Livre:Études sur la Parole — Matthieu

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destinées à aider le chrétien dans la lecture du saint LivreJ.N. Darby

Examinons maintenant l’évangile selon Matthieu. Cet évangile nous présente Christ dans le caractère de Fils de David et d’Abraham, c’est-à-dire en rapport avec les promesses faites à Israël, mais il nous Le montre en même temps comme Emmanuel, Jéhovah le Sauveur, car tel était le Christ. C’est Lui qui, étant reçu, devait accomplir les promesses (et plus tard Il le fera) en faveur de ce peuple bien-aimé. L’évangile de Matthieu est ainsi, de fait, l’histoire du rejet de Christ par le peuple ; et par conséquent l’histoire de la condamnation du peuple lui-même, autant que cela concernait sa responsabilité (car les conseils de Dieu ne peuvent manquer), et la substitution de ce que Dieu devait introduire selon Son dessein.

À mesure que le caractère du roi et du royaume se développe et réveille l’attention des principaux d’Israël, ceux-ci s’y opposent et se privent, ainsi que le peuple qui les suit, de toutes les bénédictions attachées à la présence du Messie. Le Seigneur leur annonce les conséquences de leur opposition ; Il montre à Ses disciples quel serait l’état du royaume qui devait être établi sur la terre à la suite de Son rejet, et aussi les gloires qui en résulteraient pour Lui et pour Son peuple avec Lui. Et dans Sa personne, et quant à Son œuvre, le fondement de l’Assemblée est aussi révélé, l’Église étant bâtie par Lui. En un mot, comme conséquence de Son rejet par Israël, premièrement le royaume est révélé tel qu’il existe maintenant (chap. 13), ensuite l’Église (chap. 16), et ensuite le royaume dans la gloire (chap. 17). À la fin, après Sa résurrection, une nouvelle commission, adressée à toutes les nations, est donnée aux apôtres envoyés par Jésus ressuscité[1].

Le but de l’Esprit de Dieu, dans l’évangile de Matthieu, étant de montrer Jéhovah comme accomplissant les promesses faites à Israël et les prophéties qui se rapportaient au Messie (et nul ne peut manquer d’être frappé du nombre de passages qui ont trait à leur accomplissement), notre évangile commence par la généalogie du Seigneur, en partant de David et d’Abraham, les deux souches d’où sort la généalogie messianique, et auxquelles les promesses avaient été faites. La généalogie se divise en trois périodes qui sont conformes à trois grandes divisions de l’histoire du peuple : d’Abraham à l’établissement de la royauté, dans la personne de David ; de l’établissement de la royauté jusqu’à la captivité ; et de la captivité jusqu’à Jésus.

On peut remarquer que le Saint Esprit mentionne dans cette généalogie les graves péchés commis par les personnes dont les noms sont rapportés, exaltant ainsi la grâce souveraine de Dieu, qui pouvait donner un Sauveur en rapport avec des péchés tels que ceux de Juda, avec une pauvre Moabite introduite au milieu de Son peuple, et avec des crimes tels que ceux de David.

La généalogie, dans Matthieu, est la généalogie légale, c’est-à-dire celle de Joseph ; de Joseph dont Christ homme était l’héritier légitime selon la loi des Juifs. L’évangéliste a omis trois rois de la parenté d’Achab pour avoir les quatorze générations dans chaque période ; Joakhaz et Jehoïakin aussi sont omis ; mais le but de la généalogie n’est en rien changé par cette circonstance. Le fait était de la donner comme reconnue par les Juifs, et tous les rois étaient connus de chacun.

Matthieu raconte brièvement les faits relatifs à la naissance de Jésus. Ces faits sont d’une importance infinie et éternelle, non seulement pour les Juifs qui s’y trouvaient directement intéressés, mais pour nous aussi : Dieu ayant daigné y lier Sa propre gloire à nos intérêts, c’est-à-dire à l’homme.

Marie était fiancée à Joseph. Sa postérité était par conséquent celle de Joseph légalement, quant aux droits d’héritage ; mais l’enfant qu’elle portait dans son sein était d’une origine divine, conçu par la puissance du Saint Esprit. L’ange de l’Éternel est envoyé comme instrument de la providence pour rassurer la conscience délicate et le cœur juste de Joseph, en lui communiquant que ce que Marie avait conçu était du Saint Esprit.

On peut remarquer ici que l’ange en s’adressant à cette occasion à Joseph, le nomme « fils de David ». Le Saint Esprit attire ainsi notre attention sur la relation de Joseph (qui était censé le père de Jésus) avec David, Marie étant appelée sa femme. L’ange en même temps donne à l’enfant qui devait naître, le nom de « Jésus », c’est-à-dire « Jéhovah le Sauveur ». Il applique ce nom à la délivrance d’Israël de l’état où le péché l’avait plongé[2]. Toutes ces choses ont eu lieu pour accomplir ce que l’Éternel avait dit par la bouche de Son prophète : « Voici, la vierge sera enceinte et enfantera un fils, et on appellera son nom Emmanuel, ce qui, interprété, est : Dieu avec nous » (chap. 1, 23).

Voici donc ce qui nous est présenté par l’Esprit de Dieu dans ces quelques versets : Jésus, le fils de David, conçu par la puissance du Saint Esprit ; Jéhovah, le Sauveur, qui délivre Israël de ses péchés — Dieu avec ce peuple — Celui qui accomplissait ces merveilleuses prophéties qui indiquaient plus ou moins clairement les lignes d’un cadre que le Seigneur Jésus seul pouvait remplir.

Joseph, homme juste, simple de cœur et obéissant, discerne sans difficulté la révélation du Seigneur, et y obéit.

Ces titres impriment à cet évangile son caractère, c’est-à-dire la manière dont Christ y est présenté. Mais quelle merveilleuse révélation déjà de Celui qui devait accomplir les paroles et les promesses de l’Éternel ! Quelle base de vérité pour l’intelligence de ce qu’était cette glorieuse et mystérieuse personne, dont l’Ancien Testament avait assez dit pour réveiller le désir et confondre l’intelligence du peuple auquel Il était donné !

Né d’une femme, né sous la loi, héritier de tous les droits de David selon la chair, aussi Fils de Dieu, Jéhovah le Sauveur, Dieu avec Son peuple : — qui pouvait comprendre ou sonder le mystère de la nature de Celui qui était toutes ces choses à la fois ? Sa vie, en effet, ainsi que nous le verrons, montre l’obéissance de l’homme parfait, les perfections et la puissance de Dieu.

Les titres de Jésus, ces titres d’héritier de David, de Sauveur de Son peuple, et d’Emmanuel, que nous venons de signaler et que nous lisons au chapitre 1, 20-23, se lient à Sa gloire au milieu d’Israël. Sa naissance par le Saint Esprit accomplissait à l’égard de Jésus, envisagé comme homme né sur la terre, le psaume 2, 7. Le nom de Jésus et Sa conception par la puissance du Saint Esprit s’étendent sans doute plus loin que cette relation, mais tout se lie aussi d’une manière particulière à Sa position au milieu d’Israël[3].

Chapitre 2. — Étant né ainsi, ainsi caractérisé par l’ange, et accomplissant les prophéties qui annonçaient la présence d’Emmanuel, Jésus est formellement reconnu comme roi des Juifs par les Gentils conduits par la volonté de Dieu qui gouverne le cœur de leurs sages[4]. C’est-à-dire que nous trouvons le Seigneur, Emmanuel, le fils de David, Jéhovah, le Sauveur, le Fils de Dieu, né Roi des Juifs, reconnu par les chefs des Gentils. C’est là le témoignage de Dieu dans l’évangile de Matthieu et le caractère sous lequel Jésus y est présenté. Ensuite, en présence de Jésus ainsi révélé, nous voyons les chefs des Juifs en rapport avec un roi étranger qui connaît cependant, comme système, les révélations de Dieu dans Sa Parole, tout en étant entièrement indifférent à Celui qui était l’objet de ces révélations ; nous trouvons le roi, ennemi acharné du Seigneur, vrai Roi et Messie, qu’il cherche à faire mourir.

La providence de Dieu veille sur l’enfant qui est né à Israël, en employant des moyens qui laissent toute la place à la responsabilité du peuple, et accomplissent en même temps toutes les pensées de Dieu à l’égard de ce seul vrai résidu d’Israël, seule vraie source d’espérance pour le peuple. Car hors de Lui, tout devait succomber et subir les conséquences de son association avec le peuple.

Descendu en Égypte pour éviter le cruel dessein d’Hérode qui voulait lui arracher la vie, Jésus devient le vrai sarment ; Il recommence, moralement parlant, dans Sa personne, l’histoire d’Israël, aussi bien (dans un sens plus étendu) que celle de l’homme, comme dernier Adam en rapport avec Dieu ; et cela pour que Sa mort eût lieu — sans doute pour la bénédiction de tout.

Or Il était Fils de Dieu et Messie, donc Fils de David. Mais pour prendre sa place comme Fils de l’homme, Il devait mourir (voy. Jean 12). Ce n’est pas seulement la prophétie d’Osée : « J’ai appelé mon fils hors d’Égypte » (11, 1), qui s’applique à ce vrai commencement d’Israël en grâce, comme le bien-aimé selon Ses conseils, le peuple ayant entièrement manqué à sa responsabilité, de sorte que, sans cette grâce, Dieu aurait dû le retrancher. Nous avons vu en Ésaïe, Israël serviteur faire place à Christ serviteur, rassemblant un résidu fidèle (les enfants que Dieu lui a donnés pendant qu’Il cache Sa face à la maison de Jacob. És. 8, 17-18), qui devient le noyau du nouveau peuple d’Israël selon Dieu. Le chapitre 49 d’Ésaïe nous présente cette transition d’Israël au Christ, d’une manière frappante. Du reste, c’est là le fondement de toute l’histoire de ce peuple envisagé comme ayant manqué sous la loi et se trouvant rétabli en grâce. Christ en est moralement la nouvelle souche (comparez És. 49, 3 et 5)[5].

Hérode étant mort, Dieu le fait savoir à Joseph en songe, lui commandant de retourner avec le jeune enfant et sa mère dans la terre d’Israël. Ici, on peut remarquer que le pays d’Israël est mentionné sous le nom qui rappelle ses privilèges de la part de Dieu. Ce n’est ni la Judée, ni la Galilée, c’est « la terre d’Israël ». Mais le Fils de David peut-Il, en y entrant, s’approcher du trône de Ses pères ? Non ; Il doit prendre la place d’un étranger, avec les méprisés de Son peuple. Dirigé de Dieu en songe, Joseph conduit Jésus en Galilée, dont les habitants étaient l’objet du profond mépris des Juifs, comme n’étant pas en rapport habituel avec Jérusalem et la Judée, le pays de David, des rois reconnus de Dieu, et du temple, pays dont la langue était bien la même, mais dont le dialecte trahissait la séparation d’avec ceux qui, par la faveur de Dieu, étaient rentrés de Babylone en Judée. En Galilée même, Joseph s’établit dans une ville dont le nom seul était un opprobre à quiconque y demeurait et une tache à sa réputation.

Voilà la position du Fils de Dieu en entrant dans ce monde, et les rapports du Fils de David avec Son peuple, lorsque, par grâce et selon les conseils de Dieu, Il se trouve au milieu de lui.

Il était, d’un côté, Emmanuel, Jéhovah leur Sauveur, mais de l’autre, le Fils de David, tout en prenant Sa place au milieu de Son peuple et s’associant avec les plus pauvres et les plus méprisés du troupeau ; réfugié en Galilée, de devant l’iniquité d’un faux roi qui régnait en Judée par l’appui des Gentils de la quatrième monarchie, et avec lequel les sacrificateurs et les principaux du peuple se trouvaient en rapport. Ceux-ci, infidèles à Dieu et mécontents des hommes, détestaient orgueilleusement un joug auquel leurs péchés les avaient assujettis, et qu’ils n’osaient pas secouer quoiqu’ils ne reconnussent pas assez leurs péchés pour s’y soumettre comme à un juste châtiment de la part de Dieu.

Voilà comment l’évangéliste, ou plutôt le Saint Esprit, nous présente le Messie en rapport avec Israël.

Nous commençons maintenant (chap. 3) Sa véritable histoire. Jean-Baptiste vient selon la prophétie d’Ésaïe (chap. 40) pour préparer le chemin du Seigneur devant Sa face, annonçant l’approche du royaume des cieux et invitant le peuple à se repentir. Ce ministère de Jean envers Israël est caractérisé dans cet évangile par trois choses :

1. Le Seigneur, Jéhovah Lui-même venait. Le Saint Esprit (dans la citation qu’Il fait d’Ésaïe 40, 3) laisse de côté les mots : « pour notre Dieu », à la fin du verset, parce que Jésus venait comme homme dans l’humiliation, tout en étant reconnu comme l’Éternel, et qu’Israël n’avait pas le droit de dire « notre ».

2. Le royaume des cieux[6] s’approchait — cette nouvelle dispensation qui devait remplacer celle qui appartenait proprement à Sinaï où l’Éternel avait parlé sur la terre. Dans cette nouvelle dispensation, « les cieux régneront ». Ils seront le siège de l’autorité de Dieu dans Son Christ, et la caractériseront.

3. Le peuple, au lieu d’être béni comme tel dans son état actuel, est invité à se repentir en vue de l’approche de ce royaume. Jean par conséquent se rend dans le désert : il s’éloigne des Juifs avec lesquels il ne pouvait pas s’associer, car il venait dans les voies de la justice (21, 32). Il se nourrit de ce que le désert lui fournit (ses habits même de prophète rendent témoignage à la position qu’il avait prise de la part de Dieu), rempli lui-même du Saint Esprit.

Ainsi Jean était prophète ; car il venait de la part de Dieu, s’adressant à Son peuple pour l’appeler à la repentance, et pour lui annoncer la bénédiction de Dieu selon les promesses de Jéhovah son Dieu. Mais Jean était plus qu’un prophète, car il présentait comme chose immédiate et l’introduction d’une nouvelle économie longtemps attendue, et la venue du Seigneur en personne. En même temps, bien que Jean vînt à Israël, il ne reconnaissait pas le peuple ; car il devait être jugé, l’aire de Jéhovah devait être nettoyée, les arbres qui ne portaient pas de bons fruits devaient être coupés. L’Éternel ne devait placer dans une nouvelle position, dans le royaume qu’il annonçait, qu’un résidu seulement, sans qu’Il eût encore révélé de quelle manière Il établirait ce royaume. Jean annonçait le jugement du peuple.

Quel fait immense que la présence de l’Éternel Dieu au milieu de Son peuple, dans la personne de Celui qui, quoique devant être l’accomplissement de toutes les promesses, était nécessairement, bien que rejeté, le juge de tout le mal qui se trouvait au milieu des siens !

Plus on donne aux passages qui nous occupent leur vraie application, c’est-à-dire plus on les applique à Israël, plus on saisit leur vraie force[7].

Sans doute, la repentance est une nécessité éternelle pour toute âme qui s’approche de Dieu ; mais dans quel jour cette vérité n’est-elle pas placée, lorsque nous voyons l’Éternel Lui-même intervenir pour appeler Son peuple à cette repentance, et, sur le refus de ce peuple, mettre de côté tout le système des relations d’Israël avec Lui, établissant une économie nouvelle — un royaume qui n’appartient qu’à ceux qui L’écoutent — et faisant enfin éclater Son jugement contre Son peuple et la ville qu’Il avait si longtemps chéris ! « Si tu eusses connu, toi aussi, au moins en cette tienne journée, les choses qui appartiennent à ta paix ! mais maintenant elles sont cachées devant tes yeux » (Luc 19, 42).

Cette vérité donne lieu à la mise en lumière d’une autre vérité de la plus haute importance, annoncée ici au point de vue des droits souverains de Dieu plutôt que de ses propres conséquences, mais qui portait déjà en elle-même toutes ces conséquences. Le peuple — et c’étaient surtout, comme nous le lisons ailleurs, les impies et les méprisés — venait de toutes parts pour être baptisé, confessant ses péchés. Mais ceux qui, à leurs propres yeux, tenaient au milieu de ce peuple le premier rang, étaient aux yeux du prophète qui aimait le peuple selon Dieu, les objets du jugement qu’il annonçait. La colère était imminente. Qui avait averti ces orgueilleux de la fuir ? Qu’ils s’humilient comme les autres ; qu’ils prennent leur vraie place et montrent un changement de cœur. Se vanter des privilèges de leur nation ou de leurs pères, ne servait à rien devant Dieu. Dieu demandait ce que Sa nature même, Sa vérité exigeaient. De plus, Il était souverain ; Il pouvait de pierres mêmes susciter des enfants à Abraham, et c’est ce que Sa grâce souveraine a fait par Christ à l’égard des Gentils. Il fallait de la réalité. La cognée était à la racine des arbres ; ceux qui ne portaient pas de bons fruits seraient coupés (v. 7-10).

Voilà le grand principe moral qui allait être mis en vigueur par le jugement. Le coup n’était pas encore donné ; mais la cognée était déjà à la racine des arbres. Jean était venu pour placer dans une nouvelle position ceux qui recevaient son témoignage, ou du moins dans un état nouveau où ils étaient préparés pour ce témoignage. Ceux qui se repentaient, il les distinguait des autres par le baptême. Mais Celui qui venait après — Celui duquel Jean n’était pas digne de porter les sandales — nettoierait parfaitement son aire, séparerait ce qui était vraiment sien, moralement sien au milieu de Son peuple d’Israël (c’était là Son aire) et exécuterait le jugement sur tout le reste. Auparavant, Jean ouvre de Sa part la porte à la repentance ; après viendrait le jugement.

Le jugement n’était pas tout ce qu’il appartenait à Jésus de faire. Cependant deux choses Lui sont attribuées dans ce témoignage de Jean. Il baptise de feu — c’est le jugement annoncé au verset 12 — qui consume tout mal. Mais Jésus baptise aussi du Saint Esprit ; cet Esprit qui, donné à l’homme et agissant en énergie divine en lui — vivifié, racheté, purifié dans le sang de Christ — le fait sortir de l’influence de tout ce qui agit sur la chair et le place en rapport et en communion avec tout ce qui est révélé de Dieu, avec la gloire dans laquelle Dieu introduit Ses créatures, dans la vie qu’Il communique, en détruisant moralement en nous la puissance de tout ce qui est contraire à la jouissance de ces privilèges.

Remarquez ici que le seul bon fruit reconnu par Jean comme le seul moyen d’échapper, est la confession sincère, par la grâce, de ses péchés. Ceux-là seuls qui font cette confession échappent à la cognée. Les seuls arbres réellement bons étaient ceux qui se confessaient mauvais.

Mais quel moment solennel que celui-là pour le peuple chéri de Dieu ! Quel événement que la présence de l’Éternel au milieu de la nation avec laquelle Il était en relation !

Remarquez que Jean le baptiseur ne présente pas ici le Messie comme le Sauveur venu en grâce, mais comme le Chef du royaume, comme Jéhovah qui devait exécuter le jugement si le peuple ne se repentait pas. Nous allons voir ensuite la position que Jésus prend, en grâce.

Au verset 13, Jésus Lui-même, qui jusqu’ici nous a été présenté comme Messie et même comme Jéhovah, vient à Jean pour être baptisé du baptême de la repentance. Se présenter à ce baptême, avons-nous dit, était le seul bon fruit que pouvait produire le Juif dans l’état où il se trouvait. Cet acte même était le fruit d’une œuvre de Dieu — de l’action efficace du Saint Esprit. Celui qui se repent confesse qu’il a marché loin de Dieu auparavant ; de sorte qu’il y a dans ce fait-là un fait nouveau, fruit de la Parole et de l’œuvre de Dieu en lui, signe d’une nouvelle vie, de la vie de l’Esprit dans son âme. Il n’y avait, par le fait même de la mission de Jean, d’autre fruit ou d’autre preuve recevable de la vie de Dieu dans un Juif que la confession ; ce qui ne veut pas dire qu’il n’y eût personne en qui l’Esprit agissait déjà vitalement ; mais dans l’état du peuple, et selon l’appel de Dieu par Son serviteur, c’était là la preuve même de cette vie — du mouvement du cœur vers Dieu. Ceux-là étaient le vrai résidu du peuple que Dieu reconnaissait comme tels ; et c’est ainsi qu’ils étaient séparés d’avec la masse qui mûrissait pour le jugement. C’étaient les vrais saints — les excellents de la terre ; quoique la seule place pour de tels hommes fût l’humiliation de la repentance. C’est par là qu’ils devaient commencer. Lorsque Dieu apporte la miséricorde et la justice, on profite avec actions de grâce de la miséricorde en la reconnaissant comme la seule ressource de l’âme, et le cœur fléchit devant la justice comme juste conséquence de l’état du peuple de Dieu, mais en se l’appliquant à soi-même.

Or Jésus se présente au milieu de ceux qui prennent cette position (v. 13). Quoiqu’Il fût vraiment le Seigneur, l’Éternel, le juste juge de Son peuple, Celui qui devait nettoyer Son aire, Il se place néanmoins avec le résidu fidèle qui s’humilie devant ce jugement. Il prend la place, devant Dieu, du plus petit de Son peuple. Il appelle, comme au psaume 16, 2 et 3, l’Éternel, Son Seigneur, en Lui disant : « Ma bonté ne s’élève pas jusqu’à toi » ; et aux saints et aux excellents qui sont sur la terre : « En eux sont toutes mes délices ». Parfait témoignage de grâce, le Sauveur s’identifiant, selon cette grâce, avec le premier mouvement de l’Esprit dans le cœur de Son peuple, le Sauveur s’abaissant Lui-même, non seulement dans la condescendance de Sa grâce envers les siens, mais en se plaçant comme l’un d’eux dans leur vraie position devant Dieu ; non seulement pour rassurer leur cœur par une telle bonté, mais aussi pour sympathiser avec toutes leurs peines et leurs difficultés ; pour être le modèle, la source, et l’expression parfaite de tous les sentiments qui convenaient à leur position. Il ne pouvait s’associer avec Israël méchant et sans repentir, mais avec le premier effet vivant de la Parole et de l’Esprit de Dieu dans les pauvres du troupeau. Il pouvait agir en grâce et le faisait. Il fait de même maintenant. On trouve Christ dès le premier pas, celui qui est réellement de Dieu.

Mais il y avait plus. Jésus vient pour mettre ceux qui Le recevaient en rapport avec Dieu, selon la faveur qui reposait sur une perfection telle que la sienne et sur l’amour qui, en s’intéressant à Son peuple, satisfaisait le cœur de l’Éternel et, ayant parfaitement glorifié Dieu en tout ce qu’Il est, Le rendait capable de se satisfaire en bonté. Sans doute, pour que cela eût lieu, le Seigneur dut donner Sa vie ; l’état du Juif, comme de tout homme, exigeait ce sacrifice pour que l’un et l’autre fussent en relation avec le Dieu de vérité. Or, pour ce sacrifice aussi, l’amour de Jésus n’a pas manqué non plus. Mais ici, Il conduit les siens vers la jouissance de la bénédiction exprimée dans Sa personne, laquelle devait être solidement fondée sur ce sacrifice — bénédiction à laquelle ils devaient parvenir par le chemin de la repentance dans lequel ils entraient par le baptême de Jean, et ce baptême, Jésus le recevait, afin qu’ils pussent marcher ensemble vers la possession de tous les biens que Dieu avait préparés pour ceux qui L’aimaient.

Jean sentant la dignité et l’excellence de la personne de Celui qui venait vers lui, s’oppose au dessein du Seigneur. Le Saint Esprit fait ainsi ressortir le vrai caractère de l’acte du Seigneur. Quant à Jésus, c’était la justice qui l’amenait là, et non le péché — la justice qu’Il accomplissait en amour. Il accomplissait, ainsi que Jean-Baptiste, ce qui convenait à la place qui Lui était assignée par Dieu. Avec quelle condescendance en même temps Il s’unit à Jean, disant : « Ainsi il nous est convenable ». C’est le serviteur humble et obéissant ; telle a toujours été Sa conduite sur la terre. De plus, quant à Sa position, la grâce a amené Jésus là où le péché nous a amenés, Il est entré par la porte que le Seigneur avait ouverte pour Ses brebis. En confessant le péché tel qu’il est, en venant devant Dieu en faisant la confession de notre péché (ce qui est moralement le contraire du péché), nous nous trouvons en compagnie de Jésus[8]. En vérité, c’est le fruit de Son Esprit en nous. C’est ce qui est arrivé à ces pauvres pécheurs qui sont venus vers Jean. C’est ainsi que Jésus a pris Sa place en justice et en obéissant au milieu des hommes, et plus exactement au milieu des Juifs repentants. C’est dans cette position d’homme — juste, obéissant et accomplissant sur la terre, dans une parfaite humilité, l’œuvre pour laquelle Il s’était offert en grâce, selon le psaume 40, se livrant à l’accomplissement de toute la volonté de Dieu dans un parfait renoncement — que Dieu Son Père L’a pleinement reconnu et L’a scellé, proclamant sur la terre Son Fils bien-aimé.

Jésus étant baptisé — signe le plus frappant de la position qu’Il avait prise avec Son peuple — les cieux Lui sont ouverts, et Il voit le Saint Esprit descendre sur Lui comme une colombe ; et voici une voix du ciel qui disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j’ai trouvé mon plaisir » (v. 16-17).

Mais ces circonstances demandent notre attention.

Jamais les cieux n’ont été ouverts sur la terre, ni à aucun homme sur la terre, avant que le Bien-aimé y fût[9]. Dieu, sans doute, dans Sa patience et d’une manière providentielle, avait béni non seulement toutes Ses créatures, mais selon les règles de Son gouvernement terrestre, Il avait encore béni Son peuple. Il avait aussi des élus qu’Il gardait dans Sa fidélité. Néanmoins, jusqu’alors, le ciel n’avait pas été ouvert. Un témoignage avait été suscité de Dieu, en rapport avec Son gouvernement de la terre ; mais il n’y avait pas sur cette terre d’objet sur lequel l’œil de Dieu pût se reposer en s’y complaisant, jusqu’à ce que Jésus vînt, obéissant et sans péché, Fils bien-aimé de Dieu. Mais ce qui est si précieux pour nous, c’est qu’aussitôt qu’Il prend par la grâce publiquement cette place d’humiliation avec Israël — c’est-à-dire avec le résidu fidèle, en se présentant ainsi devant Dieu, accomplissant Sa volonté — les cieux s’ouvrent sur un objet digne de leur attention. Toujours, sans doute, Il était digne de leur adoration, même avant que le monde fût ; mais maintenant, Il vient de prendre comme homme cette position dans les voies de Dieu, et les cieux s’ouvrent sur Jésus, l’objet de l’affection parfaite de Dieu sur la terre. Le Saint Esprit descend sur Lui visiblement. Et Lui, homme sur la terre, homme prenant place avec les débonnaires du peuple qui se repentent, Il est reconnu Fils de Dieu. Non seulement Il est oint de Dieu, mais comme homme Il a la conscience de la descente du Saint Esprit sur Lui — le sceau du Père mis sur Lui. Et ici, il ne s’agit pas, évidemment, de Sa nature divine dans le caractère de Fils éternel du Père. Le sceau ne serait pas même en rapport avec ce caractère ; et quant à Sa personne, ce sceau est manifesté, avec la conscience qu’Il en avait, à l’âge de douze ans, dans l’évangile de Luc. Mais tout en étant Fils éternel du Père, Il est aussi homme, Fils de Dieu sur la terre, et scellé comme homme. Il a, comme homme, la conscience de la présence immédiate du Saint Esprit avec Lui. Cette présence est en rapport avec le caractère d’humilité, de douceur et d’obéissance dans lequel le Seigneur paraissait ici-bas. C’est « comme une colombe » que le Saint Esprit descend sur Lui, de même que ce fut sous forme de langues de feu qu’Il vint sur la tête des disciples pour leur témoignage en puissance dans ce monde, selon la grâce qui s’adressait à tous, et à chacun dans sa propre langue.

Jésus crée ainsi, dans Sa position d’homme, la place où Il nous introduit par la rédemption. Mais la gloire de Sa personne est toujours soigneusement réservée. Il n’y a pas d’objet présenté à Jésus comme à Saul, par exemple, et dans un cas plus analogue, à Étienne, qui, étant plein de l’Esprit, voit aussi les cieux ouverts, y regarde et voit Jésus, le Fils de l’homme, et est transformé à Son image. Jésus est venu ; Il est Lui-même Celui sur lequel les cieux s’ouvrent ; Il n’a pas d’objet transformant, comme Étienne, ou comme nous-mêmes dans l’Esprit ; les cieux Le contemplent, objet parfait de délice. C’est Sa relation déjà existante avec Son Père, qui est scellée[10]. Le Saint Esprit ne crée pas non plus Son caractère (sauf en tant qu’Il a été conçu par Sa puissance, quant à Sa nature humaine, dans le sein de la vierge Marie) ; Il s’était uni aux pauvres dans la perfection de ce caractère, avant d’être scellé, et alors Il agit selon l’énergie et la puissance de ce qu’Il a reçu sans mesure, dans Sa vie d’homme ici-bas (Matt. 12, 28 ; Jean 3, 34 ; comp. Act. 10, 38).

Nous trouvons dans la Parole quatre occasions mémorables où les cieux s’ouvrent, et Christ est l’objet de chacune de ces révélations. Chacune d’elles a son caractère spécial. Dans celle qui nous occupe ici, le Saint Esprit descend sur Jésus, et Il est reconnu Fils de Dieu (comp. Jean 1, 33-34).

À la fin du chapitre 1 de l’évangile de Jean, Jésus s’annonce comme Fils de l’homme : et les anges de Dieu montent et descendent sur Lui. Il est, comme Fils de l’homme, l’objet de leur ministère[11].

À la fin du chapitre 7 des Actes, une scène toute nouvelle s’ouvre. Les Juifs rejettent le dernier témoignage que Dieu leur envoie. Étienne, qui rend ce témoignage devant eux, est rempli du Saint Esprit, et les cieux lui sont ouverts. Le système terrestre était définitivement terminé par le rejet du témoignage du Saint Esprit à la gloire du Christ monté en haut. Mais ce n’est pas uniquement un témoignage. Le chrétien est rempli de l’Esprit, le ciel lui est ouvert, la gloire de Dieu lui est manifestée, et le Fils de l’homme lui apparaît debout à la droite de Dieu. Ceci est une chose différente du ciel ouvert sur Jésus, objet des délices de Dieu sur la terre. C’est le ciel ouvert au chrétien lui-même, son objet s’y trouvant pendant qu’il est rejeté sur la terre. Il y voit par le Saint Esprit la gloire céleste de Dieu, et Jésus, Fils de l’homme, objet spécial de son témoignage, dans la gloire de Dieu. La différence est aussi remarquable qu’intéressante pour nous, et montre, de la manière la plus frappante, la vraie position du chrétien sur la terre, et le changement qu’a produit le rejet de Jésus par Son peuple terrestre. Seulement l’Église, l’union des croyants en un seul corps avec le Seigneur en haut, n’était pas encore révélée.

Enfin le ciel s’ouvre (Apoc. 19), et le Seigneur Lui-même sort, Roi des rois et Seigneur des seigneurs.

Nous trouvons donc :

Jésus, Fils de Dieu, sur la terre objet des délices du ciel, scellé du Saint Esprit ;

Jésus, Fils de l’homme, objet des soins du ciel, les anges de Dieu étant Ses serviteurs ;

Jésus en haut, à la droite de Dieu, et le fidèle rempli de l’Esprit et souffrant sur la terre pour Lui, le fidèle voyant la gloire en haut et le Fils de l’homme dans cette gloire ;

Enfin Jésus, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, sortant pour juger et faire la guerre contre les hommes orgueilleux qui contestent Son autorité et oppriment la terre.

Mais revenons à la fin de notre chapitre 3. Le Père Lui-même reconnaît Jésus, homme sur la terre, obéissant, et entrant comme le bon berger par la porte ; Il Le reconnaît pour Son Fils bien-aimé en qui Il trouve tout Son délice. Le ciel est ouvert sur Jésus ; Il voit le Saint Esprit descendre pour le sceller ; ce sceau de l’Esprit fait la force et le soutien de la perfection de Sa vie humaine, et Il reçoit du Père le témoignage de Sa relation entre Lui et les siens. Aucun objet sur lequel la foi de Son cœur dût se reposer, ne Lui est présenté, comme il l’est à nous. C’est Sa propre relation avec le ciel et avec Son Père qui est scellée. Son âme en jouit par la descente du Saint Esprit et la voix de Son Père.

Mais ce passage de Matthieu demande d’autres remarques. Notre adorable Seigneur, ou plutôt ce qui Lui est arrivé, montre la place où Il met les croyants ou le modèle qu’Il leur donne, qu’ils soient Juifs ou Gentils ; seulement il est évident que nous n’y sommes amenés que par la rédemption. « Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu », telles sont Ses paroles bénies après Sa résurrection. Mais pour nous le ciel est ouvert ; nous sommes scellés du Saint Esprit ; le Père nous reconnaît comme fils. Toutefois la dignité divine de la personne de Christ est toujours soigneusement réservée, aussi bien ici dans Son humiliation que dans la transfiguration en gloire. Moïse et Élie sont dans la même gloire, mais ils disparaissent quand la précipitation de Pierre, alors qu’il lui est permis de s’exprimer, voulait les mettre sur le même niveau. Plus nous sommes près d’une personne divine, plus nous adorons et reconnaissons ce qu’elle est.

Mais on trouve ici un autre fait très remarquable. Pour la première fois, quand Christ prend, dans l’humilité, cette place au milieu des hommes, la Trinité est pleinement révélée. Sans doute, le Fils et l’Esprit sont mentionnés dans l’Ancien Testament ; mais là l’unité de la divinité est le grand point révélé. Ici, le Fils est reconnu dans l’homme, le Saint Esprit descend sur Lui, et le Père Le reconnaît comme Son Fils. Quelle merveilleuse relation avec l’homme, quelle place pour l’homme que d’y être ! Par la relation de Christ avec l’homme, la divinité est révélée dans sa plénitude. Son humanité l’a fait ressortir dans son déploiement. Il était vraiment un homme, mais l’homme en qui les conseils de Dieu à l’égard de l’homme devaient s’accomplir.

Pour cette raison, comme Il a réalisé et manifesté la place que l’homme occupe devant Dieu dans Sa personne, et notre relation avec Dieu selon les conseils de Sa grâce envers nous, ainsi sommes-nous en lutte avec l’ennemi. Il entre aussi dans ce côté de notre position. Nous avons notre relation avec Dieu notre Père, et alors nous avons aussi affaire avec Satan. Le Seigneur triomphe et Il nous apprend à vaincre. Remarquez aussi que d’abord la relation du Seigneur avec Dieu est pleinement établie et manifestée, et qu’ensuite là commence le conflit avec Satan ; il en est de même pour nous. Mais la première question était : Le dernier Adam tiendrait-il là où le premier avait manqué ? Et de plus, c’était dans le désert de ce monde et sous la puissance de Satan — au lieu des bénédictions de Dieu — car c’est là que nous étions arrivés.

Il faut remarquer ici un autre point qui fait ressortir pleinement la place que le Seigneur prend. La loi et les prophètes ont été jusqu’à Jean. Alors une chose nouvelle est annoncée, le royaume des cieux. Le jugement se termine par le peuple de Dieu. La cognée est mise à la racine des arbres, le van est dans la main de Celui qui vient, le froment est assemblé dans le grenier de Dieu, la balle est brûlée. C’est-à-dire que nous avons la fin de l’histoire du peuple de Dieu en jugement. Nous entrons sur le terrain où l’homme est perdu et attend le jugement ; mais l’histoire de l’homme responsable est close. Voilà pourquoi il est dit : « Maintenant, en la consommation des siècles, il a été manifesté une fois pour l’abolition du péché par son sacrifice ». Cela est arrivé extérieurement et littéralement à Israël ; mais c’est moralement vrai de nous : seulement nous sommes rassemblés pour le ciel, comme c’était le cas pour le résidu d’alors, et nous serons dans le ciel. Mais Christ étant rejeté, l’histoire de la responsabilité est finie, et nous entrons en grâce comme des êtres déjà perdus. Comme conséquence de l’annonce de l’imminence de ce fait, Christ vient et, s’identifiant avec le résidu qui échappe par la repentance, fait cette place nouvelle pour l’homme sur la terre : seulement nous ne pouvions y être avant que la rédemption fût accomplie. Cependant Il a manifesté le nom du Père à ceux qu’Il Lui avait donnés du monde.

Chapitre 4. — Ayant ainsi pris en grâce Sa position comme homme sur la terre, Jésus commence Sa carrière terrestre, étant conduit par l’Esprit au désert pour être tenté par le diable. L’homme juste et saint, le Fils de Dieu, jouissant comme tel de tous les privilèges qui Lui sont propres, doit subir le jugement de ces ruses par lesquelles le premier Adam est tombé. Son état spirituel est mis à l’épreuve. Il ne s’agit pas ici d’un homme innocent, jouissant de toutes les bénédictions naturelles de Dieu, et mis à l’épreuve au milieu de ces bénédictions qui auraient dû lui rappeler Dieu. Christ, près de Dieu comme Son Fils bien-aimé, mais au milieu de l’épreuve ayant la connaissance du bien et du mal, et, pour ce qui est des circonstances extérieures, étant descendu au milieu de l’état de chute de l’homme, Christ doit avoir Sa fidélité à cette position pleinement mise à l’épreuve quant à Sa parfaite obéissance. Il devait pour s’y maintenir ne pas avoir d’autre volonté que celle de Son Père, et accomplir cette volonté ou la subir, quelles qu’en fussent les conséquences pour Lui-même. Il devait l’accomplir au milieu de toutes les difficultés, de toutes les privations, et dans l’isolement au désert où se trouvait la puissance de Satan. Toutes ces choses pouvaient L’engager à suivre un chemin plus doux que celui qui seul serait à la gloire de Son Père. Il devait renoncer à tous les droits qui appartenaient à Sa personne, sauf à les recevoir de Dieu et à les Lui abandonner dans une confiance parfaite.

L’ennemi faisait tous ses efforts pour engager Christ à user de Ses privilèges — « si tu es Fils de Dieu » — pour Son propre soulagement, en dehors du commandement de Dieu et en évitant les souffrances qui accompagneraient l’accomplissement de cette volonté. Mais c’était pour l’amener à faire Sa propre volonté et non celle de Dieu.

Jésus, jouissant dans Sa propre personne et dans Sa relation avec Dieu, de la pleine faveur de Dieu, comme Fils de Dieu, de la clarté de Sa face, va passer quarante jours dans le désert pour être aux prises avec l’ennemi. Il n’est pas éloigné de l’homme et de toute communication avec l’homme et les choses humaines, pour être avec Dieu, comme Moïse et Élie. Déjà pleinement avec Dieu, Il est séparé des hommes par la puissance du Saint Esprit pour être seul dans Sa lutte avec l’ennemi. Dans le cas de Moïse, c’était l’homme en dehors de son état naturel, pour être avec Dieu. Dans le cas de Jésus, il en est ainsi pour être avec l’ennemi : être avec Dieu était Sa position naturelle.

L’ennemi tente Jésus d’abord en L’engageant à satisfaire aux besoins de Son corps, et, au lieu de s’attendre à Dieu, à employer, d’après Sa propre volonté et pour Lui-même, la puissance dont Il était doué. Or si Israël a été nourri de la manne de la part de Dieu dans le désert, le Fils de Dieu, quelle que soit Sa puissance, agira selon ce qu’Israël aurait dû apprendre en recevant cette manne, savoir que « l’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ».

L’homme, le Juif obéissant, le Fils de Dieu s’attendait à cette Parole, et ne faisait rien sans elle. Il n’était pas venu pour faire Sa volonté, mais la volonté de Celui qui L’avait envoyé. C’est là le principe qui caractérise l’esprit de Christ dans les Psaumes. Aucune délivrance n’est acceptée sinon l’intervention de Jéhovah quand Il le trouve bon. C’est la patience parfaite, afin d’être parfait et accompli dans toute la volonté de Dieu. Il ne pouvait se trouver aucun désir coupable en Christ ; mais avoir faim n’était pas pécher ; c’était pourtant un besoin humain, quel mal y avait-il donc à manger quand on avait faim ? Il n’y avait pas de volonté de Dieu à le faire, et c’était cette volonté, d’après la Parole, que Jésus était venu accomplir. La suggestion de Satan était : « Si tu es Fils de Dieu, commande », mais Il avait pris la place du serviteur, et ce n’était certes pas celle du commandement : Satan cherchait à faire sortir le Seigneur de la place de l’obéissance et du service parfaits, de la place de serviteur.

Remarquez ici l’importance que l’Écriture a et le caractère de l’obéissance de Christ. Pour cette obéissance, la volonté de Dieu n’était pas simplement une règle, c’était le seul mobile d’action. Notre volonté est souvent arrêtée par la Parole. Il n’en était pas ainsi de Christ. La volonté de Son Père était Son mobile : il agissait non seulement selon la volonté de Dieu, mais parce qu’elle était la volonté de Dieu. Nous nous plaisons à voir un enfant qui, courant à quelque chose qu’il aime, s’arrêterait et ferait joyeusement la volonté de ses parents, quand il y serait appelé. Mais Christ n’a jamais obéi ainsi, Il n’a jamais cherché Sa propre volonté, mais s’en est tenu à celle de Son Père. Et nous sommes sanctifiés pour l’obéissance de Christ. Notez encore que l’Écriture était ce dont Il vivait et ce qui Le faisait vaincre. Ici, tout dépendait de la victoire de Christ, comme tout dépendit de la chute d’Adam. Mais pour Christ, une parole, bien employée naturellement, suffisait. Il n’en cherchait pas d’autre que l’obéissance. Cela suffit pour Satan, il n’a rien à redire. Ses ruses sont ainsi déjouées.

Le premier principe du triomphe, c’est l’obéissance simple et absolue qui vit de toute parole sortant de la bouche de Dieu. Le second, c’est la confiance parfaite dans le sentier de l’obéissance.

En second lieu, l’ennemi place Jésus sur le faîte du temple pour L’engager à s’appliquer les promesses faites au Messie, sans se tenir dans les voies de Dieu. L’homme fidèle assurément doit compter sur le secours de Dieu en marchant dans Ses voies. L’ennemi veut que le Fils de l’homme mette Dieu à l’épreuve (au lieu de compter sur Lui en demeurant dans Ses voies), pour savoir si l’on peut compter sur Lui. Cela aurait été un manque de confiance en Dieu et pas de l’obéissance ; ou de l’orgueil qui se flatte de ses privilèges, au lieu de compter sur Dieu dans l’obéissance[12]. Prenant Sa place avec Israël dans la condition où il se trouvait sans roi dans le pays, et rappelant les directions qui lui étaient données dans ce livre pour le guider au chemin de Dieu, lequel y était enseigné, Jésus emploie, pour Sa propre conduite, cette partie de la Parole qui contient le commandement divin à ce sujet : « Tu ne tenteras pas le Seigneur ton Dieu » ; passage souvent cité comme s’il défendait un excès de confiance en Dieu, tandis qu’il signifie qu’il ne faut pas se défier, mais essayer s’Il est fidèle. Le peuple tentait Dieu en disant : « Dieu est-il vraiment au milieu de nous ? ». Voilà ce que Satan voulait obtenir du Seigneur.

