces choses, si elles sont seules, me rendront plus misérable. Mon cœur raisonnera et dira : Si Dieu m’a réellement tant aimé, comment se fait-il que je Le déshonore ainsi ? Dans l’épître aux Hébreux, je ne trouve pas un mot sur le fait que je suis assis dans les lieux célestes, mais je trouve Christ à la droite de Dieu, et plaidant pour moi, après avoir fait par Lui-même la purification de mes péchés. Le premier chapitre même a pour point de départ cette glorieuse vérité — que Christ ne s’est assis dans les hauts lieux que lorsqu’Il put prendre cette place sur le fondement qu’Il avait complètement effacé nos péchés, et cela « par lui-même », c’est-à-dire à l’exclusion de tout autre moyen de secours. Ce fut Sa propre tâche, et Il l’a accomplie, et Il ne pouvait trouver du repos même dans cette gloire qui Lui était familière, à Lui, sinon sur ce fondement-là. En cela nous avons un fondement bien ferme. Mais tout en ayant la purification de nos péchés par Christ, nous sommes dans un lieu de tentation, où, par le moyen de l’ignorance, de la faiblesse, et de mille autres choses qui peuvent survenir, nous sommes constamment en danger de nous écarter et de glisser. Que deviendrons-nous donc alors ? Qu’est-ce qui nous soutiendra et nous conduira à travers cette scène ? Dieu révèle le Sacrificateur béni qui prend soin de l’âme. — Celui qui possède la pleine confiance de Dieu le Père, qui Lui a donné la plus entière satisfaction — Celui qui est assis à la droite de Dieu, et qui y est occupé sans cesse de nos besoins, sur cette base, que nous appartenons à Dieu et que nous sommes déjà rachetés, et que nous n’avons plus aucune conscience de péché. Il se peut que nous ne nous rendions guère compte comment il se fait que des personnes, qui sont si bénies de Dieu, soient si faibles et misérables, si peu semblables à Celui qui, à Ses propres dépens, a acquis et nous a assuré notre bénédiction. Mais la foi reçoit de Dieu et Lui demande ce qu’Il destine à être notre force et notre consolation au milieu de notre faiblesse et de nos dangers. Sa réponse est que Christ est là pour plaider notre cause, aussi certainement que l’Esprit est ici pour nous en donner la conscience. Et c’est par le moyen de l’intercession de Christ à la droite de Dieu, que nous sommes amenés à sentir nos besoins et nos manquements. Car nous ne jugeons jamais ces choses sans recevoir par le moyen de ce jugement une bénédiction morale. Toute la puissance de Christ, en tant que reposant sur nous, se réalise en raison de la profondeur de l’appréciation morale produite dans notre âme par l’Esprit de Dieu en réponse à l’intercession de Christ ; et c’est une partie de l’effet de l’intercession de Christ pour nous que nous soyons amenés à sentir les choses, quand nous nous sommes égarés dans nos pensées et de fait. Dans l’épître aux Hébreux, il ne pouvait être parlé du salut comme d’une chose passée. Nous savons que nous serons pleinement sauvés, et que Christ doit venir pour cela. Mais quoiqu’il soit réservé aux hommes de mourir, il n’en est pas nécessairement ainsi pour le saint. Nous savons qu’il peut se faire qu’ils ne s’endorment jamais, comme nous savons que certainement ils ne seront jamais jugés, quoique tout ce qu’ils ont fait doive assurément être manifesté devant le tribunal de Christ. Mais Il est passé par la mort pour eux, et par conséquent il n’y a aucune nécessité qu’ils meurent ; et Il a enduré le jugement comme nul autre ne le pouvait, et nous avons Sa propre Parole pour nous assurer que, dans tous les cas, nous ne viendrons jamais en jugement. Celui qui croit au Fils de Dieu « a [la] vie éternelle et ne viendra pas en jugement » (Jean 5, 24). La conséquence en est que, quoique nous attendions qu’Il vienne, nous savons que quand Il apparaîtra une seconde fois, ce sera sans péché, à salut. Il a si parfaitement aboli le péché par le sacrifice de Lui-même, que, quand Il sera ainsi vu une seconde fois par ceux qui L’attendent, ce sera « sans péché » (à part toute question de péché, du moins pour ce qui les concerne), « à salut », et non pour le jugement. Le salut et le jugement sont les deux choses qui, par-dessus toutes autres, présentent le plus complet contraste. Vous ne pouvez avoir le jugement et le salut comme appliqués au même individu. Ainsi donc dans l’épître aux Hébreux, vous avez le salut lié avec l’apparition de notre Seigneur une seconde fois.

Dans l’épître aux Éphésiens, au contraire, nous sommes déjà sauvés, et dans cette épître, il n’est jamais fait allusion au retour de Christ pour recevoir Son peuple. Dans les épîtres où le salut est présenté comme devant être complété bientôt, là nous trouvons la venue de Christ pour l’accomplir. Dans l’épître aux Philippiens, il est dit : « Notre conversation est dans les cieux, d’où aussi nous attendrons le Seigneur Jésus Christ [comme] Sauveur ; qui transformera le corps de notre abaissement [afin qu’il soit rendu] conforme au corps de sa gloire, selon l’opération de cette puissance par laquelle il peut même s’assujettir toutes choses ». Là nous trouvons notre Seigneur transformant ce corps d’abaissement, afin qu’il soit rendu conforme au corps de Sa gloire, prouvant qu’Il est le Sauveur ; parce que ce n’est pas une délivrance partielle, mais un salut complet pour l’homme entier. Mais dans l’épître aux Éphésiens, où la venue de notre Seigneur n’est jamais introduite, ceci se lie avec le fait que le salut est déjà regardé comme étant un fait accompli, dont nous jouissons maintenant. C’est là une manière d’envisager le salut, qui se trouve rarement dans l’Écriture : il est généralement envisagé comme quelque chose que nous avons devant nous. Les gens confondent le salut avec la justification ou la réconciliation avec Dieu ; mais dans l’épître aux Romains la distinction est présentée d’une manière évidente : — « Si étant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, beaucoup plutôt, ayant été réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie ». Ainsi nous avons la réconciliation, mais non le salut, dans le sens où il est parlé ici. « Serons-nous sauvés ». Il est vivant pour nous ; et, comme conséquence, nous sommes en voie d’être sauvés. Le salut se poursuit ; et quand Christ reviendra en gloire, alors le salut sera complet. D’après cela, dans Romains 13, nous avons la doctrine encore appliquée : « Maintenant le salut est plus près de nous que lorsque nous avons cru ». Nous ne l’avons pas encore ; mais il est plus près ; et nous l’aurons bientôt entièrement et parfaitement. Avant d’avoir cru, nous étions ennemis, et perdus ; puis, ayant cru, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de Son Fils. Maintenant Il vit pour nous ; et bientôt Il reviendra pour nous, et alors tout sera complet.

De plus, prenez les épîtres aux Corinthiens, et vous y trouverez le même enseignement. Le salut n’y est pas envisagé comme complet. Dès lors l’apôtre dit qu’il mortifie son corps et l’asservit. Il ne veut pas permettre qu’aucune mauvaise convoitise ait de l’empire sur lui. Il pourrait prêcher au monde entier ; mais si le mal avait le dessus sur lui, comment pourrait-il lui-même être sauvé ? Il présente la chose de la manière la plus forte possible par rapport à lui-même ; et il montre que la prédication (dont quelques-uns paraissaient occupés plutôt que de Christ) n’a rien à faire avec la question de savoir si un homme sera sauvé, mais qu’il s’agit de la vie en Christ ; car la grâce de Christ se manifeste dans une sainte soumission à Dieu et dans le jugement de soi-même quant au mal. Ce sont là les conséquences inséparables du fait que l’on a la vie de Christ par la puissance du Saint Esprit dans l’âme. « Je mortifie mon corps », dit-il, « et je l’asservis, de peur qu’après avoir prêché à d’autres, je ne sois moi-même réprouvé ». Je prends le dernier mot dans le sens le plus fort, ce qui est même le seul sens scripturaire, c’est-à-dire celui de réprouvé. Ce mot, dans le Nouveau Testament, ne signifie pas simplement qu’un homme va perdre quelque chose, mais qu’il va perdre sa propre âme et perdre Christ. Il n’y a aucun exemple dans les épîtres où le mot soit employé dans un sens modifié : il signifie invariablement perdre pour toujours ; et il n’y a ni foi ni intelligence à en modifier la force. Ce n’est pas que Paul eût aucune crainte d’être perdu ; mais il rapporte ce cas à lui-même, pour rendre la chose plus forte, en supposant qu’il en vînt à renoncer à Christ et à Sa sainteté. Quelle est la conséquence ? Il aurait pu être alors le prédicateur le plus actif, et pourtant se trouver être un réprouvé ; mais nul homme qui a jamais été régénéré ne pourrait devenir un réprouvé ; aussi ne dit-il pas : Quoique je sois né de Dieu, je pourrais être un réprouvé. Une telle chose ne pourrait ni ne devrait être supposée. Mais il donne un exemple bien sérieux de ce qui, hélas ! n’a été que trop commun, savoir, qu’un homme pourrait prêcher à d’autres et être un réprouvé. Nous savons que l’un des apôtres prêchait et faisait des miracles ; mais le Seigneur ne l’avait jamais connu.

Ceci montrera l’importance qu’il y a à laisser à la doctrine du salut la place que l’Écriture lui donne, selon toutes les manières dont elle l’envisage. Dans la plus grande partie de l’Écriture, elle n’est pas envisagée de la même manière que dans l’épître aux Éphésiens, mais de la manière que je viens de décrire, dans l’épître aux Romains, etc. On ne peut légitimement élever aucune question quant à la possibilité de retomber, quand l’apôtre parle du salut dans ce sens ; mais le fait est que tout le résultat de la bénédiction — toute la plénitude de la délivrance, n’est pas encore notre portion. Et qui pourrait dire qu’elle l’est ? Ici, nous souffrons encore : alors nous serons tout entièrement en dehors de la scène de la tentation. Dans l’épître aux Éphésiens, l’apôtre dit, en considérant le caractère de notre vie, qu’elle est entièrement en dehors de tout danger, de toute tentation, et de toute chose de cette nature. « Vous êtes sauvés par [la] grâce ». Il veut dire par là que nous avons été et que nous sommes sauvés ; c’est-à-dire que nous avons la jouissance actuelle de ce qui est déjà passé et complet devant Dieu. C’est un fait accompli, parce que c’est en Christ, et toutes choses sont ici considérées comme étant en Christ, comme, par exemple, notre paix. En conséquence, plus loin, Il est Lui-même appelé notre paix. Dès lors aussi, tant il est vrai que le salut est envisagé comme étant en Christ, il est dit de nous, le Sauveur étant assis dans les lieux hauts, que nous sommes, non pas en voie d’être sauvés, mais complètement sauvés, tellement qu’il ne nous faut rien de plus quant à ce qui concerne ce point. Et il est ajouté, en parfaite harmonie avec ce que nous venons de voir, que Dieu « nous a ressuscités ensemble, et nous a fait asseoir ensemble dans les lieux célestes dans [le] Christ Jésus ; afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans [le] Christ Jésus ». Que peut-il y avoir de plus clair que la nature complète de ce salut ? Combien il est manifeste qu’il a un caractère d’association avec Christ, qui est tout à fait au-delà de toute conception humaine ! Il est facile de concevoir qu’une telle béatitude puisse exister bientôt ; mais voici la chose merveilleuse, c’est que cela soit déclaré comme la portion actuelle de pauvres et faibles chrétiens, maintenant de ce monde. Si nous nous arrêtons beaucoup sur des choses humaines, elles deviennent communes et sans valeur, et nous cessons de nous émerveiller ; mais quand il s’agit de cette œuvre glorieuse de Dieu en Son Fils bien-aimé, plus nous y pensons, plus nous demeurons frappés d’étonnement devant elle ! Remarquez aussi que c’est dans ce but même : « Afin qu’il montrât dans les siècles à venir les immenses richesses de sa grâce, par sa bonté envers nous dans [le] Christ Jésus ». C’est-à-dire que ce n’est pas seulement Dieu qui a Ses yeux sur nous, et qui nous donne ce dont nous avons besoin, mais Dieu qui agit pour satisfaire Ses propres affections, par le moyen de Son Fils. Dieu dit, en quelque sorte : Je désire montrer ce que je suis, et non pas simplement pourvoir à ce dont vous avez besoin. Ainsi, c’est Dieu, s’élevant à la hauteur de Sa propre bonté, et agissant d’après ce qu’Il est, d’une manière complètement indépendante de ce que nous sommes, sinon que nous devenons l’occasion pour Dieu de montrer Son amour sans égal ; et cela, non pas simplement maintenant, mais « dans des siècles à venir », ou comme je le suppose, pour un temps illimité.

Mais ce n’est pas tout. L’apôtre nous met encore en garde contre certaines conceptions erronées, en reprenant ou répétant l’expression : « Car vous êtes sauvés par la grâce », avec cette addition : « par la foi », ce qui est une forte confirmation de ce qui a été déjà dit. Nous ne sommes pas sauvés par le dessein et l’élection de Dieu, quelque vraie et bénie que soit la chose, mais par le moyen de la foi dans nos cœurs, par le moyen de cette persuasion divine que le Saint Esprit opère dans le cœur d’un homme qui était auparavant un incrédule. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Il n’y a pas une telle chose que Dieu introduisant quelqu’un dans la relation d’enfant sans l’action de son cœur et de sa conscience. Le Saint Esprit donne à un tel homme de sentir sa propre condition telle qu’elle est vue de Dieu et pourtant de connaître ce que Dieu est envers lui en Christ. Il ne s’agit pas d’un simple contrat, d’un froid parchemin, d’un salut mécanique, pas plus que d’un tel changement de la vieille nature, qu’il pourrait être un fondement d’espérance à l’égard de Dieu. Mais si on ne peut se fier au sentiment humain, on ne peut se fier non plus à l’assentiment donné aux décrets de Dieu, quelqu’orthodoxe qu’il soit. Quand Dieu parle en Son Fils, et de Son Fils, c’est une chose réelle, et celui qui écoute doit avoir, d’une manière plus ou moins profonde, la conscience de la solennité de ce qu’Il a dit. Il n’est plus rebelle ni indifférent quant à Christ. Il peut sentir le péché et se haïr lui-même comme jamais il ne le fit, précisément parce qu’il est sous la main de Dieu et sous l’enseignement de Dieu. Ainsi la chose même que vous alléguez pour prouver que vous n’êtes pas de ceux qui appartiennent à Dieu, est plutôt la preuve que vous en êtes un. Si vous étiez mort quant à Dieu, sentiriez-vous ce qui L’attriste ? C’est quand Christ a commencé à reluire sur votre âme, que vous commencez à réaliser que vous aviez été plongé dans tout ce qui est ténébreux et dégoûtant, quoiqu’une lueur d’espérance puisse percer à travers les nuages. Vous avez sérieusement la conscience des choses qui sont mauvaises, auxquelles vous étiez insensible auparavant. C’est là un effet de la puissante opération de Dieu dans Sa grâce ; mais il n’y a pas une telle chose que la vie sans la foi ou sans que l’âme ait la conscience de ce qui est. Il y aura toujours quelque chose qui réveille de nouvelles pensées et de nouveaux sentiments à l’égard de Dieu, une crainte et un désir à l’égard de Dieu, une horreur du péché, et une haine de soi-même. Toutes ces choses, et d’autres encore, se passeront dans l’esprit de celui qui est né de Dieu ; et ce qui produit tous ces sentiments par l’Esprit de Dieu, c’est Christ — rien d’autre ne le fera. S’il n’en est pas ainsi, c’est en vain qu’un homme fréquente une église ou une chapelle — se joigne au meilleur ou au plus mauvais témoignage ; mais voici le principe d’après lequel il est là — il pense que c’est son devoir d’y assister peut-être tous les jours — c’est l’idée d’un service religieux qu’il croit devoir rendre à Dieu, et il pense que s’il le fait diligemment, Dieu se souviendra de lui à son lit de mort et au jour du jugement. Telle est une partie des devoirs que l’homme accomplit dans l’espoir d’échapper à l’enfer. Mais tout cela se fait sur ce fondement, que l’homme place Dieu en quelque sorte sous une obligation à son égard. L’homme fait quelque chose, et il pense qu’à cause de cela Dieu doit lui faire miséricorde. Qu’est-ce qui peut nier d’une manière plus flagrante et le péché de l’homme et la grâce de Dieu ? Or, voici ce qui est dit : « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Et l’expression, être sauvé par la grâce, veut dire que c’est par le moyen de ce que Dieu est pour moi en Son Fils, sans qu’il y ait en moi une seule chose qui le mérite. Consentez-vous à vous confier pour votre salut à Dieu seul, en Son Fils bien-aimé ? C’est là la foi. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». Si j’y mêle une parcelle de ce qui vient de moi, ce n’est à proprement dire ni grâce ni foi ; car la foi renonce à soi-même pour Christ, et la grâce est la pure faveur de Dieu envers moi, pécheur, à la croix. Quand j’écoute Christ, alors la Parole de Dieu commence à agir à l’égard de tout ce qui en moi est égoïste et opposé à Dieu, et il ne faut pas que j’essaie de modifier la Parole de Dieu, ni de l’accommoder à mes propres pensées, ménageant ainsi un moyen d’accorder un peu d’indulgence à la chair.

Je maintiens donc que le salut dont il est parlé dans l’épître aux Éphésiens est déjà complet pour celui qui croit — si absolu même, que nul ne peut rien y ajouter, parce que ce serait ajouter quelque chose à Christ, et à ce que Christ a fait. Et c’est ce qui ne doit pas être, ce qui ne peut pas être, voyant que tout vient de la miséricorde gratuite de Dieu, non méritée, sans mélange. Or c’est là la grande chose pour l’âme. Puis-je, sans aucune question de ce que je suis ou de ce que j’espère être, ou de ce que je devrais faire pour Dieu, me confier en Lui maintenant ? Puis-je me reposer sur Christ, quant à tout ce que j’ai été et tout ce que je suis, sans aucune promesse ni aucun gage de ma part — sans aucune espérance ni aucune pensée quant à ce que je puis faire, parce que Dieu pourrait m’enlever en un moment ? Puis-je me reposer en Lui entièrement, avec une confiance absolue ? Pensez au cas du brigand mourant, qui est un témoignage vivant et notable quant au salut par grâce, dans tous les âges. D’autres peuvent avoir une œuvre à accomplir ensuite ; mais là nous voyons un homme qui fut l’objet de la grâce dans les dernières heures de sa vie. Et il n’y a aucun autre moyen. Eût-il vécu pendant mille ans après, il n’aurait pas été le moindrement plus en sûreté, par grâce, qu’il ne l’était alors. Il est d’une haute importance de soumettre nos âmes à la pierre de touche de temps en temps — de voir si nous nous reposons uniquement sur la grâce de Dieu envers nous, et non sur ce que les gens appellent la grâce en nous, c’est-à-dire notre fidélité envers Lui. Car c’est là une idée de la grâce qui est bien commune. On veut parler d’un grand changement qui a eu lieu dans le cœur par rapport à Dieu. Ce n’est pourtant pas là ce que Dieu appelle grâce ; mais ce qui la constitue, c’est ce qu’Il nous a donné gratuitement dans l’œuvre que Christ a accomplie pour le péché. « Vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ». L’Esprit exclut toute pensée que l’homme, en venant à Christ, contribue par sa foi à la chose, ou se procure quelque crédit ; car l’apôtre dit immédiatement après : « Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu ». Ceci se rapporte probablement, non seulement au salut, mais aussi à la foi ; c’était tout le don de Dieu, et non la production de l’homme : « Non par des œuvres ; afin que personne ne se glorifie ». Au contraire, au lieu d’être une question de nos œuvres, c’est nous qui sommes l’œuvre de la main de Dieu, la nouvelle création pour Sa propre louange. « Car nous sommes son ouvrage, étant créés dans [le] Christ Jésus pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». Vous avez là une preuve des plus claires qu’il ne saurait y avoir aucune négligence dans la marche du croyant ; mais le même verset enlève toute pensée que l’acte de l’homme puisse être le fondement ou le moyen de salut.

Ici donc nous voyons que le croyant est l’ouvrage de Dieu en Christ, et cela « pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». C’est là une expression bien remarquable, une expression que nous ne saurions trop peser. Il ne s’agit pas des bonnes œuvres de la loi — ni de celles qui pourraient paraître telles au jugement de l’homme, mais d’une offrande d’un nouveau caractère, céleste et toute de grâce ; c’est là ce qui était dans la pensée de Dieu, et tout était déterminé par Lui à notre égard, avant qu’existât la scène, dans laquelle nous sommes maintenant introduits. Le même Dieu qui avait le dessein de nous sauver et de nous bénir avec Christ, avant que le monde fût fait, avait une marche d’un certain caractère, une ligne d’action spéciale, dans laquelle Sa pensée était que ceux qui auraient reçu une telle faveur, marchassent. Ce n’est pas la pensée du bien que nous devrions faire en tant qu’hommes, comme un moyen de montrer que nous désirons obéir à Dieu sous la loi. Ce n’est pas simplement aimer Dieu, et son prochain comme soi-même, mais tout entièrement un autre type et une autre manifestation de l’amour. Il découle de nos nouvelles relations, et s’il s’exerce en aimant Dieu et en aimant ceux qui sont autour de nous, c’est d’après le grand amour que Dieu nous a montré en Christ. Ce n’est pas seulement le devoir, quand même on prendrait la forme d’obligation la plus élevée. Si un homme marchait uniquement de cette manière-là — aussi bien qu’on peut le supposer — il demeurerait au-dessous de ce qu’un chrétien devrait être, et ce ne sont pas là « les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». La loi fut introduite par suite de la présomption d’Israël et de sa confiance en lui-même ; ce n’était pas quelque chose que Dieu avait préparé afin que Son peuple y marchât. C’est pourquoi il est dit dans l’épître aux Romains que la loi intervînt (παρειηλθεν). C’était quelque chose qui entra incidemment, comme une sorte de parenthèse introduite dans un but spécial, mais d’une profonde importance. Or elle a fait son œuvre, et le croyant, alors même qu’il a été sous la loi, est amené absolument hors de sa sphère, et est devenu vivant à Dieu. Il a un nouveau mari, et il est mort quant au premier. Mais ici la vérité est présentée dans une forme bien belle, en harmonie avec le caractère de l’épître entière. Comme la vocation et le dessein de Dieu, et toutes les pensées que Dieu avait à notre égard, existaient avant que le monde fût, ainsi le caractère même de la marche d’un croyant fut préparé avant que jamais nous vinssions dans le monde, et dans sa nature même est entièrement au-dessus de ce monde. Il est question pour nous de manifester Dieu comme il convient, selon qu’Il se manifeste Lui-même maintenant. « Soyez donc imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants ».

Quelle place merveilleuse que celle où nous avons été introduits ! Nous avons été « créés dans le Christ Jésus pour les bonnes œuvres que Dieu a préparées, afin que nous marchions en elles ». Nous avons un caractère de vie tout entièrement nouveau, que la loi n’avait jamais contemplé, et nous avons pour y correspondre un nouveau caractère de bonnes œuvres.

Ici s’ouvre une section bien distincte de l’épître. Ce n’est pas le développement des pensées de Dieu en grâce, pensées qui, depuis avant la fondation du monde, s’étendent jusqu’à l’héritage de gloire, quand toutes choses seront assujetties à Christ — l’Église étant une avec Lui dans Sa suprématie sur tout. Ce n’est pas non plus le moyen par lequel Dieu s’occupe d’âmes qui étaient mortes, sous la puissance de Satan, et par nature enfants de colère, les uns aussi bien que les autres, les vivifiant avec Christ, et les ressuscitant, et les faisant asseoir ensemble en Lui dans les lieux célestes. Nous avons vu cela dans la première partie du chapitre 2. Mais maintenant nous avons la mise en exécution actuelle des plans de Dieu dans le monde. Le chapitre 1 nous a donné les conseils de Dieu à l’égard de ces âmes-là ; le chapitre 2, 1 à 10 présente la manière dont Il a agi en eux ; mais maintenant nous avons la manière de Ses plans sur la terre. En conséquence, ceci fait ressortir d’une manière bien distincte la condition dans laquelle l’homme avait été auparavant. Il y avait déjà eu des voies de Dieu manifestées ici-bas. Après le déluge, quand le monde entier s’était éloigné de Dieu, et avait établi une forme de mal particulièrement pernicieuse — le culte de faux dieux — le vrai Dieu appela un homme hors de cet état de choses, et le mit dans une place de séparation d’avec les autres ; et Il fit de lui le dépositaire de Ses promesses et de Son témoignage sur la terre. Tel fut Abraham ; telle la semence d’Abraham. En conséquence, c’est là que depuis la vocation d’Abraham nous trouvons la scène des opérations de la puissance, de la bonté et du gouvernement de Dieu, quoique le gouvernement en fût ensuite séparé, à cause du mal en Israël qui était sans remède, et transmis aux Gentils. Mais la croix de Christ termina toutes ces épreuves. Dieu pouvait attendre ensuite pendant quelques années, dans Sa patience, comme nous le savons ; mais le sort de la nation juive fut scellé en la croix de Christ ; et depuis ce moment-là même, Dieu commença à manifester ces desseins plus profonds de Son amour. Car tout ce que le peuple juif aurait pu avoir, en supposant qu’il eût été converti et qu’il eût reçu le Messie, n’aurait pu dépasser ici-bas la position d’un peuple terrestre. Ils auraient pu être régénérés ; mais ils auraient nécessairement été terrestres. Les promesses qui leur étaient si pleinement et si richement accordées dans l’Ancien Testament se rapportaient à la terre. Je ne dis pas que la foi n’avait pas quelque chose de plus profond ; je ne dis pas qu’il n’y avait pas quelque chose dans la pensée cachée de Dieu, qui était en dehors de cette scène présente. Mais, qu’il me soit permis de le répéter, ils étaient un peuple terrestre ; ils avaient les « choses terrestres » du royaume par un don bien positif de Dieu ; et c’est par rapport à cette circonstance même, que Dieu déclare que Ses dons et Sa vocation sont sans repentir. Il avait donné aux Juifs des bénédictions terrestres, et Il les avait appelés hors des autres peuples pour jouir de la terre. Ils le feront dans une condition de gloire sous leur Messie. Il ne se repentira jamais de Ses desseins, et ne retirera pas Son don. Mais en attendant, toute l’histoire de la réjection de Dieu par Israël est survenue : le culte qu’ils ont rendu aux idoles, et finalement la crucifixion de leur propre Messie ; et pour le temps présent ils sont dépossédés de leur pays et dispersés sur la face de la terre.

Mais pendant le temps de la dispersion d’Israël, et même avant qu’il commençât, depuis le moment où leur culpabilité fut consommée, ce dessein céleste de Dieu fut graduellement manifesté sur la terre. Mais il faut nous rappeler que l’Église, outre qu’elle est l’objet des conseils éternels de Dieu, et qu’elle a une glorieuse portion dans le ciel avec Christ — objet de notre attente, a aussi une existence sur la terre et entre dans les voies de Dieu ici-bas. C’est là le point auquel nous sommes arrivés dans cette épître. Nous avons vu les pensées plus profondes de Dieu ; mais comme l’épître touche en effet aux voies de Dieu sur la terre, nous n’aurions pas eu une vue complète de la place de l’Église, si elle ne nous avait pas donné la succession des choses en rapport avec les économies ici-bas. D’après cela nous avons les éléments qui composent l’Église : « C’est pourquoi souvenez-vous qu’autrefois vous, les nations dans la chair, qui étiez appelés incirconcision par ce qui est appelé la circoncision, faite de main, dans la chair ». Ici nous sommes sur un terrain totalement différent. Il ne s’agit plus d’« enfants de colère », de personnes qui étaient par nature aussi mauvaises et aussi bien mortes les unes que les autres ; mais ici ce sont des hommes distingués les uns des autres sur la terre — la circoncision d’une part, et l’incirconcision de l’autre. En sorte que vous êtes sur un terrain terrestre, le terrain des voies de Dieu sous le rapport des économies, et vous y trouverez Dieu qui sépare une partie du genre humain de l’autre, par Sa propre volonté ; non parce que l’une était meilleure que l’autre, mais pour la manifestation de Sa propre sagesse et de Son propre dessein. La grande masse des Juifs était tout aussi mauvaise aux yeux de Dieu que les Gentils ; et quelques-uns d’entre les Gentils étaient convertis, comme Job par exemple, tandis qu’il y en avait beaucoup parmi les Juifs qui périrent dans leurs péchés. Mais, malgré tout cela, Dieu mit réellement une différence entre Juif et Gentil ; et Il dit : « Souvenez-vous qu’autrefois vous, les nations dans la chair », vous étiez parmi le reste du genre humain, laissés en dehors de la « vocation de Dieu », vous n’aviez pas été placés dans une position séparée de témoignage pour Dieu, comme le fut Abraham ; « vous étiez appelés incirconcision par ce qui est appelé la circoncision ». « Vous étiez en ce temps-là sans Christ, sans droit de cité en Israël ». Ils n’avaient aucune part dans l’ordre établi de Dieu en Israël ; et ils étaient « étrangers aux alliances de la promesse ». Dieu donna de glorieuses promesses en forme d’alliance, et s’engagea à les accomplir. Les Gentils n’y avaient ni part ni portion. Il y avait des promesses au sujet des Gentils, mais aucune faite aux Gentils. Israël était la partie qui avait un intérêt dans les promesses, directement — Israël, et Israël seul. Et il faut nous rappeler soigneusement ce que signifient ces promesses. Elles ne furent pas faites à Abel, ni à Énoch, encore moins à Adam et Ève, bien qu’il soit assez ordinaire de parler de la promesse faite dans le jardin d’Éden. Mais l’Écriture ne parle jamais de promesse qui y ait été faite. Et si vous examinez Genèse 3, vous verrez toute la sagesse de Dieu qu’il y a en cela ; car ce ne pouvait en aucun sens être une promesse. À qui pourrait-ce être une promesse ? À qui fut-elle adressée ? À ce serpent ancien ? Aucun croyant ne pourrait s’imaginer qu’une promesse lui ait été faite. C’était une menace de l’extinction de sa puissance. Dieu jugeait le péché qui venait d’entrer dans le monde : est-ce le temps convenable où des promesses peuvent être faites ? C’est rigoureusement une révélation de Dieu, nullement en forme de promesse, mais une déclaration qui prononce une dénonciation de jugement sur le serpent, déclaration qui montrait que la semence de la femme devait lui briser la tête.

« Les promesses », donc, ne remontent pas plus haut qu’Abraham : elles se rattachent aux économies de Dieu. On pourra demander : N’avons-nous pas des promesses ? Je réponds : Nous avons toutes les promesses de Dieu ; mais comment ? Et où ? En Christ « est le oui et en lui l’amen ». Si nous avons Christ, nous sommes la « semence d’Abraham et héritiers selon [la] promesse », mais d’une manière totalement différente de celle en laquelle les Juifs les avaient autrefois, ou les auront bientôt. Nous y entrons sur le pied de pure miséricorde, et comme étant entièrement en dehors de toute alliance. Il n’y a pas une telle chose qu’une alliance avec l’Église, ou avec nous, Gentils. Je ne veux pas dire que nous ne recevrons pas les bénédictions que renferme la nouvelle alliance : nous avons toute la béatitude qui s’y trouve, et plus encore ; mais non comme Israël. Ils y ont part comme objets des promesses de Dieu ; tandis que c’est la grâce souveraine qui nous a cherchés, et atteints, et bénis — n’ayant aucun droit à quoi que ce soit, et pourtant ayant quelque chose de meilleur réservé pour nous. Nous entrons comme remplissant la lacune entre la réjection du Messie et Sa réception par Israël bientôt ; et nous faisons partie de cette parenthèse, plutôt que des voies de Dieu ici-bas, et cela d’une manière bien intéressante, comme j’espère le montrer.

Ici donc, la différence est d’abord présentée. Dieu veut que nous connaissions quelle était notre condition. Nous n’avons droit à rien ; nous n’avons pas le moindre titre à faire valoir auprès de Dieu ; nous n’avions aucune place qui nous fût assignée spécialement, comme Israël avait par la promesse. Ils avaient une certaine place, même comme hommes inconvertis dans le monde ; et le jour approche où, après avoir été convertis, ils auront dans le monde une position clairement marquée — une distinction terrestre et une gloire terrestre qui n’ont jamais été et ne seront jamais notre portion. N’allez pas supposer que nous n’aurons pas quelque chose de bien meilleur ; mais nous n’aurons jamais une telle place sur la terre. Nous en aurons une avec Christ sur toutes choses ; mais ce ne sera pas pendant que nous avons notre vie naturelle ici-bas. C’est dans l’état de résurrection que la gloire de l’Église est destinée à être manifestée, dans toute sa plénitude, en tant qu’elle sera manifestée au monde. Ainsi l’apôtre rappelle ici aux saints d’Éphèse ce qu’avait été leur condition comme Gentils. « Vous étiez en ce temps-là sans Christ, sans droit de cité en Israël, et étrangers aux alliances de la promesse, n’ayant pas d’espérance, et sans Dieu dans le monde ». Ils n’avaient point d’espérance. Ils n’attendaient aucune intervention divine pour les délivrer sur la terre : ils pouvaient rêver à ce à quoi les gens rêvent encore — un perfectionnement de l’homme sur la terre. Ils n’avaient aucune connexion avec Dieu dans le monde, tandis que les Juifs avaient Dieu pour diriger tous leurs mouvements — comment ils devaient vivre et comment leur héritage devait être réglé. Dieu entrait dans toutes leurs affaires domestiques aussi bien que dans leur culte ; tout se trouvait placé entièrement et d’une manière distincte sous le gouvernement de Dieu. S’ils avaient ainsi Dieu dans ce monde, les Gentils ne connaissaient rien de semblable. Retirés de cette misérable condition, dans quoi sommes-nous introduits ? Est-ce dans la position d’Israël ? Cela est traité ailleurs. Dans Romains 11, le grand point est de montrer que les branches naturelles de l’olivier ont été arrachées, afin que nous, qui étions des branches sauvages, nous fussions entés. Le sujet ici n’est pas l’Église, mais simplement la possession des promesses, et la place de témoignage pour Dieu ici-bas. Ce sont là des choses distinctes. Toute personne baptisée — c’est-à-dire toute personne qui fait extérieurement profession de reconnaître Christ — appartient à l’olivier. Tous ceux qui sont tels ont une responsabilité spéciale, comme n’étant pas païens (ni Juifs non plus), mais en possession des oracles de Dieu, et comme portant le nom de Christ d’une manière extérieure. Mais dans Éphésiens 2, il y a une chose bien plus profonde : l’apôtre parle du corps de Christ et de l’Assemblée de Dieu. Et il faut nous rappeler qu’au commencement du christianisme, ces deux choses se touchaient de bien près : en d’autres termes, l’Assemblée ne se composait guère d’autres personnes que de ceux qui étaient les membres du corps de Christ, de vrais chrétiens unis à Christ par le Saint Esprit. Mais bientôt des individus s’y glissèrent, qui n’étaient pas nés de Dieu, et qui naturellement n’étaient pas membres de Christ, mais qui entrèrent néanmoins dans l’Assemblée de Dieu. Ainsi par le mot de chrétiens aujourd’hui on désigne quelqu’un qui n’est ni païen, ni Juif. D’après cela, dans Romains 11, vous lisez qu’il y a des branches qui sont arrachées ; dès lors il est dit que les branches qui sont entées sont debout par la bonté de Dieu, et sont averties et exhortées à y persévérer, puisqu’autrement, elles aussi, elles seront coupées. Il est question de la profession extérieure, de ses dangers et de sa sentence assurée si elle n’est pas fidèle. Mais dans l’épître aux Éphésiens il n’y a pas une telle chose que d’être coupé, parce que le sujet principal, c’est la condition de membres du corps de Christ. Il y en a qui parlent maintenant de ne pas déchirer le corps de Christ ; mais il n’y a dans l’Écriture ni une telle phrase, ni une telle idée. Vous trouverez des passages qui insistent beaucoup sur la position assurée et ferme des vrais croyants, et d’autres qui contiennent l’avertissement qu’il y en aura de ceux qui font profession qui d’eux-mêmes seront réduits à rien ou bien jugés de Dieu. Il n’y a pas une telle pensée que l’excision d’un membre du corps de Christ. Il y a des avertissements solennels pour les chrétiens dans le but de les préserver du mal, mais rien qui ressemble à l’incertitude de leur sécurité.

En poursuivant le chapitre, le côté positif de la question apparaît. Les Gentils ne possédaient pas par nature les privilèges des Juifs. « Mais maintenant dans le Christ Jésus, vous qui étiez autrefois loin, vous avez été approchés par le sang du Christ. Car c’est lui qui est notre paix, qui des deux en a fait un » — et Juifs et Gentils — « ayant détruit le mur mitoyen de clôture ». Nous trouvons ici la déclaration bien claire que les institutions mêmes que Dieu avait établies dans Ses voies avec les Juifs sont renversées. Dieu Lui-même a détruit le mur mitoyen de clôture. Lui seul avait le pouvoir de le faire. C’eût été un péché pour un autre, quel qu’il fût, de l’essayer. D’un autre côté, vous trouverez des personnes qui, dans leur ignorance de l’Écriture, soutiendront que, parce que Dieu a commandé ces choses autrefois, Il doit les sanctionner toujours. Rien ne saurait être moins fondé. C’est entièrement limiter Dieu, et fermer les yeux aux déclarations les plus claires de Sa Parole. Dans une grande partie du Nouveau Testament, Dieu met de côté les institutions juives, dans toutes leurs parties. Sans doute il y a des principes moraux qui étaient vrais avant la loi — des voies révélées de Dieu depuis le commencement, qui doivent toujours régler la conduite de l’homme à l’égard de Dieu ; mais ces choses n’ont pas nécessairement quelque chose à faire avec la loi. Sous les institutions légales, elles pouvaient se trouver plus ou moins incorporées dans la loi et prendre la forme de commandements ; mais leur racine est bien plus profonde que la loi donnée à Moïse. Les idées dont je parle sont fondées sur une notion fausse ; quand vous dites que le chrétien est délivré de la loi, quelques-uns pensent que vous allez détruire toute moralité et renverser la sainte mesure du bien et du mal, qui vient de Dieu. Mais il ne nous sied pas de décider ce qui contribue le plus à la gloire de Dieu. L’humilité se trouve dans l’obéissance, et se prouve par elle ; or l’obéissance dépend de la soumission à la Parole de Dieu. Le même acte dans des circonstances différentes peut être un devoir ou un crime : la seule et infaillible pierre de touche pour le croyant, c’est la Parole de Dieu. C’était un péché pour les Juifs de ne pas détruire tous les Cananéens : Dieu leur avait commandé de le faire — Celui qui seul était compétent pour juger, et qui seul avait le droit de commander d’après Sa volonté souveraine. Si un chrétien faisait maintenant la même chose, ce serait se méprendre quant à la pensée de Dieu. Le monde est tenu d’agir maintenant à l’égard des meurtriers aussi rigoureusement que jamais : Dieu n’a nullement révoqué la parole qu’Il prononça quant au caractère sacré de la vie humaine. C’est ce que Dieu avait établi longtemps avant la loi de Moïse, ou avant toute distinction entre Juifs et Gentils. Cela n’est annulé ni par la loi donnée à Israël, ni par l’évangile qui maintenant est proclamé en grâce au monde. Le gouvernement parmi les hommes demeure sur le fondement qui lui est propre ; il était compris dans la mission donnée à Noé ; mais le chrétien est en dehors de tout cela et au-dessus de tout cela. Il est appelé à une nouvelle vocation, et c’est ce que nous avons ici. « Mais maintenant dans le Christ Jésus vous qui étiez autrefois loin, vous avez été approchés par le sang du Christ ». Notre tâche n’est pas le maintien de l’ordre dans le monde ou de punir le désordre qui s’y trouve ; mais un nouvel édifice s’élève et croît, sur le fondement béni, saint et divin du sang de Christ, par lequel nous avons été approchés de Dieu. Et ce n’est pas seulement ce que nous serons bientôt, mais ce que nous sommes maintenant. Nous avons « été approchés par le sang du Christ ».

Rien ne saurait être plus clair et plus positif. « Car c’est lui qui est notre paix » ; — une expression bien merveilleuse. Notre paix n’est pas seulement une chose dont nous jouissons au-dedans de nous, mais c’est Christ en dehors de nous ; et si les âmes se reposaient seulement sur cela, y aurait-il de l’anxiété quant à la plénitude de la paix ? C’est entièrement ma propre faute si je ne me repose pas sur cela et si je n’en jouis pas. Mais quand même… dois-je douter que Christ soit ma paix ? Je Le déshonore si je le fais. Si j’avais une caution dont les richesses ne sauraient manquer, pourquoi douterais-je quant à ma position ou à mon crédit ? La chose ne dépend pas de mes richesses, ni de ma pauvreté : tout dépend des ressources de celui qui s’est rendu responsable pour moi. Il en est ainsi quant à Christ. C’est Lui qui est notre paix, et il ne saurait y avoir en Lui la moindre possibilité que rien nous manque. Lorsque le cœur se repose sur cela, quel en est l’effet ? Alors nous trouvons du repos et nous jouissons. Comment puis-je jouir d’une bénédiction avant d’y croire ? Et il faut que je commence par croire avant que de jouir. Le Seigneur dans Sa grâce, il est vrai, donne parfois à Son peuple des transports de joie ; mais la joie peut varier. La paix est ou devrait être une chose permanente : c’est ce que le chrétien a le droit de posséder toujours ; et cela parce que Christ est notre paix. Il n’est pas appelé notre joie ; et Dieu n’est pas appelé le Dieu de joie, mais de paix, parce qu’Il l’a accomplie Lui-même : et elle repose entièrement sur Christ. « C’est lui qui est notre paix, qui des deux en a fait un, ayant détruit le mur mitoyen de clôture ».

Il y a une notion qui prévaut généralement — notion inconnue dans la Bible — c’est que Christ opérait notre justice quand Il était ici-bas. Or je ne mets pas en doute que la vie de Christ fût nécessaire pour répondre à ce que demandait Dieu Lui-même et Sa sainte loi, aussi bien que pour Le manifester Lui-même et Son amour ; mais la justice que nous sommes devenus en Christ est absolument une tout autre pensée — non pas la loi accomplie par Lui, mais la justice justifiante de Dieu, fondée sur la mort de Christ, déployée dans Sa résurrection, et couronnée par Sa gloire dans le ciel. Ce n’est pas simplement Christ accomplissant notre devoir pour nous, mais Dieu pardonnant mes fautes, jugeant mon péché, et même trouvant une telle satisfaction dans le sang de Christ, que maintenant Il ne saurait trop faire pour nous ; cela devient, si je puis le dire, une dette positive envers Christ, à cause de ce que Christ a souffert. On ne voit pas que la loi est la puissance, non de la justice, mais du péché. Si Christ n’avait fait que garder la loi, ni votre âme ni la mienne n’auraient pu être sauvées, encore moins bénies, comme nous le sommes. Quel que fût celui qui aurait gardé la loi, c’eût été la justice de la loi, et non la justice de Dieu, qui n’a point la moindre connexion avec l’obéissance rendue à la loi. Il n’en est jamais parlé ainsi dans la Parole de Dieu. Parce que Christ a obéi jusqu’à la mort, Dieu a introduit une nouvelle sorte de justice — non pas la nôtre, mais la sienne, à Lui, en notre faveur. Christ est devenu malédiction pour nous sur le bois ; Dieu L’a fait « être péché pour nous, afin que nous devinssions justice de Dieu en lui ». Si la doctrine ordinaire sur ce sujet était vraie, nous pourrions nous attendre à ce qu’il fût dit : Il a obéi à la loi pour nous, afin que nous eussions une justice légale qui nous fût imputée ou transférée. Au contraire la vérité est sur tous les points en contraste avec de telles idées. Assurément l’obéissance de Christ à la loi n’est pas la même chose que le fait que Dieu L’a fait être péché. Il en est de même du passage dont on se sert si souvent : « Par l’obéissance d’un seul, plusieurs seront constitués justes ». — Comment Son obéissance est-elle ici liée avec la loi ? L’apôtre, il est vrai, introduit la loi dans le verset suivant, comme une chose nouvelle et additionnelle, qui intervient exceptionnellement.

De plus, Adam n’aurait pas compris le sens de l’expression « la loi », bien que sans aucun doute il fût sous une loi qu’il a enfreinte. Qu’est-ce qu’Adam dans son innocence aurait fait par exemple des mots : « Tu ne convoiteras point » ? Aucun sentiment pareil ne se trouvait dans les limites de son expérience. Aussi, comme nous le voyons, ce ne fut qu’après la chute de l’homme que la loi fut donnée au temps convenable, pour condamner la première manifestation du péché. Mais Christ est mort pour le péché et sous le péché — notre péché. Et quelle en est la conséquence ? Tous les croyants maintenant, soit Juifs, soit Gentils, dans le Christ Jésus, sont introduits dans une place entièrement nouvelle. Le Gentil est retiré de sa position d’éloignement à l’égard de Dieu ; le Juif, de la proximité où le mettait l’économie judaïque ; les uns et les autres jouissent d’une bénédiction commune dans la présence de Dieu, que nul n’avait jamais possédée auparavant. L’ancienne séparation disparaît et fait place, par la grâce, à l’union dans le Christ Jésus. À quel moment cela commença-t-il ? Question importante, car nous y trouverons réellement la réponse à la question : — Qu’est-ce que l’Église, d’après les Écritures ? Demandez à une foule d’enfants de Dieu. Ne diraient-ils pas : l’ensemble de tous les croyants ? Mais est-ce là le corps de Christ tel qu’il nous est montré ici ? Il y avait des saints depuis le commencement — tous ceux qui étaient nés de Dieu ; mais furent-ils réunis pour former une assemblée sur la terre ? Y avait-il dans l’Ancien Testament quelque chose qui correspondît au « seul corps » ? On n’en entendit jamais parler, sinon comme une chose promise, jusqu’au jour de la Pentecôte. Il fallait attendre la croix de Christ. En elle Dieu abolit l’inimitié. Avant cela Dieu avait commandé au Juif de demeurer séparé du Gentil ; et c’est ce que notre Seigneur maintenait bien fortement quand Il était sur la terre. Il défendit à Ses disciples d’entrer dans aucune ville des Gentils. Il dit à la femme syrophénicienne qu’Il n’était envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. Elle s’était placée sur le terrain des promesses ; mais Il lui montre qu’elle n’avait ni part ni portion dans les promesses. Si elle s’était adressée à Lui comme étant le Fils de Dieu, notre Seigneur l’aurait-Il fait attendre ? Elle en appela à Lui comme étant le Fils de David ; et en cette qualité Sa relation était avec Israël. Elle dut apprendre quelle avait été sa méprise en se plaçant sur le terrain des promesses, auxquelles elle n’avait aucun droit. Et c’est là souvent la raison pour laquelle des personnes ne jouissent pas de la paix. Elles plaident les promesses de Dieu ; mais qu’est-ce que cela, si je ne puis dire que les promesses me sont faites à moi ? Faut-il que je m’étonne si la réponse tarde ? De là vient aussi qu’il y a en général si peu de paix solide. Qu’il était bon pour la pauvre femme, qu’il est bon pour nous tous, de connaître et de confesser ce que nous sommes réellement ! Elle reconnaît qu’elle n’était en aucune façon ni un enfant, ni une brebis. « Cependant les chiens mangent ! ». Elle voit bien pourquoi elle ne pouvait obtenir ce qu’elle désirait sur le fondement erroné de privilèges qu’elle ne possédait pas. Elle est amenée à se reconnaître comme étant privée de toute promesse ; et alors il n’y a pas de limite à la bénédiction dans la grâce de Christ. « Ô femme ! ta foi est grande ; qu’il le soit fait comme tu veux ».

Les deux exemples dans lesquels le Seigneur admire la foi de ceux qui vinrent à Lui, nous présentent des Gentils — le centenier et la Syrophénicienne. Notre Seigneur ne peut nier Son amour, et ils le connaissaient. En conséquence ils insistent dans leur requête. Ce fut au milieu d’une ignorance bien grande ; mais alors, au fond, l’œil était simple, et l’objet sur lequel il se reposait, c’était Celui qui pouvait bénir au-delà de toute pensée. En conséquence la bénédiction ne pouvait être perdue, et, bien qu’elle fût retardée, elle était infinie.

Ainsi dans cette épître nous voyons le Gentil dans la condition la plus déplorable d’éloignement à l’égard de Dieu et de séparation de tout ce que Dieu avait choisi sur la terre. Mais la croix de Christ a anéanti toutes distinctions semblables. Elle a prouvé que les Juifs tant favorisés étaient, si possible, plus pervers encore que les pauvres Gentils. Ils avaient rejeté et crucifié leur propre Messie ; et s’il y en avait parmi les Juifs qui insistaient plus pour Sa mort que d’autres, c’était les sacrificateurs ; et il en est toujours ainsi. Il n’y a rien qui soit si dépourvu de cœur que la religion de ce monde ; et s’il en était ainsi alors, la chose est pire encore aujourd’hui. Qu’y a-t-il de si mauvais sous le soleil qu’un christianisme corrompu ? Il peut employer un beau langage, et contenir un grand mélange de vérité ; mais il n’y a pas de conscience purifiée, point de divines affections ; et sa fin n’en sera que d’autant plus terrible. Nous avons besoin de prendre garde à ce que nous sanctionnons dans des jours comme ceux-ci : car le temps est court. Le Seigneur a mis en lumière ce qu’est Son Église. La volonté de l’homme a ramené du tombeau de Christ la loi des commandements, et l’impose de nouveau. C’est là ce que l’on trouve dans toute la chrétienté. Il est inconcevable, à moins de réaliser la puissance de Satan, comment des chrétiens peuvent se servir des institutions spéciales de Dieu par rapport à Son peuple terrestre, malédictions et le reste, en face d’un chapitre tel que celui-ci, dans lequel nous trouvons que tout cela est mis de côté, même pour les Juifs qui croient, par l’autorité même de Dieu. C’est une dénégation pratique du sang et de la croix de Christ. Quelle preuve solennelle de l’état de ruine où se trouve l’Église de Dieu ! La vérité est bien claire en effet : « Ayant aboli dans sa chair l’inimitié, la loi des commandements, [qui consiste] en ordonnances ; afin qu’il créât les deux en lui-même pour être un seul homme nouveau, en faisant la paix ; et qu’il les réconciliât tous les deux en un corps à Dieu par la croix, ayant tué en elle l’inimitié ». C’est à cette figure d’un seul homme nouveau, que les chrétiens répondent. Vous trouverez qu’un tel état de choses ne fut jamais connu pendant les temps de l’Ancien Testament, ni même pendant la vie de notre Seigneur sur la terre. Ce ne fut qu’après l’ascension que les Juifs et les Gentils furent réunis sur la terre, et adorèrent Dieu sur le même niveau. C’est là l’Église. Ce n’est pas seulement qu’ils sont tous des croyants, mais ils sont membres de Christ et membres les uns des autres sur la terre. Sans doute, lorsque nous serons dans le ciel, ce sera toujours l’Église ; mais elle commence ici-bas, et cela avec Christ crucifié et monté au ciel. Quand Il y a ainsi pris Sa place, alors commence l’œuvre pour former le corps en union avec la Tête. Toutes les distinctions ont disparu, en tant qu’il s’agit de la sphère même de l’Église. La nature de l’Église est bien évidente d’après ces paroles : Afin « qu’il les réconciliât tous les deux en un corps à Dieu sur la croix, ayant tué en elle l’inimitié » — laquelle inimitié consistait dans les commandements de la loi, qui séparait rigoureusement et totalement l’un de l’autre.

Mais Christ « étant venu, il a annoncé la bonne nouvelle de la paix à vous qui étiez loin, et à ceux qui étaient près ». Tout est attribué à Christ, parce que tout est fondé sur la croix ; et c’est Christ, par le Saint Esprit, qui proclame maintenant cette paix céleste aux Gentils qui autrefois étaient loin, aussi bien qu’à Israël, le peuple jusqu’alors si favorisé. Lorsque cette vérité est inconnue, les hommes peuvent prêcher Christ plus ou moins ; ils peuvent discourir beaucoup d’une manière générale sur les promesses de Dieu ; mais un Juif pourrait parler des promesses ; et c’est à eux spécialement qu’il sera donné bientôt de chanter en leurs cantiques, que la miséricorde de Jéhovah « demeure à jamais » — c’est le grand thème des psaumes qui ont rapport au millénium. La position judaïque — en pratique — que prennent la plupart des chrétiens, les conduits à se servir des psaumes de David comme le grand élément de la communion chrétienne, et comme l’expression de leur propre condition devant Dieu. Il est incontestable que toute l’Écriture a été donnée par Dieu pour le profit et pour la bénédiction du chrétien. Mais dois-je offrir un taureau et un bouc, par le motif que la chose était commandée autrefois ? Imiter le Lévitique, c’est une chose ; le comprendre, c’est une chose toute différente. « Par la foi », « nous établissons la loi » ; mais nous ne sommes pas sous la loi. C’est ainsi qu’en parlant de ma marche comme chrétien, l’apôtre Paul dit que le péché n’aura pas l’empire sur moi, parce que je ne suis pas sous la loi, mais sous la grâce. Qu’il est triste de voir que ceux qu’on appelle évangéliques, comme corps, prêchent maintenant avec diligence le contraire ! Ils peuvent prêcher une certaine mesure de vérité sur d’autres choses ; mais ils ne peuvent pas prêcher l’évangile, et ils nient l’Église de Dieu. Il n’y a aucune chose pour laquelle le chrétien est sous la loi, parce qu’il est sous Christ — mort et ressuscité. Christ était une fois sous la loi ; mais alors je n’avais rien à faire avec Lui. Il est sorti de cette position à la croix ; et mon association avec Christ commence là quant à son point de départ. Je suis uni à Christ dans le ciel, et non sur la terre. Qu’y a-t-il de commun entre Christ dans le ciel et la loi ? Ainsi il est dit que nous sommes sous la grâce et non sous la loi. De plus, cette doctrine est éminemment pratique. Le niveau de la marche est abaissé d’une manière étonnante, lorsqu’il y a une erreur à cet égard ; et Satan tâche d’introduire la loi, après qu’une âme a cru, s’il n’a pu pervertir la loi afin de l’empêcher de croire.

Ici donc, c’est la bonne nouvelle de la paix qui est annoncée « à vous qui étiez loin, et à ceux qui étaient près ; car par lui nous avons, les uns et les autres, accès auprès du Père par un seul Esprit ». Par là, au lieu de la loi qui établissait une distinction entre le Juif et le Gentil, le Saint Esprit les unit sur un terrain commun, et les place dans une relation commune comme fils ayant affaire au Père. C’est là notre position. Lorsque Dieu agissait comme gouverneur, Il choisit une nation ; Il avait Ses propres serviteurs. Mais maintenant, lorsqu’Il a une famille, tout cet ordre de choses-là disparaît. Il a Ses enfants, et Il veut les avoir près de Lui. Le terme de toutes les formes judaïques, quant à des lieux saints, des jours consacrés, la sacrificature et les sacrifices, ce fut la croix de Christ. Dieu a pleinement éprouvé toute action sur les hommes par une religion qui est visible, ou par ce qui frappe la vue, ou par des sons qui agissent sur les sens. Le Saint Esprit envoyé du ciel conduit les enfants de Dieu à s’approcher du Père. Comment un chrétien peut-il reconnaître que c’est là ce que Dieu lui a donné pour le guider, et néanmoins se trouver prendre part, ne fût-ce que par sa présence, à ce qui est positivement judaïque ? Ce que Dieu a ordonné pour le Juif, et ce qu’Il enjoint au chrétien, sont des choses bien différentes. Nous ne sommes pas des Juifs, mais des chrétiens. Ce sur quoi Il insiste auprès des chrétiens, porte un coup bien plus fort à la nature, et honore beaucoup plus Christ, qu’aucune des choses qu’Il ait jamais données ou qu’Il donnera jamais à Israël. Il nous a amenés comme Sa famille près de Lui-même, et par Christ nous avons « accès auprès du Père par un seul Esprit » — nous, « les uns et les autres », Juifs et Gentils. Jusqu’à quel point le réalisons-nous en pratique ? Devons-nous sanctionner cette incrédulité qui retourne aux faibles et misérables éléments du monde ? Ou bien demeurons-nous uniquement attachés à Christ, rendant culte à Dieu dans l’Esprit ? Nous pourrons avoir à souffrir, si nous demeurons fidèles à la grâce et à la vérité ; mais bienheureux sommes-nous, s’il en est ainsi.

Il ajoute encore : « Ainsi donc vous », Gentils, « n’êtes plus étrangers, ni forains, mais concitoyens des saints, et gens de la maison de Dieu ». Ils avaient été retirés de cette condition d’éloignement, et étaient devenus partie de la maison de Dieu, « ayant été édifiés sur le fondement des apôtres et prophètes » — non pas sur celui de la loi. Quels prophètes ? Ceux du Nouveau Testament, seulement. Dieu ne se servait pas d’un ancien fondement, mais en posait un nouveau ; et ce nouveau fondement, il se commence en Christ mort et ressuscité. C’est le fondement, non pas des prophètes et des apôtres, mais « des apôtres et prophètes ». La phrase, dans le grec, signifie que ces deux classes, les apôtres et prophètes, étaient réunis dans cette œuvre commune. Ils étaient employés ensemble à poser cette base commune. Il nous est parlé (chap. 3, 5) du « mystère du Christ », « lequel n’a pas été donné à connaître aux fils des hommes dans d’autres générations comme il a été révélé maintenant par l’Esprit à ses saints apôtres et prophètes ». Ces paroles écartent toute controverse ; car elles prouvent qu’il n’est question que du temps présent. De même au chapitre 4, 11 : « Et lui, a donné les uns apôtres, les autres prophètes ». Quelques-uns des écrivains du Nouveau Testament n’étaient pas apôtres, et pourtant ils étaient tout autant inspirés. Il est donc dit de nous, que nous sommes édifiés sur ce « fondement des apôtres et prophètes, Jésus Christ lui-même étant la maîtresse pierre du coin ». Ce n’est pas seulement la prophétie ou la promesse, mais « Jésus Christ lui-même » — Sa personne. C’est ce que l’apôtre Pierre avait appris des lèvres de notre Seigneur : « Sur ce rocher je bâtirai mon assemblée », c’est-à-dire, sur la confession de Christ comme le Fils du Dieu vivant. Et de même ici, vous avez Jésus Christ comme la maîtresse pierre du coin. Mais ce n’est pas ici, comme dans Matthieu, Christ qui édifie ; mais ces apôtres et prophètes sont employés (d’une manière subordonnée sans doute), parce qu’ils étaient les instruments pour révéler l’Église. Ainsi l’Écriture limite l’Église à ce qui suivit la mort et la résurrection de Christ, et la fait dépendre du Saint Esprit envoyé du ciel pour les réunir afin de former un seul corps sur la terre. « En qui tout l’édifice, bien ajusté ensemble, croît pour [être] un temple saint dans le Seigneur ». La chose n’est pas encore complète. « En qui aussi vous êtes édifiés ensemble, pour [être] une habitation de Dieu par l’Esprit ». Dieu avait autrefois une habitation sur la terre — le temple ; et Il y habitait, non par l’Esprit, mais d’une manière visible. Maintenant, Dieu habite sur la terre d’une manière encore plus bénie, savoir par l’Esprit. Le Saint Esprit rend les saints l’habitation divine, et les unit comme un seul corps. Il habite dans l’Église, et en fait ainsi le temple de Dieu. Ce n’est pas Son habitation dans les individus que nous avons ici. Cette vérité-là est aussi bien positive et bien importante ; mais, en outre, Il habite dans l’Église : Il fait de l’Église l’habitation de Dieu. Quelle vérité ! Il est clair que ce que Dieu demande, c’est que nous marchions fidèlement dans la vérité, et selon Christ.

Chapitre 3

Nous avons ici un cas remarquable du style parenthétique de cette épître ; car tout le chapitre dans lequel nous entrons en est un exemple. Nous trouverons une parenthèse dans une autre parenthèse ; faute de le voir, on augmente les causes qui font mal comprendre cette épître ; mais une fois qu’on l’a remarqué, tout est facile ; et la propriété morale qu’il y a à décrire, en une telle forme, ce qui est en soi-même une sorte de parenthèse dans les voies de Dieu, a été, et doit être remarquée en passant. Nous pouvons chercher, par la grâce de Dieu, à apprendre et à considérer la raison de ces digressions, qui forment un épisode d’une longueur peu ordinaire. Tout le chapitre 3 trouve placé entre la doctrine de la fin du chapitre 2 et l’exhortation au commencement du chapitre 4, qui est fondée sur cette doctrine. Que veut dire cette diversion ? Le Saint Esprit s’arrête tout à coup au milieu du développement de la doctrine : où veut-Il nous conduire ? La réponse, je crois, est très claire. Il a seulement touché à ce qui a dû paraître une grande pierre d’achoppement au Juif ; savoir, la formation, par Dieu, d’un corps dans lequel il n’y a ni Juif ni Gentil. Parmi bien des chrétiens, maintenant, je suis fâché de le dire, la difficulté n’est pas même sentie, encore moins la vérité est-elle comprise. La raison est qu’ils ont saisi si peu soit la fidélité, soit les desseins de Dieu. Car c’est une épreuve réelle de la foi pour un esprit pieux, lorsqu’une partie de la vérité de Dieu semble en contredire une autre. Il ne peut y avoir aucune discorde réelle ; tout est nécessairement d’une harmonie et d’un accord parfaits. Mais nous ne pouvons pas toujours comprendre comment les différentes parties de la vérité se lient ensemble. Pendant que nous sommes ainsi ignorants, nous devrions attendre avec foi, ne doutant point, d’un côté, et n’étant pas indifférents, de l’autre.

Tâchons pour un moment, de nous mettre à la place des croyants juifs, qui héritaient des pensées, des sentiments et des préjugés des saints de l’Ancien Testament. Or si on présente clairement à de telles personnes, en y insistant, des expressions de cette nature — un corps — ni Juif ni Gentil — l’inimitié tuée — le mur mitoyen de clôture détruit — quelles vérités pour un Juif ! Qu’il semble extraordinaire que Dieu détruise ce qu’Il avait Lui-même édifié, et qu’Il avait si longtemps sanctionné ; que Dieu, qui avait formé les distinctions entre les Juifs et les Gentils, et y avait insisté, même avec menace de mort pour ceux qui les méprisaient — que Dieu Lui-même les réduise à néant et introduise ce qui est totalement différent de l’ordre ancien, et même irréconciliable avec cet ordre de choses ! Il n’est pas étonnant que toutes ces choses soient une difficulté, si on les lie ensemble comme la pensée de Dieu pour la même époque. Mais il y a une clef pour toute l’énigme : Dieu ne les a pas instituées pour le même temps. Ainsi toute la difficulté se réduit à ceci, que Dieu, qui, à une époque, établit les distinctions entre Israël et les Gentils, trouve bon à présent, pour un temps, de les abolir et d’introduire une chose entièrement nouvelle. Or la première partie du chapitre 3 est consacrée à l’explication de cette partie spéciale du mystère de Christ, par laquelle les Gentils sont introduits et placés exactement sur le même niveau que les Juifs croyants, qui maintenant ont reçu Christ, en sorte que, dans ce monde, ils ne forment qu’un seul et même corps. Mais plus un homme s’attachait à la vérité de la loi et des prophètes, plus la difficulté devenait insurmontable, parce que l’Ancien Testament ne parle jamais d’un tel état de choses. De fait, pour une personne qui ne connaissait que l’ancienne révélation hébraïque, c’était un renversement sans exemple et pour lequel elle ne devait être nullement préparée. Il y avait cette difficulté d’agir, en apparence, contre la Parole expresse de Dieu. C’est donc cela que le Saint Esprit écarte ici. Et, avant tout, remarquez la sagesse de Dieu posant un fondement admirable pour l’introduction de la nouvelle doctrine. Nous avons vu que les conseils de Dieu, de toute éternité, se concentrant sur Christ, et embrassant la pensée glorieuse d’âmes rassemblées, hors de ce monde d’où elles sont tirées, pour partager le même amour et la même gloire, dans lesquels Christ se trouve maintenant en la présence de Dieu (chap. 1). Ensuite, nous avons les moyens employés pour répondre au besoin des âmes dans leur état de ruine sur la terre : nous avons eu cela dans le chapitre 2. Et maintenant, dans le chapitre 3, nous avons une digression dans le but d’expliquer pleinement la nature de cette partie du mystère en relation spéciale avec les Gentils.

Néanmoins il faut nous garder de la notion que « le mystère » ou le secret signifie l’évangile. L’évangile en lui-même ne signifie pas, et ne peut jamais signifier un mystère. C’est ce qui, quand à ses fondements, était toujours devant l’esprit du peuple de Dieu en forme de promesse, ou d’une révélation de grâce non encore accomplie. Mais nulle part, dans l’Écriture, l’évangile n’est appelé un mystère. Ce n’était pas un mystère, qu’un Sauveur devait être donné ; c’était la toute première révélation de la grâce, après que l’homme fut devenu pécheur. La semence de la femme devait briser la tête du serpent. Un mystère est quelque chose qui n’était pas autrefois révélé, et qui ne pouvait pas être connu sans une révélation. De plus, vous avez dans les prophètes une pleine déclaration que la justice de Dieu était sur le point de venir ; la déclaration la plus claire possible que Dieu allait se manifester comme un Dieu Sauveur. Ainsi vous trouvez encore qu’Il abolira le péché, et qu’Il introduira la propitiation et la justice éternelle. Toutes ces choses n’étaient, en aucun sens, le mystère. Le mystère veut dire ce qui était caché, non pas ce qui ne pouvait être compris ; c’est là une idée humaine du mystère ; mais un secret qui n’avait point été révélé — un secret non encore dévoilé, dans l’Ancien Testament, mais pleinement révélé dans le Nouveau. Qu’est-ce donc que ce mystère ? C’est, premièrement, que le Christ, au lieu de prendre le royaume prédit par les prophètes, disparaîtrait complètement de la scène de ce monde, et que Dieu Le ferait asseoir dans le ciel à Sa droite, comme le Chef de toute gloire, céleste et terrestre, et qu’Il placerait tout l’univers entre les mains du Christ, afin qu’Il administrât le royaume et qu’Il y maintînt la gloire de Dieu le Père. C’est là la première partie, et la partie la plus essentielle du mystère ; la seconde partie, ou la portion de l’Église, n’en étant que la conséquence. La suprématie universelle du Christ n’est point le thème de l’Ancien Testament. Vous L’y voyez comme Fils de David, Fils de l’homme, Fils de Dieu — comme le Roi : mais vous ne voyez nulle part tout l’univers de Dieu (mais plutôt le royaume qui est sous tous les cieux) qui Lui est assujetti. Dans cette suprématie sur toutes choses, Christ partagera tout avec Son Épouse. Christ veut avoir Son Église associée à Sa propre domination illimitée, quand ce jour de gloire commence à briller sur le monde.

Ainsi donc, comme nous le savons, le mystère se compose de deux grandes parties, que nous trouvons résumées dans Éphésiens 5, 32 : « Ce mystère est grand ; mais moi je le dis par rapport à Christ et à l’assemblée ». Ainsi le mystère ne signifie ni Christ seul, ni l’Église seule, mais Christ et l’Église unis dans la béatitude céleste, et dans la domination sur toutes les choses que Dieu a faites. Ainsi donc, comme nous l’avons vu dans le chapitre 1, quand Christ fut ressuscité d’entre les morts, Dieu Le fit asseoir « à sa droite dans les lieux célestes, au-dessus de toute principauté, et autorité, et puissance, et domination » ; « et Il a assujetti toutes choses sous ses pieds, et L’a donné pour être chef sur toutes choses à l’Église ». Il n’est pas dit « sur l’Église » ; ce qui renverserait le mystère, bien loin de l’enseigner. Il sera chef sur Israël et sur les Gentils, mais jamais il n’est dit qu’Il règne sur l’Église. L’Église est Son corps. J’admets que c’est une figure, mais une figure qui donne l’idée d’une profonde intimité, pleine de la consolation la plus riche, et de l’espérance la plus élevée. Les saints que Dieu appelle maintenant, partageront toutes choses avec Christ dans ce jour de gloire. Ainsi cela devient une chose du plus grand intérêt, que de savoir quelle est la nature de l’Église. Quand sa vocation a-t-elle commencé ? Quel est le caractère de cette vocation ? Et quelles sont les responsabilités qui en découlent ?

L’épître aux Éphésiens est la place spéciale où se trouve la doctrine de l’Église ; et si l’Esprit de Dieu s’écarte ici de l’enchaînement de la doctrine, c’est pour nous donner une vue de ce qui était une des difficultés principales qui s’y rattachaient ; savoir, que les croyants d’entre les Gentils étaient introduits, avec les croyants d’entre les Juifs, dans l’unité du corps de Christ. Un Juif, selon ses pensées, n’aurait pas trouvé si étrange que Dieu bénît un Gentil : mais il supposerait que la bénédiction devrait être inférieure à celle d’un Juif — qu’une place plus élevée devrait être réservée pour Israël, et une place inférieure pour les Gentils. La doctrine manifestée maintenant renverse tout cela. Pour un esprit nourri des pensées de l’Ancien Testament, c’était en apparence saper la Parole expresse de Dieu. Comment une objection si naturelle et si forte pouvait-elle être écartée ? C’était une chose nouvelle en rapport avec le ciel, pendant la réjection d’Israël quant à la terre. De plus, c’est parce qu’on ne comprend pas « le mystère », et ce qu’est vraiment l’Église, que le système papiste ou opposé à l’Église, a surgi. Mais ce n’est pas tout ; les protestants aussi se sont écartés de la Parole de Dieu sur ce sujet, en conséquence de l’incrédulité par rapport à notre relation céleste avec Christ, et par suite de l’amour de ce monde — l’amour de l’honneur de ce siècle, et de la grandeur mondaine. Ils n’ont ni la foi, ni la patience, pour attendre le jour de Christ. Un chrétien est appelé à souffrir maintenant, jusqu’à être rejeté comme mauvais, en attendant d’être glorifié avec Christ, non pas seulement par Christ, mais avec Christ, d’être avec Christ Lui-même où Il est. Ceci suppose que notre place est « hors du camp », c’est-à-dire hors de toutes les formes de la religion mondaine. Le monde ne s’arroge-t-Il pas maintenant d’être l’Église de Dieu ? C’est la part de Babylone ; et quoique l’expression la plus forte de Babylone et son centre, si vous voulez, soient trouvés dans le papisme, ce système de confusion n’est pas limité à Rome. Nous faisons bien de regarder plus près de chez nous — d’examiner ce que nous faisons nous-mêmes, de voir si nous ne sommes pas entraînés dans une idée extrêmement fausse du but en vue duquel Dieu nous a sauvés. Les chrétiens en général réalisent-ils en aucune façon qu’ils sont sauvés ? Sont-ils simplement, entièrement, constamment heureux, dans la conscience d’avoir part au salut de Dieu ? Regardez les hymnes que l’on chante — pensez aux prières qui sont offertes. Ce sont les aspirations d’âmes inquiètes et troublées, qui prennent le nom de misérables pécheurs, parce qu’ils n’ont pas la conscience de posséder la bénédiction, mais seulement le désir de la posséder. Est-Il possible que l’on en vienne là, que les âmes regardent comme de l’humilité de douter de Dieu ? que c’est une partie convenable du culte de Dieu, et même une chose dont on peut se vanter, d’exprimer la misère et l’esclavage d’âmes rachetées, le jour même qui proclame que leurs péchés sont effacés et que leur paix est faite ? Où est, dans tout ceci, le repos simple et heureux de l’âme dans la connaissance de la rédemption, comme une chose accomplie, dans la connaissance que les péchés sont entièrement effacés pour le chrétien en tant qu’il s’agit du jugement de Dieu ? Assurément il reste toujours pour nous la nécessité de confesser nos péchés, et de nous juger nous-mêmes ; mais c’est tout à fait une autre sorte de jugement et de confession — la confession d’âmes qui se condamnent d’autant plus qu’ils n’ont aucun doute qu’ils soient fils de Dieu — de cœurs qui sont parfaitement en paix, et qui expriment leur bonheur dans les chants de louanges, et d’actions de grâces au Dieu qui les a sauvés pour toujours.

Sur le fondement du salut, comme une chose complète, le Saint Esprit nous amène à comprendre l’Église. Si vous ne connaissez pas la rédemption de Christ comme accomplie, et même si vous ne la connaissez pas comme une chose acceptée de Dieu pour nous, et si vous ne vous reposez pas sur cette rédemption, vous ne pouvez pas avoir une seule idée vraie de l’Église. Ceci montre la sagesse infinie de l’Esprit de Dieu en introduisant ici la doctrine de l’Église, après que la question du salut a été pleinement réglée et arrêtée. « C’est pour cela que moi, Paul, le prisonnier du Christ Jésus pour vous nations ». Il souffrait même jusqu’à être lié de chaînes à cause des Gentils. Toutes les fois qu’une personne prend vraiment sa place comme membre du corps du Christ, comment peut-elle recevoir de l’honneur dans le monde, ou y échapper à l’opprobre et à l’épreuve ? La vraie demeure de l’Église est dans le ciel ; mais sur la terre, celui qui présentait cette vérité bénie, est content d’être un prisonnier. « Si du moins vous avez entendu parler de l’administration de la grâce de Dieu qui m’a été donnée pour vous ». Ici le mot administration signifie le service à l’égard duquel il était tenu pour responsable envers Dieu. L’apôtre Paul était l’instrument choisi de Dieu pour faire connaître la nature, la vocation, le caractère et les espérances de 1’Église. Remarquez bien les voies de Dieu. Il ne voulait pas développer cela parmi les Juifs, ni le révéler par Pierre ou par Jacques. Cela leur fut révélé sans doute, mais non pas par eux. L’apôtre Paul était le seul des écrivains inspirés, par lequel Dieu le fit connaître. Ainsi donc, s’il y avait la moindre vérité dans la succession apostolique, Paul devrait être la source ou le canal par où la succession se continue, et non pas Pierre qui était expressément un apôtre de la circoncision. L’apostolat de Paul venait directement du Seigneur, et l’incirconcision en était la sphère. Il était le grand témoin de cette vérité que tout vrai ministère doit venir directement de Christ. Le Seigneur peut se servir de moyens. Il peut appeler une personne à prêcher, et il peut y avoir des personnes dont le don soit développé par le moyen de l’enseignement. Le même apôtre qui avait reçu son don du Seigneur, et qui insista là-dessus si fortement, avait l’habitude d’enseigner les autres. Il communiqua la vérité à Timothée, auquel il fut ensuite ordonné d’enseigner aux autres ce qu’il avait lui-même reçu. Le Seigneur opère par ceux qui comprennent bien la vérité, pour communiquer la vérité à ceux qui la comprennent moins. Mais encore le principe reste, que tout don vient immédiatement de Christ, et ne dérive pas de l’homme. Il y avait des charges extérieures et locales comme les « anciens » et les « serviteurs » ou « diacres », mais c’était là tout à fait une autre chose. L’ancien pouvait enseigner ou non, et il pouvait le faire formellement et publiquement, s’il était docteur ; mais sa position d’ancien était simplement une certaine charge qui était communiquée par l’autorité des apôtres, chose distincte de la question des dons. Je ne fais allusion qu’au caractère immédiat du don, proprement dit, que l’Esprit distribue dans l’Église. Il vient directement de Christ qui est en haut (Éph. 4), et non par le moyen d’un canal humain, excepté dans un exemple exceptionnel et miraculeux, comme lorsque l’apôtre imposa les mains à Timothée, et lui donna un χά ρις μα selon la prophétie.

Dans ce nouvel exposé, l’apôtre Paul dit : « Comment, par révélation, le mystère m’a été donné à connaître (ainsi que je l’ai déjà écrit en peu de mots ; d’où vous pouvez comprendre en le lisant, quelle est mon intelligence dans le mystère du Christ) ». Il y avait touché dans le chapitre 2, mais maintenant il entre plus pleinement dans le sujet. « Lequel n’a pas été donné à connaître aux fils des hommes dans d’autres générations ». Ici vous avez une déclaration positive que le secret était quelque chose qui n’avait pas été révélé dans d’autres générations — non pas, qu’il était obscurément donné à entendre, ou mal compris, mais il n’avait pas été révélé du tout. C’était un secret à l’égard duquel le silence avait été gardé, comme l’apôtre nous le fait connaître dans Romains 16. « Or à celui qui est puissant pour vous affermir selon mon évangile et la prédication de Jésus-Christ, selon [la] révélation du mystère à l’égard duquel le silence a été gardé dès les temps éternels, mais qui a été manifesté maintenant ». C’était maintenant seulement qu’il était dévoilé. Ce n’était pas que la chose avait été prédite par les prophètes, et que maintenant seulement elle était saisie par la foi. En réalité, il était maintenant manifesté, maintenant publié et enseigné ; il ne l’avait jamais été auparavant. « Mais qui a été manifesté maintenant ; et qui, par des écrits prophétiques, a été donné à connaître à toutes les nations, selon le commandement du Dieu éternel pour (l’)obéissance de (la) foi ». Il n’y a aucun doute que les « écrits prophétiques », auquel il est fait allusion ici, soient les Écritures du Nouveau Testament. C’est à proprement parler « des écrits prophétiques » sans allusion aucune aux prophètes de l’Ancien Testament ; et pour cette raison : « Maintenant a été manifesté et par des écrits prophétiques… a été donné à connaître à toutes les nations ». Si la signification avait été, les prophètes de l’Ancien Testament, qu’est-ce qui aurait pu être plus extraordinaire qu’une telle expression ? Il aurait pu dire que cela avait été révélé aux prophètes, mais maintenant la chose est comprise. Mais il dit : Qui a été « manifesté » maintenant. « Lequel n’a pas été donné à connaître aux fils des hommes dans d’autres générations, comme il a été révélé maintenant par l’Esprit à ses saints apôtres et prophètes ». Il y avait des hommes inspirés qui n’étaient pas apôtres, mais qui étaient prophètes. Cela était maintenant révélé à ces deux classes de personnes ; mais nous ne pouvons pas dire que les mots : « des écrits prophétiques », dans Romains 16, s’étendent au-delà des écrits de Paul, qui dévoilent ce précieux secret de Dieu. Le développement de l’Église eut lieu lorsque le Saint Esprit fut donné d’une manière nouvelle. « L’Esprit Saint n’était pas encore, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié ». Le Saint Esprit avait opéré auparavant, mais Il allait être répandu personnellement ; et cela s’identifie avec la vocation de 1’Église. À la Pentecôte, pour la première fois, nous avons une assemblée qui est appelée l’Église de Dieu. « Le Seigneur ajoutait tous les jours à l’assemblée ceux qui devaient être sauvés ». Ici nous trouvons ce qui est appelé l’Église ou l’Assemblée : un corps dans lequel Dieu s’est proposé d’avoir et Juif et Gentil sans distinction ; or un tel état de choses n’exista jamais avant le jour de la Pentecôte. Et maintenant nous avons et Juifs et Gentils introduits dans ce nouvel ordre de choses, nouveau pour tous les deux — un ordre auquel les précédentes révélations de Dieu ne s’appliquaient plus comme une description directe de leurs privilèges.

Et ici, permettez-moi de vous avertir, afin que vous vous gardiez d’interpréter les Écritures comme si tout ce que Dieu y dit, était dit de vous, de moi, ou de l’Église. L’Église est comparativement une chose nouvelle sur la terre ; c’est un sujet propre au Nouveau Testament exclusivement. Si je disais que les saints étaient une chose nouvelle, ce serait faux ; mais si vous dites que l’Église embrasse les saints de l’Ancien Testament, vous négligez la Parole de Dieu et vous vous y opposez : car elle limite l’Église de Dieu à ce qui commença par Christ assis à la droite de Dieu, et par le Saint Esprit envoyé du ciel, pour baptiser tous ceux qui maintenant croient pour être un seul corps. Que signifie « l’Église » ? L’assemblée des âmes rassemblées par la connaissance de Christ mort et ressuscité, et qui par le Saint Esprit sont unies à Christ en Sa qualité d’homme glorifié à la droite de Dieu. Un tel état de choses n’existait point avant la Pentecôte. Il n’y avait pas de rédemption accomplie avant la croix. Christ demeure seul, comme Fils de Dieu de toute éternité — une personne divine, égale au Père. Mais Il devint homme afin de mourir pour les hommes sur la croix ; et étant ressuscité d’entre les morts, Il prend Sa nouvelle place, comme Chef pour l’Église, qui est Son corps, comme l’Époux de l’Épouse. L’expiation a été accomplie, et le péché a été ôté par le sacrifice de Lui-même ; et il ne pouvait y avoir une telle chose, que de devenir membre du corps de Christ, jusqu’à ce que cela fût accompli. L’Église est fondée sur la rémission des péchés par le sang de Christ déjà répandu, et elle se compose de ceux qui sont unis à Christ pour partager toute Sa gloire, excepté celle qui est essentiellement et éternellement la sienne, en Sa qualité de Fils unique du Père.

Alors vient cette partie spéciale du mystère : « Que les nations seraient cohéritières, et d’un même corps, et coparticipantes de sa promesse dans le Christ par l’évangile ». Les promesses de Dieu à Abraham, et cette promesse de Dieu dans le Christ, sont deux choses non seulement différentes, mais même mises en contraste. Car si je considère la promesse à Abraham dans Genèse 12 : « Je te ferai devenir une grande nation », est-ce là l’attente de l’Église ? Quand les chrétiens deviennent grands sur la terre, c’est lorsqu’ils ont quitté leur propre place de bénédiction en communion avec Christ ; mais lorsqu’Israël sera fait une grande nation, dans la vraie signification du mot, ils seront bénis, et ils deviendront une bénédiction, comme ils ne l’ont jamais été auparavant. La promesse fut donnée à Abraham, et sera accomplie dans sa semence sur la terre bientôt. « Je te ferai devenir une grande nation… et toutes les familles de la terre seront bénies en toi ». Ici il est laissé de la place pour que la bénédiction parvienne jusqu’aux nations ; mais remarquez-le bien, elles doivent être bénies en Abraham, et ensuite en sa semence. En Genèse 22, la promesse est renouvelée à Isaac ; et c’est à cela qu’il est fait allusion dans l’épître aux Hébreux. « J’ai juré par moi-même, dit l’Éternel… certainement je te bénirai, et je multiplierai très abondamment ta postérité comme les étoiles des cieux et comme le sable qui est sur le bord de la mer : et ta postérité possédera la porte de ses ennemis ». Est-ce là ce que nous attendons ? Je crois que non. Nous désirons être dans le ciel avec Christ, et nous y serons par le moyen de Son amour, et par la faveur de notre Dieu. Mais Israël doit posséder la porte de ses ennemis, et être élevé au-dessus de tous les peuples de la terre. Dans les Psaumes nous trouvons une sorte de commentaire sur cette attente des hommes pieux en Israël. Ainsi dans le psaume 67 nous avons la prière : « Que Dieu ait pitié de nous, et nous bénisse, et qu’Il fasse luire sa face sur nous ! Sélah. Afin que ta voie soit connue en la terre, et ta délivrance parmi toutes les nations ». La chose préliminaire de la bénédiction pour les autres nations, c’est la réponse au cri d’Israël : « Que Dieu ait pitié de nous, et nous bénisse ». Toute espérance pour le monde, comme monde, dépend de la bénédiction des Juifs.

Il n’en est pas ainsi quant à l’Église, que Dieu appelle maintenant. Sa bénédiction ne repose point sur les promesses ou sur la bénédiction d’aucun peuple. Dès lors ces psaumes ne la concernent point ; et pourtant il y a des personnes qui persistent à les détourner de leur vrai sens, pour les appliquer aux circonstances présentes. Il n’est pas étonnant qu’elles s’embrouillent. La faute est en ceci, qu’elles pervertissent la Parole de Dieu. « Les peuples te célébreront, ô Dieu ! tous les peuples te célébreront ». Maintenant la chose s’étend aussi aux autres peuples. « Les peuples se réjouiront et chanteront de joie ; parce que tu jugeras les peuples en équité, et que tu conduiras les nations sur la terre ». Quand ce jour-là poindra, au lieu de soupirer et d’être en travail, ce qui dure encore, « la terre produira son fruit ; Dieu, notre Dieu, nous bénira ». De telles choses sont bien loin d’avoir lieu maintenant. C’est l’état millénial qu’on attend ici, quand la puissance de Dieu sera exercée triomphalement, et que Dieu reconnaîtra Son peuple d’Israël, et que les autres nations seront bénies en eux. Maintenant les nations sont « cohéritières et du même corps ». Avec qui sont-elles cohéritières ? Avec Christ, et avec tous ceux qui sont en Christ. Soit Juifs, soit Gentils, ils sont cohéritiers. La grâce les a mis sur un terrain commun. Ce n’est pas maintenant que les Juifs sont élevés au faîte de la bénédiction terrestre. Au contraire, comme nation, il sont dispersés, et Dieu les juge, n’usant pas de miséricorde envers eux ; il y a une oblitération complète des vieilles limites. Et voici pourquoi : les Juifs étaient réellement les conducteurs dans l’inimitié du monde contre Christ, et dans la crucifixion de leur propre Messie. La croix de Christ mit fin aux distinctions entre Juif et Gentil ; et sur le fondement de cette croix, Dieu édifie l’Église. Les plus vils pécheurs sur la face de la terre, soit Juifs, soit Gentils, Dieu les prend et les tirant hors de leur condition de péché, et d’éloignement de Dieu, Il les met sur un niveau commun et céleste, comme membres du corps de Christ. C’est ce que Dieu fait maintenant, et il est d’une importance immense qu’on le comprenne, afin de jouir de la communion avec Ses voies. Outre cela, toute la Bible devient pratiquement un livre nouveau, et encore plus précieux, lorsque cela est compris. La vérité ne peut admettre aucun compromis, quelque convenable qu’il soit que nous cherchions à être patients ; la pensée révélée de Dieu exclut nécessairement l’idée qu’on puisse suivre son jugement propre et particulier. Ni vous, ni moi, nous n’avons droit à une opinion sur des matières de foi — Dieu seul a le droit de parler à l’égard de ces choses ; et Il en a parlé si clairement, que c’est notre péché si nous ne L’écoutons pas. Mais vous ne pouvez pas séparer la vérité d’avec les affections spirituelles. Dés lors si on ne maintient pas en pratique la vérité de l’Église, on la perd et on s’aigrit contre elle. La pensée de Dieu à l’égard de l’Église, attire toujours l’inimitié du monde sur celui qui la connaît, et spécialement l’inimitié des chrétiens qui ne la comprennent pas. — Il en était ainsi de Paul, d’une manière prééminente, et depuis ce temps-là, c’est toujours la même histoire, lorsque les âmes ont saisi son témoignage : et il faut qu’il en soit ainsi. La doctrine que tenait Paul, si elle est enseignée par l’Esprit de Dieu, ne peut jamais admettre de parti, parce que son centre même, c’est Christ dans le ciel.

L’apôtre poursuit son exposé ; et voici la phase particulière du mystère qu’il dévoile ici : « Que les nations seraient cohéritières et d’un même corps, et coparticipantes de sa promesse dans le Christ par l’évangile ; duquel je suis devenu serviteur, selon le don de la grâce de Dieu, qui m’a été donné selon l’opération de sa puissance ». Quel est l’effet de cette vérité ? L’effet le plus humiliant possible. « Cette grâce m’a été donnée, à moi qui suis moins que le moindre de tous les saints, d’annoncer parmi les nations les richesses insondables du Christ ». Cela fait ressortir la valeur de Christ, comme rien autre ne le fait. Il ajoute encore : « Et de mettre en lumière devant tous, quelle est l’administration » (non pas « la communication ») « du mystère ». Il montre ainsi qu’outre l’aspect du mystère en ce qui regarde les saints, il a aussi son application à tous les hommes, sans distinction — à ceux qui sont en dehors de l’Église. Les personnes qui prêchent l’évangile, nécessairement prêchent Christ : mais il y en a peu qui comprennent le caractère de la grâce qui unit l’âme à Christ dans la relation de membre de Son corps, de Sa chair et de Ses os. C’était là une partie principale de l’œuvre de Paul ; et c’est pourquoi il ajoute : « L’administration du mystère, qui était caché dès les siècles en Dieu, qui a créé toutes choses ». Remarquez-le bien ; il n’est pas dit, caché dans les Écritures, mais, « caché en Dieu ». « Afin que la sagesse de Dieu, si diversifiée dans ses formes, soit maintenant donnée à connaître aux principautés et aux autorités, dans les lieux célestes, par l’assemblée ».

Considérons quelle place merveilleuse est celle-ci ; savoir, que Dieu fait maintenant connaître aux anges en haut, une nouvelle sorte de sagesse, par Ses voies envers nous ; et quand je dis : nous, j’entends tous les saints de Dieu maintenant sur la terre. Car, de quelque nom qu’il soit appelé, tout saint de Dieu est un membre du corps de Christ : tous appartiennent réellement et également à l’Église de Dieu. On ne peut qu’être affligé en voyant que si peu de gens comprennent ce qu’est l’Église de Dieu, ou même se soucient de le savoir, ou d’agir d’après cette connaissance. Nous devrions connaître ce que Dieu veut, et comment Il veut que Son Église marche. Christ est également possédé par tous : mais tous ne comprennent pas également quelle est la volonté de Dieu à l’égard de Son Église ; comment Il veut que nous L’adorions, et que nous agissions ensemble d’après Sa Parole ; comment Il veut que nous nous aidions l’un l’autre à manifester pratiquement cette vérité glorieuse, que Dieu donne à connaître par l’Église « la sagesse de Dieu si diversifiée dans ses formes ». Est-ce que nous marchons d’une manière si conforme à la volonté de Dieu pour Son Église, que Dieu puisse nous signaler comme une leçon aux anges de Dieu ? C’est là (rien au-dessous de cela) l’intention de Dieu. Vous ne pouvez pas assurément vous dégager de la responsabilité qui y est attachée, en vous refusant à agir selon cette intention ! Ce n’est pas bientôt, quand nous serons arrivés au ciel, que Dieu fera connaître par l’Église, Sa sagesse si diversifiée dans ses formes, aux armées célestes ; mais maintenant sur la terre, pendant que les membres de l’Église sont appelés. « Afin que la sagesse de Dieu, si diversifiée dans ses formes, soit maintenant donnée à connaître aux principautés et aux autorités, dans les lieux célestes, par l’assemblée ». Est-ce que cela ne produit pas de sérieuses considérations ? Il n’est pas question de ce que les hommes pensent de nous, ou si nous sommes aimés ou non ici-bas. Je suis bien sûr que si nous marchons selon Christ, nous ne pouvons être autrement que haïs par le monde : et cela montre que nous estimons le monde, si nous voulons qu’il en soit autrement. C’est une chose des plus pénibles, que de sentir qu’il doit en être ainsi ; mais, si je crois Christ, il faut que je croie cela, et je dois me réjouir d’être estimé digne de souffrir au moindre degré. Mais en outre, l’Église est appelée à être comme un livre d’enseignement pour les anges de Dieu. Lorsque nous considérons que Dieu a l’œil sur nous avec les anges qui L’entourent ; qu’Il est occupé avec des objets tels que nous sommes ; qu’Il avait en eux les objets les plus chers de Ses affections ; qu’Il leur a donné Christ pour être leur vie ; et qu’Il a envoyé le Saint Esprit, cette personne bénie de la Trinité, pour faire Sa demeure en eux, et les former pour être Son temple, pendant qu’ils sont dans ce monde, quelle vocation que celle-là ! Si un ange veut savoir où est Son grand amour, il faut qu’il regarde en bas, dans ce monde, et qu’il voie les choses ainsi. Vous ne pouvez pas séparer Christ de l’Église. Mais la chose merveilleuse, c’est que, devant les anges de Dieu, le conflit étonnant continue — Satan et toutes ses armées tâchent de les détourner, en les mettant sur un faux terrain, en prêchant la justice sous mille formes, afin de les détourner de la grâce et de la croix de Christ. D’un autre côté, vous avez Dieu qui opère par Sa Parole et par l’Esprit pour produire dans Son peuple la conscience de leurs privilèges. Mais que les enfants de Dieu soient fidèles ou non, l’amour parfait repose sur eux et agit envers eux (peut-être en discipline) ; Dieu est occupé d’eux ; Il a soin d’eux ; et Il a toujours dans Sa pensée, qu’Il veut les avoir parfaitement semblables à Christ. Rien ne peut jeter un nuage là-dessus. La faiblesse peut pour un temps déshonorer le Seigneur, et détruire notre propre consolation, et aider à l’illusion du monde. Tout cela peut être ; mais quant au dessein de Dieu, il demeurera ferme : ce que Dieu a dit, doit nécessairement être accompli. Notre faiblesse peut être manifestée, mais Dieu, dans Son puissant amour, accomplira Son dessein. Et c’est par ce moyen qu’Il fait connaître aux principautés et aux autorités, dans les lieux célestes, une nouvelle sorte de sagesse, qui n’avait jamais été vue dans ce monde auparavant. On avait vu les voies de Dieu dans la création, et au temps du déluge, et en Israël. Mais voici quelque chose à quoi même les Écritures données de Dieu n’avaient fait aucune allusion, une chose qui n’avait pas été promise à l’homme — une chose entièrement cachée entre le Père et le Fils.

Maintenant elle est dévoilée. Le Saint Esprit est la personne qui dévoile cette vérité glorieuse de l’Église de Dieu, et qui la réalise. Jusqu’à quel point nos âmes y sont-elles entrées ? Jusqu’à quel point nous contentons-nous de faire de vagues conjectures à ce sujet, pensant que ce n’est pas d’une grande importance ? Une ignorance volontaire de cette vérité procède d’un amour secret pour le monde. Il y a ce sentiment dans celui qui la laisse de côté, que vous ne pouvez pas l’accepter dans le cœur et marcher avec le monde. Il vous faut rompre tout à fait avec tout ce que la chair estime sous le soleil. Vous avez une place au-dessus du soleil avec Christ, et la conséquence en est que vous êtes appelés à vous soumettre à la sentence de mort qui frappe toutes choses ici-bas, à glorifier 1e nom de Christ, à vous réjouir en Lui, quelle que soit la volonté de Dieu à notre égard. Car nulle circonstance ne peut nous soustraire à la responsabilité d’être les témoins d’une gloire qui est au-dessus de ce monde. Le monde devrait voir dans l’Église le reflet de Christ. Vous pouvez trouver un moine ou une religieuse qui soit moralement convenable, mais tout cela peut n’être que la nature, et non Christ. Je ne dis pas que Christ ne puisse s’y trouver également, dans des cas isolés, en dépit d’un système excessivement pernicieux. Cependant pour la foi, il s’agit de faire la volonté de Dieu et de glorifier Christ dans le lieu où l’opprobre abonde sur la terre. Dieu attend de nous la confession du nom de Son Fils, aux dépens de tout ce qui nous est cher. Si le monde n’y fait pas attention, est-ce en vain pour les principautés et les autorités dans les lieux célestes ?

Sur un ou deux des derniers versets de la portion que nous avons maintenant devant nous, je n’ai pas fait de remarque. Nous dirons donc maintenant quelques mots sur les versets 12 et 13. L’apôtre ayant fait allusion à Christ, comme Celui dans lequel (élevé en haut) le propos arrêté de Dieu a maintenant été révélé par l’Esprit, ajoute, que dans cette même personne « nous avons hardiesse et accès en confiance, par la foi en lui. C’est pourquoi je vous prie de ne pas perdre courage à cause de mes afflictions pour vous, ce qui est votre gloire ». Or, il est très doux de trouver comment, même dans un sujet aussi vaste que celui qui occupait son cœur, et sur lequel il désirait insister auprès des saints, il peut lier avec les conseils de Dieu les plus élevés et les plus profonds, la plus simple des vérités fondamentales sur laquelle le croyant se repose. Cela est très instructif : parce que, pendant que, d’un côté, nous avons déjà vu que c’est tout à fait en vain que l’on cherche à entrer dans la nature de l’Église si on n’a pas une conception simple, claire et entière, de la paix que Christ a faite, et qu’Il est pour nous dans la puissance de Dieu ; d’un autre côté, lorsque nous saisissons en quelque mesure le caractère de l’Église, lorsque nous voyons les privilèges étonnants qui sont à nous, comme étant faits un avec Christ, nous regardons avec une jouissance plus profonde les premiers éléments, et nous réalisons la stabilité étonnante des fondements sur lesquels nous avons le privilège d’être établis. Ainsi nous voyons que Dieu veut prendre garde que la paix de la conscience, et celle du cœur aussi, soit maintenue — il n’y a rien qui soit donné seulement pour remplir notre esprit d’admiration. Je ne dis pas qu’il n’y a pas un sujet perpétuel d’admiration, ou qu’il n’y a pas une infinité de choses à apprendre ; mais chaque pas que nous faisons, et même les plus grands progrès dans la connaissance des voies de Dieu en Christ, est intimement lié avec la confiance de nos âmes dans Son amour. Ainsi, tandis que nous ne pouvons pas saisir comme il faut la nature de l’Église, jusqu’à ce que nous ayons connu la simple paix avec Dieu, une fois que nous y entrons, cette paix brille d’autant plus dans la lumière céleste des privilèges dans lesquels le Saint Esprit a conduit nos âmes. Nous revenons avec une intelligence renouvelée et une jouissance plus profonde de la grâce illimitée qui est à nous en Christ. C’est pourquoi après nous avoir introduits dans cette merveilleuse sphère de l’amour et des desseins de Dieu, il jette un coup d’œil sur certaines conséquences pratiques en nous. « En qui », dit-il, « nous avons hardiesse et accès en confiance, par la foi en Lui ». Ce n’est pas seulement la paix, mais « nous avons hardiesse », ce qui a rapport plus particulièrement à notre langage, lorsque nous nous adressons à Dieu ; pouvant, en quelque sorte, Lui dire tout, à cause de notre confiance en Son amour. Et « accès en confiance », ce qui n’est pas seulement ce que nous exprimons, mais nous nous approchons de Lui, même lorsqu’il n’y a aucune expression du cœur sous la forme d’une prière formelle ; mais il y a une jouissance de notre proximité, « accès en confiance par la foi en Lui ». « C’est pourquoi je vous prie de ne pas perdre courage à cause de mes afflictions pour vous, ce qui est votre gloire ». Voici un autre fruit pratique de cette vérité bénie. Nous avons vu auparavant comment il introduit le développement de l’Église, en même temps que le fait qu’il était prisonnier de Jésus Christ. Au moment même où il était sous la main de la puissance de ce monde, et avec la possibilité de la mort devant lui, le Seigneur trouve bon de dévoiler, par le moyen de l’apôtre, la glorieuse vocation de l’Église. Et il le leur rappelle encore une fois. Ils avaient pu être découragés par ses afflictions ; il dit, au contraire, vous ne devez pas perdre courage ; la tribulation doit plutôt être ce qui exercera et fortifiera votre foi. Dans 2 Corinthiens 1, l’apôtre parle d’être « chargés excessivement, au-delà de [notre] force, de sorte que nous avons désespéré même de vivre ». Mais lorsque les Corinthiens avaient besoin de consolation, il l’avait reçue de Dieu, et pouvait la leur communiquer. — Maintenant il était sous la puissance du monde et en prison, et là Dieu dévoile la gloire de l’Église. Ils seraient, sans doute, appelés à souffrir aussi ; et ils auraient à apprendre ce qu’était la tribulation. De sorte que l’apôtre, dans la plénitude de sa propre jouissance de la vérité, laquelle le rendait capable de se réjouir même dans ses afflictions, les exhorte à ne pas perdre courage. L’Esprit de Dieu a uni si complètement les saints, non seulement avec Christ, mais aussi les uns avec les autres, que ce que Paul souffrait, était leur gloire, et non la sienne seulement. Ils y avaient un intérêt commun, comme étant membres du même corps.

« C’est pour cela que je fléchis mes genoux devant le Père de notre Seigneur Jésus Christ, duquel toute famille dans les cieux et sur la terre est nommée ; afin que, selon les richesses de Sa gloire, Il vous donne d’être fortifiés en puissance par Son Esprit dans l’homme intérieur » (v. 14-16). Ici nous sommes sur un terrain sensiblement différent, et je puis dire, un terrain plus élevé que celui du chapitre 1. C’est une des deux grandes relations dans lesquelles Dieu est placé envers Christ, et par conséquent envers nous. Car Dieu agit maintenant envers Christ, non seulement en vue de Sa personne, mais aussi en vue de Son œuvre. La conséquence en est que l’œuvre nous met efficacement, devant Dieu, dans la place qui appartient à Christ comme homme ; oui, à Christ comme homme ressuscité d’entre les morts et glorifié dans le ciel. Je me garde soigneusement de dire que nous sommes tout ce que Christ est, car cela ne serait pas vrai. Nous ne pouvons pas partager ce qui Lui appartient comme le Fils du Père, de toute éternité. Ce serait impossible ; la conception même d’une telle chose serait irrévérente. Nulle créature ne peut dépasser les bornes qui la séparent de Dieu ; et une créature renouvelée ne le désirerait même pas. Car en vérité, c’est la joie de la créature la plus élevée de rendre l’hommage le plus humble à Celui qui est au-dessus d’elle. C’est pourquoi je ne doute point que, dans le ciel, parmi les anges de Dieu, le plus élevé est celui qui montre la révérence la plus profonde. De même, dans les choses terrestres, c’est clairement le devoir de chacun de porter du respect au souverain ; mais celui qui a la place la plus rapprochée du souverain, a la plus fréquente occasion et la plus forte obligation de montrer ce que le souverain est à ses yeux. Il en est ainsi de nous maintenant dans les choses spirituelles.

Dans cette portion donc, nous avons le second des deux grands titres de Dieu en relation avec Christ et avec nous. Ce n’est pas ici, comme dans le chapitre 1, « le Dieu », mais « le Père de notre Seigneur Jésus Christ ». Le Dieu de Christ présente davantage Christ comme l’homme glorieux, comme Il l’est, l’homme glorifié dans la présence de Dieu, le centre de tous les conseils de la puissance de Dieu, qui est dès maintenant élevé à la place la plus haute dans le ciel, et toutes choses sont assujetties sous Ses pieds — mais il est clair que Christ a ce qu’Il estime plus que tout ce qui est assujetti à Sa domination — l’amour de Son Père, et la satisfaction de Son Père en Lui. Nos cœurs mêmes sont capables de comprendre cela, et d’en jouir dans le Saint Esprit. Et même le temps arrive dans l’histoire de la plupart des hommes, même lorsque le monde les a regardés comme arrivés à un haut degré de grandeur et de bonheur, qu’ils trouvent un vide que rien ne peut satisfaire. Mais dans le cas de Christ, la gloire ne sera pas la plante prête à se faner que la main de l’homme l’a rendue. Nous savons que dans Ses mains elle sera également éclatante et sainte, parce que Dieu en sera entièrement l’objet ; et tout contribuera conséquemment à Sa louange ; comme il est dit, que tout genou se ploie… « et que toute langue confesse que Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père ». Mais alors aucune possession de l’univers, aucune expression du mal, ni jugements justes, ni le gouvernement béni de toute la création pour la gloire de Dieu, ne pourraient jamais satisfaire le cœur. Il y aura le sel de l’alliance éternelle de Dieu : le maintien continuel de la volonté et de la gloire de Dieu sera senti. Mais il y a quelque chose de plus doux que toute la puissance, quelque glorieuse qu’elle soit, et de quelque manière qu’elle soit administrée ; et c’est ce que nous avons ici. C’est l’amour du Père qui est au-dessus de tout. L’effet de la première prière est, que vous abaissez vos regards sur la scène immense qui est assujettie à Christ ; et Dieu veut que vous le fassiez. Mais l’effet de la seconde est plutôt que vous regardiez en haut, dans la jouissance de l’amour qui est le secret de la gloire ; la gloire étant l’effet et le fruit de l’amour, et ce qui prouve ce que l’amour a dû être pour avoir donné une telle gloire. Mais quelque bénie que soit la gloire, l’amour qui donne la gloire est encore meilleur et plus profond. C’est ainsi, quand notre Seigneur (dans Jean 17) prie pour les saints, quand Il dit : « La gloire que tu m’as donnée, je la leur ai donnée », quel est Son but ? « Afin… que le monde connaisse que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé ». C’est là le but de Sa demande. Tous sont consommés en un dans cette gloire ; mais le but de cette manifestation de gloire c’est afin que le monde connaisse combien le Père les a aimés. Ainsi la gloire qui est vue, quelque bénie qu’elle doive être, n’est pas ce qui couronne tout. L’amour existait avant qu’il y eût de la gloire. Et quoique je ne voudrais pas affirmer que l’amour existera après qu’il y aura eu gloire, néanmoins je dis que, ce qui produit, donne, et maintient la gloire, est meilleur que la gloire elle-même. De plus, il n’y a rien dans les pensées de Dieu de plus étonnant que ceci, que Dieu puisse aimer de telles créatures, que nous soyons aimés du même amour dont Il aime Son Fils. Et c’est en effet ainsi qu’Il nous aime ; je le sais pour moi-même, et je déshonore Sa Parole si je ne le sais pas. S’Il le dit, n’est-ce pas pour que je le croie, que je le reçoive dans mon cœur, et que j’en jouisse maintenant dans ce monde ? — pour que je m’en serve comme de mon bouclier constant contre tout ce que la chair, le monde et Satan peuvent insinuer contre moi ? Il nous aime comme Il L’a aimé. Ne dites pas que c’est là une pensée trop élevé. Je ne connais rien de si humiliant — rien qui nous convainque si fortement que nous ne sommes rien — que ce fait, qu’étant tellement aimés, nous le sentions si peu ; qu’étant tellement aimés, notre retour soit si faible ; qu’étant tellement aimés, nous cédions aux soucis, aux vanités, aux pensées, aux occupations, en un mot, à une chose quelconque, qui n’est pas selon un tel amour. C’est la satisfaction, et, si nous pouvons ainsi dire, le désir de Dieu, que ceux qui sont à Lui, entrent dans la grandeur de Son amour ; car nulle gloire, ni aucun sentiment de cette gloire, ni confiance en elle, ni l’attente de cette gloire, ne devrait même suffire pour des cœurs comme les nôtres. C’est une chose étonnante, de penser que nous devons partager la gloire de Christ ; mais il est encore plus étonnant que nous ayons le même amour. Le même Dieu qui nous donne la gloire de Christ, veut que nos âmes entrent même maintenant, par le Saint Esprit, dans la communion du même amour — et telle est la grande pensée centrale de cette prière. « C’est pour cela que je fléchis mes genoux devant le Père de notre Seigneur Jésus Christ ».

L’expression le Père de Christ indique cette relation qui manifeste l’amour, précisément comme le royaume de Christ se lie avec Sa gloire conférée ou humaine. Dans un cas, c’est ce qu’Il va faire pour nous. Si nous considérons ce que Dieu fit pour Adam, quel était Son dessein à l’égard de l’homme, que ne fera-t-Il pas pour le dernier Adam, savoir Christ ? Et tout ce qu’Il fait pour Lui, comme étant cet homme béni et glorieux, Il veut nous le faire partager. Mais plus que cela. L’amour que le Père de notre Seigneur Jésus Christ Lui porte, Il nous le porte aussi. Nous savons comment Il l’exprima lorsque Son Fils était ici-bas — dans quels moments frappants Il manifesta Son amour — combien Il prenait soin que l’homme ne pût s’imaginer qu’Il était indifférent à l’égard de Son Fils bien-aimé. Que la souffrance soit permise, ce n’est point une preuve qu’Il n’aime pas, mais c’est plutôt le contraire : cela prouve non seulement combien Il se fie à notre amour, mais combien aussi Il veut que nous nous fiions au sien, ayant cette confiance en Lui, que, en dépit de toutes les apparences, Il nous aime comme Il aime Son Fils. Nous pouvons être exposés à tout ce que Satan peut déployer contre nous ; mais nous sommes seulement dans la même scène que le Fils de Son amour a traversée avant nous. Mais quand les hommes auraient pu penser, à cause de ceci ou de cela, que Jésus n’était pas plus qu’aucun autre homme, voyez comment Dieu Le justifie. Ainsi, ce n’était pas seulement que Jean le baptiseur cherchait à empêcher le Seigneur Jésus d’être baptisé, comme s’il avait quelque chose à confesser — car ce baptême-là était une confession de péchés ; et pour cette raison même, Jean montrait son étonnement qu’il pût y avoir même l’apparence d’une confession de la part d’un être tel que Jésus. Mais Dieu avait des pensées plus profondes, et Il permet qu’il y ait ce que l’incrédulité peut tordre jusqu’à y trouver l’insinuation du mal, mais ce que la foi saisit, et ce qui nous fait adorer encore plus et Dieu et l’Agneau. Ce fut ainsi que le Père, lorsque Son Fils bien-aimé sortit du Jourdain où tous les autres confessaient leur iniquité — où Il accomplissait toute justice — où Lui, qui n’avait aucune iniquité à confesser, ne voulait pas être séparé de ceux qui faisaient ce qui était en rapport avec leur iniquité, qui reconnaissaient le Dieu dont les droits avaient été oubliés — lorsque, sympathisant avec le sentiment de sainteté qui les y conduisait, Il voulait y être avec eux ; ce fut alors que le Père déclara : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir ». C’était justement au moment convenable, et avec la sagesse la plus parfaite ; mais avec quel amour le Père prononça ces mots !… Celui qui Le servit comme Il n’avait jamais été servi auparavant — Celui qui Le glorifia comme Dieu n’avait jamais été glorifié sur cette terre — Celui qui acheva l’œuvre que Dieu Lui avait donnée à faire… était-il probable que Dieu manifestât quelque chose qui supposât qu’Il détournait en aucune façon Son cœur de Lui ? Mais pourtant, nous savons qu’au moment même où Il en avait le plus besoin, quand tout le reste était contre Lui, alors, pour couronner tout, Dieu L’abandonna. Si le péché devait être jugé, châtié pour toujours, il fallait qu’il fût jugé dans toute sa réalité. Il fallait qu’il n’y eût rien qui tendît à empêcher ou atténuer la colère de Dieu à l’égard du péché. Tout le jugement de Dieu tomba sur Lui. L’œuvre était accomplie ; le péché avait été ôté par le sacrifice de Lui-même.

Et maintenant, tout l’amour que le Père avait pour ce Sauveur béni, peut découler jusqu’à nous, à cause de cette œuvre. C’est là que l’apôtre nous place, introduits dans la position de fils avec le Père : et il fléchit les genoux devant « le Père de notre Seigneur Jésus Christ, duquel toute famille dans les cieux et sur la terre est nommée ». L’expression « toute famille », est souvent changée en « toute la famille », et mêlée avec les notions de bien des personnes à l’égard de l’Église, comme si une partie était regardée comme étant dans les cieux, et une partie sur la terre. Mais la vraie force est « toute famille ». Il n’y a pas d’allusion ici à l’unité de l’Église. Au contraire, il veut dire que, quand nous regardons au Père de notre Seigneur Jésus Christ, nous nous élevons assez haut pour embrasser toutes les classes des créatures que Dieu a faites. Supposons que vous considériez Dieu comme Il se faisait connaître anciennement ; c’était comme Jéhovah envers Israël. « Toute famille dans les cieux et sur la terre », est-elle comprise sous ce titre ? Pas une seule famille dans les cieux, et une famille seulement sur la terre. Sous ce titre de Jéhovah, il y a une relation spéciale dans laquelle Dieu se révèle aux Juifs. Il était leur Dieu dans un sens où Il n’était pas le Dieu d’aucun autre peuple. Comme Créateur, Il est le Dieu de tous : et ainsi, dans quelques parties de 1’Écriture, c’est le terme « Dieu », qui est employé, et non « Jéhovah », à cause de certaines voies de Dieu envers les Gentils. Mais lorsqu’il s’agit de l’ancien peuple de Dieu, Il emploie le terme Jéhovah. Il y a plus : dans le second livre des Psaumes, lorsque le Saint Esprit contemple le Juif pieux s’attachant à Dieu loin de Son temple, nous ne voyons pas que « Jéhovah » soit le mot saillant, mais « Dieu », car ils ne pouvaient jouir de ce qui est spécialement donné à Israël. Il ne cessera jamais d’être Dieu ; et ils y trouvent leur bénédiction — quoiqu’il arrive — Dieu ne peut se renier Lui-même. Ils sont en dehors de la place spéciale dans laquelle Il avait promis de les bénir ; mais Dieu était Dieu partout. De sorte que, s’ils étaient chassés hors de la terre sainte et ne pouvaient aller au temple pour adorer selon la loi, Dieu ne pouvait jamais cesser d’être Dieu. C’est le même principe de grâce, auquel Christ voulut abaisser la pauvre femme syrophénicienne : car il nous faut toujours en venir à notre vraie position ; et la même chose, en substance, se vérifie dans toute vraie conversion. Il me faut toujours être abaissé jusqu’à la vérité de ce que je suis, aussi bien que recevoir la vérité de ce que Dieu est : et alors il n’y a pas de limite à la bénédiction.