L’ennemi, ne réussissant pas à tromper ce cœur obéissant, même en se cachant sous l’emploi de la Parole de Dieu, se montre dans son vrai caractère en engageant pour la troisième fois le Seigneur à s’épargner toutes les souffrances qui L’attendaient, Lui montrant l’héritage du Fils de l’homme sur la terre, héritage qui devait Lui appartenir quand il y serait parvenu au travers de toutes ces voies, pénibles, mais nécessaires à la gloire du Père, et que le Père avait tracées pour Lui. Tout serait à Lui, s’Il reconnaissait Satan, le dieu de ce monde, en lui rendant hommage. C’était, en effet, ce que les rois de la terre avaient fait seulement pour une partie de ces choses ; combien souvent on les fait pour une futile vanité ! Mais Lui, Il les aurait toutes. Mais si Jésus devait hériter la gloire terrestre (comme toute autre), le but de Son cœur était Dieu Lui-même, Son Père, pour Le glorifier. Quel que fût le prix du don, c’était comme don du donateur que Son cœur l’appréciait. Au reste, Il prenait la place d’un homme éprouvé et d’un fidèle Israélite ; et quelle que fût l’épreuve de la patience où le péché du peuple l’avait placé, dût l’épreuve être grande, Il ne servirait que Son Dieu seul.

Or si le diable pousse la tentation, le péché, jusqu’au bout, et se montre l’adversaire (Satan), le fidèle a le droit de le chasser. S’il vient comme tentateur, le fidèle doit lui répondre par la fidélité à la Parole, guide parfait de l’homme, selon la volonté de Dieu. Il n’est pas nécessaire qu’il pénètre tout. La Parole est la Parole de Celui qui agit, et en la suivant, on marche selon une sagesse qui connaît tout, et dans un sentier formé par cette sagesse et qui conséquemment implique une confiance absolue en Dieu. Les deux premières tentations étaient des ruses du diable, la troisième, une hostilité ouverte contre Dieu. S’il vient comme adversaire avoué de Dieu, le fidèle a le droit de n’avoir rien à faire avec lui. « Résistez au diable, et il s’enfuira de vous ». Il sait qu’il a rencontré Christ, non la chair. Puissent les croyants résister, si Satan cherchait à les tenter par la Parole, se rappelant que le domaine de Satan est dans l’homme tombé !

Ce qui le garantit moralement (c’est-à-dire quant à l’état de son cœur), c’est un œil simple. Si je ne cherche que la gloire de Dieu, ce qui ne me présente pour motif que mon propre agrandissement ou ma propre satisfaction de corps ou d’âme, n’aura pas de prise sur moi, et se montrera à la lumière de la Parole, qui dirige l’œil simple, comme étant contraire à la pensée de Dieu. Ce n’est pas l’arrogance qui rejette la tentation comme si l’on était bon ; c’est l’obéissance, qui donne humblement à Dieu Sa place et par conséquent aussi à Sa Parole. « Par la parole de tes lèvres je me suis gardé des voies de l’homme violent » (Ps. 17, 4), de celui qui faisait sa volonté propre et en faisait son guide. Si le cœur ne cherche que Dieu, la ruse la plus habile est découverte, car l’ennemi ne nous pousse jamais à ne chercher que Dieu. Mais cela suppose un cœur pur et aucune recherche de soi-même. C’est ce qui a été montré en Jésus.

Notre sauvegarde contre la tentation, c’est la Parole employée par le discernement d’un cœur parfaitement pur qui vit dans la présence de Dieu, apprend à connaître Ses pensées dans Sa Parole[13], et connaît par conséquent l’application de cette Parole aux circonstances présentes. C’est la Parole qui garantit l’âme des ruses de l’ennemi.

Remarquez aussi que c’est conséquemment dans cet esprit d’obéissance simple et humble que réside la puissance, car là où il existe, Satan ne peut rien. Dieu est là, aussi l’ennemi est-il vaincu.

Il me semble que ces trois tentations sont présentées au Seigneur sous les trois caractères d’homme, de Messie, et de Fils de l’homme.

Il n’avait pas de convoitise comme un homme déchu, mais Il avait faim. Le tentateur L’engageait à satisfaire ce besoin sans Dieu.

Les promesses du Père Lui appartenaient comme étant faites au Messie. Et tous les royaumes Lui appartiennent comme Fils de l’homme.

Jésus répond toujours comme un Israélite fidèle, personnellement responsable à Dieu, citant le livre du Deutéronome qui traite ce sujet (c’est-à-dire l’obéissance d’Israël en vue de la possession de la terre et des privilèges qui lui appartenaient en rapport avec cette obéissance, et en dehors de l’organisation qui en formait un corps devant Dieu[14]).

Satan laisse Jésus, et les anges viennent exercer leur ministère en faveur du Messie, le Fils de l’homme victorieux par l’obéissance. Il a pleinement répondu à ce en quoi Satan aurait voulu L’amener à éprouver Dieu. Les anges sont pour nous aussi des esprits administrateurs.

Mais qu’il est profondément intéressant de voir notre adorable Seigneur, le Fils de Dieu, descendre du ciel et prendre sur la terre — Lui, la Parole faite chair — Sa place au milieu de pauvres êtres pieux ; puis, ayant pris cette place, reconnu du Père comme Son Fils, les cieux étant ouverts et ouverts sur Lui, et le Saint Esprit descendant et demeurant sur Lui comme homme, quoique sans mesure, de Le voir former le modèle de notre position, bien que nous n’y fussions pas encore ; toute la Trinité, comme je l’ai dit, était d’abord pleinement révélée lorsqu’Il s’est ainsi associé à l’homme ; et alors, quand nous étions esclaves de Satan, Il est allé dans ce caractère et cette relation rencontrer Satan pour nous, afin de lier l’homme fort et de donner par Lui-même cette place aussi à l’homme ; seulement il fallait la rédemption pour nous amener où Il est.

Jean étant mis en prison, le Seigneur se rend en Galilée. Ce mouvement, qui plaçait la scène de Son ministère en dehors de Jérusalem et de la Judée, avait une grande portée à l’égard des Juifs. Le peuple (en tant que concentré à Jérusalem, se vantant de posséder les promesses, les sacrifices, le temple, et d’être la tribu royale) perdait la présence du Messie, Fils de David. Jésus, pour la manifestation de Sa personne, pour le témoignage de l’intervention de Dieu en Israël, se rend au milieu des pauvres et méprisés du troupeau ; car le résidu et les pauvres du troupeau sont déjà, aux chapitres 3 et 4, clairement distingués des chefs du peuple. Ainsi, Il devient réellement le vrai tronc, au lieu d’être une branche de ce qui avait été planté ailleurs, quoique cet effet n’eût pas été pleinement manifesté. Ce moment correspond au chapitre 4 de Jean.

Ce serait le lieu ici de remarquer que, dans l’évangile de Jean, les Juifs sont toujours distingués de la foule[15]. La langue ou plutôt la prononciation des Galiléens était entièrement différente de celle des Juifs. On ne parlait pas le chaldéen en Galilée.

Cette manifestation du Fils de David en Galilée était en même temps l’accomplissement d’une prophétie d’Ésaïe, dont la force est celle-ci : bien que la captivité romaine fût tout autrement terrible que les invasions des Assyriens lorsqu’ils avaient envahi le pays d’Israël, il y avait cependant une circonstance qui changeait tout, savoir la présence du Messie, de la vraie lumière, dans ces contrées mêmes.

Nous remarquons que l’Esprit de Dieu passe ici par-dessus toute l’histoire de Jésus jusqu’au commencement de Son ministère après la mort de Jean le baptiseur. Il donne à Jésus Sa position propre au milieu d’Israël — Emmanuel, le Fils de David, le Bien-aimé de Dieu, reconnu comme Son Fils, le fidèle en Israël, quoique exposé à toutes les tentations de Satan ; et ensuite, Sa position prophétique annoncée par Ésaïe et le royaume proclamé comme étant proche[16].

Jésus s’entoure alors de ceux qui devaient Le suivre définitivement dans Son ministère et dans Ses tentations, et qui, à Son appel, abandonnant tout, lient leur sort et leur portion à Son sort et à Sa portion.

L’homme fort était lié, de sorte que Jésus pouvait piller ses biens et annoncer le royaume avec les preuves de la puissance qui pouvait établir ce royaume.

Deux choses sont alors mises en avant dans le récit de l’évangile : 1. La puissance qui accompagne la proclamation du royaume, fait annoncé dans deux ou trois versets[17], sans autre détail. Le royaume est proclamé avec des actes de puissance qui attirent l’attention de tout le pays, de tout l’ancien territoire d’Israël. Jésus paraît devant eux investi de cette puissance. 2. (chap. 5-7) Le caractère du royaume est annoncé dans le sermon sur la montagne, ainsi que le caractère des personnes qui y auront part (le nom du Père étant révélé en même temps). C’est-à-dire que le Seigneur avait annoncé le royaume à venir et, par la puissance présente de bonté, avait vaincu l’adversaire ; Il montre alors ce qu’étaient les vrais caractères selon lesquels le royaume serait établi, qui y entrerait, et comment. Il n’y est pas question de la rédemption, mais du caractère et de la nature du royaume, et de ceux qui pourraient y entrer. Cela montre clairement la place morale que ce sermon tient dans l’enseignement du Seigneur.

Il est évident que, dans toute cette partie de l’évangile, c’est la position du Sauveur qui est l’objet de l’enseignement de l’Esprit, et non les détails de Sa vie. Ces détails viennent après, afin de montrer pleinement ce qu’Il était au milieu d’Israël, Ses rapports avec ce peuple, et Son sentier dans la puissance de l’Esprit qui a conduit à la rupture entre le Fils de David et le peuple qui aurait dû Le recevoir. L’attention de tout le pays ayant été attirée par Ses actes de puissance, le Seigneur propose à Ses disciples — mais le peuple l’entendant — les principes de Son royaume.

On peut distinguer dans ce discours les parties suivantes[18] :

Le caractère et la portion de ceux qui seront dans le royaume, chapitre 5, 1-12.

Leur position dans le monde, chapitre 5, 13-16.

Les rapports des principes du royaume avec la loi, chapitre 5, 17-48[19].

L’esprit dans lequel les disciples de Jésus doivent faire les bonnes œuvres, chapitre 6, 1-18.

La séparation d’avec l’esprit du monde et d’avec ses soucis, chapitre 6, 19-34.

L’esprit des rapports des disciples avec les autres hommes, chapitre 7, 1-6.

La confiance en Dieu qui leur convient, chapitre 7, 7-12.

L’énergie qui doit les caractériser pour entrer dans le royaume ; cependant non seulement pour y entrer, plusieurs chercheraient à le faire, mais pour y entrer selon ces principes qui rendent la chose difficile à l’homme, pour y entrer selon Dieu — par la porte étroite : mais aussi le moyen pour eux de discerner ceux qui chercheront à les tromper, ainsi que la vigilance nécessaire pour ne pas se laisser tromper, chapitre 7, 13-23.

Enfin, l’obéissance pratique et réelle aux paroles du Seigneur, la vraie sagesse de ceux qui écoutent Ses paroles, chapitre 7, 24-29.

Il y a un autre principe encore qui caractérise ce discours : c’est l’introduction du nom du Père. Jésus place Ses disciples en rapport avec Son Père comme étant leur Père ; Il leur révèle le nom du Père pour qu’ils soient en relation avec Lui, et qu’ils agissent d’après ce qu’Il est.

Ce discours donne les principes du royaume, tout en supposant le rejet du Roi ; il donne la position dans laquelle ce rejet amènerait ceux qui sont siens et qui doivent attendre une récompense céleste. Ils devaient être une saveur divine dans laquelle Dieu était connu et agissait, et ils seraient faits un spectacle pour le monde entier. C’était, du reste, le but de Dieu. Leur confession devait être assez franche pour que le monde rapportât leurs œuvres au Père. Ils devaient agir d’une part selon un jugement du mal qui atteignît le cœur et les motifs ; et d’autre part, selon le caractère du Père en grâce, s’en rapporter à l’approbation du Père qui voit dans le secret, là où l’œil de l’homme ne peut pénétrer. Ils devaient avoir une pleine confiance en Lui pour tous leurs besoins. Sa volonté était la règle d’après laquelle on entre dans le royaume.

On peut remarquer que ce discours se rattache à la proclamation du royaume comme étant proche ; et que tous ces principes de conduite y sont présentés comme caractérisant le royaume, et comme étant les conditions d’entrée dans ce royaume. Sans doute, il en résulte qu’ils conviennent à ceux qui y sont entrés. Mais le discours est prononcé au milieu d’Israël[20], avant que le royaume soit établi, comme l’état préalable exigé pour y entrer et pour mettre en évidence ses principes fondamentaux, en rapport avec ce peuple, et en contraste moralement avec l’idée qu’Israël s’en était faite.

En examinant les béatitudes, on trouvera que cette partie du discours nous donne en général le caractère de Christ Lui-même. Ces béatitudes supposent deux choses : la possession à venir de la terre d’Israël par les débonnaires ; et la persécution du résidu fidèle, vraiment juste dans ses voies et qui affirmait les droits du vrai Roi (le ciel étant proposé à ce résidu comme espérance pour soutenir son cœur)[21].

Ce sera là en effet la position du résidu aux derniers jours avant l’introduction du royaume. Moralement il en était ainsi en rapport avec Israël, au temps des disciples du Seigneur, la partie terrestre du royaume étant suspendue. En vue du ciel, les disciples sont envisagés comme témoins au milieu d’Israël ; mais — en même temps que la seule chose conservatrice de la terre — ils étaient en témoignage au monde. Les disciples ainsi sont envisagés comme étant en rapport avec Israël, mais en même temps comme témoins devant le monde de la part de Dieu (le royaume étant en vue, mais pas encore établi). Le rapport avec les derniers jours est évident ; néanmoins le témoignage des disciples alors avait moralement ce caractère. Seulement l’établissement du royaume terrestre a été suspendu, et l’Église, qui est céleste, a été introduite. Le chapitre 5, 25 fait évidemment allusion à la position d’Israël au temps de Christ. Israël, de fait, reste captif, en prison, jusqu’à ce qu’il ait reçu son plein châtiment ; alors il en sortira.

Le Seigneur parle et agit toujours comme homme obéissant, mû et dirigé par le Saint Esprit ; mais on voit de la manière la plus frappante dans l’évangile de Matthieu, qui est Celui qui agit ainsi ; et c’est ce qui donne au royaume des cieux son vrai caractère moral. Jean le baptiseur pouvait annoncer le royaume des cieux comme changement d’économie, mais son ministère était terrestre. Christ également pouvait annoncer cette même vérité (et ce changement d’économie était de toute importance), mais en Lui il y avait plus que cela. Il était du ciel, le Seigneur qui venait du ciel. En parlant du royaume des cieux, Il parlait de la profonde et divine abondance de Son cœur. Personne n’avait été dans le ciel, sinon Celui qui en était descendu, le Fils de l’homme qui était dans le ciel (Jean 3, 13). Ainsi, en parlant du ciel, Jésus disait ce qu’Il savait, et rendait témoignage de ce qu’Il avait vu. Cette vérité, comme elle est présentée dans Matthieu, se réalisait de deux manières. Ce n’était plus un gouvernement terrestre selon la loi ; Jéhovah le Sauveur, Emmanuel était là. Pouvait-Il être autre que céleste dans son caractère, dans l’esprit, dans les principes essentiels de toute Sa vie ?

De plus, lorsque Christ a commencé Son ministère public et qu’Il a été scellé du Saint Esprit, le ciel Lui a été ouvert. Il a été identifié avec le ciel comme homme scellé du Saint Esprit sur la terre. Ainsi Il était l’expression continuelle de l’esprit, de la réalité du ciel. Ce n’était pas encore l’exercice de la puissance judiciaire faisant valoir ce caractère contre tout ce qui s’y opposait. C’était la manifestation de ce caractère en patience, malgré l’opposition de tout ce qui L’entourait et l’incapacité de Ses disciples pour le comprendre. Ainsi, dans le sermon sur la montagne, nous trouvons la description de ce qui convient au royaume du ciel, et même l’assurance d’une récompense dans le ciel à ceux qui souffriront pour Christ sur la terre. Cette description, comme nous l’avons vu, est essentiellement celle du caractère de Christ Lui-même. C’est ainsi qu’un cœur céleste s’exprime sur la terre. Si le Seigneur enseignait ces choses, c’est parce qu’Il les aimait, parce qu’Il en était la réalité et qu’Il les savourait. Étant le Dieu du ciel, rempli, comme homme, du Saint Esprit sans mesure, Son cœur était parfaitement en rapport avec un ciel qu’Il connaissait parfaitement. C’est pourquoi Il termine par ces mots la description du caractère que devaient revêtir Ses disciples : « Vous, soyez donc parfaits, comme votre Père céleste est parfait » (5, 48). Toute leur conduite devait être en rapport avec leur Père céleste.

Plus nous comprenons la gloire divine de Jésus, et la manière dont Il était en rapport avec le ciel comme homme, mieux aussi nous saisissons ce qu’était pour Jésus le royaume des cieux au point de vue de ce qui convenait à ce royaume. Lorsque ce royaume sera établi plus tard en puissance, le monde sera gouverné d’après ces principes, quoiqu’ils ne soient pas, à proprement dire, les principes du monde. Le résidu aux derniers jours, je n’en doute pas, trouvant toutes choses autour de lui contraires à la fidélité, et voyant toute espérance juive déchoir devant ses yeux, sera forcé de regarder plus haut et revêtira de plus en plus ce caractère qui, s’il n’est pas céleste, est au moins tout à fait conforme à Christ[22].

Il y a deux choses qui se rattachent à la présence des foules, au verset 1. — Premièrement le moment exigeait que le Seigneur donnât une vraie idée du caractère de Son royaume, puisque déjà Il attirait la foule après Lui. Sa puissance se faisant sentir, il importait de faire connaître Son caractère. D’un autre côté, cette foule qui suivait Jésus était un piège pour les disciples ; et le Seigneur leur fait comprendre le contraste complet qui existait entre l’effet que pouvait produire sur eux cette foule, et le véritable esprit qui devait les gouverner. Ainsi, plein Lui-même de ce qui était vraiment bon, Il met immédiatement en avant ce qui remplissait Son propre cœur. C’était le vrai caractère du résidu, qui en général ressemblait à Christ en cela. Il en est ainsi souvent dans les Psaumes. Le sel de la terre est autre chose que la lumière du monde. La terre, il me semble, exprime ici ce qui déjà faisait profession d’avoir reçu la lumière de la part de Dieu — ce qui était en relation avec Lui en vertu de cette lumière — ayant revêtu devant Lui une forme définie. Les disciples de Christ étaient le principe conservateur sur la terre. Ils étaient la lumière du monde qui ne possédait pas cette lumière. Ce devait être leur position malgré eux. C’était l’intention de Dieu qu’ils fussent la lumière du monde, et on n’allume pas une lumière pour la cacher.

Tout ceci suppose la possibilité de l’établissement du royaume dans ce monde, mais l’opposition de la plupart des hommes à cet établissement. Il n’est pas question de la rédemption du pécheur, mais de la réalisation du caractère qui était propre à une place dans le royaume de Dieu ; place que le pécheur devait chercher pendant qu’il était en chemin avec sa partie adverse, de peur d’être livré au juge, et cela est réellement arrivé au Juif.

En même temps, les disciples sont placés individuellement en rapport avec le Père — le second grand principe du discours, la conséquence de ce que le Fils était là — et Jésus leur présente quelque chose de plus excellent que leur position de témoignage pour le royaume. Les disciples devaient, eux, agir en grâce, comme agissait leur Père ; et leur prière devait chercher un ordre de choses où tout répondrait moralement au caractère et à la volonté de leur Père. « Que ton nom soit sanctifié ; que ton règne vienne »[23] ; c’est-à-dire que tout réponde au caractère du Père, que tout soit l’effet de Sa puissance. « Que ta volonté soit faite, comme dans le ciel, aussi sur la terre », c’est l’obéissance parfaite (6, 9-10). Toutes choses soumises à Dieu dans les cieux et sur la terre, tel sera le résultat accompli, jusqu’à un certain point, par l’intervention de Christ dans le millénium ; absolument accompli lorsque Dieu sera tout en tous. En attendant, la prière exprime la dépendance journalière, le besoin de pardon, le besoin d’être gardé de la puissance de l’ennemi, le désir de ne pas être criblé par lui comme dispensation de Dieu, ainsi que Job et Pierre l’ont été, et d’être délivré du mal.

C’est encore une prière en relation avec la position du résidu ; elle passe par-dessus l’économie de l’Esprit, par-dessus même ce qui est propre au millénium comme royaume terrestre, afin d’exprimer les justes désirs du résidu, et de parler de son état et de ses dangers, jusqu’à ce que vienne le royaume du Père. Beaucoup de ces principes sont toujours vrais, car nous sommes dans le royaume, et nous devons en esprit en manifester les traits ; mais l’application spéciale et littérale de ce passage est bien celle que j’ai indiquée. Les disciples sont mis en relation avec le Père dans la réalisation de Son caractère, qui devait reluire en eux, en vertu de cette relation, leur faisant souhaiter l’établissement de Son royaume et surmonter les difficultés d’un monde ennemi, se gardant contre les ruses de l’ennemi, et accomplissant la volonté du Père. C’était Jésus qui pouvait le leur communiquer. Ainsi Jésus passe de la loi[24], reconnue comme venant de Dieu, à l’accomplissement de cette loi lorsqu’elle sera, pour ainsi dire, absorbée dans la volonté de Celui qui l’avait donnée, ou accomplie dans ses intentions par Celui qui seul pouvait le faire dans quelque sens que ce fût.

Chapitre 8. — Ici, le Seigneur commence au milieu d’Israël Sa vie patiente de témoignage, vie qui s’est terminée par Son rejet de la part du peuple que Dieu avait si longtemps gardé pour Lui et pour leur propre bénédiction.

Le Seigneur avait annoncé le royaume, mis en évidence dans tout le pays Sa puissance, déclaré son caractère ainsi que l’esprit de ceux qui devaient entrer dans ce royaume.

Mais Ses miracles[25] portent toujours, ainsi que tout l’évangile, le caractère de Sa position au milieu des Juifs et des relations de Dieu avec eux, jusqu’à Son rejet. Il est Jéhovah, mais l’homme obéissant à la loi, faisant prévoir l’entrée des Gentils dans le royaume (son établissement en mystère dans le monde), prédisant l’érection de l’Église, de l’Assemblée sur ce fondement : Lui reconnu comme Fils du Dieu vivant, et le royaume en gloire ; et portant sur Son cœur, avec une patience parfaite, le fardeau d’Israël, tout en montrant, comme effet de Sa présence, la perversité de ce peuple[26]. C’est Jéhovah présent en bonté d’une manière extérieure : étonnante vérité !

Nous trouvons d’abord la guérison du lépreux. L’Éternel seul pouvait guérir le lépreux par Sa bonté souveraine (voyez Lév. 14). Ici Jésus fait de même. « Si tu veux, dit le lépreux, tu peux » ; « Je veux », répond le Seigneur (8, 2). Mais en même temps Jésus montre dans Sa personne ce qui repousse toute possibilité de souillure — ce qui est au-dessus du péché — aussi bien que la plus parfaite condescendance envers celui qui est souillé. Il touche le lépreux, en disant : « Je veux, sois net » (v. 3). On voit la grâce, la puissance, la sainteté incorruptible de Jéhovah descendre, en la personne de Jésus, dans la plus grande proximité du pécheur, le touchant, pour ainsi dire. C’était bien « l’Éternel qui te guérit »[27] (Ex. 15, 26). En même temps Jésus se cache et ordonne à celui qui venait d’être guéri, d’aller vers les sacrificateurs selon l’ordonnance de la loi et d’offrir son offrande. Il ne sort pas de sa place de Juif soumis à la loi ; Jéhovah était là en bonté.

Mais, dans le cas suivant, nous trouvons (v. 5 et suiv.) un Gentil qui, par la foi, jouit du plein effet de la puissance que cette foi attribuait à Jésus, donnant occasion au Seigneur de faire ressortir cette solennelle vérité que beaucoup de ces pauvres Gentils viendraient dans le royaume des cieux s’asseoir avec les pères, honorés des Juifs comme souches des héritiers de la promesse, tandis que les enfants du royaume seraient dans les ténèbres de dehors. En effet, la foi de ce centenier reconnaissait une puissance divine en Jésus, puissance qui devait, par la gloire de Celui qui la possédait, non pas abandonner Israël, mais ouvrir la porte aux Gentils, et enter sur l’olivier de la promesse les branches de l’olivier sauvage à la place de celles qui en seraient retranchées. La forme sous laquelle ces choses s’accompliraient dans l’Assemblée n’était pas alors en question.

Jésus n’abandonne pas encore Israël. Il entre dans la maison de Pierre et guérit sa belle-mère. Il fait de même envers tous les malades qui se pressent le soir autour de la maison, quand le sabbat était passé. Il les guérit ; les démons sont chassés, en sorte que la prophétie d’Ésaïe s’accomplit : « Lui-même a pris nos langueurs et a porté nos maladies » (És. 53, 4). Jésus se plaçait de cœur sous le poids de tout le malheur qui pesait sur Israël pour le soulager et le guérir. C’est toujours Emmanuel qui a de la sympathie pour leurs souffrances et est en détresse dans toutes leurs détresses. Mais Il vient avec cette puissance qui montre qu’Il est capable de les délivrer.

Les trois cas de guérison dont nous venons de parler montrent le caractère du ministère de Jésus d’une manière claire et frappante. Il se cache, car jusqu’au moment où Il devait montrer le jugement aux Gentils Il n’élève pas Sa voix dans les rues. C’est la colombe qui est sur Lui. Les manifestations de Sa puissance attirent les hommes auprès de Lui ; mais Il ne s’y méprend pas et ne s’éloigne jamais dans Son esprit de la place qu’Il a prise. Il est le méprisé et le rejeté des hommes, Il n’a pas où reposer Sa tête ; les renards et les oiseaux ont sur la terre plus de place que Lui, que nous avons vu paraître, il y a un moment, comme l’Éternel, reconnu du moins par les malheureux aux besoins desquels Il ne refuse jamais de répondre. Par conséquent, tout homme qui veut suivre Jésus doit renoncer à tout, pour être le compagnon du Seigneur, qui ne serait pas venu sur la terre si tout n’était pas en question, ni sans un droit absolu, quoique ce fût en même temps dans un amour qui ne pouvait s’occuper que de Sa mission et de la nécessité qui L’avait amené là.

Le Seigneur sur la terre était tout ou rien. Cela, il est vrai, devait se faire sentir moralement dans ses effets, par la grâce qui, agissant par la foi, attachait le croyant à Lui par un lien ineffable. Autrement, le cœur n’eût pas été moralement mis à l’épreuve ; mais il n’en était pas moins vrai pour cela qu’Il était Lui-même présent devant eux. Par conséquent les preuves en étaient là : le vent et la mer auxquels, aux yeux des hommes, le Seigneur semblait exposé, obéissaient à l’instant à Sa voix — répréhension frappante de l’incrédulité qui L’avait réveillé de Son sommeil, et qui avait supposé qu’il était possible aux vagues de L’engloutir, et avec Lui les conseils et la puissance de Celui qui avait créé les vents et les flots !

Il est évident que cet orage avait été permis pour mettre la foi des disciples à l’épreuve, et faire ressortir la dignité de la personne du Seigneur. Si l’ennemi a été l’instrument pour le produire, il n’a réussi qu’à donner au Seigneur l’occasion de manifester Sa gloire. Tel est toujours le cas pour Christ et pour nous quand la foi se trouve.

Or la réalité de cette puissance et la manière dont elle opérait ressortent fortement de ce qui suit (8, 28 et suiv.).

Le Seigneur débarque dans le pays des Gergéséniens. La puissance de l’ennemi se déploie là dans toutes ses horreurs. Si l’homme auquel le Seigneur était venu en grâce, ne Le connaissait pas, les démons connaissaient leur juge dans la personne du Fils de Dieu. L’homme était sous leur pouvoir. La crainte qu’ils avaient des tourments du jugement au dernier jour est appliquée dans l’esprit de l’homme à la présence immédiate du Seigneur : « Es-tu venu ici avant le temps pour nous tourmenter ? ». Les esprits méchants agissent sur l’homme par la frayeur de leur puissance ; ils n’en ont aucune si on ne les craint pas. Mais c’est la foi seule qui ôte à l’homme cette frayeur. Je ne parle pas des convoitises sur lesquelles ils agissent, ni des ruses de l’ennemi, mais de sa puissance. « Résistez au diable, et il s’enfuira de vous ». Ici, les démons désirent manifester la réalité de leur puissance, et le Seigneur le permet, afin qu’il soit évident que dans ce monde il n’est pas simplement question de l’homme bon ou méchant, mais aussi de ce qui est plus fort que l’homme. Les démons entrent dans les pourceaux et ceux-ci périssent dans les eaux. Triste réalité, clairement démontrée ! Il ne s’agissait ni de simple maladie, ni de convoitise, mais de démons ! Mais, grâce à Dieu, il s’agissait aussi de quelqu’un qui, tout en étant homme sur la terre, était plus puissant que les démons. Ils sont forcés de reconnaître la puissance de Celui qui est là, et en appellent à cette puissance, sans idée de lui résister. Dans la tentation au désert, Satan avait été vaincu. Jésus délivre complètement l’homme que les démons opprimaient de leur puissance malfaisante. Devant Lui, leur force était nulle. Jésus aurait pu, s’il n’avait été question que de cela, délivrer le monde de tout le pouvoir de l’ennemi et de tous les maux de l’humanité. L’homme fort était lié, le Seigneur pillait ses biens. Mais la présence de Dieu, de Jéhovah, inquiète le monde plus que la puissance de l’ennemi pour dominer et dégrader le corps et l’esprit. L’empire de l’ennemi sur le cœur — empire trop paisible et trop peu aperçu, hélas ! — est plus puissant que sa force. Sa force succombe devant la parole de Jésus ; mais la volonté de l’homme accepte le monde tel qu’il est, gouverné par l’influence de Satan. Toute la cité, témoin de la délivrance du démoniaque et du pouvoir de Jésus qui se trouve là, supplie le Seigneur de s’en aller. Triste image de l’histoire du monde ! Le Seigneur est venu ici-bas avec puissance pour délivrer le monde — l’homme — de toute la puissance de l’ennemi, mais le monde ne L’a pas voulu. L’homme était moralement éloigné de Dieu, et non pas seulement soumis à l’esclavage de l’ennemi. L’homme se soumettait à son joug, il s’y était habitué ; il ne voulait pas de la présence de Dieu.

Je ne doute pas que ce qui est arrivé aux pourceaux ne soit une image de ce qui est arrivé aux Juifs impies et profanes qui ont rejeté le Seigneur Jésus. Il n’y a rien de plus frappant que la manière dont une personne divine, Emmanuel, quoique un homme en grâce, est manifestée dans ce chapitre.

Chapitre 9. — Tandis que le Seigneur agit selon le caractère et la puissance de Jéhovah (comme Il est présenté au psaume 103) : « C’est lui qui pardonne toutes tes iniquités, qui guérit toutes tes infirmités » ; c’est la grâce actuelle, envers Israël, dans laquelle Il vint, qui est présentée. Ce chapitre donne le caractère de Son ministère, comme le précédent présente la dignité de Sa personne et la valeur de ce qu’Il était. Le Seigneur se présente à Israël comme son vrai rédempteur et libérateur. Pour démontrer Son droit (auquel l’incrédulité s’opposait déjà) d’être ainsi en bénédiction à Israël et de lui pardonner toutes ses iniquités, qui élevaient une barrière entre lui et son Dieu, Jésus accomplit l’autre partie du verset 3 du psaume 103, « et guérit toutes ses infirmités ». Beau et précieux témoignage de bonté envers Israël, et en même temps démonstration de la gloire de Celui qui se trouvait au milieu de Son peuple ! Dans le même esprit, comme Il avait pardonné et guéri, Il appelle le publicain et entre dans sa maison, car Il n’était pas venu appeler des justes, mais des pécheurs.

Il nous reste maintenant à examiner une autre partie de l’enseignement de l’évangile : le développement de l’opposition des incrédules, spécialement des docteurs et des religionistes, et le développement du rejet de l’œuvre et de la personne du Seigneur.

L’idée, le tableau de ce qui est arrivé nous a déjà été présenté dans le cas du démoniaque de Gergésa — la puissance de Dieu présente pour délivrer entièrement Son peuple, et le monde s’il la recevait — cette puissance est reconnue par les démons comme étant celle qui les jugerait et les chasserait plus tard, et est manifestée en bénédiction à tous les Gergéséniens ; mais ils la rejettent, parce qu’ils ne veulent pas d’une telle puissance au milieu d’eux ; ils ne veulent pas de la présence de Dieu.

Après cela commence le récit des détails de ce rejet et son caractère. Remarquez que le chapitre 8, 1-27, nous décrit la manifestation de la puissance du Seigneur, puissance qui est vraiment celle de Jéhovah sur la terre. Depuis le verset 28, il nous montre l’accueil que cette puissance a trouvé dans le monde, et l’influence qui y régnait, soit comme puissance, soit moralement, dans le cœur des hommes.

Nous arrivons donc au développement historique du rejet de cette intervention de Dieu sur la terre.

La foule glorifie Dieu qui avait donné une telle puissance à un homme. Jésus accepte cette position. Il était homme ; la foule voyait cet homme et reconnaissait la puissance de Dieu, sans savoir cependant comment réunir ces deux idées dans la personne de Jésus.

La grâce qui dédaigne les prétentions de l’homme à la justice, est maintenant mise en évidence.

Matthieu le péager est appelé, car Dieu regarde au cœur, et la grâce appelle les vases d’élection.

Le Seigneur annonce la pensée de Dieu à cet égard et Sa propre mission (v. 13) : Il est venu appeler les pécheurs ; Il veut la miséricorde. C’était Dieu en grâce, et non pas l’homme, avec sa prétendue justice, comptant sur ses mérites.

Jésus (v. 14 et suiv.) donne ensuite deux raisons qui rendent impossible de concilier Sa marche avec les exigences des pharisiens. Comment les disciples pouvaient-ils jeûner lorsque l’époux était là ? Quand le Messie sera parti, ils en auront l’occasion. D’ailleurs il est impossible d’introduire les nouveaux principes et la nouvelle puissance de Sa mission dans les vieilles formes pharisaïques.

Ainsi nous avons la grâce envers les pécheurs, mais (la grâce étant rejetée) il est donné tout de suite une preuve plus grande que le Messie, Jéhovah, était là et qu’Il s’y trouvait en grâce.

Invité à relever une jeune fille de son lit de mort, Jésus se rend à l’invitation. Sur son chemin, une pauvre femme, qui avait déjà employé inutilement tous les moyens de guérison, est guérie instantanément en touchant le pan de Sa robe.

Ce récit nous donne les deux points de vue sous lesquels se présente la grâce manifestée en Jésus. Christ est venu réveiller Israël mort ; Il le fera plus tard dans toute l’étendue de ce mot. En attendant, si au milieu de la foule qui accompagnait le Christ, quelqu’un Le saisissait par la foi, il était guéri, quelque désespéré que fût son état. Et ce fait, arrivé en Israël, quand Jésus y était, est vrai, au fond, de nous aussi. La grâce en Jésus est une puissance qui ressuscite et qui guérit. Ainsi Il ouvrait les yeux, en Israël, à ceux qui Le reconnaissaient comme Fils de David et croyaient à Sa puissance pour répondre à leur besoin. Il chassait aussi les démons et rendait la parole aux muets (v. 27 et suiv.).

Or Jésus ayant opéré ces actes de puissance en Israël, de sorte que le peuple, pour ce fait, les reconnaissait avec admiration, les pharisiens, la partie la plus religieuse de la nation, attribuent cette puissance au prince des démons. C’est là l’effet de la présence du Seigneur sur les chefs du peuple, jaloux de Sa gloire manifestée ainsi au milieu de ceux sur lesquels ils exerçaient leur influence. Mais cela n’interrompt nullement Jésus dans Sa carrière de bienfaisance. Il peut encore rendre témoignage au milieu du peuple. Malgré les pharisiens Sa patiente bonté trouve encore à s’exercer. Il continue à prêcher et à guérir. Il a compassion du peuple qui était comme des brebis qui n’ont pas de berger et moralement abandonné à lui-même. Il voit encore que la moisson est grande et qu’il y a peu d’ouvriers. C’est-à-dire qu’Il voit encore toutes les portes ouvertes pour s’adresser au peuple ; et Il passe par-dessus la méchanceté des pharisiens. Aussi longtemps que Dieu Lui donne accès auprès du peuple, le Seigneur continue Son travail d’amour.

Résumons ce que nous trouvons dans ce chapitre, c’est-à-dire la grâce développée en Israël. D’abord, la grâce guérissant et pardonnant, comme dans le psaume 103. Ensuite, la grâce venue pour appeler les pécheurs, non les justes ; l’époux était là, et la grâce en puissance ne pouvait être mise dans les outres juives et pharisiennes ; c’était nouveau même à l’égard de Jean le baptiseur. Christ vient en réalité pour donner la vie aux morts, non pour guérir, mais quiconque alors Le touchait par la foi — car il y en avait de tels — était guéri dans le chemin. Comme Fils de David, Il ouvre les yeux pour qu’on voie, et Il ouvre la bouche muette de celui que le diable tenait en son pouvoir. Tout est rejeté avec blasphème par les pharisiens propres justes. Mais la grâce voit la foule comme n’ayant point de berger ; et pendant que le portier tient la porte ouverte, Il ne cesse de chercher et de secourir les brebis.

Chapitre 10. — Cependant, quoiqu’Il ne cherchât pas Sa propre gloire, Il avait la conscience de l’iniquité qui gouvernait le peuple. Ayant recommandé à Ses disciples de demander que des ouvriers fussent envoyés dans la moisson, Il commence à agir selon ce désir. Il appelle ses douze disciples, Il leur communique le pouvoir de chasser les démons et de guérir les malades et les envoie aux brebis perdues de la maison d’Israël.

On voit, dans cette mission des douze, combien les voies de Dieu envers Israël font le sujet de cet évangile. Les disciples devaient annoncer à ce peuple, et à lui exclusivement, l’approche du royaume, en exerçant en même temps la puissance qu’ils avaient reçue : témoignage éclatant rendu à Celui qui était venu, et qui pouvait, non seulement opérer Lui-même des miracles, mais conférer à d’autres aussi le pouvoir d’en faire. À cet effet, Jésus donne à Ses disciples l’autorité sur les démons. C’est bien là ce qui caractérise le royaume : l’homme guéri de tout mal, et le démon chassé. C’est pourquoi les miracles sont appelés (Héb. 6, 5) « les miracles du siècle à venir »[28].

Les disciples devaient aussi, quant à leurs besoins, dépendre entièrement de Celui qui les envoyait. Emmanuel était là. Si les miracles étaient pour le monde une preuve de la puissance de leur Maître, le fait qu’ils ne manquaient de rien devait être pour leur cœur une preuve de cette puissance.

L’ordonnance a été abrogée pour le temps du ministère des disciples qui a suivi le départ de Jésus de ce monde (voyez Luc 22, 35-37). Ce qu’Il leur donne ici (Matt. 10) tient à Sa présence comme Messie, comme Jéhovah Lui-même sur la terre. Aussi la réception ou le renvoi de Ses messagers décidaient du sort de ceux auprès desquels ils étaient envoyés. Les rejeter, c’était rejeter le Seigneur, Emmanuel, Dieu avec Son peuple[29].

En effet, Jésus envoyait Ses disciples comme des brebis au milieu des loups. Ils avaient besoin de la prudence des serpents et devaient montrer la simplicité des colombes ; qualités rarement réunies, et qui ne se rencontrent que dans ceux qui, par l’Esprit du Seigneur, sont sages quant au bien, et simples quant au mal.

Si les disciples n’étaient pas en garde contre les hommes (triste témoignage à rendre à ceux-ci), ils ne pouvaient que souffrir ; mais battus de verges, amenés devant les sanhédrins, les gouverneurs et les rois, toutes ces tribulations deviendraient pour eux un témoignage, un moyen divin de présenter l’évangile du royaume aux rois et aux princes, sans en altérer le caractère et sans l’accommoder au monde ou mêler les disciples de Jésus aux usages et à la fausse grandeur de ce monde. Au reste, de pareilles circonstances mettaient leur témoignage beaucoup plus en évidence que ne l’aurait fait l’association avec les grands de la terre. Et pour accomplir ce témoignage, le Seigneur accorderait aux siens cette puissance et cette direction de l’Esprit de leur Père qui ferait de leurs paroles, non les leurs, mais celles de Celui qui les inspirait (v. 19-20).

Ici de nouveau, la relation des disciples avec leur Père, relation qui caractérise si évidemment le sermon sur la montagne, devient la base de leur capacité pour le service qu’ils devaient accomplir. Remarquons que ce témoignage n’était adressé qu’à Israël ; seulement, Israël étant placé depuis Nebucadnetsar sous le joug des Gentils, le témoignage parviendrait jusqu’à leurs chefs.

Or ce témoignage devait susciter une opposition qui romprait tout lien de famille et réveillerait une haine qui n’épargnerait pas la vie des êtres les plus chers. Celui qui persévérerait au travers de tout serait sauvé (v. 21-22). Néanmoins, le cas était urgent. Ils ne devaient pas résister, mais, si l’opposition prenait la forme de persécution, ils devaient fuir et prêcher l’évangile ailleurs, car, avant qu’ils eussent pu parcourir les villes d’Israël, le Fils de l’homme serait venu[30]. Ils devaient annoncer le royaume. Jéhovah Emmanuel était là au milieu de Son peuple, et les chefs du peuple avaient appelé le maître de la maison Béelzébul. Cela n’avait pas arrêté le témoignage de Jésus, mais il caractérisait très fortement les circonstances dans lesquelles ce témoignage devait être rendu. Il envoie Ses disciples en les avertissant de cet état de choses, pour maintenir aussi longtemps que possible leur témoignage au milieu de Son peuple bien-aimé. Ce témoignage était rendu dans ce temps-là ; et il est possible de le rendre, si les circonstances le permettent, jusqu’à ce que le Fils de l’homme arrive pour exécuter le jugement ; mais alors le maître de la maison se sera levé pour fermer la porte. Le aujourd’hui du psaume 95 ne sera plus.

Israël en possession de ses villes, étant l’objet du témoignage qui nous occupe ici, ce témoignage est nécessairement suspendu lorsqu’Israël n’est plus dans sa terre. Le témoignage rendu au royaume à venir par les apôtres, au milieu d’Israël, après la mort du Seigneur, est un accomplissement de cette mission, pour autant qu’un tel témoignage a été rendu dans le pays d’Israël ; car le royaume pouvait être annoncé comme devant être établi pendant qu’Emmanuel était sur la terre, ou bien par le retour de Christ venant du ciel, ainsi que Pierre l’annonce au chapitre 3 des Actes. Et cela pouvait avoir lieu si Israël était dans son pays, même jusqu’à ce que Christ revînt. Ainsi le témoignage peut être repris en Israël, quand celui-ci se retrouve sur sa terre et si Dieu donne pour cela la puissance spirituelle qu’exige ce témoignage.