J’ai seulement fait allusion à ceci, en passant, pour expliquer par le contraste la phrase, « toute famille dans les cieux et sur la terre ». Lorsque Dieu se révélait dans une relation spéciale avec Israël, c’était comme Jéhovah. En Daniel, nous n’entendons pas parler de Jéhovah, mais du Dieu des cieux, évidemment par opposition à Dieu se révélant sur la terre à un peuple particulier auquel Il donna une terre et des privilèges particuliers, qu’aucune autre nation ne partageait avec eux. Ils s’en vont après de faux dieux : Il prend Sa place dans les cieux, et se prévaut de ce qui ne pouvait jamais être nié ; et comme « le Dieu des cieux », Il dit : Je choisirai maintenant ceux que je veux ; je prendrai le peuple qui est le pire dans le monde entier, et je lui donnerai l’empire de la terre. Ainsi Il choisit l’ennemi des Juifs — les Babyloniens. Si Dieu agit ainsi souverainement comme le Dieu des cieux, les plus vils peuvent posséder le pouvoir ici-bas. Mais « il y a un Dieu qui juge en la terre » ; et lorsque arrivera le jour pour démontrer cela, c’est au milieu de Son peuple qu’Il agira comme Jéhovah. Quand on envisage la chose de cette manière, Dieu n’a qu’une seule famille, qui est placée en vertu de Son alliance dans une relation avec Lui-même (Amos 3, 2). « Je vous ai connus, vous seuls, d’entre toutes les familles de la terre ». Mais ici nous avons le contraste. Il n’est pas révélé seulement comme Jéhovah, ayant Israël, Son peuple, sur la terre, mais comme « le Père de notre Seigneur Jésus Christ ». Du moment qu’Il parle selon une relation telle que celle-ci, c’est expressément en association avec Celui qui a fait toutes choses, comme il est dit auparavant : « Qui a créé toutes choses par Jésus Christ ». En conséquence, toutes les créatures sont présentées et trouvent leur vraie place avec Lui comme le Père, parce que le Seigneur Jésus est Celui qui a créé toutes choses, et pour la gloire duquel tout fut créé. Ainsi, « toute famille dans les cieux et sur la terre », qu’il s’agisse de principautés et d’autorités, d’anges, de Juifs ou de Gentils, aussi bien que de l’Église de Dieu, toutes sont placées sous « le Père de notre Seigneur Jésus Christ ». Le titre de Jéhovah est limité à une race particulière ; celui de Père de notre Seigneur Jésus Christ est un titre illimité dans sa portée, et embrasse toutes les classes d’êtres que Dieu a faites.

Cela donne à l’Église une position bien remarquable, nous séparant de tout ce qui est local ou temporaire. Nous pouvons, nous-mêmes, avoir la place la plus spéciale dans ce déploiement de la gloire divine, mais pourtant nous avons affaire à un Dieu et Père qui est proclamé comme la source suprême d’autres choses aussi. Nous pouvons être, et nous sommes, si nous comprenons la vocation de l’Église, près de Lui, dans une place que nul autre ne peut partager, dans une proximité dont nul ange ne jouit. J’entends par « nous », tous les membres de l’Église de Dieu. Nous avons, par la grâce, une place devant Dieu dans laquelle nul autre n’entre. Mais comme Il se révèle en connexion avec Christ comme le Père de notre Seigneur Jésus Christ, de même Il introduit d’autres classes d’êtres qu’Il a créés, dans le dessein de leur donner des bénédictions dans la mesure qui leur est convenable. Il a manifesté l’héritier et le centre de tous Ses desseins, et il n’y a pas une seule classe d’êtres qu’Il a faits pour Sa louange, qui ne soient mis dans leur propre place devant le Père de notre Seigneur Jésus Christ. C’est en contraste avec la portion spéciale des Juifs, comme seuls possesseurs des privilèges que Dieu leur donna comme Jéhovah. Le Père est Jéhovah, et Jésus l’est aussi ; mais ce n’est pas ainsi que nous avons affaire à Lui ; et même ce n’est pas ce qui caractérise la manière dont nous nous adressons à Lui, si nous en avons l’intelligence. C’est devant le Père de notre Seigneur Jésus Christ que l’apôtre ici fléchit les genoux. Et nous devrions avoir le sentiment que nous nous approchons de Lui dans toute la proximité qu’un tel titre implique. Il embrasse sous Son œil et dans Son cœur toute la création, comme ce qu’Il se propose de bénir avec Christ. Mais il y a ceux qui ont rejeté Christ ; et souvenez-vous que ce même amour de Dieu envers Christ, qui se propose de bénir la création par Christ, maintiendra Sa gloire contre ceux qui Le méprisent. C’est là une vérité solennelle. Il n’y a rien de plus intolérant quant au mal que l’amour, et l’évangile de Dieu présente, comme fond du tableau, la condamnation éternelle de toute âme qui méprise Jésus le Fils de Dieu. Il doit en être ainsi. Le même disciple à qui Dieu accorda le privilège de présenter l’amour comme nul autre ne le fit, est le même qui présente la mort éternelle de ceux qui refusent Son amour. Ainsi, la révélation de la ruine sans fin de ceux qui méprisent Christ, est liée de la manière la plus étroite possible avec l’amour qui présente la bénédiction éternelle de ceux qui s’attachent à Lui. C’est ainsi que nous voyons cette universalité introduite : « Duquel toute famille dans les cieux et sur la terre est nommée ».

Mais il y a, par la grâce, ceux qui auront ce qui est le plus spécial, ce qui est le plus près de Son cœur, au milieu de cette scène d’amour et de gloire. Pour eux, la prière est, « que selon les richesses de sa gloire, il vous donne d’être fortifiés en puissance par son Esprit dans l’homme intérieur ; de sorte que le Christ habite dans vos cœurs par la foi, [et que vous soyez] enracinés et fondés dans l’amour, afin que vous soyez capables de comprendre, avec tous les saints, quelle est la largeur et la longueur, et la profondeur et la hauteur ! ». La prière, dans le chapitre 1, était en vue d’une intelligence profonde et vraie de leur position devant Dieu ; ici c’est plutôt en vue d’une puissance pratique et intérieure par le Saint Esprit. La première était, pour qu’ils puissent connaître mieux leur place en Christ, quant à la vocation de la grâce et l’héritage de la gloire. La seconde, que Christ eut Sa place dans leur cœur par la foi. En un mot, il est ici question d’un état actuel, des affections occupées de Christ au-dedans, d’être enracinés et fondés dans l’amour, afin qu’ils soient parfaitement capables (car il veut dire cela) de comprendre ce qui est en réalité sans mesure. L’apôtre ne dit pas à quoi la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur se rapportent ; il vous laisse là sans finir la sentence. Il vous conduit jusque dans l’infini. Je ne crois pas que cela veuille dire, la largeur, la longueur, la profondeur et la hauteur de l’amour de Christ. Le passage est souvent cité ainsi ; et plus souvent encore il est ainsi compris. Mais le « et » du verset suivant indique distinctement un autre sens : — « et de connaître l’amour du Christ, lequel surpasse toute connaissance ».

L’amour du Christ est évidemment une pensée additionnelle. Quel est donc le sens ? S’il n’y avait pas trop de hardiesse à remplir une esquisse que l’apôtre a ainsi laissée dans le vague, je pourrais hasarder la pensée que ce qu’il met ici devant nous, avec des marques si spéciales de grandeur indéfinie, c’est le mystère dont il venait de parler, et non pas assurément l’amour du Christ, qu’il ajoute aussitôt après. Il avait montré comment toute famille dans les cieux et sur la terre est rangée sous Celui qui est le Père de notre Seigneur Jésus Christ : en connexion avec cela, il prie qu’ils soient capables de comprendre avec tous les saints, « quelle est la largeur et la longueur, et la profondeur et la hauteur ». C’est en relation avec le conseil céleste de Dieu le Père, autrefois un secret, mais maintenant dévoilé. Toutes choses étaient pour la gloire de Son Fils — toute la création, céleste et terrestre ; et les saints auront la place la plus élevée avec Lui au-dessus de tout cela.

Mais il y avait encore quelque chose de plus profond que cela, et qui devait nécessairement être connu en même temps. C’est pourquoi il ajoute : « Et de connaître l’amour du Christ, lequel surpasse toute connaissance ; afin que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu ». Quelque glorieux que soit tout cet avenir, que peut-on comparer à Son amour ? Le meilleur vin est gardé jusqu’à la fin. « De connaître l’amour du Christ, lequel surpasse toute connaissance ». Il peut sembler un paradoxe de le dire, mais un paradoxe béni. Il ne veut pas dire que nous le connaîtrons jamais parfaitement. Mais ce qu’il peut y avoir, c’est la connaissance de plus en plus grande de ce qui surpasse toute connaissance. Il suppose que nous sommes lancés sur cette mer où il n’y a pas de rivage : nous ne pouvons jamais atteindre jusqu’à la fin de Son amour. Cependant il parle de « connaître l’amour de Christ, lequel surpasse toute connaissance » ; « afin que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu ». Vous ne pourriez pas plus arriver à la fin de l’amour, que vous ne pourriez arriver à la fin de Dieu Lui-même. Rien ne peut être plus merveilleux qu’un tel désir à notre égard, faibles créatures que nous sommes, « afin que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu ». Et cependant, c’est pour les saints maintenant, que l’apôtre a ainsi prié ; ce n’est pas afin que nous puissions savoir que nous sommes le corps de Christ, « la plénitude de celui qui remplit tout en tous », mais pratiquement une pleine entrée par la puissance de l’Esprit, dans la plénitude de Dieu. C’est la condition du cœur, et le vrai progrès dans la communion avec Dieu, qui sont ici devant nous ; et cela se présente de la manière la mieux appropriée, après qu’il a été question de la position, et avant les exhortations quant à la marche et quant à la conduite.

Ainsi encore : « Or à celui qui, selon la puissance qui opère en nous, peut faire infiniment plus que tout ce que nous demandons et pensons » ; il ne dit pas plus que nous pouvons demander et penser. Le Saint Esprit a particulièrement soin de ne pas le dire. Il y a quelque différence à remarquer entre ce que nous demandons et pensons, et ce que nous pouvons demander et penser. Il n’y a pas de limite à ce que nous pouvons demander, sinon que Dieu est au-dessus de tout ce qui peut Lui être demandé ; cependant Il aime à nous entendre demander toujours plus. Il voudrait nous habituer à demander plus abondamment.

Ainsi il y a une dépendance à l’égard de Dieu, « selon la puissance qui opère en nous ». De qui cette puissance est-elle ? Celle de Dieu, qui Lui-même demeure en chaque chrétien. C’est Dieu Lui-même qui fait maintenant que tout saint, tout chrétien devient Son temple. Ainsi quelque faible et pauvre que soit le croyant, envisagé comme il est, cependant quel est l’état dans lequel Dieu ne puisse pas l’amener ? Il est le temple de Dieu. Dieu sera toujours au-dessus de lui, élevé au-dessus de tout ce que l’homme, quel qu’il soit, peut attendre, à l’égard de Son amour ; mais il est tenu compte de ceci, savoir, qu’il y a une puissance qui opère en nous maintenant, aussi bien qu’une puissance qui a opéré pour nous, puissance à laquelle nous ne pouvons mettre aucune limite. Quant à la puissance qui a opéré pour nous, nous la trouvons dans le chapitre 1. C’est la puissance qui ressuscita Christ d’entre les morts. Oui, c’est la même puissance qui a opéré à notre égard, qui nous a ressuscités de notre état de mort, et qui ressuscita Christ d’entre les morts. Mais maintenant il va plus loin, et il signale la puissance qui opère en nous pour nous donner entrée dans Son amour et dans la plénitude de Dieu. Nous souvenons-nous que c’est précisément la chose dans laquelle nous manquons le plus ? Car il y a bien des âmes qui prouvent constamment, combien elles pensent peu à cette puissance ; combien elles sont sujettes à murmurer et à être éprouvées par les choses mêmes pour lesquelles, si elles avaient seulement eu le sentiment de Son amour, elles Le béniraient. « Or à celui qui selon la puissance qui opère en nous, peut faire infiniment plus que tout ce que nous demandons et pensons, à lui soit gloire dans l’assemblée, dans [le] Christ Jésus, pour tous les âges du siècle des siècles ! Amen ! ». Sous quel aspect spécial l’Église paraît ici ! Il donne à entendre qu’il n’y aura jamais aucun temps où l’Église n’aura pas sa place particulière. Mais il n’est pas seulement vrai, que les saints devraient avoir une introduction merveilleuse dans l’amour de Christ et la plénitude de Dieu, par Sa puissance qui opère maintenant en nous : mais il paraît aussi, qu’il n’y aura jamais aucun temps, dans tous les siècles à venir, où il n’y aura pas un caractère de relation unique et bénie, entre l’Église comme Église, et Dieu Lui-même — « le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ ». Et cela est confirmé par la belle scène dans Apocalypse 21, où nous n’avons plus ni nations, ni rois, mais Dieu avec les hommes. Il n’y est pas simplement dit : « Voici, Dieu est venu habiter avec les hommes », mais Son habitation. Ce n’est pas seulement que Dieu daignera alors demeurer avec les hommes, mais : « l’habitation de Dieu est avec les hommes ». Il semble que c’est exactement la même chose que ce qui est ici appelé l’Église. Dieu habitant dans l’Église, prendra Sa place avec les hommes ; de sorte que l’habitation particulière de Dieu dans l’Église continuera, même quand la scène sera éternelle. Ainsi, lorsque les cieux et la terre s’en seront allés, après le grand trône blanc, et lorsque tous les saints seront dans leurs corps ressuscités, alors non seulement Dieu sera en face des hommes, mais « l’habitation de Dieu » descendra pour être avec les hommes — Dieu demeurant avec eux dans Sa propre habitation, laquelle ne peut guère être autre chose que ce qui est ici appelé l’Église. De sorte que l’Église, même dans l’éternité, quand tous les ennemis et toutes les choses seront assujettis, jouira du doux et merveilleux privilège d’être l’habitation ou la demeure de Dieu. Quelles gens devrions-nous donc être en sainte conduite et piété !

Ainsi il y a dépendance à l’égard de Dieu, mais il s’agit de Celui qui peut nous bénir d’une manière illimitée, « selon la puissance qui opère en nous ».

Chapitre 4

Avant d’entrer dans le sujet des dons pour l’œuvre du ministère, qui nous est présenté plus tard dans ce chapitre, le Saint Esprit appuie sur l’unité qui appartient maintenant aux saints de Dieu en Christ. Il était nécessaire que cette unité fût présentée, comme la grande scène sur laquelle et en rapport avec laquelle le ministère poursuit son cours. Car le ministère met en saillie des membres de Christ individuellement, plutôt que le corps entier. Il est vrai que c’est une assertion commune que l’Église enseigne ; mais elle est réellement et entièrement sans fondement. Et même cette notion conduit à la prétention à l’infaillibilité, ce qui trouve le plus ouvertement son expression dans le romanisme. La vérité est que l’Église n’enseigne jamais, mais qu’au contraire, c’est le corps qui est enseigné. Il n’y a pas une telle chose qu’un corps qui enseigne. Sans doute, l’Église renferme dans son sein les ouvriers qui sont employés par le Seigneur ; mais elle est elle-même « le labourage de Dieu », ou la scène où Dieu travaille afin de produire du fruit pour Lui-même. C’est là, dans la pratique, une vérité importante, parce qu’elle détruit toute prétention, de la part de l’Église, à créer des doctrines ou même à les définir. L’Église est appelée à être « la colonne et le soutien de la vérité » ; elle est tenue de veiller, par une sainte discipline, à ce que rien de contraire à la vérité ne soit toléré dans son sein : l’assemblée de Dieu ne peut se soustraire à cette responsabilité. Mais, tandis que c’est la part de la communauté chrétienne tout entière, qu’elle devrait être ce corps qui, sur la terre, maintient la vérité devant les hommes, et au sein duquel nous devons nous trouver, si, après avoir cru à la vérité, nous devons en aucune manière nous y conformer ; toutefois, la manière dont il a plu à Dieu de travailler pour répandre Sa vérité et atteindre par elle les consciences, c’est individuellement par des membres de Son Église qui sont doués pour ce but particulier. La puissance pour enseigner dépend du don conféré par la grâce souveraine. Il ne s’agit nullement d’un droit abstrait que tout homme puisse enseigner ou prêcher, s’il veut le faire. Il n’y a pas une telle licence dans l’Église de Dieu. Le Seigneur Jésus a le droit d’appeler et de communiquer la puissance dans le Saint Esprit, comme Il lui plaît. L’Église n’est pas une société d’hommes qui ont des vues sur tel ou tel sujet : encore moins est-elle le rassemblement du monde pour former un seul tout. C’est l’Assemblée de Dieu, composée de ceux qu’Il appelle, et dans laquelle Il habite. Et de même qu’il est vrai, à l’égard du tout, qu’il appartient tout entier à Dieu, que c’est Dieu qui le forme et qui le garde, et qui y maintient Sa propre sainteté et Sa propre gloire, de même la chose est vraie par rapport au ministère, qui est une fonction bien importante, laquelle est maintenue dans des membres particuliers de l’Église, c’est-à-dire qu’il y a l’unité que les croyants possèdent maintenant dans le Christ Jésus, en vertu de laquelle il y a l’Assemblée de Dieu — l’unité commune de bénédictions dans laquelle tous les croyants sont maintenant placés, et qui forme, si je puis le dire, la base de tout. Mais en connexion avec cette unité, vous avez le ministère à l’œuvre, ministère qui appartient à des membres en particulier, plutôt qu’à l’Église entière. Les dons sont dans quelques-uns, et la part de quelques-uns, pour le bien de tous.

Cela divise la première portion du chapitre en deux parties. Dans les premiers versets, jusqu’à la fin du verset 6, nous trouvons plutôt l’unité de l’Esprit ; à partir du verset 7, la diversité des membres de Christ. Et d’abord, remarquez bien que le Saint Esprit nous a amenés maintenant sur le terrain de l’exhortation. Nous avons la doctrine dans les trois premiers chapitres ; maintenant nous arrivons à la pratique. « Je vous exhorte donc, moi qui suis prisonnier dans le Seigneur, à marcher d’une manière digne de l’appel dont vous avez été appelés ». Cet appel se compose plus particulièrement de deux parties. D’abord, les saints, tous ceux qui maintenant connaissent le Seigneur Jésus, forment un corps en Lui ; en second lieu, ils sont l’habitation de Dieu par l’Esprit. Ainsi donc, bien que l’Assemblée de Dieu soit un corps qui existe sur la terre, elle est pourtant fondée sur des privilèges célestes ; d’une part, le corps de Christ nous montre nos bénédictions comme corps, de l’autre, l’habitation de Dieu par l’Esprit met plutôt devant nous notre responsabilité comme ayant Dieu qui habite au milieu de nous. Il n’est que trop évident que les vrais enfants de Dieu eux-mêmes entrent bien peu dans ces deux choses. Quand ils entendent parler du corps de Christ, leur idée ne va guère au-delà du fait qu’ils sont pardonnés, qu’ils sont des enfants de Dieu, et qu’ils iront au ciel. Quelle faible mesure que tout cela, de ce qu’implique l’expression : le corps de Christ ! Bien des vrais croyants supposent que cela veut dire l’ensemble de ceux qui sont réconciliés avec Dieu — les objets de Sa faveur qu’Il ne laisse pas mourir dans leurs péchés. Mais on pourrait avoir tous ces privilèges, sans posséder aucun des traits caractéristiques du corps de Christ, ou de l’habitation de Dieu par l’Esprit. Il aurait été tout à fait possible, s’il avait plu à Dieu d’arranger les choses ainsi, que les chrétiens fussent des enfants de Dieu, ayant la conscience de leur rédemption, connaissant leur relation d’enfants, ayant pleinement l’attente d’être glorifiés avec Christ dans le ciel, et pourtant qu’ils ne fussent jamais unis ensemble comme un seul corps en Christ, ayant Dieu habitant parmi eux par la présence spéciale du Saint Esprit envoyé du ciel. C’était là un privilège surajouté par-dessus la rédemption par le sang de Christ. Et cela est tellement vrai, que si vous cherchez dans tout l’Ancien Testament, vous trouverez qu’il n’y est jamais fait mention des saints de Dieu comme étant membres du corps de Christ, l’habitation de Dieu par l’Esprit.

Mais il y a plus. Les prophètes sont remplis d’une scène glorieuse qui doit un jour être réalisée sur la terre, quand le Seigneur aura aboli la puissance de Satan. Le temps vient où Dieu ne permettra plus que le mal demeure impuni, ni que le bien souffre, ici-bas ; et quand ce jour-là sera venu, l’Écriture montre clairement que, bien que Dieu ait sur la terre un peuple qui Lui appartienne, ils ne seront pas unis ensemble comme un seul corps, et ils ne formeront pas non plus Son habitation par l’Esprit. C’est entre les deux avènements de Christ, entre la grâce qui est apparue, et la gloire qui va apparaître (Tite 2, 11-13), que nous entendons parler de l’appel spécial dont nous avons été appelés. Considérons en effet ce qu’est le corps de Christ : — or il est clair que je ne veux pas dire Son corps, comme si je parlais de Lui-même personnellement, mais Son corps, comme étant composé de ceux qui maintenant croient en Christ, et comme une expression qui s’applique à eux, cette corporation spirituelle à laquelle appartiennent tous les vrais saints de Dieu qui se trouvent maintenant sur la terre, ou qui y aient jamais existé depuis la Pentecôte. Quelles sont les bénédictions qui la constituent ? Qu’est-ce que le Saint Esprit veut dire par la relation de membre de ce corps ? Je réponds : La croix, étant le témoin et l’expression de la culpabilité des Juifs plus particulièrement (de la culpabilité, sans doute, de tous les hommes en général, mais des Juifs d’une manière prééminente), la croix, dis-je, fournit l’occasion pour Dieu de mettre fin complètement, pour le présent, à la position spéciale de faveur que le peuple juif avait occupée précédemment. Dieu effaça Lui-même la marque distinctive qui séparait Israël d’avec les Gentils ; et au lieu de faire d’Israël l’unique canal de Ses promesses, le courant de la bénédiction se tourne au contraire d’une manière positive et marquée vers les Gentils. Il rassemble d’entre Juifs et Gentils un peuple pour Son nom, et unit ensemble ces élus d’entre les uns et les autres, qui croient en Christ, pour les mettre en possession de nouveaux privilèges qui n’avaient jamais été goûtés auparavant d’une manière semblable ni dans une telle mesure.

Un trait bien remarquable de la bénédiction, c’est que la distinction entre Juif et Gentil a disparu. À la croix, ils étaient unis dans la méchanceté devant Dieu ; mais à quoi Dieu le fait-Il servir ? Il dit, pour ainsi dire : Je prendrai cette croix même, dont l’homme a fait la scène de sa rébellion outrageante contre moi — cette croix qui a prouvé que mon ancien peuple est devenu violent dans son hostilité contre moi dans la personne de mon Fils ; et je ferai de la croix le pivot sur lequel roulera une plénitude, une richesse de bénédictions au-delà de tout ce qu’ont même attendu jusqu’à maintenant les hommes qui ont cru dans ce monde. Ainsi, de même que la croix fut le point de ralliement de Satan pour rassembler les hommes en une union impie contre Dieu et contre Son Fils, de même Dieu en fait le précieux centre où Il rassemble les Juifs et les Gentils qui croient en Son Fils, pour former un nouveau corps, où toutes distinctions semblables sont effacées à jamais. Et si le bon plaisir de Dieu est de rassembler un peuple dans le but de donner un témoignage pratique de cette nouvelle manifestation de Son amour, qui peut s’y opposer ? La loi est juste ; et ce serait faire outrage à Dieu que de jeter la moindre défaveur sur les dix commandements. Mais s’il demeure vrai que « le commandement est saint, et juste et bon », la grâce introduit ce qui est encore plus élevé et meilleur. Il est juste, sans doute, que si je fais bien, j’en sois récompensé ; mais n’est-ce pas une chose plus bénie si, en faisant bien, je souffre, et que je l’endure ? C’est une chose digne de louange devant Dieu ; et c’est le principe pratique d’après lequel Il appelle maintenant Ses enfants à agir. Ce n’était pas là la règle publique de gouvernement dans les temps de l’Ancien Testament, mais l’opposé. Est-ce donc que Dieu se contredit Lui-même ? Loin de là. Dieu peut agir d’une certaine manière avec le peuple juif ; et plus tard Il peut établir un autre mode d’action avec les chrétiens. Et en effet qui peut nier qu’Il l’ait fait ? Le Juif aurait été coupable d’un péché grief, s’il n’avait pas été circoncis ; et je crois que, pour ce qui concerne la terre, même dans les temps glorieux qui viendront, le Juif aura sa terre, sa cité, son sacrificateur, et son temple, etc. La volonté de Dieu à l’égard des Juifs demeurera substantiellement la même. Je trouve dans les prophéties un état de choses non encore réalisé, où toutes ces ordonnances extérieures de Dieu seront accomplies. Ne dois-je donc croire Dieu, qu’après avoir vu les prophéties ainsi réalisées ? Ce n’est pas ainsi que nous traitons la parole d’un homme de bien. Mais « si nous recevons le témoignage des hommes, le témoignage de Dieu est plus grand ». Et si un homme reçoit les livres de Samuel et des Rois, tandis qu’il ne croit pas Ézéchiel ou Osée, c’est traiter Dieu comme vous ne traiteriez pas même un homme ordinaire. Mais si je crois tout ce que Dieu a dit, rappelons-nous qu’il existe des principes particuliers de Dieu à l’égard des Juifs, qui doivent un jour être réalisés par le Messie régnant en puissance, lorsque le diable est lié. Dieu accomplira tout ce dont Il a parlé dans les prophètes, dans les jours des cieux sur la terre. Mais, en attendant, le Messie, qui avait été promis pour introduire cette gloire, est venu, et a été rejeté. Au lieu d’avoir un trône, Il eut la croix ; et bien loin de recevoir la terre pour Son héritage, Il fut jeté hors de la terre et monta au ciel. En conséquence, un nouvel état de choses s’ouvrit ; et quant à cet ordre de choses totalement différent de celui qui est généralement envisagé dans les prophéties, nous avons la révélation contenue dans le Nouveau Testament. Là nous trouvons ce dont il n’est donné que de faibles indices çà et là dans l’Ancien Testament, mais qui en même temps introduit, comme un tout, une scène qui n’est ni précédée ni suivie par rien de semblable, où Dieu dévoile des privilèges qui ne furent jamais goûtés auparavant, et s’attend à une marche qu’Il ne demandait en aucune manière, même de Ses saints, jadis.

Il y a, sans doute, certains principes fixes et clairs, qui sont toujours obligatoires. Dieu ne sanctionnera jamais le mensonge, ni la convoitise, ni la malice ; aucune économie ne peut neutraliser ni affaiblir les grandes distinctions morales entre le bien et le mal. Mais le Dieu qui a agi en puissance sur la terre pour protéger Son peuple, et qui l’aurait protégé s’il avait été fidèle sous la loi, maintenant, au contraire, appelle Son peuple à souffrir en grâce. Le même Dieu, qui fut le bouclier d’Israël et le fit passer au travers de la mer Rouge, et qui ne voulut point permettre qu’aucune puissance obtînt une suprématie universelle sur la terre jusqu’à ce qu’Israël se fût montré infidèle, plus tard, après qu’Israël se fût manifesté comme entièrement indigne, permit à Babylone, à la pire même d’entre les puissances des Gentils, de le renverser ; puis divers empires se succédèrent l’un à l’autre, jusqu’à ce que, finalement, sous les Romains, et Juifs et Gentils se réunirent pour crucifier le Seigneur de gloire. Alors la condamnation du monde fut scellée ; le glas de son jugement se fit entendre depuis la croix de Jésus. On aurait pu s’attendre, si Dieu eût agi alors d’après des principes de justice, que l’univers de Dieu eût été aussitôt bouleversé, ou du moins que Jérusalem et Rome eussent été détruites dans l’ardeur de Son indignation. Bien loin de là. Le ciel s’ouvre, mais c’est pour recevoir Jésus le crucifié, et non pour juger Ses meurtriers : bien plus, c’est pour envoyer d’en haut le Saint Esprit sur la terre, afin de former, par grâce, ce corps nouveau, l’Église de Dieu ; c’est pour introduire ces vils meurtriers de Jésus, si seulement ils Le recevaient, dans une place de bénédiction dont on n’avait jamais goûté ni connu auparavant ni la largeur, ni la longueur, ni la profondeur ni la hauteur. Et c’est là la grâce. « La loi a été donnée par Moïse ; la grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ ». L’évangile de la grâce de Dieu est annoncé ; mais son effet n’est pas seulement de sauver des âmes — Il les rassemble, Il les unit à Christ, Il les fait membres de Lui-même et membres l’un de l’autre. L’ancienne position de faveur qui appartenait aux Juifs a disparu ; les privilèges lévitiques sont éclipsés, pour ce qui concerne l’Église. Les Gentils étaient enfoncés dans l’idolâtrie, et les Juifs se complaisaient en eux-mêmes sous la loi de Dieu qu’ils ne gardaient point ; mais, par la foi en Christ, et Juifs et Gentils sont introduits par le moyen de l’Esprit dans ce seul corps, et adorent Dieu sur un même terrain commun, celui de la grâce. Ils sont « édifiés ensemble, pour être une habitation de Dieu par l’Esprit ». C’est là « l’appel » dont nous avons « été appelés ».

« Je vous exhorte donc, moi qui suis prisonnier dans le Seigneur », etc. Il appelle encore l’attention sur cette marque honorable de l’inimitié du monde, parce qu’il est occupé à faire ressortir d’une manière pratique ce qui résultait dans ce monde, même pour le plus grand serviteur de Dieu qui ait jamais vécu — après Christ. Après tout, il était prisonnier dans le Seigneur. Quel merveilleux honneur ! Il n’y avait point de chariot de feu pour l’entourer, comme avec Élie ; pas de puissance employée pour le préserver. Il souffre de la main du même empire qui crucifia le Seigneur de gloire ; et depuis sa prison il encourage les saints à marcher d’une manière digne du même appel ! Maintenant même le monde a le dessous. Que sera-ce quand le Seigneur viendra ?

Néanmoins il est ajouté : « Avec toute humilité et douceur, avec longanimité, vous supportant l’un l’autre dans l’amour ». Il y avait le danger du contraire : on pouvait mésuser des privilèges spirituels pour remplir les saints d’orgueil. Il fait donc face à cela, et leur montre le seul ton qui sied particulièrement au chrétien. « Avec toute humilité et douceur ». C’est une chose bénie que de trouver du zèle ; mais qu’y a-t-il pour faire compensation dans la marche d’un chrétien, lorsqu’elle manque d’humilité et de douceur ? Il y a un temps pour être ferme, et un temps pour céder ; mais il n’y a ni don ni position qui puisse justifier ceux qui semblent penser que, dans leur cas, l’exhortation à la douceur et à l’humilité ne trouve pas sa place. D’un autre côté, nous devons prendre garde que ce ne soit seulement de la douceur dans les manières ou de l’humilité dans les paroles, car Dieu attend de nous ce qui est réel. Trop souvent, une telle humilité ne fait que couvrir le plus profond orgueil, de même qu’on parle souvent le plus de l’amour et de l’esprit de Christ là même où ils existent le moins. Gardons-nous de ce vain étalage.

Mais en supposant qu’il y ait en d’autres des choses que nous ne pouvons pas laisser passer, comme étant contraires à la pensée de Dieu, comment devons-nous agir ? Sans doute il devrait y avoir la parole de répréhension, convenablement donnée, si cela est nécessaire ; mais il doit y avoir aussi la « longanimité » ; et s’il y a quelque cas où la longanimité soit spécialement demandée, c’est lorsque le mal nous touche nous-mêmes. Nous ne devons pas tolérer le mal qui est contre le Seigneur ; mais toutes les fois qu’il s’agit de ce qui nous endommage, la longanimité est le mot — « vous supportant l’un l’autre dans l’amour, vous appliquant à garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix ». Ici ce n’est pas seulement l’humilité de la grâce et la patience que le chrétien a à entretenir, mais c’est la diligence spirituelle avec laquelle il est appelé à tenir ferme ce qu’il y a de plus précieux et divin ici-bas.

« Vous appliquant à garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix ». Quelle perfection que celle de l’Écriture ! Elle ne dit pas : « l’unité du corps », bien qu’elle la comprenne. Mais s’il eût été dit : « l’unité du corps », les hommes auraient pu établir (comme en effet ils l’ont fait) une institution extérieure, et faire un point de vie ou de mort de ne pas s’en séparer. Mais ce que le Saint Esprit recommande à ceux qui appartiennent à Christ, c’est de s’appliquer (en y apportant tout le zèle nécessaire), non à former, mais « à garder l’unité de l’Esprit ». C’est quelque chose que l’Esprit a déjà formé, et que nous avons à maintenir ou à observer. Ce n’est pas seulement que nous devons avoir des sentiments d’amour envers ceux qui sont chrétiens comme nous. Ceci pourrait exister dans mille corporations différentes ; mais quelque attention qu’on y apportât, ce ne serait pas là « garder l’unité de l’Esprit ». Quel est donc le sens ? L’unité du Saint Esprit, laquelle est déjà formée, embrasse tous les membres de Christ. Et où trouver les membres de Christ ? Dans un sens partout, Dieu en soit béni ; dans un autre sens, hélas ! dans le premier endroit venu. Partout où Christ est prêché et que des âmes L’ont reçu, là sont Ses membres. Et qu’avons-nous à faire ? À maintenir diligemment l’unité qui embrasse tous ceux qui appartiennent à Christ — « par le lien de la paix ». Ici nous trouvons qu’il est fait mention de la paix, non pas tant pour nos propres âmes avec Dieu, mais plutôt pour la jouissance et l’avancement de l’union parmi les saints de Dieu d’une manière pratique. La chair est inquiète et remuante : un esprit paisible est le fruit du Saint Esprit, et contribue puissamment à lier ensemble les cœurs dans la pratique. L’Esprit de Dieu ne s’occupe pas seulement à donner des opinions justes sur tel ou tel point : Il a des desseins d’une plus grande profondeur. Il incline les âmes devant Christ, et Il L’exalte à leurs yeux. Mais c’est assurément une chose précieuse que d’amener une seule âme des ténèbres à la lumière, ou d’un faible degré de lumière à une lumière plus grande ; et c’est à quoi Dieu Lui-même travaille maintenant. Nous ferons bien, tandis que nous tenons ferme notre liberté pour Christ, de ne pas permettre les barrières que les hommes ont introduites, mais de les traiter comme étant sans valeur et de nul effet.

Mais alors, on dira, comme on le fait souvent, que tout homme a droit à son jugement particulier. Je le nie totalement. Nul n’a droit à une opinion dans les choses divines ; Dieu seul, et cela d’une manière absolue, a le droit de communiquer Sa pensée. Ce que l’on a à faire, c’est de se mettre de côté, afin que la lumière de Dieu reluise dans le cœur de Ses enfants. Les hommes, dans l’importance qu’ils s’attribuent, ne font que projeter l’obscurité de leur ombre sur eux-mêmes et les uns sur les autres ; ils empêchent ainsi la communication de la vérité divine, au lieu de l’aider. Au contraire, lorsque le désir du serviteur de Christ est que Dieu veuille conduire et fortifier Ses enfants, est-ce en vain ? Jamais. Du moment que vous commencez à rassembler des personnes autour d’un homme en particulier, ou d’une vue, ou d’un système, vous ne faites que former une secte. Car c’est là un parti, bien qu’il puisse renfermer bien des membres de Christ, et il établit la base de son union, non sur Christ, mais sur des points de différence, lesquels deviennent ainsi une marque particulière et un moyen de séparer les uns des autres les enfants de Dieu. L’Église apostolique n’a jamais exigé la foi d’un nouveau converti, quant à un système national ou dissident ; elle n’a jamais demandé : Croyez-vous à l’épiscopat, à un arrangement qui découle de la volonté de l’homme, ou même à l’Église de Dieu ? La vraie question — celle qui glorifie Dieu, a toujours été et est encore maintenant : Croyez-vous au Christ de Dieu ? Il est vrai que dans les premiers temps, si quelqu’un confessait Christ, il était rejeté par Juifs et Gentils, et devenait un objet d’inimitié pour le monde entier ; ce qui ne contribuait pas peu à empêcher les personnes de confesser Christ, à moins qu’elles ne crussent réellement en Lui. Mais si quelqu’un avait reçu le Saint Esprit sur le principe de l’ouïe de la foi, il était dès ce moment membre du « seul corps », et reconnu comme tel.

Pourquoi cela ne ferait-il pas autorité maintenant ? Est-ce que je ne me contente pas de la sagesse de Dieu ? Voudrais-je donc compléter Sa Parole, ou agir sans elle ou contre elle ? Ce n’est pas une secte, si vous agissez d’après la pensée de Dieu ; c’est une secte si vous vous en écartez. La question est donc : Quelle est l’intention de Dieu au sujet de Son Église ? Comment veut-Il que nous nous réunissions ? Suis-je content de recevoir tous ceux qui sont réellement des chrétiens — des personnes que tous croient converties ? Sans doute il y a une telle chose que de les retrancher, si dans la suite il est manifesté qu’elles ne le sont pas ; car il n’est pas possible que le cas se présente d’un mal, auquel la Parole de Dieu ne s’applique pas, en sorte qu’il n’y a pas le moindre besoin de quelque règle ou de quelque règlement d’homme. À moins que les hommes ne soient spirituels, ils ne garderont pas longtemps l’unité de l’Esprit ; ils trouveront bientôt d’abondantes raisons pour trouver à redire. Mais quant à ceux qui s’attachent fermement à Christ, en tant que le centre de l’unité de l’Esprit, comme ils ne sont pas une secte, ainsi ils ne peuvent jamais en devenir une, quels que soient les schismes, les divisions ou les hérésies de leurs adversaires. C’est une chose lamentable s’il se trouve des âmes qui se retirent, se condamnant ainsi elles-mêmes, mais c’est une chose d’autant plus bénie pour ceux qui, malgré tout, ont la foi, la patience et la grâce pour rester. L’apôtre dit, en écrivant aux Corinthiens : « Il faut aussi qu’il y ait parmi vous des sectes, afin que ceux qui sont approuvés soient manifestés parmi vous ». C’étaient là les hommes qui, dans ce moment-là, demeurèrent attachés au Seigneur de tout leur cœur. Puisse la même chose être vraie de nous maintenant ! Je nie que la Parole de Dieu soit devenue de nul effet, ou que je sois en aucune manière tenu de pécher maintenant, plus qu’alors. L’unité de l’Esprit que les Éphésiens devaient garder, est l’unité que Dieu recommande à tous Ses enfants. Si la Parole a régénéré mon âme par le moyen du Saint Esprit ; si par elle je connais mon Sauveur et mon Père ; si je suis redevable à cette Parole comme étant le moyen que Dieu emploie pour purifier mon âme de jour en jour, puis-je dire que je n’ai pas besoin de suivre Sa Parole comme membre du corps de Christ dans l’Assemblée de Dieu, où Il habite par l’Esprit ? Certes, si mon âme en reconnaît la divine autorité, malheur à moi si je ne cherche pas à la suivre en toutes choses. Dieu nous appelle à être diligents à maintenir « l’unité de l’Esprit par le lien de la paix ». Ce n’est pas l’unité de nos esprits, mais l’unité de l’Esprit.

Lorsque nous réfléchissons que c’est le Saint Esprit qui forme cette unité, n’est-ce pas là une pensée solennelle ? Ne devrions-nous pas nous garder de tout ce qui L’attristerait ? Notre Seigneur attachait une importance spéciale à ce qui concernait le Saint Esprit ; et il en sera de même de nous, si nous sommes sages. Si le Saint Esprit est ici dans ce dessein sur la terre, Il devient comme une divine pierre de touche pour les âmes, quant au fait si elles sont préparées à L’honorer ou non. Mais on pourrait dire : Si vous recevez tous les chrétiens, sans exiger d’eux qu’ils donnent un gage pour l’avenir, tacitement sinon expressément, vous pouvez accepter un socinien, ou un arien. Mais je ne reconnais en aucune façon que de telles personnes soient des chrétiens ; le faites-vous ? Sur quoi l’Église est-elle fondée ? « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » voilà ce que dit notre Seigneur dans le chapitre même où Il annonça pour la première fois qu’Il allait bâtir Son Église : « Tu es le Christ », dit un des disciples, « le Fils du Dieu vivant ». Et que répond notre Seigneur ? « Tu es Pierre, et sur ce rocher je bâtirai mon assemblée ». Dès lors on doit agir de la manière la plus forte et la plus stricte avec les âmes, quant à la question de savoir si, en effet et en vérité, elles croient et confessent la divine gloire du Seigneur Jésus Christ. La sanction donnée au moindre accommodement sur ce point serait une raison pour être dans le doute à l’égard d’une âme. Vous n’avez aucun fondement pour recevoir comme chrétien celui qui touche à la pureté, à la gloire, ou à l’intégrité de la personne de Christ. L’Église est fondée sur Christ, le Fils de Dieu : si ce rocher est ébranlé, tout a disparu. « Puisque les fondements sont ruinés, que fera le juste ? ». Toucher à Christ, c’est toucher à la base même sur laquelle l’Église de Dieu repose.

Mais lorsqu’une âme confesse Christ en réalité et en vérité, qu’elle Le confesse d’une manière qui se recommande à votre conscience comme étant divine, recevez-la ; car Dieu l’a reçue. Ce peut être un baptiste ou un pédobaptiste : n’importe, recevez-le. S’il vit dans le péché, ai-je besoin de dire que Christ et l’ivrognerie, etc., ne peuvent aller ensemble ? La foi au Fils de Dieu est incompatible avec le fait de marcher dans les ténèbres. Peu importe comment un homme peut parler de Christ ; s’il associe à cette confession un mépris de la gloire morale de Dieu, il prouve par ce fait qu’il n’est pas né de Dieu. Simon le magicien pensait qu’on pouvait « acquérir avec de l’argent le don de Dieu ». Il en est qui diront : Ce fut une méprise qu’il fit. Oui ; mais cette méprise était vitale, et prouvait qu’il était impossible qu’il possédât la vie qui vient de Dieu ; et par conséquent quoique baptisé, il ne fut pas reçu comme membre du corps de Christ. Nous n’avons aucune raison de penser qu’il ait jamais rompu le pain. Le baptême n’aurait nullement été une raison, en présence de telles circonstances, pour que l’assemblée reçût celui qu’ils ne croyaient pas un saint.

Ceci montrera, en quelque mesure, le caractère ou les limites de l’unité de l’Esprit. Car le Saint Esprit, tandis qu’Il appelle les âmes et leur donne de confesser Christ, ne les laisse jamais marcher dans la boue de leur propre méchanceté. Si un croyant tombe dans un péché d’un certain caractère, il doit être retranché. Quant à ce qui est purement personnel, on devrait agir à cet égard d’une manière privée ; il serait monstrueux de mettre tous les manquements sur la même ligne. En maintenant l’honneur de Dieu, le premier sentiment, le profond sentiment de notre âme, devrait être de ramener la personne. L’Église est un témoin de la grâce divine, et elle doit chercher la bénédiction des inconvertis et la restauration des chrétiens qui se sont égarés. Nous appliquons-nous en effet à garder l’unité de l’Esprit ? Comment se fait-il que les chrétiens sont divisés en différentes associations ? Si la Parole de Dieu est ce qu’ils cherchent, à tout prix, à mettre en pratique, pourquoi exigent-ils des règles humaines et des inventions modernes ? Si Dieu donne une règle, je n’ai besoin d’aucune autre ; mais j’ai besoin d’avoir celle de Dieu dans toute sa force, de manière à présenter la vérité à la conscience d’un homme, et à dire : C’est là la volonté de Dieu. Est-il bien, ou est-il sage de céder sur ce point ? Dieu a écrit Sa Parole, qui porte sur tout ce qui est moral, et c’est selon elle qu’Il a voulu que Ses enfants marchassent : le faisons-nous ? Quelques-uns peuvent demander : Êtes-vous donc parfaits ? Je réponds : Nous nous appliquons à tenir ferme et dans la paix l’unité de l’Esprit, nous cherchons sincèrement la soumission à la volonté de Dieu : faites-vous de même ? C’est ici la principale question pour tout enfant de Dieu : — Est-ce que je m’applique à garder l’unité de l’Esprit ? Et le fais-je de la manière qui est selon Dieu, ou d’après ma propre tête ? Ai-je fait abandon de moi-même pour faire Sa volonté ? Notre affaire c’est de Lui être soumis. Nous avons nos ordres, et c’est notre responsabilité de les exécuter, dans l’obéissance à Celui à qui nous sommes et que nous sommes tenus de servir.

Mais, en outre, cette unité doit être gardée par le lien de la paix. Dieu est occupé à former Son Église de tous ceux qui Lui appartiennent. Il ne s’agit pas de personnes chrétiennes qui ont des vues particulières sur tel ou tel point ; mais c’est l’Esprit maintenant Sa propre unité, ou ce que Christ est pour eux, et non les points sur lesquels elles diffèrent les unes des autres. Si je désire « garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix », il faut que j’aie ma propre âme bien établie sur ce point : le Saint Esprit est occupé à glorifier Christ seul. Vous ne pouvez plaire plus au Père qu’en exaltant le Fils ; et vous ne pouvez rien faire qui Le touche de plus près, que de faire peu de cas de Son Fils. Tout est assuré en maintenant Christ. Cela ramène la chose à la question la plus simple possible. Est-ce notre affaire de forcer les gens d’abandonner leurs vues et d’adopter les nôtres, quelque correctes qu’elles soient ? La Parole de Dieu fournit un terrain, dans le nom de Christ, sur lequel vous pouvez embrasser tous les saints, quel que soit d’ailleurs le degré de leur faiblesse ou de leurs préjugés. Gardons-nous d’avoir plus à cœur notre réputation ou notre tranquillité que Sa volonté. Ne tirons pas vanité du peu de connaissance que nous avons, ni du point auquel nous sommes parvenus dans la pratique. Regardons en haut ; regardons au Seigneur, afin d’avoir la foi et la patience pour reconnaître tout vrai membre de Christ, et tout vrai serviteur de Christ, partout où ils se trouvent. Demeurons attachés à l’unité de l’Esprit par le lien de la paix, et soyons diligents à la maintenir, quelles que puissent être les difficultés — et certes elles sont grandes. La foi ne voit pas plusieurs corps et un seul Esprit — elle ne connaît qu’un seul corps. Tout en supportant ceux qui à cet égard ne voient qu’obscurément ou qui voient double, soyons inflexibles en tenant ferme le nom de Christ, et pour ce qui est de nous-mêmes ayons soin de ne rien accréditer de contraire à ce nom. « [Il y a] un seul corps et un seul Esprit, comme aussi vous avez été appelés pour une seule espérance de votre vocation ». C’est là notre bénédiction en Christ la plus essentielle, la plus vitale : « car nous sommes membres de son corps, de sa chair, et de ses os ». Il est ajouté immédiatement : « Un seul Esprit », parce que c’est le Saint Esprit qui effectue la chose ; et c’est de ce que nous sommes maintenant, par la puissance du Saint Esprit, que nous espérons jouir bientôt avec Christ. Nous l’aurons pleinement et parfaitement en la présence de Dieu dans le ciel. C’est là la première unité.

Il y a une différence entre cela et les versets suivants. Le verset 4 donne un caractère d’unité, le verset 5 un autre, et le verset 6 un troisième ; et ces trois cercles concentriques d’unité grandissent respectivement. « [Il y a] un seul corps et un seul Esprit, comme aussi avez-vous été appelés pour une seule espérance de votre vocation ». Nul n’entre là, s’il n’est né et baptisé du Saint Esprit. Ce « seul corps existe sans doute sur la terre », mais aussi c’est maintenant une chose réelle et qui vient de Dieu, quelle que soit la gloire qui lui appartienne en propre plus tard. Mais au verset 5, vous avez une unité plus extérieure, la scène de la profession de christianisme — plus étendue que celle de la puissance réelle et spirituelle. Ici, c’est le « Seigneur » qui est proéminent ; et il y en a plusieurs qui « diront en ce jour-là : Seigneur, Seigneur, n’avons-nous pas prophétisé en ton nom… » ?

Dès lors il nous est parlé ensuite d’« une seule foi », et qui signifie la foi chrétienne. Si je parle de la foi dans le sens qu’elle est le moyen par lequel nous saisissons Christ, et que nous sommes sauvés dans la grâce de Dieu, elle n’est jamais appelée une seule foi. Mais la phrase signifie la foi commune que professent tous les chrétiens, par opposition à la religion ou à la loi des Juifs, et à l’idolâtrie des Gentils. D’après cela, les mots : « Un seul Seigneur, une seule foi », sont suivis par « un seul baptême » ; parce que quiconque faisait profession de croire en Christ était baptisé d’eau. Simon le magicien avait reçu Christ de nom, et fut baptisé, quoiqu’il fût bientôt manifesté qu’il n’était nullement un chrétien. Ainsi, le verset 5 nous donne, non l’unité qui est réelle, et sainte, et durable, mais celle de la profession du christianisme.

En dernier lieu, nous avons : « Un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tout, et qui est partout et en vous tous » (v. 6). Il est évident qu’ici nous avons devant nous une étendue plus vaste encore. Il y a une masse immense du genre humain qui ne fait aucune profession de christianisme. La plus grande partie des hommes ont continué à vivre dans leur idolâtrie, malgré la loi et l’évangile. Dieu n’a-t-Il aucun droit ici ? Nous reconnaissons « un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tout, et qui est partout et en vous tous ». C’est-à-dire qu’il s’agit d’un seul Dieu personnellement : ce n’est nullement l’idée que tout est Dieu, ce qui est l’incrédulité dans la pire de ses formes, ou le panthéisme. Nous reconnaissons « un seul Dieu », non une multitude de divinités, à l’exemple des Gentils, mais « un seul Dieu et Père de tous ». Le Juif ne croyait pas que Dieu était le Père de tous, ni même Père, à proprement dire, par rapport à la nation élue, mais plutôt leur gouverneur, savoir, Jéhovah. La révélation chrétienne fait connaître Dieu sous un caractère infiniment plus large, en même temps que plus intime pour nous ; mais plus large aussi, comme embrassant tout l’ensemble des créatures. — « Un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tout, et qui est partout  » (Sa suprématie et Sa providence, mais il y a plus que cela), « et en vous tous ». Il y a Sa connexion intime avec quelques-uns, et non avec tous ; car il n’est pas dit « en tous », mais « en vous tous ». Le Saint Esprit parle ici de la relation particulière du Père avec le chrétien. Rien donc ne saurait être plus complet, ni plus beau, ni plus coordonné que ces développements de l’unité en Christ notre Seigneur, et autour de Lui.

Nous sommes maintenant arrivés à la fin de l’exposé que l’apôtre nous a donné de l’unité de l’Esprit, de la position commune qui appartient à tous les enfants de Dieu qui sont appelés par Sa grâce par le Saint Esprit envoyé du ciel. Nous entrons maintenant dans les manières spéciales dont le Seigneur appelle les divers membres de Son corps à Le servir — non pas tant la position commune qu’ont nécessairement tous ceux qui Lui appartiennent, mais les privilèges et la responsabilité propres à chaque membre de Christ individuellement. C’est ainsi que le septième verset ouvre le sujet : « Mais la grâce a été donnée à chacun de nous, selon la mesure du don de Christ ». Telle est la base. Christ, selon Son propre bon plaisir, comme Tête et Seigneur, donne certains dons. Il est important de remarquer que c’est sous ce point de vue que l’Esprit Saint présente le ministère dans les Éphésiens. Il n’y a personne, je n’ai guère besoin de le dire, qui soit présenté sous un caractère aussi positivement proéminent que Christ. Dans les Corinthiens, au contraire, l’Esprit Saint est plus proéminent que Christ. Les deux aspects sont nécessaires pour la gloire de Dieu, et également parfaits à leur place ; mais ils ne sont pas la même chose. Il y a dans chaque épître la sagesse de Dieu adaptée à l’objet spécial que Dieu Lui-même a en vue.

Il est impossible pour une âme spirituelle de reporter ses regards sur l’épître aux Éphésiens, sans s’apercevoir que la grande vérité qu’elle présente, c’est la plénitude de bénédiction qui appartient à l’Église en vertu de son union avec Christ. Cela, par conséquent, place Christ en relief. D’un autre côté, nous ne pouvons étudier l’épître aux Corinthiens, et particulièrement la partie de cette épître où le sujet des manifestations spirituelles est traité, sans voir qu’il ne s’agit pas tant de Christ haut élevé à la droite de Dieu, que de l’Esprit Saint envoyé ici-bas. La conséquence en est que, dans les Corinthiens, nous avons plutôt l’Assemblée sur la terre et la personne divine à qui il a plu d’y habiter et d’y opérer. Ainsi l’Esprit Saint y est mis en vue ; tandis que dans les Éphésiens, c’est Christ, comme la Tête de l’Église, qui est toujours regardé comme Celui qui donne ces dons. Et même il n’y a aucune partie de l’Écriture où l’Esprit Saint soit représenté, à proprement parler, comme Celui qui donne ; et je doute beaucoup, avec un autre, que l’expression : les dons de l’Esprit, soit une phrase exacte. Vous pourrez trouver dans Hébreux 2, 4, un texte qui semble l’impliquer, mais c’est : « les distributions de l’Esprit Saint ». Partout où il est parlé simplement et distinctement de donner, c’est Christ qui est regardé comme Celui qui donne. C’est ainsi que notre Seigneur Lui-même dit de ce qui est à la source de tout : « L’eau que je lui donnerai sera en lui une fontaine d’eau », etc. L’eau ici représente l’Esprit Saint. Ainsi dans cet endroit, l’Esprit est envisagé comme le don, et Christ est Celui qui donne. Et de même que la chose est vraie à l’égard de cette grande vérité fondamentale, savoir, la présence de l’Esprit Saint Lui-même, elle l’est aussi de tous les détails. Christ, la Tête de l’Église, agit dans les membres individuellement selon Sa propre affection pleine de bonté ; car c’est là le côté béni de la vérité, qui est présenté ici. « La grâce a été donnée à chacun de nous, selon la mesure du don de Christ ». L’apôtre parle de dons pour le ministère ; mais cela est appelé « grâce » ici, parce que ce qui est envisagé l’est moins comme une position d’autorité (bien que quelques-uns de ces dons l’impliquent), que comme la position de Celui qui aime l’Église et qui a soin de chacun de ses membres ; et Il ne peut manquer de fournir tout ce qui est convenable, et digne de Lui-même et de Son amour. « La grâce a été donnée à chacun de nous, selon la mesure du don de Christ ».

Or ceci conduit à une autre remarque d’une nature générale. L’épître aux Corinthiens vous a donné un champ plus vaste dans lequel l’Esprit Saint est présenté comme opérant ; vous avez des miracles — des langues — des dons de guérison — les manières remarquables dont l’Esprit Saint opère par une puissance extérieure. Tout cela est omis ici. À quel principe devons nous l’attribuer ? Car Dieu ne fait rien arbitrairement, mais toujours avec un amour et une sagesse dignes de Lui-même, et avec l’intention assurément que nous en profitions. Quant à ce qu’Il n’a pas révélé, il ne nous convient pas de le sonder ; mais ce qu’Il a fait connaître dans Sa Parole, nous sommes évidemment libres, tenus même de chercher à l’apprendre simplement et avec reconnaissance. Pourquoi donc avons-nous aussi les opérations plus permanentes de l’Esprit dans les Corinthiens ? Et pourquoi, en écrivant aux Éphésiens, l’apôtre omet-il les manifestations extérieures pour ne parler que de celles qui concernent le progrès de l’âme, la fondation de l’Église et la continuation de l’œuvre, le maintien, dans la sainteté, du progrès et de la communion, et de l’ordre selon Dieu, parmi les enfants de Dieu ? Car c’est à cela seul que les déclarations du chapitre s’appliquent. La clef se trouve, je crois, dans ce que nous avons déjà indiqué. Dans les Corinthiens, la pensée saillante, c’est l’Esprit Saint présent dans l’Église, et tout ce qu’Il fait est mis devant nous. Et comme l’Esprit Saint peut opérer d’une manière extraordinaire, et qu’Il est la puissance qui produit ce qui est sensiblement surnaturel aussi bien que ce qui répond aux besoins de l’âme, il en résulte que tout nous y est présenté. Mais dans Éphésiens, où Christ est envisagé dans une relation immédiate à l’Église, et où il s’agit de Son amour, et du soin pour les membres de Son corps qui découle de cet amour, il est clair que tout ce qui a seulement trait au monde et constitue un témoignage pour les non-croyants, ne serait pas nécessaire, mais superflu : il n’y a que ce qui concerne les membres de Christ, qui soit à sa place et de saison. Oh ! si nous avions seulement plus de patience et plus de confiance en Dieu et en Sa Parole, nous trouverions la réponse à toutes les difficultés dans le temps convenable. Dieu reconnaît la confiance du cœur qui compte sur Lui. En examinant une portion spéciale à la lumière du livre entier où elle se trouve, combien souvent nous discernons ce qui nous donne le vrai fil pour en trouver la signification.

Mais avant de considérer les dons eux-mêmes, je désire d’abord attirer l’attention sur ce qui est d’une importance et d’un intérêt encore plus profonds, la base sur laquelle repose le fait que Christ confère ces dons. Car nous avons tous immensément souffert de vues purement traditionnelles sur le ministère, le regardant en général comme une profession honorable parmi les hommes, ou comme une position à laquelle se rattache un certain caractère. Ces choses faussent entièrement la nature du ministère ; et la conséquence en est que la pleine bénédiction, comme le sens complet du mot, est perdue d’autant pour l’âme. Comprenez-moi bien. Je ne nie pas que Dieu agisse là où il y a beaucoup de ce qui est antiscripturaire. Il fait tout bien, et la chute de l’Église, ou de nous-mêmes individuellement, ne peut porter atteinte à la bonté souveraine de Celui qui veille, en vue de bénir, sur tous les membres de Christ et sur chacun d’eux. Mais alors Il permet que les manquements se montrent, et Il permet que nous en souffrions les conséquences afin de nous humilier et de nous faire sentir que tout le bien vient de Lui et que tout le mal vient de nous-mêmes. Dans toute l’histoire de la chrétienté, ces deux choses se montrent : — l’homme corrompant sa voie sur la terre, et Dieu se manifestant au-dessus du mal que Sa lumière juge. Cela est vrai du ministère comme de toute autre chose.

Dès lors si nous considérons l’Écriture, et que nous voyions la base sur laquelle le ministère repose, nous trouverons que rien ne peut être plus glorieux ; mais, hélas ! rien de plus contraire à ce qui en prend ordinairement la forme parmi les hommes. Car sa base n’est rien moins que la rédemption que Christ a accomplie par Son sang, et Son ascension au ciel. Le ministère chrétien dérive de Christ à la droite de Dieu ; il n’existait pas auparavant. Je ne nie pas que Dieu eut Sa manière d’agir en Israël. Mais là Ses voies revêtaient plus le caractère de sacrificature ; or le ministère, en son caractère, diffère totalement de la sacrificature. La sacrificature terrestre était une caste d’hommes qui avaient affaire à Dieu, en faveur de ceux pour qui ils étaient sacrificateurs : c’est-à-dire qu’ils étaient chargés des affaires spirituelles de personnes qui étaient, pour une raison ou une autre, incapables de les régler avec Dieu directement, et dépendaient par conséquent de ces médiateurs entre Dieu et elles. Le sacrificateur entrait où le peuple ne pouvait entrer ; il entrait dans le lieu saint, il présentait le sang, il brûlait le parfum, il avait affaire à Dieu, en un mot, pour tous les besoins spirituels de ceux qu’il représentait. Le ministère part d’une base tout à fait différente, étant une action, par le moyen de l’homme, de la part de Dieu envers l’homme, et non de la part de l’homme envers Dieu. Les deux choses sont le contraste complet l’une de l’autre. Quant au serviteur de Dieu, s’il s’agit vraiment de quelqu’un que Dieu suscite, qui a un message de Sa part et une œuvre à faire pour Lui, ce message ou cette œuvre est en vertu de l’autorité de Dieu pour la bénédiction des hommes. Ainsi donc, si vous prenez un évangéliste, qu’est-il ? Quelqu’un qui est lui-même enseigné de Dieu pour les besoins de sa propre âme, qui non seulement connaît la voie du salut, mais possède une puissance qu’il n’avait pas auparavant et qui lui est donnée par Christ pour agir sur les âmes des autres. Tout chrétien devrait pouvoir confesser la vérité, confesser Christ ; toutefois cela ne suffit pas pour en faire un évangéliste ; mais il s’agit de proclamer l’évangile de manière à agir puissamment sur les âmes, spécialement sur celle des inconvertis, et ainsi à réveiller, à éclairer, ou à établir dans la grâce de Dieu. L’action spirituelle est par l’Esprit Saint ; mais elle vient de la part de Dieu et de Son Fils bien-aimé, Christ notre Seigneur, et s’adresse à l’homme. Ainsi le don, sous la main du Seigneur, est exercé en amour pour les âmes pour chercher leur bien, et il implique une puissance venant d’en haut pour agir sur elles, ou plutôt il est cette puissance.

Prenez encore le don d’enseigner. Là vous avez une autre forme de la puissance de Dieu. Il en est beaucoup qui comprennent la vérité pour la jouissance de leur propre âme, mais ils ne peuvent aider les autres : ils sont incapables de placer la vérité par des paroles convaincantes devant ceux qui croient, ou d’agir sur les affections, de manière à faire pénétrer dans l’âme la vérité dans sa force. Lorsque cela se fait, c’est le don d’enseigner. Mais j’y ai seulement fait allusion dans le but de présenter le contraste entre la nature de la sacrificature et le ministère, et de montrer que la confusion de ces deux choses est une conséquence lamentable de l’état de l’Église. Si les gens vont entendre un sermon, ils disent qu’ils vont au culte. Les hommes sont tellement habitués à confondre l’enseignement avec le culte, que l’on suppose que ces deux choses sont comprises l’une dans l’autre.

J’admets qu’il y a une telle chose que la sacrificature chrétienne : néanmoins le ministère en est totalement distinct. Tous les chrétiens, sans exception — hommes, femmes et enfants — sont sacrificateurs ; car le sacrificateur est celui qui a une vocation et un titre venant de Dieu, qui lui donnent accès à la présence de Dieu. La sacrificature, en un mot, donne à l’âme le droit de s’approcher de Dieu. C’est là toujours son caractère distinctif. De l’autre côté, le ministère dans la Parole est un service varié ; mais ce n’est que par des membres particuliers du corps que Christ agit ainsi pour le bien de tous. Dès lors, tandis que la sacrificature est universelle, et que nul ne peut être chrétien sans être sacrificateur, ce n’est que quelques-uns parmi la masse, qui sont ce que l’Écriture appelle ministres de la Parole, ou serviteurs publics de Christ. Je ne parle pas ici du sens vague dans lequel tous devraient être occupés à servir Christ tous les jours de leur vie ; mais il s’agit maintenant du ministère de la Parole proprement dit ; et il est clair que tous n’ont pas la puissance pour prêcher la Parole de Dieu profitablement pour l’âme des autres. La grande masse des enfants de Dieu ont besoin que le sentier que Dieu trace leur soit signalé, et que leurs difficultés soient levées ; or traiter ces choses comme il convient, dépend du ministère, ou plutôt constitue le ministère, sous une forme ou une autre.

Le ministère donc, comme nous l’avons déjà dit, s’adresse à l’homme de la part de Dieu ; la sacrificature s’adresse à Dieu de la part de l’homme. Quand nous sommes réunis pour adorer Dieu, ce n’est pas l’exercice du ministère, mais de la sacrificature. Il se peut qu’un ou plusieurs de ceux qui y prennent part soient ministres ; mais pour le moment ils n’exercent pas leur ministère, mais adorent. Le culte est l’exercice de la sacrificature chrétienne, l’acte d’offrir des louanges et des actions de grâces. Il s’adresse à Dieu de la part de l’homme — c’est la direction de la sacrificature. Dès lors, quand il y a un élan de louanges et d’actions de grâces, vous avez le caractère le plus élevé de la sacrificature. L’intercession et la prière sont une forme moins élevée, quoique l’intercession soit une chose vraiment bénie, parce qu’elle s’occupe des besoins d’autrui. Mais, pour parler strictement, le culte consiste plutôt en louanges et actions de grâces ; c’est pour cela que la cène du Seigneur, l’eucharistie, forme une partie si centrale du culte chrétien. C’est là ce qui appelle si puissamment nos âmes, dans une joie solennelle, à se souvenir de Jésus, et à rendre grâces à Dieu. De là vient aussi, quoique la participation au pain et au vin ne puisse sans doute pas être regardée en elle-même comme le culte, que c’est là néanmoins ce qui agit sur l’âme et attire le cœur, par l’Esprit Saint, dans le culte rendu à Dieu. Lorsque la cène du Seigneur est regardée comme un moyen de grâce, les personnes y ont recours pour leur consolation, ou du moins dans l’espérance de la trouver. Elle n’est jamais ainsi présentée dans la Parole de Dieu. Au contraire, elle montre que si les communiants n’entraient pas dans la pensée de Dieu dans la cène (c’est-à-dire s’ils ne distinguaient pas le corps du Seigneur), elle devenait pour eux un moyen de jugement. « Celui qui mange et qui boit indignement, mange et boit un jugement contre lui-même, ne distinguant pas le corps du Seigneur ». Ceci indique, non de faux chrétiens, mais des chrétiens, quelque réels qu’ils fussent, qui prenaient la cène du Seigneur dans un esprit de légèreté et sans se juger soi-même. Lors donc qu’une âme marche dans un péché connu, et vient à la table du Seigneur, l’effet en est que la main du Seigneur est étendue d’une manière ou d’une autre ; et il est impossible d’échapper quand on agit ainsi légèrement avec Dieu. De plus, si quelqu’un se plaçait en dehors pour éviter cela, il proclamerait son propre péché, et pratiquement il s’excommunierait. Ainsi une âme n’a rien à faire, sinon de se porter franchement et de regarder à Dieu pour la grâce dont elle a besoin pour veiller contre le péché, même contre les moindres mouvements du péché, et, en se jugeant soi-même, de s’appuyer sur le Seigneur, qui seul peut nous fortifier pour marcher d’une manière digne de Lui. À une telle âme s’adresse cette parole : « Qu’ainsi il mange ». Ce n’est pas : Qu’il s’abstienne ; mais  : Qu’il se juge soi-même et qu’il vienne.

Ainsi donc, ces deux choses, le culte et le ministère, ne devraient jamais être mêlées l’une avec l’autre. Une parole peut être prononcée à la table du Seigneur, qui aide à la communion des saints ; mais on ne pourrait guère appeler cela l’exercice ordinaire du ministère. Un discours régulier y serait, selon moi, bien irrégulier : il détournerait de l’objet principal qui est dans l’intention du Seigneur. Un certain développement des affections de Christ peut y trouver place, ou même il peut y avoir plus encore dans des circonstances particulières, telles que le cas de la visite de quelqu’un pour un temps limité, comme celui où Paul prolongea son discours jusqu’à minuit. Mais comme la cène du Seigneur n’a pas de connexion avec le ministère, mais plutôt avec le fait que les saints se souviennent de leur Seigneur, et avec leur culte quand ils se réunissent pour Le louer, il est clair que l’exercice formel du ministère, proprement parlant, trouve sa place non à la table du Seigneur, mais ailleurs. Quelques paroles propres à réveiller les affections de l’âme et à les concentrer sur Christ dont nous nous souvenons, sont tout à fait convenables et de saison, si le Seigneur dirige ainsi les choses ; mais il est important de voir la place, et l’ordre, et le but de ces deux choses d’après la Parole. Dans le ministère, vous avez le Seigneur qui pourvoit à la provision spirituelle pour les besoins de Son peuple. Et sur quoi cela est-il fondé ? Sur le fait que Christ est monté en haut comme Tête, ayant d’abord aboli le péché et glorifié Dieu sur la terre ; et depuis Sa place actuelle dans la gloire céleste Il communique les dons nécessaires. À quel titre Christ a-t-Il pris Sa place ? Ce n’est pas comme Dieu, ni simplement comme homme. Ce n’est pas non plus que Christ soit entré en la présence de Dieu, parce que Satan n’avait pas pu Le toucher lorsqu’Il fut tenté en toutes choses. Il y eut une scène plus solennelle encore — la grande heure pour laquelle Il était venu — l’acte de porter le péché — la croix, où Il prit sur Lui la charge de tous les manquements, de mes péchés et de vos péchés. C’est ce qu’Il a fait. Christ a uniquement pris Sa place à la droite de Dieu sur ce fondement qu’Il a aboli le péché par le sacrifice de Lui-même. C’est sur cette base que le ministère est fondé. Le juste jugement de Dieu a été porté et maintenu ; le péché et Satan sont complètement vaincus pour nous par Christ. Le témoignage de la grâce divine, sa plénitude même, peut maintenant, sans empêchement, être la portion du croyant. La victoire pour Dieu en faveur des pécheurs les plus coupables est gagnée. Et Christ a pris Sa position dans la place la plus élevée dans le ciel comme l’homme victorieux. Comme tel Il a porté l’humanité jusqu’au trône de Dieu, et Il est là, comme homme, assis bien au-dessus des anges, des principautés, et des puissances. C’est de là qu’Il donne ces dons.

Ainsi donc, le ministère chrétien doit son origine même à ceci — la pleine rémission des péchés de la part de Dieu et la glorification céleste de l’homme en la personne de Christ. Ce sont les fruits et les témoins d’une victoire complète. Néanmoins tout cela est donné à connaître à la foi, et uniquement à la foi, sinon en tant que les miracles autrefois étaient un signe aux incrédules. Quelle en est la conséquence ? L’homme continue dans le péché. Satan rôde encore ça et là comme un lion rugissant, cherchant qui il pourra dévorer. Le jugement de Dieu est suspendu sur le monde. Quelle est donc la valeur de la mort de Christ et de Sa victoire ? Elle est immense, mais immense seulement pour ceux qui croient en Christ ; et par conséquent, au milieu de ce monde ruiné, et pendant que le péché et Satan sont là, le jugement de Dieu suspendu sur le monde, il y a ce merveilleux lien entre Celui qui est assis à la droite de Dieu et ceux qui étaient autrefois de pauvres pécheurs perdus aux yeux de Dieu. Il envoie des dons ici-bas ; Il appelle celui-ci et celui-là, et en fait les témoins de Sa puissance, de la puissance de Celui qui a conquis tout cela et plus encore ; qui n’a, en un mot, rien laissé inaccompli de ce qui est nécessaire pour la gloire de Dieu et la bénédiction de l’homme. Le monde n’entend le son que pour mépriser la bonne nouvelle, et même l’enfant de Dieu voit la chose obscurément s’il raisonne sur elle ; mais si je crois ce que Dieu me dit avoir été fait par Son Fils bien-aimé, je devrais savoir que toutes ces choses sont ôtées, en tant qu’elles étaient entre mon âme et Dieu, avec une certitude aussi simple que si elles n’avaient jamais existé du tout. Je devrais être aussi sûr que le péché a été effacé, que si je n’avais été coupable d’aucun péché — que Satan est aussi complètement jugé, que s’il était dans l’étang de feu — que le juste jugement de Dieu est complètement arrêté, et qu’il ne reste plus rien pour moi que Sa grâce. Cela est vrai de tous Ses enfants. C’est la seule chose qui soit convenable pour un chrétien, parce que c’est ce dont Dieu fait provision pour lui. Dieu n’avoue pas les personnes chrétiennes dans leur trouble et leur hésitation sur la question si tout est accompli pour eux. Douter que tout ce que Christ a entrepris soit réglé en leur faveur, c’est pratiquement nier la rédemption ; et si tout cela est accompli et accepté, que me faut-il de plus ? Christ ne savait-Il pas beaucoup mieux que moi-même ce qu’il fallait ? Dieu ne sentait-Il pas ce qui était dû à Sa sainteté plus que vous ou moi ? Et pourtant Celui qui était et qui est Dieu, a dit : « C’est accompli ». Qui suis-je ou que suis-je pour en douter ? Je dois donc à Christ de rendre ce témoignage.

Le ministère est fondé sur l’œuvre et l’exaltation de Christ. Sans doute les douze et les soixante-dix furent envoyés avant que Christ fût élevé à la droite de Dieu, mais leur mission durant les jours de la chair de Christ, se trouve exclue dans Éphésiens 4. Sans doute les apôtres sont mentionnés, mais non en vertu de leur appel pendant qu’Il était le Messie sur la terre. Au contraire, « étant monté en haut, il a emmené captive la captivité, et a donné des dons aux hommes ». Ce n’est pas que ceux qui avaient été établis apôtres quand Christ était ici-bas, n’aient pas été introduits aussi dans cette nouvelle place, à l’exception de Judas ; mais le fait qu’ils sont apôtres de l’Église est fondé sur ceci, qu’ils ont reçu ce don de Christ après qu’Il fut monté en haut. C’est pourquoi il est dit ici : « Et lui, a donné les uns apôtres ». Pourquoi y en avait-il eu douze ? Par rapport aux douze tribus d’Israël ; et dès lors, quand notre Seigneur les envoya, Il leur défendit d’entrer dans aucune ville des Gentils. Mais quant aux apôtres de l’Église, ne sont-ils envoyés que vers les Juifs ? Tout le monde sait qu’il n’en est pas ainsi. Après que Christ eut été crucifié, les liens avec Israël furent rompus. Le Fils de l’homme, après avoir été rejeté et avoir souffert, monte au ciel, et depuis Sa gloire céleste, Il envoie ici-bas l’Esprit Saint, et appelle des âmes hors du monde dans la souveraineté de la grâce, les constitue membres de Son corps, et les revêt de puissance pour Le servir, de quelque manière qu’il Lui semble bon, à Lui-même.

D’après cela, ce qu’on appelle succession, se trouve complètement écarté. Dans la sacrificature judaïque il y avait un ordre de succession, et tout ministère terrestre se forme sur ce modèle. Mais le ministère chrétien n’est pas d’institution humaine, mais divine dans le sens le plus complet ; et par conséquent toute la source des pensées de l’homme sur ce sujet est une illusion manifeste et totale. Devons-nous abandonner la Parole de Dieu qui est claire, pour les opinions passagères des hommes ? S’il en est ainsi, je ne connaîtrai jamais aucune certitude que ce soit. Le dissident dira qu’une église doit appeler un homme pour être son ministre. Il peut avoir un don de ministère de la part de Christ, et être ce don ; mais ce qui fait d’un homme le ministre d’une congrégation, c’est l’appel de la congrégation elle-même. Ainsi cela est fondé sur l’élection par une église particulière de celui qu’elle veut avoir comme son ministre. Il est de leur choix, et par conséquent leur ministre. Mais que dire, s’il n’y a pas une telle chose dans l’Écriture ? Que dire, si une telle idée est étrangère à la Parole de Dieu ? Il n’y a pas même une allusion à cela, que l’on puisse y trouver. Nous voyons la nomination d’hommes pour avoir soin des fonds et des pauvres, et cela avec le concours de l’assemblée. Personne ne devrait entreprendre une telle œuvre à moins qu’il n’eût le juste sentiment de la satisfaction de toute l’assemblée chrétienne. L’Église donne ce qu’elle peut, et par conséquent Dieu lui donne le droit de désigner les personnes à qui elle veut confier le soin des choses, c’est-à-dire à ceux qui administreront les affaires extérieures de l’Église. Mais dans les dons spirituels, dans l’enseignement, la prédication, l’exhortation, le gouvernement, l’Église peut-elle donner ? Évidemment non. La Parole de Dieu ne renferme nulle part une telle notion que l’Église choisissant ou nommant, excepté à l’égard de dons comme ceux que l’Église peut donner. L’Église donne de l’argent, et elle peut nommer des personnes pour l’administrer. L’Église ne donne pas des dons de ministère, et n’a ni droit ni qualité pour intervenir. Qui les possède ? C’est Christ seul qui donne, comme nous lisons ici : « Selon la mesure du don de Christ ». « Étant monté en haut, Il… a donné des dons aux hommes… les uns apôtres, les autres prophètes ». Cela exclut, même de la part de la vraie Église de Dieu, toute prétention à nommer ; et si la chose est examinée, vous verrez comme l’histoire scripturaire s’accorde avec le principe et le confirme. Qui choisit Matthias, sinon le Seigneur ? Qui nomma Pierre et les autres ? Qui s’adressa à la multitude au jour de la Pentecôte ? Ce ne pouvait être l’Église, car l’Église ne fut formée que ce jour-là. Pierre prêcha, et par sa prédication l’Église fut rassemblée. Ce fut le Seigneur qui amena ainsi ceux qui devaient être sauvés ; de sorte que le ministère précède l’Église, comme l’expiation et l’ascension de Christ précédèrent le ministère. Le Seigneur, depuis Sa place en haut, appelle les vaisseaux de Sa grâce, communique la puissance, conduit en avant par la direction de Son Esprit, agissant par toutes les circonstances et les réglant, de manière que Ses serviteurs puissent — plus ou moins fidèlement — être occupés à faire Son œuvre. La conséquence en est que des âmes sont rassemblées et que l’Église est formée. Ainsi le ministère dans la Parole ne dérive jamais de l’Église, mais de Christ, et l’Église en est le résultat. Le ministère est par conséquent antérieur à l’Église, au lieu d’être fondé sur son autorité. C’est ainsi que vous voyez mis de côté, non seulement le principe dissident de l’élection populaire, mais toutes les autres inventions humaines. Ce ne furent pas les apôtres, mais ce fut Christ qui donna les dons. Or a-t-Il cessé de les donner ? Est-Il encore à la droite de Dieu ? Alors, je le demande, est-Il là comme la Tête de l’Église ? Ne demeure-t-Il pas maintenant aussi parfaitement et efficacement la Tête de l’Église qu’avant le jour de la Pentecôte ? Il était là alors, amenant l’Église à l’existence ; et maintenant Il y est pour perpétuer l’Église et fournir à tous ses besoins. Il est aussi impossible, par conséquent, que le ministère vienne à manquer, qu’il l’est que Christ quitte la droite de Dieu avant que le corps soit complet. Mais Il est là comme Celui qui donne tous les dons nécessaires ; et l’exercice de ces dons est ce que nous appelons ministère.

Mais si nous regardons plus loin, il y a une bien magnifique parenthèse de l’apôtre sur ce sujet. « C’est pourquoi il dit : Étant monté en haut, Il a emmené captive la captivité, et a donné des dons aux hommes ». C’est-à-dire qu’Il a emmené captifs ceux qui avaient emmené 1’Église captive. Nous étions emmenés captifs par le diable, et Christ en montant en haut a passé d’une manière triomphante au-dessus de la puissance de Satan. Les esprits déchus furent complètement défaits, et cela par Christ comme homme. L’homme a vaincu Satan en la personne de Christ, et nous pouvons regarder en haut comme ceux qui sont un avec Celui qui a défait Satan. Nous ne devrions jamais traiter avec Satan comme s’il avait du pouvoir sur nous. Nous avons toujours le droit de dire à Satan, quand nous le découvrons, de s’éloigner de nous. Nous pouvons et nous devrions toujours lui résister ; et il nous est dit que, si nous le faisons, il s’enfuira de nous ; non parce que nous sommes forts, mais parce que Celui auquel nous appartenons s’est acquis la victoire par la mort et nous l’a donnée. « Or qu’il soit monté, qu’est-ce, sinon qu’il est aussi descendu dans les parties inférieures de la terre ? ». Cela suppose la gloire de Sa personne. Celui qui est monté est Celui qui est premièrement descendu.

C’est même là le principe constant de Dieu ; Il est toujours le premier à descendre. Nous avons besoin d’être élevés, et nous n’avons rien qui soit à nous, d’où nous ayons à descendre : Christ, étant Dieu, était le seul homme qui eût une gloire propre à Lui-même et au-dessus de tout ce qui est créature. Il descendit premièrement dans les parties inférieures de la terre. Son humiliation même est la preuve de Sa propre dignité personnelle. Depuis Sa suprématie naturelle, pour ainsi dire, Il descend premièrement pour faire Son œuvre ici-bas. « Celui qui est descendu est le même que celui qui est monté au-dessus de tous les cieux, afin qu’il remplît toutes choses ». Nous avons donc ici une vue magnifique de notre Sauveur. L’Esprit Saint nous donne, dans deux courts versets, la vaste étendue de la gloire et du triomphe de Celui qui condescendit à devenir un homme et un serviteur. Celui qui est monté maintenant est le même que Celui qui premièrement descendit, et qui ne voulut remonter dans la gloire qu’après qu’Il eut complètement aboli tout ce qui nous aurait nécessairement tenus pour toujours loin de Lui. Mais Il descendit pour l’abolir, et ne voulut pas remonter en haut avant de l’avoir accompli. Il nous a tant aimés, d’un amour qui est selon les glorieux conseils de Dieu, que nos péchés, tout grossiers et funestes qu’ils étaient, ne firent que Lui donner l’occasion de montrer ce que Dieu est, et ce qu’Il est pour nous, en Sa propre personne. Et maintenant il s’agit de la justice de Dieu, non seulement envers Lui, mais envers nous, à cause de Lui. Quelle différence ! Il pourrait descendre en Son amour, mais ce fait en soi ne nous eût pas donné une place en la présence de Dieu ; mais Il est monté en justice ; et c’est là la raison pour laquelle notre Seigneur dit, que quand l’Esprit serait venu, Il convaincrait le monde de justice, « parce que je m’en vais à mon Père ». Vous avez la pleine manifestation de justice maintenant en Christ assis à la droite de Dieu. Justice envers Lui dans ce monde, c’est ce qu’on ne trouva nulle part, mais au contraire l’injustice et l’iniquité les plus iniques. Où me faut-il chercher cette justice ? À la droite de Dieu. J’y vois Celui envers lequel Dieu, pour parler avec révérence, est redevable pour la manifestation et le maintien de Sa gloire morale, auquel Il doit la seule expression adéquate de tout ce qui manifestait et maintenait Son caractère devant les hommes — savoir, dans l’homme Christ Jésus. Dieu n’eut jamais Son caractère justifié d’une manière vraiment complète depuis que le péché était entré dans le monde, jusqu’au moment où Christ mourut sur la croix. Lorsque Son sang fut répandu pour la gloire de Dieu et la délivrance de l’homme, Dieu fut manifesté sous un nouveau jour devant le monde. Dieu n’était plus regardé comme étant un maître dur, ainsi que le mensonge de Satan L’avait faussement représenté. Le voile était déchiré ; la vérité ne pouvait plus être cachée, qu’il n’y avait aucune preuve d’amour que la créature aurait pu demander de Dieu, que Dieu n’eût surpassée en Son Fils, mort, ressuscité, et glorifié dans le ciel. Jusqu’à la mort de Christ, la justice de Dieu devait nécessairement détruire toute créature qui avait sur elle un seul péché. Maintenant, au contraire, c’est la justice de Dieu, de me justifier, moi croyant, bien que j’aie été un vil pécheur ; et voici pour quelle raison, c’est que, quoique mes péchés dans un plateau de la balance dussent me plonger, à moi seul, jusques dans l’enfer, toutefois il y avait, dans l’autre plateau, Christ et Son sang, l’emportant de beaucoup sur tout cela, et m’élevant jusque dans le ciel. Quelle en est la conséquence ? Mes péchés ont complètement disparu devant ce sang précieux, et le plateau de Christ se manifeste comme étant le seul qui conserve son poids devant Dieu. C’est de là que dépend la justice même de Dieu. Il n’est plus question de justice légale ; mais maintenant Dieu a Christ, et il s’agit de ce que Dieu doit à l’obéissance de Christ jusqu’à la mort, la mort même de la croix ; en vertu de quoi Dieu avec justice décharge le coupable, ce qu’Il ne pourrait faire en aucune manière s’Il agissait à son égard selon la loi. Comme nous lisons : « De tout ce dont vous n’avez pu être justifiés par la loi de Moïse, quiconque croit, est justifié par lui ». Ce qui était connu de Dieu dans la création ne renfermait aucun remède pour le péché ; ce qui était connu de lui sous la loi, n’aurait fait que détruire le plus faible espoir du pécheur. Maintenant, au contraire, plus je vois ce que Dieu est en la croix de Christ, plus j’ai de confiance et de paix. « C’est ici la vie éternelle, qu’ils te connaissent seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ ».

Nous voyons donc dans ces versets la source céleste du ministère. Ce n’est pas une position qui, dans la pensée de Dieu, donne de l’importance dans le monde. L’ouvrier, nous le savons tous, est digne de son salaire. Mais ne voyez-vous pas que l’apôtre Paul ne voulait point user du droit que l’évangile lui donnait d’être soutenu dans ses besoins ? Il ne voulait pas voir quelqu’un anéantir ce qu’il appelle sa gloire ; car quoiqu’il eût ce droit, il préférait travailler de ses propres mains, plutôt que d’être à charge à personne. Et c’est là la merveilleuse liberté de la grâce : sous la grâce il n’y a rien que nous ne puissions faire, sinon pécher. Mais quoique toutes choses soient permises, elles ne sont pas toutes avantageuses ; et ce fut sans doute selon la sagesse de Dieu que le grand apôtre fit ce que bien des serviteurs de Christ auraient honte de faire. Quel terrible déclin il y a aussi bien quant à tout l’esprit du christianisme, que quant à la lettre ! Quel changement complet quant au caractère de l’évangile, que les hommes — protestants ou catholiques, nationaux ou dissidents, presbytériens ou wesleyens — considèrent également comme une tache ou un sujet de censure ce qui faisait la gloire de l’apôtre ! Il y avait un principe important impliqué dans sa conduite. Il reçut un don des Philippiens ; des secours lui furent envoyés en prison aussi bien que hors de prison. Il recherchait du fruit qui abondât pour le compte des saints. Si l’apôtre n’avait pas, dans certaines occasions, reçu quelque chose d’eux, c’eût été une perte pour leurs âmes. Le christianisme n’entend pas que les saints emploient pour eux-mêmes ce qu’ils doivent à Dieu, et ce que la grâce aime à faire pour tous et pour quelqu’un en particulier. Mais l’apôtre n’agissait jamais de manière que l’on pût dire, soit qu’il se servait lui-même par le moyen de l’évangile, ou qu’il était indifférent à l’égard des saints. Dieu eut soin qu’il en fût ainsi dans le cas de Paul. Il y aurait eu le danger de mépriser les dons qui étaient moindres. Mais les efforts de l’apôtre, dans un esprit de grâce, tendaient à maintenir les dons qui étaient moindres ; ceux qui étaient plus grands avaient moins besoin de son ample égide. Mais quand il s’agissait de ceux qui s’étaient voués au service de l’évangile, l’apôtre prend le plus grand soin d’affirmer leur droit de vivre de l’évangile. Que ceux qui vivent ainsi aient soin qu’en cela ils servent Christ le Seigneur !

« Et Lui, a donné les uns apôtres, les autres prophètes ». Je conçois que l’apostolat et la prophétie soient manifestement ce que l’on pourrait appeler les dons fondamentaux, tels que Dieu les a institués afin de jeter de larges et profondes assises sur lesquelles l’Église fût bâtie. Cette œuvre fut faite par ceux que Dieu avait revêtus de puissance d’une manière spéciale. Les apôtres et les prophètes furent les deux classes qui entrèrent les premières de toutes comme instruments dans l’appel de l’Église de Dieu. Les évangélistes furent à l’œuvre dès les premiers jours, les pasteurs aussi bientôt après ; mais les deux premières catégories, les apôtres et les prophètes, étaient tout particulièrement dans la plénitude de leur force à la fondation originale de l’Église de Dieu. Il n’y a pas de motif pour supposer que, dans le sens strict, il devait continuer d’y avoir des apôtres et des prophètes, ou que la chose a continué ainsi de fait, bien qu’il puisse être suscité en temps convenable quelque don analogue à celui d’apôtre. Prenez Luther, par exemple. Il y a eu de son temps et par son moyen, d’une manière générale, un rappel partiel des saints de Dieu à la vérité fondamentale qu’on avait négligée et comme perdue depuis longtemps. Cette œuvre correspond, dans une petite mesure, à ce que faisait un apôtre. Un prophète, à son tour, était un serviteur qui n’exposait pas les Écritures purement et simplement, mais qui faisait pénétrer la vérité d’une manière telle que l’âme en était directement rattachée à Dieu.

Dès le tout premier commencement, il apparut des hommes de Dieu qui n’étaient pas apôtres, ni des organes de la vérité nécessairement inspirés, tels que Marc et Luc, mais des prophètes comme Judas et Silas (Act. 15, 32). Les Écritures n’étaient pas écrites toutes lorsque l’Église commença, et les apôtres n’étaient pas partout. En conséquence, Dieu suscitait des prophètes qui, en certains cas du moins, étaient des moyens de révélation. Et si l’on demande pourquoi nous ne possédons pas aujourd’hui de tels canaux de bénédiction, nous répondons que c’est parce que la révélation est complète : nous avons la Parole de Dieu, et n’avons pas besoin d’une parole de plus. Supposer aujourd’hui quelque autre révélation, ce serait porter atteinte à celle que nous possédons ; de sorte que le besoin qu’il y avait de ces prophètes dans le sens le plus élevé a pris fin avec l’achèvement du canon des Écritures ; ce qui dans un sens secondaire répondrait à l’œuvre prophétique dont il s’agit, ce serait le réveil des saints en général, et une action puissante exercée sur eux, par un ministère qui mettrait de nouveau en lumière des vérités jadis révélées, mais complètement disparues. Prenez, par exemple, la grande vérité de la venue du Seigneur en tant que l’espérance de l’Église. Cette vérité a souffert une longue éclipse, une éclipse presque totale. De nos jours elle a brillé de nouveau avec une certaine mesure de puissance de la part de Dieu. Dans quel écrit, depuis les jours des apôtres, pourriez-vous trouver exposés la nature et l’appel de l’Église, ce qui constitue son espérance propre, et la venue du Seigneur pour la recevoir et lui donner une place céleste ? Ces vérités s’étaient évanouies devant les pensées des hommes, jusqu’à ce qu’elles aient été restaurées dans ces derniers quarante ou quarante-cinq ans. La justification par la foi avait été connue en partie par Augustin et Bernard. Les Vaudois possédaient une grande fidélité, mais non une doctrine pure ; mais ce qui concerne la nature de l’Église comme étant le corps de Christ et le caractère propre de l’espérance du chrétien, tout avait été, pour autant que je sache, complètement perdu de vue. Ces vérités avaient disparu de l’Église, et il me semble que leur rétablissement est assez analogue, dans ce point-là, à l’œuvre que faisaient les prophètes, bien qu’on pût hésiter à appeler apôtre ou prophète le serviteur qui y serait employé.

Quand nous en venons aux classes suivantes de dons, « évangélistes, pasteurs et docteurs », il est évident que nous les trouvons encore à l’œuvre, plus ou moins, dans l’état actuel de ruine, et que leur sphère n’est pas limitée à ces croyants-ci ou à ceux-là, mais qu’ils sont distribués partout selon qu’il plaît au Seigneur. On confond le ministère avec les charges locales. Peut-être dira-t-on que j’ai passé légèrement sur une partie de l’Écriture — l’imposition des mains des apôtres sur les anciens, etc. ; mais qu’on me permette de le dire avec le plus entier souvenir de tout ce que nous lisons à ce sujet dans la Parole de Dieu, les anciens ne sont pas la même chose que les ministres. Le ministère est l’exercice d’un don de Christ ; les anciens étaient établis par des hommes, mais jamais par d’autres que des apôtres ou des délégués d’apôtres comme Tite en était un. Quelle est notre position à l’égard de cette question maintenant ? Où sont les hommes dûment autorisés à établir des anciens aujourd’hui ? Savez-vous mieux que moi où on pourrait les trouver ? Il en est, sans doute, qui prétendent posséder ce pouvoir, mais leur prétention ne donne pas validité à ce qu’ils établissent. Dans les affaires civiles, si quelqu’un s’avisait de faire un autre magistrat sans en avoir la pleine autorité, il risquerait d’être puni sévèrement ; est-ce possible que dans les choses de Dieu on tienne pour peu important d’empiéter sur l’autorité du Seigneur ? Ce n’est pas que quelques sections de l’Église ont les apôtres, et que quelques-unes ne les ont pas, car aucune ne les a plus qu’une autre. Je ne vois pas ce que l’on gagne à prétendre faire l’œuvre d’un apôtre où il n’y a que présomption. N’y a-t-il pas plus d’humilité à ne pas prétendre à l’œuvre apostolique, si nous ne sommes pas apôtres ? Nous ne pouvons pas ordonner légitimement des anciens parce que nous manquons pour cela de l’autorité apostolique ; n’est-ce pas tout à fait en harmonie avec l’humilité qui nous convient de rester dans les limites de ce que nous pouvons ? Je n’admets pas qu’aucun homme vivant ait le droit de nommer des anciens, ou rien de semblable, parce qu’il n’y a ni apôtre ni délégué d’apôtre ayant reçu du Seigneur mission pour cela : si quelqu’un a la prétention d’établir des anciens, ou d’ordonner des ministres, comme on parle, il faut qu’il prouve son droit.

Mais le ministère et la charge d’ancien ne sont point la même chose, et bien qu’on les confonde presque toujours, ce sont des choses totalement différentes. Elles se trouvent toutes deux dans l’Écriture : des charges locales, dûment établies par des apôtres ou leurs délégués ; et des dons de ministère qui n’avaient pas besoin du visa humain. Dans l’Écriture jamais personne ne fut choisi pour être apôtre, ni appelé pour être prophète ou évangéliste, si ce n’est par Christ. Il en était précisément de même pour les pasteurs et les docteurs, comme nous le voyons dans notre chapitre ; et pourquoi n’en serait-il pas de même encore ? Christ n’a pas déserté Son office, et c’est Son office d’appeler et de donner des pasteurs, des évangélistes, des docteurs, etc. Mais il y a un autre principe tout à fait distinct de celui qui est impliqué dans ces dons, savoir que Christ donnait le droit aux apôtres d’agir en voie d’autorité : et c’est en vertu de cela qu’ils établissaient des personnes pour être anciens ou diacres comme le cas se présentait. Nous ne saurions faire ce que les apôtres faisaient, à moins que nous ne soyons revêtus de la même autorité ; mais Christ reste toujours comme Celui qui dispense immédiatement les dons de ministère : ceci demeure toujours vrai. Le ministère ne dépend pas et n’a jamais dépendu des apôtres ou de l’Église, mais uniquement de Christ ; et c’est pour cela qu’il ne saurait manquer. Mais comme l’établissement des anciens, selon l’Écriture, dépendait des apôtres et qu’il n’y a pas d’apôtre aujourd’hui, le pouvoir légitime d’établir des anciens a nécessairement et évidemment pris fin. L’Écriture peut bien donner à entendre que les dons continueront d’exister, mais elle ne donne à entendre rien de pareil quant au pouvoir d’établir. Il y a abondance d’anciens, ou plutôt de personnages officiels dans les diverses corporations religieuses ; mais quelle est la valeur, je ne dis pas de leurs dons, mais de leur établissement ? Je laisse à quiconque connaît la Bible le soin de dire si je traite loyalement cet important sujet conformément à la Parole de Dieu.

La question pour nous maintenant est donc de savoir si nous faisons la volonté de Dieu. Plusieurs ont idée qu’il y a quelque valeur spéciale dans un rite d’ordination humaine pour faire un homme ministre. Mais dans les jours des apôtres eux-mêmes, nul ne songea jamais à se faire établir pour prêcher l’évangile. Si quelqu’un pouvait prêcher, il était tenu de le faire ; s’il ne le faisait pas, il était semblable au serviteur paresseux qui cachait son talent. Si quelqu’un se présente comme ayant le droit de prêcher ou de parler dans l’assemblée, vous pouvez en toute sûreté nier son droit. Nul autre que Dieu n’a le droit de proclamer au monde la bonne nouvelle, ou de parler à Son Assemblée par qui bon lui semble. Lui seul peut donc appeler des hommes et les mettre en avant, l’un pour cette œuvre-ci, et l’autre pour celle-là. Et ici se pose la question solennelle : Le Seigneur doit-Il être reconnu honnêtement et entièrement comme la Tête sur Sa propre Église ? Dans le ministère proprement ainsi nommé, il ne s’agit pas d’hommes établissant des hommes, mais de savoir s’il est permis à Christ d’être la Tête de Sa propre Église. Ne reconnaissez donc pas que c’est l’affaire de l’Église d’établir des ministres dans la Parole. Ce n’est pas l’Église qui est mon Seigneur, mais Christ, et nous ne devons jamais mettre l’Église à la place de Christ. Ç’a été là une des sources principales du papisme et des plus funestes.

Il suit de là que nous devons reconnaître tout ce que le Seigneur établit. Si quelqu’un prêche la vérité dans ce corps-ci, ou dans ce corps-là, je dois, non pas ignorer, mais reconnaître les serviteurs de Christ où que ce soit. Il est possible qu’ils ne présentent pas complètement la vérité ; mais en tout cas, ce ne sont pas les frères qui ont donné les dons, c’est Christ. Mais s’ensuit-il que je dois aller à la messe, en admettant même qu’un prêtre romain prêche une certaine mesure de vérité ? Il faut que j’examine si celui qui peut toujours de cette manière être réellement un serviteur de Christ fait en cela la volonté de Dieu. Nous ne sommes point appelés à suivre tel ou tel serviteur, sauf en tant qu’ils suivent eux-mêmes Christ. Nous sommes sommés de faire la volonté de Dieu ; et « celui qui fait la volonté de Dieu, est-il écrit, demeure éternellement ». Rien ne saurait donc être plus simple que le sentier du chrétien. Qu’il apprécie les serviteurs de Christ à leur place, mais non pas nécessairement tout ce qu’ils font, à moins que ce ne soit conforme à la volonté de Dieu. Mais n’est-il pas dit que nous devons obéir à ceux qui ont autorité sur nous ? Oui, certainement, et cela est aussi vrai maintenant que ce le fut jamais. Mais en supposant que vous êtes converti à Dieu, et qu’il y a un prêtre de Rome vous disant que vous devez obéir à ceux qui ont autorité sur vous, et que lui et ses pareils ont cette autorité, ne faut-il pas lui demander ce qu’il veut dire par là et à l’appui de quoi il cite ce texte ? Est-ce pour m’amener à désobéir à Dieu ? Et s’il en est ainsi, ne dois-je pas dire que je dois « obéir à Dieu plutôt qu’à l’homme » ? Il y a donc toujours un sentier pour le saint de Dieu qui désire faire Sa volonté ; et ce sentier est tout simplement l’obéissance. Il est possible que parfois cela prenne la forme de ce que les hommes égarés ou adonnés à leur volonté propre appelleront désobéissance ; mais ce sera certainement obéir à Dieu plutôt qu’à l’homme. Rien ne peut nous dispenser du devoir positif, invariable, d’obéir à Dieu.

Cela fait voir que quelle que soit la valeur du ministère, il ne fut jamais destiné à obliger les enfants de Dieu et à être pour eux une question d’aveugle acquiescement. Le vrai ministère manifeste ce qu’est la volonté de Dieu, là où il y a un cœur simple ; il présente la vérité avec une puissance de conviction telle que la conscience est placée dans la lumière et sent la responsabilité où elle est de suivre cette lumière. Si vous faites quelque chose simplement parce qu’un ministre de Dieu le dit, c’est l’influence de l’homme qui est à l’œuvre, et non la puissance de l’Esprit de Dieu. Dans l’obéissance chrétienne, ce n’est pas plus l’aveugle conduit par le voyant que l’aveugle conduit par l’aveugle, c’est le voyant conduit par le voyant. Tout voyant a capacité dans l’Esprit de voir la pensée de Dieu pour lui-même ; et celui qui est appelé de Dieu à guider les autres sera, en général, rendu capable d’appliquer d’une manière si complète la pensée de Dieu à la conscience que tout cœur simple et sincère ne pourra que la voir. Mais souvenons-nous que c’est une affaire sérieuse que de reconnaître la vérité et ne pas la suivre. « Il y a du péché chez celui qui sait faire le bien et qui ne le fait pas ».

J’ai déjà expliqué que les deux premières classes des divers dons placés devant nous dans le verset 11 avaient pour but l’introduction d’une œuvre nouvelle et d’un nouveau témoignage. Elles étaient destinées et furent employées à poser le fondement de cet édifice auparavant inconnu, l’Assemblée, le rassemblement en un de Juifs et de Gentils dans la confession de Jésus, le Fils de Dieu. Il y a seulement cette différence entre les apôtres et les prophètes que tandis qu’ils étaient également employés comme organes inspirés de la pensée de Dieu qui n’avait pas été révélée jusque-là, les apôtres étaient en outre revêtus d’autorité au nom du Seigneur, ce qui n’était pas le cas pour les prophètes. Il y avait donc une autorité compétente pour gouverner, aussi bien qu’un moyen sûr de communication de la part de Dieu à l’homme. Les prophètes comme tels n’avaient rien à faire avec le gouvernement proprement dit. Ils ne visitaient pas les assemblées comme des agents revêtus d’autorité (1 Cor. 4 et 11 ; 2 Cor. 13, 3), et n’établissaient pas non plus ça et là des institutions pour régler les choses dans l’Église, comme faisaient les apôtres (voyez 1 Cor. 7, 17).

Toutefois c’est à une chose de la plus profonde importance qu’était employé le prophète, à faire connaître directement et immédiatement de la part de Dieu la vérité qui n’avait jamais été jusqu’alors connue ou même révélée. Ils étaient, par conséquent, rattachés d’une manière très spéciale avec la révélation de la vérité qui pouvait avoir lieu par la parole de la bouche ou par des écrits ; et tel est le sens de Romains 16, 26. Tout lecteur capable d’examiner la langue dont le Saint Esprit a fait usage verra que la portée de l’expression n’est pas strictement « les écrits des prophètes », mais bien « des écrits prophétiques ». Cela a trait exclusivement aux Écritures du Nouveau Testament, qui n’ont pas été toutes écrites par des apôtres. Deux des évangiles ne sont pas des ouvrages apostoliques, mais ils sont précisément autant inspirés que s’ils l’étaient. Cela est pareillement tout aussi vrai de l’enseignement oral qui était donné dans les jours apostoliques ; car l’Église commença avant qu’une portion quelconque du Nouveau Testament fût écrite. C’est même dans le mauvais usage de ce fait que consiste l’argument favori de ceux qui soutiennent qu’il y a une espèce d’inspiration dans l’Église, et que les Écritures ne sont pas aussi essentielles que nous le prétendons. Mais je réponds, que, si l’Église posséda au commencement la présence d’hommes inspirés, l’Église eut ensuite le saint dépôt des écrits des apôtres et des prophètes, sous la parfaite garde de l’Esprit de Dieu. Voici donc ce qui constitue l’unique règle de la vérité divine : l’Ancien Testament, la révélation originelle de Dieu en tant que donnée à Israël — le Nouveau Testament, comme ce supplément de Sa vérité qui est nécessaire à l’Église. Mais il est évident qu’avant que le canon de l’Écriture fût clos ou même commencé, il était nécessaire qu’il y eût une classe d’hommes ayant pour mission de faire connaître la pensée de Dieu dans les difficultés qui surgissaient au sein de l’Église. Il fut pourvu à cette nécessité dans la personne des apôtres et des prophètes. Il semble que parmi les saints de l’assemblée de Corinthe, il s’en trouvait qui étaient revêtus du caractère de prophète.

De là vient que nous avons en 1 Corinthiens 14 une parole remarquable que je voudrais considérer un moment. Le Saint Esprit posait là pour règle (v. 29-30) que dans le cas où une révélation serait accordée à quelqu’un dans l’assemblée pendant qu’un autre serait occupé à parler dans la voie ordinaire, celui-ci devrait interrompre son discours afin de laisser communiquer la révélation. Si on objecte qu’aujourd’hui une chose pareille serait de la confusion, ma réponse est que Dieu n’accorde plus de nouvelles révélations maintenant. Tout le temps que subsistait l’état de choses dans lequel la pleine révélation de la pensée de Dieu n’avait pas été donnée, et où il y avait sur la terre ces personnes inspirées, Dieu maintenait Son droit d’interrompre même quelqu’un qui parlait comme prophète par la communication de quelque vérité nouvelle de la part de Lui-même. Mais aujourd’hui si quelqu’un prétendait se prévaloir d’une nouvelle révélation de la part de Dieu, il ne ferait que prouver qu’il est séduit sinon un imposteur lui-même. Maintenant que ces personnes inspirées ont disparu, nous possédons la pleine communication et la pleine mesure de la pensée de Dieu. Aussi n’est-ce pas à des apôtres ou à des prophètes que l’Église est renvoyée, mais à la Parole écrite de Dieu comme critère et règle de la vérité. Naturellement il y a les dons plus ordinaires que l’Esprit de Dieu employait alors, et qu’Il emploie encore — aussi réellement dons que les apôtres et les prophètes, mais ne possédant pas le même caractère d’autorité dans l’action que les apôtres, non plus que le droit de communiquer des vérités nouvelles comme les prophètes. Aujourd’hui comparativement à ces dons-là tout est d’une nature subordonnée. Tout ce qu’il peut y avoir d’autorité à présent, dans quelque mesure que ce soit, doit se démontrer être de Dieu par son caractère et par son but ; sans la moindre prétention d’être quelque révélation nouvelle de la pensée divine, mais être tout simplement le véritable usage ou la juste application de ce qui a été déjà donné.

D’un autre côté, les dons que le Saint Esprit suscite encore pour le bien de l’Église sont appelés ici évangélistes, pasteurs et docteurs. Ce ne sont pas là les seuls dons qui demeurent, car l’Écriture n’en donne pas dans un seul passage la liste complète, comme les hommes le désireraient. Nous devons sonder toute l’Écriture ; et c’est pour nous une chose salutaire, précieuse, que nous ne puissions jamais recueillir quelque chose de complet de la Parole de Dieu, en n’en examinant simplement que quelque portion particulière. Dieu a voulu que nous sondassions Sa Parole en tous sens pour arriver à avoir Sa pensée d’une manière complète au moins en quelque mesure. S’il n’en était pas ainsi nous serions disposés à y faire un triage, et à nous en tenir à quelques portions favorites en laissant là le reste. Voilà pourquoi beaucoup de chrétiens négligent de fait une portion considérable de la Parole de Dieu comme si elle n’était plus d’application. Ce sujet du ministère est précisément un sujet sur lequel il existe, au moment actuel, beaucoup d’ignorance et d’infidélité. L’idée qui prévaut généralement à son égard est purement et simplement que l’intelligence a été sanctifiée. Or, j’admets que Dieu donne et forme la capacité intellectuelle : c’est ce qui est appelé dans l’Écriture « la capacité ». Mais examinez la parabole où notre Seigneur fait allusion précisément à cette chose-là, et vous verrez qu’Il distingue entre « le don » et « la capacité » — « Il donna à chacun selon sa propre capacité » (Matt. 25, 15).

En appelant les hommes à Le servir, même avant qu’ils soient convertis, Dieu façonne pour Ses desseins l’instrument qu’Il veut employer. Sa providence distingue une personne dès même sa naissance, et Il règle toutes les circonstances de sa vie qui doit suivre. Il se peut que cette personne soit élevée pour être prêtre, ou homme de loi. C’est ainsi que Paul avait une connaissance si complète des ressources de la propre justice qu’il put se replier sur la grâce et juger ce que c’est que la justice de l’homme aime, en qui elle vit, et à quoi elle mène. Sa propre expérience était la preuve que même avec le plus haut degré de culture, elle aboutit à être en antagonisme même direct avec le Seigneur de gloire. Cependant vous avez en Paul un caractère naturel très remarquable, aussi bien qu’une éducation et des connaissances non ordinaires. Tout cela avait été providentiellement ordonné en Saul de Tarse ; mais quand il fut appelé par la grâce de Dieu, il fut en outre revêtu d’un don qu’il ne possédait pas auparavant, de la capacité de par le Saint Esprit de se saisir de la vérité et d’en pénétrer puissamment les âmes. Dieu opéra par le moyen de son caractère naturel, de ses habitudes de langage et de sa manière particulière d’écrire ; mais tout cela, bien que coulant par le canal de sa capacité naturelle, employé dans cette nouvelle puissance du Saint Esprit communiquée à son âme. C’est ainsi qu’il y a ces deux choses, la capacité qui est le vaisseau du don, et le don lui-même qui est, sous la dépendance du Seigneur, l’énergie directrice de la capacité. Le don ne se trouve pas séparément du vaisseau dans lequel le don agit.

Maintenant une autre remarque. Dans cette épître les dons ne sont pas considérés simplement comme des énergies spirituelles. Ils sont considérés sous cet aspect-là dans les épîtres aux Romains et aux Corinthiens, mais dans l’épître aux Éphésiens ce sont toujours des personnes. Il a donné des apôtres — non pas tout simplement les dons apostoliques. Je trouve le don d’enseignement dans l’épître aux Romains, et le don d’un docteur dans l’épître aux Éphésiens. Les deux vérités sont en parfaite harmonie. Voici, ce me semble, la raison de la différence. Dans les Éphésiens c’est l’amour de Christ pour l’Église qui donne son ton à toute l’épître — la plénitude de bénédiction qui appartient au corps de Christ, l’Église, en vertu de son union avec la Tête. Ce qui agit sur les affections de l’Église n’est pas simplement de la puissance ; c’est une personne, et non de la puissance, qui peut être l’objet de votre amour ; et une personne de laquelle découle le don, agit évidemment sur les affections de ceux pour le bien desquels le don est employé. Tout le long de l’épître c’est de Christ qu’il s’agit, et non de l’Esprit, si ce n’est exceptionnellement. Dans les Corinthiens, au contraire, c’est le Saint Esprit qui est en toute première ligne. Ici c’est Christ, et en harmonie avec cela nous trouvons les personnes qui agissent de la part de Christ pour le bien de Son corps. C’est là un bel exemple de l’harmonie qui règne dans la vérité de Dieu. L’amour actif de Christ est représenté dans cette épître comme la source de toute la bénédiction de l’Église ; et il en est de même pour les dons personnels de Christ, qu’Il aime Lui-même et qu’Il emploie à entretenir Son amour dans les autres.

La différence entre les évangélistes et les pasteurs et docteurs est évidente. L’évangéliste est le moyen ordinaire d’amener les âmes à Christ. On peut dire qu’il est par sa nature propre un don itinérant ; non pas limité à un seul lieu, mais appelé à aller çà et là partout où le Seigneur peut le conduire par l’Esprit pour les besoins des âmes. Timothée, qui a été par un tour de main clérical métamorphosé en archevêque, est appelé dans l’Écriture « évangéliste ». Il avait été signalé par prophétie pour une œuvre particulière, et il lui avait été accordé un certain don par le moyen de l’apôtre en compagnie des anciens. Il va par le commandement de l’apôtre en un certain lieu, et là il prend connaissance de l’état des choses. Mais ni lui ni Tite n’avaient de poste fixe, comme les évêques modernes. Encore moins n’y avait-il rien destiné à des successeurs. Timothée devait confier ce qu’il avait appris de l’apôtre à des hommes fidèles qui fussent en état de l’enseigner aussi à d’autres : c’est-à-dire qu’il s’agit de la transmission de la vérité, et nullement d’autorité ou de saints ordres, comme on le dit en pervertissant la Parole de Dieu.

Le fait est qu’il était établi plusieurs évêques dans toute église où il se trouvait un certain nombre de saints réunis ensemble — après un certain temps d’épreuve et d’expérience. Ils étaient choisis là par un apôtre, ou un délégué des apôtres. Comme pour les individus doués d’un don c’est une usurpation que de s’emparer des fonctions de l’Église, pareillement c’est une usurpation de la part de l’Église que de prétendre aux fonctions des dons individuels. Naturellement s’il y avait quelque chose d’immoral dans la conduite d’un serviteur de Christ, il est aussi responsable qu’un autre et il l’est même davantage. Les enfants de Dieu et lui-même sont tenus de veiller à cela avec une sainte jalousie, parce que son péché serait pour le nom de Christ la source d’un plus grand opprobre et d’un plus grand scandale que le péché d’un membre du corps moins en évidence. Mais sauf dans les choses d’une nature morale, nul ne doit intervenir dans l’exercice de son ministère entre lui et le Maître qui l’a appelé à Le servir. À cet égard les dissidents sont complètement et radicalement dans le faux, parce qu’ils supposent que l’Église établit les ministres et peut naturellement les démettre si elle le trouve bon. Cela fait du ministre le ministre de son église ; mais l’Écriture ne parle jamais, comme tout le monde fait aujourd’hui, du ministre d’une église particulière. On n’y trouve jamais rien qui ressemble à ces locutions « notre » ministre, « votre » ministre. Ce qu’elle nous apprend, c’est que tous les dons sont des dons dans l’unité du corps de Christ. Si quelqu’un est réellement pasteur ou docteur il est placé comme pasteur ou docteur dans l’Église tout entière. N’importe le lieu où il peut se trouver, où qu’il aille, il a un appel, s’il marche selon l’Écriture, non pas de la part d’une congrégation, mais de la part de Christ, pour exercer son ministère sans crainte, avec humilité naturellement, et sans prétendre à plus qu’il n’a reçu. Lorsque quelqu’un prétend à davantage, généralement il perd la confiance même pour le don qu’il possède ; et, en général, la tendance des enfants de Dieu est, non pas de rabaisser le ministère, mais de lui faire une place trop grande. Mais Satan qui travaille toujours à disloquer les moyens destinés à faire avancer le corps, pousse les saints à accorder leur confiance là où ils ne le devraient pas, et à être méticuleux et défiants quand ils devraient se montrer remplis de gratitude. Toutes ces choses ont besoin d’être réglées par la Parole. En général, c’est sur l’Ancien Testament et non sur le Nouveau que les hommes basent leurs idées : de là l’habitude de considérer le ministère comme une sorte de profession honorable, ou comme quelque chose donnant un titre dans le monde. Mais si nous prenons cette portion-ci de l’Écriture ou telle autre que ce soit dans les épîtres, on verra bientôt que ce n’est jamais comme titres reconnus dans le monde qu’elle fait mention d’apôtre, de pasteur, de docteur, etc. Le monde les méprisait. Pierre en son temps ne fut pas plus honoré dans le monde après qu’il fut devenu apôtre qu’il ne l’était avant. Le monde pouvait reconnaître qu’il opérait des miracles ; ce qui est tout autre chose. Bien des hommes charnels opéraient de grands miracles. Paul traite les Corinthiens de petits enfants en intelligence parce qu’ils étaient tant occupés de miracles et du déploiement de dons extérieurs : ils aimaient aussi à s’écouter parler ; et l’apôtre leur montre que prononcer seulement quelques paroles pour le bien de l’Église, c’était beaucoup plus élevé et bien meilleur que tous les signes et toutes les merveilles qu’ils opéraient. Il pouvait faire plus de miracles qu’eux tous, toutefois il déclare qu’il aimerait mieux prononcer cinq paroles avec son intelligence « afin que j’instruise aussi les autres, que dix mille paroles en langue ». Si donc l’Église est privée des pouvoirs miraculeux qui sont de nature à frapper les yeux des incrédules, il lui reste toutefois ce qui est même plus important, sauf les dons fondamentaux qui n’avaient pas besoin d’être continués.