En attendant, les disciples devaient partager la position de Christ Lui-même. Si l’on a appelé le maître de la maison Béelzébul, à plus forte raison appellera-t-on ainsi les gens de Sa maison. Mais les disciples ne devaient pas craindre. C’était la portion nécessaire de ceux qui étaient pour Dieu, au milieu du peuple. Il n’y avait rien de ce qui était caché qui ne dût être révélé. Les disciples ne devaient rien retenir, mais proclamer sur les toits tout ce qui leur avait été enseigné ; car tout serait mis en lumière : leur fidélité à Dieu sous ce rapport, aussi bien que toutes les autres choses. Cela même, tout en déjouant les complots secrets de leurs ennemis, devait caractériser le chemin des disciples. Dieu qui est lumière et voit dans les ténèbres comme dans la lumière, mettrait tout en lumière, mais ils devaient alors le faire moralement. Aussi ne devaient-ils rien craindre, en accomplissant cette tâche, si ce n’est Dieu Lui-même, juste juge au dernier jour. Du reste, les cheveux de leur tête étaient comptés. Ils étaient précieux à leur Père, qui tient compte même de la mort d’un passereau. Cela ne pouvait arriver sans Lui, qui était leur Père.

Enfin, les disciples devaient être bien pénétrés de la conviction que le Seigneur n’était pas venu pour mettre la paix sur la terre ; au contraire, ce serait la division, même au sein des familles. Mais Christ devait être plus précieux aux siens qu’un père ou une mère, même que leur propre vie. Celui qui gagnerait sa vie au préjudice de son témoignage à Christ, la perdrait ; celui qui la perdrait pour l’amour de Christ, la gagnerait. Celui aussi qui recevrait ce témoignage, dans la personne des disciples, recevait Christ et, en Christ, Celui qui L’avait envoyé. Dieu étant ainsi reconnu dans la personne de Ses témoins sur la terre, accorderait à tous ceux qui les recevraient une récompense selon le témoignage qui Lui était rendu. Celui qui, reconnaissant ainsi le témoignage du Seigneur rejeté, ne donnerait qu’un verre d’eau froide, ne perdrait pas sa récompense. Dans un monde ennemi, celui qui reçoit le témoignage de Dieu, et accueille (malgré le monde) le serviteur qui porte ce témoignage, confesse réellement Dieu, aussi bien que Son serviteur. C’est tout ce que nous pouvons faire. Le rejet du Christ a fait de Lui une épreuve, une pierre de touche.

Dès cette heure, nous trouvons le jugement définitif de la nation, non pas cependant ouvertement déclaré (la chose a lieu au chapitre 12), ni dans la cessation du ministère de Christ, qui agissait, malgré l’opposition de la nation, en rassemblant le résidu, et, ce qui est plus important encore, dans la manifestation d’Emmanuel ; mais ce jugement se développe dans le caractère des discours de Jésus, dans Ses déclarations positives qui dépeignent l’état du peuple, et dans la marche du Seigneur au milieu de circonstances qui devenaient pour Lui l’occasion d’exprimer quelles étaient Ses relations avec ce peuple.

Chapitre 11. — Ayant envoyé Ses disciples pour prêcher, Jésus continue l’exercice de Son propre ministère. Le bruit de Ses travaux parvient jusqu’à Jean, dans sa prison, et Jean, dans le cœur duquel, malgré ses dons prophétiques, il restait encore quelque chose des pensées et des espérances juives, fait demander par ses disciples à Jésus, s’Il est Celui qui devait venir, ou si l’on devait encore en attendre un autre[31]. Dieu a permis cette question pour mettre chaque chose à sa place. Christ étant la parole de Dieu, dut être Son propre témoin. Il dut rendre témoignage à Lui-même, aussi bien qu’à Jean, et ne pas recevoir témoignage de Jean ; c’est ce qu’Il fit en présence des disciples de Jean. Il guérissait toutes les maladies des hommes et prêchait l’évangile aux pauvres, et les envoyés de Jean devaient porter à leur maître ce vrai témoignage de ce que Jésus était. Jean devait le recevoir. C’était par ces choses que l’homme était mis à l’épreuve. Heureux celui qui ne se scandalisait pas de la chétive apparence du Roi d’Israël. Dieu manifesté en chair ne venait pas chercher la pompe de la royauté, quoiqu’elle Lui fût due ; mais Il venait chercher la délivrance des hommes malheureux. Son œuvre révélait un caractère bien plus profondément divin, qui avait une source d’action bien autrement glorieuse que celle qui dépendait de la possession du trône de David — bien autrement glorieuse, dis-je, qu’une délivrance qui aurait mis Jean en liberté et mis fin à la tyrannie qui l’avait jeté en prison. Entreprendre ce ministère, descendre sur la scène où il s’exerçait, porter les langueurs et les fardeaux de son peuple, devait être une pierre d’achoppement pour un cœur charnel s’attendant à l’apparition d’un règne glorieux qui contenterait l’orgueil d’Israël. Mais cela n’était-il pas ainsi plus vraiment divin, plus nécessaire à l’état du peuple tel que Dieu le voyait ? Le cœur de chacun devait donc ainsi être mis à l’épreuve, pour montrer s’il appartenait à ce résidu repentant qui discernait les voies de Dieu, ou à la foule orgueilleuse qui recherchait sa propre gloire, n’ayant ni conscience exercée devant Dieu, ni sentiment de ses besoins et de sa misère.

Ayant placé Jean sous la responsabilité de la réception du témoignage qui mettait tout Israël à l’épreuve, et, de la nation en général, distinguait le résidu, le Seigneur rend témoignage à Jean, en s’adressant à la foule, et en lui rappelant de quelle manière elle avait suivi la prédication de ce dernier. Il fait voir le point précis auquel Israël était arrivé dans les voies de Dieu. L’introduction du royaume en témoignage faisait la différence entre ce qui précédait et ce qui suivait. De tous ceux qui sont nés de femme, il n’y en avait pas eu un plus grand que Jean le baptiseur, pas un qui eût été aussi près de Jéhovah, comme envoyé devant Sa face, pas un qui Lui eût rendu un témoignage plus précis, plus complet, qui eût été autant séparé de tout mal, par la puissance de l’Esprit — séparation propre à l’accomplissement d’une pareille mission au milieu du peuple de Dieu. Cependant Jean n’avait pas été dans le royaume ; celui-ci n’était pas encore établi. Or, être dans la présence de Christ, dans Son royaume, jouissant de l’effet de l’établissement de Sa gloire[32], était plus grand que tout témoignage établissant que ce royaume allait arriver.

Toutefois, depuis le temps de Jean le baptiseur, il y avait eu un changement notable. Depuis ses jours, le royaume était annoncé. Il n’était pas établi, mais prêché. C’était une chose très différente des prophéties qui parlaient d’un royaume encore à venir, tout en rappelant le peuple à la loi telle que Moïse l’avait donnée. Le baptiseur allait devant le Roi, annonçant la proximité du royaume, et sommant les Juifs à se repentir pour y entrer. Ainsi les prophètes et la loi parlaient de la part de Dieu jusqu’à Jean. La loi était la règle ; les prophètes, en maintenant la règle, fortifiaient l’espérance et la foi du résidu. L’énergie de l’Esprit poussait l’homme à faire son chemin à travers toutes les difficultés et toute l’opposition des chefs de la nation et d’un peuple aveugle, pour parvenir, coûte que coûte, au royaume d’un Roi rejeté par l’aveugle incrédulité de ceux qui auraient dû le recevoir. Il fallait — puisque le roi était venu dans l’humiliation et qu’Il avait été rejeté — il fallait cette violence pour y entrer. La porte étroite était la seule entrée.

Si la foi pouvait réellement dans ces choses pénétrer la pensée de Dieu, Jean était l’Élie qui devait venir. Qui avait des oreilles pour entendre, qu’il entendît. De fait, ce n’était que pour ceux-là.

Si le royaume avait paru dans la gloire et dans la puissance de son Chef, la violence n’aurait pas été nécessaire ; on l’aurait possédé comme l’effet assuré de cette puissance ; mais Dieu voulait qu’ils fussent mis à l’épreuve moralement. C’est ainsi encore qu’ils devaient recevoir Élie d’une manière spirituelle.

Le résultat de cette épreuve nous est donné immédiatement après, dans les paroles du Seigneur (v. 16 et suiv.), c’est-à-dire le vrai caractère de cette génération, et les voies de Dieu en rapport avec la personne de Jésus mise en évidence par Son rejet même. Les menaces de la justice et les attraits de la grâce étaient donc également perdus pour le peuple comme génération. Les enfants de sagesse, ceux qui étaient vraiment enseignés de Dieu dans leur conscience, reconnaissaient la vérité du témoignage de Jean contre eux-mêmes, et la grâce des voies de Jésus, si nécessaire pour les coupables.

Jean, séparé de l’iniquité de la nation, avait, aux yeux de cette nation, un démon. Jésus, bon envers les plus méchants, était accusé par eux de tomber dans de mauvaises voies. Cependant l’évidence était assez forte pour fléchir le cœur de villes comme Tyr ou Sodome ; et le juste reproche du Sauveur avertit la nation incrédule et perverse d’un jugement plus terrible que ce qui attendait l’orgueil de Tyr et la corruption de Sodome.

Mais c’était une épreuve pour les hommes les plus favorisés. On aurait pu demander pourquoi le message n’était pas envoyé à Tyr, ville prête à écouter, ou à Sodome, pour qu’elle échappât aux flammes qui l’ont consumée. C’est afin que l’homme soit mis à l’épreuve de toutes manières, et que les conseils parfaits de Dieu soient développés. Si Tyr et Sodome avaient abusé des avantages dont un Dieu créateur et de providence les avait comblés, les Juifs devaient manifester ce qui était dans le cœur de l’homme, eux qui possédaient toutes les promesses, et qui avaient été faits les dépositaires de tous les oracles de Dieu.

Ils s’enorgueillissaient du don, et s’éloignaient du donateur. Leur cœur aveuglé ne reconnaissait pas leur Dieu, et même Le rejetait.

Le Seigneur était sensible au mépris de Son peuple, qu’Il aimait ; mais, homme obéissant sur la terre, Il se soumettait à la volonté de Son Père qui, agissant en souveraineté, comme Seigneur des cieux et de la terre, manifestait, dans l’exercice de cette souveraineté, Sa divine sagesse et la perfection de Son caractère (v. 25 et suiv.). Jésus accepte la volonté de Son Père dans ses effets, et ainsi soumis, en voit la perfection.

Il convenait que Dieu révélât aux humbles tous les dons de Sa grâce en Jésus, Emmanuel sur la terre, et qu’Il les cachât à l’orgueil qui cherchait à les scruter et à les juger. Mais cela ouvre la porte à la gloire des conseils de Dieu.

Le fait est que la personne du Seigneur était trop glorieuse pour que l’homme la sondât ou la comprît, quoique les paroles et les œuvres de Jésus laissassent la nation sans excuse dans son refus de venir à Lui pour connaître le Père.

Jésus, soumis à la volonté de Son Père, tout sensible qu’Il fût à ce qu’il y avait de pénible pour Son cœur dans les effets de cette volonté, voit toute l’étendue de la gloire qui suivrait Son rejet.

Toutes choses étaient mises entre Ses mains de la part de Son Père. C’est le Fils qui est révélé à notre foi, le voile qui couvrait Sa gloire étant ôté, maintenant qu’Il est rejeté comme Messie. Personne ne Le connaît, sinon le Père. Qui d’entre ces orgueilleux pouvait sonder ce qu’Il était ? Celui qui avait été de toute éternité un avec le Père, et qui était devenu homme, dépassait, dans la profondeur du mystère de Son être, toute connaissance, sauf celle du Père Lui-même. L’impossibilité de connaître Celui qui s’était anéanti pour devenir homme, soutenait la certitude, la réalité de Sa divinité, que ce renoncement à soi-même aurait pu cacher aux yeux de l’incrédulité. L’incompréhensibilité d’un être, dans une forme définie, décelait l’infini qui se trouvait en Lui. Sa divinité était garantie pour la foi contre l’effet de Son humanité sur l’esprit de l’homme.

Or, si personne ne connaissait le Fils que le Père seul, le Fils, qui est vrai Dieu, était capable de révéler le Père. « Personne ne vit jamais Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, lui, l’a fait connaître » (Jean 1, 18). Personne ne connaît le Père, si ce n’est le Fils, et celui à qui le Fils voudra le révéler. Misérable ignorance, qui dans son orgueil Le rejette ! Aussi, était-ce selon le bon plaisir du Fils que cette révélation était faite. Attribut distinctif de la perfection divine ! Il était venu pour révéler le Père et Il le faisait selon Sa propre sagesse. Telle était la vérité des rapports de l’homme avec le Fils, quoique le Fils ait dû se soumettre à l’humiliation pénible du rejet de la part de Son peuple, comme dernière épreuve de son état, de l’état de l’homme.

Remarquez aussi que ce principe, cette vérité quant au Christ, ouvre la porte aux Gentils, à tous ceux qui seront appelés. Le Fils révèle le Père à qui Il veut. Il cherche toujours la gloire de Son Père. Lui seul peut Le faire connaître — Lui à qui le Père, Seigneur du ciel et de la terre, a tout donné. Les Gentils sont embrassés dans les droits conférés par ce titre, même toute famille dans les cieux et sur la terre. Christ exerce ces droits en grâce, en appelant qui Il veut à connaître le Père.

Nous trouvons donc ici la génération perverse et incrédule ; nous trouvons un résidu de la nation justifiant la sagesse de Dieu manifestée en Jean et en Jésus, en jugement et en grâce ; puis, la sentence de jugement des incrédules ; le rejet de Jésus dans le caractère selon lequel Il s’était présenté à la nation, et Sa parfaite soumission comme homme à la volonté de Son Père dans ce rejet, donnant une occasion pour la manifestation à Son âme de la gloire qui Lui était propre comme Fils de Dieu. C’était une gloire que personne ne savait connaître, comme Lui seul pouvait révéler celle du Père. De sorte que le monde qui refusait de Le recevoir était dans une complète ignorance, sauf en tant que le Fils, selon Son bon plaisir, voulait leur révéler le Père.

On voit aussi ici que la mission des disciples auprès d’Israël qui rejetait Christ, continue (avec la condition qu’Israël habite dans son pays) jusqu’à l’arrivée du Christ comme Fils de l’homme, Son titre de jugement et de gloire, comme héritier de toutes choses (c’est-à-dire jusqu’au jugement par lequel Il prend possession de la terre de Canaan, avec une puissance qui ne laisse aucune place à Ses ennemis). C’est ce titre comme héritier de toutes choses, qui est mentionné en Jean 5, Daniel 7, Psaumes 8 et 80.

Remarquons encore, au chapitre 11, comment la perversité de la génération qui avait repoussé le témoignage de Jean et celui du Fils de l’homme, venu en grâce et s’associant en bonté aux Juifs, ouvre la porte au témoignage de la gloire du Fils de Dieu et à la révélation du Père par Lui en grâce souveraine — grâce qui pouvait Le faire connaître d’une manière aussi efficace à un pauvre Gentil qu’à un Juif. Il ne s’agissait plus de la responsabilité de recevoir Celui qui était envoyé, mais de la grâce souveraine qui communiquait à qui elle voulait. Jésus connaissait l’homme, le monde, la génération qui avait joui des plus grands avantages possibles. Il n’y avait pas où poser le pied dans le bourbier fangeux de ce qui s’était éloigné de Dieu. Au milieu d’un monde de mal, Jésus restait le seul révélateur du Père, la source de tout bien. Et qui invite-t-Il ? Que donne-t-Il à ceux qui viennent ? Seule source de bénédiction et révélateur du Père, Il invite tous ceux qui sont travaillés et chargés. Peut-être ces hommes ne connaissaient-ils pas la source de toute misère, savoir l’éloignement de Dieu, le péché ? Jésus la connaissait, et seul, Il pouvait les guérir. Si c’était la conscience du péché qui pesait sur eux, tant mieux. Le monde, en tout cas, ne contentait plus leur cœur ; ils étaient misérables et, par conséquent, les objets du cœur de Jésus. De plus, Jésus leur donnerait du repos ; Il ne dit pas ici par quels moyens, Il annonce seulement le fait. L’amour du Père qui, en grâce dans la personne du Fils, cherchait les misérables, donnerait du repos (non pas seulement du soulagement ou des sympathies, mais du repos) à quiconque viendrait à Jésus. C’était la parfaite révélation du nom du Père au cœur de celui qui en avait besoin, et cela par le Fils — c’était la paix, la paix avec Dieu. Il suffisait de venir à Christ : Il se chargeait de tout et donnait du repos.

Mais il y a dans le repos un second élément. Il y a plus que la paix par la connaissance du Père en Jésus. Et il faut plus que cela ; car lors même que l’âme se trouve parfaitement en paix avec Dieu, ce monde présente au cœur bien des sujets de peines. Dans ce cas, il s’agit de la soumission, ou de la volonté propre. Christ, dans la conscience de Son rejet, dans la peine profonde que Lui faisait éprouver l’incrédulité des villes où Il avait opéré tant de miracles, Christ venait de manifester la plus entière soumission à Son Père, et y avait trouvé un repos parfait pour Son âme. Il invite à cette soumission et à ce repos ceux qui L’écoutent, ceux qui éprouvent ce besoin de repos pour leur âme. « Prenez mon joug sur vous, et apprenez de moi… », c’est-à-dire le joug d’une soumission complète à la volonté de Son Père, en apprenant de Lui comment il faut se conduire dans les peines de la vie ; car Lui, Il était « débonnaire et humble de cœur », content d’être à la dernière place par la volonté de Son Dieu. De fait, rien ne peut renverser celui qui déjà est au plus bas. C’est la place du parfait repos pour le cœur.

Chapitre 12. — Enfin, le rejet de la nation, à cause de son mépris du Seigneur, est clairement montré, aussi bien que la cessation de tous les rapports du Seigneur avec elle, pour mettre en évidence, de la part de Dieu, un système entièrement différent, c’est-à-dire le royaume sous une forme toute particulière.

Ainsi, le chapitre 11 est le grand pivot de toute l’histoire. Christ est Son propre témoin divin, et Jean le baptiseur devait Le reconnaître ainsi, comme un autre l’eût fait. Il n’est plus resté comme Messie attesté, mais comme Fils de Dieu, mais Il rend un plein témoignage à Jean. La nation avait rejeté Dieu, manifesté par des avertissements, mais en grâce aussi ; seulement, il y avait un résidu. La sagesse était justifiée par ses enfants. Alors, tout abominable que fût Son rejet, nous Le voyons s’y soumettre, comme étant la volonté du Père ; mais cela Le conduit à la conscience de Sa gloire personnelle, vrai motif de ce rejet. Toutes choses Lui étaient livrées par Son Père. Personne ne pouvait Le connaître, ni connaître le Père, à moins qu’Il ne Le révélât. Le monde entier, mis à l’épreuve par la perfection du Seigneur, a été trouvé gisant dans la méchanceté (quoiqu’il y eût un résidu épargné), mais l’homme était universellement éloigné de Dieu. Dieu a regardé des cieux pour voir, comme nous lisons, mais les fils des hommes s’étaient tous détournés ; il n’y avait point de juste, non pas même un seul. Ainsi Jésus, quand Il marchait sur la mer, se tenait seul dans un monde jugé, jugé par Son rejet ; mais maintenant, dans la souveraine grâce du Père, c’est le Fils révélant le Père, et appelant à la révélation de cette grâce en Lui-même. C’est maintenant la nouvelle position. Il avait mis l’homme à l’épreuve. Ce qu’Il était en Lui-même empêchait l’homme de Le recevoir. Or, ceux qui étaient fatigués devaient venir à Celui qui se tenait ainsi seul, et Il leur donnerait du repos. Ils devaient apprendre de Celui qui s’était ainsi soumis entièrement, et ils auraient du repos quant au monde et à tout ici-bas. Il en est ainsi de nous : quand nous nous abaissons complètement, nous entrons comme reniés, d’une manière consciente, dans la possession de nos privilèges sur un terrain céleste plus élevé.

La première circonstance dans laquelle Sa personne et le droit qu’Il possédait de mettre fin à cette économie ont été mis en question, c’est lorsque Ses disciples arrachaient des épis et les broyaient entre leurs mains, pour satisfaire leur faim. Les pharisiens les reprennent, parce que c’était un jour de sabbat. Jésus leur montre que le roi, rejeté par la malice de Saül, avait participé à ce qui n’était accordé qu’aux sacrificateurs. Le Fils de David, dans un pareil cas, pouvait bien jouir d’un privilège pareil. Au reste, Dieu agissait en grâce. Et puis, les sacrificateurs ne profanaient-ils pas le sabbat dans le temple ? Et Celui qui était plus grand que le temple était là (v. 5-6).

En outre, s’ils eussent vraiment connu les pensées de Dieu, s’ils eussent été pénétrés de l’esprit que Sa Parole déclarait Lui être agréable — « Je veux miséricorde, et non pas sacrifice » — les pharisiens n’auraient pas condamné ceux qui n’étaient pas coupables. Au reste, le Fils de l’homme est seigneur du sabbat. Il ne prend plus ici le titre de Messie, mais celui de Fils de l’homme — nom qui rendait témoignage à un nouvel ordre de choses et à une puissance plus étendue. Or, ce que le Seigneur disait, avait une grande portée, car le sabbat était le signe de l’alliance entre Jéhovah et la nation juive (Éz. 20, 12, 20), et le Fils de l’homme en disposait. Si l’on y touchait, c’en était fait de l’alliance.

La même question surgit dans la synagogue ; et le Seigneur persiste à agir en grâce et à faire du bien, tout en montrant à ceux qui L’observaient qu’ils en feraient autant pour une de leurs brebis. Ceci, quelle que fût la preuve de la puissance bienfaisante de Jésus, ne fait qu’exciter leur haine. Ils étaient enfants du meurtrier. Jésus se retire d’eux, et de grandes troupes Le suivent. Il les guérit, leur défendant de Le faire connaître. Cependant, en tout cela, Ses actions n’étaient que l’accomplissement d’une prophétie qui dessine nettement la position du Seigneur à ce moment (v. 17 et suiv.). L’heure devait venir où Il ferait éclater le jugement en victoire. En attendant, Il gardait une position d’humilité parfaite, dans laquelle la grâce et la vérité pouvaient se faire valoir à ceux qui les goûtaient et qui en avaient besoin. Mais, dans l’exercice de cette grâce et dans Son témoignage à la vérité, Jésus ne faisait rien qui faussât ce caractère d’humiliation, ni qui attirât l’attention des hommes, de manière à mettre obstacle à Sa véritable œuvre, ou même qui fît soupçonner en Lui la recherche de Son propre honneur. Cependant, l’Esprit de Jéhovah était sur Lui comme étant Son bien-aimé, Celui en qui Son âme trouvait son plaisir ; Il annoncerait le jugement aux Gentils, et les Gentils mettraient leur confiance en Son nom.

L’application de cette prophétie à Jésus, dans ce moment-là, est de toute évidence. Nous voyons comment Il se tenait sur la réserve avec les Juifs, s’abstenant quant à Lui-même de satisfaire leurs désirs charnels, et content d’être dans l’ombre, pourvu que Dieu Son Père fût glorifié. Il glorifiait Lui-même Son Père parfaitement sur la terre, en faisant le bien. Il devait bientôt être annoncé aux Gentils, soit dans l’exécution du jugement de Dieu, soit en se présentant à eux comme l’objet de leur confiance (v. 17-21).

Ce passage d’Ésaïe 42 est évidemment placé ici par le Saint Esprit, pour dessiner clairement la position du Seigneur, avant que s’ouvrent les nouvelles scènes que Son rejet nous prépare.

Le Seigneur chasse alors un démon hors d’un homme aveugle et muet (v. 22 et suiv.) — triste état peignant vraiment celui d’Israël quant à Dieu. Les foules, pleines d’admiration, s’écrient : Celui-ci serait-Il le fils de David ? Mais les religieux d’entre eux, entendant cela, jaloux du Seigneur et hostiles au témoignage de Dieu, déclarent que c’est par la puissance de Béelzébul que Jésus faisait ce miracle, scellant ainsi leur propre état, et se plaçant sous le jugement définitif de Dieu. Jésus démontre l’absurdité de leur accusation. Satan ne détruirait pas son propre royaume. Leurs propres enfants, qui prétendaient chasser les démons, jugeraient leur iniquité. Mais ce n’était pas par la puissance de Satan (et les pharisiens admettaient que les démons avaient été réellement chassés), c’était le doigt de Dieu, et le royaume de Dieu était au milieu d’eux.

Celui qui était entré dans la maison de l’homme fort pour piller ses biens, avait dû le lier auparavant (v. 29). Le fait est que la présence de Jésus mettait tout à l’épreuve ; tout se concentrait en Lui, de la part de Dieu. Emmanuel Lui-même était là ! Celui qui n’était pas avec Lui, était contre Lui ; celui qui ne rassemblait pas avec Lui, dispersait (v. 30). Tout, maintenant, dépendait de Lui seul. Il supporterait toute incrédulité à l’égard de Sa personne. La grâce ne pouvait ôter cette incrédulité, Jésus pouvait pardonner tout péché ; mais parler contre le Saint Esprit et Le blasphémer (c’est-à-dire reconnaître l’exercice d’une puissance, qui est celle de Dieu, et l’attribuer à Satan), cela ne pourrait être pardonné ; car les pharisiens admettaient que le démon était chassé (v. 24), et ce n’était qu’avec malice et de propos délibéré, avec la haine contre Dieu et les yeux ouverts, qu’ils attribuaient cette puissance à Satan. Et, pour ce blasphème, quel pardon pouvait-il y avoir ? Il n’y en avait ni dans le siècle de la loi[33], ni dans celui du Messie. Le sort de ceux qui blasphémaient ainsi était décidé. C’est ce que le Seigneur leur fait comprendre. On reconnaissait l’arbre à son fruit, et ce fruit était essentiellement mauvais. Ils étaient une race de vipères ; Jean leur en avait dit autant. Leurs paroles les condamnaient (v. 31-37). Sur ces entrefaites, les scribes et les pharisiens demandent un signe (v. 38 et suiv.). Ce n’était que de la méchanceté. Ils avaient vu assez de miracles. Ce n’était que provoquer l’incrédulité des autres.

Cette demande donne au Seigneur l’occasion de prononcer le jugement de cette génération.

Il ne serait donné d’autre signe que celui de Jonas à cette génération méchante. Comme Jonas était resté trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson, ainsi le Fils de l’homme resterait trois jours et trois nuits au sein de la terre. Mais alors, hélas ! Christ était déjà rejeté.

Au jour du jugement, les gens de Ninive condamneraient cette génération par leur conduite, car ils s’étaient repentis à la prédication de Jonas ; et il y avait là quelqu’un de plus grand que Jonas. La reine du Midi aussi rendait le même témoignage contre la méchanceté de cette génération perverse. Le cœur de la reine, attiré par le bruit de la sagesse de Salomon, l’avait conduite auprès de lui, depuis les bouts de la terre ; et un plus grand que Salomon était là ! Ces pauvres Gentils ignorants comprenaient mieux la sagesse de Dieu dans Sa Parole, soit par le prophète, soit par le roi, que Son peuple bien-aimé, lors même que le grand Roi et Prophète fût là.

Et c’est ici le jugement de Dieu : le mauvais esprit (l’esprit d’idolâtrie) qui était sorti du peuple, ne trouvant pas de repos loin d’Israël (Israël, hélas ! sa vraie maison, tandis qu’il aurait dû être celle de Dieu), reviendrait avec sept esprits plus méchants que lui. Ils trouveraient la maison vide, balayée et ornée ; et sa dernière condition serait pire que la première (v. 45).

Quel jugement solennel du peuple que celui-ci — que ceux au milieu desquels Jéhovah avait marché devinssent la demeure d’un esprit immonde, d’une surabondance d’esprits immondes ! Car il n’y a pas seulement sept démons, nombre complet, mais avec ceux-ci (qui pousseraient le peuple à toute folie contre Dieu et contre ceux qui honoreraient Dieu, les conduisant ainsi à leur propre destruction) cet autre esprit immonde aussi, qui replongerait le peuple dans la misérable idolâtrie à laquelle il avait échappé ! Le jugement d’Israël était prononcé.

Enfin, Jésus rompt publiquement les liens qui subsistaient naturellement entre Lui et le peuple selon la chair (v. 46-50), en n’acceptant comme siens que ceux qui étaient formés par la Parole de Dieu, et manifestés par l’accomplissement de la volonté de Son Père qui était aux cieux. Il ne reconnaissait comme Ses parents que ceux qui étaient formés d’après le modèle du sermon sur la montagne.

Ses actes et Ses paroles, à dater de ce moment, rendent témoignage à l’œuvre nouvelle qu’Il faisait réellement sur la terre. Il quitte (chap. 13) la maison et s’assied au bord du lac. Il prend une nouvelle position en dehors d’Israël, pour annoncer à la multitude ce qui était réellement Son œuvre. Un semeur sortit pour semer.

Le Seigneur ne cherche plus du fruit dans Sa vigne. Il avait été nécessaire, selon les relations de Dieu avec Israël, que le Seigneur cherchât ce fruit ; mais Son vrai service, Il le savait bien, était, non pas de trouver du fruit parmi les hommes, mais d’apporter à l’homme ce qui pouvait produire du fruit.

Il est important de remarquer ici que le Seigneur parle de l’effet évident et extérieur de Son œuvre de semeur. La seule occasion où Il exprime Son jugement quant à la cause intérieure du résultat, c’est lorsqu’Il dit : « Ils n’avaient pas de racine » ; et ici même Il se borne à énoncer le fait. Les doctrines relatives à l’opération divine nécessaire pour avoir du fruit ne sont pas traitées ici. C’est le semeur qui est en scène, ainsi que le résultat de son œuvre, et non ce qui fait germer la semence dans la terre. Dans chacun des cas, sauf le premier, un certain effet est produit.

Le Seigneur donc nous est présenté ici comme commençant une œuvre indépendante de toute relation précédente de Dieu avec les hommes, apportant avec Lui la semence de la Parole qu’Il sème dans le cœur par Son ministère. Là où cette Parole demeure, là où elle est comprise, où elle n’est ni étouffée, ni desséchée, elle produit des fruits pour la gloire du Seigneur et pour le bonheur et le profit de l’homme qui porte du fruit.

Au verset 11, le Seigneur montre pourquoi Il parle énigmatiquement à la foule. La distinction est maintenant définitivement établie entre le résidu et la nation : celle-ci était sous le jugement d’aveuglement prononcé par le prophète Ésaïe. Heureux étaient les yeux des disciples qui voyaient l’Emmanuel, le Messie, objet des espérances et des désirs de tant de prophètes et d’hommes justes ! Tout cela montre le jugement, et un résidu appelé et mis à part[34].

J’ajouterai ici quelques remarques sur le caractère des personnes dont le Seigneur parle dans la parabole. Lorsque la Parole est semée dans un cœur qui ne la comprend pas, lorsqu’elle ne produit aucune relation d’intelligence, de sentiment ou de conscience entre le cœur et Dieu, l’ennemi l’ôte : elle ne reste pas dans le cœur. Celui qui l’a entendue n’en est pas moins coupable : ce qui avait été semé dans le cœur était adapté à tous les besoins, à la nature et à l’état de l’homme.

La réception immédiate de la Parole avec joie, dans le cas suivant, tend plutôt à démontrer que le cœur ne gardera pas la Parole, car alors il n’est guère probable que la conscience soit atteinte. Une conscience atteinte par la Parole rend l’homme sérieux ; il se voit devant Dieu, ce qui est toujours une chose sérieuse, quel que soit l’attrait de la grâce de Dieu, ou l’espoir qu’inspire Sa bonté. Si la conscience n’a pas été atteinte, il n’y a pas de racine. La Parole a été reçue pour la joie qu’elle a communiquée ; lorsqu’elle amène la tribulation, on l’abandonne. Quand la conscience a été déjà exercée, l’évangile produit tout de suite de la joie ; mais, quand elle ne l’a pas été, il réveille la conscience, s’il y a eu un travail réel. Dans le premier cas, il répond aux besoins qui existent déjà, et les satisfait. Dans le second, il les crée.

Hélas ! l’histoire de chaque jour est la triste explication de la troisième classe ! Il n’y a pas mauvaise volonté, il y a stérilité.

La vraie intelligence de la Parole n’est affirmée que de ceux qui produisent du fruit. La vraie intelligence de la Parole place une âme en rapport avec Dieu, parce que la Parole révèle Dieu — exprime ce qu’Il est. Si je la comprends, je Le connais ; et la vraie connaissance de Dieu (c’est-à-dire du Père et de Son Fils Jésus Christ) est la vie éternelle. Or, quel que soit le degré de lumière, c’est toujours Dieu ainsi révélé, dont la Parole, semée par Jésus, donne la connaissance. Ainsi, engendrés de la Parole, nous produirons dans ce monde, en diverses mesures, les fruits de la vie de Dieu. Car le sujet dont il s’agit ici, c’est l’effet dans ce monde de la réception de la vérité apportée par Jésus (non le ciel, ni ce que Dieu fait dans le cœur, pour que la semence porte du fruit).

Cette parabole ne parle pas, comme similitude, du royaume, quoique la parole semée fût celle du royaume, mais du grand principe élémentaire du service de Christ dans l’universalité de son application ; et il fut réalisé dans Sa personne et dans Son service quand Il était sur la terre, et après Son départ, quoique de plus amples sujets de grâce pussent être alors produits.

Dans les six paraboles suivantes, nous trouvons des similitudes du royaume ; et nous avons à nous souvenir que ce royaume est établi pendant le rejet du Roi[35] ; il a, par conséquent, un caractère particulier, c’est-à-dire qu’il est caractérisé par l’absence du Roi ; de plus, dans l’explication de la première parabole, nous trouvons quel est l’effet de Son retour.

Les trois premières de ces six paraboles nous présentent le royaume dans ses formes extérieures dans le monde. Elles sont adressées à la foule. Les trois dernières nous le montrent suivant l’estimation qu’en fait le Saint Esprit selon la vérité du caractère de ce royaume, comme Dieu le voit — la pensée et le conseil de Dieu en lui. Aussi sont-elles adressées aux disciples seuls. L’établissement public du royaume selon la justice et la puissance de Dieu, est aussi annoncé aux disciples dans l’explication de la parabole de l’ivraie.

Considérons premièrement la forme extérieure que ce royaume, publiquement annoncé à la foule, devait prendre.

Rappelons-nous que le Roi, c’est-à-dire le Seigneur Jésus, était rejeté sur la terre ; que les Juifs s’étaient jugés en le rejetant ; et que, la Parole de Dieu étant employée pour accomplir l’œuvre de Celui que le Père avait envoyé, le Seigneur faisait ainsi savoir qu’Il établissait le royaume non par Sa puissance, exercée en justice et en jugement, mais en rendant témoignage aux cœurs des hommes ; et que le royaume maintenant prenait un caractère se rattachant à la responsabilité de l’homme et à l’effet qui se produisait lorsque la parole de lumière était semée sur la terre, adressée aux cœurs des hommes et confiée comme système de vérité à leur fidélité et à leurs soins (Dieu toutefois maintenant toujours Son droit souverain de conserver Ses enfants et la vérité elle-même). Cette dernière partie ne fait pas le sujet de ces paraboles. Je l’ai mentionnée ici, parce qu’autrement on aurait pu supposer que tout dépendait absolument de l’homme. Dans ce cas, hélas ! tout aurait été perdu !

La parabole de l’ivraie est la première dans l’ordre (v. 24-30). Elle nous donne une idée générale de l’effet des semailles quant au royaume, ou plutôt ce qui est résulté parce que le royaume ici-bas a été confié pour le moment aux mains des hommes.

Le résultat a été que ce royaume n’a plus présenté, comme ensemble, l’apparence de l’œuvre même du Seigneur. Le Seigneur, Lui, ne sème pas de l’ivraie ; mais, par la négligence et par l’infidélité des hommes, l’ennemi a trouvé le moyen de la semer. Remarquez que « l’ivraie » ne désigne ni les païens, ni les Juifs, mais le mal opéré au milieu des chrétiens par Satan, par les mauvaises doctrines, par les mauvais docteurs et leurs sectateurs. Le Seigneur Jésus a semé. Satan, pendant que les hommes dormaient, a semé aussi. Il y a eu des judaïsants, des philosophes, des hérétiques qui tenaient des uns et des autres, ou qui s’opposaient à la vérité de l’Ancien Testament.

Cependant Christ n’avait semé que du bon grain. Mais faudra-t-il arracher l’ivraie ? Il est clair que l’état du royaume dans ce monde, pendant l’absence de Christ, dépend de la réponse à cette question, et elle sert aussi à mettre au clair cet état. Or il y avait moins de puissance encore pour porter remède à l’introduction du mal que pour prévenir ce mal. Tout était irrémédiable jusqu’à l’intervention du Roi au temps de la moisson. Le royaume des cieux sur la terre, tel qu’il est entre les mains des hommes, doit rester un système mélangé. Les hérétiques, les faux frères s’y trouvent, ainsi que le fruit de l’œuvre du Seigneur, qui rend témoignage, dans cette dernière relation de Dieu avec l’homme, de l’incapacité de l’homme de conserver dans son premier état ce qui est bon et pur. Il en a toujours été ainsi[36].

Au temps de la moisson (expression qui désigne un certain espace de temps, dans lequel s’accomplissent les événements qui se rapportent à la moisson) — « au temps de la moisson », le Seigneur s’occupera premièrement, dans Sa providence, de l’ivraie. Je dis « dans Sa providence », parce qu’Il emploie les anges. L’ivraie sera liée en faisceaux, prête à être brûlée.

Il faut remarquer que les choses extérieures dans le monde sont le sujet même ici des actes qui arrachent la corruption — corruption qui s’est développée au milieu de la chrétienté.

Les serviteurs ne sont pas capables de le faire. Le mélange (que leur infirmité et leur négligence ont occasionné) est tel, qu’en ôtant l’ivraie, ils arracheraient aussi le bon grain. Non seulement le discernement, mais encore la puissance pratique de séparation, leur manqueraient pour mettre leur dessein à exécution. Une fois que l’ivraie est là, ils n’ont rien à faire avec elle, quant à sa présence dans ce monde, dans la chrétienté. Leur service s’applique au bien. Le soin d’en purifier la chrétienté n’est pas de leur ressort. C’est là une œuvre de jugement sur ce qui n’est pas de Dieu, une œuvre qui appartient à Celui qui sait l’exécuter selon la perfection d’une connaissance qui embrasse tout et d’une puissance à laquelle rien n’échappe ; une connaissance qui saura de deux hommes qui seront dans un même lit, prendre l’un et laisser l’autre. L’exécution du jugement sur les méchants dans ce monde n’appartient pas aux serviteurs[37] de Christ. Le Seigneur accomplira ce jugement par les anges de Sa puissance, auxquels Il remet le soin de l’exécuter.

Après avoir lié l’ivraie, Il assemble le bon grain dans Son grenier. Le blé n’est pas lié en faisceaux ; le Seigneur le prend tout à Lui-même. Voilà ce qui a trait à l’apparence extérieure du royaume ici-bas. Ce n’est pas là tout ce que cette parabole nous enseigne, mais elle termine le sujet de cette partie du chapitre. Pendant l’absence de Jésus, l’ensemble de l’effet de ce qu’Il a semé sera gâté par l’œuvre de l’ennemi. À la fin, le Seigneur liera en faisceaux toute l’œuvre de l’ennemi, c’est-à-dire la préparera dans ce monde pour le jugement. Puis Il enlèvera l’Église. Il est évident que cela termine ici-bas la scène qui se poursuit pendant Son absence. Le jugement n’est pas encore exécuté ; et avant d’en parler, le Seigneur donne d’autres tableaux des formes que prendra le royaume pendant Son absence.

Ce qui avait été semé comme un grain de moutarde devient un grand arbre, expression qui est le symbole d’une grande puissance sur la terre. L’Assyrien, le Pharaon, Nebucadnetsar, nous sont présentés comme de grands arbres dans la Parole (voyez Éz. 31, 3 et suivants ; 17, 23-24 ; Dan. 4, 10 et suiv.). Telle devait être la forme du royaume qui commençait en petitesse par la Parole, semée par le Seigneur et plus tard par Ses disciples. Ce que produirait cette semence devait revêtir peu à peu la forme d’une grande puissance qui se mettrait en évidence sur la terre, et sous laquelle les autres viendraient s’abriter, comme les oiseaux sous les branches d’un arbre. C’est bien là ce qui est arrivé.

Ensuite (v. 33 et suiv.), non seulement ce serait une grande puissance sur la terre, mais le royaume aurait le caractère d’un système de doctrine qui se répandrait elle-même — une profession qui embrasserait tout ce qu’atteindrait la sphère de son influence. La totalité des trois mesures serait levée. Je n’insiste pas ici sur le fait que le mot levain est toujours employé dans les Écritures dans une acceptation mauvaise ; mais le Saint Esprit veut nous faire comprendre qu’il ne s’agit pas de la puissance régénératrice de la Parole dans le cœur d’un individu qui par elle reviendrait à Dieu ; qu’il ne s’agit pas non plus simplement d’une puissance agissant par la force extérieure, comme le Pharaon, Nebucadnetsar et les autres grands arbres de l’Écriture. Mais c’est un système de doctrine qui, pénétrant partout, caractérisera la masse de la pâte. Ce n’est pas la foi proprement dite, ni la vie ; c’est une religion ; c’est la chrétienté. La profession d’une doctrine dans des cœurs qui ne supportent ni Dieu, ni la vérité, se lie toujours à l’état de corruption de la doctrine elle-même.

La parabole du levain termine les instructions du Seigneur à la multitude. Tout maintenant lui est présenté en paraboles, car elle ne Le recevait pas, Lui, son Roi ; et Il parlait des choses qui supposaient Son rejet, et un aspect du royaume inconnu aux révélations de l’Ancien Testament, lesquelles ont en vue ou bien le royaume en puissance, ou un petit résidu recevant, au milieu des souffrances, la parole du Roi prophète qui avait été rejeté.

Après la parabole du levain, Jésus ne demeure plus avec la foule, au bord de la mer — lieu propre à la position dans laquelle Il se trouvait vis-à-vis du peuple après le témoignage rendu à la fin du chapitre 12, et où Il était venu en quittant la maison. Maintenant, Jésus rentre dans la maison avec Ses disciples ; et là, dans une étroite intimité avec eux, Il révèle le vrai caractère — le but — du royaume des cieux, le résultat de ce qui s’y faisait, et les moyens qui seraient employés pour tout purifier sur la terre, lorsque l’histoire extérieure du royaume, pendant Son absence, serait terminée. C’est-à-dire que nous trouvons ici ce qui caractérise le royaume pour l’homme spirituel, ce que celui-ci comprend comme la vraie pensée de Dieu à l’égard du royaume, et le jugement qui en ôtera ce qui Lui était contraire — l’exercice de puissance qui rendra le royaume extérieurement conforme au cœur de Dieu.