Le fondement était si parfaitement posé que les apôtres et les prophètes n’étaient plus nécessaires. Cela est donné à entendre ici. L’Esprit de Dieu ne donne pas à entendre aux saints que les choses doivent continuer longtemps dans ce monde. Christ a donné « les uns apôtres, les autres prophètes, les autres évangélistes, les autres pasteurs et docteurs ; en vue de la perfection des saints, pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps de Christ, jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi, et de la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ ». En ces jours-là les croyants ne pouvaient que penser que toute l’œuvre de l’Église devait se compléter dans cette même génération : notre passage n’enseigne nullement qu’il doive y avoir succession en elle, bien que nous puissions voir maintenant que cela y était impliqué. Le ministère est l’exercice d’un don spirituel ; et ces dons dépendent du fait béni que Christ demeure toujours la Tête de l’Église, et que jamais Son office ne prend fin, comme cela arrivait à un grand sacrificateur dont, pour cause de mort, l’office passait à un successeur. Mais Christ se trouve dans les cieux à la suite de Sa résurrection, et ces apôtres sont ce qu’Il a donné après qu’Il est monté en haut. Jusque-là nous sommes aujourd’hui sur le même terrain qu’on était le jour de la Pentecôte. Alors Christ avait quitté le monde, et c’est en conséquence de cela qu’Il donnait les dons énumérés ici. Le Saint Esprit demeure dans l’Église, et par le Saint Esprit, Christ donne capacité à des hommes sur la terre pour tout ce dont l’Église peut avoir besoin. Nous avons les évangélistes, les principaux agents que le Seigneur emploie pour recruter Son armée spirituelle ; nous avons ensuite les pasteurs et les docteurs que le Seigneur suscite et donne pour conduire, guider et gouverner ces saints de Dieu introduits par les travaux des évangélistes. Tous ces dons demeurent autant que jamais. Je ne parle pas de la mesure de puissance dans laquelle nous les possédons, car tout est certainement dans un état de faiblesse ; mais en tant qu’ils dépendent de Christ en haut et du Saint Esprit ici-bas, et comme Christ ne peut jamais cesser d’être Tête là-haut ni le Saint Esprit ici-bas laisser l’Église, ces dons demeurent aussi nécessairement. Aussi est-il ajouté : « jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi ». Il n’y a pas de garantie divine pour la continuation des miracles, mais cette garantie est impliquée pour la continuation de ces dons d’édification pour le bien des âmes.

Notre Seigneur a donc donné ces dons « jusqu’à ce que nous parvenions tous ». L’apôtre ne dit pas qu’Il les donnera, parce que la primitive Église était placée dans la position d’attendre le retour du Seigneur. Paul et les autres apôtres dirigeaient constamment les saints à attendre Christ. Ce n’était pas l’idée que Christ devait venir, mais qu’on devait L’attendre constamment. De là vient qu’il n’y a rien absolument qui présente le ministère comme travaillant à une œuvre qui doit se poursuivre durant une longue suite de siècles. C’est simplement ceci : Christ est à la droite de Dieu, fournissant ce qui est nécessaire. «  Il a donné les uns… jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi ». Si la venue de Christ avait eu lieu aux jours de la génération apostolique, cela eût été vrai. Christ a différé ; mais cela demeure véritable, « jusqu’à ce que nous parvenions tous ». De sorte que, à la réserve des exceptions que nous avons déjà faites, nous sommes autorisés à attendre la continuation d’un ministère de même nature et découlant de la même source que celui que possédait l’église apostolique. Tout ce qui est nécessaire pour le rassemblement des âmes, et pour les soins qu’elles demandent lorsqu’elles sont rassemblées, demeure jusqu’à ce que Christ vienne et complète tout.

Quelle bénédiction de savoir que nous pouvons accepter de Dieu ce ministère qui, dans les mains de l’homme, a été si orgueilleux ou si servile ou l’un et l’autre à la fois — que nous pouvons l’attendre de Lui et le reconnaître comme une chose divine — que nous n’en sommes pas réduits à n’avoir qu’un ministère humain maintenant au lieu d’un ministère divin comme jadis, mais que nous avons la certitude que ces dons découlent de Christ qui ne saurait faillir à Sa Parole et à Son œuvre ! Mais de quelle manière pouvons-nous reconnaître un ministre, un évangéliste, un pasteur, un docteur ? Je répondrai par une question : De quelle manière reconnaissez-vous un chrétien ? Tout chrétien, qui est lié avec des chrétiens, en a une idée générale. Je ne dis pas qu’il y a à cet égard un discernement infaillible ; mais quoique personne ne puisse prononcer d’une manière infaillible, et que nous dépendions nécessairement pour notre mesure du secours actuel de Dieu, toutefois nous savons, en règle générale, qu’il y a dans un chrétien quelque chose qui le recommande par soi-même à ses frères en général. Il y a dans sa confession de Christ quelque chose qui est plus ou moins en harmonie avec la Parole de Dieu ; et puis il se peut que son esprit, son ton, le caractère général de sa vie et de ses habitudes, après qu’il s’est un peu trouvé aux prises avec les épreuves du chemin, fortifient ou affaiblissent la conviction qu’on a à son sujet. C’est ainsi précisément qu’on a à juger du ministère, et nous sommes tenus d’éprouver toute chose. Quelqu’un est employé de Dieu à remuer les âmes avec puissance et bénédiction, à les rassembler en Christ, et à les Lui amener : évidemment il y a en cette personne un évangéliste. D’un autre côté vous en voyez un autre dont le cœur n’est pas aussi ardent à présenter l’évangile aux âmes, mais qui jouit de la vérité de Dieu et aime à en faire jouir les autres — n’est-ce pas là un docteur ? D’autres connaissent aussi bien, peut-être, la vérité de Dieu, mais ils ne peuvent pas la présenter de manière à agir sur les autres avec la même puissance et les mêmes effets. Mais si une troisième personne entreprend de s’occuper pratiquement des âmes, et fait habituellement de graves méprises, puis-je dire que c’est un pasteur ? Dès qu’il se présente quelque difficulté, il est à bout de ressources, ne sachant que faire ni aviser. Il se peut qu’il soit capable d’expliquer la Bible, mais dès qu’il s’agit de l’appliquer à la vie pratique des chrétiens, ce ne sont que des fautes et des bévues. En outre, être pasteur ne suppose pas seulement la connaissance de la vérité, mais le pouvoir de la faire agir chaque jour avec force sur les individus : cela implique un exercice de la conscience et des affections que n’implique pas nécessairement au même degré et de la même manière l’activité du docteur. Un homme peut être docteur sans être pasteur (et vice versa), ou il peut être l’un et l’autre. Un apôtre pouvait être docteur et évangéliste et pasteur aussi. Vous trouverez un don particulier dans un homme, et dans un autre un don d’une nature toute différente. Puis encore, tel qui ne saurait présenter la vérité avec puissance, est en état d’exhorter ; il peut agir sur la conscience. C’est là un don inappréciable auquel il n’est pas fait allusion ici, mais nous le trouvons en Romains 12. Ici ce sont les dons les plus saillants pour bien ajuster les saints dans l’ordre et les fonctions qui leur conviennent. Mais tout en croyant que ce n’est que par la puissance du Saint Esprit demeurant en nous que nous pouvons discerner, dans la mesure de certitude qu’il plaît à Dieu d’accorder, si un homme est chrétien ou s’il ne l’est pas, et s’il a ou n’a pas un don, j’ajoute que naturellement le degré de discernement dépend de la spiritualité de nos cœurs et de la manière dont ils sont au-dessus de la chair et de son activité. Il faut de la spiritualité, et cela suppose le jugement du moi. L’Église tout entière est sous la responsabilité de juger. Un évangéliste peut se tromper en pensant que telle personne est réellement convertie, et en la présentant comme telle pour l’admission à la cène. Alors vient la responsabilité de l’Église d’examiner ce qu’il en est. Personne n’a le droit d’entrer : qui a des droits aujourd’hui, sauf Dieu seul ? Notre juste place c’est d’obéir et non de parler de droits. L’Église examine donc, et s’il y a communion d’une manière générale ou une mesure de satisfaction suffisante pour amener à penser que la personne en question a reçu Christ et que l’on ne serait pas fondé à repousser sa profession d’être un membre de Christ, elle est reçue dans l’assemblée, et alors vient l’épreuve — la dépendance de Dieu après que l’on est reçu. Christ est absolument nécessaire pour une bonne marche. Ceux même qui sont nés de Dieu ne seront pas gardés à moins qu’ils ne marchent réellement dans l’humilité et en regardant à Dieu.

L’Esprit de Dieu opère dans l’assemblée ; un frère manifeste de l’aptitude pour prêcher ; un autre pour enseigner ; quelques-uns pour servir le Seigneur dans la sphère privée, et d’autres dans une activité publique. Qui est capable de juger de ces choses ? Le même Esprit de Dieu. Et après tout, c’est une question plus simple que beaucoup ne le supposent. Absolument comme un être humain connaît la nourriture qui lui est bonne, que ce soit un petit enfant ou un homme fait ; de même c’est une chose tout à fait inséparable de la nature des saints qu’ils connaissent en général ce qui est pour leur bénédiction spirituelle. Si l’on est dans un pauvre état spirituel, si l’on est charnel, on sera charmé par des riens pompeux ; mais en général, c’est un jugement sain et droit qui se rencontre depuis le chrétien spirituel le plus mûri jusqu’au simple petit enfant. Bien que tous ne soient pas capables de faire ressortir le point précis, tous ceux qui sont guidés de Dieu en quelque mesure sont en état d’apprécier la valeur de ce qui leur est présenté. Pareillement quant à l’hérésie. Comment l’assemblée peut-elle juger de la fausseté d’une doctrine ? Christ est la mesure. Tout ce qui, en accord avec l’Écriture, exalte Christ est vrai ; tout ce qui rabaisse Christ est faux et procède du diable. Christ est la puissance de Dieu et la sagesse de Dieu. Mais Dieu opère par des moyens, et s’il y a un faux docteur qui cherche à introduire le mal, il y a de vrais docteurs qui sont capables de le discerner ; et quoique le docteur de l’hérésie puisse s’efforcer de la produire sous des formes attrayantes, le Saint Esprit qui demeure dans l’Église n’en travaille pas moins contre Satan, et par des membres divers Il dévoile et manifeste le véritable caractère de la chose mauvaise devant l’assemblée de Dieu ; et tous ceux qui marchent avec Dieu sont en état, quand elle a été ainsi mise à découvert, de prononcer contre elle un jugement divin. Si nous avions à construire un chemin de fer, nous ne saurions pas de quelle manière commencer l’œuvre ; mais quand le chemin de fer est fait nous pouvons en dire parfaitement bien l’usage et la valeur et sommes assez capables au point de vue pratique de juger s’il est bon ou s’il ne l’est pas. Il en est de même de l’Église de Dieu. Bien que tous ne soient pas également capables de discerner et de signaler le mal, Dieu en donne qui peuvent le faire, et ensuite tous portent un jugement sur lui sans aucune difficulté. Ces dons sont indispensables à l’Église dans son ensemble, quoique je ne veuille pas dire que partout où il y a une assemblée de Dieu, ce soit absolument nécessaire pour la marche des saints en commun que des personnes douées de telle ou telle manière soient suscitées au milieu d’eux. Mais nous pouvons bénir Dieu pour Sa miséricordieuse grâce à pourvoir ainsi aux besoins de Son Église aussi longtemps qu’Il a une Église ici-bas. L’existence de l’Église et celle du ministère reposent sur le même fondement ; ils découlent tous les deux de l’amour de Christ, et aussi longtemps que nous aurons l’une nous posséderons aussi l’autre : c’est le même amour de Christ qui voit Son corps et qui communique à certains membres la puissance spirituelle que réclame le bien-être de ce corps. Tous ceux qui sont de Dieu, n’importe la marche ecclésiastique qu’ils suivent, reconnaissent qu’il faut qu’il y ait l’action de Dieu dans le ministère, et par conséquent, quand il met son vote dans l’urne, le dissident ne nie pas qu’il faut que le Saint Esprit donne la capacité d’être ministre. Si la personne était ministre avant, naturellement elle l’est aussi après ; mais ils disent qu’il était nécessaire qu’ils en fissent leur ministre. Ne vaudrait-il pas mieux abandonner cette forme non scripturaire, et reconnaître toujours le ministre de Christ ? De cette manière vous le laisseriez sur son propre et véritable terrain comme un homme qui est tenu de servir Dieu de toutes manières et coûte que coûte.

J’admets que la Parole de Dieu parle d’évêques et de diacres ; mais il n’y est pas fait allusion ici. Il n’est pas dit qu’il en a donné d’autres pour être évêques et diacres. Mais je maintiens que ces évêques et ces diacres devaient être établis par l’autorité apostolique ou quasi apostolique. Ne nous convient-il pas aujourd’hui de dire que, n’étant pas apôtres, nous ne prétendons pas en exercer les fonctions dans l’ordination pour certaines charges, bien que nous reconnaissions de grand cœur partout où nous les trouvons, ceux qui possèdent les qualifications requises pour ces charges locales ?

Mais le système régnant non seulement s’arroge une autorité qu’en réalité on ne possède pas, mais il introduit le plus grand désordre et la plus coupable confusion, si nous le jugeons par l’Écriture, ou même par ses résultats pratiques ; et cela aussi dans toutes les associations humaines — épiscopales, presbytériennes ou congrégationalistes. Que peut-il y avoir, en effet, de plus fatal à la bénédiction ou à la gloire du Seigneur — que de voir un évangéliste plein d’ardeur et de zèle enchaîné à un champ de travail limité et essayant en vain de satisfaire aux besoins d’un corps de chrétiens qui ont à être édifiés en Christ ? Ou que d’apprendre que juste dans le voisinage, un docteur précieusement doué est forcé d’abandonner son don particulier à cause que sa congrégation ne se compose presque exclusivement que d’inconvertis ? Que peut-il y avoir de plus tristement calculé pour faire obstacle à l’Esprit de Dieu que ce réseau de canons, de coutumes, de formalités ecclésiastiques, etc., qui dégrade le ministère, le met dans l’esclavage de l’homme, et dispose des âmes comme si elles étaient les serfs du sol sur lequel elles vivent ?

De l’autre côté, là où l’on s’est placé à cause de la conscience envers Dieu sur le principe scripturaire, il se peut qu’il y ait de la faiblesse ; toutefois il y a place pour que le Saint Esprit entre et opère par qui Il voudra. Sans doute, l’ennemi a ses artifices particuliers pour troubler, et, si c’est possible, pour corrompre ceux qui se sont établis sur ce terrain ; et nulle part il n’est plus nécessaire de veiller et de prier, pour ne pas dire de s’humilier ; mais grâce à Dieu, cette marche est l’arène de la foi ; elle honore la Parole de Dieu ; elle donne à l’Esprit la place qui Lui appartient ; et elle reconnaît la seigneurie de Christ en accueillant chaque membre du corps, selon que la Tête l’a placé. Et c’est pourquoi si on allègue qu’il faut qu’il y ait de l’ordre, je demande de quelle nature il doit être. Est-ce un ordre établi par vous, ou l’ordre selon Dieu que vous désirez réellement ? Si nous sommes soumis à l’Écriture nous ne laisserons pas, sous aucun prétexte, quelque spécieux qu’il puisse être, mettre de côté le seul ordre que Dieu sanctionne pour Ses enfants maintenant sur la terre, c’est-à-dire, Son Assemblée guidée par le Saint Esprit, présent au milieu d’elle pour maintenir la gloire de Christ et travailler souverainement par qui Il veut, quoique, cela va sans dire, uniquement pour l’édification et avec la grâce qui convient à la présence de Dieu. Quant à du désordre, il peut y en avoir par manque de spiritualité, et de la part de ceux qui ont des dons aussi bien que de la part de ceux qui n’en ont pas. Mais assurément l’Écriture est une règle plus sûre et plus efficace pour corriger tous les désordres que les plus sages règlements des hommes, quoique cependant rien ne profitera s’il n’y a pas une véritable dépendance actuelle du Saint Esprit.

Cependant l’apôtre Paul, tout en s’opposant aux abus charnels, suppose la plus complète liberté pour l’exercice de tous les dons du Seigneur dans le sein de l’assemblée chrétienne soumise uniquement à Ses propres expresses restrictions, à Lui, le Seigneur (voyez 1 Cor. 14). Si c’était là l’ordre de Dieu alors, quand est-ce qu’il a cessé ? Ou l’Église de Dieu n’a-t-elle plus de directions divines pour ses services publics ? Je ne saurais porter envie à ceux qui, abandonnant le système de Dieu pour celui qu’ils ont adopté ou inventé eux-mêmes, ne se font aucun scrupule pourtant de citer des fragments çà et là, comme les versets 33, 40, à l’appui d’arrangements humains directement contraires à la lettre et à l’esprit de la Parole inspirée de laquelle ils sont ainsi brusquement tirés. Ce que Dieu a établi pour le culte et le service de l’Église est et doit être aussi obligatoire pour la conscience que ce qu’Il a écrit pour notre marche et notre consolation habituelles. Il me semble même dans un certain sens, que la désobéissance publique de l’Église en corps est plus insultante pour Dieu qu’aucune chute individuelle, quelque gravité qu’elle puisse avoir. Et quel est l’état actuel de la chrétienté ? Les enfants de Dieu, confondus avec le monde auquel ils se sont joints, se sont écartés de la Parole de Dieu. Je ne parle pas d’eux comme hommes, ni de devoirs moraux ; mais on ne laisse pas à l’Esprit de Dieu dans l’assemblée, ni même individuellement dans ceux qui la composent, la place qui Lui appartient. Sa puissance n’est pas reconnue comme une personne divine descendue du ciel non pas simplement pour convertir des pécheurs, mais pour être le guide de l’assemblée chrétienne. Comment en est-il partout des réunions de l’Église (bien plus, se réunit-elle jamais comme telle ?) et de l’exercice des dons de Christ dans l’assemblée de Dieu, séparée du monde ? Lorsque les chrétiens se réunissent, n’est-ce pas d’après une méthode arrêtée qui n’a rien de scripturaire, tel système ici, tel autre là, au lieu de laisser l’assemblée de Dieu pleinement et saintement soumise au Saint Esprit et se confiant en Lui du soin d’opérer librement, abondamment et avec puissance par les membres qu’Il voudra employer, pour l’utilité de tous ? La Parole révélée de Dieu, concernant Son Assemblée, n’est-elle pas comme toute autre vérité, éternelle pour la conduite de l’Église ici-bas ? Je maintiens qu’elle l’est ; et je crois que ceux qui contestent la permanence de son autorité et leur propre responsabilité présente auront une sérieuse question à régler devant le tribunal de Christ ; tandis que ceux qui s’en tiennent à la volonté de Dieu exprimée dans Sa Parole, auront sûrement Sa bénédiction maintenant et Son approbation en ce jour solennel.

Mais ce n’est pas tout que de sortir de ce qui est manifestement mauvais. Ce doit être pour nous une chose pénible que de rompre avec ce qui, personnes et choses, a été jusqu’ici notre marche, et l’on ne doit jamais le faire sans croire que telle est bien la volonté manifeste de Dieu. Et quoique l’on ne doive pas repousser les plus faibles chrétiens qui viennent d’ailleurs, je ne pense pas qu’une personne doive être prompte à recevoir ce qui est nouveau pour elle, à moins qu’elle ne soit convaincue que c’est assurément de Dieu. Si on vient seulement à cause de certaines circonstances heureuses, cela ne tiendra pas si on dit : « il y a tant d’amour, de vérité, d’union, de simplicité, etc., parmi ces chrétiens, que nous devons aller avec eux » ; bientôt il survient quelque épreuve, et alors on est prêt à dire : « Il n’y a point du tout d’amour parmi eux — comme ils sont tout changés ! ». Ces effets spirituels peuvent bien agir sur les affections et attirer l’attention, mais ce n’est pas sur eux que le chrétien doit se baser pour sa marche en présence de la volonté révélée de Dieu. Plus encore ; supposé que vous puissiez former une assemblée d’heureux croyants, tous du même sentiment quant à l’Esprit, à l’Église et la venue du Seigneur, outre les vérités fondamentales, je ne voudrais pas m’y joindre, si on mettait pour condition d’adhérer à leur sentiment : c’est là ne pas avoir et méconnaître le fondement divin. Je dois m’attacher uniquement au nom de Christ, le seul centre de rassemblement et qui suffit parfaitement pour toute l’Église de Dieu ; et faire cela quelque peu nombreux et faibles que puissent être ceux qui se rassemblent de la sorte et quoi qu’il en puisse coûter. Il est possible que mon ami le plus cher ou moi-même nous venions à mal marcher. Naturellement c’est pénible et humiliant d’être jugé par les autres, parce qu’on a manqué à se juger soi-même. Mais je n’ai garde de me retirer parce que je sais que la volonté de Dieu est contre cela. Nous n’avons pas le droit de faire de l’Église de Dieu un club à notre convenance. C’est à Dieu à élire et à appeler comme Il le trouve bon pour la gloire de Son Fils ; c’est à nous à obéir de tout notre cœur. Dans la condition ruinée actuelle de la chrétienté, nous avons appris que les principes de Dieu obligent toujours les consciences, et nous nous sommes réunis pour être là où le Saint Esprit a liberté pour tout conduire selon Sa Parole. Si parmi nous quelqu’un tombe dans le péché, aussitôt nos adversaires s’écrient : Voyez, ils ne sont pas plus parfaits que leurs voisins. Mais qui a jamais parlé de supériorité personnelle ? Nous ne prétendons à rien pour nous-mêmes, n’ayant que le droit d’être conduits de Dieu pour marcher individuellement et collectivement comme Il veut que nous marchions.

Voulez-vous ressembler à ceux qui s’assemblèrent autour de David dans la caverne d’Adullam ? Bien qu’ils fussent dans la détresse et misérables lorsqu’ils vinrent, ils ne continuèrent pas de l’être. Celui qui les avait attirés à lui était le centre des conseils de Dieu, et Dieu travailla en eux et forma leurs cœurs ; Il mit de l’honneur sur eux, et le jour vint où ces hommes méprisés devinrent des héros et les champions de la cause du Seigneur quand tout était en ruine en Israël. Puisse-t-il être notre lot de Le servir fidèlement ! Je crois que nous sommes ecclésiastiquement là où nous devons être — là où le Saint Esprit a liberté pour enseigner, manier et appliquer cette vérité qui a pour but de nous séparer du monde pour Dieu et pour les dons qu’Il a en vue, soit quant aux affections du cœur, soit quant à la pratique journalière. À présent c’est uniquement notre faute si nous n’avançons pas. Si nous sommes délivrés de tout ce qui nous faisait obstacle jadis lorsque nous étions enveloppés dans le déshonneur systématique du Saint Esprit, puissions-nous avoir le sentiment profond de nos manquements personnels ! Notre principe n’est pas affaire simplement de rivalité humaine, mais bien un principe divin, car ce n’est ni plus ni moins que la réalisation dans la foi de la Parole de Dieu quant à Son Église, et cela selon qu’Il donne lumière et puissance. Si d’autres pouvaient nous montrer à faire plus parfaitement Sa volonté, nous devrions leur en être très reconnaissants et bénir Dieu pour ce secours. Puissions-nous retenir ferme la vérité dans la soumission à Son Esprit, ayant à cœur le bien de tous les croyants où qu’ils se trouvent, sans nous préoccuper de les faire sortir ou entrer un moment plus tôt que celui où Il leur donnera de connaître Sa pensée. Je n’admets pas qu’une société humaine quelconque, grande ou petite, ait le plus petit droit sur un seul enfant de Dieu. C’est uniquement de Sa volonté qu’il s’agit. Obéir à Sa Parole, insister là-dessus auprès des autres, n’est ni présomption ni manque de charité ; c’est foi en Dieu. Puissions-nous y abonder avec actions de grâces.

Quoique nous nous soyons déjà arrêtés sur les formes les plus remarquables sous lesquelles la grâce de Christ s’est déployée en fait de dons — apôtres, prophètes, évangélistes, pasteurs et docteurs — nous n’avons encore rien dit du but que notre Seigneur avait en vue, c’est-à-dire du but général du ministère. Le verset 12 nous apprend que les dons sont accordés « en vue de la perfection des saints, pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps du Christ ». Or vous remarquerez comment dès les tout premiers mots de cette déclaration de l’Esprit de Dieu, est redressée l’une des fausses notions les plus répandues en ce moment dans la chrétienté : et non pas simplement dans la chrétienté sous ses formes les plus ténébreuses (car je ne parle pas tant de l’église latine ou de l’église grecque), mais dans les quartiers du protestantisme les plus réputés pour l’orthodoxie et même pour des sentiments évangéliques accentués. Pas un lecteur, tant soit peu au courant de la manière de voir si générale aujourd’hui, ne révoquera en doute que, même parmi les chrétiens, la notion qui prévaut quant au ministère c’est qu’il a pour but unique l’appel des âmes à la connaissance de leur propre salut en Christ.

Mais tel n’est point le dernier but du Seigneur dans le ministère. Gagner des pécheurs au Sauveur est une partie nécessaire de la bénédiction, mais n’en constitue qu’une partie. Les évangélistes, comme les autres, sont donnés « en vue de la perfection des saints », ce qui va beaucoup plus loin. Il est évident qu’il faut d’abord devenir des saints ; mais ce que le Saint Esprit signale comme la fin propre du ministère, c’est de former les saints selon Christ ; de les ajuster ensemble conformément à l’appel du Seigneur et à Sa volonté souveraine à leur égard ; de les mettre bien en état de trouver leur vraie place vis-à-vis de Dieu et vis-à-vis les uns des autres. Voilà, ce semble, ce qu’implique l’expression, la perfection des saints. Ce qui suit présente plutôt les formes immédiates que revêt cette grande fin, « pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps de Christ ».

À l’égard de Ses saints, c’est toujours à ce qui les concerne considérés individuellement, à leur bonne condition devant Lui, à ce qu’ils soient complètement façonnés conformément à Son modèle, que Dieu attache le plus d’importance ; ce qui tient à leur réunion comme corps, à leur action comme assemblée, tout important que c’est, vient en seconde ligne. Aussi dans le chapitre 1, n’est-ce qu’à la fin du chapitre qu’apparaît le sujet du corps, de l’Église ; tandis que toute la première partie est remplie de tout ce qui est nécessaire pour la perfection des saints. Dieu Lui-même révèle Sa vérité précisément dans le même ordre, et pour la même fin majeure ; et ici encore les dons de Christ se trouvent être justement selon le modèle de Ses propres voies. La perfection des saints est l’objet le plus près de Son cœur ; puis viennent les moyens employés pour introduire dans la connaissance des privilèges qui nous sont communs, et l’opération de l’Esprit dans l’Assemblée qui est liée avec Sa gloire dans le ciel. Ainsi donc, quelles que soient la condition de l’Église et les précieuses voies de Dieu envers elle, quelles que soient les affections de Christ pour Son corps, après tout c’est de la manière la plus immédiate que Dieu s’occupe de Ses saints et Il fait de leur perfectionnement Son premier et principal objet. Et Il tient toujours à cela : quelles que soient les fluctuations de l’œuvre, et quelque caractère que revête Son témoignage à un moment donné sur la terre, le perfectionnement des saints est l’objet qu’Il ne cesse pas d’avoir devant Lui.

Il y a dans cette pensée quelque chose d’extrêmement doux. Quoi qu’il arrive, Dieu accomplira le perfectionnement de Ses saints, et changera en moyens de bénédiction pour eux, sinon toujours à leur honneur, les choses pénibles et affligeantes. Quand nous avons besoin d’être humiliés, il est évident que nous ne sommes pas humbles ; si nous ne sommes pas petits à nos propres yeux, il faut que Dieu nous rende tels. Cela n’est pas de nature à nous donner de l’importance, mais Dieu poursuit toujours Son précieux dessein à notre égard, et ne manque jamais de l’accomplir. De sorte que nous avons toujours lieu de L’adorer pour Sa bonté ; bien qu’il puisse y avoir pour le moment de la souffrance pour nous, toutefois le but que Dieu a en vue est toujours atteint. Il est décidé à effectuer la perfection des saints. Il est fidèle et Il le fera. Il signale cette œuvre à Ses saints comme étant l’objet pratique de Christ ; et le ministère prend dans notre passage ces diverses formes conformément à ce qu’Il a arrangé souverainement Lui-même.

Mais le ministère relève directement et immédiatement du Seigneur sans aucune intervention de la part de l’assemblée. Mais nulle trace dans l’Écriture d’un ministère procédant de l’Église, quoiqu’il y ait le ministère qui s’adresse à l’Église. Paul parle de lui-même comme d’un ministre de l’Église : c’est-à-dire non pas comme procédant d’elle en tant que la servant : car bien loin que le ministère découle de l’Église, c’est l’Église qui est formée par le ministère. Les dons sont accordés pour la perfection des saints. Le ministère peut faillir, mais le Seigneur ne manque jamais d’effectuer Son dessein. Ce sera peut-être par une voie plus lente, à travers une entière faiblesse, et beaucoup de choses pénibles, mais Il accomplira Ses desseins. Il accorde ces dons « en vue de la perfection des saints, pour l’œuvre du service, pour l’édification du corps des saints ». Ces deux dernières clauses viennent comme subordonnées à la première. C’est une chose très bénie de voir les saints agissant ensemble ; mais quoique l’œuvre du service puisse faillir ou se gâter entre les mains de l’homme, le grand dessein que le Seigneur poursuit Lui-même, et en vue duquel Il a donné ces dons, n’en marche pas moins vers sa pleine réalisation en dépit de tout. Et de plus, cela est vrai, « jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi, et de la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ ». L’expression, « l’état d’homme fait », n’a point trait ici à la résurrection, mais à notre entier accroissement dans la connaissance de Christ.

On peut observer cela dans saint Paul. Bien que son grand sujet, son œuvre capitale, fût de développer la rédemption de Christ et les conseils de la gloire de Dieu fondés sur la rédemption, il ne peut toutefois s’empêcher d’introduire ce plein accroissement des saints en connexion avec la connaissance approfondie du Fils de Dieu. C’est la personne de Christ qui se dresse devant l’âme ; et il y a là une preuve de spiritualité beaucoup plus que dans une mesure quelconque de connaissance de Son œuvre. La vérité que Dieu communique à nos âmes a pour effet de nous rendre de plus en plus intimes avec Christ Lui-même comme personne divine. C’est là ce qu’il place devant nous — « jusqu’à ce que nous parvenions tous à l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu, à l’état d’homme fait ». La connaissance des voies de Dieu dans le passé ne suffirait pas aujourd’hui. Les saints de l’Ancien Testament regardaient au Messie comme objet d’espérance ; mais aujourd’hui, la forme sous laquelle l’Esprit de Dieu nous présente l’objet, c’est la connaissance de sa personne, comme le Fils désormais révélé pour notre joie, pour nos louanges et pour notre adoration. En sorte que ce que nous trouvons ici c’est le grand objet chrétien, la grande forme de connaissance que Dieu a en vue pour tous Ses saints maintenant. Comparant avec le verset 14 on a la force de l’expression, « l’état d’homme fait ». C’est en contraste avec le fait d’être des enfants, « à la mesure de la stature de la plénitude du Christ ; afin que nous ne soyons plus des enfants, ballottés et emportés çà et là par tous vents de doctrine ». Ce que Dieu a en vue pour nous, c’est que nous arrivions à notre pleine insistance, et cela « dans l’unité de la foi et de la connaissance du Fils de Dieu à la pleine croissance d’homme, à la mesure de la stature de la plénitude du Christ » : en contraste, je le répète avec cet état de faiblesse où l’on est exposé à toute la tromperie des hommes et à leur habileté à ourdir sans cesse de nouvelles trames d’erreur.

Puis vient l’opposé, la manière pratique selon laquelle notre accroissement a lieu. « Mais que, étant vrais dans l’amour, nous croissions en toutes choses jusqu’à lui qui est le chef, le Christ ». Être vrai dans l’amour exprime beaucoup plus que dire la vérité dans l’amour, quoique naturellement ceci soit une partie très importante de cela ; et nous savons tous qu’il est très possible de ne pas être vrai dans la pensée et le sentiment, lors même que les mots soient parfaitement exacts. « Être vrai dans l’amour » implique la vérité dans le cœur.

Nous trouvons ici les deux traits essentiels de la piété : naturellement ils se trouvèrent en Christ dans une perfection infinie. Il était la lumière. Quelque chose qu’Il dit, Il réfléchissait exactement la pleine vérité de la part de Dieu Lui-même ; bien plus, Il l’était. Il y a une expression remarquable en Jean 8, lorsque notre Seigneur discutait avec les Juifs et se présentait comme la lumière du monde. Ils Lui demandèrent ce qu’Il était, et Il répond : « Absolument ce qu’aussi je vous dis » (traduction exacte de l’original). Notre Seigneur est exactement et absolument ce qu’Il profère ; Ses paroles expriment avec une certitude infaillible ce qu’Il est. Il était certainement vrai dans l’amour. Les paroles de notre Seigneur reproduisaient si parfaitement l’homme intérieur, Il était si parfaitement transparent, que rien en Lui ne déviait de la vérité ; rien n’avait même l’apparence d’être si ce n’est exactement ce qu’Il était. Et cela parce qu’il n’y avait pas de péché en Lui, et qu’aucune fraude non plus ne se trouvait en Sa bouche. Il n’y avait pas d’autre objet que Dieu devant Son âme, selon qu’Il dit Lui-même : « Je fais toujours les choses qui lui plaisent ». Et soyez bien assurés de ceci, que ce qui seul nous donne la puissance de la vérité, c’est d’avoir Christ devant nous comme l’objet de nos âmes en toute chose dans l’activité et la pratique de la vie. Du moment que nous avons quelque chose de nous-mêmes comme objet, nous nous dévoyons d’autant, et il y a ce qui n’est pas la pleine vérité, car Christ seul est la vérité et Il nous donne seul la vérité dans l’amour parfait ; et ce n’est que dans la proportion que nous sommes remplis de Lui, et que nous Le possédons à l’exclusion de tout notre propre mal, que nous marchons nous-mêmes dans la vérité. Que nos cœurs soient fixés sur une chose ou une personne quelconque à l’exception de Christ, et le mal se montre ; il nous est bon de savoir et de reconnaître cela. Il n’en fut jamais ainsi avec notre Seigneur. Il pouvait dire : « Je me suis toujours proposé l’Éternel devant moi », et Il s’est donné Lui-même à nous pour l’objet à avoir toujours devant nous.

La viande de notre Seigneur et Son breuvage étaient de faire la volonté de Son Père ; toutefois, Il avait à rencontrer Dieu relativement à nos péchés d’une manière selon laquelle nous ne sommes pas appelés à le faire. Notre point de départ est une rédemption accomplie par Christ, qui nous a amenés dans la présence de Dieu et qui nous appelle à marcher conformément à la grâce qui nous a amenés là et qui nous y garde. Nous ne pouvons pas tous réaliser cela, mais nous en avons fini avec nous-mêmes en vertu de l’œuvre de Christ ; nous sommes amenés près de Dieu, pour être à l’aise, en liberté, avec Dieu, et c’est de cette position que nous sommes appelés à entreprendre tout ce qui peut être convenable pour nous ici-bas ; et ici nous avons à juger ce qu’est la volonté de Dieu, car nous ne sommes absolument que faiblesse si nous ne faisons pas nettement Sa volonté. Ce n’est pas seulement que Dieu veut que nous soyons bientôt semblables à Christ, mais c’est ce qu’Il a encore pour nous maintenant. Et en dépit de tout, partout où le cœur est sincère et où Christ est devant l’âme, bien qu’il puisse y avoir des différences immenses, toutefois ce sont là les délices de Dieu avec Ses enfants. L’enfant ne reste pas toujours enfant, mais devient un homme : et il devrait en être ainsi dans la famille de Dieu. Il veut que Ses enfants croissent.

Tel est donc le but des dons de Christ. Il est décidé à bénir les âmes même à présent dans le monde, et c’est là l’objet de tout le ministère. Il ne nous est pas livré pour que nous en pensions et en disposions de la manière qu’il nous plaira : le Seigneur le garde absolument entre Ses mains. Il aime Ses saints : Il veut les bénir ; et ceux qu’Il daigne employer individuellement comme Ses serviteurs pour avoir à faire avec les saints, Il les tient en rapport immédiat avec Lui-même, et Il veut qu’ils aient toujours devant leurs yeux ceux qui sont ainsi les objets de Son cœur dans le service qu’ils ont à remplir pour Lui et non pas pour eux. Aussitôt, en effet, que l’Église devient le principal objet de l’âme, la bénédiction est d’un caractère tout à fait inférieur, inférieur dans tous ses traits spirituels. Nous pouvons éprouver les uns à l’égard des autres les sentiments convenables, mais il y a quelque chose de beaucoup plus élevé que l’amour des frères, quelque divin qu’il soit ; et si vous ne connaissez rien comme votre objet au-dessus de l’amour fraternel, vous ne marcherez pas dans l’amour. Dieu est plus élevé que l’amour, et c’est là précisément le grand point de différence si nécessaire dans ce moment. L’une des principales choses contre lesquelles nous avons à nous tenir en garde, c’est l’effort que fait Satan pour persuader les gens que, parce que Dieu est amour, l’amour est par conséquent Dieu. Mais il n’en est point ainsi. Lorsque je dis que Dieu est amour, j’exprime ce qu’Il est dans l’énergie active de Sa sainte nature. Mais ce n’est pas là tout ce que Dieu est. Il est lumière autant qu’Il est amour ; et je dois confesser Son amour sans nier Sa lumière. Aujourd’hui ce qui prévaut chez beaucoup, c’est de déifier l’amour afin de dépouiller Dieu de Sa lumière ; mais si nous comprenons bien, non pas que l’amour « est Dieu », mais que « Dieu est amour », l’amour n’en existera pas moins, et de fait il sera plus réel et plus pur. En même temps qu’il sera la source de l’activité de nos propres cœurs, il ne sera pas en opposition avec le caractère de Dieu, mais il laissera à Dieu place et liberté pour se manifester conformément à tout ce qu’Il est. Dieu est vrai dans l’amour. Considérez Ses voies envers mon âme quand Il me convertit. La foi est-elle la seule chose produite par le Saint Esprit ? Quel est le premier effet de Son opération en un pécheur sur lequel Il a fondu ? C’est qu’il ne fait aucun cas de lui-même : et n’est-ce pas là l’amour ? Oui certainement, mais c’est l’amour de Dieu qui en agit avec moi dans la vérité de ce qu’Il est, et de ce qu’est la terrible condition du pécheur. En sorte que l’effet produit sur le cœur de celui qui est renouvelé n’est pas seulement la foi en Christ, mais la repentance envers Dieu ; c’est le jugement de sa condition morale tout entière devant ses yeux. Et comme vous le voyez en rapport avec les voies de Dieu envers une âme dès le commencement, et dans l’effet moral produit dans l’âme du saint, cela est vrai constamment. Partout où un saint agira selon sa vraie position en la présence de Dieu, il n’y aura pas moins pleinement place pour l’amour divin, mais la sainteté et la majesté de Dieu seront maintenues. Nous ne voudrions pas nous épargner de la souffrance en vue d’échapper à des difficultés aux dépens de Dieu. Nous ne sommes jamais passés par une épreuve du cœur avec Dieu, sans en avoir reçu de la bénédiction. Nous pourrions obtenir la bénédiction dans une mesure encore plus riche, sans tant manquer ou tant faire voir ce que nous sommes ; mais si nous ne nous saisissons pas de Christ de manière à être élevés au-dessus de nous-mêmes, il faut alors que nous apprenions douloureusement ce que nous sommes. Toutefois Dieu fait concourir tout cela à notre bien.

C’est là la pensée capitale de ce chapitre. Dieu nous a amenés à cette position bénie. Avant tout nous sommes en Christ devant Dieu, et, ensuite, Dieu demeure en nous : l’une de ces choses est notre grand privilège, l’autre est notre solennelle responsabilité découlant du fait que Dieu a fait de nous la place de Son habitation.

Cette vérité de l’habitation de Dieu exclut aussitôt toutes les notions ecclésiastiques rétrécies. Si nous nous réunissons simplement comme une église, une relation pareille avec Dieu disparaît. Mais quand ce ne serait qu’au nombre de deux ou trois, il faut que nous nous réunissions sur le principe de l’Église ou cela n’a pas de vérité devant Dieu ; et deux ou trois chrétiens réunis de cette manière seraient avec Dieu et auraient Dieu demeurant en eux. Là se trouve Christ, et Dieu y demeure d’une manière spéciale. Dieu peut bénir même dans une position qu’Il ne sanctionne pas ; Il peut bénir dans le papisme. La grâce de Dieu est tellement riche, et tellement au-dessus des voies mauvaises de l’homme, qu’Il peut se servir du nom de Christ dans les circonstances les plus fâcheuses ; mais c’est une chose tout autre que de mettre Son sceau à ce que nous faisons. Pour qu’Il puisse s’associer à cela, il faut que nous soyons dans la vérité des choses et que nous agissions conformément à la pensée divine. Je crois que ce n’est que de nos jours que cette grande vérité a été mise en lumière par le Saint Esprit de manière à agir sur les âmes selon Dieu. Je ne sache pas que depuis la ruine de la chrétienté, il lui ait été rendu un plein et entier témoignage. Il y a eu abondance de tentatives et d’efforts pour améliorer le présent et imiter le passé ; mais ni l’une ni l’autre de ces choses ne sont la provision que Dieu a faite dans la Parole pour les saints dans une condition déchue. Quand vous voyez un homme s’efforcer pieusement et simplement, et toujours avec plus d’ardeur et de zèle, de se corriger, de devenir meilleur, vous dites avec raison qu’il est sous la loi et ne comprend pas l’évangile. De la même manière précisément lorsqu’un certain nombre de chrétiens tachent d’améliorer la chrétienté par de nouveaux plans et de nouveaux efforts, je me sens pressé de dire que s’ils comprenaient la nature de l’Église de Dieu et la relation du Saint Esprit avec elle, ils sentiraient que substituer l’union à l’unité, c’est remplacer celle-ci bien pauvrement ; ils s’humilieraient devant Dieu à cause de l’état de l’Église, et auraient recours à la Parole de Dieu pour voir s’il n’y a pas une voie réelle et humble, mais selon Dieu et de Sa part, en vue de l’état actuel des choses dans l’Église ; que Dieu daigne délivrer Ses saints de l’idée impie aussi bien qu’incrédule, mais bien généralement répandue que, par suite des circonstances présentes, nous sommes obligés de poursuivre dans le péché ! Pour les hommes d’un discernement spirituel, cette pensée revient à faire de Dieu un être pareil à nous-mêmes. Si je fais l’abandon de Sa sainteté en une chose, comment puis-je la maintenir ou me confier en Lui dans une autre ? Bien au contraire, maintenons fermement qu’il ne peut exister de cas où Dieu puisse abaisser le niveau de Sa sainteté ou sanctionner que nous y manquions ; et si Sa volonté est parfaite dans les autres choses, l’est-elle moins dans ce qui tient si profondément, et de si près que l’Église, à la gloire et au nom de Christ ? On argumente du fait que les choses ne sont pas aujourd’hui dans l’ordre et la beauté du commencement ; et on va jusqu’à nier la responsabilité des saints, comme si les chrétiens n’étaient pas responsables d’une manière ou de l’autre de ces voies si éloignées de la pensée et de la volonté de Dieu. Et si on prétend qu’on doit continuer de les suivre parce qu’on a été élevé de cette manière, alors voici sûrement pour nous la question à poser : Désirons-nous apprendre et faire la volonté de Dieu ? Est-ce là le grand but que nous poursuivons ? Ou bien s’agit-il simplement de savoir où je trouverai assez d’aise, assez de bénédiction, de manière à aller toujours sûrement ? Au reste de ceci aussi, suis-je pleinement assuré que c’est en faisant la volonté de Dieu que vous jouirez de la plus riche bénédiction ; mais la bénédiction n’est pas le vrai motif chrétien, ce ne serait pas un mobile sûr. On peut aller ici et trouver un peu de bénédiction, et puis aller là dans l’espérance d’y en trouver un peu plus. Mais, comme c’est dit dans notre passage, la croissance a lieu « afin que nous ne soyons plus des enfants ballottés et emportés çà et là par tous vents de doctrine ». Dieu veut que nous soyons gardés de toute la tromperie des hommes et de leur habileté à user de voies détournées pour égarer.

N’y a-t-il donc pas de moyens d’arriver à la certitude au milieu de la confusion qui règne ? Assurément il y en a ; et où l’âme est suffisamment humiliée pour sentir ce qui est dû à Dieu, Il saura bien rendre toute chose claire. Nous ne devons jamais, soit en particulier, soit en public, participer à quoi que ce soit que nous savons être mauvais. Naturellement il peut partout se dire ou se faire des choses que nous ne saurions approuver ; mais participer à des actes publics de culte dont on connaît d’avance l’ordre comme systématiquement antiscripturaire, est chose entièrement différente de ces manquements individuels. En le faisant je m’identifie avec le péché qu’il y a en une chose faite contrairement à la Parole de Dieu et établie ainsi par l’autorité de l’homme. Mais cela montre l’importance qu’il y a à ce que rien ne soit fait dans l’assemblée qui n’ait l’assentiment de l’assemblée tout entière, et combien par conséquent aussi il est évidemment désirable de garder loin de l’assemblée toutes les questions controversables. Nous pouvons en parler à un serviteur de Dieu, ou à un frère ; mais le fait que je puis jouir individuellement d’un sujet ne m’autorise pas à l’introduire dans l’assemblée de Dieu, à moins que je ne croie qu’Il veut que j’en parle spécialement, si je sais que cela donne lieu à un juste doute dans l’esprit du plus simple croyant. Les petites affaires de discipline ne doivent jamais être introduites dans l’assemblée ! S’il s’agit de quelque affaire de fausse doctrine touchant des vérités fondamentales ou d’immoralité grossière, quoi que ce puisse être, il est évident que sur des points pareils tous les saints doivent être supposés avoir le même jugement. Tous sentiront qu’ils ne sauraient avoir communion avec le blasphème ou l’ivrognerie, ou toute autre déplorable manifestation du mal de quelque nature que ce soit. Nous trouvons ensuite des cas qui réclament le jugement collectif de l’assemblée tout entière. Supposez qu’un saint fût, comme l’on dit, de l’église nationale, ou un dissident et peu versé dans ce qu’enseigne l’Écriture quant à l’idée et l’action ecclésiastiques, malgré cela s’il était réellement né de Dieu il ne pourrait y avoir de différence importante dans le jugement à porter en de pareilles matières. La puissance de l’Esprit est grande ; le Seigneur sait comment opérer ; et les instincts spirituels communs à tous les enfants de Dieu guidés par Sa Parole dans de telles matières, trouvent leur expression dans la répudiation et le jugement de tous ces maux. Mais la discipline publique dans l’Église est une affaire si sérieuse, qu’on ne doit jamais y recourir jusqu’à ce que le mal ait atteint un degré tel que tous les croyants d’un esprit impartial et sans prévention soient unis à son sujet. Il y a tendance chez les esprits justes et actifs à faire de toute différence qui surgit une question que l’Église doit prendre en main et décider. C’est là une grave erreur, grosse de maux pour tous ceux qui y sont impliqués, et contre laquelle il faut combattre avec toute l’énergie possible. Les saints eux-mêmes sont exposés à se laisser aller à des préjugés ou à des préventions dans ce qui les concerne les uns les autres, particulièrement dans les petites choses qui prêtent tant à l’esprit de parti. En outre ce serait pour bien des âmes une véritable torture, si toute affaire privée était susceptible d’être produite en public. Dieu soit béni, Il nous a donné Ses propres jalons pour diriger notre marche et nous a montré clairement qu’on ne doit jamais rien soulever comme sujet de discipline publique de l’Église avant d’avoir employé tous les moyens pour l’empêcher. Le désir de nos cœurs doit être la gloire de Dieu dans la bénédiction réciproque de nos âmes ; et nous savons tous qu’une publicité inutile doit ajouter largement à la honte, à la souffrance et aux difficultés. Mais lorsque c’est nécessaire, qu’on le fasse, de sorte que ce soit pour le Seigneur, avec la plus profonde gravité et un véritable amour. La ruine de la vraie idée de l’Église et de son action a tendu à la rabaisser au niveau d’un simple club.

Mais lorsque nous avons saisi la vérité que le Seigneur a sur la terre ce avec quoi Il lie Son nom, quoique peut-être il n’y en eût que deux ou trois qui se soient rassemblés autour de ce nom, répudiant leur connexion avec ce qui est du monde et de l’homme ; lorsque nous sommes arrivés à apprendre de Dieu que Celui qui a sauvé nos âmes est le seul qui soit capable de former, de garder et de diriger l’Église — si nous savons qu’Il nous a fait membres de Sa propre Église, tout ce que nous avons à faire est d’agir sur le principe de l’Église que Dieu a faite. Si nous appartenons réellement à Dieu, nous appartenons à Son Assemblée et nous sommes tenus de la réaliser d’une manière pratique. Si j’en connais qui agissent, en quelque petit nombre que ce puisse être, d’après la Parole de Dieu qui s’applique à cela, j’ai pleine liberté, bien plus, je suis tenu dans la liberté de Christ de me réunir avec eux. Ce serait, naturellement, un sujet d’actions de grâces s’il y en avait des centaines de milliers se réunissant ainsi, quoique cela pourrait bien d’une autre manière occasionner plus de souffrances et plus d’épreuves. Mais l’épreuve ne sera pas seulement le trouble de la chair ; elle sera, si nous marchons avec Dieu, l’exercice de la grâce et de la patience ; elle fera appel à l’amour réel pour Christ qui cherche le bien des autres et qui se traduit toujours en intercession sous l’effet de la pression du mal de tous les côtés.

En supposant donc que deux ou trois arrivent à ce point — de ne pouvoir pas plus reconnaître une église d’homme, qu’un salut d’homme, doivent-ils demeurer tranquilles, déshonorant Dieu et ruinant leur conscience en persistant dans un mal connu ? Ou plutôt ne doivent-ils pas, marchant dans la foi, se réunir au nom du Seigneur ? Très certainement ; qu’ils se réunissent décidés à suivre docilement la Parole et se confiant dans l’Esprit de Dieu. Ils rencontreront des épreuves, mais ils auront la vraie liberté et le Saint Esprit opérant au milieu d’eux. Il est donné pour demeurer avec eux éternellement ; qu’ils croient cela et qu’ils ne manquent pas d’y compter. Il se peut qu’ils soient très faibles, mais le Saint Esprit n’est pas faible. Quand ils se réuniront peut-être ne se trouvera-t-il personne pour leur parler un peu au long d’une manière profitable ; mais l’assemblée de Dieu ne se réunit pas pour des sermons. Qu’il y ait beaucoup ou peu de discours, le but des chrétiens en s’assemblant est de faire la volonté de Dieu, de se souvenir de Christ, d’agir conformément à l’Écriture sur la foi des vues de Dieu dans Sa propre Église. Et s’il y avait dans leurs environs vingt mille chrétiens se réunissant sur des principes humains, quel croyant pourrait maintenir que ces deux ou trois n’auraient pas la présence spéciale de Dieu parmi eux d’une manière dont les autres ne l’auraient point ? Plus nous avons le sentiment de la ruine de l’Église, plus aussi nous avons pleine confiance que les principes de Dieu demeurent toujours intacts et aussi obligatoires aujourd’hui qu’au jour de la Pentecôte ; plus l’âme est heureuse dans le Seigneur, et plus elle se répandra en amour pour tous les saints. Puisse-t-il nous être ainsi accordé par grâce « de croître en toutes choses jusqu’à lui qui est le Chef, le Christ » ! Cela ne dépend pas du nombre des communiants, ni de la forme et des moyens de l’action dans le ministère, mais bien davantage de la condition de nos propres âmes avec Dieu et de l’accomplissement de Sa volonté, non seulement dans notre service et notre vie comme individus, mais aussi comme Son assemblée qui doit se réunir conformément à Sa Parole.

Il y a donc ces trois choses : d’abord et prééminemment, la perfection des saints individuellement ; ensuite, d’une manière secondaire, l’œuvre du ministère dans laquelle d’autres personnes agissent sur moi ; et, enfin, l’édification du corps de Christ. La pleine portée et le résultat désiré de tout cela est la croissance jusqu’à l’état d’homme fait, à la mesure de la stature de la plénitude de Christ ; « afin que nous ne soyons plus des enfants ballottés et emportés çà et là par tous vents de doctrine dans la tromperie des hommes, dans leur habileté à user de voies détournées pour égarer ; mais que, étant vrais dans l’amour, nous croissions en toutes choses, jusqu’à Lui qui est le chef, Christ ». Permettez-moi de vous en produire une preuve pratique. Vous savez que de bonne heure, surgirent de fausses doctrines et des hérésies de toutes sortes. Quelle fut en ces jours-là la ressource des hommes pieux ? On inventa des confessions et des symboles par lesquels on tâcha de mettre à l’épreuve les personnes suspectes. Mais où était l’autorité pour une pareille voie ? Ces remparts préservèrent-ils du mal ? En aucune manière, jamais, nulle part. Il n’y a qu’un seul pouvoir capable de maintenir la vérité et l’amour — Christ ; et là où Christ est réellement retenu et où l’on demeure attaché à Christ sans les arrangements des hommes, il est possible qu’il y ait d’abord de la faiblesse et de l’ignorance, mais en définitive la force de Christ sera accomplie dans leur faiblesse. La puissance de Christ reposera sur ceux qui, sentant leur propre faiblesse, s’attachent à Lui seul. De l’autre côté, tandis que souvent en imposant des symboles vous mettez en perplexité des consciences faibles chez les gens pieux, vous parvenez rarement, si même vous y arrivez quelquefois, à exclure par là les hommes méchants ; et les chrétiens spirituels qui ont leur sentiment de l’honneur dû à la Parole de Dieu et en état de voir le caractère non scripturaire de ces symboles, lors même qu’ils seraient pleinement corrects, n’estimeraient pas non plus convenable de les reconnaître. Par conséquent vous embarrassez et faites broncher les faibles parmi les enfants de Dieu et vous excluez les forts. Vous avez une multitude de signataires légers ou bigots ; et quant aux hommes dangereux, quel voleur se laisse arrêter par un credo ? Les barrières humaines sont capables de déshonorer l’œuvre de Dieu mais ne peuvent pas empêcher le mal de l’homme ou de Satan. Ce que vous trouvez dans l’Écriture, ce sont les saints conduits en avant, et le corps bien lié ensemble par les diverses jointures du fournissement et recevant ainsi la nourriture qu’il lui faut. Voilà l’exercice et le fruit du ministère exercé dans toute son étendue ; mais le Saint Esprit peut donner une parole par quelqu’un qui ne possède pas un don permanent. D’ordinaire Dieu fait d’un homme un évangéliste ou un docteur ; de sorte que c’est une vérité divine qu’il existe un ministère positif.

Mais le ministère exclusif, j’ose le dire, constitue une usurpation sur les droits de Christ et une entreprise sur l’action du Saint Esprit. Dieu a permis que la ruine de l’Église fût plus sentie dans ces derniers jours qu’à aucune autre époque que je sache de l’histoire de l’Église ; mais Il a fait aussi apprendre et sentir aux âmes qu’il n’y a pas de ruine de l’Église qui détruise un principe divin. Ce qui était la vérité pour l’Église est la vérité pour l’Église. Le principe originel du ministère demeure toujours le seul principe que Dieu sanctionne ou que nous devons suivre. Si aux temps apostoliques il n’y eut rien de pareil à la pratique moderne, c’est de nos jours une chose humaine, et pourquoi un saint devrait-il la retenir ou la justifier ? L’Église doit au Seigneur d’une manière absolue de ne se mêler en rien de ceux qui font Son œuvre conformément à l’Écriture[2] ; et aussi que tous Lui laissent place pour en susciter d’autres selon qu’il Lui plaît. Nul ouvrier, quelque habile ou béni qu’il soit, ne réunit tous les dons en sa personne. Il pourrait se trouver dans la congrégation quelque membre de Christ qualifié de Dieu pour édifier occasionnellement par une parole de sagesse, ou capable de prêcher l’évangile, d’exhorter, ou de servir de quelque manière et en quelque mesure, selon la Parole de Dieu. Ce que nous trouvons dans l’Écriture, c’est la porte tenue ouverte en principe et en pratique pour tout ce que Dieu donne. Sûrement ce n’est pas là déprécier le ministère ; c’est, au contraire, l’affirmer et les droits du Seigneur en lui. Mais le principe d’après lequel le ministère est exercé aujourd’hui, est si entièrement, certainement et manifestement humain, que l’effet en est inévitablement d’accréditer comme ministres bon nombre de personnes qui ne sont pas même chrétiennes, et de décréditer tous les vrais ministres qui, pour l’amour du Seigneur, rejettent leurs formes non scripturaires. C’est là un mal qu’aucun saint pieux ayant le désir d’être obéissant, ne doit tolérer, ou même considérer comme peu de chose, un instant. Pour ma propre part, c’est la raison pourquoi c’est mal de devenir ministre d’une dénomination qui suit (comme elles le font toutes) ces traditions sans fondement. Si vous êtes réellement ministre, vous êtes ministre de Christ, et pas de quelque autre corps. La Parole de Dieu fait cela aussi clair que le jour. L’action de l’assemblée, comme telle, est entièrement distincte. Tout en étant naturellement partie ou membre de l’assemblée, le ministre doit toutefois agir, s’il agit justement, de la part de Christ, et de Christ seul. Il peut chercher à édifier les croyants par des discours, des exhortations, qui s’adressent à eux ; il peut poursuivre avec zèle la conversion des non croyants ; mais qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas de ministère (naturellement ce dernier cas serait une perte), l’assemblée n’en est pas moins en état et obligée de remplir ses propres fonctions en soumission au Seigneur. En outre, ce n’est pas le ministère, mais la présence et l’opération de l’Esprit qui constituent la puissance de l’assemblée. Il est aussi important pour l’assemblée de se mettre bien cela dans l’esprit, qu’il l’est pour les serviteurs de se souvenir qu’ils ont à faire directement avec Christ comme leur Seigneur. Il va sans dire que l’abus du ministère comme tout autre péché, amène nécessairement celui qui en est coupable sous le jugement de l’assemblée. Nul ne peut jamais être au-delà du jugement de l’Église là où il y donne occasion par quelque mal dans sa conduite. Mais l’intervention de l’Église ne doit jamais se montrer sauf dans le cas de quelque mal connu, doctrine ou pratique.