Nous avons vu l’histoire extérieure du royaume finissant avec ces deux choses : le bon grain caché dans le grenier et l’ivraie liée en faisceaux sur la terre, prête à être brûlée. L’explication de cette parabole reprend l’histoire du royaume à cette époque-là ; seulement, elle nous fait comprendre et distinguer les diverses parties du mélange, en attribuant chaque partie de ce mélange à son vrai auteur. Le champ est le monde[38] ; la Parole y a été semée pour établir de cette manière le royaume. La bonne semence, c’étaient les enfants du royaume ; ils y appartenaient réellement selon Dieu ; ils en sont les héritiers. Les Juifs ne l’étaient plus, et ce n’était plus le privilège de la naissance selon la chair. On devenait enfant du royaume par la Parole. Or, au milieu de ces enfants du royaume, pour gâter l’œuvre du Seigneur, l’ennemi introduit toutes sortes de personnes, fruits des doctrines qu’il avait semées au milieu de ceux qui étaient nés de la vérité. C’est là l’œuvre de Satan, là où la doctrine de Christ a été introduite. La moisson, c’est la fin du siècle[39]. Les moissonneurs sont des anges (v. 39). On remarquera ici que le Seigneur n’explique pas historiquement ce qui a eu lieu, mais les termes employés introduisent le dénouement lorsque la moisson est arrivée. L’accomplissement de ce qui est historique dans la parabole est supposé ; et le Seigneur passe outre, pour donner le grand résultat en dehors du royaume lui-même, tel qu’il était pendant Son absence en haut. Le bon grain — c’est-à-dire l’Église — est dans le grenier, et l’ivraie en faisceaux sur la terre. Or le Fils de l’homme prendra tout ce qui constitue ces faisceaux, tout ce qui, comme mal, offense Dieu dans le royaume, et le jettera dans la fournaise où sont les pleurs et les grincements de dents (v. 40-42). À la suite de ce jugement, les justes brilleront comme Lui-même, le vrai soleil de ce jour de gloire — du siècle à venir — dans le royaume de leur Père. Christ aura reçu le royaume du Père dont ceux-là étaient les enfants et ils y brilleront avec Lui selon ce caractère.

Ainsi nous trouvons pour la foule les résultats sur la terre des semailles divines et les machinations de l’ennemi — le royaume présenté sous cet aspect ; puis les associations des méchants entre eux, en dehors de leur ordre naturel sur la surface du champ, et l’enlèvement de l’Église. Mais pour Ses disciples, le Seigneur explique tout ce qui était nécessaire pour leur faire comprendre parfaitement les termes de la parabole. Ensuite vient le jugement exécuté par le Fils de l’homme sur les méchants, qui sont jetés dans le feu ; et la manifestation des justes dans la gloire (ces derniers événements s’accomplissant après que le Seigneur s’est déjà levé et a mis fin à la forme extérieure du royaume des cieux sur la terre, les méchants étant liés en faisceaux et les saints enlevés en haut[40]).

Le Seigneur, après avoir donné ainsi, pour la pleine instruction de Ses disciples, l’explication de l’histoire publique et ses résultats en jugement et en gloire, leur communique les pensées de Dieu à l’égard de ce qui se passait sur la terre pendant que les événements extérieurs et terrestres du royaume se développaient — choses que l’homme spirituel devait y discerner. Le royaume des cieux était pour lui, pour celui qui avait l’intelligence du but de Dieu, comme un trésor caché dans un champ (v. 44). Un homme trouve le trésor, et il achète le champ pour posséder ce trésor. Le champ n’était pas son but, mais le trésor qui s’y trouvait. Ainsi Christ a acquis le monde. Il le possède de droit. Son but est le trésor qui y est caché, Son peuple, toute la gloire de la rédemption qui se rattache à lui ; en un mot, l’Église, envisagée non pas dans sa beauté morale et, dans un certain sens, divine, mais comme objet spécial des désirs et du sacrifice du Seigneur — ce que Son cœur avait trouvé dans ce monde, selon les conseils et les pensées de Dieu.

Dans cette parabole, il s’agit du puissant attrait de cette « chose nouvelle » qui engage celui qui l’a trouvée à acheter tout le champ, afin de la posséder.

Les Juifs n’étaient pas une chose nouvelle ; le monde n’avait point d’attrait ; mais ce nouveau trésor engageait Celui qui en avait fait la découverte à se défaire de tout pour l’obtenir. En effet, Christ a tout quitté. Non seulement Il s’est anéanti pour nous racheter, mais Il a renoncé à tout ce qui Lui appartenait comme homme, comme Messie sur la terre ; Il a renoncé à Ses promesses, à Ses droits royaux, à S vie, pour prendre possession du monde qui contenait ce trésor, le peuple qu’Il aimait.

La même idée, mais modifiée par d’autres, se retrouve dans la parabole de la perle de grand prix (v. 45-46). Un homme cherchait de belles perles. Il savait ce qu’il faisait. Il avait le goût, le discernement, la connaissance de ce qu’il cherchait. C’était la beauté bien connue de la chose qui l’engageait dans cette recherche. Quand il a trouvé une perle qui répond à ses pensées, il sait qu’il vaut la peine de tout vendre pour la posséder. La perle a ce prix aux yeux de celui qui sait en estimer la valeur. Aussi, il achète la perle seule, rien avec elle. Ainsi Christ a trouvé dans l’Église en elle-même une beauté, et (à cause de cette beauté) un prix qui Lui a fait tout abandonner pour l’obtenir. C’est précisément ce qui a lieu à l’égard du royaume. Vu l’état de l’homme, des Juifs même, la gloire de Dieu exigeait que tout fût abandonné pour posséder cette chose nouvelle ; car rien ne se trouvait dans l’homme que Christ pût prendre à Lui. Non seulement Il trouvait Sa joie à tout laisser pour posséder cette chose nouvelle ; mais ce que Son cœur cherche, ce qu’Il ne trouve nulle part ailleurs, Il l’a trouvé dans ce que Dieu Lui a donné, dans le royaume. Il n’a pas acheté d’autres perles. Avant qu’Il eût découvert cette perle, Il n’avait aucun motif de se défaire de tout ce qu’Il avait. Aussitôt qu’Il l’a vue, Il prend une décision ; Il abandonne tout pour elle. Le prix qu’elle a Le décide, car Il sait juger et cherche avec discernement.

Je ne veux pas dire que les enfants du royaume ne soient pas animés par le même principe. Quand on a appris ce que c’est que d’être enfant du royaume, on quitte tout pour en jouir, pour être de la perle de grand prix. Mais on n’achète pas ce qui n’est pas le trésor pour avoir le trésor lui-même ; et l’on est bien loin de chercher de belles perles, avant d’avoir trouvé celle de grand prix. Ces paraboles, dans toute leur portée, ne s’appliquent qu’à Christ. Le but de ces paraboles est de faire ressortir le contraste entre ce qui se faisait alors de l’état de choses qui avait précédé — savoir les rapports du Seigneur avec les Juifs.

Il nous reste encore à examiner l’une des sept paraboles — celle du filet jeté dans la mer (v. 47-50). Dans cette parabole, il n’y a point de changement dans les personnes employées, c’est-à-dire dans la parabole elle-même. Les mêmes pêcheurs qui ont jeté le filet, le tirent sur le rivage, et font le triage en mettant les bons poissons dans des vaisseaux, ne s’occupant pas davantage des mauvais. Mettre en sécurité les bons poissons, c’est l’ouvrage de ceux qui ont tiré le filet ; et ce travail ne se fait que lorsqu’on a débarqué. Faire le triage est leur ouvrage, sans doute ; mais ils ne sont occupés que des bons poissons. Ils les connaissent. Avoir de bons poissons est leur affaire, le but de leur pêche. Sans doute, d’autres poissons entrent dans le filet et y sont retenus avec les bons ; mais ils ne sont pas bons. Un autre jugement n’est pas nécessaire. Les pêcheurs connaissent les bons poissons. Tous les poissons ne sont pas bons. Les bons sont mis à part. Cet acte de pêcheurs fait partie de l’histoire même du royaume des cieux. Il n’y est pas question du jugement des méchants. Ils sont laissés de côté lorsque les pêcheurs rassemblent les bons dans des vaisseaux. Il n’est pas question ici du sort final, ni des bons, ni des méchants. Le sort des bons n’est pas d’être mis à part sur le rivage, ni celui des autres d’être laissés là seulement. Cela est postérieur à l’action de la parabole : et, quant aux méchants, leur jugement ne se fait pas seulement par leur séparation d’avec les bons, auxquels ils avaient été mêlés, mais par leur destruction. Ni dans cette parabole, ni dans celle de l’ivraie et du froment, le jugement ne fait partie de la parabole elle-même. Là, l’ivraie est liée et laissée sur le champ ; ici, les mauvais poissons sont jetés hors du filet.

Ainsi le filet de l’évangile a été jeté dans la mer des peuples, et a renfermé des hommes de toute sorte. Après ce rassemblement général qui a rempli le filet, les ouvriers du Seigneur, en s’occupant des bons, les rassemblent en un, les séparant des méchants. Il faut remarquer que ceci est une similitude du royaume. C’est le caractère que prend le royaume, lorsque l’évangile a rassemblé une masse de bons et de mauvais. À la fin, lorsque le filet a été tiré ramassant toutes sortes de poissons, les bons sont mis à part, parce qu’ils sont précieux ; les autres sont laissés. Les bons sont réunis en divers vaisseaux. Les saints sont réunis, non pas par les anges, mais par l’œuvre de ceux qui ont travaillé au nom du Seigneur. La distinction ne se fait pas par le jugement, mais par les ouvriers occupés des bons.

L’exécution du jugement est une toute autre chose. Les ouvriers n’ont rien à y faire. À la fin du siècle, les anges sortiront et sépareront les méchants d’avec les justes — non les justes d’avec le reste, comme ont fait les pêcheurs — et les jetteront dans la fournaise, où il y aura des pleurs et des grincements de dents (v. 49-50). Il n’est rien dit ici de leur occupation auprès des justes. Ce n’était pas l’ouvrage des anges de mettre les justes dans les vaisseaux, mais celui des pêcheurs. Dans les deux paraboles, les anges s’occupent des méchants. Dans la parabole de l’ivraie, le résultat public avait été donné, soit pendant la période du royaume des cieux, soit après. Cela n’est pas répété ici. L’œuvre qui doit être faite à l’égard des justes, lorsque le filet est plein, est ajoutée. Le sort des méchants est donné une seconde fois pour distinguer l’œuvre qui se fait à leur égard d’avec celle qui s’opère par le moyen des pêcheurs rassemblant les bons en divers vaisseaux. Encore ce sort des méchants est-il présenté sous un autre point de vue ; et les justes sont laissés à leur place. Dans la parabole de l’ivraie, le jugement des méchants est déclaré ainsi. Ils sont jetés là où seront les pleurs et les grincements de dents, mais l’état général du royaume est révélé, et nous avons les justes resplendissant comme le soleil dans la partie la plus élevée du royaume. Ici, c’est seulement ce que les intelligents comprennent, ce que la pensée spirituelle voit ; les justes sont mis dans des vaisseaux. Il y a, dans la première parabole, avant le jugement, par la puissance spirituelle, une séparation qui n’existait pas dans l’état public général du royaume, mais seulement ce que la providence a fait dans le champ, et le bon grain est reçu au ciel. Ici, la séparation s’opère par rapport aux bons. Pour l’intelligence spirituelle, c’était le point principal, et non une manifestation publique ; seulement le jugement sera exécuté de fait sur les méchants ; alors les justes seront laissés là[41].

Dans l’explication de la seconde parabole, c’est, dans le cas de l’ivraie, le jugement absolu et final qui détruit et consume ce qui reste sur le champ et qui avait été déjà rassemblé et séparé providentiellement du bon grain. Les anges sont envoyés à la fin, non pour séparer l’ivraie du froment (ce qui a été fait), mais pour jeter l’ivraie au feu, purifiant ainsi le royaume. Dans l’explication de la parabole des poissons (v. 49), le triage même se fait. Il y aura des justes sur la terre, et les méchants seront séparés d’avec eux. L’instruction pratique de cette parabole, c’est la séparation des bons d’avec les mauvais, et le rassemblement en un d’un grand nombre des premiers. Cela se répète plus d’une fois, beaucoup de bons étant aussi réunis ailleurs en un. Les serviteurs du Seigneur sont les instruments employés pour ce qui a lieu dans la parabole elle-même.

Ces paraboles contiennent des choses vieilles et des choses nouvelles (v. 51-52). La doctrine du royaume, par exemple, était une doctrine bien connue. Que le royaume dût prendre les formes décrites par le Seigneur, qu’il dût embrasser tout le monde sans distinction, le peuple de Dieu tirant son existence non pas d’Abraham, mais de la Parole : tout cela était bien nouveau. Tout était de Dieu. Le scribe avait bien connaissance du royaume, mais il ignorait entièrement le caractère qu’il prendrait comme royaume des cieux planté par la Parole dans ce monde, ce dont tout dépend ici.

Le Seigneur ensuite (v. 53 et suiv.) reprend Ses travaux au milieu des Juifs[42]. Pour eux, il n’était que le « fils du charpentier » ; ils connaissaient Sa famille selon la chair. Le royaume des cieux n’existait pas pour leurs yeux. Il était révélé ailleurs, où la connaissance des choses divines était communiquée. Les Juifs ne voyaient pas au-delà des choses que le cœur naturel pouvait apercevoir. La bénédiction du Seigneur était arrêtée par leur incrédulité : Il était rejeté par Israël comme prophète aussi bien que comme roi.

Chapitre 14. — Ici notre évangile reprend la suite historique de ces révélations, mais de manière à faire ressortir l’esprit qui animait le peuple. Hérode (aimant sa puissance terrestre et sa propre gloire plus que la soumission au témoignage de Dieu, et lié par une fausse pensée humaine plus que par sa conscience, quoiqu’il semble avoir reconnu en bien des choses la force de la vérité) avait décapité le précurseur du Messie, Jean le baptiseur, qu’il avait déjà mis en prison, afin d’éloigner de la vue de sa femme celui qui avait repris fidèlement le péché dans lequel elle vivait.

Jésus est sensible à la portée de cet acte qui Lui est rapporté. Accomplissant conjointement avec Jean, dans un humble service (quelque élevé qu’Il fût au-dessus de lui personnellement) le témoignage de Dieu dans la congrégation, Il se sentait lié avec Jean, de cœur et dans son œuvre, car la fidélité au milieu du mal unit étroitement les cœurs ; et Jésus avait daigné prendre une place où il s’agissait de fidélité (voyez Ps. 9, 9-10). Apprenant la mort de Jean, Il se retire dans un lieu désert ; mais tout en s’éloignant de la multitude d’Israël, qui commençait ainsi à agir ouvertement dans le rejet du témoignage de Dieu, Jésus ne cesse pas d’être le soutien de tous les besoins de cette multitude, et de rendre ainsi témoignage que Celui qui pouvait pourvoir directement à ses besoins était là au milieu d’elle. Car la foule qui sentait ces besoins et qui, si elle n’avait pas la foi, admirait cependant la puissance de Jésus, Le suit dans le désert ; et Jésus, touché de compassion, guérit tous leurs malades. Le soir, Ses disciples l’engagent à renvoyer la multitude pour qu’elle se pourvoie de vivres. Il s’y refuse, et rend un témoignage remarquable à la présence, en Sa personne, de Celui qui devait rassasier de pain les pauvres de Son peuple (Ps. 132). Jéhovah le Sauveur, qui établissait le trône de David, était là dans la personne de Celui qui devait hériter ce trône (v. 13-21). Je ne doute pas que les douze paniers de restes des morceaux ne se rapporte au nombre qui désigne toujours dans les Écritures la perfection de la puissance administrative dans l’homme.

Il est à remarquer aussi que le Seigneur s’attend à ce que Ses douze disciples soient capables de servir d’instruments pour accomplir Ses actes de bénédiction et de puissance, en administrant selon Sa puissance les bénédictions du royaume. « Vous, donnez-leur à manger », dit-Il (v. 16). Ceci a trait à la bénédiction du royaume de l’Éternel et aux disciples de Jésus, les douze, comme en étant les ministres ; mais il y a également un principe de toute importance quant à l’effet de la foi à toute intervention de Dieu en grâce. La foi devrait pouvoir user de la puissance qui opère dans une telle intervention, pour produire les œuvres qui sont propres à cette puissance selon l’ordre de cette dispensation et de l’intelligence que la foi en a. Nous retrouverons ailleurs ce principe plus pleinement développé.

Les disciples voulaient renvoyer la foule, ne sachant pas se servir de la puissance de Christ. Ils auraient dû savoir en user en faveur d’Israël, selon la gloire de Celui qui se trouvait au milieu d’eux.

Si maintenant le Seigneur démontrait avec une patience parfaite, par Ses actes, que Celui qui pouvait ainsi bénir Israël était au milieu de Son peuple, Il ne rendait pas moins témoignage qu’Il était séparé de ce peuple, à cause de son incrédulité. Jésus fait monter Ses disciples dans une nacelle pour leur faire traverser la mer, seuls ; et renvoyant Lui-même la foule, Il monte sur une montagne à l’écart, pour prier, pendant que la nacelle où sont les disciples est ballottée sur les flots de la mer, agitée par un vent contraire : tableau vivant de ce qui est arrivé. Dieu, en effet, a envoyé les siens traverser seuls la mer orageuse du monde, rencontrant une opposition contre laquelle il est dur de lutter. Pendant ce temps, Jésus prie seul en haut. Il a renvoyé le peuple juif qui L’avait entouré pendant la période de Sa présence ici-bas.

Outre son caractère général, le départ des disciples nous présente particulièrement le résidu juif. Pierre, individuellement, sortant de la nacelle, dépasse en figure la position de ce résidu. Il présente cette foi qui, abandonnant la commodité terrestre de la nacelle, va à la rencontre de Jésus, qui s’est révélé à elle. Pierre marche sur la mer — entreprise hardie, mais basée sur la parole de Jésus : « Viens » (v. 29). Mais remarquez que cette marche de Pierre n’a d’autre fondement que ces mots : « Si c’est Toi » (v. 28), c’est-à-dire Jésus Lui-même. Il n’y a aucun appui, aucune possibilité de marcher, si l’on perd Christ de vue. Tout dépend de Lui. Il y a dans la nacelle un moyen connu pour arriver : la foi seule qui regarde à Jésus peut marcher sur les eaux. L’homme, en tant qu’homme, enfonce par le fait même qu’il est dans une pareille position. Nul ne peut se soutenir sur les eaux, sauf par la foi qui puise en Jésus la force qui est en Lui et L’imite. Mais il est doux d’imiter Jésus ; et l’on est alors plus près de Lui, plus semblable à Lui. C’est la vraie position de l’Église, en contraste avec le résidu dans son caractère ordinaire. Jésus marche sur l’eau comme sur la terre ferme. Lui qui a créé les éléments tels qu’ils sont, peut bien disposer de leurs qualités à Son gré. Il permet les orages pour éprouver notre foi. Il marche sur les flots soulevés comme dans le calme. D’ailleurs l’orage ne change rien. Celui qui enfonce dans les eaux, enfoncera par le calme comme dans l’orage, et celui qui peut marcher sur les eaux, y marchera dans l’orage comme par le calme — mais dès que l’on regarde aux circonstances, la foi manque et le Seigneur est oublié. Souvent, en effet, les circonstances nous font oublier Jésus, là où la foi en Celui qui est au-dessus de toutes choses devrait nous rendre capables de les dominer.

Cependant, Dieu en soit loué, Celui qui, par Sa propre puissance, marche sur les eaux est là pour soutenir la foi et les pas chancelants du pauvre disciple ; quoi qu’il en soit, cette foi avait amené Pierre si près de Jésus que Celui-ci lui tend la main et le soutient. La faute de Pierre était qu’il regardait aux flots, à l’orage (qui n’importait nullement, après tout), au lieu de regarder à Jésus, qui n’avait pas changé, et marchait sur les flots mêmes, ce que la foi de Pierre aurait dû remarquer. Toutefois, le cri de sa détresse met en activité la puissance de Jésus, comme la foi de Pierre aurait dû le faire ; seulement c’était à sa honte, au lieu qu’il fût dans la jouissance de la communion du Seigneur et marchant comme Lui.

Jésus étant monté dans la nacelle, le vent cesse. Il en sera ainsi lorsque le Seigneur rejoindra le résidu de Son peuple dans ce monde. Alors aussi Il sera adoré comme Fils de Dieu par tous ceux qui sont dans la barque avec le résidu d’Israël. À Génésareth, Jésus exerce de nouveau la puissance qui plus tard chassera de la terre tout le mal que Satan y a fait. Car quand Il reviendra, le monde Le reconnaîtra. Ceci est un beau tableau du résultat du rejet de Christ, que l’évangile de Matthieu nous a déjà fait connaître comme devant arriver au milieu du peuple juif.

Chapitre 15. — Ce chapitre nous présente l’homme et Dieu, contraste moral entre la doctrine de Christ et celle des Juifs ; ainsi le système juif est moralement rejeté de Dieu. En parlant du système, je parle de tout l’état moral des Juifs, réduit en système par l’hypocrisie qui cherchait à cacher l’iniquité, tout en l’augmentant aux yeux de Dieu devant lequel ils se présentaient. Ils se servaient du nom de Dieu pour descendre, sous prétexte de piété, plus bas que les règles de la conscience naturelle. C’est ainsi qu’un système religieux devient le grand instrument de la puissance de l’ennemi, et plus particulièrement lorsque ce dont ce système porte encore le nom, a été institué de Dieu. Mais alors l’homme est jugé, car le judaïsme c’était l’homme avec la loi et sous la culture de Dieu.

Le jugement que prononce le Seigneur sur ce système d’hypocrisie en en montrant le résultat, savoir la réjection des Juifs, donne lieu à un enseignement qui va bien plus loin, et qui en sondant le cœur de l’homme et en jugeant l’homme d’après ce qui sort de lui, montre que son cœur est une source de toute iniquité : Il fait voir ainsi que toute vraie moralité a sa base dans la conviction et la confession du péché. Car, sans cette conviction et cette confession, le cœur est toujours faux et se flatte vainement. Ainsi aussi Jésus remonte à la source de tout, et sort des relations spéciales et temporaires de la nation juive pour entrer dans la morale vraie, qui appartient à tous les temps. Les disciples n’observaient pas la tradition des anciens (v. 1-2) ; le Seigneur ne s’inquiétait pas de cette tradition. Il en profite pour mettre sur la conscience de leurs accusateurs cette vérité, que le jugement dont le rejet du Fils de Dieu était l’occasion, se légitimait aussi sur le pied des relations déjà subsistantes entre Dieu et Israël.

Les scribes et les pharisiens annulaient le commandement de Dieu par leurs traditions, et cela en un point capital et duquel dépendaient même toutes les bénédictions terrestres pour les enfants d’Israël. Jésus (v. 8-9) leur expose aussi, par leurs propres ordonnances, la profonde hypocrisie, l’égoïsme et l’avarice de ceux qui prétendaient conduire la nation et former son cœur à la moralité et au culte de Jéhovah. Ésaïe avait déjà prononcé leur jugement.

Ensuite, Il montre à la foule (v. 10 et suiv.) qu’il s’agit de ce que l’homme est, de ce qui sort de son cœur, de l’intérieur de son être ; et Il signale les tristes flots qui sortent de cette source corrompue. Mais ce qui scandalisait les propres justes de ce monde, ce qui était inintelligible même pour les disciples, c’était la simple vérité à l’égard du cœur de l’homme tel qu’il est connu de Dieu. Rien de si simple que la vérité lorsqu’elle est connue ; rien de si difficile, de si obscur, quand un jugement doit être porté sur elle par le cœur de l’homme qui ne la possède pas ; car l’homme juge d’après ses propres pensées, et la vérité ne se trouve pas en elles. En un mot, Israël, et particulièrement l’Israël religieux, et la vraie morale sont mis en contraste : l’homme est placé sous sa propre responsabilité et sous son vrai jour devant Dieu.

Jésus sonde le cœur ; mais, agissant en grâce, Il agit selon le cœur de Dieu et le manifeste en sortant, et pour les uns et pour les autres, des termes conventionnels des relations de Dieu avec Israël. Une personne divine, Dieu, peut entrer dans l’alliance qu’Il a donnée, mais ne saurait être limité par elle. L’infidélité de Son peuple à cette alliance fournit l’occasion de nous montrer le Seigneur s’en allant au-delà de ce lieu. Notez ici l’effet de la religion traditionnelle qu’aveugle le jugement moral. Quoi de plus clair et de plus simple que cette vérité, que ce qui souille l’homme n’est pas ce qu’il a mangé, mais ce qui est sorti de sa bouche et de son cœur ? Mais les disciples ne pouvaient la comprendre, sous l’influence méprisable de l’enseignement pharisaïque qui mettait les formes extérieures à la place de la pureté intérieure.

Christ laisse alors les confins d’Israël et Ses disputes avec les docteurs de Jérusalem, pour visiter les endroits les plus en dehors des privilèges juifs. Il se rend dans les quartiers de Tyr et de Sidon (v. 21), ces villes qu’Il avait citées Lui-même comme exemples de ce qui était le plus éloigné de la repentance. Voyez le chapitre 11, où Il met ces villes au même rang que Sodome et Gomorrhe, comme plus endurcies que celles-ci.

Une femme vient de ces contrées. Elle était de la race maudite, selon les principes qui distinguaient Israël (Deut. 7, 1-2). Elle était Cananéenne. Cette femme vient demander l’intervention de Jésus en faveur de sa fille possédée d’un démon. En demandant à Jésus cette faveur, elle se sert du titre que la foi reconnaissait au Seigneur dans Sa relation avec les Juifs, elle l’appelle : « Fils de David ». Ceci donne lieu à un entier développement de la position du Seigneur, en même temps que des conditions sous lesquelles l’homme pouvait espérer d’avoir part à l’effet de Sa bonté, à la révélation de Dieu Lui-même.

Comme Fils de David, Il n’a rien à faire avec une Cananéenne. Il ne lui répond pas. Les disciples, eux, voudraient bien qu’on lui accordât sa demande pour se débarrasser d’elle, pour en finir avec son importunité. Le Seigneur leur répond qu’Il n’est envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël (v. 24). C’est ce qui était, en effet. Quels que fussent les conseils de Dieu manifestés à l’occasion de Son rejet (voyez Ésaïe 49), Il était ministre de la circoncision pour la vérité de Dieu pour accomplir Ses promesses faites aux pères (Rom. 15, 8).

La femme, en un langage plus simple et plus direct, expression plus naturelle de ses sentiments, demande la miséricordieuse intervention de Celui dans la puissance duquel elle mettait sa confiance. Le Seigneur lui répond qu’il ne convient pas de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens (v. 26). Nous voyons ici la vraie position du Seigneur en tant que venu à Israël ; les promesses étaient pour les enfants du royaume. Le Fils de David en était le ministre. Pouvait-Il comme tel effacer ce qui distinguait le peuple de Dieu ?

Mais cette foi qui puise sa force dans la nécessité, et qui ne trouve d’autre ressource que dans le Seigneur Lui-même, accepte l’humiliation de sa position, et estime qu’auprès du Seigneur il y a du pain pour la faim de ceux qui n’y ont pas de droit. Cette foi persévère aussi, parce qu’il y a un besoin senti, et de la confiance dans Celui qui est venu en grâce.

Qu’avait fait le Seigneur dans Sa dureté apparente ? Il avait amené la pauvre femme au sentiment et à l’expression de sa vraie place devant Dieu, c’est-à-dire à la vérité quant à elle-même. Mais alors était-il vrai de dire que Dieu était moins bon qu’elle ne pensait, moins riche en miséricorde envers la délaissée qui n’avait d’espérance et de confiance qu’en cette miséricorde ? Dire cela, c’eût été renier le caractère et la nature de Dieu dont Jésus était l’expression, la vérité, et le témoin sur la terre ; c’eût été se renier Lui-même, et le but de Sa mission. Jésus ne pouvait pas dire : « Dieu n’a pas une miette pour une telle créature ». Il répond de tout cœur : « Ô femme, ta foi est grande ; qu’il te soit fait comme tu veux » (v. 28). Dieu sort des limites étroites de Son alliance avec les Juifs pour agir dans Sa souveraine bonté, selon Sa nature même. Il en sort pour être Dieu en bonté, et non pas seulement Jéhovah en Israël.

Mais cette bonté s’exerce envers une âme amenée à reconnaître, en présence de cette bonté, qu’elle n’y a aucun droit. C’était là que l’apparente dureté du Seigneur l’avait conduite. Elle recevait tout de la grâce, étant elle-même indigne de tout. C’est ainsi, et seulement ainsi, que chaque âme obtient la bénédiction. Ce n’est pas seulement le sentiment de ses besoins — la Cananéenne l’avait depuis le commencement — c’étaient ses besoins qui l’amenaient là. Il ne suffit pas de reconnaître que le Seigneur Jésus peut répondre à ces besoins ; elle vient en le reconnaissant ; il faut se trouver en présence de la seule source de bénédiction et être amené à sentir que, quoiqu’on y soit, on n’a aucun droit d’en jouir. Et c’est une terrible position. Quand on en est là, tout est grâce. Dieu peut alors agir selon Sa propre bonté ; et Il répond à tout souhait que le cœur peut former pour son bonheur.

Nous voyons donc ici Christ, serviteur de la circoncision pour la vérité de Dieu, pour la confirmation des promesses faites aux pères, et pour que les nations glorifiassent Dieu pour Sa miséricorde, selon qu’il est écrit : Romains 15, 8-9. En même temps, cette dernière vérité manifeste le véritable état de l’homme et la pleine et parfaite grâce de Dieu. Dieu agit selon cette vérité, tout en demeurant fidèle à Ses promesses ; et Sa sagesse se déploie d’une manière qui appelle notre admiration.

On voit combien l’introduction en cet endroit de l’histoire de la Cananéenne développe et met en évidence cette partie de notre évangile. Le commencement du chapitre expose l’état moral des Juifs, la fausseté d’une piété pharisaïque et sacerdotale ; il fait voir le véritable état de l’homme comme homme, ce dont le cœur de l’homme était la source, et révèle ensuite le cœur de Dieu tel qu’il est manifesté en Jésus. Les voies de Jésus envers cette femme montrent la fidélité de Dieu à Ses promesses ; et la bénédiction enfin accordée fait ressortir la pleine grâce de Dieu en rapport avec la manifestation du véritable état de l’homme, reconnu par la conscience — la grâce s’élevant au-dessus de la malédiction qui pesait sur l’objet de cette grâce — s’élevant au-dessus de tout, pour se frayer un chemin jusqu’au besoin que la foi lui présentait.

Maintenant le Seigneur se retire de là et se rend en Galilée, contrée où Il était en relation avec le résidu méprisé des Juifs. Ce n’était ni Sion, ni le temple, ni Jérusalem ; mais les pauvres du troupeau, où le peuple était assis dans de profondes ténèbres (voyez És. 8 ; 9). Là Ses compassions suivent le pauvre résidu et s’exercent encore en sa faveur. Il renouvelle les preuves, non seulement de Ses tendres compassions, mais aussi de Sa présence, qui rassasiait de pain les pauvres de Son peuple ! Cependant, ce n’est pas par la puissance administrative qu’Il pouvait confier à Ses disciples, mais selon Sa propre perfection, et en agissant Lui-même. Il prend soin du résidu de Son peuple. En conséquence, on ramassa du reste des morceaux de pain sept corbeilles pleines (v. 37). Jésus part sans qu’il soit arrivé d’autres circonstances.

Nous avons vu la morale éternelle et la vérité intérieure substituées à l’hypocrisie des formes, la religion légale de l’homme et son cœur montré comme une source de mal et rien autre, le cœur de Dieu pleinement révélé s’élevant au-dessus de toute dispensation pour manifester la parfaite grâce qui est en Christ. Ainsi les dispensations sont mises de côté, quoique bien reconnues, et par cela, l’homme et Dieu pleinement mis en évidence. C’est un chapitre merveilleux en ce qu’il y a d’éternel dans la vérité qui concerne Dieu, et ce que la révélation de Dieu dévoile dans l’homme. Et cela, remarquez-le, fournit l’occasion de révéler, dans le chapitre suivant, l’Assemblée, qui n’est pas une dispensation, mais qui est fondée sur ce que Christ est, le Fils du Dieu vivant. Dans le chapitre 12, Christ était rejeté selon une dispensation, et, dans le chapitre 13, le royaume était substitué. Ici l’homme est mis de côté, ainsi que ce qu’il avait fait de la loi, et Dieu agit selon Sa propre grâce au-dessus de toutes les dispensations. Alors paraissent l’Assemblée et le royaume en gloire.

Le chapitre 16 va plus loin que la simple grâce de Dieu. Jésus révèle ce qui devait se former dans les conseils de cette grâce où Il était reconnu, en montrant que les orgueilleux du peuple de Dieu sont rejetés, que Dieu les abhorre (Zach. 11), comme ils L’abhorrent. Fermant les yeux (par la perversité de leur volonté) aux signes merveilleux et bienfaisants de Sa puissance, qu’Il accordait sans cesse aux pauvres qui Le cherchaient, les pharisiens et les sadducéens — frappés cependant malgré eux de ce qui se manifestait en Lui, bien qu’incrédules de volonté et de cœur — demandent un signe du ciel. Le Seigneur leur reproche cette incrédulité en leur montrant que s’ils savaient bien distinguer l’apparence du ciel (v. 2-3), les signes des temps étaient bien autrement frappants. Ils étaient la génération adultère et méchante qui était devant Lui, et Il les laisse : expression significative de ce qui se passait alors en Israël. Jésus prévient Ses disciples oublieux contre les ruses de ces subtils adversaires de la vérité et de Celui que Dieu avait envoyé pour faire connaître cette vérité (v. 5-12). Israël comme peuple est délaissé dans ses chefs. En même temps, dans une grâce patiente, Il rappelle à Ses disciples ce qu’Il leur avait expliqué par Ses paroles.

Ensuite Jésus questionne Ses disciples sur ce que les hommes disent de Lui (v. 13 et suiv.). Toutes les pensées des hommes n’étaient que des opinions, non la foi ; c’est-à-dire l’incertitude qui tient à l’indifférence morale, à l’absence de ces besoins sentis de l’âme, qui ne se reposent que dans la vérité, dans le Sauveur qu’on a trouvé. Puis Jésus demande aux disciples ce qu’ils disaient eux-mêmes de Lui. Pierre, à qui le Père avait daigné se révéler, déclare sa foi, en Lui répondant : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». Point d’incertitude ici, point de simple opinion, mais l’effet puissant de la révélation, faite par le Père Lui-même, de la personne de Christ, au disciple qu’Il avait élu pour jouir de ce privilège.

Ici ressort d’une manière remarquable l’état du peuple, non à l’égard de la loi, comme dans le chapitre précédent, mais à l’égard du Christ qui leur avait été présenté. Nous le voyons en contraste avec la révélation de Sa gloire à ceux qui L’avaient suivi. Nous avons ainsi trois classes : premièrement, les pharisiens arrogants et incrédules ; ensuite, les personnes sentant et reconnaissant qu’il y avait en Christ une puissance divine et une autorité, mais qui restaient indifférentes ; enfin, la révélation de Dieu et la foi donnée divinement.

Dans le chapitre 15, la grâce envers celui qui n’a d’espoir que dans la grâce, est mise en contraste avec la désobéissance et avec la perversion hypocrite de la loi, par laquelle les scribes et les pharisiens cherchaient à couvrir cette désobéissance sous prétexte de piété.

Le chapitre 16, en jugeant l’incrédulité des pharisiens à l’égard de la personne de Christ, et en mettant de côté ces hommes pervers, introduit la révélation de cette personne comme fondement de l’Assemblée qui devait remplacer les Juifs comme témoin de Dieu sur la terre ; et puis il annonce les conseils de Dieu à l’égard de l’établissement de cette Assemblée. Il nous montre, conjointement avec ceci, l’administration du royaume tel qu’il s’établissait alors sur la terre.

Considérons premièrement la révélation de la personne de Christ.

Pierre confesse que Jésus est le Christ, l’accomplissement des promesses de Dieu et des prophéties qui en annonçaient la réalisation. Il était Celui qui devait venir, le Messie promis de Dieu.

De plus, Il était le Fils de Dieu. Le psaume 2 avait annoncé que, malgré les complots des chefs pervers du peuple et l’inimitié orgueilleuse des rois de la terre, le Roi de Dieu serait consacré sur la montagne de Sion. C’était le Fils, engendré de Dieu. Les rois et les juges de la terre[43] sont appelés à se soumettre à Lui, de peur d’être frappés du sceptre de Sa puissance lorsqu’Il prendrait les nations pour Son héritage. Ainsi le vrai croyant attendait le Fils de Dieu, né dans le temps convenable sur cette terre. Pierre confesse que Jésus est le Fils de Dieu. Nathanaël aussi l’avait fait : « Tu es le Fils de Dieu ; tu es le roi d’Israël » (Jean 1, 50). Marthe le dit de même plus tard.

Pierre cependant, spécialement enseigné par le Père, ajoute à sa confession un mot simple, mais puissant : « Tu es le Fils du Dieu vivant ». Jésus n’est pas seulement Celui qui accomplit les promesses et qui répond aux prophéties ; c’est du Dieu vivant qu’Il est le Fils, de Celui en qui est la vie et le pouvoir de donner la vie.

Il hérite de cette puissance de vie en Dieu, que rien ne peut vaincre ni détruire. Qu’est-ce qui peut vaincre la puissance de Celui — de ce Fils — qui était issu de « Celui qui vit » ? Satan a l’empire de la mort ; c’est lui qui tient l’homme sous la domination de cette affreuse conséquence du péché ; et cela par le juste jugement de Dieu, qui fait la force de cette domination. L’expression du verset 18, « les portes du hadès », du lieu invisible, se rapporte à cet empire de Satan. C’est donc sur cette puissance, qui laisse sans force la forteresse de l’ennemi, que l’Assemblée est bâtie. La vie de Dieu ne sera pas détruite. Le Fils du Dieu vivant ne sera pas vaincu. Ce que Dieu fonde sur ce rocher de la puissance immuable de vie dans Son Fils ne sera donc pas renversé par l’empire de la mort. Si l’homme a succombé et s’il est tombé sous la puissance de cet empire, Dieu, le Dieu vivant n’y succombe pas. C’est sur ce fondement que Dieu bâtit Son Assemblée. Elle est l’œuvre du Christ, fondée sur Lui comme Fils du Dieu vivant, et non du premier Adam, ni fondée sur lui ; elle est fondée sur Son œuvre accomplie selon la puissance que cette vérité révèle. La personne de Jésus, Fils du Dieu vivant, en est la force. Cette force, la résurrection l’a démontrée. Là Il est déclaré Fils de Dieu en puissance. Aussi, ce n’est pas pendant Sa vie, mais lorsqu’Il est ressuscité, que Jésus commence cette œuvre. La vie était en Lui ; mais c’est après que le Père a brisé les portes du hadès même (c’est Lui qui, par Sa divine puissance, avait fait cela et était ressuscité) que, monté en haut, Il commence, par le Saint Esprit, à bâtir ce que la puissance de la mort ou de celui en qui elle avait déjà été vaincue, ne pourra jamais détruire. C’est Sa personne qui est en vue ici, et c’est sur Sa personne que tout est fondé. La résurrection est la preuve qu’Il est le Fils du Dieu vivant et que les portes du hadès ne peuvent rien contre Lui ; leur puissance est détruite par la résurrection. Par cela, nous voyons que l’Assemblée (bien que formée sur la terre) est beaucoup plus qu’une dispensation ; le royaume ne l’est pas.

L’œuvre de la croix était nécessaire ; mais ici il ne s’agit pas de savoir ce que le juste jugement de Dieu exigeait, ou de la justification d’un individu, mais de ce qui annulait la puissance de l’ennemi. Il était donné à Pierre de reconnaître la personne de Celui qui vivait selon la puissance de la vie de Dieu. C’était une révélation particulière et directe du ciel, de la part du Père. Sans doute, Christ avait donné assez de preuves de qui Il était ; mais les preuves n’avaient rien prouvé au cœur de l’homme. La révélation du Père était le moyen de savoir qui Il était, et cela allait bien au-delà des espérances d’un Messie.

Ici, le Père avait directement révélé la vérité de la personne même de Christ, révélation qui dépassait toute question de relation avec les Juifs. Sur ce fondement, Christ bâtirait Son Assemblée. Pierre, déjà nommé ainsi par le Seigneur, reçoit, à cette occasion, une confirmation de ce titre. Le Père avait révélé à Simon, le fils de Jonas, le mystère de la personne de Jésus ; et secondement, Jésus aussi indique, par le nom qu’Il lui donne[44], la stabilité, la fermeté, la durabilité, la force pratique de Son serviteur favorisé par la grâce.

Le droit de donner un nom appartient à un supérieur qui peut assigner à celui qui le porte sa place et son nom dans la famille ou dans la position où cet inférieur se trouve. Ce droit, quand il est réel, suppose le discernement, l’intelligence de ce qui se fait : Adam donne des noms aux animaux (Gen. 2, 19-20). Nébucadnetsar donne de nouveaux noms aux Juifs captifs (Dan. 1, 7) ; le roi d’Égypte, à Éliakim, qu’il avait placé sur le trône (2 Rois 23, 34). Jésus prend donc cette place en disant à Pierre : Le Père t’a révélé cela, et moi aussi je vous donne une place et un nom qui se lie à cette grâce. C’est sur ce que le Père t’a révélé que je m’en vais bâtir mon Assemblée[45], contre laquelle (fondée qu’elle est sur cette vie qui vient de Dieu) les portes de l’empire de la mort ne prévaudront jamais ; et moi qui bâtis, et qui bâtis sur ce fondement inébranlable, moi je te donne la place d’une pierre (Pierre) en relation avec ce temple vivant. Par le don de Dieu, tu appartiens déjà par nature au bâtiment — pierre vivante et ayant la connaissance de cette vérité qui en est le fondement et qui fait de chaque pierre une partie de l’édifice. Pierre était par excellence tel par cette confession ; il l’était par anticipation par l’élection de Dieu. Le Père lui fait la révélation dans Sa souveraineté. Le Seigneur lui assigne en même temps sa place comme ayant, Lui, droit d’administration et autorité dans le royaume qu’Il allait établir.

Voilà ce qui nous est dit à l’égard de l’Assemblée, nommée ici pour la première fois, les Juifs ayant été rejetés à cause de leur incrédulité, et l’homme convaincu de péché.

Un autre sujet se présente lié à celui de l’Assemblée que le Seigneur allait bâtir ; savoir, le royaume qui devait être établi. Ce royaume devait avoir la forme du royaume des cieux ; il en était ainsi dans les conseils de Dieu ; mais le roi ayant été rejeté sur la terre, le royaume allait s’établir maintenant d’une manière spéciale.

Tout rejeté d’ailleurs qu’Il fût, le Seigneur tenait les clefs de ce royaume, l’autorité Lui en appartenait. Il devait les confier à Pierre qui, lorsque Lui, Christ, serait parti, ouvrirait les portes du royaume, premièrement aux Juifs, et puis aux Gentils. Pierre devait exercer aussi l’autorité dans le royaume, de la part du Seigneur ; de sorte que ce qu’il lierait sur la terre au nom de Christ (le vrai Roi, quoique monté au ciel), serait lié dans le ciel, et que, s’il déliait quelque chose sur la terre, ce qu’il ferait serait ratifié dans le ciel. En un mot, Pierre avait l’autorité d’ordonner dans le royaume de Dieu sur la terre, ce royaume ayant maintenant le caractère de royaume des cieux, car son Roi était dans le ciel, et le ciel marquerait de son autorité les actes de Pierre. Mais le ciel sanctionnait ses actes terrestres, non le fait de lier ou de délier pour le ciel. L’Assemblée, rattachée au caractère de Fils du Dieu vivant, et bâtie par Christ, quoique formée sur la terre, appartient au ciel ; le royaume, bien que dirigé du ciel, appartient à la terre — c’est là qu’il a sa place et son service[46].