Cela peut aider à faire voir la portée pratique du passage. Ce que Dieu fait et ce que Christ donne, les services mutuels des divers membres du corps, jointures et liens — tout a pour but que nous « croissions jusqu’à Christ en toutes choses ; duquel tout le corps bien ajusté et lié ensemble par chaque jointure du fournissement, produit l’accroissement du corps pour l’édification de soi-même, en amour ». Nous avons là la théorie de l’Église, parce que Dieu, en posant ces principes bénis, n’introduit pas les simples accidents du mal ; pas l’ombre de l’idée qu’une vis soit trop lâche ici, ou que quelque autre chose aille mal là : tout est supposé se mouvoir harmonieusement en vue de la grande fin pour laquelle le Seigneur l’a établie. Il est une difficulté qu’on allègue souvent — vous ne sauriez, nous dit-on, avoir sur la terre une église parfaite. Qu’entendent-ils par là ? Si c’est une église où il ne se trouvera pas une âme qui ne fasse ou ne désire jamais rien qui ne soit selon Dieu, ils affirment sans aucun doute une vérité banale, si ce n’est pas plutôt une pauvre folie. Mais ce que l’on veut insinuer, c’est qu’il n’est pas possible sur la terre d’avoir quelque association de saints selon la volonté de Dieu. Je nie cela formellement et je crois que vous pouvez trouver aisément le sentier de Sa volonté, et que tout croyant doit trouver ce sentier. Vous êtes sous la responsabilité d’apprendre la volonté de Dieu concernant Son Église, si vous en êtes membre, et de ne rien faire d’autre. Si je connais dans une localité deux ou trois chrétiens cherchant à marcher conformément aux Écritures, là doit être mon lot. Il est possible que l’un soit un homme naturellement ardent, qu’un autre ait des idées et des manières étranges. Il pourrait y avoir quelque chose de blâmable dans chacun de ces individus. Tout cela ne doit pas m’arrêter un instant, parce que le principe d’après lequel je les reconnais comme étant cette partie de l’Église qui agit là où ils sont selon Dieu, ne dépend pas de quelque idéal sans tache en ceci ou en cela. La question est — font-ils la volonté de Dieu en se réunissant ainsi conformément à Sa Parole ? La volonté de Dieu au moins est parfaite, et celui qui la fait demeure éternellement. Sa volonté touchant Son Église n’est-elle pas aussi absolue qu’à l’égard de toute autre chose ? Si cela est admis, je dis que c’est là le principe pour agir. Ne devons-nous pas nous occuper de l’affaire de notre Père quant à ceci ? De sorte que, pour tous ceux qui désirent plaire à Dieu, l’unique question est : Qu’est Sa volonté ? Elle n’est pas sûrement que nous nous rassemblions comme le troupeau de M. tel ou de M. tel (car où trouvons-nous quelque chose de pareil dans l’Écriture ?) mais bien que nous nous réunissions comme des chrétiens qui sommes simplement attachés à Christ et qui comptons sur le Saint Esprit pour nous enseigner toute la volonté de Dieu. Cela et cela seul ne constitue-t-il pas la vraie base sur laquelle les chrétiens doivent agir comme corps ? Où, donc, trouverai-je des chrétiens se rassemblant de cette manière ? Y en a-t-il qui ont eu la foi pour sortir de tout ce qui est purement humain, afin de se placer sur le fondement posé dans la Parole de Dieu ? La même Écriture qui me dit comment je dois être sauvé, m’enseigne de quelle manière marcher dans Sa maison, l’Église de Dieu. Ni l’Assemblée, ni le ministère ne sont laissés à l’idée ou au caprice de l’homme ; pour l’un et pour l’autre il nous faut sonder la Parole de Dieu, et lui être soumis. Le système de Dieu (car il en a un tel qu’il est révélé dans l’Écriture), est ce que nous avons à découvrir pour ensuite agir d’après lui ; et bien que nous puissions rencontrer des épreuves et des difficultés très grandes et nous trouver nous-mêmes dans les mêmes embarras par lesquels eurent à passer les saints des premiers jours, toutefois, cela même nous confirme la vérité et nous aurons joie et force si nous nous tenons simplement dans la dépendance du Seigneur et si nous Lui sommes obéissants. Les épreuves mêmes deviendront le moyen d’une nouvelle bénédiction ; et nous ferons l’expérience combien véritablement Dieu nous donnera d’employer pour Sa propre gloire bien des choses de Sa Parole qui jadis étaient sans usage pour nous dans la pratique, et qui étaient supposées se rapporter simplement aux temps apostoliques. Nous commençons donc à trouver une application actuelle de la Parole de Dieu dans notre position comme corps, juste autant que dans la satisfaction des besoins de nos âmes au jour le jour. S’il en est ainsi, puissions-nous réaliser le bonheur non seulement de connaître ces choses, mais de les pratiquer avec constance jusqu’à la fin.

Nous arrivons maintenant à ce qui concerne la marche chrétienne en général, comme se rattachant à la doctrine de notre épître et en harmonie avec elle. Le commencement du chapitre 4 renferme bien, il est vrai, une exhortation à marcher d’une manière digne de la vocation dont nous sommes appelés, mais ici l’apôtre en vient aux détails. Et d’abord c’est une solennelle injonction aux saints de ne plus marcher, comme marche le reste des nations, dans la vanité de leurs pensées. L’Esprit de Dieu nous met en garde contre une chose à l’égard de laquelle nous aurions peut-être jugé une telle précaution superflue — la marche de ceux qui nous environnent — la marche qui a été la nôtre avant que nous fussions amenés à Christ. Toutefois, dès que nous réfléchissons, la sagesse d’une exhortation pareille apparaît aussitôt. Car, d’ordinaire, les chrétiens sont exposés à subir considérablement l’influence du courant des pensées et des sentiments du monde. La passion qui prédomine dans le monde à un temps donné risque toujours d’être un piège pour ceux au moins qui reculent à la pensée de charger la croix tous les jours, et un piège d’autant plus dangereux qu’ils ne se défient pas d’eux-mêmes. Quel que soit l’objet dont il s’occupe, principalement, s’il est d’une nature religieuse, philanthropique ou de progrès moral, nous sommes toujours en danger d’être surpris. En outre, et c’est ce dont il s’agit ici directement, les vieilles habitudes ont beaucoup de force ; aussi l’apôtre n’hésite-t-il pas à avertir ces saints qui se tenaient, non seulement dans la fraîcheur de la joie de la foi, mais aussi dans leur position extérieure, très séparés du monde, et alors que les lignes étaient fortement marquées ; et néanmoins par cette première parole d’exhortation, le Saint Esprit met solennellement les saints en garde contre le danger d’être entraînés dans les voies et les pratiques des Gentils. Il y a souvent danger de cela pour les chrétiens, parce qu’ils n’aiment pas de paraître singuliers. Il peut bien se trouver parmi les enfants de Dieu des personnes originales ; mais ce n’est pas d’individus excentriques que l’apôtre parle, car pour eux ce ne serait pas une difficulté, mais un plaisir, de différer de tous les autres. Ils affectent l’originalité dans leurs paroles et leurs actions, et après tout ils ne sont que bizarres. Mais c’est contre le danger moral ordinaire, lorsque la foi a perdu quelque chose de sa simplicité et de sa fraîcheur, qu’il cherche à nous mettre en garde.

De l’autre côté, l’apôtre a montré ailleurs — et nous devrions tâcher toujours de nous en souvenir — que c’est une chose importante et sage d’en agir avec les âmes en grâce autant que possible, et de ne pas imposer aux autres ce qu’ils n’ont pas la force de porter. En écrivant aux Corinthiens, l’apôtre avait insisté sur cela, selon qu’il l’avait pratiqué dans son ministère. Il était devenu comme Juif pour les Juifs, afin de gagner les Juifs. Il était devenu toutes choses pour tous, afin que de toute manière il en sauvât quelques-uns. Il ne s’agissait pas d’insister sur des points particuliers. Le désir de son cœur était le bien des âmes ; car nous pouvons posséder ce désir sans insister sur nos propres pensées et nos sentiments particuliers, quelque justes qu’ils puissent être. Voilà la largeur du chrétien s’il est établi dans la grâce. Quand il s’agit de nos propres âmes, du danger de glisser nous-mêmes, nous ne saurions trop serrer la corde, ni être trop prompts, trop fermes dans la vigilance et la prière ; mais c’est autre chose quand il s’agit des autres. Nous devons supporter leurs infirmités si nous sommes véritablement des forts ; c’est pour leur bien que le Seigneur les place sur nos cœurs. Nous voyons, en effet, que, même avec Ses propres disciples, Il n’allait pas au-delà de ce qu’ils étaient en état de supporter pour le moment. Mais le désir même de faire du bien aux âmes, et de ne pas soulever des questions pouvant engendrer des disputes, pourrait exposer un chrétien animé de l’esprit de grâce, à prendre la couleur de ceux qui lui sont étrangers, et à abandonner ses propres principes.

Il n’y a donc pas d’incertitude à l’égard du support dans lequel nous sommes appelés à marcher les uns avec les autres ; toutefois nous devons prendre garde de ne pas changer la grâce en légèreté ou en dissolution. « Voici donc ce que je dis et témoigne dans le Seigneur, c’est que vous ne marchiez plus comme le reste des nations aussi marche dans la vanité de leurs pensées, ayant leur entendement obscurci, étant étrangers à la vie de Dieu à cause de l’ignorance qui est en eux, à cause de l’endurcissement de leur cœur ». Ici il commence par la chose intérieure. Vous remarquerez que notre tendance est de nous occuper et d’occuper les autres de quelque chose d’extérieur. Mais l’apôtre va à la racine de la marche mauvaise des Gentils. Leurs pensées étaient vaines et vides, comme doivent l’être les pensées de gens qui n’ont pas, nettement et positivement et d’une manière intelligente, Dieu devant eux dans une affaire quelconque, de quelque nature qu’elle puisse être. Pour ce qui est de ces Gentils, ils n’avaient Dieu devant eux en rien ; ils étaient « sans Dieu dans le monde ». En conséquence, il n’y avait rien que la vaine pensée, et la bouche de l’homme imaginant une chose et en exprimant une autre. Et qu’en résultait-il ? Leur entendement était obscurci. « Ils étaient étrangers à la vie de Dieu à cause de l’ignorance qui était en eux, à cause de l’endurcissement de leur cœur ». Ce sont là des descriptions diverses non pas de la marche extérieure, mais de la racine de tout le mauvais fruit qu’ils portaient. Dieu n’était pas dans toutes leurs pensées. Ils étaient « étrangers à la vie de Dieu ». Comment pouvait-il en être autrement ? La vie de Dieu ne se trouve qu’en Lui et en Son Fils, et en conséquence ils ne l’avaient pas. Bien loin d’avoir le moindre sentiment juste de leur besoin, ils étaient étrangers au bien ; et cela en raison de l’aveuglement ou de l’endurcissement de leur cœur. C’est là qu’est rattachée la source de la mauvaise conduite de ces Gentils ; en résumé elle provenait de leur ignorance, et leur ignorance venait de ce que leur cœur était endurci et aveuglé. Quel caractère solennel et pratique a cette vérité pour toute âme d’homme, convertie ou non ! Notre conduite découle de notre manière de juger, et notre manière de juger découle de nos affections. De là la grande importance de l’état de nos cœurs pour tout ce qui concerne la vie pratique. Nous apprenons ici que tout l’homme extérieur a sa source dans l’homme intérieur, et que l’homme intérieur est formé par ce qui gouverne le cœur.

De là, l’importance absolue que Christ soit l’objet du cœur — plus encore, son objet exclusif ; car rien de plus commun qu’un cœur partagé dans ses affections : c’est même contre ce mal que nous devons le plus veiller. Si nous avions davantage l’œil simple et un cœur se jugeant mieux lui-même et plus entièrement consacré à Christ, quelle en serait la conséquence ? Comme c’est le cœur qui donne toujours au jugement sa direction, sa couleur et son énergie, il n’y aurait jamais d’incertitude dans notre marche individuelle, et tout ne serait que paix dans notre marche en commun dans la lumière de Dieu, sans faux pas ni trébuchement d’aucune sorte. Et c’est bien là le chrétien en théorie (comp. Phil. 1 et Col. 1). Dans la pratique il y a des difficultés. Qui de nous n’a pas eu à confesser de tristes chutes et du péché ? Qui n’a pas eu à dire : Je ne sais pas quelle est la pensée de Dieu à l’égard de ceci ou de cela ? En un mot, l’entendement a été trop souvent obscurci, et la marche différente de la marche de Celui de qui nous sommes. Naturellement il y a des différences entre cela et ce qui est décrit dans notre passage. Mais n’est-ce pas une chose solennelle qu’on ait à veiller précisément contre le même mal qui nie et outrage le caractère et la volonté de Dieu dans des âmes qui ne Le connaissent pas ? Et toutefois c’est ce que nous avons tous à sentir et confesser quant à nous-mêmes. Que de fois nous nous sommes trouvés sans la lumière divine ! Ce ne devrait jamais être le cas chez un saint. Il n’en fut jamais ainsi de Christ. Il était la lumière. De sorte que ce serait rester complètement au-dessous de ce qui est dû à Sa gloire, de dire qu’Il marcha toujours non seulement dans la lumière, mais selon la lumière. Aussi ne sut-Il jamais ce que c’était que d’avoir l’ombre d’un doute. S’Il attendit, ce ne fut jamais incertitude, mais connaissance plus grande de la volonté de Son Père, comme en Jean 11. Ce peut être notre affaire d’attendre ; et c’est bien d’agir ainsi, lorsque nous n’avons pas une parfaite assurance. Le développement qui suit est une description de la terrible dépravation des Gentils ; comme il dit dans le verset suivant : « Qui ayant perdu tout sentiment moral, se sont livrés à la dissolution, pour pratiquer avidement toute impureté ». Sans aucun doute, c’est la plus abjecte dégradation morale dont soit capable la vie de l’homme. Mais ce qu’il nous est salutaire de voir et de nous appliquer pour le bien, la direction et aussi la préservation de nos propres âmes, c’est que tous les excès de ce mal extérieur provenaient de ce que le cœur était obscurci, et l’était par la raison qu’il était sans Dieu. Il n’y avait rien que ce que Satan tirait du propre esprit de l’homme, et la conséquence était que son jugement et ses sentiments étaient faussés. Par suite, les hommes étaient devenus la proie de toute sorte de maux. Ils s’étaient livrés à la dissolution pour pratiquer avidement toute impureté.

Mais maintenant voici en contraste le chrétien : « Vous n’avez pas ainsi appris le Christ », dit l’apôtre, bien que nous soyons en danger de tout cela, et que Dieu se serve du sentiment même de notre danger pour nous empêcher d’y tomber. De même que toute la mauvaise conduite des Gentils provenait de leur ignorance de Dieu, et que par suite de cette ignorance, le cœur, l’entendement, la marche, tout était mauvais et le devenait de jour en jour davantage ; de même à présent la délivrance de la part de Dieu, de tout mal, racine, branche et fruit, c’est Christ. Et quelle délivrance bénie, simple, sainte et glorifiant Dieu ! Cependant l’apôtre n’entre dans aucune des opérations diverses dont Dieu peut se servir pour conduire à ce résultat. En outre, Christ est le chemin aussi bien que la vérité. Le grand moyen qui s’applique à tous les cas et qui donne la plus sûre délivrance, c’est Christ Lui-même. « Vous n’avez pas ainsi appris le Christ ». C’est intentionnellement qu’il Le présente comme la personne qui a à faire directement avec l’âme : manière remarquable de nous rattacher avec notre Seigneur, quoique chose ordinaire en Jean. « Mes brebis entendent ma voix ». Mais ici, où le point principalement présenté est l’union des membres avec la Tête, et non pas la vie seulement, nous arrivons de près à l’enseignement de l’ancien ; c’est comme si nous avions entendu Christ nous-mêmes. « Si toutefois vous l’avez entendu » ; ils étaient enseignés par Lui « selon que la vérité est en Jésus ». N’y a-t-il pas une grande force dans cette expression ? Ce n’est pas, selon que la vérité est en Christ. Nous savons tous que Jésus est Christ, et que Christ est Jésus. Mais Dieu n’emploie jamais un mot inutilement. Et je pense que la différence est d’autant plus grande qu’il est fait usage des deux noms. Il emploie tout d’abord celui de Christ. — « Vous n’avez pas ainsi appris le Christ », parce que là il met devant mon âme toute l’étendue de mon privilège. Christ est le nom spécial quand je L’envisage comme l’homme ressuscité, exalté. J’ai obtenu en Lui ma bénédiction. L’expression apporte à mon esprit l’idée de Celui en qui tout est concentré comme mort et crucifié et aussi dans le ciel. Jésus est le nom personnel qu’Il porte sur la terre. Dans les chapitres précédents l’Esprit avait révélé le grand nom placé devant nous en Christ. Mais lorsqu’il va parler de Sa connaissance pratique qui s’appliquait aux devoirs de leur marche ici-bas, il dit : « Si toutefois vous l’avez entendu et si vous avez été instruits en lui selon que la vérité est en Jésus ». Là, je suppose, il parle plutôt de Lui comme de cette personne qui, aux yeux des hommes, aussi bien que devant Dieu, était dans Ses voies ici-bas l’exemple béni de toute lumière et de toute pureté. Tout cœur spirituel appréciera aussitôt combien est précieuse et bénie cette manière de placer cela devant nos âmes : l’apôtre nous présente un vivant tableau de tout ce que nous avons en Christ, mais nous le voyons dans les voies de cet homme béni, Jésus, ici-bas. Par « la vérité qui est en Jésus », n’entend-il pas la vérité que nous voyons, entendons et savons réalisée dans toutes les paroles qu’Il proféra, dans toutes Ses voies, dans Son obéissance et Son service, dans toutes les sortes de souffrances à travers lesquelles Il passa sur la terre ; dans Sa patience, dans Son zèle ardent pour la gloire de Dieu, et Sa compassion pour de pauvres pécheurs ? Et toutefois, regardez où vous voudrez, et voyez comment Il ne tolère rien de ce qui est contraire à Dieu. Toutes ces choses, et infiniment davantage encore, nous les trouvons en Jésus, et nulle part ailleurs dans la perfection,

Ce n’est que dans la personne de Jésus que vous trouvez toute la vérité. Je puis l’apprendre par le Saint Esprit, et Il est seul la puissance par laquelle je la connais ; et c’est pour cette raison, je suppose, qu’Il est appelé « la vérité » en 1 Jean 5, 6. Ni Dieu, comme tel, ni le Père, ne sont jamais appelés la vérité, ni ne pourraient l’être : quand vous parlez de la vérité, vous n’entendez simplement ni la nature divine dans sa perfection ni la personne de Celui « de qui descend tout ce qui nous est donné de bon ». Mais pourquoi est-ce que Jésus est emphatiquement la vérité ? Jésus est Celui qui m’a présenté objectivement ce qui me fait voir la portée et la relation de toute chose avec Dieu aussi bien qu’avec l’homme. Si je veux éprouver une chose quelconque, je ne puis jamais voir son véritable caractère jusqu’à ce que je l’envisage en connexion avec la personne de Christ. Le Saint Esprit est la vérité subjectivement, parce que nul ne peut voir Jésus, trouver la vérité en Jésus, en dehors de Lui-même. Le Saint Esprit est le révélateur de Jésus ; notre propre esprit ne peut pas Le voir. Le nouvel homme même ne peut par lui-même comprendre Jésus ou entrer dans les choses de Dieu. Et vous remarquerez de quelle manière frappante cela fut montré dans le fait que les disciples eux mêmes, quoique convertis, eurent à attendre jusqu’à ce que le Seigneur leur eût ouvert l’intelligence pour comprendre les Écritures, et après cela qu’ils eussent reçu puissance pour marcher d’après elles. Après qu’ils furent convertis, ils eurent besoin de la puissance de l’Esprit pour être capables de comprendre les Écritures. Plus tard, il faut qu’ils attendent la puissance pour rendre témoignage à d’autres de la vérité d’après les Écritures. Ils eurent besoin d’avoir le Saint Esprit, indépendamment de la nouvelle nature, afin d’entrer dans les choses de Dieu. La simple nature humaine ne comprend jamais les choses de Dieu, le nouvel homme les comprend. Mais pour cela il faut qu’il soit conduit de l’Esprit. Le nouvel homme est caractérisé par la dépendance. Le Saint Esprit agit par Sa propre puissance. De sorte que pour entrer dans la vérité nous avons besoin non seulement de dépendre de Dieu, mais de recevoir de Lui puissance pour le faire. Je ne parle pas ici simplement de la conversion, mais de l’entrée pratique dans la pensée de Christ et dans les voies de Dieu, comme elles sont déployées dans les voies de Jésus.

Permettez-moi de faire ressortir par un exemple la valeur de la vérité telle qu’elle est en Jésus. Prenez la vérité que vous voudrez, l’homme, par exemple. Où apprendrai-je la vérité relativement à l’homme ? La trouverai-je en Adam ? Un homme qui a prêté l’oreille à sa femme après que celle-ci eut écouté le diable ? Un homme qui, après que Dieu fut descendu, s’enfuit loin de Lui, et osa insulter à Dieu en faisant tomber sur Lui un blâme ? Regarderai-je à ses fils ? À Caïn son premier-né, ou à Abel tué par Caïn ? Ce qu’il y avait de si beau en Abel était ce qui provenait de Dieu, non ce qui était de lui-même. Si vous poursuivez cette histoire de l’homme comme tel, vous ne trouverez chez lui que mal, orgueil et présomption allant toujours en croissant jusqu’à ce que de honte et de dégoût vous laissiez là toute l’histoire. Et c’est ainsi qu’elle finirait, n’était le second Adam. Mais ici je trouve dans chacun de Ses pas, dans chacune de Ses paroles, dans tout ce qui découla de Son cœur et qui fut réfléchi dans Ses voies, l’Être qui ne fit jamais Sa propre volonté. En Lui j’apprends la beauté et la merveille d’un homme soumis à Dieu sur la terre — le seul qui ait jamais marché dans une dignité morale parfaite, bien qu’Il fût méprisé de tous, et, par-dessus tout, haï des chefs religieux du monde en ces jours-là. Mais de quelle manière Dieu prit en Lui Son bon plaisir ! Ici nous trouvons donc l’humiliante vérité. L’homme s’est entièrement manifesté. Jésus, la croix, nous disent l’histoire.

Mais prenons un autre cas. Si je regarde à Dieu et pense à Lui, où Le trouverai-je avec assurance ? Dans la création ? Elle est toute ruinée ; de plus, Le lire uniquement dans le livre de la nature, c’est n’avoir que des rayonnements de puissance et de bonté. Mais au milieu de ces puissants et éclatants caractères de majesté divine, de sagesse et de bonté, répandus de toutes parts sur tout ce que Sa main a fait et ordonné sur la terre, j’ai aussi à contempler d’autres choses qui parlent de faiblesse, de décadence, de souffrance et de mort. Et la question s’élève d’où ces derniers traits viennent. Ils sont tout aussi tortus que les autres étaient droits ; les derniers sont aussi remplis de misère que les premiers portaient l’empreinte de la sagesse et de la puissance. Le résultat en est que pour l’homme qui ne fait que raisonner dans la vanité de ses pensées, l’intelligence est obscurcie de ténèbres ; et tout ce qui peut être appris même par la considération des œuvres de la main de Dieu, manque complètement à donner sa connaissance. Je discerne là les effets d’une autre main aussi bien que ceux de la sienne — la main d’un destructeur et d’un menteur ; et au lieu de vous élever de la nature au Dieu de la nature, comme le chantent vainement les poètes, vous risquez de décliner de la nature au diable qui l’a toute ruinée ; vous tombez dans les pièges de l’ennemi pour avoir voulu trouver Dieu par votre propre force. J’ai besoin de quelqu’autre voie par laquelle je puisse apprendre ce que Dieu est. Recueillir des preuves de Son existence est une chose ; Le connaître en est une autre. Je puis me réjouir en tout ce qu’Il a fait, mais que sont Ses pensées, Ses sentiments, Ses voies spécialement à l’égard d’un pécheur ? Si vous parlez de la providence, n’y a-t-il pas un Abel qui souffre et un Caïn qui prospère ? De grandes œuvres se firent dans la famille de l’orgueilleux meurtrier ; tandis que ceux qui possédaient tout ce qu’il y avait de lumière de Dieu étaient repoussés et méprisés par le monde, souvent faibles à leurs propres yeux aussi, mais souffrants et rejetés, partout où il y avait la foi, de la part de ceux qui ne croyaient point. C’est là une énigme impénétrable pour l’homme. Comment peut-il, en présence de tels faits, discerner le pouvoir de contrôle souverain d’un Dieu comme la conscience dit qu’il y en a un ? Il surgit constamment des difficultés ; et la raison en est évidente ; — ce n’est pas dans les circonstances extérieures, pas plus que dans mon propre esprit, que je puis trouver la vérité. Non pas qu’il n’y en ait pas des traces et des indications dans la providence comme dans la création, mais j’ai besoin de la vérité et je ne puis la trouver ni dans l’une ni dans l’autre.

Ensuite je puis en venir à la loi. Est-ce qu’elle me donne la vérité ? En aucune manière. Non que la loi ne fût pas bonne et sainte, mais elle n’est jamais appelée la vérité, ni en elle-même ne pouvait l’être. Elle était plutôt destinée à faire connaître l’homme que Dieu. Elle eut pour effet que l’homme put apprendre par elle ce qu’il est lui-même. Elle agit comme une charrue lorsqu’elle est dirigée par l’Esprit, dans le cœur ; elle ouvre bien des sillons et manifeste ce que l’homme n’eût jamais pensé s’y trouver auparavant. Mais aucune de ces choses ne montre ce que Dieu est pour l’homme en grâce. La loi elle-même ne peut donner la vérité quant à cela. Je ne puis absolument pas apprendre par elle ce qu’est un Dieu Sauveur, ni même pleinement ce qu’est l’homme. Tout au plus fait-elle voir ce qu’un homme doit être, et ce qu’il doit faire ; mais cela n’est point la vérité. Ce que je dois être n’est pas la vérité de Dieu, mais mon devoir. Elle était la mesure, la règle de vie pour l’homme dans la chair, et en conséquence, elle ne fut jamais donnée avant que l’homme fût devenu un homme pécheur. La loi fut donnée par Moïse, et non pas à Adam ou par Adam. Le commandement imposé à Adam n’est jamais appelé la loi, bien que, naturellement, ce fût une loi.

Bien plus, vous ne trouverez jamais la vérité, même dans la Bible, si vous la séparez de Jésus. Mais du moment que le même Être béni, qui m’a montré dans Sa propre vie et dans Sa mort ce qu’est l’homme, m’a aussi montré de la même manière ce qu’est Dieu, aussitôt tous les nuages se dissipent et toutes les difficultés disparaissent. Désormais je connais Dieu, Le contemplant en Jésus. De nouvelles pensées concernant Dieu rayonnent sur mon âme, et, me soumettant à Lui, je suis parfaitement heureux ; peut-être non pas tout aussitôt, mais aussi sûrement que mon âme a reçu Jésus, je possède la vie éternelle, et j’aurai une paix inébranlable. Mais en Lui, je reçois tout ce dont j’ai besoin, tout ce que Dieu a en vue pour mon âme, parce que la vérité est en Jésus. Ainsi donc, comme croyant, je connais Dieu ; je connais ce que les païens n’atteignirent jamais ni ne pouvaient atteindre. Leur entendement était obscurci. N’ayant pas la connaissance de Jésus, ils n’avaient pas de véritables, d’efficaces moyens de connaître Dieu. Mais c’est là précisément ce que l’évangile apporte à toute pauvre âme qui l’entend aujourd’hui. Et qu’est-ce que j’apprends de Dieu, quand je regarde à la vérité telle qu’elle est en Jésus ? D’abord j’apprends ceci — un Dieu qui descend jusqu’à moi, un Dieu qui cherche mon âme pour me faire du bien, un Dieu qui peut me suivre avec amour, tout égoïste que je suis, et avoir pitié de mon ignorance ; et non seulement cela, mais quelqu’un qui peut m’instruire, et veut le faire, nonobstant mon opiniâtreté et ma stupidité : en un mot, un Dieu très miséricordieux et fidèle. Il se fait connaître en Jésus. Je trouve quelqu’un qui, après avoir employé d’autres moyens, s’est dépensé en amour sur moi afin que je Le connaisse ; quelqu’un qui a pris sur Lui de porter le jugement de mes péchés. Car Jésus est venu et a pris sur Lui-même tous les péchés en faveur de toute âme qui croit en Lui. J’apprends maintenant qu’Il a souffert même pour cet odieux moi qui L’ai rejeté et dédaigné, et qu’Il en a complètement fini avec lui. Il a été jugé en la croix de Christ ; et si mon âme croit que Dieu est assez bon pour faire tout cela pour moi, pour souffrir tout cela pour moi, pour prendre et porter toute la conséquence sur Lui-même dans la personne de Son Fils bien-aimé ; si je vois cela et m’y incline, et que je le reçoive de la part de Dieu, qu’est-ce qui pourrait encore troubler et harasser mon âme ? Mes péchés ? Certainement, si quelque chose est capable de troubler mon âme, ce sont eux avant tout. Mais la croix, à quoi s’applique-t-elle ? Qu’est-ce que Dieu y a opéré ? Que m’a-t-Il dit dans l’évangile ? Si ç’a été Dieu se révélant Lui-même dans Son Fils bien-aimé ; si ç’a été Jésus le Fils de Dieu fait là péché, pourquoi aurais-je un seul doute ou la plus légère incertitude à cet égard ? Tout dépend de ceci : Me suis-je incliné devant ce que Dieu a opéré et m’a donné dans la croix de Christ ? Si je désespère relativement au péché, c’est en réalité dépouiller de tout effet la croix de Christ, et faire de l’œuvre de Christ une chose vaine. Il a parfaitement accompli Sa tâche, et j’ai le droit de me reposer sur elle jusqu’au point de savoir que mes péchés ne peuvent plus s’élever jamais contre moi. Ne dois-je pas être heureux et me reposer dans la paix la plus parfaite en raison de ce que Jésus a fait et souffert ? La foi peut se reposer ici. La mort de Christ a une telle valeur dans la pensée de Dieu, qu’Il aime à donner cette paix en conséquence. Voilà la vérité telle qu’elle est en Jésus. Si vous l’envisagez de cette manière, quelle profondeur, quelle étendue merveilleuse de vérité il y a ! Quelle pauvre chose est mon expérience propre comparée avec la vérité telle qu’elle est en Jésus ! La puissance spirituelle est beaucoup mieux prouvée en discernant Jésus dans les autres, qu’en mesurant ou comparant ce que l’on est en soi-même, ce qui, certes, est loin d’être sage. Et toutefois quelle perte c’est de se voir simplement comme il est reflété dans les autres ! Il faut que j’envisage la vérité telle qu’elle est en Jésus : dans ce qu’Il fut ici-bas comme Celui qui m’a montré tout le long de Sa vie et jusqu’à Sa mort ce que Dieu est et l’homme aussi, Lui-même l’homme modèle.

Dans la même personne de Jésus seulement je vois la pleine vérité touchant quoi que ce soit. Et vous trouverez la valeur de cela non pas simplement dans les grandes leçons de ce que Dieu ou l’homme est, mais si vous avez à faire avec quelque épreuve ou quelque difficulté particulière, quelle est l’unique pierre de touche de toute chose bonne ou mauvaise ? La vérité telle qu’elle est en Jésus. C’est la puissance de se servir de Jésus pour faire face à cette difficulté et de voir comment Son nom se comporte avec elle. Il a exprimé Sa volonté à cet égard — où je dois demeurer tranquille, où je dois agir, de quelle manière je dois marcher, et comment je dois supporter : Il m’a donné un exemple afin que je marche sur Ses traces. Et la plus grande puissance pour être semblable à Jésus dépend de la mesure de spiritualité que nous avons pour appliquer Son nom. Je suppose encore qu’il y a droiture de cœur et que notre désir est de marcher en présence les uns des autres comme nous marchons dans la vérité devant Dieu nous-mêmes. C’est en proportion que nous nous tournons vers Jésus, et que nous usons de Lui, et que nous envisageons les choses en Lui : c’est là la règle et la source de la vraie puissance spirituelle. C’est là ce qui fait d’un homme un père en Christ. Ce n’est point la quantité de zèle ou de victoire sur le monde, non plus que quelque connaissance profonde de ceci ou de cela, mais cela se trouve dans le fait de Le connaître. « Pères, je vous ai écrit parce que vous l’avez connu dès le commencement ». De qui s’agit-il ? De Jésus. La connaissance de Jésus est donc la puissance pratique, la force et la sagesse du chrétien et ce qui dénote le progrès dans les choses de Dieu. C’était donc là plus ou moins ce qu’ils avaient à apprendre. Mais Le connaître profondément, et de manière à l’appliquer et à le manifester, était ce qui caractérisait spécialement les pères : chacun parle dans sa propre langue. L’esprit le plus épais peut employer intelligiblement les termes de sa langue maternelle ; mais il y a une différence immense de capacité entre les diverses personnes parlant la même langue ; toutes ne peuvent pas parler selon ce que le sujet demande. Celui qui possède supérieurement sa langue le prouve en l’appliquant d’une manière appropriée à toute la variété des sujets. C’est ainsi que tous les saints doivent s’être saisis plus ou moins de la vérité en Jésus ; mais alors la puissance, pour bien s’en servir, pour en user convenablement, pour la produire dans les occasions propices et la faire tourner à notre profit et à celui des autres — voilà le vrai secret de nos progrès dans les choses de Dieu, et ce qui tend à la bénédiction des âmes et à l’avancement de la cause de Dieu ; de sorte que l’importance n’en saurait être exagérée.

Puis nous est exposé l’effet pratique de cela : « Savoir que, quant à la conversation précédente, vous dépouilliez le vieil homme qui est corrompu selon les convoitises qui séduisent ». Il ne s’agit pas d’amélioration. Il n’y a pas à améliorer notre vieil homme. Le cœur peut être purifié par la foi, mais en lui-même il est « rusé par-dessus toute chose et désespérément malin ». La foi peut effectuer, et l’Esprit effectue la nouvelle vie, mais la chair ne peut jamais être changée ou renouvelée. Et ici nous trouvons ce qu’il faut faire de notre vieille nature : « Que vous dépouilliez, etc. ». C’est aux chrétiens que l’apôtre parle : ils ont le vieil homme et ont besoin de le dépouiller pratiquement. Il faut que je prenne garde, me souvenant que j’ai encore cette chose incurablement mauvaise, accoutumée à s’abandonner à ses mauvaises voies avant la conversion et tendant encore à nous entraîner dans le mal, si nous manquons de vigilance.

Mais maintenant commence la partie positive. « Et que vous soyez renouvelés dans l’esprit de votre entendement, et que vous revêtiez le nouvel homme créé selon Dieu en justice et en vraie sainteté ». Il y a d’abord le dépouillement du vieil homme, son jugement moral, basé sur le jugement de Dieu dans la croix de Christ définitivement consommé. Vient ensuite le renouvellement de l’esprit que nous ne pouvons posséder à moins qu’il n’y ait le jugement de l’ancien. « Et que vous soyez renouvelez, etc. ». Naturellement ils avaient le nouvel homme, mais c’est du revêtement pratique du nouvel homme qu’il s’agit, de la manifestation extérieure de l’homme nouveau qui était déjà au-dedans d’eux. Il est bon de se bien mettre dans l’esprit que celui-ci est en justice et sainteté de vérité. C’est encore la vérité qui le produit. Tel est le sens réel de l’expression.

Voici la différence entre la justice et la sainteté. La justice est la vraie intelligence et, cela va sans dire, la vraie marche dans nos devoirs selon nos relations diverses, comme hommes de Dieu ; la sainteté consiste plutôt dans la réjection dans notre cœur et dans nos voies, conformément à la nature de Dieu, de ce qui Lui est contraire. La sainteté est donc une chose beaucoup plus absolue que la justice qui s’applique à nos obligations envers Dieu et envers l’homme. C’est en contraste avec le premier homme. Adam était bon en tant que créature, mais il n’y avait pas chez lui perception de ce que Dieu était, ni de ce qu’était le mal selon Dieu. Aussi ne connaissait-il pas le péché ; il n’y avait pas de péché à connaître. Si vous eussiez parlé de la convoitise à Adam dans le jardin d’Éden, il eût dû, je pense, vous avouer son ignorance de ce que cela voulait dire. Si donc la loi : « Tu ne convoiteras point » avait été donnée à Adam, il n’en aurait pas compris la signification, n’ayant pas fait jusqu’à plus tard l’expérience de la convoitise. Nous avons des cœurs qui aiment ce que nous n’avons pas obtenu, mais Adam n’avait pas un cœur pareil. Il était précisément un exemple de la bonté de la créature dans l’homme. Il n’était pas créé selon Dieu dans la justice et la sainteté de vérité. Dieu a fait l’homme droit ; mais la droiture est une chose différente d’être créé dans la sainteté. L’homme fut créé droit et innocent ; mais le nouvel homme est beaucoup plus, et connaît fort bien, par l’enseignement, de l’Esprit, ce qu’est le mal et ce qu’est Dieu. Adam n’apprit que lorsqu’il tomba, et jamais avant, ce que c’est que le bien et le mal ; c’est-à-dire qu’il devint conscient d’un bien qu’il avait perdu, et qu’il n’était pas ; et d’un mal dans lequel il était tombé, que Dieu haïssait et devait juger. Lors donc qu’un homme est amené à la vérité telle qu’elle est en Jésus, déjà auparavant il connaissait le bien et le mal avec une conscience mauvaise, mais désormais il les connaît avec une bonne conscience, c’est-à-dire avec une conscience purifiée. Rien ne peut donner une conscience aussi bonne que le sacrifice de Jésus. À supposer que quelqu’un de nous fût capable de vivre sans commettre d’iniquité jusqu’à la fin de ses jours, cela lui donnerait-il une bonne conscience ? Pas le moins du monde : il y aurait toujours une mauvaise conscience à cause de la conscience du péché dans le passé, non ôté, non pardonné. Nulle opération humaine, nulle communication d’une nouvelle nature, ne peut débarrasser du mal que nous avons fait. Le sacrifice de Christ l’a fait parfaitement. Là, mon mal est jugé selon Dieu. Il en a été agi avec le mal du vieil homme, et c’en est fait de lui devant Dieu. Christ ressuscite d’entre les morts et me communique Sa vie, ce qui est le nouvel homme. Christ en résurrection est la source même du nouvel homme dans mon âme. S’il en est ainsi, nous devons dépouiller le vieil homme. Pour la foi c’en est fait de lui. Jésus me l’a montré comme une chose jugée dans Sa croix, et je dois le juger et ne pas tolérer mon vieil orgueil, ma vanité et ma folie. Je l’ai encore au-dedans de moi, mais je ne dois pas lui lâcher la bride, sinon j’affligerais le Seigneur et j’amènerais Sa main sur moi. Nous avons tous à veiller soigneusement contre notre première conversation ; mais alors il est possible qu’on se laisse séduire par un mal dans lequel on ne sera jamais tombé avant, parce qu’on s’est imaginé qu’il était impossible d’y tomber. Rien n’expose autant à tomber comme l’idée qu’on ne pourrait se dévoyer ainsi. Ç’a été là souvent la ruine d’un chrétien, pour autant qu’il s’agit de la gloire de Dieu.

Ainsi, il est parlé du nouvel homme de manière à faire ressortir son contraste avec ce qu’était l’homme même dans son meilleur état.

Oui, même quand il sortit des mains de Dieu, Adam ne pouvait être décrit dans les termes de bénédiction qui sont vrais aujourd’hui de tout croyant. Pas l’ombre de l’idée dans l’Écriture d’une restauration de l’état adamique. Maintenant, quand elle est convertie, une âme a la place du second homme ; et de même que Lui, le Seigneur ne peut déchoir, de même le chrétien a une vie qui ne saurait jamais être touchée. C’est aussi impossible qu’un chrétien soit perdu, qu’il l’est que Christ perde Sa place à la droite de Dieu, parce qu’Il est la vie du chrétien. Si vous dites qu’on peut déchoir de la grâce, rien de plus certain qu’on le peut. Mais si vous entendez par là que la vie du chrétien peut périr, vous contredisez nettement la Parole de Dieu ; c’est donc une affaire d’intelligence des Écritures. Christ Lui-même est la vie du chrétien : est-ce qu’Il peut tomber ? C’est donc en principe renier Christ Lui-même, que d’admettre le plus léger doute à cet égard. Toutes ces exhortations sont basées sur ceci : qu’ils avaient appris Christ et connaissaient la vérité telle qu’elle est en Jésus. Ils étaient déjà dans cette relation, et c’est sur cette base que viennent toutes les exhortations chrétiennes. Est-ce jamais chose raisonnable de parler de fruit jusqu’à ce que la plante ait bien pris racine ? Ce serait inutile d’entretenir un petit enfant des devoirs d’un homme. Il faut d’abord que l’homme soit là comme tel, avant que vous puissiez vous attendre à le voir s’acquitter des devoirs d’un homme ; de même pour le chrétien avant que vous puissiez insister avec raison sur les devoirs d’un chrétien. Mais maintenant que la vérité telle qu’elle est en Jésus est connue, vous ne devez pas tolérer le vieil homme. L’apôtre parle de fruit et de marche pratique, parce qu’on est déjà en Christ et que l’on connaît la vérité en Lui. Ceci doit toujours être un grand encouragement pour l’âme. Même si Dieu m’exhorte à me juger moi-même, cela suppose toujours ma bénédiction préalable comme possesseur de la vie éternelle. C’est sur ce principe que, pour ainsi dire, Dieu s’adresse à nous de cette manière : Est-ce possible, semble-t-Il nous dire, qu’après que j’ai tant fait pour vous, vous puissiez être si insouciants de ma volonté ? C’est toucher la source de la grâce dans 1’âme, afin que nous marchions avec Lui et que nous fassions Sa volonté.

Maintenant il insiste auprès d’eux sur quelques-uns des résultats. « C’est pourquoi dépouillant le mensonge, parlez la vérité chacun à son prochain, car nous sommes membres les uns des autres ». Comme ils avaient appris la vérité en Jésus, la honte du mensonge était d’autant plus manifeste. Quel est le principe que nous avons ici ? Nous sommes trop enclins à considérer le mensonge plutôt sur la base humaine de l’honneur. Plus d’un ne voudrait pas mentir en vertu de principes moraux ; ou bien seraient trop fiers pour dire un mensonge ; et s’il s’agit d’un homme ayant quelque sentiment de crainte de Dieu, il ne voudrait pas le faire parce que ce serait une dénégation pratique de Dieu : cela reviendrait à dire que Dieu n’entend pas. De sorte que, soit que vous regardiez simplement à l’homme dans son orgueil naturel, soit qu’il s’agisse d’un homme religieux, tel qu’un Juif, vous trouvez là le principe d’après lequel chacun agissait. Mais cela n’est pas assez pour un chrétien. C’est d’une grande importance pour nos âmes, non seulement que nous marchions bien et justement, mais que le motif, le caractère et l’étendue de notre marche soient aussi selon Dieu. Non seulement cette exhortation est nécessaire, mais il y a, associée avec elle, une considération à laquelle nous pensons rarement dans nos rapports réciproques : nous sommes exhortés à parler la vérité chacun à son prochain, car nous sommes membres les uns des autres. L’apôtre n’envisage ici que les chrétiens : évidemment eux seuls sont des membres. Il veut rattacher à Christ les devoirs les plus ordinaires que nous sommes en danger de faire reposer sur une base inférieure, et voici le principe qu’il pose : que c’est aussi déplacé et malséant pour un chrétien de ne pas dire simplement l’exacte vérité à un frère chrétien, qu’il l’est pour un homme de se tromper lui-même. Ils font partie de vous-mêmes. « Nous sommes membres les uns des autres ». Est-ce que nous réalisons cela ? Si nous le faisions, quels en seraient les effets ? Assurément, l’un serait une franchise parfaite quand on en agit avec ce qui est mal ; un autre serait un désir réel, sincère, de restaurer ceux qui vont mal. Il est évident que nous ne pouvons pas désirer nous nuire à nous-mêmes ; et si je regarde quelqu’un comme une partie de moi-même, je dois agir envers lui en conséquence. De la même manière aussi, nous devons sentir ce qui est contraire à Dieu dans un autre. Et comme nous désirerions extrêmement, si nous étions réveillés au sentiment de notre propre péché, aller à Dieu à son sujet, et avoir nos âmes bien restaurées là, ainsi en devrait-il être quand nous avons à faire les uns avec les autres. Une plus profonde réalisation de cette vérité produirait un plus profond désir de la prospérité de nos frères. Et en outre, si ce doit être en accord avec la gloire de Dieu, nous ne devons pas simplement juger ce qui est mal, mais nous devons chercher à obtenir ce qui est bon et selon Dieu. Nous sommes enclins, dans les cas, par exemple, de retranchements de la communion, à ne voir que ceci, que nous sommes débarrassés du mal ; mais je ne trouve pas cela là où la bénédiction d’être membres les uns des autres est sentie et reconnue en la présence de Dieu. Même quand on en vient à la mesure extrême d’en agir ainsi avec quelqu’un que nous avons cru être un membre du corps de Christ, la fin de toute discipline est d’éloigner le mal afin que ce qui est de Christ puisse rayonner.

« Mettez-vous en colère et ne péchez pas ; que le soleil ne se couche pas sur votre colère ». Je considère cela comme un très important et saint avis pour nos âmes. On a souvent l’idée que c’est mal à un chrétien d’être jamais mécontent ou en colère. Ce passage et plusieurs autres font voir que cela peut être bien. Mais nous devons prendre garde à ce qui est la source de la colère, aussi bien qu’à sa nature. Si on se met en colère au sujet de ce qui affecte le moi, et que cela prenne en conséquence la forme de la vengeance, naturellement, c’est, sans aucun doute, contraire à tout ce qui est de Christ. Nous trouvons en Lui (Marc 3) qu’Il regarda tout à l’entour certaines personnes avec colère, et fit voir clairement qu’Il avait le sentiment le plus profond de ce qui était contraire à Dieu. Ce n’était pas simplement qu’Il réprouvait la chose, mais les gens qui en étaient coupables. Je trouve la même analogie dans les épîtres. Il ne nous est pas dit seulement de nous attacher fortement au bien, mais d’avoir en horreur le mal. La Parole de Dieu nous enseigne qu’il y a certaines choses que nous devons juger et d’autres que nous ne devons pas juger. Je ne dois pas juger ce qui ne se voit pas ; je dois juger le mal positif, le mal connu. Nous avons là nettement, clairement, la ligne tracée par Dieu. Vous entendez souvent dire, que si l’on parle avec force contre le mal de ceci ou de cela, l’on manque de charité. Mais cela n’est point ; c’est charité réelle que de dénoncer le mal, de ne pas le laisser passer. Le véritable amour consiste à avoir toujours les sentiments de Dieu à l’égard de tout ce qui vient devant nous. Voilà l’unique question. Nous pouvons avoir communion avec ce avec quoi Dieu a communion ; et ce que Dieu hait, nous ne devons ni l’aimer ni le tolérer. Mais nous devons prendre soin d’être dans l’intelligence de la pensée de Dieu. « Mettez-vous en colère et ne péchez pas » : Vous êtes dans le plus grand danger de pécher si vous vous mettez en colère, et c’est pour cette raison que ceci est ajouté. La simple émotion de la colère envers quelqu’un qui a péché peut et doit être un saint sentiment, pourvu qu’elle s’arrête là. Et il en est ainsi quand elle est éprouvée en la présence de Dieu. Mais comment puis-je savoir que je ne pèche pas dans ma colère ? « Que le soleil ne s’arrête pas sur votre irritation ». Si l’esprit garde de l’irritation, s’il se trahit de l’impatience, de l’aversion, du mépris, qui ne peut voir que ce n’est pas de Dieu ? Quand le soleil se couche, c’est le temps soit pour votre paisible communion avec Dieu, soit pour rejeter toute trace de ressentiment. Aussi est-il ajouté : « Et ne donnez pas lieu au diable ». Si la colère est entretenue, si on garde quelque chagrin dans l’esprit, Satan entre aisément, et il n’est pas facile de le déloger.

Dans ces exhortations, comme dans la doctrine de l’épître, il n’est nullement question d’améliorer la nature humaine. Il est dit que le chrétien revêt une nouvelle nature, que Christ est sa vie. La conséquence pratique c’est qu’elle doit être exercée et manifestée.

Néanmoins, il y a un sérieux obstacle, car le vieil homme subsiste, la chair est encore dans le chrétien, et comme la nouvelle créature n’est en aucune façon le résultat du perfectionnement de l’ancienne, celle-ci ne saurait être absorbée par la nouvelle ou élevée à sa hauteur. Elles sont en opposition irréconciliable. « Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né de l’Esprit est esprit ». La seule marche, le seul soulagement, le seul devoir du fidèle est de renoncer à la chair et de la mortifier, de telle sorte que le nouvel homme soit laissé libre d’accomplir la volonté de Dieu.

Nous avons vu plus haut le danger qu’il y a à céder à la colère ; elle dégénère aisément en haine, ce qui donne accès au diable. Nous trouvons à la suite une autre exhortation qui semble à peine devoir être adressée à des chrétiens : « Que celui qui dérobait ne dérobe plus ». Il n’y a pas à proprement parler « celui qui dérobait », mais « le larron ». « Voleur » serait un terme trop fort ; « celui qui dérobait » est trop faible. L’apôtre a été amené à choisir une expression assez flexible pour qualifier toutes les nuances de ce vice. Jugez-vous la précaution inutile ? Prenez garde que votre assurance et le peu de cas que vous faites d’une seule parole de Dieu, ne vous soient en piège. Il est hors de doute que l’Esprit qui a inspiré l’épître jugeait cet avertissement nécessaire pour nous tous aussi bien que pour les saints d’Éphèse ; cependant nous ne trouvons nulle part une assemblée plus heureuse, plus florissante et bénie de Dieu que celle-là. Eh bien, même pour eux, vivifiés et ressuscités avec Christ, et assis en Lui dans les lieux célestes, le Saint Esprit reconnaît l’utilité de cet avertissement. Dieu nous connaît mieux que nous ne nous connaissons nous-mêmes ; et que les saints soient aussi instruits, aussi dévoués, aussi zélés que possible, aucune de ces vertus, en dehors de la jouissance de la communion présente, en dehors de la dépendance actuelle de Dieu, ne constitue une parfaite sauvegarde. En outre, si une âme, par suite d’un manque 1e vigilance, est tombée dans un péché si dégradant même aux yeux des hommes, nous pouvons concevoir aisément la force que communique une telle parole au cœur brisé et couvert de honte, qui court le risque de succomber sous le poids de la douleur qui l’accable. Combien peu le cœur sent ses dangers et connaît sa faiblesse ou la puissance de Satan ! Une fois rendu capable de se juger selon Dieu, il reconnaît la valeur de paroles comme celles-ci, qu’auparavant il avait jugées, ou peu s’en faut, sans utilité pour le chrétien. Il sent aussi combien est étendu l’appel du Saint Esprit, qui embrasse toute espèce de coutumes mondaines, professionnelles, commerciales (si respectables soient-elles d’ailleurs) qui sont frauduleuses, aussi bien que les formes plus grossières du vice en question. Dieu forme l’homme nouveau à l’image de Ses propres pensées.

Avec quelle évidence encore un tel précepte montre que le chrétien est sur un terrain plus vaste, plus élevé et plus ferme que celui sur lequel l’Israël selon la chair se tint ou plutôt tomba. A-t-on jamais entendu la loi dire : « Que celui qui dérobait, ne dérobe plus » ? Elle tient bien plutôt ce langage : « Qu’il meure ! ». La loi est bonne si l’homme en fait usage légitimement ; et son application n’est précisément pas destinée à régler, à guider, à diriger la marche des justes, mais bien à punir ceux qui ne l’observent pas, qui l’enfreignent, les incrédules et les pécheurs, les profanes et les impies, en un mot, tout ce qui est contraire à la saine doctrine. Le péché, ainsi que le déclare Romains 6, n’aura pas domination sur les chrétiens, « car vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce », et ceci se trouve dans un chapitre qui traite de la marche sainte du saint, et non de sa justification. Pourtant en présence de ce passage, en présence de l’enseignement clair et uniforme du Nouveau Testament, la tendance générale ordinaire dans la chrétienté est de retourner à la loi ; elle existe surtout là où il n’y a que faible séparation d’avec le monde. C’est facile à concevoir : le monde n’accepte ni ne comprend la grâce de Dieu, tandis qu’il peut apprécier dans sa lettre Sa juste loi. Il s’ensuit que là où le monde et les saints se trouvent mêlés la volonté de l’homme ne tarde pas à prendre la haute main ; et comme le saint ne peut élever le monde à la hauteur de sa position, il est obligé de s’abaisser à ce qu’il a de commun avec le monde ; ainsi tous deux se rencontrent une fois de plus sur le terrain judaïque, comme si la croix de Christ n’avait jamais existé et si le Saint Esprit n’avait pas été envoyé du ciel pour retirer les croyants de cette condition de mélange et les réunir en Assemblée de Dieu, séparément du monde. Même pour le chrétien pris individuellement, aussi bien que pour l’Église, et principalement pour la vérité, la grâce et la gloire de Dieu, la perte a été incalculable. La marche ordinaire a été réduite à une série de négations, sauf en ce qui concerne les actes publics de philanthropie, l’activité religieuse, les observances rituelles auxquelles le chrétien participe avec quiconque veut se joindre à lui. Ce n’est pas là s’occuper du bien, selon la volonté de Dieu ; encore moins est-ce souffrir à cause de Christ et de la justice de la part d’un monde qui ne les connaît point. Ce n’est pas là le christianisme, bien que ce soit l’état et le système de la plupart des chrétiens. Christ a-t-Il jamais obéi par crainte du jugement ? Sa vie ne fut-elle pas un complet abandon de Lui-même à la volonté sainte et au bon plaisir de Son Père ? Ainsi nos âmes doivent être occupées de la grâce de Dieu en Christ, si nous voulons trouver la force de Lui être agréables. Éviter simplement le mal, ne pas faire ceci ou cela, est au-dessous de notre vocation. Désirons-nous réellement connaître et faire Sa volonté comme Ses enfants ? Sommes-nous zélés pour apprendre à bien faire, et non moins soigneux de nous détourner de toute mauvaise voie ? Sinon le jour viendra où nous retomberons dans le mal, et avec une conscience de moins en moins sensible, parce que nous avons appris la vérité que nous ne réalisons pas.