Quatre choses donc sont signalées par le Seigneur dans ce passage :

1. La révélation faite par le Père à Simon ;

2. Le nom donné à ce même Simon par Jésus qui allait bâtir Son Assemblée sur le fondement révélé dans ce que le Père avait communiqué à Simon ;

3. L’Église bâtie par Christ Lui-même, encore incomplète, sur le fondement de la personne de Jésus reconnu comme Fils du Dieu vivant ;

4. Les clefs du royaume destinées à Pierre, c’est-à-dire l’autorité dans le royaume, donnée à Pierre comme administrant ce royaume de la part de Christ, et y ordonnant ce qui était Sa volonté et qui serait ratifié dans le ciel. Tout ceci se rattache personnellement à Simon (en vertu de l’élection du Père qui l’avait choisi dans Sa sagesse pour recevoir cette révélation), et en vertu de l’autorité de Christ (qui lui avait conféré le nom qui le signalait comme jouissant personnellement de cette faveur).

Le Seigneur ayant ainsi communiqué les desseins de Dieu à l’égard de l’avenir — desseins qui s’accompliraient dans l’Assemblée et dans le royaume — il n’y avait plus lieu à Sa présentation comme Messie aux Juifs. Ce n’est pas qu’Il abandonnât ce témoignage plein de grâce et de patience envers le peuple, témoignage qu’Il avait rendu pendant tout Son ministère. Non, ce témoignage continuait de fait, mais Ses disciples devaient comprendre que ce n’était plus leur œuvre de l’annoncer au peuple comme étant le Christ. Dès lors aussi Il commence à faire comprendre à Ses disciples qu’Il devait souffrir, être mis à mort, et ressusciter (v. 21 et suiv.).

Or, quelque béni et honoré que fût Pierre par la révélation que le Père lui avait faite, son cœur tenait encore charnellement à la gloire humaine de son maître (et pour dire vrai à la sienne propre), et était loin de s’élever à la hauteur des pensées de Dieu. Hélas ! il n’est pas le seul. Autre chose est d’être convaincu des vérités les plus élevées et d’en jouir même sincèrement comme vérités, ou bien d’avoir le cœur formé à des sentiments et à une marche ici-bas qui soient en rapport avec ces vérités. Ce n’est pas la sincérité dans la jouissance de la vérité qui fait défaut. Ce qui manque, c’est d’avoir la chair, le moi mortifiés, c’est d’être mort au monde. Nous pouvons jouir sincèrement de la vérité telle que Dieu l’enseigne, et cependant n’avoir pas la chair mortifiée, ni le cœur dans un état qui soit selon cette vérité dans laquelle il se meut ici-bas. Pierre (naguère si honoré par la révélation de la gloire de Jésus, et constitué, d’une manière toute particulière, le dépositaire de l’administration du royaume confiée au Fils — ayant une place éminente dans l’état de choses qui devait suivre le rejet de Christ par les Juifs) Pierre fait maintenant l’œuvre de l’adversaire à l’égard de la soumission parfaite de Jésus, à la souffrance et à l’ignominie qui devaient introduire cette gloire et caractériser le royaume. Hélas ! la chose était simple ; Pierre pensait aux choses de l’homme et non à celles de Dieu. Mais le Seigneur, dans Sa fidélité, le repousse, et enseigne à Ses disciples que la croix est le seul chemin, le chemin arrêté, nécessaire ; et qui voulait Le suivre, devait entrer dans ce chemin qu’Il prit. D’ailleurs, que profiterait-il à un homme de gagner le monde entier, s’il fait la perte de son âme ? Car c’était de cela qu’il s’agissait[47], et non pas alors de la gloire extérieure du royaume.

Après avoir examiné le chapitre 16, comme étant l’expression de la transition du système messianique à l’établissement de l’Assemblée fondée sur la révélation de la personne de Christ, je désire attirer aussi l’attention sur les caractères d’incrédulité qui s’y développent, soit au milieu des Juifs, soit dans les cœurs des disciples. Il nous sera utile d’observer un peu les formes de cette incrédulité.

D’abord elle prend une forme plus grossière, en demandant un signe du ciel. Les pharisiens et les sadducéens s’unissent pour montrer leur insensibilité à tout ce que le Seigneur avait fait. Ils demandent une preuve pour leurs sens naturels, c’est-à-dire pour leur incrédulité. Ils ne veulent pas croire Dieu, soit en écoutant Ses paroles, soit en considérant Ses œuvres. Il faudrait que Dieu contentât leur propre volonté, qui ne serait ni la foi, ni l’œuvre de Dieu. Ils avaient de l’intelligence pour les choses humaines bien moins clairement manifestées ; ils n’en avaient aucune pour celles de Dieu. Aussi ne leur sera-t-il accordé d’autre signe qu’un Sauveur perdu pour eux, comme Juifs sur la terre. Il faudra qu’ils se soumettent, bon gré mal gré, au jugement de l’incrédulité qu’ils manifestaient. Le royaume leur sera ôté ; le Seigneur les quitte. Le signe de Jonas se rattache au sujet de tout le chapitre.

Ensuite, nous retrouvons cette même inattention pour la puissance manifestée dans les œuvres de Jésus ; mais ce n’est plus l’opposition de la volonté incrédule, la préoccupation du cœur pour les choses présentes le soustrait à l’influence des signes déjà donnés. C’est la faiblesse, non pas la mauvaise volonté. Toutefois, les disciples sont coupables, et Jésus les appelle « gens de petite foi », non pas « hypocrites » et « génération méchante et adultère ».

Puis nous voyons l’incrédulité se manifester sous la forme d’une opinion oiseuse, qui montre que le cœur et la conscience de ceux dont il est question ne s’intéressent pas à un sujet qui devrait les dominer — sujet tel que si le cœur se plaçait vraiment en face de lui et de son importance, il ne pourrait demeurer tranquille avant d’en avoir acquis une entière certitude. L’âme n’a pas de besoins, et partant point de discernement. Quand l’âme sent ces besoins, une seule chose y répond ; et il ne peut y avoir de repos qu’en la trouvant. La révélation de Dieu qui a créé le besoin ne laisse pas l’âme tranquille jusqu’à ce qu’elle possède avec toute certitude ce qui l’a réveillée. Ceux qui n’éprouvent pas de besoins, peuvent rester dans les probabilités, chacun selon son caractère naturel, son éducation, ses circonstances. Il y a assez pour réveiller la curiosité — l’esprit en est occupé et en juge. La foi a des besoins ; elle a, en principe, l’intelligence de l’objet qui répond à ces besoins ; l’âme est exercée jusqu’à ce qu’elle trouve ce qu’il lui faut. Le fait est que Dieu est là.

C’est le cas de Pierre. Le Père lui révèle Son Fils. Quoiqu’il fût faible, une foi vivante se trouvait en lui, et l’on reconnaît l’état de son âme lorsqu’il dit : « Seigneur, auprès de qui nous en irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle ; et nous, nous croyons et nous savons que toi, tu es le Saint de Dieu » (Jean 6, 68-69). Heureux l’homme à qui Dieu révèle de telles vérités ! chez qui Il réveille de pareils besoins ! Il peut y avoir lutte, beaucoup à apprendre, beaucoup à mortifier ; mais le conseil de Dieu est là avec la vie qui s’y rattache. Nous en avons vu l’effet dans le cas de Pierre. Chaque chrétien a sa place à lui dans le temple dont Simon était une pierre si éminente. S’ensuit-il donc que le cœur soit en pratique à la hauteur de la révélation qui lui a été faite ? Non ; la chair, après tout, peut n’être pas mortifiée du côté où la révélation touche notre position terrestre.

En effet, la révélation faite à Pierre impliquait le rejet du Christ ici-bas — amenait nécessairement l’humiliation de Christ et Sa mort. C’était là le point essentiel. Substituer la révélation du Fils de Dieu, de l’Assemblée et du royaume céleste, à la manifestation du Messie sur la terre, qu’est-ce que cela signifiait, sinon que Jésus devait être livré aux Gentils, être crucifié, et ensuite ressusciter ? Or Pierre n’en était pas là moralement. Son cœur charnel, au contraire, profitait de la révélation qui lui avait été faite et de ce que le Seigneur lui avait dit, pour s’élever à ses propres yeux. Il voyait donc la gloire personnelle de Jésus, sans en saisir les conséquences morales. Il se met à reprendre le Seigneur Lui-même et cherche à Le détourner du chemin de l’obéissance et de la soumission. Le Seigneur, toujours fidèle, le traite en adversaire. Hélas ! que de fois nous avons joui, joui sincèrement d’une vérité, et manqué cependant aux conséquences pratiques qui en découlaient pour nous sur la terre. Un Sauveur céleste, glorifié, qui bâtit l’Assemblée, cela implique la croix sur la terre. La chair ne comprend pas cela. Elle élèvera son Messie au ciel, si l’on veut ; mais prendre sa part de l’humiliation qui suit nécessairement, ce n’est pas ce qu’elle entend par un Messie glorieux. La chair doit être mortifiée pour prendre cette place. Il faut pour cela la force de Christ par le Saint Esprit. Un chrétien qui n’est pas crucifié au monde n’est qu’une pierre d’achoppement pour quiconque cherche à suivre Christ.

Telles sont les formes d’incrédulité qui précèdent la vraie confession de Christ, et qui se trouvent, hélas ! en ceux qui L’ont sincèrement confessé et connu (la chair n’étant pas mortifiée, de manière à faire marcher l’âme à la hauteur de ce qu’elle a appris de Dieu, et l’intelligence spirituelle étant obscurcie par la pensée des conséquences dont cette chair ne veut pas).

Mais si la croix est la porte du royaume, la gloire ne tardera pas à se produire. Le Messie étant rejeté par les Juifs, un titre plus glorieux et d’une portée bien autrement grande est révélé : le Fils de l’homme viendra dans la gloire de Son Père (car Il est Fils de Dieu), et rendra à chacun selon sa conduite (v. 27). Même il y en avait de ceux qui se tenaient là, qui ne goûteraient pas la mort (car on en parlait) avant de voir la manifestation de la gloire du royaume, qui appartenait au Fils de l’homme.

On peut remarquer ici le titre de « Fils de Dieu » posé comme fondement ; le titre de Messie est abandonné, en tant que témoignage rendu dans ce temps-là, et remplacé par celui de « Fils de l’homme », que Jésus prend en même temps que celui de Fils de Dieu, et qui avait une gloire lui appartenant de plein droit. Jésus devait venir dans la gloire de Son Père, comme Fils de Dieu, et dans Son royaume, comme Fils de l’homme.

Il est intéressant de rappeler ici l’instruction qui nous est donnée au commencement du livre des Psaumes. L’homme juste distingué de l’assemblée des méchants a été présenté dans le psaume 1. Nous trouvons, au psaume 2, la révolte des rois de la terre et des princes contre l’Éternel et contre Son Oint (c’est-à-dire Son Christ). Or là-dessus le décret de l’Éternel est déclaré. Adonaï, le Seigneur, se moquera d’eux du ciel. En outre, le Roi de Jéhovah sera établi sur la montagne de Sion. Voici ce décret : « L’Éternel m’a dit : Tu es mon Fils ; aujourd’hui, je t’ai engendré »[48]. Il est commandé aux rois de la terre et aux juges de baiser le Fils.

Dans les psaumes suivants, toute cette gloire s’obscurcit. La détresse du résidu, à laquelle Christ a part, est racontée. Puis, au psaume 8, Christ est salué Fils de l’homme, héritier de tous les droits conférés en souveraineté à l’homme par les conseils de Dieu. Le nom de Jéhovah devient excellent sur toute la terre. Ces psaumes ne dépassent pas la partie terrestre de ces vérités, sauf dans le passage : « Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux » (Ps. 2, 4) ; tandis que, dans Matthieu 16, le rapport du Fils de Dieu avec cela, Sa venue avec Ses anges (pour ne rien dire de l’Assemblée), nous sont présentés. C’est-à-dire que nous voyons que le Fils de l’homme viendra dans la gloire du ciel. Ce n’est pas que Son séjour dans le ciel soit la vérité annoncée dans ce passage ; mais le Fils de l’homme arrivant pour établir Son royaume sur la terre est revêtu de la gloire du ciel la plus élevée. Il vient dans Son royaume. Le royaume est établi sur la terre ; mais Il arrive avec la gloire du ciel pour le prendre. C’est ce que le chapitre suivant va nous montrer, selon la promesse du verset 28 de celui-ci.

Dans chaque évangile qui en parle, cette promesse de ne pas goûter la mort avant de voir le royaume du Fils de l’homme, est suivie immédiatement de la transfiguration. Et non seulement cela, mais Pierre (dans sa seconde épître, chap. 1, 16), en parlant de cette scène, déclare qu’elle était une manifestation de la puissance et de la venue de notre Seigneur Jésus Christ. Il dit que la parole prophétique leur avait été confirmée par la vue de Sa majesté ; de sorte que les apôtres savaient de quoi ils parlaient en annonçant la puissance et la venue de Christ, ayant contemplé Sa majesté. C’est dans ce sens effectivement que le Seigneur parle ici de Sa venue, ainsi que nous l’avons vu : c’était un exemple de la gloire dans laquelle Il reviendrait pour confirmer la foi de Ses disciples, en vue de Sa mort qu’Il venait de leur annoncer.

Dans le chapitre 17, Jésus conduit Pierre, Jacques et Jean, sur une haute montagne, et là Il est transfiguré devant eux : Son visage resplendit comme le soleil, et Ses vêtements devinrent blancs comme la lumière. Moïse et Élie apparurent aussi, parlant avec Lui. Pour le moment, nous laisserons le sujet de leur entretien, qui est d’un profond intérêt, jusqu’à ce que nous arrivions à l’évangile de Luc. Cet évangéliste ajoute quelques circonstances qui présentent, sous certains rapports, un autre aspect de cette scène.

Ici, le Seigneur paraît en gloire et Moïse et Élie avec Lui : l’un, le législateur des Juifs ; et l’autre (presque aussi remarquable), le prophète qui chercha à ramener au culte de l’Éternel les dix tribus apostates, et qui, désespérant du peuple, s’en retourna à Horeb, d’où la loi était sortie, et fut ensuite retiré au ciel, sans passer par la mort.

Ces deux personnages éminents par excellence dans les rapports de Dieu avec Israël, l’un fondateur, l’autre restaurateur du peuple selon la loi, ces deux hommes paraissent avec Jésus. Pierre (frappé de cette apparition, heureux de voir son Maître associé à ces colonnes du système juif, à de si grands serviteurs de Dieu, ignorant la gloire du Fils de l’homme et oubliant la révélation qu’il avait reçue de la gloire de Sa personne comme Fils de Dieu), Pierre désire faire trois tentes, et placer Jésus, Moïse et Élie au même niveau, comme des oracles. Mais la gloire de Dieu se manifeste ; c’est-à-dire le signe connu en Israël comme demeure (Shechinah) de cette gloire[49] ; et la voix du Père se fait entendre. La grâce peut mettre les Élie et les Moïse dans la même gloire que le Fils de Dieu, et les associer avec Lui ; mais si la folie de l’homme, dans son ignorance, veut les placer ensemble, comme ayant en eux-mêmes une autorité égale sur le cœur du fidèle, il faut que le Père aussitôt revendique les droits de Son Fils. Il ne s’écoule pas un instant avant que la voix du Père proclame la gloire de la personne de Son Fils, Sa relation avec Lui, proclamant qu’Il est l’objet de toute Son affection, qu’Il trouve en Lui tout Son plaisir. C’est Lui que les disciples doivent écouter. Moïse et Élie ont disparu. Christ reste seul là, comme Celui qui doit être glorifié, qui doit enseigner ceux qui écoutaient la voix du Père. Le Père Lui-même Le distingue, Le présente à l’attention des disciples, non comme étant digne de leur amour, mais comme objet de Ses propres délices. Lui-même trouvait en Jésus Son bon plaisir. Ainsi les affections du Père nous sont présentées comme réglant les nôtres en leur offrant un objet commun. Quelle position pour de pauvres êtres comme nous ! Quelle grâce ![50]

En même temps, la loi et toute pensée de sa restauration sous l’ancienne alliance étaient passées ; et Jésus, glorifié comme Fils de l’homme et Fils de Dieu vivant, reste le seul dispensateur de la connaissance et des pensées de Dieu. Les disciples, effrayés en entendant la voix de Dieu, se prosternent. Jésus, pour qui cette gloire et cette voix étaient naturelles, les encourage, ainsi qu’Il le faisait toujours ici-bas, leur disant : « N’ayez point de peur » (v. 7). Ils étaient avec Lui, qui était l’objet de l’affection du Père ; pourquoi craindraient-ils ? Leur meilleur ami était la manifestation de Dieu sur la terre ; la gloire était à Lui : Moïse et Élie avaient disparu ainsi que la gloire que les disciples n’étaient pas encore capables de supporter. Jésus — qui leur avait été ainsi manifesté dans la gloire qui Lui était donnée et dans les droits de Sa glorieuse personne dans Ses relations avec le Père — Jésus leur reste, le même qu’ils avaient toujours connu. Mais cette gloire ne devait être le sujet de leur témoignage que lorsque Lui, le Fils de l’homme, serait ressuscité d’entre les morts — le Fils de l’homme dans la souffrance. Il fallait alors donner la grande preuve qu’Il était Fils de Dieu en puissance. Le témoignage devait être rendu à cela, et Il entrerait personnellement dans cette gloire qui venait d’être exposée à leurs yeux.

Mais il s’élève dans l’esprit des disciples une difficulté produite par la doctrine des scribes à l’égard d’Élie. Élie, disaient ceux-ci, devait venir avant la manifestation du Messie ; et, en effet, la prophétie de Malachie 4, 5-6 donnait lieu à cette attente. Les disciples demandent à Jésus : « Pourquoi donc les scribes disent-ils qu’il faut qu’Élie vienne premièrement ? » (c’est-à-dire avant la manifestation du Messie) tandis que nous venons de voir que tu es, toi, ce Messie ; et pourtant Élie n’est pas venu. Jésus confirme les paroles du prophète en ajoutant qu’Élie rétablirait toutes choses (v. 11). « Mais », continue le Seigneur, « je vous dis qu’Élie est déjà venu, et… ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu ; ainsi aussi le Fils de l’homme va souffrir de leur part » (v. 12). Les disciples comprirent qu’Il parlait de Jean le baptiseur, qui était venu dans l’esprit et la puissance d’Élie, selon ce que le Saint Esprit avait annoncé à Zacharie son père (Luc 1, 17). Mais ce passage exige quelques observations.

D’abord, lorsque le Seigneur dit (Matt. 17, 11) : « En effet, Élie vient premièrement, et il rétablira toutes choses », Il ne fait que confirmer ce que les scribes disaient d’après la prophétie de Malachie, comme s’Il disait : « Ils ont raison ». Ensuite, le Seigneur déclare l’effet de la venue d’Élie : « Il rétablira toutes choses ». Or, le Fils de l’homme devait encore venir. Jésus avait dit à Ses disciples : « Vous n’aurez point achevé de parcourir les villes d’Israël, que le Fils de l’homme ne soit venu » (Matt. 10, 23). Néanmoins, le Fils de l’homme était venu et même s’entretenait avec eux. Mais cette venue du Fils de l’homme dont Il parlait, c’était Sa venue en gloire, lorsqu’Il sera manifesté Fils de l’homme en jugement, selon Daniel 7. C’est ainsi que tout ce qui avait été dit aux Juifs sera accompli ; et, dans l’évangile de Matthieu, Jésus parle à Ses disciples suivant cette attente. Cependant Jésus a dû être présenté à la nation, et Il a dû souffrir. Il était nécessaire que la nation fût mise à l’épreuve par la présentation du Messie selon la promesse. Cela a été fait et, ainsi que Dieu l’avait prédit par les prophètes, « il a été rejeté des hommes ». De même Jean L’a précédé selon Ésaïe 40, comme la voix dans le désert, dans l’esprit et la puissance d’Élie ; Jean a été rejeté, comme devait l’être le Fils de l’homme[51].

Le Seigneur donc, par ces paroles, annonce à Ses disciples, en rapport avec la scène qu’ils venaient de contempler et avec toute cette partie de notre évangile, que le Fils de l’homme, tel qu’Il était maintenant présenté aux Juifs, devait être rejeté. Ce même Fils de l’homme devait être manifesté en gloire, tel qu’ils l’avaient vu momentanément sur la montagne. Élie, en effet, devait venir, comme disaient les scribes, mais Jean le baptiseur avait rempli cette fonction d’Élie en puissance pour la présentation du Fils de l’homme ; laquelle (les Juifs étant laissés, ainsi qu’ils devaient l’être, à leur propre responsabilité) ne devait aboutir qu’à Son rejet, et à la mise de côté d’Israël jusqu’aux jours dans lesquels Dieu commencerait de nouveau Ses relations avec Son peuple toujours bien-aimé, quelle que fût sa condition. Dieu rétablirait alors toutes choses (œuvre glorieuse qu’Il accomplirait en introduisant Son premier-né dans le monde). L’expression de « rétablir toutes choses » se rapporte ici aux Juifs, et dans un sens moral. Dans les Actes, chapitre 3, elle désigne l’effet de la présence même du Fils de l’homme.

La présence temporaire du Fils de l’homme a été le moment de l’accomplissement d’une œuvre dont dépend la gloire éternelle, et dans laquelle Dieu a été pleinement glorifié, au-dessus et au-delà de toute dispensation ; d’une œuvre dont la gloire même extérieure du Fils de l’homme n’est que le fruit, en tant que cette gloire dépend de Son œuvre, et non de Sa personne divine ; d’une œuvre enfin dans laquelle, moralement, Il a été Lui-même parfaitement glorifié en glorifiant parfaitement Dieu. Toutefois, sous le rapport des promesses faites aux Juifs, cette présence du Fils de l’homme n’était que le dernier pas dans l’épreuve à laquelle la grâce a soumis ce peuple. Dieu savait bien qu’ils rejetteraient Son Fils : mais Il n’a pas voulu les tenir pour définitivement coupables jusqu’à ce qu’ils l’eussent fait. Dieu ainsi, dans Sa sagesse divine (tout en accomplissant plus tard Ses promesses immuables), présente aux Juifs Jésus — Son Fils, leur Messie. Il leur en donne toutes les preuves nécessaires. Il leur envoie Jean le baptiseur comme Son précurseur, dans l’esprit et la puissance d’Élie. Le Fils de David est né à Béthléhem, avec tous les signes qui auraient dû convaincre ce peuple. Mais les Juifs étaient aveuglés par leur orgueil et leur propre justice, et ils ont tout rejeté.

Néanmoins il convenait que Jésus s’adaptât en grâce, quant à Sa position, à l’état misérable d’Israël. Ainsi aussi, antitype de David rejeté dans son temps, Il partageait l’affliction de Son peuple. Si les Gentils opprimaient ce peuple, Lui, Son roi, devait s’associer à sa détresse, tout en donnant les preuves de ce qu’Il était, et en recherchant les siens en amour. Lui rejeté, tout devient pure grâce. Les Juifs n’ont plus droit à rien selon les promesses, et ils sont réduits à recevoir tout de cette grâce même, comme le ferait un pauvre Gentil. Dieu ne manquera pas à Sa grâce. Ainsi Dieu les a mis dans la vraie condition de pécheurs, et n’en accomplira pas moins Ses promesses. C’est le sujet de Romains 11.

Or le Fils de l’homme qui reviendra sera ce même Jésus qui s’en est allé. Les cieux Le recevront jusqu’au temps du rétablissement de toutes choses dont les prophètes ont parlé. Mais celui qui devait être Son précurseur dans Sa présence temporaire ici-bas ne pouvait être le même Élie. Aussi Jean était-il conforme à la manifestation d’alors du Fils de l’homme, sauf la différence qui découlait nécessairement de la personne du Fils de l’homme. Celle-ci ne pouvait être qu’une, tandis que cela pouvait ne pas être le cas pour Jean le baptiseur et Élie. Mais comme Jésus a manifesté toute la puissance du Messie, tous Ses droits à ce qui appartenait à ce dernier, sans revêtir encore la gloire extérieure, Son temps (Jean 7) n’étant pas encore venu : ainsi Jean a accompli moralement et en puissance la mission d’Élie pour préparer le chemin du Seigneur devant Jésus (selon le vrai caractère de Sa venue, telle qu’elle s’accomplissait alors), et a répondu littéralement à Ésaïe 40, et même à Malachie 3, les seuls passages qui lui soient appliqués. C’est pourquoi Jean a affirmé qu’il n’était pas Élie, et que le Seigneur a dit : « Si vous voulez recevoir ce que je vous dis, celui-ci est Élie qui doit venir » (Matt. 11, 14). C’est pourquoi aussi Jean ne s’applique jamais Malachie 4, 5-6, mais s’annonce comme accomplissant Ésaïe 40, 3-5, et cela dans tous les évangiles, quel que soit leur caractère particulier[51].

Mais poursuivons l’étude de notre chapitre 17. Si le Seigneur monte dans la gloire, Il descend dans ce monde, même maintenant, en Esprit et en sympathie, et rencontre la foule et la puissance de Satan, avec lesquelles nous avons affaire. Pendant que le Seigneur était sur la montagne, un pauvre père avait amené aux disciples son fils lunatique et possédé d’un démon (v. 14 et suiv.). Ici se développe un autre caractère de l’incrédulité de l’homme, du croyant même — l’incapacité de se servir de la puissance qui est mise, pour ainsi dire, à sa disposition dans le Seigneur. Christ, Fils de Dieu, Messie, Fils de l’homme, avait vaincu l’ennemi, avait lié l’homme fort et avait le droit de le chasser. Comme homme, Être obéissant, malgré les tentations de Satan, Christ l’avait vaincu dans le désert, et avait ainsi, comme homme, le droit de le déposséder de son empire sur l’homme, quant à ce monde ; et c’est ce qu’Il a fait. En chassant les démons et en guérissant les malades, Il délivrait l’homme de la puissance de l’ennemi. « Dieu », dit Pierre (Act. 10, 38), a oint Jésus de Nazareth « de l’Esprit Saint et de puissance, Lui qui a passé de lieu en lieu, faisant du bien, et guérissant tous ceux que le diable avait asservis à sa puissance ». Or cette puissance aurait dû être mise à profit par les disciples, qui auraient dû, par la foi, savoir user de ce que Jésus avait ainsi manifesté sur la terre ; mais ils n’en ont pas été capables. À quoi bon, alors, apporter cette puissance ici-bas, si les disciples n’avaient pas la foi pour s’en servir ? La puissance était là : l’homme pouvait en profiter pour une délivrance complète de toute l’oppression de l’ennemi ; mais la foi lui manquait pour cela — les croyants même ne l’avaient pas. La présence de Christ devenait ainsi inutile sur la terre quand les siens même ne savaient pas en profiter. Il y avait plus de foi dans celui qui amenait l’enfant, que dans les disciples, car le besoin senti l’amenait au remède. Tous subissent cette sentence du Sauveur : « Ô génération incrédule et perverse ! » (v. 17). Il doit les quitter ; ce que la gloire avait révélé au ciel, l’incrédule le réalisera ici-bas.

Remarquons ici que ce qui met fin à une intervention particulière de Dieu, n’est pas le mal dans le monde ; au contraire, il donne occasion à l’intervention en grâce. Christ était venu à cause de l’empire de Satan sur les hommes. Il s’en va, parce que ceux qui L’ont reçu sont incapables de se servir de la puissance qu’Il a apportée avec Lui ou qu’Il accorde pour les délivrer ; ils ne savent pas profiter des avantages dont ils jouissent. La foi manquait. Cependant remarquons encore cette importante et touchante vérité, qu’aussi longtemps que cette dispensation de Dieu continue, Jésus ne manque pas de répondre, en bénédiction, à la foi individuelle, même lorsque Ses disciples ne savent pas Le glorifier par l’exercice de la foi. La même sentence qui juge l’incrédulité des disciples appelle le père affligé à la jouissance de la bénédiction. Après tout, pour pouvoir profiter de la puissance de Jésus, il faut être dans Sa communion par l’énergie pratique de la foi.

Jésus bénit donc le pauvre père selon ses besoins, et, plein de patience, reprend le cours des instructions qu’Il donnait à Ses disciples à l’égard de Son rejet et de Sa résurrection comme Fils de l’homme. Aimant le Seigneur, et incapables de porter leurs idées au-delà des circonstances du moment, ils sont troublés ; toutefois c’était la rédemption, le salut, la gloire de Christ.

Avant d’aller plus loin cependant, et de leur enseigner ce qui convenait aux disciples d’un maître ainsi rejeté et à la position dans laquelle ils allaient se trouver, Christ présente aux siens, et de la manière la plus touchante, Sa gloire divine et leur association avec Celui qui la possédait, s’ils avaient pu seulement le comprendre ; en même temps, Il se place avec eux, avec une condescendance et une tendresse parfaites, ou plutôt Il les met dans la même place que Lui, Fils du grand Roi du temple et de toute la terre (v. 24-27).

Ceux qui percevaient le tribut pour le service du temple viennent à Pierre et lui demandent si son Maître ne le paie pas. Pierre, toujours prêt à se mettre en avant, oublieux de la gloire qu’il avait vue et de la révélation que le Père lui avait faite, Pierre, revenant au niveau habituel de ses propres pensées, tenant à ce que son Maître fût estimé bon Juif, et sans Le consulter, répond affirmativement. Le Seigneur alors prévient Pierre, à son entrée dans la maison, et lui montre la connaissance divine qu’Il avait de ce qui se passait loin de Lui. En même temps, Il parle de Pierre et de Lui-même, comme étant tous deux enfants du Roi du temple (fils de Dieu, gardant cependant avec une patiente bonté Sa place humble comme Juif), et étant, par conséquent, l’un et l’autre exempts du tribut. Mais ils ne doivent pas scandaliser. Ensuite le Seigneur commande à la création (car Il peut tout, comme Il sait tout), et Il fait apporter par un poisson précisément la somme requise, associant de nouveau le nom de Pierre au sien. Il avait dit : « Afin que nous ne les scandalisions pas » ; et maintenant : « Donne-le-leur pour moi et pour toi ». Merveilleuse et divine condescendance ! Celui qui sonde les cœurs et dispose à Son gré de la création tout entière, le Fils du souverain Seigneur du temple, place Ses pauvres disciples dans cette même relation avec Son Père céleste, avec le Dieu qui y était adoré. Il se soumet aux exigences auxquelles devaient être soumis justement les étrangers ; mais Il place Ses disciples dans tous Ses droits comme Fils. Le rapport entre cette touchante expression de la grâce divine et le sujet de ces chapitres ressort bien clairement. Il montre toute la portée du changement qui avait lieu.

Il est intéressant de remarquer que la première épître de Pierre est fondée sur Matthieu 16 ; et la seconde, sur le chapitre 17, que nous venons d’étudier[52]. Au chapitre 16, Pierre, instruit du Père, avait confessé le Seigneur comme Fils du Dieu vivant ; et le Seigneur avait dit que sur ce roc Il bâtirait Son Assemblée, et que celui qui avait la puissance de la mort ne prévaudrait pas contre elle. Ainsi aussi Pierre, dans sa première épître, déclare que lui et les autres disciples avaient été régénérés pour une espérance vivante par la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts. Or, c’est par cette résurrection que la puissance de la vie du Dieu vivant a été manifestée. Ensuite, Pierre appelle Christ la pierre vivante, à laquelle venant comme des pierres vivantes, nous sommes édifiés pour être un temple saint au Seigneur.

Dans sa seconde épître, il rapporte d’une manière particulière la gloire de la transfiguration comme preuve de la venue et du royaume du Fils de l’homme ; aussi parle-t-il, dans cette seconde épître, du jugement du Seigneur.

Chapitre 18. — Ici, les grands principes qui conviennent au nouvel ordre de choses sont communiqués aux disciples. Examinons un peu ces douces et précieuses instructions du Seigneur.

Elles peuvent être envisagées de deux manières. Elles révèlent les voies de Dieu à l’égard de ce qui devait remplacer le Seigneur sur la terre comme témoignage rendu à la grâce et à la vérité. Outre cela, elles dépeignent le caractère qui est en soi le vrai témoignage à rendre.

Ce chapitre suppose Christ rejeté et absent ; la gloire du chapitre 17 n’étant pas encore venue. Le récit passe par-dessus le chapitre précédent pour se lier au chapitre 16 (sauf en tant que les derniers versets du chapitre 17 sont un témoignage pratique à l’abdication que Christ a faite de Ses vrais droits jusqu’à ce que Dieu les fît valoir).

Le Seigneur parle des deux sujets qu’embrasse le chapitre 16, le royaume et l’Église. Ce qui conviendrait au royaume, ce serait la douceur d’un petit enfant qui ne sait pas faire valoir ses droits en face d’un monde qui ne prend pas garde à lui — l’esprit de dépendance et d’humilité. Il faut devenir comme un petit enfant. En l’absence de leur Seigneur rejeté, c’était l’esprit qui convenait à ceux qui Le suivent. Quiconque recevra un petit enfant au nom de Jésus, recevra Jésus Lui-même. D’un autre côté, quiconque mettra une pierre d’achoppement sur le chemin d’un de ces petits qui croient en Jésus[53], sera sous le poids du jugement le plus terrible (v. 5-6). Hélas ! le monde le fait ; mais malheur au monde à cause de cela. Quant aux disciples, si ce qu’ils estimaient le plus leur tournait en piège, ils devaient l’arracher et le couper (v. 8-9) — ils devaient avoir, en agissant en grâce, le plus grand soin de ne pas être une occasion de chute pour un de ces petits qui croyaient en Christ, et exercer la plus inflexible sévérité envers eux-mêmes, dans tout ce qui pouvait devenir pour eux une occasion de chute. La perte de ce qui était le plus précieux ici-bas n’était rien en comparaison de leur condition éternelle dans un autre monde ; car c’était de quoi il s’agissait alors, et le péché ne pouvait trouver place dans la maison de Dieu. Sollicitude à l’égard des autres, même les plus faibles, sévérité envers soi-même, telle était la règle du royaume, afin qu’il ne pût y avoir ni piège, ni mal. Quant à l’offense, il fallait une parfaite grâce dans le pardon. Ils ne devaient pas mépriser un de ces petits ; car, s’ils ne savaient pas s’ouvrir leur chemin dans ce monde, ils étaient néanmoins l’objet de la faveur spéciale du Père, comme ceux qui, dans les cours terrestres, avaient le privilège particulier de voir la face du roi (v. 10). Non pas qu’il n’y eût pas de péché en eux, mais le Père ne méprisait pas ceux qui étaient loin de Lui. Le Fils de l’homme était venu sauver ce qui était perdu[54]. Et la volonté du Père n’était pas qu’un seul de ces petits pérît (v. 11-14). Le Seigneur, je n’en doute pas, parle ici des petits enfants, tels que celui qu’Il tenait entre Ses bras ; mais Il inculque à Ses disciples, d’un côté l’esprit d’humilité et de dépendance, et de l’autre cet esprit du Père qu’ils devaient imiter pour être de vrais enfants du royaume ; ils n’avaient pas à marcher selon l’esprit de l’homme qui veut maintenir sa place et se faire valoir ; mais ils devaient s’abaisser et supporter le mépris ; et en même temps, imiter (ce qui est la vraie gloire) le Père qui a égard aux humbles et les admet en Sa présence. Le Fils de l’homme était venu pour ceux qui étaient méprisables. Voilà l’esprit du royaume : c’est cet esprit de grâce dont il est parlé à la fin du chapitre 5. C’est l’esprit du royaume.

Mais l’Assemblée plus particulièrement devait occuper la place de Christ sur la terre. Quant aux offenses personnelles, ce même esprit de douceur convenait à Son disciple ; il devait gagner son frère. Si celui qui avait péché contre son frère écoutait, alors la chose était ensevelie dans le cœur de celui qu’il avait offensé ; sinon, l’offensé devait prendre avec lui deux ou trois personnes, et se rendre auprès de l’offenseur pour atteindre sa conscience, ou servir de témoins ; mais si les moyens ordonnés étaient inefficaces, on devait le faire savoir à l’assemblée, et si le coupable ne se soumettait pas, il devait être tenu pour un étranger, comme l’était pour Israël un païen et un publicain. Il n’est pas question, ici, de la discipline publique de l’assemblée, mais de l’esprit dans lequel les chrétiens doivent marcher. Si l’offenseur cédait à l’avertissement, il fallait lui pardonner même soixante-dix fois sept fois par jour. Mais, quoiqu’il ne soit pas question de la discipline de l’Église, nous voyons que l’Assemblée remplace Israël sur la terre. La question du dehors et du dedans se rapporte dorénavant à elle. Le ciel ratifiera ce que l’Assemblée liera sur la terre ; et le Père aussi exaucera la requête de deux ou trois qui seront d’accord pour demander quelque chose ; car Christ est là où deux ou trois sont assemblés en ou à Son nom[55]. Ainsi, soit pour les décisions à prendre, soit pour les prières, ils étaient comme Christ sur la terre, car Christ Lui-même était là avec eux. Solennelle vérité ! Immense faveur accordée à deux ou trois vraiment réunis en Son nom ! Mais c’est un sujet de tristesse profonde, lorsqu’on a des prétentions à l’unité et que la réalité n’y est pas[56].

Un autre élément du caractère propre au royaume qui avait été manifesté en Dieu et en Christ, c’est la grâce qui pardonne. En ceci aussi, les enfants du royaume doivent être les imitateurs de Dieu, et pardonner toujours. Il ne s’agit que de torts qui seraient faits à nous-mêmes, et non de la discipline publique. On doit pardonner jusqu’à la fin, ou plutôt ne pas trouver de limites à cette action, ainsi que Dieu nous a tout pardonné. En même temps que ceci, je crois que les dispensations de Dieu envers les Juifs sont dépeintes ici. Ils n’avaient pas seulement violé la loi, mais ils avaient tué le Fils de Dieu. Christ a intercédé pour eux, en disant : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font » (Luc 23, 34). En réponse à cette prière, un pardon provisoire a été prêché par le Saint Esprit, par la bouche de Pierre (Act. 3). Mais cette grâce a été rejetée. Lorsqu’il s’agissait de faire grâce aux Gentils qui, sans doute, leur devaient les cent deniers, ils n’ont pas voulu en entendre parler, et ont été livrés au châtiment[57], jusqu’à ce que l’Éternel puisse dire : « Ils ont reçu le double pour tous leurs péchés ».

En un mot, l’esprit du royaume n’est pas la puissance extérieure, mais l’humilité ; mais, dans cet état, on est près du Père, et il est facile alors d’être doux et humble dans ce monde. Celui qui a goûté la faveur de Dieu ne cherchera pas à être grand sur la terre ; il est imbu de l’esprit de grâce, il chérit les petits, il pardonne à ceux qui lui ont fait tort, il est près de Dieu et Lui ressemble dans ses voies. Le même esprit de grâce règne soit dans l’Assemblée, soit dans ses membres. Seule l’Assemblée représente Christ sur la terre ; et c’est à elle que se rapportent ces règles fondées sur l’acceptation d’un peuple comme appartenant à Dieu. Deux ou trois, réellement réunis au nom de Jésus, agissent avec Son autorité, et jouissent de Ses privilèges auprès du Père ; car Jésus Lui-même est là au milieu d’eux.

Chapitre 19. — Ce chapitre poursuit le sujet de l’esprit qui convient au royaume des cieux, et pénètre profondément dans les principes qui gouvernent la nature humaine, et dans ce qui était alors introduit divinement. Le Seigneur s’est rapproché de la Judée ; et une question des pharisiens donne lieu à l’exposition de Sa doctrine sur le mariage. Abandonnant la loi donnée à cause de la dureté de leurs cœurs, Il remonte[58] à l’institution de Dieu, d’après laquelle un seul homme et une seule femme devaient s’allier pour n’être qu’un aux yeux de Dieu. Il établit ou rétablit plutôt le vrai caractère du lien indissoluble du mariage. Je dis indissoluble, car l’exception pour le cas de l’infidélité n’en est pas une ; la personne coupable ayant déjà rompu le lien. Ce n’était plus l’homme et la femme devenus une seule chair. En même temps, si Dieu en donnait la force spirituelle, il valait encore mieux rester seul (v. 10-12).

Le Seigneur renouvelle alors Ses instructions à l’égard des enfants, en témoignant Son affection pour eux : Il le fait ici, il me semble, plutôt en le rattachant à l’absence de tout ce qui lie au monde, à ses distractions, et à ses convoitises, et en reconnaissant ce qui est aimable, confiant, et extérieurement pur dans la nature ; tandis que, dans le chapitre 18, il s’agissait du caractère intrinsèque du royaume.

Après cela, Jésus montre (en rapport avec l’introduction du royaume dans Sa personne) la nature du dévouement absolu et du complet sacrifice de tout pour Le suivre, si vraiment on ne cherche qu’à plaire à Dieu. L’esprit du monde, les passions charnelles et les richesses, sont en tout point opposés à cet esprit-là. La loi de Moïse mettait un frein à ces passions, sans doute ; mais elle les suppose et les supporte sous quelques rapports. Selon la gloire du monde, l’enfant n’avait aucun prix. Quelle puissance pouvait-il avoir dans cette gloire ? Il est précieux aux yeux du Seigneur.

La loi promettait la vie à celui qui l’observait. Le Seigneur la rend simple et pratique dans ses exigences, ou plutôt rappelle ces exigences dans leur vraie simplicité. Les richesses n’étaient pas défendues par la loi ; c’est-à-dire, bien qu’elle maintînt les obligations morales entre hommes, ce qui liait le cœur au monde n’était pas jugé par elle. Selon le gouvernement de Dieu, la prospérité se rattachait à l’obéissance à la loi, car elle supposait le monde et que l’homme y était vivant, et elle l’y éprouvait. Christ reconnaît cela ; mais les motifs du cœur sont éprouvés. La loi était spirituelle, et le Fils de Dieu était là. Nous retrouvons ce que nous avons déjà vu, c’est-à-dire l’homme mis à l’épreuve et Dieu révélé. Tout dans la nature de la loi est intrinsèque et éternel, car Dieu est déjà révélé. Christ juge tout ce qui corrompt le cœur, agit sur son égoïsme et le sépare ainsi de Dieu. « Vends ce que tu as », dit-Il, « et suis-moi ». Hélas ! le jeune homme ne pouvait renoncer à ses possessions, à ses aises, à lui-même. Et Jésus ajoute : « Un riche entrera difficilement dans le royaume des cieux ». Cela était évident : c’était le royaume de Dieu, le royaume des cieux ; le moi, le monde n’y avaient point de place. Les disciples, ne comprenant pas qu’il n’y a pas de bien dans l’homme, s’étonnaient qu’un homme si favorisé et si bien disposé fût encore éloigné du salut. Qui donc pourrait réussir ? Alors, toute la vérité se révèle : c’est impossible aux hommes ; ils ne peuvent vaincre les convoitises de la chair. Moralement, elles sont l’homme lui-même quant à sa volonté et à ses affections. On ne peut blanchir un nègre, ni enlever au léopard ses taches : ce qu’ils font voir est dans leur nature. Mais pour Dieu, que Son nom en soit béni, tout est possible.

Ces instructions à l’égard des richesses poussent Pierre à demander quelle serait la portion de ceux qui avaient renoncé à tout. Nous sommes ramenés ainsi à la gloire du chapitre 17. Il y aura une régénération ; l’état de choses sera entièrement renouvelé sous la domination du Fils de l’homme. Dans ce temps-là, les disciples seront assis sur douze trônes, jugeant les douze tribus d’Israël, ils auront la première place dans l’administration du royaume terrestre. Au reste, chacun aura la sienne ; car, quelles que soient les choses auxquelles on ait renoncé pour l’amour de Jésus, on en recevra le centuple et la vie éternelle. La décision, d’ailleurs, n’en sera pas établie sur les apparences, ni d’après la place que les hommes occupent dans le vieux système et devant les hommes ; plusieurs qui sont les premiers seront les derniers, et les derniers seront les premiers. Il était à craindre, en effet, que le cœur charnel de l’homme ne prît un tel encouragement, présenté sous forme de récompense pour tout son travail et pour tous ses sacrifices, dans un esprit mercenaire, et cherchât à faire de Dieu son débiteur. C’est pourquoi, dans la parabole par laquelle le Seigneur continue Son discours (chap. 20), Il établit clairement le principe de la grâce et de la souveraineté de Dieu dans ce qu’Il donne, et d’une manière distincte envers ceux qu’Il appelle. Le Seigneur fait dépendre de Son appel et de Sa grâce Ses dons à ceux qu’Il introduit dans Sa vigne.