Elle est bien belle l’exhortation de l’apôtre dans le sens positif : « Mais plutôt qu’il prenne de la peine (la paresse n’est ni bonne ni saine), faisant de ses mains ce qui est bon, afin qu’il ait de quoi donner à celui qui a besoin ». Ainsi l’Esprit encourage et dirige l’homme dont les mains étaient autrefois employées à des travaux indignes ; ainsi Il ouvre un heureux sentier là où la grâce peut justifier sa puissance, en dépit d’un naturel d’habitudes vicieuses ; et celui qui dérobait avant de connaître le nom du Sauveur, peut entrer maintenant dans l’esprit et la conduite du grand apôtre (Act. 20, 33-35), et du Maître Lui-même, se souvenant de Ses paroles, quand Il disait : « Il vaut mieux donner que recevoir ». Vivre, c’est le but que l’homme du monde se propose en travaillant ; donner est celui du chrétien. Ce n’est pas une simple question d’acquérir du superflu, c’est un but déterminé, spécialement pour celui qui a le sentiment de la miséricorde qui l’a délivré de la convoitise, de sa honte et de son jugement. Seulement on ne doit travailler qu’à ce qui est bon et honnête. En vain plaiderait-on en faveur de l’usage bienfaisant ou religieux d’un gain mal acquis. Nulle occupation contraire à la volonté de Dieu n’est bonne pour le chrétien ; il doit l’abandonner immédiatement. Jamais l’alliance du Sinaï ne mit en avant une pareille raison à l’appui du travail. Parler des dix commandements comme de la règle actuelle de conduite des chrétiens, c’est reculer depuis le soleil qui règle le jour jusqu’à la lune qui règle la nuit ; c’est éclipser Christ par Moïse sous le prétexte illusoire d’accomplir le service de Dieu. En général, ce que la loi exigeait de ceux qui étaient placés sous elle, sur le principe du droit, le chrétien est tenu, en vertu du principe de la grâce, de le dépasser en tous points. L’étendue de l’obéissance est considérablement accrue ; les motifs intérieurs sont recherchés et mis à découvert ; toute disposition à la violence, à la corruption, à la fausseté, est jugée dans son principe, et souffrir injustement, tout en aimant, prend pour les disciples la place de la justice terrestre. Tel est l’enseignement incontestable de notre Seigneur et de Ses apôtres ; il est obscurci, neutralisé, nié par ceux qui s’efforcent de judaïser l’Église en donnant au chrétien la loi pour règle de vie. En vérité, ils ne comprennent pas ce qu’ils disent ni ce qu’ils affirment.

Mais ce n’est pas seulement sur nos actions, c’est aussi sur nos paroles que nous avons à veiller : « Qu’aucun discours déshonnête ne sorte de votre bouche, mais seulement celui qui est propre à édifier, afin qu’il communique la grâce à ceux qui l’entendent ». Il faut éviter un langage inconvenant comme on rejette un fruit qui ne vaut rien ; si elle vient aux lèvres, la parole vaine ne doit pas aller plus loin. Au chapitre suivant nous verrons spécifiée et interdite toute allusion malséante. Ici la défense a une plus grande étendue. Bien des personnes qui ne tiendraient ni n’écouteraient une conversation impure, peuvent souvent avoir à déplorer d’avoir proféré ou sanctionné des discours insipides. Il vaut mieux se taire si (telle est la force du passage) l’on n’a rien à dire de propre à édifier. Au besoin se mesure le service, et l’amour édifie au lieu d’enfler comme le fait la connaissance. Il est également vrai que « la multitude des paroles n’est pas exempte de péché », et que « les lèvres du juste en instruisent plusieurs ; elles connaissent ce qui est agréable », et ceux qui les entendent y trouvent du rafraîchissement et de la bénédiction.

Jusqu’ici nous avons eu les principes d’une activité sainte et les avertissements contre le péché, qui se trouvent dans les traits de l’homme nouveau. Mais tout cela ne nous présente pas le caractère complet et la puissance du chrétien. Le Saint Esprit de Dieu habite en lui. Cette vérité solennelle et bénie apparaît maintenant dans sa portée pratique. Il est dit (chap. 2, 22) que nous sommes édifiés ensemble pour être une habitation de Dieu par l’Esprit ; et en conséquence l’apôtre nous exhorte, au chapitre 4, à marcher d’une manière digne de notre vocation. Mais il y a une habitation individuelle de l’Esprit, aussi bien que Sa relation avec la maison de Dieu, Nous avons été scellés par l’Esprit, appropriés par là pour Dieu sur la base d’une rédemption accomplie. Le précieux sang de Christ a effacé nos péchés ; en lui nous avons la rédemption par Son sang, le pardon des offenses selon les richesses de la grâce de Dieu. Ainsi, Son sacrifice a effacé devant Dieu et pour la foi tout notre mal, et nous possédons une nouvelle nature en Christ ; c’est au point que le Saint Esprit peut venir et habiter en nous et nous sceller pour le jour de la rédemption, où notre corps sera transformé à la ressemblance de la gloire de Christ, aussi sûrement que nos âmes sont maintenant vivifiées dans Sa vie. En présence de ce privilège infini actuel et de l’assurance d’une gloire éternelle, l’apôtre ajoute : « Et n’attristez point le Saint Esprit de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption ». Il est une source de force, pour rendre le saint capable de faire ce qui est agréable à Dieu. Mais ceci suppose qu’il y a jugement de soi-même et dépendance de Dieu. Autrement nous L’attristons et nous sentons, non pas Son pouvoir, mais notre propre misérable infidélité.

En outre, il semble étrange qu’un chrétien soit assez inintelligent pour confondre la parole qui nous occupe avec « n’éteignez point l’Esprit » de 1 Thessaloniciens 5, 19. Le contexte (v. 20) démontre clairement que c’est un avertissement de ne pas empêcher la moindre manifestation réelle de l’Esprit dans un saint, quelque faible qu’il puisse être ; et l’histoire de la chrétienté au temps où nous vivons prouve combien le précepte était nécessaire et combien peu l’injonction de l’apôtre a été suivie. Mais le passage d’Éphésiens 4 concerne personnellement chaque saint et ses conversations journalières.

Il est bon encore de noter la différence du langage du psaume 51 : « Ne m’ôte point ton Saint Esprit ». Mais l’apôtre, alors même qu’il engage fortement à ne point attrister le Saint Esprit, n’a pas la pensée qu’Il soit ôté. Au contraire, au même instant il nous assure que nous avons été scellés par Lui pour le jour de la rédemption, et rien ne pourrait autant qu’une semblable déclaration nous garantir notre sécurité individuelle. À quoi devons-nous attribuer cette différence ? Ce n’est pas, ai-je besoin de le dire, à un degré plus élevé d’inspiration chez Paul, l’apôtre, que chez le roi David ; mais à la modification nécessaire et révélée des relations de l’Esprit avec le saint, depuis que Jésus est mort, ressuscité et monté au ciel. Jusque-là il n’y avait rien de tel que l’Esprit donné pour demeurer avec le croyant à jamais. Alors Il bénissait les âmes, agissait en elles et par elles, les remplissait de joie et de force ; mais Son habitation intérieure telle que le chrétien la possède et la connaît présentement, n’existait pas et ne pouvait pas exister jusqu’à la glorification de Jésus, à cause du péché que Son sang a effacé. C’est pour cela qu’il nous est recommandé de ne point attrister l’Esprit ; mais jamais, depuis qu’Il nous a été donné, nous ne sommes supposés avoir à demander que Son départ nous soit épargné. Ceci, incontestablement, aggrave le péché du chrétien, et, quand il est dans ce cas, rend cuisants et amers les reproches qu’il s’adresse ; mais cela même est destiné, dans les vues du Seigneur, à servir d’avertissement plus sérieux à Son enfant. Ce verset prouve donc clairement d’un côté le danger de pécher et, par là, d’attrister l’Esprit ; de l’autre, la sécurité du saint en dépit même de circonstances aussi tristes. Il est amené à Dieu, réconcilié, lavé, sanctifié, justifié ; il a la vie éternelle et ne périra jamais ; il est scellé de l’Esprit, et qui pourrait briser ce sceau ? S’il tombe dans le péché, assurément Dieu y regardera et le punira ; Il ira, s’il le faut, jusqu’à la mort ; car Il ne passera pas à la légère sur son mal, ni ne le condamnera avec le monde. Aussi Pierre exhorte-t-il les justes à marcher dans une sainte obéissance, et, tandis qu’ils invoquaient comme Père Celui qui, sans acception de personnes, juge selon l’œuvre de chacun, à se conduire avec crainte durant le temps de leur séjour sur la terre. En même temps, loin d’affaiblir leur confiance, l’apôtre insiste là-dessus d’autant plus qu’ils savaient « qu’ils avaient été rachetés, non point par des choses corruptibles, comme l’argent ou l’or… mais par le précieux sang de Christ ». Ainsi la vérité de Dieu a pour effet d’attirer et de fortifier les affections, même alors qu’elle nous fait prosterner jusques dans la poussière ; tandis que l’erreur de l’homme affaiblit la pleine grâce de Dieu, et à la fois manque complètement à humilier l’âme. Mais quelle chose précieuse pour le croyant que cette vérité, qu’il a au-dedans de lui la présence constante d’une personne divine, le Saint Esprit, témoin de tout ce qui s’y passe ! Combien nous devrions prendre soin de ne pas L’attrister ! Ce n’est pas seulement une vérité pour la conscience, c’est une source inépuisable de consolations ; car Il habite en nous toujours, non que nous soyons dignes d’un tel hôte céleste, mais c’est en vertu des mérites de Jésus et de la perfection avec laquelle Son œuvre nous a purifiés de nos péchés aux yeux de Dieu ; et Il habite en nous pour notre joie, notre affermissement, notre bénédiction éternelle, par Christ et en Christ notre Seigneur. Puissions-nous être rendus capables d’être toujours pleins de confiance, de prier sans cesse, et de ne pas faiblir !

La doctrine de la présence du Saint Esprit dans chaque croyant, qu’Il scelle pour le jour de la rédemption, paraît, ainsi que nous l’avons vu, liée de la manière la plus étroite à la sainteté pratique, comme motif et garantie, non moins que comme puissance. Qu’y a-t-il, en effet, de plus solennellement touchant que la pensée, d’un tel hôte établi dans le corps du croyant ? Et quoi de plus certain que ceci, qu’Il est l’Esprit, non de crainte, mais de puissance, d’amour et de pureté ? Nous pouvons être extrêmement faibles et notre cœur trompeur et désespérément malin. Mais ce n’est pas là la seule vérité. Le caractère du chrétien c’est d’avoir le Saint Esprit habitant en lui. Est-Il faible, Lui ? Ou, s’Il est tout-puissant, est-Il dans le croyant le témoin passif, inactif de toute faute et de toute infirmité ? N’est-Il pas, au contraire, en lui pour unir ses affections à Christ, pour glorifier Christ, prenant ce qui est à Christ et le lui montrant ? Sans doute, Il peut être et Il est attristé par les folies que l’on se permet, par la négligence, par le mal, et par tout ce contre quoi nous avons été sérieusement prémunis ; mais ce serait bien que ceux qui parlent sans cesse de l’impuissance et de l’indignité de la chair (et rien n’est plus évident ni plus certain), se missent bien dans l’esprit que le croyant, le chrétien n’est plus dans la chair mais dans l’Esprit, que l’Esprit de Dieu habite en lui. Il convient, en conséquence, que le péché, tout péché, soit confessé et jugé ; mais il n’appartient ni à l’humilité sincère, ni à la foi d’un élu de Dieu, d’ignorer ce fait aussi béni et encourageant que sérieux, que l’Esprit de Dieu est en nous, pour nous communiquer toute force, en révélant Christ à nos âmes. Il peut être salutaire, et c’est incontestable, d’apprendre la pénible leçon de Romains 7, 7 et suivants, mais se borner là, c’est prouver qu’on l’a mal apprise. La vraie place du chrétien est, à cet égard, la fin du chapitre qui l’introduit dans les exercices encore plus profonds et les souffrances plus dévouées du chapitre 8, avec la liberté, la puissance, l’espoir et la sécurité, qu’il déclare si abondamment être notre portion, par grâce. — La rédemption de notre corps et de la création extérieure n’a pas encore été opérée, mais Celui qui en est le gage est au-dedans de nous.

Cela étant, « que toute aigreur, toute animosité, toute colère, toute crierie, toute médisance et toute malice, soient bannies du milieu de vous » (v. 31). L’union étroite qui doit exister entre les membres de la famille de Dieu peut devenir un piège si l’on n’y veille et si l’on ne regarde simplement à Christ. Mais le Saint Esprit ne tolère aucun sentiment mauvais quel qu’il soit. Ici est indiqué ce qui peut faire brèche dans notre union ; au chapitre suivant (v. 3 et séq.) nous en trouverons les abus.

Si nous en venons aux détails, le mot « toute aigreur » désigne, je pense, toute espèce d’humeur âpre, impitoyable, qui repousse les âmes au lieu de les attirer, et tombe dans la plupart des fautes réelles ou imaginaires d’autrui. « L’animosité, la colère », qui viennent ensuite, représentent l’éclat de la passion, le ressentiment réfléchi, vindicatif, qui se développe à mesure qu’on s’y abandonne ; de même que « la crierie et la médisance » en sont la contrepartie dans le langage. Tous ces sentiments proviennent de la source profonde de « toute malice », condamnée à la fin de ce verset. Ainsi, de même que nous avions été mis en garde contre toute parole et toute action déshonnête, avant l’allusion au sceau du Saint Esprit, de même après cela, nous voyons l’apôtre dénoncer la haine dans ses diverses manifestations. C’est, hélas ! dans la nature du premier homme, Adam. C’est la même corruption et la même violence qui amenèrent le déluge sur le monde ancien qui se renouvellent en dépit du jugement et de la volonté de Dieu, jusqu’à ce que Christ en agisse avec l’homme et Satan en personne.

Mais, ainsi que l’observation en a été faite précédemment, il ne suffit pas de s’abstenir, en pensée et en action, des œuvres de la chair. Il y a une activité pour le bien en Christ, le second homme, et c’est le Saint Esprit qui la produit en même temps que les prières dans le chrétien. C’est pourquoi il ajoute : « Soyez bons les uns envers les autres, pleins de compassion, vous pardonnant les uns aux autres, comme Dieu vous a aussi pardonné par Christ ». — Évidemment, il s’agit de manifester la grâce ; et le modèle de tout cela, c’est Dieu en Christ, et non dans la loi, sainte, juste et bonne comme est le commandement. Mais si bonne que fût et que soit la loi, Christ est le meilleur de tout, l’expression réelle et parfaite de ce que Dieu est. Laissant à la loi le soin de punir les méchants (1 Tim. 1), comme l’apôtre déclare expressément que c’est là sa destination légitime, nous qui sommes morts avec Christ nous ne sommes plus sous la loi, mais sous la grâce qui, par la puissance de l’Esprit, nous fortifie selon le caractère qui lui est propre et en communion avec Celui qui en est la source.

Chapitre 5

Quelle puissance dans le principe qui est posé ici pour les saints ! « Soyez imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants ! ». Où est la limite, si nous sommes exhortés à imiter Dieu Lui-même ? Il n’est plus maintenant question de placer l’homme sous sa responsabilité, comme créature, devant Dieu, ni de requérir, comme sous la loi, telle ou telle chose de lui. Dieu s’est révélé en grâce ; pourtant Il est Dieu, et seul Dieu ; et s’Il nous a communiqué Sa propre nature, il ne conviendrait pas d’accepter un niveau plus bas. Ce serait Le déshonorer Lui-même, ce serait déshonorer la grâce qu’Il nous a montrée et qu’Il ne montre nulle part plus pleinement que dans les premiers chapitres de cette épître. Ce serait aussi la perte la plus fâcheuse pour Ses bien-aimés enfants, qu’Il désire éduquer et bénir de plus en plus, même à travers cette scène de mal et d’affliction, prenant occasion des circonstances les plus contraires pour nous enseigner ce qu’Il est dans les profondeurs de Sa grâce, et nous remplissant du sentiment de cette grâce de manière à former nos cœurs et à façonner nos voies à mesure que nous nous oublions nous-mêmes et vivons, dans la vérité de Christ, au-dessus de nos habitudes propres et des conventions humaines.

Ni la loi, ni même la promesse n’ouvrirent un champ pareil à celui-ci. Le seul fait que nous soyons appelés à être imitateurs de Dieu, implique la parfaite grâce dans laquelle nous sommes. En dehors de cette grâce, un tel appel serait véritablement insupportable. Sans doute il est humiliant de penser combien peu nous y avons répondu ; mais le sentiment même de nos manquements antérieurs, s’il est profond et si la grâce n’est pas perdue de vue, est mis au profit de notre compte, et ainsi nous croissons et marchons avec Dieu là où peut-être il ne nous le paraît guère. La loi exigeait ce que l’homme aurait dû rendre à Dieu. Aimer Dieu et notre prochain n’est pour nous que le plus rigoureux devoir. La promesse présentait la promesse de la bénédiction par la semence, et cela, non pas à Israël seulement, mais à toutes les familles de la terre. Mais maintenant, après que la promesse a été méprisée et la loi violée, Dieu se révèle Lui-même en Christ, et, tandis qu’Il accomplit tout en Christ, manifeste envers nous les conseils les plus élevés d’une grâce infinie, de telle sorte que Son propre caractère, ainsi déployé, devient le seul modèle convenable à la conformité duquel Il appelle Ses enfants même ici-bas. « Soyez donc imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants ; et marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous comme offrande et sacrifice à Dieu en odeur de bonne senteur » (v. 1, 2).

Se pardonner l’un à l’autre, comme Dieu aussi nous a pardonné en Christ, est chose bénie ; mais cela, bien que selon Son cœur et Ses propres voies, n’est pas assez. C’est assurément une capacité divine dans sa source, et, pour la chair, une chose impossible à réaliser pleinement ; mais c’est une chose qui a pour objet l’homme, les manquements de l’homme et les excès d’une nature mauvaise. Cette qualité du pardon, Il aime à la voir en nous ; c’est le fruit de Sa grâce, et un fruit bien nécessaire dans un monde comme celui-ci et bien salutaire pour les saints dans les rapports et le commerce qu’ils soutiennent entre eux. Mais cela est loin d’être l’expression complète de ce qu’Il est et de ce qu’Il veut que nous reflétions et savourions. Il y a l’activité du bien qui est selon Son cœur, là où il n’est pas question de mal à pardonner ; car le pardon des fautes, si réel et si doux qu’il puisse être, n’est que le côté négatif de la vérité. Ici, tout est positif et coule plein de fraîcheur, pour ainsi dire, au-dessus de la pensée humaine. Aussi est-il dit : « Marchez dans l’amour, comme aussi le Christ nous a aimés et s’est donné lui-même pour nous », etc. Dans notre état d’abjection nous avions un besoin urgent de pardon, si du moins nous désirions recevoir quelque consolation de la part de Dieu, quelque espérance d’être délivrés de la colère et bénis dans la vie à venir. Ce pardon, sans doute, est le fruit de la grâce de Dieu, mais de la grâce présentée, sinon limitée, au besoin de l’homme. Mais maintenant nous sommes sur le terrain de l’excellence de Christ et de l’exercice de ce qui est propre à Dieu dans l’activité de Sa nature même. Aussi n’est-ce pas à un sacrifice pour le péché qu’il est fait allusion ici, ni simplement au sang et aux souffrances de notre adorable Seigneur, mais au glorieux fait qu’Il s’est Lui-même donné pour nous, dans Son amour incomparable, « comme offrande et sacrifice à Dieu en odeur de bonne senteur ».

Il ne faut pas se méprendre sur un pareil sujet, ni affaiblir un seul instant la certitude que dans les souffrances du Seigneur sur la croix se trouvent des profondeurs qu’on ne rencontre pas ailleurs ; mais ce n’est pas là ce qui est ni pourrait être mis devant nous comme exemple, puisque ces souffrances appartiennent exclusivement à Celui qui a porté nos péchés en Son corps et qui a été fait péché pour nous. Lui seul, en effet, a rencontré ce jugement de Dieu, que nul homme, ni ange, ni créature, ni nouvelle créature ne pouvait partager avec Lui, quelque bénédiction que nous en retirions et si remplis que nous puissions être de gratitude, d’adoration et de joie en Celui qui a été ainsi seul, non seulement pour nous, mais pour la gloire de Dieu — l’objet de la colère que Dieu ressentait et devait nécessairement exécuter contre le péché. Mais ici il est question de ce qui démontre l’amour admirable de Christ dans sa bonne odeur et sa beauté positive, et cela, pour provoquer, dans l’énergie de l’Esprit, une réponse pratique de la part des saints, qui ont la nouvelle nature ; car Christ est effectivement notre vie, et quelle restriction pourrait-on mettre à la puissance de l’Esprit qui habite en nous ? L’amour conduit au service dans l’abnégation : en Christ, d’une manière parfaite ; en nous, selon notre mesure ; mais assurément c’est là ce qui donne et forme l’esprit de service, ainsi que nous le voyons en notre adorable Seigneur (Phil. 2).

Toutefois, plus cet esprit de service est doux et béni, plus il est exposé à l’action du mal, à moins qu’il ne soit maintenu par la puissance divine et le jugement de soi-même. Il resserre, il réveille les affections spirituelles ; mais ce qui est commencé par l’Esprit peut finir par la corruption charnelle (ce fut le cas à Corinthe), ou bien par un perfectionnement charnel de forme religieuse, comme parmi les Galates. C’est pourquoi l’apôtre commence d’abord par avertir les saints d’Éphèse des dangers auxquels les exposait un commerce libre et familier les uns avec les autres, à moins qu’il ne soit soutenu par le Saint Esprit. « Mais que ni la fornication, ni aucune impureté, ni avarice ne soient même nommées parmi vous, comme il est convenable à des saints » (v. 3). Il ne suffisait pas de ne point tolérer ces convoitises de la chair : on ne devait pas même les nommer. Ceux à qui Paul écrit ici étaient participants de la sainteté de Dieu, Ses saints ; et il s’agissait maintenant de ce qui convenait non pas à des hommes, mais à des saints.

D’un autre côté, il ne limite pas son avertissement à ce qui constitue la licence effrénée ou le désir cupide de ce qui est propre à satisfaire les passions de l’homme, mais il embrasse aussi l’impiété du langage, soit du langage ouvertement honteux ou de celui qui se couvre d’un voile de raffinement : « Ni aucune chose déshonnête, ni parole folle, ni plaisanterie, lesquelles ne sont pas bienséantes, mais plutôt des actions de grâces » (v. 4). Ici encore, nous n’avons pas simplement l’abstention de ce qui manque de bienséance pour un chrétien ; mais il y a le côté positif présenté et le cœur s’entretenant de la bonté de Dieu et s’ouvrant en actions de grâces. « Car vous savez qu’en effet aucun fornicateur, ou impur, ou avare (qui est un idolâtre) n’a d’héritage dans le royaume du Christ et de Dieu » (v. 5). Il est important de se rappeler que, quoiqu’il plaise à la grâce souveraine d’opérer, qu’elle s’offre au plus vil ou qu’elle purifie le plus souillé, les voies morales de Dieu demeurent inflexibles. Sa nature ne change pas. Il hait et ne peut jamais tolérer l’iniquité. Son amour peut trouver et a en effet trouvé une glorieuse solution à la difficulté dans la croix de Christ ; mais Dieu et le péché ne peuvent jamais marcher ou demeurer ensemble.

Les enfants de Dieu sont en danger du contraire et, par conséquent, ont besoin de veiller contre leurs sentiments. Ils peuvent être prompts à s’écrier, dans tel cas flagrant, qu’il n’y a pas la vie là ; ou bien ils peuvent accorder trop facilement leur confiance à ce qui a une belle apparence dans la chair. Quelques-uns des retours les plus attristants vers le monde sont précisément ceux dont on s’était peu ou point douté ; et, d’un autre côté, qui n’a eu la consolation de voir se dissiper les pénibles apparences qui nous causaient de la répulsion, de façon à faire luire la grâce de Christ plus vivement là où la chair est jugée par la vérité en la présence de Dieu ? Ainsi, il en est beaucoup dont l’air défavorable faisait douter, qui ont fini par gagner la confiance de tous. Quelquefois ce brisement de la chair peut nécessiter une sérieuse visitation de Dieu, une maladie grave, par exemple, des revers de fortune, des chagrins domestiques, avant que l’âme soit mise en bon état ; pourtant elle y parvient, quoique tardivement. L’un et l’autre de ces extrêmes nous enseignent la nécessité de nous attendre à Dieu pour juger justement, au lieu de nous reposer sur nos impressions. Le cœur naturel pourra prendre avantage de la grâce, mais après cela ne tardera pas à laisser voir le mal qui n’a pas été ôté. Des hommes pervers peuvent s’élever, des loups s’introduire, et pour un moment les brebis peuvent être trompées. Mais Dieu demeure, ainsi que la parole de Sa grâce, et pourquoi montrerions-nous de l’inquiétude ? Ayons foi en Dieu ; imitons Dieu comme de bien-aimés enfants, et marchons dans l’amour, non seulement parce que, mais comme Christ nous a aimés ; et quoi qu’il en résulte, nous aurons la consolation de plaire à Dieu, en même temps que nous serons gardés de précipitation dans un sens ou dans l’autre. Épier le mal et « rendre grâces » sont deux choses bien différentes, et, de fait, incompatibles l’une avec l’autre. Mais n’abaissons jamais le niveau de la marche que Dieu attend de Ses enfants. Si nulle personne corrompue n’a d’héritage en Son royaume, qu’il ne nous arrive jamais maintenant de traiter à la légère ce péché-là. « Que personne ne vous séduise par de vaines paroles ; car à cause de ces choses la colère de Dieu vient sur les fils de désobéissance. N’ayez donc pas de participation avec eux » (v. 6, 7). Être associé en quelque mesure que ce soit avec ceux que la Parole décrit en ces termes, est une chose grave pour un saint. Prenons garde.

Le huitième verset de notre chapitre nous présente un autre sujet d’appel. Nous n’y sommes pas exhortés à marcher selon notre vocation, comme au chapitre 4, 1 ; ni, d’une manière particulière, en contraste avec les autres Gentils qui sont étrangers à la vie de Dieu, comme au chapitre 4, 17, 18, et pas encore non plus dans l’amour seulement, comme au verset 2 de notre chapitre ; mais « comme des enfants de lumière ». « Car vous étiez autrefois ténèbres, mais maintenant vous êtes lumière au Seigneur ». Soyez donc conséquents avec ce que vous êtes et non pas seulement avec ce que vous devriez être. Nous sommes lumière ; oui, lumière au Seigneur — vérité qui renferme tout à la fois et le principe et le caractère et la mesure de ce qui doit former nos voies comme chrétiens : marchons donc d’une manière qui y soit conforme. Combien il est encourageant de voir la grâce nous appeler à marcher saintement ! L’appel le plus solennel et le plus pressant ne peut que nous faire ressouvenir de notre bénédiction et de sa certitude. Combien est sainte notre position en Christ, que Dieu Lui-même puisse dire de nous : « Vous êtes lumière au Seigneur ». Si c’est là ce que Dieu déclare, ne devons-nous pas le dire nous-mêmes, tant sous le rapport du privilège que sous le rapport de la responsabilité ? Regardons à Lui, afin que, ainsi placés en dehors de toute souillure (car il n’est rien de plus pur que la lumière), nous puissions avancer et faire briller cette lumière que nous sommes maintenant au Seigneur. C’est dans la lumière que nous marchons et par la lumière que nous devrions juger toutes choses, car nous sommes lumière. Dieu répudierait un niveau moins élevé ou une atmosphère moins pure. Il est lumière, et en Lui il n’y a pas de ténèbres ; si nous sommes Ses enfants, nous sommes enfants de lumière. Il n’est jamais dit de nous que nous sommes amour (ce qui constitue la nature et la prérogative de Dieu), bien que, assurément, nous soyons appelés à aimer comme étant nés de Dieu et connaissant Dieu en Christ. De quelle manière absolue la loi disparaît comme motif ou moule de notre marche !

« Car le fruit de la lumière consiste en toute bonté, justice et vérité ». Ce sont là sans doute les caractéristiques de l’opération toute de grâce de l’Esprit, et peut-être est-ce là ce qui a conduit à la substitution du terme « l’Esprit » pour « lumière » dans la version ordinaire. Mais on ne saurait raisonnablement douter que la vraie pensée et le vrai mot du verset 9 ne soit : « la lumière » — mot confirmé par la portée du contexte aussi bien que par les preuves externes. En Galates 5 nous avons, non pas le fruit de la lumière, mais le fruit de l’Esprit, parce que là il s’agit d’un contraste avec les œuvres de la chair — l’impureté, la violence contre Dieu et contre l’homme, cet esprit qui joue avec les ruses de l’Ennemi et s’y assujettit sans peine ; au lieu que le fruit de l’Esprit est l’amour, la paix, la longanimité, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance : — choses contre lesquelles il n’y a pas de loi, déclare emphatiquement l’apôtre à ceux qui affectent de se placer sous la loi. Dans notre passage d’Éphésiens 5, il est question d’un contraste, non pas avec le penchant vers le légalisme et les œuvres de la chair, que la loi provoque et condamne en même temps, mais avec les ténèbres qui constituaient notre état alors que nous étions sans Dieu. Mais maintenant nous sommes appelés à marcher comme enfants de la lumière qui est devenue notre nature même dans le Seigneur, et la Parole nous rappelle que le fruit de cette lumière consiste en toute bonté, justice et vérité. La grâce si riche de notre Dieu confirme plutôt qu’elle n’affaiblit le déploiement de Ses principes moraux, et en produit la réalisation même en nous, Ses enfants, quels que nous ayons pu ou puissions encore être par nature. La nouvelle vie qu’Il nous a donnée en Christ répond à la bonté, à la justice et à la vérité qui Lui sont propres. Il ne pouvait ni ne devait en être autrement. Et le cœur renouvelé lui-même ne consentirait pas de sang-froid à ce que Dieu fût déshonoré ou même représenté d’une manière défectueuse dans les objets de Sa faveur. Il implante en nous le désir de Lui plaire et Il veille sur nous de façon à ce que ce désir ne soit jamais vague ni vain, mais qu’il porte du fruit — le fruit de la lumière — « éprouvant », comme il est ajouté, « ce qui est agréable au Seigneur » (v. 10).

Puis il ne suffit pas que nos âmes refusent toute participation avec les fils de désobéissance, comme aux versets 6, 7 ; nous devons encore refuser toute communion avec les œuvres infructueuses des ténèbres et plutôt les reprendre (v. 11). Tout cela fait partie de la position merveilleuse qui nous appartient comme enfants de lumière et de la responsabilité qui en découle. Ce n’est pas la loi, condamnant simplement par l’application d’une règle extérieure ; mais c’est une divine capacité, intérieure et profondément scrutatrice, qui, quel que soit l’amour qui en est la source et le terme, tolère le mal d’autant moins et, au contraire, porte en Christ des fruits à maturité par le Saint Esprit. « Car il est déshonnête même de dire les choses qu’ils font en secret (à savoir, ceux qui pratiquent les œuvres infructueuses des ténèbres) ; mais toutes choses qui sont reprises, sont manifestées par la lumière, car ce qui manifeste tout, c’est la lumière » (v. 12, 13). C’est une propriété spéciale à la lumière de manifester avec elle-même toutes les autres choses, et dans l’ordre spirituel cela est tout aussi vrai que dans l’ordre naturel.

Mais il y a plus dans la pensée du Seigneur envers nous. Il veut que, non contents de posséder la bénédiction, nous en jouissions pleinement. Il y a autour de nous des morts — choses ou personnes — et quand leur influence est tolérée, elle devient profondément pernicieuse. « C’est pourquoi il dit : Réveille-toi, toi qui dors, et te relève d’entre les morts, et le Christ t’éclairera » (v. 14). Il ne s’agit pas ici de nous donner la vie comme si nous étions morts, ni même la lumière comme si nous n’étions pas déjà lumière ; c’est plutôt le resplendissement de la lumière sur nous qui, tout en étant lumière en Lui, nous assoupissons néanmoins au milieu de ce qui est à la fois mort et propre à faire mourir. Combien Son amour se montre vigilant en pensant ainsi à nous, afin que notre coupe de bénédiction déborde et que nos âmes soient délivrées de ce qui est dégradant pour Lui et pour nous-mêmes, qui sommes en Lui, de telle sorte que nous soyons remplis de ce que nous sommes comme Lui appartenant ! Combien chaque parole à Lui, chaque circonstance à nous, doit nous rappeler que nous avons à prendre garde de marcher soigneusement (v. 15), non pas comme étant dépourvus de sagesse, mais comme étant sages ; rachetant l’occasion parce que les jours sont mauvais ! Nous sommes, en vérité, largement approvisionnés, mais néanmoins nous avons besoin de veiller constamment dans la dépendance. Il faut rechercher et saisir le moment opportun, à quelque prix que ce soit, si l’on désire n’être pas insensibles, mais comprendre quelle est la volonté du Seigneur (v. 16, 17). Il faut éviter l’excitation mondaine, tout ce qui irrite la nature, et, en général, tout ce que désire l’homme habitué aux excès. Néanmoins nous pouvons et devrions être remplis d’une puissance qui surpasse celle de la nature et qui repousse non seulement le mal, mais encore l’attraction des choses présentes. « Soyez remplis de l’Esprit, vous entretenant par des psaumes, des hymnes et des cantiques spirituels, chantant et psalmodiant dans vos cœurs au Seigneur, rendant toujours grâces pour toutes choses au nom de notre Seigneur Jésus Christ à Dieu le Père ; étant soumis les uns aux autres dans la crainte de Christ » (v. 18-21). Je considère toutes ces choses comme composant les sujets sacrés qui conviennent aux chrétiens, comme autant d’expressions d’adoration, de louanges, d’un sentiment de sainteté, le terme « spirituels » étant ajouté à la dernière classe, ou classe inférieure, pour en marquer même la consécration au Seigneur. C’est là une véritable et sainte joie. Puissions-nous la cultiver en simplicité ! Nous possédons vraiment un heureux lot. De quoi ne pourrions-nous pas rendre grâces à Celui qui est notre Dieu et Père, au nom du Seigneur Jésus ? Et qu’est-ce qui peut, aussi bien que de telles actions de grâces, nous faire soumettre les uns aux autres dans Sa crainte ?

Nous entrons maintenant dans le sujet des relations terrestres spéciales. Nous avons eu ci-devant les exhortations générales, celles qui concernent les saints de Dieu comme tels — les enfants de Dieu et membres du corps de Christ. Mais maintenant le Saint Esprit montre qu’Il n’est pas indifférent aux relations que ces saints peuvent soutenir ici-bas, ou l’un avec l’autre, ou peut-être avec un inconverti. Il pourrait y avoir, par exemple, un mari et sa femme, chrétiens tous les deux, ou bien l’un d’eux seulement converti et l’autre encore juif ou païen ; et la même chose pour ce qui regarde la relation de père à enfants, de maître à serviteur. Pour le moment nous n’avons affaire qu’à celle qui tient au lien terrestre le plus intime, celle de mari à femme. Et nous verrons que l’Esprit Saint pourvoit de la manière la plus ample aux besoins des enfants de Dieu attachés l’un à l’autre par un tel lien ; de sorte que, quelles que soient leurs difficultés, ils puissent trouver de quoi s’instruire en grâce et s’exhorter sérieusement, et non pas seulement des commandements en rapport avec les circonstances dans lesquelles ils sont devant Dieu — car ce n’est pas strictement sous cette forme de commandements que nous sont présentées les règles proposées aux chrétiens. Sans doute il y a des préceptes et des commandements dans le Nouveau Testament. Et, en vérité, c’est bien des écrivains inspirés celui qui met l’amour le plus en évidence, qui aussi insiste le plus sur les commandements ; car c’est dans l’évangile et dans les épîtres de Jean que de telles injonctions ont le plus de force, et cependant nous savons qu’il n’est pas de portion de l’Écriture où l’amour de Dieu se lise d’une manière plus frappante et plus constante. C’est donc une erreur énorme de supposer qu’il y ait inconséquence entre l’amour de Dieu et la plus stricte injonction que Son autorité puisse adresser à Ses enfants.

Cependant, il est incontestable que, de même que le caractère général des instructions données aux chrétiens ne prend pas la forme de commandements légaux, pareillement nous ne sommes pas placés sous les commandements mosaïques pour en tirer nos pensées, nos sentiments et en régler nos voies comme chrétiens. Bien plus, nous sommes si loin d’un principe analogue à la loi que notre position y fait contraste : « La grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ ». Nous avons bien des commandements ; mais ces commandements impliquent que nous avons la vie ; ils sont destinés à en devenir la règle et ont pour but d’exercer en nous l’obéissance de Christ (1 Pier. 1) ; et il n’est rien qui glorifie Dieu davantage, ni qui soit plus beau pour l’âme. C’est ordinairement de la manière suivante que le Nouveau Testament nous présente l’instruction : il y a une relation formée, et selon le caractère de cette relation, développée avec ampleur et insistance dans la Parole, nous avons à glorifier Dieu. De même que cela est vrai jusque dans les choses naturelles, ainsi l’Esprit de Dieu se sert de la relation de tous les jours comme d’une occasion pour manifester la relation spirituelle qui y correspond. Et si nos cœurs sont occupés de l’extrême grâce qui a formé le lien nouveau et éternel, nous pourrons trouver, dans la relation naturelle comme dans la relation spirituelle, non seulement un motif, mais un modèle et de la puissance pour glorifier Dieu. Nulle part cette vérité n’est démontrée d’une manière plus frappante que dans la première des relations sur lesquelles l’Esprit de Dieu s’étend d’une façon si particulière : « Femmes, soyez soumises à vos propres maris, comme au Seigneur ». La première comparaison qu’Il emploie avant d’entrer dans la relation spirituelle qui nous est présentée sous la figure du mariage, fait ressortir tout d’abord la primauté de l’homme comme ayant une force particulière dans la vie matrimoniale. Nous savons tous que, même à part du mariage, l’homme est le chef de la femme ; c’est-à-dire que lors même que le mariage n’existerait pas, l’homme aurait, indépendamment du caractère, une place que ne peut avoir la femme. Tel homme peut être imbécile et telle femme avoir beaucoup de fermeté et de sagesse ; mais cela ne change rien à l’ordre de Dieu. Tel enfant sera doué d’une grande prudence, alors que ses parents seront faibles et imprudents. Néanmoins, la relation est absolument indépendante du caractère particulier, de l’état, de la condition, soit de ceux qui occupent la place supérieure, soit de ceux qui sont dans la position subordonnée. Et il est très important que nous ayons la chose fixée dans nos âmes, afin que jamais les circonstances ne puissent servir de prétexte pour renverser l’arrangement de Dieu. Il est des circonstances pénibles, qui rendent immense la difficulté des deux côtés. Mais il est d’une haute importance de se souvenir que, dans tous les cas, l’autorité de l’ordre selon Dieu subsiste toujours, que rien ne justifie jamais la désobéissance à Sa volonté. Il peut y avoir des cas où l’obéissance dans l’ordre naturel selon Dieu serait un péché ; il n’en est pas où la désobéissance soit un devoir. Il n’est pas possible que vous soyez requis de désobéir sous des circonstances quelconques ; mais il se peut que vous soyez appelés à obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. C’est une bien grande grâce, en vérité, que les cas soient rares où l’obéissance à Dieu comporte une apparente infraction à l’ordre naturel et au devoir moral. Pourtant, il peut s’en présenter de tels. Vous verrez, par exemple, au commencement du livre des Actes, les autorités d’alors, qui gouvernaient le peuple d’Israël, enjoignant à Pierre et à Jean de ne pas enseigner au nom de Jésus. Or, que pouvaient faire ceux-ci, sinon se rejeter sur l’autorité de Dieu ? Ils pouvaient déclarer à ces gouverneurs mêmes que leurs consciences étaient liées envers Dieu à la face de tous les hommes. Ainsi donc, avant d’entrer dans les particularités, nous constatons que ce grand principe demeure et demeure parfaitement clair, à savoir, que l’obéissance est toujours la part du chrétien.

Donc, comme découlant de l’exhortation générale à nous soumettre les uns aux autres dans la crainte de Christ (car dans cette épître l’honneur est continuellement attribué à Christ), l’Esprit saisit cette première place, si bien appropriée à la femme chrétienne, et pose ce principe : « Femmes, soyez soumises à vos propres maris, comme au Seigneur ». Bien qu’un tel langage puisse paraître extraordinairement fort quand nous pensons à ce que sont ou peuvent être les maris, cependant c’est une grande chose d’être toujours sûrs que Dieu est dans le vrai. À la prudence humaine cela peut paraître peu circonspect. Peut-être même avez-vous affaire à un mari inconverti ? Mais faites seulement intervenir le Seigneur et vous aurez aussitôt la puissance qui rend la soumission facile et apprendrez jusqu’à quelle mesure la soumission doit être portée. Mais qui plus est, vous avez ce qui vous préservera contre l’abus du principe : « Femmes, soyez soumises à vos propres maris, comme au Seigneur ». Du moment qu’on fait intervenir le Seigneur, chaque chose entre à sa vraie place. S’il s’agit d’épreuve ou de souffrance, la Parole, quoi qu’il en soit, reste la même. Le Seigneur peut nous mettre au milieu de grandes difficultés et de grands dangers. Qu’est-ce qui convient au chrétien sous de pareilles circonstances ? Une soumission sans réserve. Car je dois être assuré que, quels que soient les brisements d’esprit que de telles épreuves peuvent occasionner, néanmoins tout ce que fait le Seigneur est bien le mieux et le meilleur, et, en fin de compte, le plus propre à fortifier mon âme — le Seigneur étant incapable d’ordonner à mon égard une seule chose qui n’ait pour but de produire un bien durable à la louange de Son propre nom.

Dans cette épître, ce n’est pas seulement le contrôle de Dieu qui est mis en évidence, mais une relation spéciale. Ici, nous voyons en activité l’amour qui, dans le Seigneur, a sacrifié toutes choses pour les siens. Comment pourrais-je douter de la bénédiction et du profit qu’il y a à se soumettre au Seigneur ? La femme chrétienne a peut-être un mari dont il faut supporter des choses dures et pénibles ; peut-être la traite-t-il comme rien et exige-t-il souvent ce qui est déraisonnable. Mais si le joug est senti, qu’est-ce qui peut l’alléger ? « Soyez soumises à vos propres maris comme au Seigneur ». La femme doit se soumettre à son mari comme au Seigneur ; que seulement elle voie dans l’affaire le Seigneur, au lieu du manque d’égards et du mauvais caractère du mari, et son chemin sera aisé. Il faut qu’elle en fasse une affaire, non pas simplement de devoir, mais de confiance dans le Seigneur, qui est au-dessus de tout dans Son amour, Ses soins et Son gouvernement. C’est là ce dont le Saint Esprit fait le point de départ et la base des instructions variées qui vont suivre. Il débute par cette grande vérité que la femme chrétienne doit se soumettre à son mari comme au Seigneur. Il ne s’agit donc pas simplement d’une affaire d’affection, qui ne regarderait que l’homme ; sans doute l’affection est une chose absolument nécessaire comme élément naturel, mais elle se trouve chez des personnes qui ne sont pas du tout chrétiennes. Il ne s’agit pas davantage de ce que peut exiger le mari, ni de ce que je puis croire convenable. De telles choses appartiennent au domaine des sentiments et de la moralité. Mais la grande affaire, c’est que Dieu ne peut pas être avec une femme chrétienne qui marche habituellement dans la déconsidération de ce dont Il a fait la base de sa relation, à elle, comme femme. Il ne permettra pas à un chrétien de ne marcher que d’après des principes moraux ou conventionnels. Ces choses peuvent être bonnes à leur place ; mais, comme chrétien, j’ai un appel plus élevé, duquel découle — quelles que soient les difficultés et lors même que celui à qui je dois la soumission ne serait pas chrétien — la direction bénie : « Soyez soumises à vos propres maris, comme au Seigneur ». Il donne à la femme chrétienne le privilège de voir le Seigneur derrière la personne du mari, et c’est Lui qu’elle doit suivre et à Lui qu’elle doit se soumettre. Il y a dans cette pensée une grande consolation pour la femme chrétienne même la plus éprouvée. Mais alors se présente la limite de l’épreuve — car il y a un terme à chaque sentier — et voici quelle elle est : c’est que Dieu ne nous place jamais dans des circonstances quelconques où nous puissions impunément commettre le péché. Ainsi donc, en admettant qu’un mari commande ce qui serait positivement péché, la femme apprend dès lors qu’elle n’est pas sous l’obligation d’obéir ; parce qu’il lui est dit de se soumettre à son mari comme au Seigneur. Le Seigneur ne sanctionnerait jamais ce qui serait péché. Il peut me passer au crible, et peut-être n’en comprendrai-je pas tout d’abord l’utilité ou la nécessité ; mais la foi trouve constamment sa force et sa direction dans la sagesse du Seigneur. Par la foi je me confie en Lui, au lieu de me confier dans la sagesse que je puis me croire quant à l’intelligence de Sa volonté. Et vous verrez que nous croissons en sagesse lorsque nous nous contentons de ne pas nous en croire. Si j’ai confiance dans la sagesse du Seigneur, ce sera par ce moyen que j’acquerrai de la sagesse et que je croîtrai en elle. Notre Seigneur fut parfaitement homme, et bien que toujours parfait dans toutes les conditions de la vie, Il fut cependant l’homme dépendant qui regardait continuellement à Dieu. Cette dépendance fut même le grand sceau de Sa perfection. Il pouvait dire : « Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? ». Voilà bien, pour l’homme, la place la plus humble, mais aussi, en vérité, la plus élevée. Il avait saisi le secret de Sa relation avec Dieu le Père ; et bien que cela fût plus vrai de Christ que de tout autre, néanmoins c’est assurément vrai de tout croyant dans une certaine mesure.

Nous avons à veiller fort soigneusement sur nous-mêmes à ce sujet. Là où il y a la moindre tendance à s’écarter du sentier de la soumission, nous ferons bien d’examiner et sonder si nous sommes sages selon Dieu. La nature ne se plaît jamais sous l’assujettissement. Et si je me trouve dans le cas d’avoir à me prévaloir de la vérité de Dieu pour justifier un acte où je paraîtrais manquer de soumission envers l’autorité d’autrui, j’ai besoin, ici surtout, de veiller sur moi-même avec une jalousie d’autant plus grande. Lorsque nous sommes dans un sentier où la soumission est requise, laissons de la place au Seigneur pour qu’Il y soit avec nous. Si nous voulons que notre obéissance soit marquée d’un saint caractère de foi et de puissance, considérons que c’est au Seigneur que nous obéissons, lors même que c’est à une autorité terrestre que nous sommes soumis. La vérité bénie que le Seigneur allait introduire, commence à s’ouvrir devant nous : « Car le mari est le chef de la femme comme le Christ est le chef de l’assemblée, et c’est lui qui est le Sauveur du corps » (v. 23). Ces paroles font allusion à une relation intime, qui a pour but de nous montrer comment, sous ce rapport, nous devons nous conduire l’un envers l’autre. Bien que seul Christ soit le Sauveur du corps, ce fait, loin de donner à l’Église ou au croyant individuellement une autre place que celle de la sujétion, l’y retient au contraire d’une manière expresse.

« Mais comme l’assemblée est soumise au Christ, ainsi que les femmes le soient aussi à leurs propres maris en toutes choses ». Tel est le principe général. Mais vous remarquerez qu’il y a, dans chaque parole analogue de l’Écriture, une mesure déterminée et une sauvegarde. Il n’est pas dit simplement : « Que les femmes soient soumises en toutes choses à leurs propres maris », mais : « Comme l’assemblée est soumise au Christ, ainsi que les femmes », etc. Là, j’apprends que la manière bénie en laquelle Christ prend soin de l’Assemblée et agit vis-à-vis d’elle dans sa position de soumission envers le Seigneur, est posée comme modèle de la conduite des femmes envers leurs maris. Mais c’est lorsque nous arrivons à la plus haute des deux relations que le Saint Esprit en fait ressortir le plus clairement le caractère. « Maris, aimez vos propres femmes ». Ici nous voyons quel pourrait être le piège du mari. D’abord la femme est tenue de veiller à son caractère propre et de discipliner son esprit par une entière soumission à son mari. Il ne lui est pas dit, à elle, d’aimer son mari, mais de lui être soumise. Mais Satan pourrait prendre occasion de cela, et, dans l’exercice de la relation mutuelle, le mari pourrait manquer de tendresse dans les soins et l’affection qu’il doit. Il y a ce qui est propre à régler et à diriger la conduite de la femme ; mais ici l’exhortation adressée au mari porte sur ce dont il a le plus besoin dans ses circonstances propres et ce qui est le plus excellent pour le bien de son âme et la joie de sa femme. C’est pourquoi nous lisons : « Maris, aimez vos propres femmes, comme aussi le Christ a aimé l’assemblée et s’est livré lui-même pour elle ». Quel saint modèle ! Quel sage, quel pur et céleste exemple de dévouement est placé devant nous, afin que cette relation, qui pourrait être si aisément dégradée, soit maintenue à sa vraie hauteur et que même les saints les plus pauvres sur la terre, ainsi liés l’un à l’autre, puissent jouir de la lumière et de l’amour du ciel reluisant sur eux. « Maris, aimez vos propres femmes, comme aussi le Christ a aimé l’assemblée et s’est livré lui-même pour elle, afin qu’il la sanctifiât en la purifiant par le lavage d’eau par la parole ; afin qu’il se présentât l’assemblée glorieuse, n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable, mais afin qu’elle fût sainte et irréprochable ». Ainsi l’amour de Christ pour l’Église est posé comme le modèle auquel le mari chrétien doit chercher à conformer son propre amour pour sa femme. Voyez quels en sont la source et le caractère : « Comme aussi le Christ a aimé l’assemblée ». Tout découle de là. Ai-je besoin de dire que, comme l’amour — même d’après le sentiment humain — doit précéder le mariage, ainsi l’amour est, selon la nature, le secret qui seul rend le mariage heureux lorsqu’il est consommé. L’amour de Christ, tel qu’il est déployé ici, nous est présenté comme un tout invariable, du commencement à la fin. Il est bon, dans la vie du mariage, de se souvenir que l’amour qui était vrai avant la formation du lien, est un amour qui demeure vrai après que le lien est formé et qui doit grandir jusqu’à la fin.

Il en fut certainement ainsi, dans un sens parfait, du côté du Seigneur. Il a aimé l’Église. Il s’agit ici d’une affection bien spéciale de la part de Christ. Ce n’est pas la vérité générale que Dieu a aimé même le monde, car avec celui-ci il n’y eut pas de relation formée. La chose importante à considérer est que, lors bien même que l’amour existerait avant la relation, c’est en elle cependant qu’il trouve la sphère de son exercice en même temps qu’il en constitue en permanence la force et la joie. Et si de la chose terrestre nous tournons nos regards vers ce qu’elle symbolise, combien est grande la grâce et riche la bénédiction ! Ce fut autrefois une grande joie pour nos cœurs de réaliser cette vérité que Dieu pouvait aimer les pécheurs, et les aimer jusqu’à livrer Son Fils pour nous, comme pécheurs. Mais il est une autre espèce d’amour, que nous connaissons maintenant. Dieu a pris vis-à-vis de nous la relation de Père, ou tout au moins nous a introduits dans celle d’enfants vis-à-vis de Lui, par Jésus Christ. Nous sommes « enfants de Dieu par la foi en Jésus Christ ». Par conséquent le Père nous aime d’un cœur de Père ; Il n’aime pas seulement, comme Dieu, la créature, mais Il nous aime comme Père ; bien plus, Il nous aime comme le Père de notre Seigneur Jésus Christ L’a aimé, Lui, et non pas seulement dans la mesure de l’affection humaine de parents pour leurs enfants. Et en considérant ce que nous sommes, qu’elle est merveilleuse la pensée que, même dans ce monde, Dieu le Père peut trouver Son plaisir en nous ! qu’Il nous aime infiniment plus que le meilleur père ne peut aimer son enfant, et que cet amour s’étend aux membres les plus faibles et les plus nécessiteux de Sa famille ! Il y a aussi un amour conditionnel en faveur de ceux qui marchent fidèlement, amour que nous trouvons exposé en Jean 14 ; 15. Mais je parle maintenant de cet amour immuable, personnel, qui découle de la relation que Dieu soutient, comme Père, avec Ses enfants, de l’amour qui ne se borne pas à la compassion, mais qui trouve actuellement son plaisir et sa joie dans les enfants, malgré tout ce qui peut être de nature à le détourner ou à l’affaiblir. Étant en Christ, ne dois-je pas être assuré d’un tel amour autant que je le suis de mon existence comme homme ? Bien plus, ne dois-je pas avoir une connaissance et une certitude plus grande de ce qu’est Son amour envers moi, que de tout ce qui me concerne comme vivant sur la terre ? Ce que j’ai en moi ne me garantit pas des déceptions du monde au-dehors ; mais dans les choses de Dieu, là où la foi est vivante, il n’en est pas ainsi : il y a une certitude divine.

Lorsque Dieu se révèle clairement, nous devons recevoir avec humilité d’esprit cette révélation ; et plus il y aura d’humilité, plus il y aura de certitude, parce que nous fonderons notre assurance sur ce que c’est Dieu qui s’est révélé à nous : il s’agira de Lui et non pas de nous. Et s’il en est ainsi, quelle merveilleuse position que d’être en Christ ! Il est très vrai que Christ m’a aimé ; mais ici il est question de l’Église — « Assemblée » — et Christ a pour Son Assemblée un amour spécial que je suis autorisé à m’approprier et sur lequel j’ai droit de compter. Voilà ce qui rend si précieux le rassemblement des enfants de Dieu comme assemblée, et ce qui montre l’extrême importance de ne pas réduire ce rassemblement aux proportions d’une société si nombreuse qu’elle puisse être. Du moment que vous introduisez la volonté de l’homme, vous détruisez virtuellement et d’emblée le fondement de l’Écriture ; — au lieu que si vous comprenez que Dieu a formé, dans l’Esprit, un certain lien pour la gloire de Son Fils parmi ceux qui Lui appartiennent maintenant sur la terre, et que Christ porte à ceux qui réalisent ce lien un amour parfait et particulier, alors il ne saurait y avoir de plus grande joie pour nos âmes que d’entrer dans Son amour et puis d’agir par la Parole pour amener les autres membres du corps de Christ à recevoir et à goûter cette joie. Ce n’est pas une partie seulement, mais c’est l’Assemblée qu’Il a aimée. Je me sers à dessein du terme « assemblée », parce que souvent on a une notion très vague de ce qu’est l’Église. De nos jours le terme « église » est la plupart du temps absolument mal appliqué. On le dit d’un édifice, d’une société religieuse, de celle, en particulier, qui sera la plus nombreuse dans un endroit quelconque. Mais substituez au terme « église » celui de « assemblée », et comprenez par là le corps entier de ceux que Dieu met à part de ce monde par le Saint Esprit descendu du ciel, et alors vous saisirez ce qu’est l’amour spécial que Dieu a révélé en Christ, non pas seulement à l’âme individuelle, mais à l’Assemblée qui est, sur la terre, le corps de Christ.

Il fallait évidemment et de toute nécessité que Christ mourût pour que l’évangile pût être maintenant prêché au monde. Cette mort de Christ est également le principe en vertu duquel les cieux et la terre seront purifiés de tout ce qui est aujourd’hui souillure et corruption. Tout pour la justification de Dieu dans le passé et la diffusion de Son amour dans l’avenir, est fondé sur la mort de Christ. De là la valeur immense de la rédemption qu’Il a accomplie, soit pour la terre ou pour le ciel, soit pour le Juif ou pour le Gentil, soit pour l’Église de Dieu, dans le temps et dans l’éternité. Mais il y a, de plus, une grande force dans cette parole : « s’est livré lui-même pour elle ». Il n’y a rien en Christ qu’Il n’ait donné. Ce n’est pas seulement qu’Il a fait beaucoup, qu’Il a beaucoup souffert, mais Il s’est donné Lui-même. Sans doute, ce fait comporte tout ce qui était de Christ et en Christ, mais il va beaucoup plus loin parce qu’il est l’expression d’un renoncement absolu de la part de Christ en amour pour ce qui était l’objet de Son cœur. Nous y voyons le parfait modèle de la plénitude même de l’amour qui dépasse infiniment tout ce qu’il peut être question de stimuler dans les relations humaines. C’est à juste titre que l’Esprit, en exhortant le mari chrétien, nous montre qu’en toutes choses Christ a la prééminence : « Il s’est livré Lui-même pour nous ». Quelle est la conséquence de cela ? Que l’Église est sans péché devant Dieu — que les péchés sont pour jamais effacés — que la rédemption est accomplie — que Satan est vaincu — que la colère et le jugement divin sont passés — que les ordonnances, contraires à ceux qui y étaient soumis, sont clouées à la croix — que l’inimitié est détruite — que le nouvel homme est formé. Tout cela, et beaucoup plus encore, est dû au sacrifice que Christ a fait de Lui-même. L’effet en est que Christ nous est présenté ici, sous la lumière la plus vive, dans un amour qui ne comporte ni doute, ni question, comme source de notre jouissance et objet à jamais digne de notre soumission, de notre service et de notre adoration.

Je ne suis pas moins en droit de croire que Christ s’est donné pour moi que de croire que mes iniquités ont été complètement effacées par Son précieux sang. Si je crois l’une de ces choses, je dois à Dieu de croire aussi l’autre ; et j’ai pour fondement de ma foi le témoignage rendu par Dieu à la perfection de ce que Christ a fait selon la gloire de Sa personne. Dieu attache une telle valeur à l’œuvre de souffrance de Son Fils sur la croix, qu’Il peut m’aimer parfaitement. Nous sommes affranchis. Nous avons la rédemption par Son sang ; mais ce n’est pas seulement par Son sang, c’est aussi en Lui, comme il est dit au chapitre 1 : « En qui nous avons la rédemption par Son sang, la rémission des péchés, selon les richesses de Sa grâce ». Il est donc de haute importance que, tandis que nous croyons en la rédemption, nous n’en recevions pas, s’il m’est permis de parler ainsi, la vérité séparément de Lui-même, mais bien en Lui. Et, en effet, c’est Sa propre personne qui nous rendra capables d’apprécier et de retenir la valeur de cette œuvre ; il faut nous rappeler non seulement ce qui a été fait, mais qui est Celui qui l’a fait. Si en vous jugeant vous-mêmes, vous vous attachez à Lui et à ces deux vérités bénies, jamais un seul nuage ne planera sur votre âme quant à votre parfaite délivrance devant Dieu.