On peut remarquer que, lorsqu’Il répond à Pierre, c’était la conséquence d’avoir, sur l’appel de Christ, tout quitté pour Lui. Le motif en était Christ Lui-même ; c’est pourquoi Il dit : « Vous qui m’avez suivi ». Il parle de ceux qui ont tout quitté pour l’amour de Son nom. Voilà le motif ! La récompense est un encouragement, lorsque nous sommes déjà dans le chemin pour l’amour de Christ. Quand il est question de récompense dans le Nouveau Testament[59], il en est toujours ainsi. Celui qui a été appelé à la onzième heure dépendait de cet appel pour entrer dans le travail ; et si son maître, dans sa bonté, a voulu lui donner autant qu’aux autres, ceux-ci auraient dû s’en réjouir. Ils s’en tiennent à la justice ; ils ont reçu ce dont il était convenu avec eux ; le dernier jouissait de la grâce de son maître. Il fait remarquer qu’ils acceptent le principe de la grâce, de la confiance en cette grâce. « Je vous donnerai ce qui sera juste ». Le grand point de la parabole, c’est cela — la confiance en la grâce du maître de la vigne, et la grâce comme point de départ de leur action. Mais qui le comprenait ? Un Paul pouvait entrer tard dans l’œuvre, Dieu l’ayant appelé alors, et être néanmoins un témoignage plus puissant à la grâce que les ouvriers qui travaillaient depuis l’aube du jour de l’évangile.

Le Seigneur poursuit Son sujet avec Ses disciples. Il monte à Jérusalem, où le Messie aurait dû être reçu et couronné, pour être rejeté et mis à mort, mais pour ressusciter ensuite ; et quand les fils de Zébédée viennent Lui demander les deux premières places dans le royaume, Il leur répond qu’Il peut les conduire aux souffrances, mais que, quant à ces premières places, Il ne peut les accorder (selon les conseils du Père) qu’à ceux pour qui le Père les a préparées. Merveilleux renoncement à soi-même ! Il travaille pour le Père, pour nous. Il ne dispose de rien. Il peut donner à ceux qui Le suivront une part dans Ses souffrances : toutes les autres choses seront données selon les conseils du Père. Mais quelle gloire réelle pour Christ et quelle perfection en Lui, et quel privilège pour nous de n’avoir que ce motif et de partager les souffrances du Seigneur ! Et quelle purification de nos cœurs charnels nous est ici proposée, en ne nous faisant agir que pour un Christ souffrant, partageant Sa croix et nous remettant à Dieu pour la récompense.

Le Seigneur saisit alors cette occasion pour expliquer les sentiments qui conviennent à ceux qui Le suivent et dont ils avaient vu la perfection en Lui. Dans le monde, on cherchait l’autorité ; mais l’esprit de Christ était un esprit de service qui faisait choisir la dernière place et montrer un dévouement absolu aux autres. Beaux et parfaits principes, dont la perfection a été manifestée en Christ dans toute sa splendeur ! Tout abandonner, afin de dépendre avec confiance de la grâce de Celui que nous servons ; et, comme conséquence, l’empressement à prendre la dernière place, étant ainsi le serviteur de tous — voilà ce qui devrait être l’esprit de ceux qui ont part au royaume, tel que l’a établi maintenant le Seigneur rejeté. C’est ce qui convient à ceux qui Le suivent[60].

Cette partie de l’évangile se termine à la fin du verset 28 de notre chapitre, et alors commencent les dernières scènes de la vie de notre adorable Sauveur. Au verset 29[61], commence Sa dernière présentation à Israël, comme Fils de David, l’Éternel, le vrai Roi d’Israël, le Messie. Il commence, à cet égard, Sa carrière à Jéricho, lieu où Josué est entré dans le pays — lieu où la malédiction a reposé si longtemps. Il ouvre les yeux aveugles de Son peuple, qui croient en Lui, et Le reçoivent comme Messie, car Il l’était réellement, tout rejeté qu’Il fût. Les aveugles Le saluent comme Fils de David, et Il répond à leur foi en leur ouvrant les yeux. Ils Le suivent — figure du vrai résidu de Son peuple qui L’attendra.

Après quoi (chap. 21), Jésus, disposant de tout ce qui appartient à un peuple de franche volonté, fait Son entrée à Jérusalem comme Roi et Seigneur, conformément au témoignage de Zacharie. Mais, tout en entrant en Roi — dernier témoignage rendu à la ville bien-aimée, qui (pour sa ruine) allait Le rejeter — Il vient en Roi débonnaire et humble. La puissance de Dieu agit sur le cœur des masses ; et elles saluent Jésus comme Roi, comme Fils de David, se servant des expressions du psaume 118[62], qui célèbre le sabbat millénaire introduit par le Messie, et devant être alors reconnu du peuple. Les foules jettent leurs vêtements pour préparer le chemin de leur Roi glorieux mais débonnaire ; elles coupent des rameaux pour Lui rendre témoignage ; Il est conduit en triomphe jusqu’à Jérusalem, tandis que le peuple crie : « Hosanna [sauve maintenant] au Fils de David ! Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna dans les lieux très hauts ! » (v. 9). Qu’ils eussent été heureux, si leurs cœurs avait été changés pour conserver ce témoignage par l’Esprit ; mais Dieu, dans Sa souveraineté, disposait leurs cœurs pour le rendre ; Il ne pouvait permettre que Son Fils fût rejeté sans qu’Il reçût ce témoignage.

Et maintenant le Roi, tout en gardant Sa position d’humilité et de témoignage, va tout passer en revue. En apparence, ce sont les différentes classes du peuple qui viennent pour Le juger et pour L’embarrasser ; mais, de fait, elles se présentent toutes devant Lui, pour recevoir, les unes après les autres, de Sa part, le jugement de Dieu à leur égard.

C’est une scène frappante que celle qui se déroule ici devant nos yeux — le vrai Juge, le Roi éternel, se présentant, pour la dernière fois, à Son peuple rebelle, avec le témoignage le plus éclatant rendu à Sa puissance et à Ses droits ; et eux venant pour Le tourmenter et Le condamner, amenés par leur malice même à défiler les uns après les autres devant Lui, en exposant leur véritable état, pour recevoir leur jugement de Sa bouche, sans qu’Il quitte même un instant (si ce n’est en purifiant le temple avant que cette scène commence) la position de témoin fidèle et véritable en toute débonnaireté sur la terre.

Il y a deux parties à distinguer dans ce récit. La première nous présente le Seigneur, dans Son caractère de Messie et de Jéhovah. Comme Seigneur, Il fait chercher l’ânesse (v. 3). Il entre dans la ville, comme Roi, selon la prophétie (v. 7-11). Il purifie le temple avec autorité (v. 12-13). Aux objections des sacrificateurs, Il oppose le psaume 8, qui parle de la manière dont l’Éternel tirait Sa gloire et établissait Ses justes louanges par la bouche des petits enfants (v. 15-16). Dans le temple aussi, Il guérit Israël (v. 14). Le Seigneur les quitte alors, ne pouvant plus loger dans la ville, qu’Il ne pouvait plus reconnaître, mais restant dehors avec le résidu. Le lendemain, par une image remarquable, Il montre la malédiction qui va tomber sur le peuple. Israël était le figuier de l’Éternel, mais il encombrait la terre. Il était couvert de feuilles, mais ne portait point de fruit. Le figuier, jugé par le Seigneur, se dessèche incontinent : figure de ce pauvre peuple, de l’homme dans la chair avec tous ses avantages, qui ne portait aucun fruit pour le cultivateur.

Israël, en effet, avait bien toutes les formes extérieures de la piété ; il était zélé pour la loi et pour les ordonnances, mais il ne portait point de fruit pour Dieu. En tant que placé sous la responsabilité d’en porter, c’est-à-dire sous l’ancienne alliance, il n’en portera jamais. La réjection de Jésus a mis fin à tout espoir. Dieu agira en grâce sous la nouvelle alliance, mais ici il ne s’agit pas de cela. Le figuier représente Israël tel qu’il était, l’homme cultivé par Dieu, mais en vain. Tout était fini. Je ne doute pas que ce que le Seigneur dit ici aux disciples du déplacement de la montagne (v. 20-22), tout en étant un grand principe général, ne se rapporte aussi à ce qui devait arriver à Israël par leur ministère. Envisagé en un corps sur la terre comme nation, Israël disparaîtrait et serait perdu au milieu des Gentils. Les disciples étaient ceux que Dieu agréait selon leur foi.

Nous avons vu le Seigneur entrer dans Jérusalem comme roi — Jéhovah, le Roi d’Israël — et puis le jugement prononcé sur la nation. Ensuite viennent les détails du jugement sur les diverses classes qui composaient ce peuple. D’abord, les principaux sacrificateurs et les anciens, qui auraient dû le diriger ; ils s’approchent du Seigneur et mettent en question Son autorité (v. 23 et suiv.). En L’abordant ainsi, ils se posaient en chefs de la nation et en juges capables de prononcer sur la validité de toutes les réclamations qui auraient pu être faites ; sinon, pourquoi s’occupaient-ils de Jésus ?

Le Seigneur, dans Sa sagesse infinie, leur fait une question qui met leur capacité à l’épreuve, et, d’après leur propre confession, ils étaient incapables. Comment alors Le juger ?[63] Leur communiquer le fondement de Son activité eut été inutile. Il était maintenant trop tard pour le faire. Ils L’auraient lapidé, s’Il leur en avait déclaré la vraie source. Aussi leur répond-Il : Prononcez-vous sur la mission de Jean le baptiseur. Et s’ils ne pouvaient pas le faire, pourquoi s’enquérir de Sa mission à Lui ? Ils ne le pouvaient pas. Reconnaître la mission de Jean comme envoyé de Dieu, c’était reconnaître Christ. La nier, c’était perdre leur influence auprès du peuple. De conscience, il n’en était pas question ! Ils avouent leur incapacité. Jésus alors décline leur compétence comme chefs et gardiens de la foi du peuple : ils s’étaient jugés eux-mêmes. Là-dessus, depuis le verset 28 jusqu’au chapitre 22, 14, le Seigneur met leur conduite et les voies de Dieu à leur égard, clairement devant leurs yeux.

D’abord, tout en ayant la prétention de faire la volonté de Dieu, ils ne la faisaient pas ; tandis que ceux qui étaient manifestement méchants s’étaient repentis et avaient fait cette volonté. Eux, voyant cela, étaient restés endurcis. Ensuite, non seulement la conscience naturelle n’avait pas été atteinte chez eux, ni par le témoignage de Jean, ni par la vue du repentir d’autrui ; mais, quoique Dieu eût employé tous les moyens propres à leur faire rapporter du fruit digne de Ses soins, Il n’avait trouvé chez eux que perversité et rébellion. Les prophètes avaient été rejetés, et Son Fils le serait également. Ils voulaient avoir l’héritage du Fils pour eux-mêmes (v. 38). Ils ne pouvaient que reconnaître que la conséquence d’un pareil crime serait nécessairement la destruction de ces méchants, et que la vigne serait donnée à d’autres. Jésus leur applique la parabole, en citant le psaume 118 (v. 22-23), annonçant que la pierre rejetée par ceux qui bâtissaient deviendrait la maîtresse pierre du coin ; de plus, que celui qui tomberait sur cette pierre — c’est ce que la nation faisait dans ce moment-là — serait brisé ; mais que celui sur lequel cette pierre tomberait — ce sera le sort de la nation rebelle aux derniers jours — serait broyé (v. 44). Les principaux sacrificateurs et les pharisiens comprirent qu’Il parlait d’eux ; mais ils n’osaient pas mettre les mains sur Lui, parce que les foules Le tenaient pour un prophète. Telle est l’histoire d’Israël envisagé dans sa responsabilité même jusqu’aux derniers jours. Jéhovah cherchait du fruit dans Sa vigne.

Chapitre 22. — Ici, à son tour, la conduite des Juifs à l’égard des invitations de la grâce nous est présentée. La parabole est donc une similitude du royaume des cieux. Dieu veut honorer Son Fils en célébrant Ses noces. En premier lieu, les Juifs déjà invités sont conviés au festin des noces. Ils ne veulent pas y venir. Ceci a été fait du vivant du Christ. Puis, tout étant préparé, Dieu envoie de nouveau des messagers pour les engager à venir. C’est la mission des apôtres auprès de la nation, lorsque l’œuvre de la rédemption a été accomplie. Les Juifs méprisent le message ou tuent les messagers[64]. La conséquence en est que ces méchants et leur ville sont détruits (v. 7). C’est le jugement qui est tombé sur Jérusalem.

Sur leur refus d’accepter l’invitation, les malheureux, les Gentils, ceux du dehors, sont introduits au festin, et la salle des noces est remplie de conviés. Mais ici une autre chose se présente. Nous avons trouvé, il est vrai, le jugement de Jérusalem dans cette parabole, mais comme elle est une similitude du royaume, elle nous donne aussi le jugement de ce qui est dans le royaume. Il faut ce qui convient à la circonstance. Or, pour un festin de noces, il faut une robe de noces. Si Christ doit être glorifié, il faut que tout soit selon Sa gloire. On peut entrer extérieurement dans le royaume, faire profession de christianisme ; mais celui qui n’est pas revêtu de ce qui convient aux noces sera mis dehors. C’est de Christ Lui-même qu’il faut être revêtu. De l’autre côté tout est préparé — rien n’est demandé. Ce n’était pas au convié d’apporter quoi que ce fût. Le Roi fournissait tout. Mais il faut être pénétré de l’esprit de ce qui se fait. Si l’on avait eu la moindre pensée de ce qui convenait aux noces, on aurait sûrement senti le besoin de paraître dans une robe de noces ; sinon, l’on aurait oublié l’honneur du Fils du Roi. Le cœur y est étranger ; l’homme lui-même sera traité en étranger par le jugement du Roi, quand Il prendra connaissance des conviés qui sont entrés.

Ainsi aussi la grâce a été montrée envers Israël, et ce dernier est jugé pour avoir refusé l’invitation du grand Roi aux noces de Son Fils. Ainsi l’abus de la grâce par ceux qui prétendent en profiter est jugé. L’entrée des Gentils est annoncée. Ici se termine l’histoire du jugement d’Israël en général, ainsi que du caractère que prendra le royaume.

Après ceci (v. 15 et suiv.), les diverses classes des Juifs se présentent chacune à leur tour. D’abord, les pharisiens et les hérodiens (c’est-à-dire ceux qui favorisaient l’autorité des Romains et ceux qui y étaient opposés) cherchent à embarrasser Jésus dans Ses paroles. Le précieux Sauveur leur répond avec cette parfaite sagesse qui se révélait toujours dans tout ce qu’Il faisait et disait. De leur part, ce n’était que méchanceté pure, manifestant une absence totale de conscience. C’était leur propre péché qui les avait placés sous le joug romain, position contraire, en effet, à celle où aurait dû être le peuple de Dieu sur la terre. Ainsi, en apparence, Christ a dû, ou se rendre suspect aux autorités, ou bien renoncer à la prétention d’être le Messie, et par conséquent le Libérateur. Mais qui est-ce qui avait amené ce dilemne ? N’était-il pas le fruit de leurs propres péchés ? Le Seigneur leur montre qu’ils avaient accepté eux-mêmes le joug. Le denier en portait l’empreinte : qu’ils le rendissent donc à ceux auxquels il appartenait, et qu’ils rendissent aussi — ce qu’ils ne faisaient pas — à Dieu ce qui était à Dieu. Le Seigneur les laisse sous le joug sous lequel ils étaient forcés de reconnaître qu’ils s’étaient placés. Il leur rappelle les droits de Dieu qu’ils avaient oubliés. Tel d’ailleurs aurait dû être l’état d’Israël d’après la puissance remise à Nébucadnetsar comme une « vigne qui s’étendit, mais avait peu de hauteur ».

Ce sont, ensuite, les sadducéens qui arrivent auprès de Lui et qui Lui font des questions sur la résurrection, pensant en démontrer l’absurdité. Or, de même que l’état de la nation avait été mis en évidence dans l’entretien de Jésus avec les pharisiens, ainsi l’incrédulité des sadducéens est exposée ici. Les sadducéens ne pensaient qu’aux choses de ce monde, voulant nier l’existence d’un autre monde. Mais, quel que fût l’état de dégradation et d’assujettissement dans lequel était tombé le peuple, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ne changeait pas. Les promesses faites aux pères restaient assurées, et les pères étaient vivants pour en jouir plus tard. C’étaient la parole et la puissance de Dieu qui étaient en question. Le Seigneur les maintient avec puissance et clarté. Les sadducéens sont réduits au silence.

Les gens de loi, frappés de Sa réponse, font une question (v. 36) qui donne occasion au Seigneur d’extraire du contenu de la loi ce qui, aux yeux de Dieu, en est l’essence, présentant ainsi la perfection de la loi, et ce qui — quel que soit le moyen d’y parvenir — fait le bonheur de ceux qui y marchent. La grâce seule s’élève plus haut.

Ici, leurs questions cessent. Tout est jugé, tout est mis en lumière à l’égard de la position du peuple et des sectes d’Israël ; et le Seigneur a placé devant eux les pensées parfaites de Dieu à leur égard, soit au sujet de l’état du peuple, des promesses de Dieu ou de la substance de la loi.

C’était à Jésus maintenant de poser une question pour faire ressortir Sa position à Lui. Il propose aux pharisiens de concilier le titre de Fils de David avec celui de Seigneur qui Lui a été donné par David lui-même, et cela en rapport avec l’ascension de ce même Christ pour siéger à la droite de Dieu jusqu’à ce que Dieu ait mis tous Ses ennemis pour le marchepied de Ses pieds et qu’Il ait établi Son trône en Sion. Or, c’était là la clef de la position de Christ dans ce moment-là. Incapables de Lui répondre, personne n’ose plus Lui faire de question. En effet, si les Juifs avaient pu comprendre ce psaume 110, ils eussent compris toutes les voies de Dieu à l’égard de Son Fils dans le moment où ils allaient Le rejeter. Ceci terminait nécessairement ces entretiens, en montrant la vraie position de Christ, qui, tout en étant Fils de David, devait monter en haut pour recevoir le royaume, et, en l’attendant, rester assis à la droite de Dieu, selon les droits de Sa glorieuse personne — Seigneur de David, aussi bien que Fils de David.

Il y a une autre chose intéressante à remarquer ici. Le Seigneur, dans Ses entretiens et Ses discours aux diverses classes du peuple, constate l’état des Juifs à l’égard de leurs relations avec Dieu sous tous les rapports, et montre la position qu’Il prenait Lui-même. Il fait voir d’abord leur position nationale vis-à-vis de Dieu, comme étant responsables envers Lui, selon la conscience naturelle et les privilèges qui leur appartenaient. Le résultat en sera leur retranchement et leur remplacement par d’autres dans la vigne du Seigneur (chap. 21, 23-46). Ensuite, le Seigneur expose la condition des Juifs en rapport avec la grâce du royaume, ainsi que l’introduction des pécheurs gentils. Ici aussi, le résultat est le retranchement et la destruction de la ville[65]. Puis les hérodiens, les amis des Romains, et les pharisiens, leurs ennemis, prétendus amis de Dieu, font ressortir la vraie position des Juifs vis-à-vis de la puissance impériale des Gentils et vis-à-vis de Dieu. Dans Son entrevue avec les sadducéens, le Seigneur fait voir la certitude des promesses faites aux pères, et les relations de Dieu avec eux à l’égard de la vie et de la résurrection. Puis Il montre aux scribes la vraie portée de la loi, et enfin la position que Lui, le Fils de David, prenait, d’après le psaume 110 ; position qui se rattachait à Son rejet par les conducteurs de la nation dont Il était entouré.

Chapitre 23. — Ce chapitre montre clairement jusqu’à quel point les disciples sont considérés en rapport avec la nation en tant que peuple juif, quoique le Seigneur juge les conducteurs qui séduisaient le peuple et déshonoraient Dieu par leur hypocrisie. Jésus dit à la multitude et à Ses disciples (v. 2) : « Les scribes et les pharisiens se sont assis dans la chaire de Moïse ». Il faut qu’eux étant ainsi interprètes de la loi, on leur obéisse en tout ce qu’ils disaient selon cette loi, bien que leur propre conduite ne fût qu’hypocrisie. Ce qui est important ici, c’est la position des disciples, qui est effectivement la même que celle de Jésus. Ils sont en rapport avec ce qui est de Dieu dans la nation, c’est-à-dire avec la nation en tant que peuple reconnu de Dieu — par conséquent avec la loi comme ayant de l’autorité de la part de Dieu. En même temps le Seigneur juge, et les disciples aussi devaient en pratique juger la marche de la nation, en tant que représentée publiquement par ses chefs. Ils devaient soigneusement éviter la marche des scribes et des pharisiens, tout en continuant à faire partie de la nation.

Après avoir reproché à ces pasteurs du peuple leur hypocrisie, le Seigneur signale la manière par laquelle ils condamnaient eux-mêmes les actes de leurs pères — en bâtissant les sépulcres des prophètes que ces pères avaient tués. Ils étaient donc les enfants de ceux qui avaient tué les prophètes. Dieu les mettra à l’épreuve en leur envoyant aussi des prophètes, des justes et des scribes ; ils combleront la mesure de leur iniquité en mettant à mort ces envoyés et en les persécutant — se condamnant ainsi eux-mêmes, de leur propre aveu — afin que tout le sang des justes répandu depuis le sang d’Abel jusqu’à celui du prophète Zacharie vienne sur cette génération (v. 35-36). Affreuse somme de culpabilité que l’homme pécheur placé sous la responsabilité, n’avait fait qu’accumuler toujours depuis le commencement de son inimitié contre le témoignage de Dieu ; et qui augmentait tous les jours, parce que la conscience s’endurcissait davantage, à mesure qu’elle s’obstinait contre ce témoignage. La vérité était d’autant plus en évidence que ses témoins avaient souffert. C’était un écueil visible à éviter dans la marche du peuple. Mais il persévérait à mal faire, et chaque pas en avant dans cette voie, chaque acte semblable, était la preuve d’un endurcissement croissant. Tout s’était accumulé sur la tête de cette génération réprouvée.

Remarquez ici le caractère donné aux apôtres et aux prophètes chrétiens. Ce sont des scribes, des sages, des prophètes envoyés aux Juifs — à la nation toujours rebelle. Cela fait ressortir très clairement à quel point de vue ils sont envisagés dans ce chapitre. Même les apôtres sont des « sages », des « scribes », envoyés comme tels aux Juifs.

Mais la nation — Jérusalem, la ville bien-aimée de Dieu — est coupable et jugée. Christ, ainsi que nous l’avons vu, depuis la guérison de l’aveugle près de Jéricho, se présente comme l’Éternel, le Roi d’Israël. Que de fois Il aurait voulu rassembler les enfants de Jérusalem, et ils ne l’ont pas voulu (v. 37-39) ! Et maintenant leur maison sera laissée déserte jusqu’à ce que, convertis de cœur, ils se servent des expressions du psaume 118, et saluent par leurs désirs l’arrivée de Celui qui vient au nom de l’Éternel, en recherchant la délivrance de Ses mains et en la Lui demandant — en un mot, jusqu’à ce qu’ils disent : Hosanna à Celui qui vient. Ils ne verront plus Jésus jusqu’à ce que, humiliés dans leur cœur, ils proclament béni Celui qu’ils attendaient, et qu’ils ont rejeté maintenant — enfin, jusqu’à ce qu’ils y soient préparés de cœur. La paix viendra après, le désir avant Son apparition.

Les trois derniers versets nous présentent assez clairement la position des Juifs ou de Jérusalem comme centre du système juif devant Dieu. Depuis longtemps et bien des fois, Jésus, Jéhovah le Sauveur, aurait voulu rassembler les enfants de Jérusalem, comme une poule ses poussins sous ses ailes, mais ils ne l’avaient pas voulu. Leur maison demeurera abandonnée et déserte, mais pas pour toujours. Après avoir tué les prophètes et lapidé ceux qui leur avaient été envoyés, les Juifs avaient crucifié leur Messie, et rejeté et tué ceux qu’Il leur avait envoyés pour leur annoncer la grâce, même après Son rejet. Ils ne Le verront donc plus jusqu’à ce qu’ils se repentent et que le désir de Le voir soit produit dans leur cœur, de sorte qu’ils soient préparés à Le bénir et Le bénissent dans leurs cœurs, et fassent confession de ce désir. Le Messie qui allait les quitter ne sera plus vu d’eux jusqu’à ce que la repentance amène leur cœur à Lui qu’ils rejetaient dans ce moment-là. Alors ils Le verront. Le Messie venant au nom de l’Éternel sera manifesté à Son peuple d’Israël. C’est l’Éternel leur Sauveur qui paraîtra, et l’Israël qui L’avait rejeté Le verra comme tel. Le peuple rentrera ainsi dans la jouissance de ses relations avec Dieu.

Tel est le tableau moral et prophétique d’Israël. Les disciples, en tant que Juifs, étaient considérés comme faisant partie de la nation, bien que s’en détachant spirituellement comme résidu et rendant témoignage au milieu d’elle.

Chapitre 24. — Nous avons déjà vu que le rejet du témoignage du royaume en grâce est la cause du jugement qui tombe sur Jérusalem et sur ses habitants. Or, le chapitre 24 nous donne la position de ce témoignage au milieu du peuple ; l’état des Gentils, et leur relation avec le témoignage rendu par les disciples ; puis l’état de Jérusalem, qui était la conséquence de son rejet du Messie et de son mépris du témoignage ; enfin, le bouleversement universel qui doit arriver à la fin de ces temps-là — état de choses qui sera terminé par l’apparition du Fils de l’homme et le rassemblement des élus d’Israël des quatre vents.

Ce passage remarquable mérite toute attention ; il est à la fois une prophétie et un enseignement adressé aux disciples pour les diriger dans la marche qu’ils auraient à suivre au milieu des événements à venir.

Jésus quitte le temple, et cela pour toujours — acte solennel qui, on peut le dire, exécutait le jugement qu’Il venait de prononcer. — La maison était maintenant déserte. Mais le cœur des disciples demeurait encore enchaîné à ce temple par leurs anciens préjugés. Ils attirent l’attention de Jésus sur les magnifiques bâtiments qui en formaient l’ensemble. Jésus leur annonce sa destruction totale. Puis, retirés sur la montagne des Oliviers avec Lui, les disciples Lui demandent quand ces choses arriveront, et quel sera le signe de Sa venue et de la consommation du siècle (v. 3). Ils rangeaient sous un même chef la destruction du temple, la venue de Christ, et la consommation du siècle. Celle-ci, il faut le remarquer, est la fin de la période pendant laquelle Israël était assujetti à la loi sous l’ancienne alliance, période qui devait cesser pour faire place au Messie et à la nouvelle alliance. Il faut remarquer encore qu’il s’agit du gouvernement de la terre de la part de Dieu, et des jugements qui s’exerceront à la venue de Christ, qui mettra fin au siècle d’alors. Les disciples confondaient ce que le Seigneur avait dit de la destruction du temple avec cette époque[66]. Le Seigneur traite le sujet à Son point de vue à Lui (c’est-à-dire au point de vue du témoignage que les disciples devaient rendre en rapport avec les Juifs, pendant Son absence, et au point de vue de la consommation du siècle). Il n’ajoute rien sur la destruction de Jérusalem qu’Il avait déjà annoncée. Le temps de Sa venue était tenu caché à dessein. De plus, la destruction de Jérusalem par Titus mettait fin, de fait, à la position qu’avait en vue l’enseignement du Seigneur. Il n’y avait plus de témoignage reconnaissable au milieu des Juifs. Quand cette position sera reprise, l’applicabilité du passage reprendra aussi. Depuis la destruction de Jérusalem jusqu’à ce moment-là, il ne s’agit que de l’Église.

Le discours du Seigneur se divise en trois parties :

1. L’état général des disciples et du monde pendant le temps du témoignage, jusqu’à la fin du verset 14 ;

2. La période caractérisée par le fait que l’abomination de la désolation est établie dans le lieu saint (v. 15) ;

3. La venue du Seigneur, et le rassemblement des élus d’Israël.

Voici ce qui caractérise le temps du témoignage des disciples : de faux Christs, de faux prophètes au milieu des Juifs, la persécution de ceux qui rendent témoignage et qu’on livre aux Gentils. Mais il y a des détails plus précis encore à l’égard de ces temps : il y aurait de faux Christs en Israël, il y aurait des guerres, des famines, des pestes, des tremblements de terre. Les disciples ne devaient pas se troubler : la fin ne serait pas encore. Ces choses ne seraient qu’un commencement de douleurs (v. 5-8). Elles étaient plus particulièrement extérieures. Il y avait d’autres événements qui mettraient les disciples encore plus à l’épreuve — des choses plus intérieures. Les disciples seront livrés pour être affligés, tués, haïs de toutes les nations. La conséquence en sera que parmi ceux qui feront profession d’être disciples, plusieurs seront scandalisés ; ils se livreront l’un l’autre. De faux prophètes surgiront et en séduiront plusieurs, et parce que l’iniquité prévaudra, l’amour de plusieurs sera refroidi — triste tableau. Mais ces choses donnent lieu à l’exercice d’une foi éprouvée. Celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé. Voilà pour la sphère propre du témoignage en particulier. Ce que le Seigneur dit n’est pas limité absolument au témoignage en Canaan ; mais comme Canaan est le point de départ du témoignage, tout est en rapport avec ce pays comme centre des voies de Dieu.

Ensuite (v. 14), l’évangile du royaume sera prêché dans le monde entier en témoignage à toutes les nations ; et alors la fin viendra — la consommation du siècle. Or, quoique le ciel soit la source d’autorité lorsque le royaume sera établi, Canaan et Jérusalem en sont les centres terrestres. De sorte que l’idée du royaume, tout en s’étendant à tout le monde, tourne nos pensées vers la terre d’Israël. C’est « cet évangile du royaume »[67] dont il est parlé ici ; ce n’est pas la proclamation de l’union de l’Église avec Christ, ni la rédemption dans sa plénitude, comme elle a été prêchée et enseignée par les apôtres après l’ascension ; mais c’est le royaume qui allait être établi sur la terre, comme Jean le baptiseur et le Seigneur Lui-même l’avaient annoncé. L’établissement de l’autorité universelle de Christ monté au ciel sera prêché dans le monde entier, pour mettre à l’épreuve l’obéissance des disciples, et pour fournir l’objet de la foi à tous ceux qui avaient des oreilles pour entendre.

Voilà donc l’histoire générale de ce qui se fera jusqu’à la fin du siècle, sans entrer dans le sujet de la proclamation qui a fondé l’Assemblée proprement dite. La destruction imminente de Jérusalem et le refus des Juifs de recevoir l’évangile ont fait que Dieu a suscité un témoignage spécial par le ministère de Paul, sans pour cela annuler la vérité du royaume qui va venir. Ce qui suit démontre que cet établissement du témoignage du royaume aura lieu à la fin, et que le témoignage parviendra à toutes les nations avant qu’arrive le jugement qui mettra fin au siècle.

Mais il y aura un moment où, dans une certaine sphère (savoir à Jérusalem et dans le voisinage), un temps particulier de souffrance commencera quant au témoignage en Israël. En parlant de l’abomination qui causera la désolation, le Seigneur nous renvoie à Daniel pour que nous comprenions de quoi il parle. Or Daniel (chapitre 12, où il est question de cette tribulation) nous place définitivement dans les derniers jours — dans le temps où Micaël se tiendra pour le peuple de Daniel, c’est-à-dire pour les Juifs qui sont sous la domination des Gentils — jours auxquels il y aura un temps de trouble tel qu’il n’y en a jamais eu et qu’il n’y en aura jamais de semblable, et où le résidu sera délivré (Dan. 12, 1). À la fin du chapitre précédent, ce temps est appelé « le temps de la fin » (Dan. 11, 40), et la destruction du roi du nord sans main est prophétiquement déclarée. Or le prophète annonce (Dan. 12, 11-12) que treize cent trente-cinq jours avant la pleine bénédiction (et bienheureux celui qui y participera !) le sacrifice continuel sera ôté et l’abomination qui cause la désolation sera établie ; il annonce en outre que, de ce moment-là, il y aura mille deux cent quatre-vingt-dix jours (c’est-à-dire un mois de plus que les mille deux cent soixante jours dont il est question dans l’Apocalypse, et pendant lesquels la femme qui s’envole loin du serpent est nourrie dans le désert ; un mois de plus aussi que les trois ans et demi de la fin du chapitre 7 de Daniel, verset 25). Après cela, comme on le voit ici, le jugement arrive et le royaume est donné aux saints.

Ainsi, il est bien constaté que le passage (Matt. 24, 15) se rapporte aux derniers jours et à la position des Juifs dans ce temps-là. Les événements du temps passé depuis que le Seigneur a parlé, confirment cette pensée. Ni mille deux cent soixante jours, ni mille deux cent soixante ans après le temps de Titus, ni trente ans plus tard, aucun événement n’est arrivé qui puisse être l’accomplissement de ces jours de Daniel. Ces périodes-là sont passées depuis nombre d’années. Israël n’a pas été délivré, et Daniel ne s’est pas tenu dans son lot à la fin de ces jours. Il est également clair qu’il s’agit ici, dans le passage qui nous occupe, de Jérusalem et de ses environs ; car ceux qui sont en Judée sont appelés à s’enfuir aux montagnes (v. 16).

Les disciples qui se trouveront en Judée à ce moment-là devront prier que leur fuite n’arrive pas un jour de sabbat (v. 20) — c’est là un témoignage de plus que les Juifs sont le sujet de la prophétie ; c’est aussi un témoignage des tendres soins que le Seigneur prend des siens, en s’occupant, même au milieu de ces événements sans pareils, du temps qu’il ferait au moment de leur fuite.

En outre, d’autres circonstances, si toutefois de nouvelles preuves étaient nécessaires, démontrent qu’il s’agit ici du résidu juif, et non de l’Assemblée. Nous savons que tous les fidèles doivent être enlevés pour aller à la rencontre du Seigneur en l’air, et qu’après ils reviendront avec Lui (1 Thess. 4, 17, 14). Mais ici, il y aura de faux christs sur la terre, et l’on dira : « Voici, il est au désert », « il est là dans les chambres intérieures » (v. 24-26). Mais les saints qui seront enlevés et reviendront avec le Seigneur, n’ont absolument rien à faire avec les faux christs sur la terre, puisqu’ils iront dans le ciel pour y être avec Christ, avant qu’Il vienne sur la terre. Il est facile de comprendre, par contre, que les Juifs, qui attendent une délivrance terrestre, soient en butte à de pareilles tentations, et qu’ils soient trompés par le moyen de ces christs prétendus, s’ils ne sont pas gardés par Dieu Lui-même.

On voit donc que cette partie de la prophétie s’applique aux derniers jours, aux trois dernières années et demie à la fin desquelles le jugement éclatera par la venue du Fils de l’homme. Le Seigneur viendra subitement, comme un éclair, comme l’aigle sur sa proie, là où l’objet de Son jugement se trouvera (v. 27-28). Immédiatement après la tribulation de ces trois dernières années et demie, tout le système hiérarchique de gouvernement sera ébranlé et renversé de fond en comble (v. 29). Alors paraîtra le signe du Fils de l’homme, dans le ciel, et toutes les tribus de la terre verront le Fils de l’homme venant sur les nuées du ciel, avec puissance et une grande gloire (v. 29-30). Ce verset (30) est la réponse à la seconde partie de la demande des disciples, au verset 3. Le Seigneur donne à Ses disciples les avertissements nécessaires pour diriger leur conduite ; mais le monde ne verra aucun signe, quelque clairs que soient ces signes pour ceux qui comprennent. Mais le signe ne paraîtra qu’au moment de l’apparition du Seigneur. L’éclat de la gloire de Celui que le monde avait méprisé fera voir à ce monde qui est Celui qui vient ; et ce sera d’un côté d’où le monde ne l’attendait pas. Moment terrible, quand, au lieu d’un Messie qui réponde à leur orgueil terrestre, le Christ qu’ils ont méprisé apparaîtra dans le ciel !

Ensuite, le Fils de l’homme, ainsi venu et manifesté, enverra chercher tous les élus d’Israël des quatre coins du monde (v. 31). C’est là ce qui termine l’histoire des Juifs et même d’Israël, en réponse à la question des disciples, et développe les voies de Dieu à l’égard du témoignage au milieu du peuple qui L’avait rejeté, en annonçant le temps de la profonde détresse de ce peuple, et le jugement qui éclatera au milieu de cette scène, quand Jésus viendra, le bouleversement des puissances grandes et petites étant complet.

Le Seigneur donne l’histoire du témoignage en Israël, et celle de ce peuple lui-même, depuis le moment de Son départ jusqu’à Son retour ; mais l’espace de temps pendant lequel il n’y aura ni peuple, ni temple, ni cité, n’est pas spécifié. C’est ce qui rend importante la prise de Jérusalem. Il n’est pas directement question ici de cet événement — le Seigneur ne l’a pas décrit ; mais la prise de Jérusalem a mis fin à l’ordre de choses auquel le discours du Seigneur s’applique, à cet ordre de choses qui ne reprend pas son application jusqu’à ce que Jérusalem et les Juifs soient de nouveau en scène. Le Seigneur l’annonce au commencement. Les disciples pensaient que la venue du Seigneur aurait lieu en même temps que la destruction de Jérusalem. Aux questions qu’ils Lui avaient faites, Jésus répond de manière à ce que Son discours leur soit utile jusqu’à la prise de Jérusalem. Mais, une fois qu’il est fait mention de l’abomination de la désolation, nous sommes transportés aux derniers jours.

Les disciples devaient comprendre les signes que le Seigneur leur donnait. La destruction de Jérusalem, je l’ai déjà dit, arrêtait, par le fait même, l’application du discours de Jésus. La nation juive fut alors mise de côté ; mais le verset 34 a un sens beaucoup plus étendu, et qui lui est plus propre. Les Juifs incrédules subsisteront comme tels jusqu’à ce que tout soit accompli (comp. le chapitre 32 du Deutéronome, 5, 20, qui a particulièrement en vue ce jugement d’Israël). Dieu cache Sa face jusqu’à ce qu’Il voie quelle sera leur fin, car ils sont une génération très perverse, des enfants en qui il n’y a pas de foi. Cela est arrivé. Ils sont une race à part jusqu’aujourd’hui. Cette génération subsiste telle quelle — monument de l’infaillibilité des voies de Dieu et des paroles du Seigneur.

Enfin, le gouvernement que Dieu exerce à l’égard de ce peuple est retracé jusqu’à sa fin. Le Seigneur vient et Il rassemble les élus dispersés d’Israël (v. 31).

L’histoire prophétique continue au verset 31 du chapitre 25, qui se rattache au verset 30 du chapitre 24. Et comme ce verset 31 du chapitre 24 raconte le rassemblement d’Israël à la suite de l’apparition du Fils de l’homme, le verset 31 du chapitre 25 annonce Ses voies en jugement envers les Gentils. Le Fils de l’homme paraîtra, sans doute, comme un éclair à l’égard de l’apostasie qui sera comme un cadavre devant Lui. Mais, quand Il viendra solennellement, pour prendre Sa place terrestre en gloire, cet événement ne passera pas comme un éclair. Il s’assiéra sur le trône de Sa gloire, et toutes les nations seront assemblées devant Lui, assis sur Son trône de jugement, et elles seront jugées selon leur conduite à l’égard des messagers du royaume qui sont allés leur annoncer ce royaume. Ces messagers sont « les frères » dont il est question ici (chap. 25, 40) ; ceux qui les avaient reçus, sont les « brebis » (v. 32-33) ; ceux qui avaient négligé leur message sont les chèvres (v. 32, 41 et suiv.). Le récit, commençant au verset 31 du chapitre 25, de la séparation des brebis d’avec les chèvres et de ses résultats, représente les nations qui sont jugées sur la terre selon leur conduite envers ces messagers. C’est le jugement des vivants, au moins pour ce qui regarde les nations — jugement aussi final que celui des morts. Il ne s’agit pas ici du jugement guerrier du Christ, comme au chapitre 19 de l’Apocalypse. C’est une séance de Son tribunal suprême dans Son droit de gouverner la terre, comme au chapitre 20, 4 de l’Apocalypse. Je parle du principe, ou plutôt du caractère du jugement. Ces « frères » sont, je n’en doute pas, des Juifs tels que les disciples, c’est-à-dire qui se trouveront dans une position semblable quant à leur témoignage. Les Gentils qui auront reçu leur message seront acceptés comme s’ils avaient traité Christ de la même manière. Son Père leur avait préparé la jouissance du royaume ; et ils y entrent, tout en étant sur la terre, car Christ était venu dans la puissance de la vie éternelle[68].

J’ai passé, pour le moment, par-dessus tout ce qui se trouve entre le chapitre 24, 31, et le chapitre 25, 31, parce que la fin de ce dernier chapitre complète tout ce qui concerne le gouvernement et le jugement de la terre. Mais il y a une classe de personnes dont l’histoire, dans ses grands traits moraux, trouve sa place entre les deux versets que je viens d’indiquer. Ce sont les disciples de Christ en dehors du témoignage au milieu d’Israël, les disciples auxquels Il a confié Son service et une position en rapport avec Lui-même, pendant Son absence. Cette position et ce service sont en rapport avec Christ Lui-même, et non avec Israël, en quelque lieu que ce service soit accompli.

Avant d’en venir à ces versets-ci, il y en a cependant quelques-uns, dont je n’ai pas encore parlé, qui s’appliquent plus particulièrement à l’état de choses au milieu d’Israël, comme avertissement aux disciples qui s’y trouvaient, et décrivent le jugement distinctif qui se produit au milieu des Juifs aux derniers jours. Je m’en occupe ici, parce que toute cette partie de ce discours — savoir du chapitre 24, 31, au 25, 31 est une exhortation du Seigneur, une adresse aux disciples au sujet de leurs devoirs pendant Son absence. Je fais allusion aux versets 36 à 44 du chapitre 24. Ils nous parlent de l’attente continuelle qu’imposait aux disciples l’ignorance du moment auquel le Fils de l’homme paraîtrait, et dans laquelle les disciples étaient laissés intentionnellement (le jugement terrestre) ; tandis que, depuis le verset 45, le Seigneur s’adresse plus directement, et d’une manière plus générale en même temps, à leur conduite pendant Son absence, non en rapport avec Israël, mais avec les siens — les domestiques de Sa maison. Il leur avait confié la tâche de donner à ceux-ci une nourriture convenable dans Sa maison. C’est là la responsabilité du ministère, dans l’Assemblée.

Il est important de remarquer que, dans la première parabole, l’état de l’Assemblée est considéré comme un tout ; la parabole des vierges et celle des talents indiquent une responsabilité individuelle. Voilà pourquoi le serviteur infidèle est coupé en deux et a sa part avec les hypocrites. L’état de l’Assemblée responsable dépendait de son attente de Christ, ou de son cœur disant : Il tarde à venir. C’est au retour du Seigneur que le jugement sera prononcé sur la fidélité de Ses serviteurs pendant cet intervalle. La fidélité sera approuvée en ce jour-là. D’un autre côté, l’oubli pratique de Sa venue conduira à la licence et à la tyrannie.

Il ne s’agit pas ici d’un système intellectuel. « Le méchant esclave dit en son cœur : Mon maître tarde à venir » ; sa volonté y était engagée. Le résultat était que la volonté charnelle se manifestait. Ce n’était plus le service dévoué aux domestiques de sa maison, attendant de cœur l’approbation du maître quand il reviendrait ; mais la mondanité dans la conduite et la prétention à une autorité arbitraire à laquelle le service qui lui était confié prêtait l’occasion. Il mange et boit avec les ivrognes ; il s’unit au monde et partage ses voies ; il bat à son gré ceux qui sont esclaves avec lui. Voilà où l’on arrive quand on oublie, de propos délibéré, la venue de Jésus pendant Son absence, et qu’on tient l’Assemblée pour établie ici-bas ; à la place du service fidèle, on trouve la tyrannie et la mondanité. Et ce tableau n’est-il pas exact ?

Qu’est-il arrivé à ceux qui avaient la place du service dans la maison de Dieu ? Voici quelles sont les conséquences de part et d’autre : le fidèle serviteur qui, par amour et dévouement pour son maître, se sera voué au bien de sa maison, sera, au retour du maître, établi sur tous ses biens ; ceux qui auront été fidèles dans le service de la maison, seront établis sur toutes choses par le Seigneur, quand Il prendra Sa place de puissance et agira en Roi. Toutes choses sont livrées à Jésus par le Père. Ceux qui, dans l’humilité, auront été fidèles à Son service pendant Son absence, seront établis sur tout ce qui Lui a été confié, c’est-à-dire sur toutes choses — elles ne sont autre chose que les « biens » de Jésus. D’un autre côté, celui qui se sera élevé en maître pendant l’absence du Seigneur et se sera laissé conduire par l’esprit de la chair et du monde auquel il se sera uni, ne sera pas traité seulement comme le monde ; son maître viendra à un moment tout à fait inattendu, et il recevra le châtiment des hypocrites. Quelle leçon pour ceux qui s’attribuent une place de service dans l’Assemblée ! Et il est à remarquer ici qu’il n’est pas dit que ce serviteur soit ivrogne lui-même, mais qu’il mange et qu’il boit avec les ivrognes. Il s’allie au monde et suit ses habitudes.

Du reste, tout méchant qu’est le cœur du mauvais serviteur, voici l’aspect général que prendra le royaume dans ce jour-là. L’époux tardera en effet ; et les conséquences qu’on en pourra attendre de la part du cœur de l’homme ne manqueront pas de se réaliser. Mais l’effet, que nous trouvons alors, est de mettre en évidence ceux qui avaient réellement la grâce de Christ[69] et ceux qui ne l’avaient pas.

Chapitre 25. — Les professants, pendant l’absence du Seigneur, sont présentés ici comme des vierges qui sortent à la rencontre de l’époux pour l’éclairer dans son chemin vers la maison. Dans ce passage, il n’est pas l’époux de l’Église. D’autres ne vont pas à Sa rencontre pour Ses noces avec l’Église dans le ciel. L’Épouse ne paraît pas dans cette parabole. Si elle avait été introduite, c’eût été Jérusalem sur la terre. L’Église, comme telle, n’est pas en scène dans ces chapitres.

Il s’agit ici de la responsabilité individuelle[70] pendant l’absence de Christ. Ce qui caractérisait les fidèles à cette époque, c’est qu’ils sortaient du monde, du judaïsme, de tout, même de la religion en rapport avec le monde, pour aller à la rencontre du Seigneur qui vient. Le résidu juif, au contraire, attend Jésus là où ce résidu se trouve. Si cette attente était réelle, la pensée de ce qui sera nécessaire pour Celui qui vient — la lumière, l’huile — caractériserait celui qui est gouverné par elle. Autrement, il suffira au cœur d’être en attendant dans la compagnie des professants, et de porter des lampes avec eux. Néanmoins, les vierges prennent toutes leur position ; elles sortent ; elles quittent la maison pour aller à la rencontre de l’époux. Il tarde. Cela aussi a eu lieu. Toutes s’endorment (v. 5). Toute l’église professante a perdu la pensée du retour du Seigneur — même les fidèles qui ont l’Esprit. Aussi sont-ils encore entrés quelque part pour dormir à l’aise — dans quelque lieu où la chair trouve du repos. Or, au milieu de la nuit, à un moment inattendu, le cri s’élève : « Voici l’époux ; sortez à sa rencontre ! » (v. 6). Hélas ! on avait besoin encore du même appel qu’au commencement. On doit encore sortir pour aller à sa rencontre. Les vierges se lèvent et apprêtent leurs lampes. Il se passe assez de temps entre le cri de minuit et l’arrivée de l’époux pour mettre l’état de chacune à l’épreuve. Or, il y avait des vierges qui n’avaient pas d’huile dans leurs vaisseaux. Leurs lampes s’éteignaient[71]. Les sages avaient de l’huile, mais il leur était impossible de la partager avec les autres. Celles-là seules qui en avaient entrèrent avec l’époux pour prendre part aux noces (v. 7-10). L’époux refuse de reconnaître les autres. Qu’avaient-elles à faire là ? Les vierges devaient éclairer avec leurs lampes. Elles ne l’avaient pas fait. Pourquoi jouiraient-elles du festin ? Elles avaient manqué dans ce qui leur y donnait une place. À quel titre y avaient-elles droit ? Les vierges du festin étaient celles qui accompagnaient l’époux. Elles ne l’avaient pas fait. Elles n’entraient pas non plus au festin. Les chrétiens fidèles eux-mêmes ont oublié la venue de Christ. Ils se sont endormis. Mais au moins ils possédaient la chose essentielle à cette venue. La grâce de l’époux fait éclater le cri (v. 6) qui annonce Son arrivée. Ce cri éveille les vierges : elles ont de l’huile dans leurs vaisseaux ; le délai qui fait que les lampes des infidèles s’éteignent, donne le temps aux fidèles de se préparer et de se trouver à leur place ; et tout oublieuses qu’elles aient pu être, elles entrent avec l’époux au festin des noces[72].

Nous passons maintenant de l’état de l’âme au service.

Car, en vérité (v. 14), il en est de ceci comme d’un homme qui s’étant éloigné de chez lui — car le Seigneur habitait en Israël — confie ses biens à ses serviteurs, puis s’en va. Nous avons ici les principes qui caractérisent les serviteurs fidèles, ou le contraire. Il ne s’agit pas ici de l’attente personnelle, individuelle, et de la possession de l’huile nécessaire pour avoir une place dans le cortège glorieux du Seigneur ; il ne s’agit pas non plus de la position publique et générale de ceux qui étaient au service du Maître, caractérisée comme position et comme tout, et ainsi désignée par un seul serviteur ; mais ce que nous trouvons ici, c’est la fidélité individuelle dans le service, comme auparavant l’attente de l’Époux. Le Maître réglera Ses comptes avec chacun à Son retour. Or, quelle était la position des serviteurs ? Quel est le principe qui produira la fidélité ?

Remarquons premièrement qu’il ne s’agit pas de dons providentiels, de possessions terrestres. Ce ne sont pas là les « biens » que Jésus a confiés aux siens en s’en allant. C’étaient des biens qui les rendaient propres pour travailler à Son service pendant Son absence. Le maître était souverain et sage. Il donnait différemment à chacun, et à chacun selon sa capacité. Chacun était approprié au service qui lui était confié, et les dons nécessaires pour l’accomplir lui étaient communiqués. La fidélité pour accomplir le service, voilà la seule chose en question. Or ce qui distinguait les serviteurs fidèles de l’infidèle, c’était la confiance dans leur Maître. Ils avaient assez de confiance dans Son caractère bien connu, dans Sa bonté et Son amour, pour travailler sans autre autorisation que la connaissance qu’ils avaient de Son caractère personnel et l’intelligence que cette confiance et cette connaissance produisaient. À quoi bon leur avoir laissé des sommes d’argent, si ce n’est pour trafiquer avec elles ? Avait-Il manqué de sagesse en leur conférant ces dons ? Le dévouement qui découlait de la connaissance qu’ils avaient de leur Maître, comptait sur l’amour de Celui qu’ils connaissaient. Ils travaillaient et ils étaient récompensés. C’est là le vrai caractère et le ressort du service dans l’Église. C’était ce qui manquait au troisième serviteur. Lui ne connaissait pas son Maître — il ne se fiait pas à Lui. Il n’a même pas su faire ce qui était conséquent avec ses propres pensées (v. 24-27). Il attendait une autorisation qui lui donnât de la sécurité contre le caractère que son cœur attribuait faussement à son Maître. Ceux qui ont connu le caractère de leur Maître sont entrés dans Sa joie.

Il y a cette différence entre cette parabole-ci et celle de Luc, chapitre 19, 12-27, qu’en Luc chaque serviteur reçoit une mine ; il ne s’agit que de sa responsabilité. Et par conséquent celui qui a gagné dix mines est établi sur dix villes. Ici, il s’agit de la souveraineté et de la sagesse de Dieu, et celui qui travaille est conduit par la connaissance qu’il a de son Maître : les conseils de Dieu en grâce sont accomplis. Celui qui a le plus reçoit encore davantage (v. 20, 21 et 29). La récompense en même temps est plus générale. Celui qui a gagné deux talents et celui qui en a gagné cinq entrent tous les deux dans la joie du Seigneur qu’ils ont servi (v. 21 et 23). Ils L’ont connu sous Son vrai caractère ; ils entrent dans Sa pleine joie. Que le Seigneur nous l’accorde à tous !

Il y a plus que cela dans la seconde parabole — celle des vierges. Elle se rapporte plus directement et plus exclusivement au caractère céleste des chrétiens. Ce n’est pas de l’Assemblée proprement dite, comme corps, qu’il est question ; mais les fidèles sont sortis pour aller à la rencontre de l’Époux qui revenait aux noces. Le royaume des cieux, au temps où le Seigneur reviendra pour exécuter le jugement, prendra le caractère de personnes sorties du monde et encore plus du judaïsme — de tout ce qui tient à la chair en fait de religion — de toute forme mondaine établie — pour n’avoir affaire qu’avec le Seigneur qui vient, et pour aller vers Lui. C’était là le caractère des fidèles dès l’origine, comme ayant part au royaume des cieux, en tant qu’ils comprenaient la position où le rejet de Christ les avait placés. Les vierges, il est vrai, étaient rentrées de nouveau, et cela faussait leur caractère ; mais le cri de minuit les ramène à leur vraie place. Aussi elles entrent avec l’Époux, et il ne s’agit pas de juger ni de récompenser, mais d’être avec Christ. Le sujet de la première parabole et de celle de Luc, est le retour de Jésus ici-bas, et la récompense individuelle — résultat, dans le royaume, de leur conduite pendant l’absence du Roi[73]. Il ne s’agit pas de cela dans la parabole des vierges. Celles qui n’ont pas d’huile n’entrent pas du tout aux noces. Cela suffit. Les autres ont une bénédiction commune ; elles y entrent avec l’Époux. Il ne s’agit pas de récompense particulière, ni de différence de conduite entre elles. C’était l’attente de leur cœur, quoique la grâce eût à les y ramener ; quel qu’ait été le champ du service, la récompense était sûre. Cette seconde parabole s’applique et se borne à la portion céleste du royaume comme telle. Elle est une similitude du royaume des cieux.

On peut remarquer ici que le retard du Maître est signalé également dans la troisième parabole (v. 19) : « Longtemps après ». La fidélité et la constance des serviteurs étaient ainsi mises à l’épreuve. Que le Seigneur nous donne d’être trouvés maintenant, à la fin du temps, fidèles et dévoués, afin qu’Il puisse nous dire : « Bon et fidèle esclave » ! Une chose digne de remarque, c’est que dans ces paraboles, les serviteurs ou ceux qui sont sortis au commencement, sont les mêmes qui se retrouvent à la fin. Le Seigneur ne suppose pas un retard se prolongeant au-delà de « nous, les vivants[74], qui demeurons ».

Les pleurs et les grincements de dents sont la portion de celui qui n’a pas connu son Maître, et qui L’a outragé par les pensées qu’il avait de Son caractère.

L’histoire prophétique, interrompue depuis la fin du verset 31 du chapitre 24, est reprise au verset 31 du chapitre 25. Nous avons vu le Fils de l’homme paraître comme un éclair et ensuite rassembler le résidu d’Israël des quatre coins de la terre. Mais ce n’est pas tout. S’Il apparaît ainsi d’une manière aussi subite qu’inattendue, Il établit également Son trône de jugement et de gloire sur la terre. S’Il détruit Ses ennemis qu’Il trouve soulevés contre Lui, Il s’assied aussi sur Son trône pour juger toutes les nations. C’est là le jugement des vivants sur la terre.

Quatre partis différents se trouvent ici en présence : le Seigneur, le Fils de l’homme, Lui-même — les frères, les brebis et les chèvres. Les frères ici sont les Juifs, je le crois, ces Juifs qu’Il avait employés comme messagers pour prêcher le royaume pendant Son absence. L’évangile du royaume devait être prêché comme témoignage à toutes les nations ; ensuite la fin du siècle viendrait. Or, ceci avait eu lieu à l’époque dont il est question ici. Le résultat en sera manifesté devant le trône du Fils de l’homme sur la terre.

Le Fils de l’homme appelle donc ces messagers : « ses frères ». Il leur avait dit qu’ils seraient maltraités, et ils l’avaient été. Cependant il y avait des hommes qui avaient reçu leur témoignage.

Or, telle était l’affection du Seigneur pour Ses fidèles serviteurs, tel était le cas qu’Il faisait d’eux, qu’Il traitait ceux auxquels le témoignage avait été adressé d’après la manière dont ils avaient reçu Ses serviteurs, soit en bien, soit en mal, comme s’ils eussent fait ces choses à Lui-même. Quel encouragement pour Ses témoins, durant ce temps pénible, où l’activité de leur foi sera mise à l’épreuve ! En même temps, c’était moralement la justice à l’égard de ceux qui étaient jugés, car ils avaient rejeté le témoignage, quel qu’eût été celui qui l’avait rendu. Ensuite la Parole nous donne la conséquence de la conduite, soit des uns, soit des autres. C’est le roi — car c’est là le caractère que Christ a pris maintenant sur la terre — qui prononce le jugement ; et Il appelle « les brebis » (ceux qui avaient accueilli les messagers et avaient sympathisé avec eux dans leurs peines et leurs persécutions) à hériter du royaume qui leur avait été préparé dès la fondation du monde ; car telles avaient été les intentions de Dieu à l’égard de cette terre. Dieu avait toujours en vue le royaume. Ils étaient les bénis de Son Père (du Père du Roi). Ils n’étaient pas des enfants comprenant leur propre relation avec leur Père ; mais ils étaient l’objet de la bénédiction du Père du Roi de ce monde. En outre, ils devaient entrer dans la vie éternelle ; car telle était, par grâce, la puissance de la Parole qu’ils avaient reçue dans leur cœur. Possesseurs de la vie éternelle, ils seront bénis dans un monde béni aussi (v. 34).

Ceux qui avaient méprisé le témoignage et les témoins, avaient par là méprisé le Roi qui les avait envoyés ; ils s’en iront dans les tourments éternels (v. 45-46).

Ainsi, tout l’effet de la venue de Christ, en rapport avec le royaume et Ses messagers pendant Son absence, est développé : à l’égard des Juifs jusqu’au verset 31 du chapitre 24 ; à l’égard de Ses serviteurs pendant Son absence, jusqu’à la fin du verset 30 du chapitre 25, y compris le royaume des cieux dans son état actuel, et les récompenses célestes qui seront accordées ; et ensuite, à l’égard des nations bénies sur la terre lors de Son retour, depuis le verset 31 de ce chapitre 25, jusqu’à la fin.

Chapitre 26. — Le Seigneur avait fini Ses discours. Il se prépare à souffrir et à faire Ses derniers et touchants adieux à Ses disciples à la table de Sa dernière pâque dans ce monde, table où Il a institué le simple et précieux mémorial qui rappelle avec un intérêt si profond Ses souffrances et Son amour. Cette partie de notre évangile n’exige pas beaucoup d’explications — non pas, assurément, que l’intérêt y manque, mais parce qu’elle a besoin d’être sentie plutôt qu’expliquée.

Avec quelle simplicité le Seigneur annonce ce qui doit arriver (v. 2) ! Déjà six jours avant la Pâque, Il est arrivé à Béthanie (Jean 12, 1) ; Il y a demeuré, sauf pour le dernier souper, jusqu’à ce qu’Il fût saisi au jardin de Gethsémané, quoiqu’Il visitât Jérusalem et y eût pris Son dernier repas.

Nous avons examiné plus haut les discours prononcés par le Seigneur pendant ces six jours, ainsi que Ses actes tels que la purification du temple ; ce qui précède ce chapitre (26), c’est la manifestation des droits du Seigneur comme Emmanuel, Roi d’Israël, ou celle du jugement du grand Roi, à l’égard du peuple — jugement exprimé dans des paroles auxquelles le peuple n’avait rien à répondre ; et enfin l’état de Ses disciples pendant Son absence. Maintenant nous est présentée la soumission de Christ au jugement qui allait être exécuté contre Lui, mais qui n’était réellement que l’accomplissement des conseils de Dieu son Père et l’œuvre de Son propre amour.

Le tableau de l’affreux péché de l’homme dans le crucifiement de Jésus se déroule devant nos yeux. Mais le Seigneur Lui-même (chap. 26, 2) annonce Sa mort à l’avance, avec le calme de quelqu’un qui était venu pour cela. Avant que les principaux sacrificateurs consultent ensemble, Jésus en parle comme d’une chose arrêtée : « Vous savez que la Pâque est dans deux jours, et le Fils de l’homme est livré pour être crucifié ».

Ensuite (v. 3), les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens du peuple se rassemblent, afin d’arrêter leurs plans pour s’emparer de la personne de Jésus et se défaire de Lui.

En un mot, nous avons d’abord les conseils merveilleux de Dieu, et la soumission de Jésus d’après la connaissance qu’Il a de ces conseils et des circonstances qui les accompliront ; ensuite, les conseils iniques de l’homme qui ne font qu’accomplir ceux de Dieu. Leur projet de ne pas Le prendre pendant la fête, parce qu’ils craignaient le peuple (v. 5), n’était pas de Dieu et tombe : Il devait souffrir pendant la fête.

Judas n’était qu’un instrument de leur malice dans la main de Satan qui, après tout, ne fit que régler les choses selon l’intention divine. Les principaux du peuple voulaient, mais en vain, éviter de se saisir de Jésus au moment de la fête, à cause de la multitude qui pouvait Le favoriser, s’Il en appelait à elle. Ils avaient déjà agi de même (Marc 11, 18) lors de Son entrée à Jérusalem. On pensait que Jésus ferait cet appel, car la méchanceté compte toujours trouver ses propres principes chez d’autres. C’est pourquoi si souvent elle ne réussit pas à circonvenir les justes — ils sont simples. Ici, c’était la volonté de Dieu que Jésus souffrît pendant la fête. Mais Dieu avait préparé un doux soulagement pour le cœur du Sauveur — un baume pour Son cœur plus que pour Son corps — circonstance employée par l’ennemi pour pousser Judas à l’extrémité et le mettre en rapport avec les principaux sacrificateurs.

Béthanie — dont le souvenir se lie aux derniers moments de tranquillité et de paix de la vie du Sauveur et où demeuraient Marthe et Marie et Lazare, le mort ressuscité — Béthanie[75] reçoit Jésus pour la dernière fois : retraite bénie, mais momentanée, d’un cœur qui, en tout temps prêt à s’épancher en amour, était toujours à l’étroit dans un monde de péché qui ne répondait pas à cet amour et en était incapable ; d’un cœur qui, cependant, nous a donné, dans ses rapports avec cette famille bien-aimée, l’exemple d’une affection parfaite et pourtant humaine, trouvant de la douceur à se rencontrer avec ce qui l’appréciait et y répondait. La proximité de la croix au-devant de laquelle Il a dû dresser Sa face comme un caillou, n’a pas privé Son cœur de la joie ou de la douceur de cette communion, tout en la rendant solennelle et touchante. En faisant l’œuvre de Dieu, Jésus n’a pas cessé d’être homme. En tout Il a daigné être nôtre. Il ne pouvait plus reconnaître Jérusalem, et ce sanctuaire de Béthanie L’abritait pour un moment de la rude main de l’homme. Il pouvait y montrer ce qu’Il était toujours comme homme. C’est avec raison que l’acte de celle qui, dans un certain sens, pouvait apprécier ce qu’Il sentait[76] (celle dont l’affection comprenait instinctivement l’inimitié qui s’élevait contre l’objet qu’elle aimait, inimitié qui faisait ressortir cette affection), l’acte qui exprimait l’appréciation que son cœur faisait de la valeur et de la grâce de Jésus, est raconté dans le monde entier (v. 6-13). C’est une scène, un témoignage qui place le Sauveur sensiblement près de nous et réveille dans nos cœurs un sentiment qui les sanctifie en les liant à Sa personne bien-aimée.

Sa vie habituelle était une tension d’âme perpétuelle en proportion de la puissance de Son amour — une vie de dévouement au milieu du péché et de la misère. Pour un moment, Il put reconnaître, et Il reconnut (en présence de la puissance du mal qui alors allait avoir son cours, et de l’amour qui, par la vraie connaissance de Jésus, cultivée en restant assis à Ses pieds, s’attachait à Lui, s’inclinant ainsi sous cet amour) ce dévouement pour Lui-même manifesté par les choses auxquelles Son âme se soumettait en perfection divine. Il pouvait donner un langage intelligent, son vrai sens, à ce qui dirigeait divinement l’affection qui agissait en silence[77] envers Lui.

Le lecteur fera bien d’étudier soigneusement cette scène de touchante condescendance et d’épanchement de cœur. Du chapitre 16 jusqu’à la fin du chapitre 25, Jésus, Emmanuel, Roi et souverain Juge, venait de faire tout passer en jugement devant Lui. Il avait terminé ce qu’Il avait à dire. Sous ce rapport, Sa tâche au milieu du monde était accomplie. Il prend alors la place de victime ; Il n’avait qu’à souffrir et peut se laisser aller librement à jouir des expressions touchantes d’affection découlant d’un cœur qui Lui était dévoué. II ne pouvait que goûter le miel et passer outre ; mais Il le goûte, et Il n’a pas rejeté une affection que Son cœur pouvait apprécier et appréciait.

Remarquons encore l’effet d’une affection profonde pour le Seigneur. Cette affection respire nécessairement l’atmosphère dans laquelle l’esprit du Seigneur se trouvait alors. La femme qui L’avait oint n’était pas informée des circonstances qui allaient arriver, et elle n’était pas prophétesse. Mais l’approche de cette heure de ténèbres se faisait sentir à qui avait le cœur fixé sur Jésus[78]. Devant Lui les diverses formes du mal se déployaient, se dessinaient sous leurs vraies couleurs, se groupaient, sous l’influence d’un seul maître, de Satan, autour de l’unique objet contre lequel il valait la peine de concentrer toute cette méchanceté et qui mettait en plein jour le vrai caractère de chacun.

Mais la perfection de Jésus, qui faisait ressortir l’inimitié de l’homme, dévoilait l’affection qui se trouvait en Marie ; elle, pour ainsi dire, reflétait la perfection dans l’affection ; et comme cette perfection était mise en activité et produite dans la lumière par l’inimitié, il en était de même de son affection. Aussi le cœur de Christ ne pouvait qu’y répondre. Jésus, en raison de cette inimitié, était encore plus l’objet d’un cœur qui, certainement conduit de Dieu, saisissait instinctivement ce qui se passait.

Le temps du témoignage et même l’explication de ses relations à tous ceux qui l’entouraient était terminé. Son cœur pouvait jouir librement des affections vraies, bonnes et spirituelles dont il était l’objet, affections qui, quelle que fût leur forme humaine, montraient si clairement leur origine divine en ce qu’elles s’attachaient à cet objet sur lequel toute l’attention du ciel était concentrée dans ce moment solennel.

Jésus Lui-même avait le sentiment de Sa position. Il s’occupait de Son départ. Pendant qu’Il exerce Sa puissance, Il se cache et Il s’oublie. Mais, maintenant, opprimé, rejeté et semblable à un agneau mené à la boucherie, Il sent qu’Il est le juste objet des pensées des siens, de tous ceux qui ont des cœurs pour apprécier ce que Dieu apprécie. Son cœur est plein de ce qui va arriver (voyez les v. 2, 10-13, 18, 21).

Mais disons encore quelques mots de la femme qui oignit Jésus. Elle montre d’une manière frappante quel effet peut produire le cœur fixé avec affection sur Jésus. Préoccupée de Lui, elle sent Sa position. Elle sent ce qui Le touche, et cela met en jeu son affection selon le dévouement spécial que cette situation lui inspire. Comme la haine contre Lui s’élève jusqu’à des intentions meurtrières, l’esprit de dévouement pour Lui y répond et grandit en elle. Elle fait, par conséquent, avec tout le tact du dévouement, précisément ce qui convient à la position du Seigneur. Sans doute la pauvre femme ne s’en rend pas compte par son intelligence, mais elle a fait ce qui convenait. La valeur si infiniment précieuse que la personne de Jésus avait pour elle la rendait clairvoyante à l’égard de ce qui se passait dans son esprit. Christ se revêtait à ses yeux de tout l’intérêt de ses circonstances ; et elle prodigue sur Lui ce qui est l’expression de son affection. Fruit de ce sentiment, son acte répond aux circonstances ; et quoiqu’il ne fût que l’effet de l’instinct de son cœur, il prend aux yeux de Jésus toute la valeur que la parfaite intelligence du Seigneur pouvait lui attribuer, intelligence qui embrassait à la fois ce qui se passait dans le cœur de la femme et les événements à venir.

Mais ce témoignage d’affection et de dévouement à Christ fait ressortir l’égoïsme, le manque de cœur des autres témoins de cette scène. Ils blâment la pauvre femme et prouvent tristement (pour ne rien dire de Judas[79]) combien peu la connaissance de ce qui concerne Jésus réveille nécessairement dans nos cœurs les affections qui conviennent à cette connaissance (v. 8-9). Après cela (v. 14-16), Judas s’en va et s’entend avec les malheureux sacrificateurs afin de leur livrer Jésus pour le prix d’un esclave.

Le Seigneur poursuit Sa voie d’amour ; et de même qu’Il avait accepté le témoignage d’affection de la pauvre femme, Il rend à Ses disciples un témoignage infiniment précieux pour nos âmes.

Le verset 16 termine le sujet que nous venons de traiter, savoir : la connaissance que Christ avait selon Dieu de ce qui L’attendait, les complots des principaux sacrificateurs, l’affection de la pauvre femme agréée du Seigneur, la froideur égoïste des disciples, et la trahison de Judas.

Le Seigneur institue alors le mémorial de la vraie Pâque. Il envoie Ses disciples faire les préparatifs pour la célébration de la fête à Jérusalem. Il désigne Judas comme celui qui devait le livrer aux Juifs (v. 17-25). On remarquera que le Seigneur n’exprime pas ici simplement la connaissance qu’Il avait de celui qui devait Le livrer — Il savait cela quand Il appela Judas ; mais Il dit : « l’un d’entre vous me livrera » (v. 21). C’était cela qui touchait le cœur de Jésus : et Il voulait que le leur aussi en fût touché.

Jésus montre ensuite que c’est d’un Sauveur mis à mort qu’il faut se souvenir. Il n’était plus question d’un Messie vivant ; tout cela était fini. Il ne s’agissait plus du souvenir de la délivrance d’Israël de l’esclavage de l’Égypte. Christ, et un Christ mort, commençait tout un nouvel ordre de choses. C’était à Lui qu’ils devaient penser maintenant — à Lui, mort ici-bas. Puis Jésus attire leur attention sur le sang de la nouvelle alliance, et sur ce qui fait que ce sang s’étend à d’autres que des Juifs, sans les nommer. — « Il est versé pour plusieurs ». D’ailleurs ce sang n’est pas seulement, comme en Sinaï, pour confirmer l’alliance à laquelle ils étaient tenus d’être fidèles : il était versé en rémission de péchés. De sorte que la cène présente le souvenir de Jésus mort, de Jésus qui en mourant a rompu avec le passé, posé le fondement de la nouvelle alliance, obtenu la rémission des péchés et ouvert la porte aux Gentils. C’est dans Sa mort seule que la cène nous présente Jésus. Son sang est séparé de Son corps ; Il est mort. Ce n’est ni Christ vivant sur la terre, ni Christ glorieux dans le ciel. Il est séparé de Son peuple en tant qu’Il s’agit de leurs joies sur la terre, mais ils doivent L’attendre comme le compagnon du bonheur qu’Il leur a assuré — car Il daigne l’être — pour de meilleurs jours : — « Désormais je ne boirai plus de ce fruit de la vigne, jusqu’à ce jour où je le boirai nouveau[80] avec vous dans le royaume de mon Père » (v. 29). Mais, ces liens une fois rompus, qui, excepté Jésus, pourrait soutenir la lutte ? Tous L’abandonnent. Les témoignages de la Parole s’accomplissent, car il était écrit : « Je frapperai le berger, et les brebis du troupeau seront dispersées » (v. 31).

Cependant, Jésus ira renouer Ses relations, comme Sauveur ressuscité, avec ces pauvres du troupeau, là même où Il s’était déjà identifié avec eux pendant Sa vie (v. 32). Il ira devant eux en Galilée. Cette promesse est très remarquable, parce que le Seigneur recommence, sous une nouvelle forme, Ses relations judaïques avec eux et avec le royaume. On peut remarquer ici que, comme le Seigneur avait jugé toutes les classes de personnes (jusqu’à la fin du chapitre 25), Il montre maintenant le caractère de Ses rapports avec tous ceux avec lesquels Il en maintenait. Soit qu’il s’agisse de la femme, soit qu’il s’agisse de Judas, ou des disciples, chacun prend sa place en relation avec le Seigneur. C’est tout ce qui se trouve ici. Si Pierre a eu assez d’énergie naturelle pour aller un peu plus loin, ce sera pour faire une chute plus lourde là où le Seigneur seul pouvait se tenir debout.

Et maintenant (v. 36 et suiv.), le Seigneur s’isole pour présenter, en supplication à Son Père, les souffrances qui L’attendent.

Mais, tout en s’isolant pour Sa prière, Il prend avec Lui trois de Ses disciples, afin qu’ils puissent veiller avec Lui dans ce moment solennel. Ce sont les mêmes qui avaient été avec Lui lors de la transfiguration. Ils devaient voir Sa gloire dans le royaume et Ses souffrances. Il s’en va un peu plus avant. Eux s’endorment, ainsi qu’ils l’avaient fait sur la montagne de la transfiguration. La scène qui se passe ici nous est dépeinte au chapitre 5 de l’épître aux Hébreux, verset 7. Jésus ne buvait pas encore la coupe, mais elle était devant Ses yeux. Sur la croix, Il l’a bue, étant fait péché pour nous, Son âme se sentant abandonnée de Lui. Ici, la puissance de Satan agit en employant la mort comme terreur pour l’accabler. Mais la considération de ce sujet sera plus à sa place en étudiant l’évangile de Luc.

Nous voyons ici l’âme de Jésus sous le poids de la mort — anticipée — comme Lui seul pouvait la connaître, et elle n’avait pas encore perdu son aiguillon. Nous savons qui en a l’empire, et jusqu’ici la mort avait tout le caractère des gages du péché, et la malédiction, celui du jugement de Dieu. Mais Jésus veille, et Il prie. Homme exposé par Son amour à cet assaut, en présence de la plus puissante tentation à laquelle Il pût être soumis, d’un côté Il veille, et de l’autre Il présente Son angoisse à Son Père. Sa communion avec le Père n’était pas interrompue quelle que fût Sa détresse. Cette détresse même Le poussait davantage, en toute soumission et toute confiance, vers Son Père. Mais si nous devions être sauvés, si Dieu devait être glorifié en Lui qui s’était chargé de notre cause, la coupe ne devait pas passer loin de Lui. La soumission de Jésus est parfaite.

Il rappelle avec tendresse à Pierre sa fausse confiance[81], en lui faisant sentir sa faiblesse (v. 40-41) ; mais Pierre était trop plein de lui-même pour en profiter ; il se réveille bien de son sommeil, mais sa fausse confiance n’est pas ébranlée. Il lui fallait une expérience plus triste que celle-là pour le guérir de cette confiance.

Jésus prend donc la coupe ; mais Il la prend de la main de Son Père. La volonté de Son Père était qu’Il la bût. S’abandonnant ainsi parfaitement à Son Père, ce n’est ni de la main de Ses ennemis, ni de celle de Satan (bien qu’ils fussent les instruments) qu’Il la reçoit. Selon la perfection avec laquelle Il s’était soumis à la volonté de Dieu à cet égard, en Lui remettant tout, c’est de Sa main seule qu’Il la reçoit. C’est la volonté du Père. Ainsi, en ne cherchant que la volonté de Dieu qui dirige tout, nous échapperons aux causes secondaires et aux tentations de l’ennemi. C’est de Dieu qu’on reçoit l’affliction et l’épreuve, quand elles arrivent.

Mais il n’est plus besoin que les disciples veillent : l’heure s’est approchée[82]. Jésus allait être livré entre les mains des hommes. C’était assez dire. Judas le désigne par un baiser. Jésus va à la rencontre de la foule et reprend Pierre de ce qu’il avait voulu résister avec des armes charnelles. Si le Christ avait voulu échapper, Il aurait pu demander douze légions d’anges et les avoir ; mais toute l’Écriture devait s’accomplir[83]. C’était l’heure de la soumission de Jésus à l’effet de la malice de l’homme, de la puissance des ténèbres, et du jugement de Dieu contre le péché. Il est l’agneau pour la boucherie. Alors tous les disciples L’abandonnent (v. 56). Il se rend à eux, montrant aux foules qui venaient là, ce qu’elles faisaient. Si nul ne peut démontrer Sa culpabilité, Lui ne niera pas la vérité. Il confesse la gloire de Sa personne comme Fils de Dieu, et déclare que dorénavant ils verront le Fils de l’homme, non plus dans la douceur de Celui qui ne brise pas le roseau froissé, mais venant sur les nuées du ciel et assis à la droite de la puissance (v. 56-64).

Ayant rendu ce témoignage, Jésus est condamné pour ce qu’Il a dit de Lui-même — pour la confession de la vérité. Les faux témoins ne réussissent pas. Les principaux sacrificateurs et les chefs d’Israël étaient coupables de Sa mort en vertu de leur propre rejet du témoignage qu’Il rendait à la vérité. Il était la vérité ; eux étaient sous la puissance du père du mensonge, rejetant le Messie, le Sauveur de Son peuple (v. 65-66). Il ne viendra plus à eux, sinon en juge.

Ils L’insultent et L’outragent. Chacun, hélas ! nous l’avons vu, prend sa place ici — Jésus, celle de victime ; les autres celle de trahison, de rejet, d’abandon, de reniement du Sauveur. Quel tableau ! Quel moment solennel ! Qui pouvait y rester indemne ? Christ seul ; et Il le traversait en victime. Comme tel, Il devait être dépouillé de tout, et cela dans la présence de Dieu. Toute autre chose disparaissait, excepté le péché qui conduisait à la croix ; et, par grâce, le péché lui-même aussi devant la puissante efficace du sacrifice. Confiant en lui-même, Pierre hésite, et, quand il est reconnu, mentant et jurant, il renie son Maître ; puis, péniblement convaincu de l’impuissance de l’homme vis-à-vis de l’ennemi de son âme et du péché, il sort et pleure amèrement : ces larmes ne pouvaient pas effacer sa faute, mais en prouvant qu’il y avait, par grâce, intégrité de cœur, elles témoignaient de cette impuissance même à laquelle l’intégrité de cœur ne portait pas remède[84].

Chapitre 27. — Ensuite les malheureux sacrificateurs et chefs du peuple livrent leur Messie aux Gentils, ainsi que Jésus l’avait annoncé à Ses disciples. Judas, au désespoir, sous la puissance de Satan, se pend, après avoir jeté la récompense de son iniquité aux pieds des principaux sacrificateurs et des anciens. Satan est forcé de rendre témoignage à l’innocence du Seigneur même, par une conscience qu’il a trompée. Quelle scène ! Puis les sacrificateurs, qui ne se faisaient pas conscience d’acheter à Judas le sang de Jésus, se font un scrupule de mettre l’argent dans le trésor du temple, parce qu’il était le prix du sang. Il fallait qu’en présence de ce qui se passait alors, l’homme se fît voir tel qu’il était, et montrât la puissance de Satan sur lui. Les sacrificateurs, ayant tenu conseil, achètent un cimetière pour les étrangers. Ceux-ci étaient à leurs yeux assez profanes pour cela, pourvu qu’eux-mêmes ne fussent pas souillés par un tel argent. Cependant c’était le temps de la grâce de Dieu pour les étrangers, et du jugement d’Israël. Du reste, ils établissaient ainsi un mémorial perpétuel de leur propre péché et du sang qui avait été répandu. Aceldama est tout ce qui reste dans ce monde des circonstances de ce grand sacrifice. Le monde est un champ de sang, mais il parle mieux que le sang d’Abel.

Il est connu que cette prophétie se trouve dans le livre de Zacharie (chap. 11, 12-13). Le mot « Jérémie » a pu glisser dans le texte, quand il n’y avait rien que : « par le prophète » ; ou bien, comme d’après l’ordre voulu par les talmudistes, « Jérémie » était le premier dans le livre des prophètes, on disait probablement « Jérémie ou l’un des prophètes » (voy. Matt. 16, 14). Mais ce n’est pas ici le lieu de discuter cette question.

Leur part dans les scènes juives cesse ici. Le Seigneur se tient maintenant devant Pilate. Ici, la question n’est pas s’Il est Fils de Dieu, mais s’Il est Roi des Juifs. Quoiqu’Il fût Roi des Juifs, ce n’est que dans le caractère de Fils de Dieu qu’Il permettait aux Juifs de Le recevoir. S’ils l’avaient reçu comme Fils de Dieu, Il aurait été leur Roi. Mais cela ne se pouvait pas : Il devait accomplir l’œuvre de l’expiation. Les Juifs L’ayant rejeté comme Fils de Dieu, Le renient maintenant comme leur Roi. Mais les Gentils se rendent coupables aussi dans la personne de leur gouverneur en Palestine, pays dont le gouvernement leur avait été confié. Le chef gentil aurait dû régner en justice. Celui qui représentait ce chef en Judée reconnaît la malice des ennemis de Christ ; sa conscience, alarmée par le rêve de sa femme, veut échapper à l’iniquité de condamner Jésus. Mais le vrai principe de ce monde, quant à l’exercice actuel du pouvoir, était Satan. Pilate, en se lavant les mains (vain espoir de se décharger de sa responsabilité), livre l’innocent à la volonté de Ses ennemis, tout en disant qu’il ne trouve aucune faute en Lui. Et il rend aux Juifs un meurtrier séditieux à la place du Prince de la vie (v. 11-26). Mais c’était encore sur Sa propre confession, et sur elle seulement, qu’on L’avait condamné ; Il confessait, devant la cour des Gentils, la même chose que devant celle des Juifs, c’est-à-dire la vérité dans l’une et dans l’autre, et rendant un bon témoignage à ce qui concernait la vérité quant à ceux devant qui Il était.

Barabbas[85], expression de l’esprit de Satan, qui a été meurtrier dès le commencement, expression de la rébellion contre l’autorité que Pilate était là pour maintenir — Barabbas était aimé des Juifs ; et par lui, l’injuste nonchalance du gouverneur, impuissant contre le mal, cherchait à satisfaire la volonté de ce peuple qu’il aurait dû gouverner. « Tout le peuple » se rend coupable du sang de Jésus, par ces mots solennels qui restent accomplis jusqu’à aujourd’hui, en attendant que la grâce souveraine les enlève selon le dessein de Dieu — mots solennels mais terribles : « Que son sang soit sur nous et sur nos enfants ! » (v. 25). Triste et affreuse ignorance que la volonté propre a amenée sur un peuple qui a refusé la lumière !

Nous voyons, hélas ! je le répète, de quelle manière chacun prend sa place devant cette pierre de touche — un Sauveur rejeté. Le commun des Gentils, les soldats, le font dérisoirement, avec la brutalité qui leur était habituelle comme païens et comme bourreaux ; les Gentils le feront avec joie et adoration, lorsque Celui duquel ils se moquaient sera vraiment le Roi des Juifs en gloire. Jésus supporte tout. C’était l’heure de Sa soumission parfaite à toute la puissance du mal : il fallait que la patience eût son œuvre parfaite, afin que Son obéissance fût complète de toute manière. Il supporte tout sans soulagement, plutôt que de manquer à l’obéissance à Son Père. Quelle différence entre Sa conduite et celle du premier Adam entouré de bénédictions !

Chacun, à cette heure solennelle où tout est mis à l’épreuve, doit être serviteur du péché ou de la tyrannie de la méchanceté. On force un certain Simon (connu plus tard à ce qu’il paraît parmi les disciples) à porter la croix de Jésus ; et on mène le Seigneur au lieu de Son crucifiement. Là, Il refuse ce qui aurait pu Le stupéfier. Jésus ne veut pas éviter la coupe qu’Il avait à boire, ni se priver de Ses facultés pour être insensible à ce que Dieu voulait qu’Il souffrît (v. 30-38). Les prophéties des Psaumes s’accomplissent dans Sa personne par le moyen de ceux qui pensaient peu à ce qu’ils faisaient. En même temps, les Juifs réussissent ainsi à se faire mépriser au dernier point. Leur Roi est pendu ! Il faut qu’ils en portent l’opprobre malgré eux. Mais à qui la faute ?

Endurcis et insensibles, les Juifs partagent avec un malfaiteur la triste satisfaction d’insulter le Fils de Dieu, leur Roi, le Messie, et cela à leur propre ruine (v. 39-44), et citent, tant l’incrédulité est aveugle, d’après leurs propres Écritures, comme l’expression de leur pensée, ce qui est mis dans la bouche des ennemis incrédules de Jéhovah. Jésus l’a bien senti ; mais l’angoisse de Son épreuve, où après tout Il était un témoin calme et fidèle, l’abîme de Ses souffrances, cachait quelque chose de bien autrement terrible que toute cette malice ou cet abandon de l’homme. Les flots élevaient leur voix sans doute[86]. La méchanceté poussait ses vagues les unes après les autres sur Lui ; mais l’abîme qui L’attendait au-dessous d’elles, qui pouvait le sonder ? Son cœur, Son âme — vase d’un amour divin — pouvaient seuls descendre plus bas que le fond de cet abîme ouvert à l’homme par le péché, pour en faire remonter ceux qui y gisaient, après en avoir souffert les angoisses dans Son âme même. Un cœur qui avait toujours été fidèle, était abandonné de Dieu. L’amour amène le Seigneur là où le péché avait fait descendre l’homme, mais avec une nature capable de l’apprécier, de sorte que l’abandon fût senti dans toute sa plénitude là où il n’y avait ni distance ni séparation. Nul autre que Celui qui se trouvait dans cette position ne pouvait le sonder ou le sentir.