Maintenant, il se présente une autre pensée. Si Christ a complété cette œuvre, si c’est une chose passée, n’ayant pas besoin d’être retouchée jamais, nous entrons dans la seconde preuve de Son amour : « afin qu’il la sanctifiât en la purifiant par le lavage d’eau, par la parole ». Je considère que cette sanctification de l’Église, dont il est parlé ici, est une chose distincte du lavage d’eau par la Parole, bien qu’elle s’y rattache étroitement. Ce sont là deux opérations, et il y a une différence importante entre sanctifier l’Église et la purifier. Cette sanctification ne se rapporte pas seulement à notre croissance dans la grâce, elle se rattache à Christ ; ce n’est pas simplement l’Esprit de Dieu opérant dans le croyant. Les hommes parlent souvent comme si justifier était l’affaire du Fils, et sanctifier, l’affaire de l’Esprit. Mais nous sommes lavés, nous sommes sanctifiés, nous sommes justifiés au nom du Seigneur Jésus et par l’Esprit de notre Dieu. C’est tout entièrement en vertu de ce qu’est Christ que nous sommes lavés, sanctifiés et justifiés, et c’est par l’Esprit de notre Dieu. L’Esprit de Dieu est l’agent actif dans la justification non moins que dans la sanctification, mais Il agit toujours en présentant Christ. C’est pourquoi il y a un grand danger à détacher Christ de la sanctification. Christ s’est donné Lui-même pour l’Église, « afin qu’il la sanctifiât et la purifiât ». Dans le fait que Christ s’est donné est comprise l’effusion du sang, mais il y a plus que cela.

En effet, tout ce que comporte la rédemption proprement dite, est impliqué dans le verset 25 : « Il a aimé l’assemblée et s’est donné lui-même pour elle ». C’est là une chose passée, mais suivie de tout ce qui se poursuit pendant le temps de l’existence de l’Église sur la terre. La mort de Christ pour nous — l’offrande qu’Il a faite de Lui-même pour l’Église, vient comme le fruit de Son amour. Et maintenant vous avez, sur le fondement de la croix, la sanctification et la purification dont l’action est continue. Mais comment s’opèrent-elles ? L’une et l’autre par le lavage d’eau par la Parole. Cela nous fait voir l’immense importance de la Parole de Dieu. Combien il est essentiel que tout enfant de Dieu apprécie cette Parole et cherche à croître, par elle, dans la connaissance de Dieu ! Le fait d’appartenir à l’Église ou plutôt à Christ, loin d’être la somme ou la substance de ce que nous avons à apprendre, n’en est que la base ; c’est seulement quand nous avons cette connaissance fondamentale que nous entrons dans la sanctification et la purification qui s’opèrent par le lavage d’eau par la Parole. Ainsi, nous avons clairement ces trois fruits distincts de l’amour de Christ : d’abord, l’offrande de Lui-même (jusqu’à la mort) ; ensuite Son œuvre actuelle dans la vie. Depuis l’achèvement de l’œuvre de la croix, Il s’occupe, dans le ciel, de l’Église ; Il prend soin de Ses membres, opère par le Saint Esprit, en appliquant la Parole de Dieu. Et tout est en connexion avec Lui, parce que le point de départ de tout est l’amour de Christ pour l’Église. Il sanctifie et purifie maintenant par le lavage d’eau par la Parole ; mais nous savons que nos péchés ont été effacés par Son sang.

Avant d’entrer dans la considération du troisième effet de Son amour, permettez-moi de dire ici que l’idée d’une application renouvelée du sang de Christ, est étrangère au christianisme. Sans doute, il est des chrétiens qui vous disent qu’il faut plusieurs fois recourir au sang ; mais ils avouent en même temps que leur opinion n’est fondée sur aucun passage de l’Écriture. Mais une pareille idée ne fait qu’affaiblir, au contraire, la vérité fondamentale de l’efficace du sacrifice de Christ, tout en ayant pour but de l’appuyer et de l’exalter à la façon de l’homme. C’est là, en effet, ce qui résulte de l’habitude de recourir à nos propres pensées quant à l’usage à faire de la vérité, au lieu de nous incliner simplement devant la Parole de Dieu. Du moment que nous détachons de Lui dans Sa connexion avec nous une vérité pour la soumettre à nos pensées, c’est comme si nous déracinions la plante qui croit dans le jardin de Dieu, où elle produit un fruit abondant et précieux, pour la placer dans un terrain où elle se flétrit dès qu’elle a passé par les mains de l’homme. Une application répétée du sang de Christ ne ferait qu’en prouver l’imperfection. Mais l’immutabilité du fondement est si complètement exposée dans l’épître aux Hébreux, qu’elle n’a pas besoin d’être établie de nouveau. Une nouvelle effusion du sang de Christ est aussi impossible que la nouvelle mort par laquelle ce sang serait répandu. Lorsqu’une âme l’a trouvé, Lui, et a été lavée du péché dans Son sang, elle demeure dans cette position pour jamais. Voilà ce qui rend si sérieux le péché lorsqu’il est commis par un chrétien. Si vous pouviez, dans ce cas, faire une nouvelle aspersion, quel en serait l’effet ? À peu près le même que celui de la confession auriculaire sur un catholique romain. C’est par de tels moyens que bientôt on apprend à jouer avec le mal et à s’endurcir par la tromperie du péché. Et quoi qu’il n’en soit pas ainsi là où Christ est connu, pourtant l’effet n’en diffère guère en ce qui regarde la façon de traiter le péché à la légère. Si, après avoir commis le péché, l’on pouvait revenir au point de départ comme s’il s’agissait d’une bagatelle, puis recommencer encore chaque fois que l’on se dévoie, le péché ne serait pas, à beaucoup près, aussi profondément senti. Car, tandis que d’un côté, nous sommes tenus de ne pas laisser souiller ce qui a été lavé dans le sang de Christ, de l’autre, nous avons la conscience de manquements continuels.

N’y a-t-il donc pas de ressource ? L’accès à la croix ne peut-il pas être renouvelé ? Ce serait une chose terrible s’il n’y avait pas de provision contre nos manquements et nos chutes, pas de moyens de nous ramener de nos écarts ; mais il y a une ressource, et la voici : « Afin qu’il la sanctifiât en la purifiant par le lavage d’eau par la parole ». Vous avez la même vérité, exposée dans son application individuelle, en Jean 13. Ici, elle est fondée sur ce que les disciples appartenaient à Jésus, qu’Il les aimait, et que ceux qu’Il aime, Il les aime jusqu’à la fin ; puis nous voyons que, exposés comme ils l’étaient à se souiller en traversant le monde, le Seigneur les met en garde contre deux choses : d’abord contre l’anxiété qui pourrait les amener à penser qu’Il cesserait de les aimer s’ils manquaient de fidélité ; ensuite contre le danger d’abuser de Sa fidélité, à Lui, pour s’autoriser à passer légèrement par-dessus le péché. Christ ne cessera jamais d’aimer, et aussi ne traitera pas davantage le péché à la légère, non plus qu’Il ne nous permettra de le faire. Il nous fait reposer sur Son sang à toujours. Mais alors, dans le cas où quelqu’un se rendrait coupable de péché après avoir reçu la rémission des péchés, que resterait-il à faire ? Allons, dans un tel cas, nous épancher devant Dieu par la confession. Le voile n’est pas rétabli parce que nous avons agi follement en dehors du voile. Nous sommes autorisés à nous approcher et à confesser notre faute devant Dieu — à nous approcher sur le principe même de cette vérité que nous sommes lavés dans le sang de Christ. Quel est l’effet d’un tel acte, et de quoi cet acte est-il l’effet ? Il s’explique en ce que Christ sanctifie et purifie, par le maintien du lavage d’eau par la Parole. Ce lavage peut être présenté sous son aspect collectif, comme dans notre chapitre des Éphésiens, ou sous son aspect individuel, comme en Jean 13 : l’un et l’autre sont vrais. C’est une vérité pour chaque âme sauvée, comme pour l’Église en général. Christ, dans la présence de Dieu, agit continuellement en faveur de l’Église, et comme conséquence il y a la nécessité de la répréhension et du châtiment. On est amené à sentir ce que l’on a pu faire. Quelque portion de la Parole de Dieu, lorsqu’on la médite soi-même ou lorsqu’on la reçoit par d’autres, pourra jeter une vive lueur sur l’âme. On est alors convaincu de folie ; la volonté propre cesse d’agir ; la Parole de Dieu est appliquée avec puissance par le Saint Esprit, et sous son témoignage on s’incline devant le Seigneur.

Tel est le lavage d’eau par la Parole — c’est-à-dire l’effet de la sacrificature de Christ à la droite de Dieu. L’application de la Parole de Dieu à l’âme est l’effet de l’intercession que Christ exerce pour effacer les fautes, où qu’elles se trouvent. L’œuvre qu’Il fait à la droite de Dieu est revêtue de ce caractère d’intercession. Une grande partie de ce qui forme l’exercice de l’âme a moins pour effet de relever dans les chutes que de les prévenir ou de les empêcher. Dieu ne compte pas sur le péché ; Il n’attend pas de Son enfant le péché. Il y a, au contraire, une exhortation solennelle à ne pas pécher : « Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez pas ». L’apôtre venait justement de déclarer que si nous disons que nous n’avons point de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous. Or, quelques-uns auraient pu, tant est grande la corruption du cœur de l’homme, s’autoriser d’une telle déclaration pour conclure qu’après tout tomber dans le péché n’était pas une affaire tellement grave. Mais il ajoute aussitôt : « Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez pas ». Jamais nous n’avons la liberté de pécher ; nous sommes toujours inexcusables quand nous commettons le péché. Puis enfin il dit : « Si quelqu’un a péché nous avons un avocat auprès du Père, Jésus Christ le juste ». Ici, nous avons la vérité qui correspond à notre passage en Éphésiens. Non que dans les deux passages la position de Christ soit la même ; seulement, l’effet qui en découle est analogue en ce qui regarde l’âme. Christ poursuit l’action bénie de Son amour, et comme fruit, nous avons telle portion de la Parole qui, par la grâce de Dieu, s’applique à nos fautes — de sorte que la sanctification dont il est parlé ici, est ce qui nous met pratiquement à part, comme Assemblée de Dieu, conformément à l’appel que nous en avons reçu — ou la réalisation, dans nos âmes, de cette séparation par la Parole de Dieu. Elle s’opère par la révélation de Christ, et de Christ tel qu’Il est maintenant dans la présence de Dieu. C’est à cela qu’il est fait allusion en 2 Corinthiens 3, où nous lisons : « Nous tous, contemplant, à face découverte, la gloire du Seigneur, nous sommes transformés dans la même image, de gloire en gloire, comme par le Seigneur en esprit ». Nous voyons que le Saint Esprit, révélant Christ dans la gloire qu’Il a devant Dieu actuellement, nous sépare du monde, qui est étranger à Sa gloire et qui cherche la sienne propre en rapport avec les choses présentes. Dieu nous révèle Christ en haut, et par là nous sommes sevrés du faux éclat de ce siècle mauvais.

Mais, comme nous avons ici l’exposé de tout ce que Christ fait, il s’y trouve la purification aussi bien que la sanctification de l’Église. Il est nécessaire que toute souillure soit ôtée, et dans les deux cas, c’est le lavage d’eau par la Parole que Dieu emploie comme moyen. Mais il y a un troisième fruit, un fruit encore à venir de Son amour : « Afin qu’il se présentât l’assemblée glorieuse, n’ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable ». Ici nous avons évidemment ce qui complète la bénédiction de l’Église, alors qu’il ne sera plus question de la purifier, alors que l’amour de Christ aura son plein effet et que l’Église sera glorieuse par une entière ressemblance avec Christ : « mais afin qu’elle fût sainte et irréprochable ». Tel est l’exposé divin et complet de tout l’amour de Christ. Mais vous remarquerez que ce témoignage est présenté moins sous une forme doctrinale que dans un sens pratique en vue de démontrer la position du mari chrétien vis-à-vis de sa femme. Le mari ne peut agir convenablement envers sa femme que quand la relation est considérée de plus haut que le niveau naturel. Il faut, pour bien agir, que dans l’exercice d’une relation selon la nature, le chrétien apporte des motifs et des principes célestes. Il n’est pas rare de trouver un mari ayant beaucoup d’attachement pour sa femme et une femme profondément attachée à son mari ; mais s’il n’existe entre eux rien de plus que ce sentiment naturel, il n’en découlera ni puissance, ni bénédiction pour eux, ni honneur pour Dieu. Quoique rien ne soit plus juste qu’un tel sentiment, il faut cependant quelque chose de plus, et ce quelque chose qu’il faut de plus, c’est de garder constamment devant nous le souvenir de la manière dont Christ agit envers l’Église. Il y a toujours bénédiction et puissance à croire la Parole de Dieu. Si nous ne nous dirigeons pas d’après la Parole, nous ne réaliserons pas la puissance de Christ dans la relation naturelle de cette vie, et cependant nous devrions la réaliser, et si cette puissance manque à notre relation, est-ce que, en cela, nous ne nous privons pas dans une grande mesure de ce qui ferait notre force et de ce en quoi Dieu nous approuverait et nous honorerait ?

L’Esprit applique ainsi la vérité : « Les maris doivent aimer leurs propres femmes comme leurs propres corps ; celui qui aime sa propre femme s’aime soi-même ». Ces dernières paroles sont fondées sur l’instinct commun d’après lequel il est dans la nature de l’homme d’éviter la peine et de prendre soin de soi-même. L’apôtre constate simplement le fait et raisonne ainsi : Considérez votre femme comme étant une partie de vous-même, et comprenez tout préjudice à elle causé comme étant causé à votre propre corps ; ainsi vous apprendrez à user d’affectueux égards, « car personne n’a jamais haï sa propre chair, mais il la nourrit et la chérit, comme aussi le Christ l’assemblée » : — belle et douce vérité ajoutée à celle qui a déjà été exposée. Dans tout ce qui a précédé nous avons vu la rédemption, la purification pratique actuelle, la future glorification de l’Église ; mais maintenant l’apôtre ajoute : « il la nourrit et la chérit ». Il y a l’introduction spéciale de la pensée de Christ, Son tendre intérêt pour ceux qui Lui appartiennent. Quand nous pensons à toute la ruine qui nous entoure, c’est une grande consolation de savoir que la chose demeure encore vraie dans l’état actuel de l’Église. Est-ce que Christ pourrait cesser jamais de nourrir ce qui Lui appartient ? Ce n’est pas admissible. Malgré toute la ruine, Il a la même sollicitude pour les siens. Nous ne pouvons jamais trop prier pour l’Église ; mais nous ne devons pas, d’un autre côté, nous tourmenter comme si le Seigneur l’oubliait et ne proportionnait pas Ses soins aux besoins et à l’épreuve de Ses saints. Le Seigneur n’a jamais failli ; et ce qu’Il nous dit ici de pratiquer dans notre relation terrestre n’est pas autre chose que ce que Lui-même pratique d’une manière parfaite vis-à-vis de Son Église. Il aime l’Église ; Il la nourrit et la chérit, et cela, parce que « nous sommes membres de son corps, de sa chair et de ses os ». Tout comme Ève était partie d’Adam, ainsi l’Église est partie de Christ. Le Seigneur tira du côté d’Adam ce qui Lui servit à former sa femme, et c’est dans une relation aussi intime que nous sommes vis-à-vis de Christ.

On applique quelquefois le verset à Christ se faisant homme ; mais c’est en sens inverse qu’il faut le prendre. Il ne signifie pas que Christ a pris notre chair et nos os, mais que nous sommes faits membres de Son corps, de Sa chair et de Ses os. Il expose notre relation avec Christ ressuscité d’entre les morts et non la relation de Christ avec nous comme hommes sur la terre. Je ne dis ceci que pour prévenir les âmes contre une fausse interprétation. Il ne s’agit pas ici du Seigneur prenant la chair et le sang, ce que nous savons bien qu’Il a fait et ce dont aussi nous parle l’épître aux Hébreux. Nous sommes membres de Son corps, de Sa chair et de Ses os. Nous faisons réellement partie de Lui-même, étant unis à Lui dans la place qu’Il occupe maintenant en la présence de Dieu. Dans notre passage, il est question de notre union avec Lui et non pas de Son incarnation.

Ensuite, nous avons une allusion à Genèse 2 : « C’est pourquoi l’homme laissera son père et sa mère, et il sera joint à sa femme ; et les deux seront une seule chair. Ce mystère est grand ; mais moi je le dis par rapport à Christ et à l’assemblée. Toutefois que chacun de vous aussi en particulier aime sa propre femme comme soi-même, que la femme aussi craigne son mari ». Ainsi, le sujet se trouve résumé dans cette parole toute pratique. Je n’ai pas besoin de dire que tout ce qui, dans cette relation, serait contraire à la confiance la plus absolue, est exclu par ce verset. Le mari, s’il agit dans l’esprit d’une telle parole, n’a pas de secret pour celle qui est une partie de lui-même ; mais quant à la femme, qu’elle n’oublie pas de craindre son mari. S’il n’y avait que la simple familiarité qui découle de l’amour mutuel, ce serait une faute au point de vue céleste. Quelle que soit la confiance d’une femme en son mari, c’est assurément une chose convenable qu’elle le craigne. Et qu’on ne pense pas que la crainte soit incompatible avec l’amour. Nous sommes exhortés à retenir la grâce ; et cela dans quel but ? Afin que nous servions Dieu, d’une manière qui Lui soit agréable, avec révérence et avec crainte. Sans doute, il y a une immense différence entre Dieu et l’homme ; mais toutefois cette parole de Hébreux 12, fait ressortir la compatibilité de la crainte avec l’amour. Dans notre passage, il s’agit de cette crainte qui redoute d’offenser et qui, au contraire, recherche activement tout ce qui est propre à reverser de l’honneur sur le mari. Et cet esprit de crainte convient à tous les cas. Supposez, par exemple, le cas d’un sot mari avec une femme intelligente ; s’il montre jour par jour ce qu’il est, c’est une raison de plus pour sa femme de se garder de sa propre capacité afin de la mettre au service du mari sans que cela apparaisse. Ensuite elle doit se rappeler sérieusement, dans ces circonstances, qu’elle a à honorer Dieu et son mari au lieu de jeter à l’adresse de son mari des paroles blessantes et inconsidérées. C’est dans de semblables circonstances que la sagesse et la spiritualité d’une femme pieuse devraient briller, et briller en voilant leur éclat : car pour qu’il y ait bénédiction dans l’union, il faut que la prééminence soit laissée toute entière au mari et non pas à la femme. Ce résultat sera toujours atteint lorsque le cœur regardera au Seigneur en simplicité ; et bien qu’une union dans laquelle la femme sera moralement supérieure au mari puisse paraître disparate et propre à rendre l’existence pénible, cependant rien n’est impossible à Dieu. Et si la femme chrétienne recherche la pensée de Dieu et désire honorer Dieu Lui-même dans la circonstance, Dieu certainement se servira d’elle de la manière la plus heureuse et la plus bénie pour aider au mari et couvrir ce qui pourrait être mortifiant pour lui. Mais le principe demeure toujours. De même que rien ne justifie le manque d’amour d’un mari pour sa femme, ainsi rien non plus ne justifie, du côté de la femme, l’absence de crainte envers son mari. Le Seigneur veuille que nous ne perdions pas de vue Sa sainte et gracieuse exhortation !

Chapitre 6

Considérons brièvement les relations d’enfants à parents et de serviteurs à maîtres. Ici, l’obéissance est le grand point sur lequel la Parole insiste auprès de ceux qui occupent la position inférieure. Comme tous les saints sont appelés à se soumettre les uns aux autres dans la crainte de Christ, et particulièrement les femmes à leurs maris en toutes choses, ainsi les enfants doivent obéir à leurs parents dans le Seigneur (v. 1). Le Saint Esprit a bien aussi pour les pères une parole appropriée et sérieuse ; mais en général combien la marche est aisée dans une maison chrétienne où les jeunes obéissent — surtout quand ils obéissent « dans le Seigneur » ! Il y a de la douceur dans l’affection naturelle, et l’absence de ce sentiment est un signe des temps fâcheux ; mais le sentiment seul ne suffit pas. La conscience elle-même, si importante qu’elle soit à sa place, est une sauvegarde insuffisante et ne saurait devenir une source de puissance ; mais le Seigneur est cette source. Combien c’est chose heureuse quand on sait revêtir et absorber son devoir en Lui ! Et c’est là-dessus que le Saint Esprit insiste d’une manière pressante.

Le Seigneur Lui-même l’a réalisé lorsque, ici-bas, Il prit la place d’enfant. « Et le petit enfant croissait et se fortifiait en esprit, étant rempli de sagesse ; et la faveur de Dieu était sur lui ». Et nous ne sommes pas limités à une déclaration vague et générale, mais nous avons le tableau suivant de Ses voies : « Et quand il eut douze ans, étant montés à Jérusalem, selon la coutume de la fête, et ayant accompli les jours de la fête, comme ils s’en retournaient, l’enfant Jésus demeura dans Jérusalem ; et Joseph et sa mère ne le savaient pas. Mais croyant qu’il était dans la troupe des voyageurs, ils marchèrent le chemin d’un jour et le cherchèrent parmi leurs parents et leurs connaissances. Et ne le trouvant pas, ils s’en retournèrent à Jérusalem pour le chercher. Et il arriva que trois jours après ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant. Et tous ceux qui l’entendaient s’étonnaient de son intelligence et de ses réponses. Et quand ils le virent, ils en furent tout étonnés, et sa mère lui dit : Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait ainsi ? Voici, ton père et moi te cherchions, étant en grande peine. Et il leur dit : Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il me faut être aux affaires de mon père ? ». Ainsi, n’ayant encore que douze ans, il avait conscience de Sa propre relation. L’humanité qu’Il avait prise comme né de femme, loin d’affaiblir le sentiment qu’Il avait de l’amour et des affaires de Son Père, ne servait plutôt qu’à en manifester la réalité. En même temps nous voyons (et que de beauté il y a en cela !) combien Son œil — absolument simple — percevait ce qui Lui seyait du côté terrestre, par contraste frappant avec Joseph et Sa mère, qui « ne comprirent pas la parole qu’il leur disait ». Aussi lisons-nous immédiatement après : « Et il descendit avec eux et vint à Nazareth, et leur était soumis ». Tel fut Jésus, le Seigneur de tout, pendant la partie de beaucoup la plus considérable de Sa carrière terrestre.

Le même principe est vrai de l’enfant chrétien, à cette différence près que la relation de Christ avec le Père tenait à l’essence même de Sa personne, tandis que notre relation avec Christ et avec Son Père est tout simplement le pur don de la grâce. Mais néanmoins nous sommes pourtant enfants aussi ; le titre nous en est bien sûrement conféré en et par notre Seigneur Jésus Christ. « Voyez quel amour le Père nous a accordé, que nous soyons appelés enfants de Dieu… Bien-aimés, nous sommes maintenant enfants de Dieu ». Et ceci, par l’opération du Saint Esprit, est le secret d’une heureuse obéissance dans la relation terrestre. Conscients de ce que nous sommes pour le Seigneur, nous pouvons obéir en Lui. « Dans le Seigneur » est tout à la fois le motif d’encouragement, la sauvegarde et la limite. Que les parents soient Juifs ou païens, ou bien qu’ils portent indignement le nom de Christ, les enfants chrétiens (tout en reconnaissant pleinement leur relation avec leurs parents, quels que soient ceux-ci) auront néanmoins le doux privilège d’obéir « dans le Seigneur ». Combien cela simplifie des questions autrement si embarrassantes. Et combien aussi cela détermine le chemin que nous devons suivre et le point où nous devons nous arrêter ! Car puisque c’est « dans le Seigneur » qu’on est appelé à obéir, on ne saurait trouver là de raison ou d’excuse pour pécher.

Dans l’épître aux Colossiens, où les saints étaient en danger de mésuser des ordonnances légales, le motif proposé aux enfants pour obéir à leurs parents en toutes choses est que « cela est agréable au Seigneur ». À Éphèse, les fidèles étaient dégagés d’un tel piège, et le Saint Esprit peut librement se servir d’un principe incorporé dans la loi ; il ajoute donc : « car cela est juste ». Bien plus, Il peut poursuivre par une citation, légèrement retouchée, du décalogue et ainsi attirer par parenthèse l’attention à la place spéciale qu’elle y occupe. « Honore ton père et ta mère (c’est le premier commandement avec promesse), afin que bien te soit, et que tu jouisses de longue vie sur la terre » (v. 2, 3). Si Dieu appréciait ainsi la piété filiale sous la loi, l’apprécierait-Il moins maintenant qu’Il déploie Sa nature comme le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ et nous appelle à la relation d’enfants vis-à-vis de Lui ? Si le respect porté à cette parole d’autrefois était approuvé et récompensé dans le juste gouvernement de Dieu, si alors Dieu accordait des soins et de la prospérité à ceux qui honoraient leurs parents, est-ce que la révélation qu’Il donne de Lui-même en grâce peut affaiblir l’obligation sous laquelle sont Ses enfants, ou rendre moins précieux à Ses yeux maintenant l’amour qui inspirait et soutenait l’honneur ainsi rendu ? Il n’est pas de chrétien intelligent qui voulût contester qu’il s’agit ici d’un précepte de la loi, mais appliqué, si je ne me trompe, de façon à insinuer au croyant du Nouveau Testament une sorte de conclusion a fortiori. Il est certain que depuis la croix de Christ, la portion particulière des saints ne leur est pas présentée sous la forme d’une prolongation de jours et de biens sur la terre.

Aux pères est adressée l’exhortation (peut-être plus nécessaire pour eux que pour les mères, bien qu’en principe elle s’applique évidemment aux uns et aux autres) : « N’irritez pas vos enfants, mais élevez-les dans la discipline et sous les avertissements du Seigneur » (v. 4). Quelle connaissance du cœur et des vieux et des jeunes ! Combien la Parole, après avoir si fortement recommandé l’obéissance, l’entoure de tendre considération, de peur que les enfants ne soient exaspérés par un usage capricieux et trop rigoureux de l’autorité paternelle ! Mais il faut, d’un autre côté, élever les enfants sous la discipline et les avertissements du Seigneur. De même que le chrétien connaît les voies du Seigneur selon qu’Il les exerce envers lui et envers d’autres, ainsi doit-il former ses enfants pour le Seigneur : — principe de la dernière importance pour le cœur et la conscience des parents. Désirons-nous pour nos enfants le Seigneur seulement, ou bien le monde aussi ?

Ensuite (v. 5-8) les esclaves chrétiens sont exhortés à obéir à leurs maîtres selon la chair (lesquels demeuraient toujours tels, convertis ou non), « à leur obéir avec crainte et tremblement, en simplicité de cœur comme à Christ ; ne servant pas seulement sous leurs yeux comme cherchant à plaire aux hommes, mais comme esclaves de Christ, faisant de cœur la volonté de Dieu, servant joyeusement le Seigneur et non pas les hommes, sachant que chacun, soit esclave, soit libre, quelque bien qu’il fasse, le recevra du Seigneur ». N’est-elle pas bien digne de remarque par son étendue et sa profondeur, cette liberté qui est en Christ ? Il n’y a rien de violent, ni de révolutionnaire, et pourtant le changement est complet, absolu, final dans son principe et dans son caractère, bien qu’il nous reste à croître dans l’appréciation et la manifestation de ce changement. Et une telle croissance est importante moralement, parce qu’elle constitue une partie essentielle du christianisme considéré au point de vue pratique, de ce christianisme où la toute première bénédiction que la grâce de Dieu nous accorde en Christ n’est saisissable que pour la foi, où cette bénédiction ne peut être réalisée du commencement à la fin que dans la puissance de l’Esprit par le jugement de soi-même, et où elle ne deviendra nôtre — comme affaire de possession effective et de manifestation — que quand l’état de perfection sera atteint dans la gloire de la résurrection. Néanmoins, il est doux de savoir que si, dans un certain sens, nous n’avons rien encore, dans un autre sens non moins juste et non moins réel, nous possédons toutes choses. C’est à cette vérité que la foi doit s’attacher et d’après elle qu’elle doit agir ; et pour l’esclave chrétien, quel privilège entre beaucoup d’autres ! Quel puissant motif pour lui, qui, déjà sciemment affranchi en Christ et dans une liberté absolument supérieure aux circonstances, a par cela même une si grande force pour triompher de ses chaînes et servir Christ en obéissant au pire des maîtres, si c’est la volonté du Seigneur qu’il soit placé sous un tel joug. Sans doute, le maître a, lui aussi, ses devoirs ; mais s’il y manque, que s’en suivra-t-il ? Que l’esclave sera déchargé de sa responsabilité ? Celui-ci ne se fera pas même une telle question, s’il obéit en simplicité, comme à Christ. Est-ce que Christ manque jamais ? Comme l’on est, par là, délivré de toute tendance à la déloyauté ! — « ne servant pas seulement sous leurs yeux comme cherchant à plaire aux hommes, mais comme esclaves de Christ (quel honneur à partager avec un apôtre !), faisant de cœur la volonté de Dieu ». Mais il y a plus : ils ne sont pas seulement exhortés à s’acquitter de leur service de franche volonté, comme pour le Seigneur et non pour les hommes, mais à se souvenir que le jour approchait où chacun, soit esclave, soit libre, recevrait du Seigneur quelque bien qu’il eût fait. Un ample salaire leur est donc assuré ; car Lui, au moins, n’est pas injuste.

Ensuite, les maîtres (v. 9) sont à leur tour exhortés à une impartiale équité, à faire ce qu’ils aimeraient qu’on leur fît et à s’abstenir des menaces que l’on adresse si facilement à un pauvre esclave. Ils ont à apprendre que le Seigneur et des maîtres et des esclaves, est dans les cieux, et qu’il n’y a point par-devers Lui acception de personnes : — deux considérations qui ne manquent pas de poids et qui, avec un à-propos plein de délicatesse, sont placées devant les maîtres plutôt que devant les esclaves.

Ici prend fin le sujet des relations diverses des saints dans leurs circonstances terrestres ; et, par conséquent, les exhortations qui terminent l’épître, au lieu d’être adressées à des classes distinctes, deviennent générales. « Au reste, mes frères, fortifiez-vous dans le Seigneur et dans la puissance de sa force ». Ainsi s’ouvre le sujet solennel du combat proprement chrétien, naturellement envisagé, dans les Éphésiens, comme porté au sommet de nos privilèges en Christ. En 1 Pierre, le désert est, pour ainsi dire, la scène du combat, et c’est pour cela que la sobriété et la vigilance sont avec tant d’à-propos enjointes aux pèlerins et étrangers qui cheminent vers l’héritage incorruptible — parce que le diable, leur adversaire, comme un lion rugissant, rôde autour d’eux cherchant qui il pourra dévorer. En Éphésiens, l’ennemi est envisagé comme dans les lieux célestes, où les saints sont bénis de toutes bénédictions spirituelles, où leur Chef est exalté, où ils sont assis en Lui, où les principautés et les puissances apprennent par eux la sagesse diversifiée de Dieu ; c’est donc là aussi qu’a réellement lieu la lutte contre le prince de la puissance de l’air et ses armées.

Mais si, d’une part, ce formidable combat auquel les croyants sont destinés ne leur est pas épargné, d’autre part aussi leurs mains sont soutenues. La trompette qui appelle ici à la bataille, rend des sons bien propres à donner aux saints un courage exempt de présomption, et il y a pour eux d’amples provisions pour vaincre dans le Seigneur, qui les a appelés à faire la guerre à Ses dépens. Quelle fut, par la foi en Son nom, la valeur de Son nom pour celui qui était boiteux dès le sein de sa mère et qu’on portait chaque jour à la porte du temple pour demander l’aumône ? Ce nom est-il moins efficace pour répondre à notre besoin ? Loin de nous une telle pensée ! Tout ce qu’il nous faut, c’est la foi en Lui ; et la foi vient de ce qu’on entend, et ce qu’on entend par la Parole de Dieu. Or, qu’y a-t-il de plus propre à nous ranimer que ces mots : « Fortifiez-vous dans le Seigneur et dans la puissance de sa force » ?

Néanmoins, cette lutte gigantesque avec les puissances des ténèbres ne nous permet pas de rien négliger ou de laisser des points non gardés. Nous avons à tenir ferme moins contre la puissance du diable (cela, Christ l’a fait) que contre ses artifices. Par le fait, pour nous c’est un ennemi vaincu dans la croix, et nous avons toujours le droit de le traiter comme tel. C’est pourquoi Jacques dit : « Résistez au diable et il s’enfuira de vous » (chap. 4, 7). Ce sont ses artifices qui surtout et toujours sont le plus à redouter, et pour y résister il nous est nécessaire de revêtir l’armure de Dieu, ainsi qu’il est ajouté : « Revêtez-vous de l’armure complète de Dieu, afin que vous puissiez tenir ferme devant les artifices du diable. Car notre lutte n’est pas contre le sang et la chair, mais contre les principautés, contre les autorités, contre les dominateurs de ces ténèbres, contre les puissances spirituelles de méchanceté qui sont dans les lieux célestes ».

Nous pourrions à juste titre trembler si nous étions livrés à nos propres ressources en présence d’une pareille armée. Mais il n’en est pas ainsi. La bataille est celle du Seigneur et le danger que nous courons ne fait que Lui servir d’occasion pour déployer Sa puissante main et Sa fidèle sagesse. Néanmoins, nous avons à combattre. C’est en vain que nous voudrions nous prévaloir ou de notre faiblesse ou de Sa force pour nous soustraire à notre responsabilité. Il ne suffit pas de regarder ni de montrer, pour ainsi dire, l’armure de Dieu comme nous appartenant ; il faut encore s’en revêtir à Son commandement.

Une autre chose dont il est nécessaire de se souvenir, c’est qu’ici il ne s’agit pas de nos besoins devant Dieu. Il n’est pas, Lui, en lutte contre nous ; mais après avoir délivré nos âmes, Il nous appelle à combattre dans la lice contre les armées invisibles de Son ennemi. Autrefois nus dans notre état de perdition, il nous a fallu être revêtus ; et Sa grâce nous a revêtus de la plus belle robe, revêtus de Christ. Christ est notre robe devant Dieu. Rien moins et rien autre, du côté de Ses conviés, n’aurait convenu à Sa présence. Mais ici il est question de combattre l’ennemi après que nous avons été revêtus de Christ ; et par conséquent nous avons besoin d’une armure de trempe divine pour rester debout d’une manière sûre et ferme. Nous entrerons bientôt dans les détails de cette armure ; pour le moment, je ne fais qu’insister sur la vérité générale.

Qu’elle est remarquable la façon dont nous sont rappelés Josué au verset 10 et les ennemis d’Israël au verset 12 ! La parole fut adressée à Josué en ces termes : « Maintenant donc, lève-toi, passe ce Jourdain, toi et tout ce peuple, pour entrer au pays que je donne aux enfants d’Israël. Je vous ai donné tout lieu où vous aurez mis la plante de vos pieds, selon que je l’ai dit à Moïse… Nul ne pourra subsister devant toi tous les jours de ta vie ; je serai avec toi comme j’ai été avec Moïse ; je ne te délaisserai point et je ne t’abandonnerai point. Fortifie-toi et te renforce : car c’est toi qui mettras ce peuple en possession du pays dont j’ai juré à leurs pères que je le leur donnerais. Seulement, fortifie-toi et te renforce de plus en plus » (Jos. 1. Comp. aussi v. 9, 18). De plus, il est clair que si les Cananéens n’étaient que des ennemis de chair et de sang, ce sont néanmoins des types de ces ennemis plus mortels encore que nous avons à combattre — ces ennemis dont les efforts tendent à empêcher le chrétien de prendre possession, comme affaire de jouissance actuelle, de son héritage céleste.

Il ne s’agit pas ici, remarquez-le bien, de traverser la mer Rouge et puis le désert, où nous avons à apprendre ce qu’est Dieu et à être en même temps mis à l’épreuve. Le désert est la grande scène de la tentation ; sans doute, le combat peut s’y présenter occasionnellement, comme avec Amalek et Madian ; mais toutefois c’est le lieu où nous avons à marcher ou à nous arrêter suivant l’ordre de Dieu, avec le besoin constant de ces provisions envoyées d’en haut, là où rien d’autre ne peut soutenir tandis que nous cheminons ayant la patrie céleste devant nous. Mais ici, le combat, comme dans le livre de Josué, implique le passage du Jourdain et l’entrée en Canaan, où maintenant nous avons la lutte comme nous avons eu la tentation au désert.

L’école évangélique est-elle dans le vrai en appliquant le type du Jourdain à la mort du chrétien, quand, à la fin de sa carrière, il déloge pour être avec le Christ ? Assurément non ; car, en ce cas, qu’est-ce qui correspondrait aux guerres de Canaan ? Non ! si excellent que fut Bunyan, il s’est trompé sur ce point, suivant en cela les erreurs de ses devanciers et les perpétuant largement jusqu’à ce jour. Et en vérité, c’est ici une des choses qui montrent où en est l’âme et jusqu’à quel point elle s’est émancipée de la théologie traditionnelle, dont les disciples sont retenus dans le minimum de la vérité. Ailleurs, comme, par exemple, dans l’application qu’ils font de la Pâque ou de la mer Rouge, il y a de la défectuosité ; ici, il n’y a absolument que du vide ou bien de l’erreur. Et je dis cela en proclamant l’auteur du « Voyage du chrétien vers l’éternité » comme un noble spécimen des vues populaires et aussi l’un des plus avancés. Depuis son jour, les meilleurs écrivains du monde religieux n’ont fait que reproduire ses idées, quelques-uns même ont été jusqu’à commenter son livre. Peut-il y avoir une preuve plus patente de l’ignorance du grand nombre concernant la véritable portée de cette épître ? Le fait est que dans la mer Rouge nous avons Christ mort et ressuscité pour nous, et dans le Jourdain nous avons notre mort et notre résurrection avec Lui ; — la première nous introduisant dans le monde comme devenu le lieu aride de notre pèlerinage, le dernier nous plaçant en vue de notre bénédiction céleste, que nous avons dès lors à nous approprier en remportant la victoire sur Satan. La distinction entre les deux vérités est aussi claire qu’importante, quoique l’une et l’autre soient actuellement la part du chrétien. Quand le glorieux jour viendra où nous serons mis en possession de notre héritage, de fait et non par la puissance de la foi qui, ainsi mise en pratique, défait l’ennemi et nous fait réaliser en esprit le pays que Dieu nous a donné, alors nous n’aurons plus à lutter contre ces principautés et ces puissances dans les lieux célestes : le combat aura pour jamais pris fin pour nous. L’expulsion du dragon, « ce serpent ancien », n’est pas notre tâche, c’est celle de Michel et de ses anges. Il nous appartient, à nous, de le vaincre, mais non pas de le chasser du ciel par la force. Tout le temps que l’Église est ici-bas, notre lutte se soutient contre ces puissances spirituelles de méchanceté dans les lieux célestes ; lorsque l’expulsion aura lieu de fait par la puissance providentielle de Dieu, nous ne serons pas ici, mais en haut.

Après la Pâque et la mer Rouge, Israël ne retourna pas à l’esclavage de Pharaon ; leurs oppresseurs étaient vaincus et anéantis, il n’en restait pas un seul. « Ainsi l’Éternel délivra en ce jour-là Israël de la main des Égyptiens ; et Israël vit sur le bord de la mer les Égyptiens morts ». Mais ce n’était pas la circoncision qui caractérisait les rachetés dans le désert. Dès que leurs enfants eurent mis le pied sur le bord cananéen du Jourdain, ils secouèrent à Guilgal l’opprobre de l’Égypte, et alors le couteau de la circoncision leur fut appliqué avant qu’ils tirassent l’épée contre ces habitants de Canaan sur lesquels la sentence était prononcée. Israël était maintenant en Canaan et n’avait plus rien à faire pour y parvenir : il ne lui restait qu’à s’approprier le pays.

Est-ce que cela ne renferme pas d’instruction pour nous ? Nous sommes-nous sciemment saisis de notre union avec Christ en haut ? Savons-nous que notre place est là, en Lui, et que c’est dans cette place que nous avons à nous maintenir ? La nature — racines et branches — est-elle chose jugée en nous ? Le témoignage que nous rendons est-il céleste, pas seulement juste et saint, mais céleste ? Est-ce dans ces conditions que nous avançons contre l’ennemi, en réalisant, par une victoire actuelle, notre titre à jouir des bénédictions infinies qu’en Christ nous avons en haut ? Ou bien sommes-nous, quant à la réalisation, des rachetés encore dans le désert, ayant devant nous le Jourdain à traverser et le vieux blé du pays comme un aliment non encore goûté ? Veillons-nous simplement pour empêcher la chair de se montrer ici et là, et les tentations mondaines de nous renverser en ceci ou en cela ? S’il en est ainsi, nous ne devons pas nous étonner que le verset 12 rende des sons si mystérieux et que nous nous demandions ce que c’est que de combattre contre les ennemis dans les lieux célestes[3]. Il nous importe donc de considérer jusqu’à quel point nos âmes ont fait et font l’épreuve de l’armure de Dieu dans ce combat, où plus que partout ailleurs il est clair que « la chair ne profite de rien ».

Dans ces versets, après un résumé préliminaire, nous venons aux détails de l’armure du chrétien. « C’est pourquoi prenez l’armure complète de Dieu, afin que, au mauvais jour, vous puissiez résister, et après avoir tout surmonté, tenir ferme. Tenez donc ferme, ayant vos reins ceints de la vérité, » etc. (v. 13-17).

La première chose à remarquer, c’est que l’Esprit de Dieu nous appelle à prendre l’armure de Dieu. Ni la force, ni la sagesse de l’homme n’ont d’efficace dans cette bataille. De même que, d’une part, nous avons affaire avec les armées de Satan, ainsi, d’autre part, c’est de « l’armure complète de Dieu » que nous avons besoin. Nos habitudes et notre caractère naturel peuvent être insignifiants lorsque l’Esprit de Dieu travaille à sauver nos âmes par Sa grâce ; mais ils ont une grande importance en présence d’un ennemi qui sait comment prendre avantage de la moindre voie négligée. Même à ceux de Corinthe, charnels comme ils étaient et seulement en état de supporter la nourriture des enfants (non la viande solide qui est placée devant les saints d’Éphèse), l’apôtre avait déclaré que, quoique marchant dans la chair, nous ne combattons pas selon la chair. « Car les armes de notre guerre ne sont pas charnelles, mais puissantes par Dieu pour la destruction des forteresses, détruisant les raisonnements et toute hauteur qui s’élève contre la connaissance de Dieu, et amenant toute pensée captive à l’obéissance de Christ ». Ce n’est pas la chair, mais l’Esprit qui a de la puissance contre Satan.

Ici aussi, le caractère du temps pendant lequel le combat se continue, est désigné sous le nom de « mauvais jour ». Elle est fâcheuse, en effet, la période qui date de la crucifixion de Christ, à partir de laquelle l’ennemi a acquis le titre de « prince de ce monde ». C’est pourquoi, au chapitre 5, nous sommes exhortés à marcher soigneusement, non point comme étant dépourvus de sagesse, mais comme étant sages, rachetant l’occasion « parce que les jours sont mauvais ». Mais ici nous avons quelque chose de plus précis : « afin que, au mauvais jour, vous puissiez résister ». Car il est des occasions où Satan est autorisé à nous serrer de plus près, et alors grand est le danger pour une âme insouciante. Ce moment est, emphatiquement, « le mauvais jour », et il est bon que le chrétien le considère par anticipation ; car ce n’est pas à ce moment-là qu’il s’agit de saisir l’armure, mais bien, après l’avoir saisie, de « résister ». Il faut que « le mauvais jour » nous trouve déjà et complètement armés pour que nous puissions opposer une résistance efficace. Et ce n’est pas tout. Car bien souvent la victoire de la foi est trop grande pour la foi qui l’a remportée, et un saint qui, pendant longtemps et à réitérées fois, a vaincu l’ennemi, peut se lasser du combat et se tourner vers un sentier plus aisé en apparence pour prouver par là sa folie et le danger excessif qu’il court, quand même il serait finalement délivré par la pure miséricorde de Dieu. Il ne suffit donc pas de « résister » ; il faut encore, « après avoir tout surmonté », après s’être entièrement acquitté de tout ce qui est requis, « tenir ferme ». Là où les combats peuvent avoir été ardents, la victoire est complète, par la bonté et la puissance du Seigneur ; mais toutefois la guerre n’est pas terminée : nous avons encore à maintenir notre terrain.

« Tenez donc ferme, ayant vos reins ceints de la vérité et ayant revêtu la cuirasse de la justice ; et ayant les pieds chaussés de la préparation de l’évangile de paix ». Ces paroles ne décrivent pas seulement une position déterminée, mais elles font voir l’âme en activité, conformément au commandement de l’Esprit. On a souvent considéré ce passage (et que de méprises en ont résulté !) comme traitant de la position chrétienne, au lieu qu’en réalité il traite d’une chose essentiellement différente. Il s’agit de l’armure et du combat dans le sens pratique, basés sur le fondement le plus béni qui soit révélé dans le Nouveau Testament, et terminant avec beaucoup d’à propos l’épître qui révèle le dit fondement.

Autre chose est connaître la vérité et être affranchi par elle, autre chose avoir les reins ceints de la vérité. Dans ce dernier cas, c’est la vérité agissant d’une manière intime dans l’âme, de sorte qu’il n’y ait pas de relâchement de cœur ou tolérance de la volonté propre, mais au contraire les affections et les pensées attachées à Christ et aux choses de Christ. Dans ces conditions, le croyant s’attache au Seigneur de propos bien délibéré, et, le moi étant sondé et jugé par la vérité, il y a de la vigueur communiquée par la révélation de Sa pensée et de Sa grâce, qui sont maintenant mieux goûtées que jamais. C’est cette puissance de la vérité qui garde l’âme délivrée par la riche miséricorde de Dieu et profondément reconnaissante de se trouver placée sous une autorité si incommensurable, si pénétrante, si absolue qu’elle fait entrer toutes choses, même les plus intimes, dans le cadre de la volonté de Dieu et de l’obéissance des saints. Toutefois, pour supporter cela et en jouir, il faut que le cœur soit établi dans la grâce : c’est alors qu’il peut accueillir la vérité avec tous ses droits et son puissant contrôle.

Ensuite vient « la cuirasse de la justice » — vérité tout à fait distincte de la justice de Dieu, ou ce que nous sommes faits en Christ. C’est de la dernière que nous avons besoin pour nous tenir devant Dieu, et de la première pour combattre avec succès contre notre adversaire, le diable. L’Esprit nous enseigne que, tandis que la première pièce de l’armure se compose de cette ceinture de vérité portée autour des reins — type de la Parole produisant par son application à la conscience le jugement de soi-même et surtout de l’énergie morale — la chose requise ensuite est que nous nous revêtions de la justice pratique comme d’une cuirasse. Rien n’expose plus facilement les saints, durant le combat, qu’une mauvaise conscience dans leurs voies : — je ne veux pas dire une conscience non purifiée, mais celle dans laquelle, lorsqu’il y a connaissance de la rédemption, le mal est toléré et la communion interrompue.

En rapport avec ce qui précède nous avons : « les pieds chaussés de la préparation de l’évangile de paix ». Évidemment il s’agit encore ici d’une affaire de puissance et de jouissance pratiques découlant du maintien d’une bonne conscience, et cette dernière n’existe que là où tout est soutenu et gardé par la vérité. Alors, l’âme chemine en paix. « Le fruit de la justice, comme dit un autre apôtre, se sème dans la paix pour ceux qui procurent la paix ». S’il y a du relâchement, la conscience devient mauvaise, et voilà ce qui sème et procure du trouble ; si la vérité gouverne, la conscience se maintient pure, et alors, heureux nous-mêmes, nous répandons le bonheur autour de nous.

Le verset 16 apporte une autre et non moins nécessaire partie de l’armure divine ; mais c’est à juste titre qu’elle suit ce que nous venons de voir. « Par-dessus tout, prenant le bouclier de la foi, par lequel vous pourrez éteindre tous les dards enflammés du méchant ». Le bouclier de la foi signifie cette confiance en Dieu à laquelle nos âmes sont encouragées et qu’elles sont en droit de cultiver. Je dis : confiance en Dieu, parce que, bien qu’elle soit inséparable de l’état de justice et de piété qu’impliquent les premières parties de l’armure, cependant c’est une confiance qui naît seulement de la connaissance que l’on a de ce que Dieu est dans Sa propre nature et dans Son propre caractère. Tous les efforts envenimés du méchant sont vains là où Dieu est ainsi connu dans la puissance d’un Esprit non contristé au-dedans de nous. Ce n’est pas seulement que ces dards ne réussissent pas à produire le désespoir et la méfiance, mais ils sont éteints par le bouclier de la foi.

Mais il y a plus : « Prenez aussi le casque du salut et l’épée de l’Esprit, qui est la parole de Dieu » (v. 17). Le bouclier de la foi représente une confiance générale ; le casque du salut est plutôt ce sentiment de liberté et de joie qui découle de la connaissance de la délivrance que Dieu a opérée pour nous en Christ. Ce casque est le couronnement des différentes parties que nous avons examinées ; ce qui suit, par conséquent, n’est plus un instrument ajouté aux moyens de défense (d’ailleurs complets), mais bien l’instrument d’une énergie offensive contre l’adversaire : « l’épée de l’Esprit, qui est la parole de Dieu ». L’âme intelligente discernera la sagesse par laquelle cette arme vient la dernière. En effet, si l’on n’a pas expérimenté la justesse de cet ordre selon Dieu, la Parole, au lieu d’avoir ce caractère d’épée de l’Esprit, sera ou un jouet ou un fouet pour nous ; elle sera sans puissance parce qu’on en mésusera. Si elle est maniée par l’Esprit, quelle délivrance elle opère ! Comme elle renverse les adversaires et dénonce Satan ! C’est pour combattre qu’elle est donnée.

Nous avons eu en détail devant nous l’armure de Dieu, dans laquelle l’énergie active suit ce qui constitue l’état proprement dit, la sécurité pratique et la confiance de l’âme. Mais il y a, en outre, une source cachée de puissance à défaut de laquelle rien n’a d’efficace — une chose qui, si singulier que cela paraisse, est l’expression de la faiblesse, mais de la faiblesse qui compte sur Dieu. Aussi lisons-nous : « Priant par toutes sortes de prières » — priant en tout temps. Il n’est rien que l’Ennemi redoute davantage, rien que la chair cherche plus à empêcher, ou au moins à dénaturer lorsqu’il y en a la forme. Mais cela ne rend que plus urgente pour nous la nécessité de nous souvenir que nous sommes appelés à une dépendance complète et habituelle.

De plus, il y a l’exercice de désirs spirituels, et non pas la dépendance seulement — ainsi que le dit notre Seigneur dans un autre endroit : « Quoi que vous demandiez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils. Si vous demandez quelque chose en mon nom, je le ferai ». « Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez ce que vous voudrez et il vous sera fait » (Jean 14 ; 15). En un mot, il y a encouragement et exhortation à offrir des prières de toute sorte et en toute occasion, tandis qu’il y a aussi telles demandes particulières qui sont présentées dans la puissance du Saint Esprit et à la hauteur desquelles toutes les prières des saints ne sauraient s’élever : « les supplications par l’Esprit ».

Nous avons une autre parole d’un grand poids — « veillant à cela » — car elle suppose l’activité de cet amour qui est prompt à discerner, dans la crainte du Seigneur et par les entrailles de Christ, ce qui, d’une part, pourrait ternir Sa gloire et ce qui, d’autre part, pourrait contribuer à l’exaltation de Son nom dans Ses saints et dans Son témoignage. Comme tout cela délivre, non seulement de la volonté propre, mais aussi d’anxiété et de propre importance ! Et quel champ pour les affections de la grâce, lorsque nous pouvons convertir toutes choses — bonnes ou mauvaises — en autant d’occasions de nous entretenir avec le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ — convertir toutes choses autrement passagères ou sujets de causerie en canaux de bénédictions éternelles ! Combien sont sages et bonnes toutes les paroles de notre Dieu ! Puisse la chose elle-même, aussi bien que la parole touchant cette chose, être précieuse à nos yeux ! Là où il en sera ainsi, le cœur veillera dans la pratique de la prière, « avec toute persévérance et des supplications pour tous les saints ». Car si la présence de Dieu est ainsi réalisée, les affections ne sont pas à l’étroit, mais l’amour s’élève énergiquement vers Lui, dans la communion avec Lui en ce qui concerne tous les saints. C’est le service de l’amour devant Celui qui est amour. Mais si l’on a à cœur les intérêts de Christ, on se souviendra d’une manière particulière de ceux qui se rassemblent autour de Christ. C’est ainsi que l’apôtre demande ici pour lui-même leurs supplications, et les demande, paraît-il, en vertu d’un lien plus fort que celui qui produit ordinairement devant le Seigneur un épanchement général de désirs pour les saints. « Et pour moi » (pas seulement περι mais ὺπὲρ εμοῦ comme indiquant quelque chose de particulier parmi les objets généraux de l’action) — « afin qu’il me soit donné de parler à bouche ouverte pour donner à connaître avec hardiesse le mystère de l’évangile, pour lequel je suis un ambassadeur lié de chaînes, afin qu’en le faisant j’use de hardiesse en lui, ainsi qu’il faut que je parle ».

Il est précieux de rencontrer une preuve si pratique du sentiment que l’apôtre avait de la valeur de l’intercession, l’intercession des saints, relativement à son ministère. La conscience qu’il avait de la dignité de cette intercession augmentait plutôt qu’elle ne diminuait en lui le désir qu’on se souvînt ainsi de lui.

Mais, de plus, il comptait que leur amour les porterait non seulement à prier pour lui, mais à désirer de connaître ce qui le concernait, comment il se trouvait. Il leur dit donc : « Tychique, le frère bien-aimé, et fidèle serviteur dans le Seigneur, vous fera tout savoir ; aussi je l’ai envoyé tout exprès pour cela, afin que vous sachiez où nous en sommes et qu’il console vos cœurs ». Quel contraste il y a entre l’esprit des hommes et cet exercice, en puissance et en grâce, de l’amour divin dans le cœur — amour qui, en celui qui servait et aimait les saints dans le Seigneur, compte en même temps sur leur propre sollicitude ! L’homme, comme tel, serait dur et indifférent, ou bien il craindrait qu’on ne l’accusât de vanité, sous prétexte qu’il n’y a rien dans ses propres affaires qui puisse intéresser les autres ; mais Christ change tout dans les cœurs de ceux qui L’ont reçu.

Paix soit aux frères, et amour, avec la foi, de la part de Dieu, le Père, et du Seigneur Jésus Christ ! Que la grâce soit avec tous ceux qui aiment notre Seigneur Jésus Christ en pureté !



  1. Comme ce verset renferme plusieurs mots et plusieurs clauses qui ne sont pas généralement compris, nous pouvons ajouter dans cette note que le mot « dispensation » ou « économie » (οὶϰονομία) n’a aucun rapport à une époque particulière ou un âge — ou siècle — spécial (ce qui dans le Nouveau Testament est exprimé par αὶών). Mais le mot signifie « gestion d’un économe », ou plutôt « administration », la forme particulière qui est présentée ici étant la réunion — la réunion en un — de toutes choses, célestes et terrestres, sous Christ, comme Tête (ἀναϰεφαλαίωσις). Cela aura lieu dans le siècle à venir, quand Christ sera manifesté comme chef sur toutes choses, et quand les saints glorifiés régneront avec Lui. Ce n’est pas le siècle présent, pendant lequel Dieu permet encore que Satan règne comme le dieu de ce monde ou siècle, « le prince de l’autorité de l’air » ; ce n’est pas non plus l’état éternel, lorsque le temps de tout gouvernement est passé et que Christ aura remis le royaume, « afin que Dieu soit tout en tous ». C’est le millénium, l’époque qui trouve sa place entre les deux dont nous venons de parler. Ce sera « la plénitude des temps », les époques qui la précèdent ayant été comme sa préparation nécessaire pour son introduction. Dans l’intervalle, la rédemption par le sang de Christ ayant été effectuée, le Saint Esprit scelle le croyant, et devient les arrhes de l’héritage.
  2. Si on suppose que des dons à ceux qui travaillent et des secours pour les soutenir eux et leurs familles en cas des nécessités de la vie impliquent le droit d’intervenir, la source humaine et mauvaise de cette pensée apparaît aussitôt. Acquerrait-on le don de Dieu avec de l’argent, ou ferait-on d’un serviteur de Dieu le mercenaire des hommes ? De l’autre côté, prenons garde à l’esprit d’indépendance humaine, qui est simplement l’orgueil.
  3. C’est probablement pour n’avoir pas compris la vérité ici révélée que nos traducteurs, sans l’ombre de garantie et dans ce passage seulement, ont rendu l’expression « lieux célestes » par « les airs ».