C’est aussi un merveilleux spectacle que de voir le seul homme juste dans ce monde déclarer à la fin de Sa vie qu’Il était abandonné de Dieu. Mais c’était ainsi qu’Il Le glorifiait, comme aucun autre n’avait pu le faire et là où aucun autre que Lui ne le pouvait — fait péché en la présence de Dieu comme tel, sans voile pour le cacher, sans miséricorde pour l’en couvrir ou le supporter.

Les pères, remplis de foi, avaient dans leurs détresses fait l’expérience de la fidélité de Dieu qui répondait à l’attente de leur cœur. Mais Jésus (quant à l’état de Son âme dans ce moment-là) criait en vain. « Un ver, et non point un homme » aux yeux des hommes, Il devait supporter l’abandon de Dieu en qui Il se confiait.

Ayant leurs pensées bien éloignées des siennes, ceux qui l’entouraient ne comprenaient même pas Ses paroles, mais ils accomplissaient les prophéties par leur ignorance. Jésus rendant témoignage, par la force de Sa voix, que ce n’était pas le poids de la mort qui l’oppressait, rend l’esprit (v. 45-50).

L’efficace de Sa mort nous est présentée dans cet évangile sous un double aspect. D’abord le voile du temple a été déchiré en deux depuis le haut jusqu’en bas (v. 51). Dieu, qui avait toujours été caché derrière un voile, se découvrait complètement par le moyen de la mort de Jésus. Le chemin des lieux saints est manifesté — chemin nouveau et vivant que Dieu nous a consacré à travers le voile (Héb. 10, 19-20). Tout le système judaïque, les relations de l’homme avec Dieu sous l’empire de ce système, sa sacrificature, tout tombait avec le déchirement du voile. Chacun se trouvait en présence de Dieu, sans un voile entre deux. Les sacrificateurs devaient se trouver toujours en cette présence. Mais, par le même acte, le péché, qui nous aurait rendus incapables de nous y tenir, était entièrement ôté de devant Dieu pour le croyant. Le Dieu saint et le croyant purifié de ses péchés sont mis en rapport par la mort de Christ. Quel amour que celui qui avait accompli cette œuvre !

Secondement, d’autre part, telle est l’efficace de la mort de Jésus, que lorsque Sa résurrection a rompu les liens qui les retenaient, beaucoup de morts se présentent dans la cité — témoins de la puissance de Celui qui, ayant subi la mort, l’avait surmontée et vaincue, en avait détruit le pouvoir, et l’avait pris dans Ses propres mains. La bénédiction se trouvait maintenant dans la résurrection. La présence de Dieu sans voile, et des pécheurs sans péché devant Lui, prouvent l’efficace des souffrances de Christ.

La résurrection des morts sur lesquels le roi des terreurs n’avait plus de droit, montrait l’efficace de la mort de Christ pour les pécheurs, et la puissance de Sa résurrection. Le judaïsme est terminé pour ceux qui ont la foi ; la puissance de la mort l’est aussi. Le voile est déchiré, le sépulcre rend sa proie (v. 52-53) ; Il est le Seigneur des morts et des vivants[87].

Il reste encore un témoignage particulier de la toute-puissance de la mort de Jésus et de la portée de cette parole : « Si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à moi-même » (voy. Jean 12, 32). Le centurion qui était de garde au crucifiement du Seigneur, voyant le tremblement de terre et les choses qui étaient arrivées, reconnaît, effrayé, la gloire de la personne du Sauveur ; et, tout étranger qu’il est à Israël, rend le premier témoignage de la foi parmi les Gentils : « Certainement, celui-ci était Fils de Dieu » (v. 54).

Mais le récit continue. De pauvres femmes — auxquelles le dévouement donne souvent, de la part de Dieu, plus de courage qu’aux hommes dont la position est plus responsable et plus agitée — se tenaient près de la croix, regardant ce qui arrivait à Celui qu’elles aimaient[88] (v. 55-56).

Mais ces femmes n’étaient pas seules à remplacer les disciples effrayés. D’autres (v. 57-60) — et c’est ce qui arrive souvent — des hommes que le monde a retenus en arrière, une fois atteints dans la profondeur de leur affection par la question des souffrances de Celui qu’ils aimaient réellement (quand le moment est si pénible que d’autres s’en effrayent) enhardis par le rejet de Christ, sentent que le moment est venu de se décider et se montrent de courageux confesseurs du Seigneur. Associés jusqu’à ce moment avec ceux qui L’ont crucifié, ils devaient alors accepter cet acte ou se faire connaître eux-mêmes. Par la grâce, ils se montrent maintenant.

Dieu avait tout préparé d’avance. Son Fils devait avoir Son tombeau avec le riche. Joseph d’Arimathée se présente hardiment devant Pilate pour demander le corps de Jésus. Il enveloppe dans un linceul le corps du Seigneur que Pilate lui accorde, et le place dans son propre sépulcre, qui n’avait jamais encore servi à cacher la corruption de l’homme. Marie de Magdala et l’autre Marie[89] — car elles étaient connues — s’asseyent près du sépulcre, liées par tout ce qui restait pour leur foi de Celui qu’elles avaient aimé et suivi avec adoration pendant Sa vie (v. 61).

Mais l’incrédulité ne croit pas à elle-même ; et craignant que ce qu’elle nie ne soit vrai, elle se méfie de tout (v. 62-66). Les principaux sacrificateurs demandent à Pilate que le sépulcre soit gardé, afin de déjouer toute tentative que pourraient faire les disciples pour fonder la doctrine de la résurrection sur l’absence du corps de Jésus du sépulcre où il avait été déposé. Pilate leur commande de garder le sépulcre eux-mêmes ; de sorte qu’ils ne font autre chose que de se rendre les témoins involontaires du fait, et nous assurer de l’accomplissement de ce qu’ils craignaient. Ainsi Israël était coupable de cet effort de futile résistance au témoignage que Jésus avait rendu à Sa propre résurrection. Les Juifs en rendaient témoignage contre eux-mêmes. Les précautions que Pilate n’aurait peut-être pas prises, les sacrificateurs les ont poussées au dernier point, de sorte que toute méprise sur le fait de la résurrection de Jésus était impossible.

La résurrection du Sauveur est brièvement racontée dans Matthieu. L’objet encore, après la résurrection, est de lier le ministère et le service de Jésus — transféré maintenant à Ses disciples — avec les pauvres du troupeau, avec le résidu d’Israël. Le Seigneur les rassemble encore en Galilée, où Il les avait constamment enseignés et où demeuraient les méprisés du peuple, loin de l’orgueil des Juifs. Cela rattachait leur œuvre à la sienne dans ce qui la caractérisait, particulièrement en rapport avec le résidu d’Israël.

J’examinerai ailleurs les détails de la résurrection. Ici, je m’occupe seulement de la portée de cet événement dans Matthieu.

Chapitre 28. — Le sabbat terminé (c’est-à-dire pour nous le soir du samedi), les deux Marie viennent voir le sépulcre. Dans ce moment, c’était tout ce qu’elles firent. Les versets 1-2 ne se font pas suite ; les versets 2-4 vont ensemble. Lorsque le tremblement de terre et les circonstances qui l’accompagnèrent eurent lieu, personne n’était au sépulcre, sauf les soldats. La nuit, tout était en sûreté. Le matin, les disciples n’en savaient rien. Lorsque les femmes arrivèrent, au point du jour, l’ange qui se tenait à la porte du sépulcre les rassure en leur annonçant la résurrection du Seigneur. L’ange du Seigneur est descendu et a ouvert la porte du tombeau que l’homme avait fermée avec toutes les précautions possibles[90]. Les Juifs seulement, il est vrai, en y plaçant les soldats, ont donné par des témoins irrécusables, une garantie de la vérité de la prédication des apôtres. Les femmes, par leur visite au sépulcre le soir auparavant, et le matin quand l’ange leur a parlé, ont reçu pour la foi une pleine assurance du fait de la résurrection du Sauveur.

Tout ce qui est présenté ici, ce sont ces faits. Les femmes avaient été au sépulcre le soir. L’intervention de l’ange a rendu certain pour les soldats le vrai caractère de la sortie de Jésus du tombeau ; puis la visite des femmes le matin a établi le fait de Sa résurrection comme un objet de foi pour elles. Elles vont l’annoncer à Ses disciples qui — loin d’avoir fait ce que les Juifs leur attribuaient — ne croyaient même pas les assertions des femmes. Jésus apparaît Lui-même aux femmes qui, ayant ajouté foi aux paroles de l’ange, s’en revenaient du sépulcre.

Jésus se lie, ainsi que je l’ai dit, à Son ancienne œuvre au milieu des pauvres du troupeau, loin du siège des traditions judaïques et du temple et de tout ce qui liait le peuple à Dieu selon l’ancienne alliance. Il donne rendez-vous à Ses disciples en Galilée, ils Le trouvent et Le reconnaissent ; c’est là, sur cet ancien théâtre de l’œuvre de Christ, selon Ésaïe 8 et 9, qu’ils reçoivent de Lui leur mission. Voilà pourquoi, dans cet évangile, nous n’avons pas du tout l’ascension de Christ, mais toute puissance Lui est donnée dans les cieux et sur la terre, et ainsi la mission des disciples s’étend à toutes les nations (les Gentils). Ils devaient leur proclamer Ses droits et faire d’eux Ses disciples.

Ce n’était pas simplement le nom de l’Éternel cependant qu’ils avaient à annoncer, et leur mission n’était pas seulement en rapport avec Son trône à Jérusalem. Seigneur des cieux et de la terre, Ses disciples devaient l’annoncer par toutes les nations, en fondant leur doctrine sur la confession du Père, du Fils et du Saint Esprit. Ils devaient enseigner non la loi, mais les préceptes de Jésus. Jésus serait avec eux, avec les disciples qui Le confessaient ainsi, jusqu’à la consommation du siècle (v. 18-20). C’est là ce qui lie tout ce qui sera accompli jusqu’à ce que Christ soit assis sur le grand trône blanc (Apoc. 20, 11), au témoignage qu’Il a rendu Lui-même sur la terre au milieu d’Israël. C’est le témoignage du royaume, et de son Chef une fois rejeté par un peuple qui ne Le connaissait pas. Cela rattache le témoignage rendu aux nations à un résidu en Israël reconnaissant Jésus comme un Messie, maintenant ressuscité d’entre les morts, ainsi qu’Il l’avait annoncé, mais non à un Christ reconnu comme monté au ciel. Cela ne présente pas Jésus seul, ni Jéhovah comme étant plus longtemps le sujet du témoignage, mais la révélation du Père, du Fils et du Saint Esprit, comme le saint nom par lequel les nations étaient mises en relation avec Dieu.



  1. Cela eut lieu après Sa résurrection, en Galilée, et non du ciel et de la gloire, comme sur le chemin de Damas.
  2. Il est écrit : « Car c’est lui qui sauvera son peuple », ce qui montre parfaitement le titre de Jéhovah contenu dans le nom de Jésus ou Josué. Car Israël était le peuple de l’Éternel, c’est-à-dire de Jéhovah.
  3. La relation plus étendue est indiquée plus particulièrement dans l’évangile de Luc, où Sa généalogie remonte jusqu’à Adam ; mais ici, le titre de Fils de l’homme Lui est spécialement appliqué.
  4. L’étoile n’a pas conduit les mages de leur pays jusqu’en Judée. Dieu a voulu présenter ce témoignage à Hérode et aux chefs du peuple. Ayant été dirigés par la Parole (dont les principaux et les scribes eux-mêmes déclaraient la portée, et d’après laquelle Hérode les renvoyait à Bethléhem), les mages retrouvent l’étoile qu’ils avaient vue dans leur pays et qui les conduit à la maison où était le petit enfant. Leur visite a eu lieu quelque temps après la naissance de Jésus. Ils avaient sans doute vu premièrement l’étoile à l’époque de cette naissance. Hérode aussi se dirige dans ses calculs d’après le moment de l’apparition de l’étoile dont il s’était exactement informé auprès des mages. Leur voyage a dû prendre quelque temps. La naissance de Jésus est racontée au chapitre 1. Le premier verset du chapitre 2 devrait être traduit : « Or Jésus ayant été né… », si cela se pouvait dire en français ; car il s’agit d’un temps déjà passé.
    Je ferai remarquer également ici que les prophéties de l’Ancien Testament sont citées de trois manières qui ne doivent pas être confondues ; la Parole dit : « afin que fût accompli » — « en sorte que fut accompli » — ou « alors fut accompli ». Dans le premier cas, il s’agit du but même de la prophétie ; voyez Matthieu 1, 22-23, qui en est un exemple. Dans le second cas, il s’agit d’un accomplissement qui est dans l’intention de la prophétie, sans que cela soit cependant la seule et complète pensée du Saint Esprit ; Matthieu 2, 23 peut servir d’exemple. Enfin en troisième lieu, il ne s’agit que d’un fait répondant à la pensée du passage qui s’y applique dans son esprit, sans en être l’objet positif (voyez chap. 2, 17).
  5. Au verset 5, Christ prend ce titre de serviteur. La même substitution de Christ à Israël se trouve en Jean 15. Israël avait été le cep transporté d’Égypte. Christ est le vrai cep.
  6. Cette expression ne se trouve qu’en Matthieu, comme s’occupant des dispensations et des voies de Dieu à l’égard des Juifs. « Le royaume de Dieu » est le terme générique. « Le royaume des cieux », c’est le royaume de Dieu, mais le royaume de Dieu prenant particulièrement le caractère de gouvernement céleste ; nous le trouverons, plus loin, séparé en royaume de notre Père, et royaume du Fils de l’homme.
  7. Il faut se rappeler que, outre les promesses spéciales faites à Israël et son appel comme peuple de Dieu sur la terre, ce peuple représentait justement l’homme envisagé dans sa responsabilité envers Dieu sous la culture la plus parfaite que Dieu pût lui donner. Jusqu’au déluge, il y avait un témoignage, mais pas de dispensations ou d’institutions de Dieu. Après, dans le monde nouveau, on voit un gouvernement humain, un appel et des promesses en Abraham, la loi, le Messie, Dieu venu en grâce ; Dieu pouvait tout faire, et Il le fit avec une patience parfaite, mais en vain, quant à trouver du bien dans la chair ; maintenant Israël ayant été mis de côté comme étant dans la chair, celle-ci étant jugée et le figuier maudit comme stérile, l’homme de Dieu, le dernier Adam, Celui en qui est la bénédiction par la rédemption, est manifesté au monde. Dans les trois premiers évangiles, comme nous l’avons vu, Christ est présenté à l’homme pour qu’il Le reçoive ; en Jean, l’homme et Israël sont mis de côté, et les voies souveraines de Dieu en grâce et en résurrection sont introduites.
  8. Il en est de même du sentiment de notre néant. Il s’est anéanti Lui-même, et dans la conscience de notre néant, nous nous rencontrons avec Lui et, en même temps, nous sommes remplis de Sa plénitude. Même quand nous tombons, ce n’est pas après que nous avons été amenés à nous connaître tels que nous sommes, que nous voyons Jésus nous relever encore.
  9. Au commencement d’Ézéchiel (1, 1), il est bien dit que les cieux ont été ouverts, mais ce n’était qu’en vision, ainsi que le prophète l’explique. Dans ce cas-là, c’était la manifestation de Dieu en jugement.
  10. Cela est aussi vrai de nous, quand nous sommes dans cette relation par grâce.
  11. C’est une complète erreur de faire de Christ l’échelle. Il est, comme le fut Jacob, l’objet de leur service et de leur ministère.
  12. Nous avons besoin de confiance pour avoir le courage d’obéir ; mais la vraie confiance se trouve sur le chemin de l’obéissance. Satan peut se servir de la Parole avec ruse, mais il n’en peut détourner Christ le Seigneur. Christ peut encore l’employer comme l’arme divine suffisante, et Satan n’a point de réplique. Interdire l’obéissance aurait été se montrer soi-même Satan. Quant à la place où se trouvait le Seigneur d’une manière dispensationnelle, nous pouvons remarquer qu’Il cite toujours d’après Deutéronome.
  13. Il ne doit y avoir d’autre motif d’action que la volonté de Dieu qui, pour l’homme, doit toujours se chercher dans la Parole ; parce que, dans ce cas, lorsque Satan nous pousse à agir, comme il le fait toujours, par quelque autre motif, on voit que celui-ci est opposé à la Parole qui est dans le cœur et au motif qui le gouverne ; il est par conséquent jugé comme lui étant contraire. Il est écrit : « J’ai caché ta parole dans mon cœur, afin que je ne pèche pas contre toi ». C’est pour cette raison qu’il est souvent important, quand nous sommes dans l’incertitude, de nous demander par quel motif nous sommes influencés.
  14. Un examen attentif du Pentateuque montrera que, quoique les faits historiques nécessaires soient établis, le contenu de l’Exode, du Lévitique et des Nombres est essentiellement typique. Le tabernacle était fait selon le modèle montré sur la montagne, modèle des choses célestes ; non seulement les ordonnances cérémonielles, mais les faits historiques, ainsi que l’apôtre l’établit clairement, leur arrivèrent comme types et ont été écrits pour notre instruction. Le Deutéronome donne des directions pour leur conduite dans le pays ; les trois livres mentionnés, même là où ils contiennent des faits historiques, sont typiques dans leur objet. Je ne sais pas si un sacrifice fut offert après leur institution, à moins peut-être que ce ne soient des sacrifices officiels (voyez Act. 7, 42).
  15. Appelée le peuple dans les évangiles.
  16. Nous pouvons remarquer ici, comme on l’a déjà fait, qu’Il quitte les Juifs et Jérusalem, et Sa place naturelle, pour ainsi dire, qui Lui donnait Son nom, Nazareth, et prend Sa place prophétique. La mise en prison de Jean était le signe de Son propre rejet. Jean y était Son précurseur, comme, dans sa mission, il l’avait été du Seigneur (voyez chap. 17, 12). Le témoignage de Jésus est le même que celui de Jean le baptiseur.
  17. Il est frappant de voir que tout le ministère du Seigneur est raconté dans un seul verset (4, 23). Tout ce qui est exposé ensuite, ce sont des faits ayant une importance morale particulière, et montrant ce qui se passait au milieu du peuple en grâce, jusqu’à Son rejet ; ce n’est pas une histoire consécutive proprement dite. Cela marque très clairement le caractère de Matthieu.
  18. La division que nous donnons peut aider d’une manière pratique à l’application du sermon sur la montagne. Quant aux sujets que renferme ce discours, on pourrait peut-être, quoique la différence ne soit pas très grande, le diviser encore mieux ainsi :
    Le chapitre 5, 1-16 contient le tableau complet du caractère et de la position du résidu qui reçoit les instructions du Seigneur, la position de ce résidu telle qu’elle devait être selon les pensées de Dieu. Ceci est complet en soi.
    Les versets 17-48 du chapitre 5 établissent l’autorité de la loi qui aurait dû régler la conduite du fidèle jusqu’à l’introduction du royaume, loi qu’ils auraient dû accomplir, ainsi que les paroles des prophètes, afin qu’ils (le résidu) fussent placés sur ce nouveau terrain ; quiconque serait coupable du mépris de cette loi serait exclu du royaume.
    Mais, tout en établissant ainsi l’autorité de la loi, Il reprend les deux grands éléments du mal, traités seulement dans les actes extérieurs de la loi, violence et corruption, et juge le mal dans le cœur (v. 22, 28) ; il faut à tout prix se débarrasser du mal et de toute occasion de le faire, montrant ainsi ce que devait être la conduite de Ses disciples et l’état de leur âme — ce qui devait les caractériser sous ce rapport. Le Seigneur considère alors certaines choses supportées par Dieu en Israël, et ordonnées suivant ce qu’il pouvait porter. Ensuite Il amène, à la lumière d’une vraie estimation morale, le divorce — le mariage étant la base divinement établie de toutes les relations humaines — et les jurements ou vœux, l’action de la volonté de l’homme en relation avec Dieu, puis le support du mal et la plénitude de la grâce, c’est-à-dire son caractère béni qui apportait avec lui le titre moral de ce qui était sa place vivante — fils de leur Père qui était dans les cieux.
    Au lieu d’affaiblir ce que Dieu exigeait sous la loi, Il voulait non seulement qu’on observât la loi jusqu’à son accomplissement, mais que Ses disciples fussent parfaits comme leur Père qui est aux cieux est parfait. Ceci ajoute à la révélation du Père la marche morale et l’état moral qui convenaient au caractère des fils, tel qu’il était révélé en Christ.
    Au chapitre 6, nous avons les motifs, le but, qui doivent gouverner le cœur en faisant le bien, en menant une vie religieuse. Les yeux des disciples devaient être sur leur Père. Ceci est individuel.
    Le chapitre 7 s’occupe essentiellement de ce qui convient aux disciples de Jésus quant à leurs rapports avec les autres — ne pas juger ses frères et prendre garde aux profanes (v. 1-6). Ensuite le Seigneur exhorte les siens à se confier en leur Père, Lui demandant ce qu’il leur fallait ; Il leur apprend à agir envers les autres d’après cette même grâce qu’on voudrait voir mise en pratique envers soi-même. Ceci est fondé sur la connaissance de la bonté du Père (v. 7-12). Enfin, le Seigneur exhorte les siens à l’énergie qui les fera entrer par la porte étroite et prendre coûte que coûte le chemin de Dieu (car beaucoup aimeraient à entrer dans le royaume, mais non par cette porte-là). Il les avertit à l’égard de ceux qui chercheraient à les tromper en prétendant posséder la parole de Dieu. Ce n’est pas seulement notre propre cœur, et le mal proprement dit, qui est à craindre quand il s’agit de suivre le Seigneur, mais aussi les ruses et les agents de l’ennemi. Or ceux-ci se trahiront par leurs fruits.
  19. Il est cependant important de remarquer qu’il n’y a pas de spiritualisation de la loi, comme on le prétend souvent. Il y est question des deux grands principes d’immoralité parmi les hommes (violence et mauvaise convoitise), auxquels s’ajoutent les serments volontaires. Il y a en cela un contraste entre les exigences de la loi et ce que Christ demandait.
  20. Il faut toujours se rappeler que, tandis qu’Israël a, d’une manière dispensationnelle, une grande importance comme centre du gouvernement de ce monde par Dieu, il était moralement l’homme en qui toutes les voies et toutes les relations de Dieu avaient été développées, de manière à mettre en lumière ce que l’homme était. Le Gentil, c’était l’homme laissé à lui-même quant aux voies spéciales de Dieu, et ainsi il n’était pas révélé. Christ était une lumière (eis apocalupsin ethnôn) qui révélait les Gentils.
  21. Il faut noter en passant les caractères qui sont vraiment bénis. Ils supposent le mal dans le monde et au milieu du peuple de Dieu. D’abord on ne cherche pas de grandes choses pour soi-même, acceptant une place méprisée au milieu d’une scène contraire à Dieu. Voilà pourquoi ils y sont caractérisés par les afflictions et la débonnaireté, par une volonté qui ne s’élève pas contre Dieu ou qui ne soutient pas sa position ou ses droits. On éprouve alors le désir d’un bien positif, car on ne le possède pas encore ; en être affamé et altéré, tels sont et l’état intérieur et l’activité de l’esprit. Alors la grâce envers les autres se manifeste, de même que la pureté du cœur et l’absence de ce qui exclurait Dieu, et, ce qui y est toujours lié, la paix et ce qui la procure. Je crois qu’il y a dans ces versets une progression morale, l’un conduisant à l’autre comme en en étant un effet. Dans les deux derniers on voit les conséquences du maintien d’une bonne conscience et de la relation avec Christ dans un monde de péché. Il y a, comme en 1 Pierre, deux principes de souffrances : pour la justice et pour l’amour de Christ.
  22. Ceux qui seront tués monteront dans le ciel, ainsi que le témoignent Matthieu 5, 12, et l’Apocalypse. Les autres, rendus conformes à Christ, comme Juif souffrant, seront avec Lui sur la montagne de Sion ; ils apprendront le cantique chanté dans le ciel, et accompagneront l’Agneau quelque part qu’Il aille (ici-bas).
    Nous pouvons encore faire remarquer ici que dans les béatitudes la promesse de la terre est faite aux débonnaires (5, 5), et s’accomplira à la lettre aux derniers jours. Au verset 12 du même chapitre, il y a la promesse d’une récompense dans les cieux à ceux qui souffrent pour Christ, promesse vraie pour nous maintenant, et vraie en quelque sorte pour ceux qui seront mis à mort pour Lui aux derniers jours, qui auront leur place au ciel, quoiqu’ils aient fait partie du résidu juif et non de l’Assemblée. La même chose se trouve en Daniel 7 : seulement, il faut remarquer que ce sont les saisons et la loi, et non les saints, qui sont livrées aux mains de la Bête.
  23. C’est-à-dire celui du Père. Comparez Matthieu 13, 43.
  24. La loi est la règle parfaite pour un enfant d’Adam, la règle ou la mesure de ce qu’il doit être, mais non de la manifestation de Dieu en grâce, comme l’était Christ, qui est notre modèle en cela — c’est une juste invitation à aimer Dieu et à marcher dans l’accomplissement du devoir en relation avec Lui, mais non une imitation de Dieu, en marchant dans l’amour, comme Christ nous a aimés et s’est livré Lui-même pour nous.
  25. Les miracles de Christ avaient un caractère particulier. Ils n’étaient pas seulement des actes de puissance, mais tous étaient des actes de la puissance de Dieu visitant ce monde en bonté. Cette puissance s’était fréquemment manifestée, surtout depuis Moïse, mais souvent en jugement. Tous les miracles de Christ délivraient les hommes des funestes conséquences que le péché avait amenées. Il y eut une seule exception, la malédiction du figuier, mais c’était une sentence judiciaire contre Israël, c’est-à-dire contre l’homme sous l’ancienne alliance, quand il avait une belle apparence, mais pas de fruit.
  26. J’ajoute ici quelques notes manuscrites prises en lisant l’évangile de Matthieu, après que ceci était écrit ; elles jetteront, je crois, de la lumière sur la structure de cet évangile. Les chapitres 5-7 indiquent le caractère requis pour entrer dans le royaume, caractère qui devait marquer le résidu reconnu, Jéhovah étant alors en chemin avec la nation pour le jugement. Les chapitres 8 et 9 montrent l’autre côté : la grâce et la bonté introduites, Dieu manifesté, Son caractère et Ses actes, cette chose nouvelle qui ne pouvait se mettre dans de vieilles outres ; la bonté en puissance encore, mais rejetée, le Fils de l’homme (non le Messie) n’ayant pas où reposer Sa tête. Le chapitre 8 présente l’intervention actuelle de Dieu en bonté temporelle avec puissance. Ce chapitre va au-delà d’Israël à cause de la bonté qui agissait en grâce à l’égard de ce qui était exclu du camp de Dieu en Israël. Il comprend la puissance de Dieu au-dessus de tout le pouvoir de Satan, des maladies et des éléments, et cela par Christ prenant le fardeau sur Lui-même, mais dans un rejet dont Il avait la conscience. Les versets 17 à 20 du chapitre 8 nous amènent à Ésaïe 53, 3-4, et à un état de choses qui exige qu’on Le suive entièrement, en renonçant à tout. Cela conduit à ce triste témoignage que si la puissance divine chasse Satan, la présence divine qui se manifeste ainsi est insupportable au monde. Les pourceaux représentent Israël. Le chapitre 9 offre le côté religieux de la présence du Seigneur en grâce, le pardon, et le témoignage que Jéhovah était là, selon le psaume 103, mais pour appeler les pécheurs et non les justes ; voilà surtout ce qui ne pouvait convenir aux vieilles outres. Finalement, sauf la patience en bonté, ce chapitre met pratiquement fin à l’histoire. Il est venu pour sauver la vie d’Israël. C’était réellement la mort quand Il vint ; seulement, partout où il y avait de la foi au milieu de la foule environnante, il y avait guérison. Les pharisiens montrent le blasphème des conducteurs, mais la patience de la grâce subsiste encore, développée envers Israël, au chapitre 10 ; au chapitre 11, toutes choses ont été trouvées comme ne servant à rien. Le Fils révélait le Père, et cela demeure et donne du repos. Le chapitre 12 développe complètement le jugement et le rejet d’Israël. Le chapitre 13 présente Christ comme un semeur, ne cherchant pas de fruit dans Sa vigne ; il présente aussi la forme actuelle du royaume des cieux.
  27. Celui qui touchait un lépreux devenait lui-même impur, mais le Sauveur adorable s’est ainsi approché de l’homme ; Il a enlevé la souillure sans la contracter. Le lépreux connaissait Sa puissance, mais n’était pas sûr de Sa bonté. Le « Je veux » la manifeste, mais avec le droit que Dieu seul avait de dire : « Je veux ».
  28. Car alors Satan sera lié, et l’homme délivré par la puissance de Christ. Il y avait alors des délivrances partielles de la même sorte.
  29. Il y a une division du discours du Seigneur, au verset 15. Jusque-là, c’est Sa mission à ce moment-là. À partir du verset 16, nous avons des réflexions plus générales sur la mission des disciples, vue dans son ensemble au milieu d’Israël jusqu’à la fin. Évidemment, cela va au-delà de leur mission d’alors, et suppose la venue du Saint Esprit. La mission à laquelle l’Église comme telle est appelée est différente. Ceci s’applique seulement à Israël : il leur était défendu d’aller vers les Gentils. Cela prit fin nécessairement avec la destruction de Jérusalem et la dispersion de la nation juive, mais se renouvellera à la fin, jusqu’à la venue du Fils de l’homme. Il y avait pour les Gentils seuls un témoignage placé devant Israël comme juge. Tel était Paul, et cette partie de son histoire, même jusqu’à Rome dans le livre des Actes, se passait au milieu des Juifs. La dernière partie, depuis le verset 16, a moins à faire avec l’évangile du royaume.
  30. Remarquez ici l’expression « Fils de l’homme ». C’est le caractère (selon Dan. 7) sous lequel le Seigneur viendra, avec une puissance et une gloire beaucoup plus grandes que celles de Sa manifestation comme Messie, Fils de David, puissance et gloire qui se déploieront dans une sphère beaucoup plus vaste. Comme Fils de l’homme, Il est l’héritier de tout ce que Dieu destine à l’homme (voyez Héb. 2, 6-8, et 1 Cor. 15, 27). Il devait, en conséquence, vu la condition de l’homme, souffrir pour posséder cet héritage. Il était là comme le Messie, mais Il doit être reçu dans Son vrai caractère, comme Emmanuel, et les Juifs doivent être éprouvés moralement. Il n’aura pas le royaume d’après un principe charnel. Rejeté comme Messie, comme Emmanuel, Il ajourne la période de ces événements qui cloront le ministère de Ses disciples envers Israël jusqu’à Sa venue comme Fils de l’homme. Pendant ce temps, Dieu a produit d’autres choses qui avaient été cachées dès la fondation du monde : la vraie gloire de Jésus, le Fils de Dieu, Sa gloire céleste comme homme et l’union de l’Église avec Lui dans le ciel. Le jugement de Jérusalem et la dispersion de la nation ont suspendu le ministère qui avait commencé au moment dont parle ici l’évangéliste. Ce qui a rempli l’intervalle depuis ce moment ne fait pas ici le sujet du discours du Seigneur, car il n’a trait qu’au ministère ayant les Juifs pour objet. Quant aux conseils de Dieu à l’égard de l’Église, en rapport avec la gloire de Jésus à la droite de Dieu, il en sera question ailleurs.
    Luc nous donne avec plus de détails ce qui concerne le Fils de l’homme. En Matthieu, le Saint Esprit nous entretient du rejet d’Emmanuel.
  31. Son message à Jésus montre une pleine confiance dans la parole du Seigneur comme prophète, mais de l’ignorance quant à Sa personne ; et c’est ce qui ressort ici en pleine lumière.
  32. Ce n’est pas l’établissement de l’Assemblée de Dieu ; mais les droits du Roi, tels qu’ils se manifestent dans la gloire, étant établis, les bases de ce royaume étant posées, les chrétiens sont dans le royaume, quoique d’une manière toute particulière et exceptionnelle, parce qu’ils sont dans le royaume et la patience de Jésus Christ, glorifié, mais caché en Dieu. Ils partagent le sort du Roi, et ils partageront Sa gloire lorsqu’Il régnera.
  33. Remarquez cette expression. Nous voyons la manière dont le Saint Esprit passe du temps, alors présent pour les Juifs, et qui devait bientôt finir, à celui où le Messie établirait Son royaume, le « monde (siècle) à venir ». Nous avons une position en dehors de tout cela, pendant la suspension de l’établissement public du royaume. Les apôtres n’ont fait que le prêcher ou l’annoncer, ils ne l’ont pas établi. Leurs miracles étaient « les miracles du siècle à venir » (comp. 1 Pier. 1, 11-13). Cela est d’une grande importance, comme nous le verrons bientôt. Il en est de même de la nouvelle alliance, dont Paul était le ministre ; et cependant il ne l’a pas établie en Juda et en Israël.
  34. Comp. Marc 4, 33, 34. Cela s’appliquait à tous, s’ils avaient eu des oreilles pour entendre, mais était ténèbres aux hommes à propre volonté.
  35. Remarquons ici que le chapitre 12, ayant placé devant nous le jugement du peuple juif, nous avons maintenant le royaume tel qu’il est pendant l’absence du roi, chapitre 13 ; l’Assemblée bâtie par Christ, chapitre 16 ; et le royaume en gloire, chapitre 17.
  36. C’est une pensée solennelle, que le premier acte de l’homme a été de gâter ce que Dieu avait fait bon. Il en a été ainsi d’Adam, de Noé, de la loi, du sacerdoce d’Aaron, du fils de David, de Nebucadnetsar même, de l’Église. Au temps de Paul, tous cherchaient leurs propres intérêts, non pas ceux de Jésus Christ. Tout est bon, meilleur et stable dans le Messie.
  37. Je parle ici de ceux qui auront été Ses serviteurs pendant Son absence ; car les anges sont aussi Ses serviteurs, aussi bien que les saints du siècle à venir.
  38. Il est clair que ce n’est pas dans l’Église que le Seigneur a commencé à semer ; elle n’existait pas ; aussi distingue-t-Il ici Israël du monde, et c’est de ce dernier qu’Il parle. Il cherchait du fruit en Israël ; Il sème dans le monde, parce qu’Israël, après tous Ses soins, ne rapportait pas de fruit.
  39. Non seulement le moment qui le termine, mais les actes qui accomplissent les desseins de Dieu en le terminant (sunteleia).
  40. Remarquez aussi que le royaume des cieux est divisé en deux parties : le royaume du Fils de l’homme, et le royaume de notre Père ; les objets du jugement dans ce qui est soumis à Christ, et une place semblable à la sienne devant le Père pour des fils.
  41. Dans toutes les prophéties symboliques et les paraboles, l’explication va au-delà de la parabole, et ajoute des faits ; parce que le jugement exécuté témoigne publiquement de ce qui, dans le temps de la parabole, peut être discerné spirituellement. Celle-ci peut être comprise spirituellement. Le résultat existe ; le jugement le montrera publiquement, en sorte que, dans l’explication, nous devons toujours aller au-delà de la parabole. Le jugement explique ce qui n’est compris que spirituellement avant, et introduit un nouvel ordre de choses (comp. Dan. 7).
  42. Les chapitres qui suivent sont frappants dans leur caractère. La personne de Christ, comme le Jéhovah du psaume 132, est introduite, mais Israël est renvoyé, les disciples sont laissés seuls, pendant que Jésus prie sur la montagne. Il retourne, rejoint Ses disciples, et le pays de Génésareth Le reconnaît. Nous avons alors, au chapitre 15, la description morale complète du terrain sur lequel Israël se tenait réellement, et doit se tenir ; mais il est entraîné beaucoup plus loin dans ce que le cœur de l’homme est ; ensuite, nous trouvons ce que Dieu est, révélé en grâce à la foi, même quand elle se rencontre dans un Gentil. Historiquement, Il reconnaît encore Israël, mais en perfection divine ; maintenant, c’est dans une puissance administrative humaine. Alors (chap. 16) l’Église est introduite prophétiquement, et, au chapitre 17, c’est le royaume de gloire en vue. Dans le chapitre 16, il leur est défendu de dire qu’Il est le Christ. C’est fini.
  43. L’étude des Psaumes nous a fait comprendre que ceci est en rapport avec l’établissement du résidu juif en bénédiction aux derniers jours.
  44. Le passage (chap. 16, 18) doit être lu : « Et moi aussi, je te dis ».
  45. Il est important ici de distinguer l’Église que Christ bâtit, non achevée encore, mais que Lui-même bâtit, et qui, manifestée comme un tout dans le monde, est édifiée, sous responsabilité, par l’homme. En Éphésiens 2, 20, 21, et en 1 Pierre 2, 4, 5, nous avons cette construction qui croît et est édifiée. Il n’est fait aucune mention du travail de l’homme, dans l’un ou l’autre de ces passages ; c’est un travail divin. Dans 1 Corinthiens 3, Paul est un sage architecte ; d’autres peuvent édifier du bois, du foin, du chaume. La confusion de ces choses a été la base de la papauté et d’autres corruptions qui se rencontrent dans ce qu’on appelle l’Église. L’Église de Dieu, vue dans sa réalité, est une œuvre divine que Christ accomplit, et dans laquelle Il habite.
  46. Remarquez ceci, dont j’ai parlé ailleurs : il n’y a point de clefs de ou pour l’Église ou l’Assemblée. Pierre avait les clefs de l’administration dans le royaume. Mais l’idée de clefs en rapport avec l’Église, ou le pouvoir des clefs dans l’Église, est un pur sophisme. Il n’y a rien de semblable. L’Église est bâtie ; les hommes ne bâtissent pas avec des clefs, et c’est Christ (non Pierre) qui la bâtit. En outre, les actes ainsi sanctionnés étaient des actes d’administration ici-bas. Le ciel mettait sa sanction à ces actes ; ils n’ont pas de rapport au ciel, mais à l’administration terrestre du royaume.
    De plus, il faut noter que ce qui est conféré ici est individuel et personnel. C’étaient un nom et une autorité, conférés à Simon, fils de Jonas.
    Quelques autres remarques nous aideront à mieux comprendre la portée de ces chapitres. Dans la parabole du semeur (chap. 13), la personne du Seigneur ne nous est pas présentée ; il n’y est question que de semer, non de moissonner. Dans la première similitude du royaume, Il est Fils de l’homme, et le champ est le monde. Jésus est tout à fait en dehors du judaïsme. Le chapitre 14 nous montre l’état des choses, depuis le rejet de Jean jusqu’au temps où le Seigneur, à Son retour, sera reconnu là où Il a été rejeté. Dans le chapitre 15, c’est la lutte morale, et Dieu s’y voit en grâce en Lui-même, comme étant au-dessus du mal. Je ne m’arrêterai pas davantage sur ce sujet. Mais au chapitre 16, nous avons la personne du Fils de Dieu, le Dieu vivant, puis l’Assemblée et Christ le constructeur ; au chapitre 17, c’est le royaume avec le Fils de l’homme venant en gloire. Les clefs (quoique le ciel sanctionne l’usage que Simon en fait) étaient, comme nous l’avons vu, celles du royaume (non de l’Assemblée) ; et cela, la parabole de l’ivraie le montre, devait se corrompre et se détruire, irrémédiablement. Christ, et non Pierre, bâtit l’Église (comp. 1 Pier. 2, 4, 5).
  47. Dans la première épître de Pierre nous rencontrons fréquemment ces pensées — les mots « espérance vivante », « pierre vivante » — appliquées à Christ, puis aux chrétiens. Et, conformément à notre sujet, le salut par la vie en Christ, le Fils du Dieu vivant, nous trouvons encore ceci : « Recevant la fin de votre foi, le salut des âmes ». Voyez aussi tous les versets dans lesquels l’apôtre présente ses instructions.
  48. Nous avons vu que Pierre allait plus loin que cela. Ici, Christ est envisagé comme le Fils, né sur la terre dans le temps, non pas comme Fils éternellement au sein du Père. Pierre, sans recevoir la pleine révélation de cette dernière vérité, Le voit comme Fils selon la puissance de la vie divine en Sa propre personne ; personne sur laquelle l’Assemblée, par conséquent, pouvait être bâtie. Mais ici, nous considérons ce qui se rapporte au royaume.
  49. Pierre, instruit par le Saint Esprit, l’appelle « la gloire excellente ».
  50. Ce n’est pas à cause de la valeur divine de leur témoignage que Moïse et Élie disparaissent. Il ne pouvait y en avoir une confirmation plus forte que cette scène, comme le dit Pierre. Mais, non seulement ils n’étaient pas les sujets du témoignage de Dieu, comme l’était Christ, mais leur témoignage ne se rapportait pas aux choses célestes, qui devaient alors être révélées en liaison avec le Fils, venu du ciel, et leurs exhortations n’y atteignaient pas. Jean le baptiseur même établit cette différence (Jean 3, 13, 31-34). C’est pourquoi, comme cela est montré, le Fils de l’homme devait être élevé. Ainsi, le Seigneur enjoint ici à Ses disciples de ne pas dire qu’Il était le Messie, car le Fils de l’homme devait souffrir. C’était un changement dans la vie et dans le ministère du Seigneur, et la gloire à venir du royaume était montrée aux disciples ; mais, alors, Il devait souffrir (voyez Jean 12, 27). L’histoire des Juifs était terminée au chapitre 12, ou, plus exactement, au chapitre 11 ; et le fondement du changement était posé. Nous trouvons Jean et le Seigneur rejetés l’un et l’autre, une soumission parfaite, puis toutes choses remises à Christ par Son Père, et Lui, révélant le Père (comp. Jean 13, 14). Mais en Matthieu, en dehors du judaïsme, Il commence par ce qu’Il a apporté, ne cherchant pas de fruit dans l’homme.
  51. 51,0 et 51,1 Jean le baptiseur rejette aussi l’application pour lui-même de Malachie 4, 5-6 ; tandis que Ésaïe 40 et Malachie 3, 1 lui sont appliqués en Luc 1, 76 ; 7, 27.
  52. Ces deux épîtres, après avoir établi la rédemption par le précieux sang de Christ, et la régénération par la semence incorruptible de la Parole, traitent du gouvernement de Dieu ; dans la première, nous trouvons son application aux siens pour les conserver ; dans la seconde, cette application se fait aux méchants et au monde ; elle va jusqu’aux éléments embrasés qui se fondront, et enfin jusqu’aux nouveaux cieux et à la nouvelle terre.
  53. Ici, le Seigneur distingue « un petit qui croit ». Dans les autres versets, Il parle d’un petit enfant, en faisant de son caractère comme tel le modèle de celui du chrétien dans le monde.
  54. Comme doctrine, l’état de péché de l’enfant et son besoin du sacrifice de Christ sont clairement constatés ici. Il ne dit pas « chercher », pour eux. L’emploi de la parabole de la brebis égarée est frappant ici.
  55. Il est important de se rappeler ici que — tandis que le Saint Esprit est pleinement reconnu en personne dans Matthieu, comme à la naissance du Seigneur et, au chapitre 10, agissant et parlant comme personne divine dans les disciples qui accomplissaient leur service, parce que c’est toujours par Lui seul que nous pouvons agir justement — la venue du Saint Esprit dans l’ordre d’une dispensation divine, ne fait pas partie de l’enseignement de cet évangile, quoiqu’elle soit reconnue de fait dans le chapitre 10. La vue de Christ en Matthieu se termine avec Sa résurrection, le résidu juif est envoyé de Galilée vers le monde comme un corps accepté, pour évangéliser les Gentils, et Jésus déclare qu’Il sera avec eux jusqu’à la consommation du siècle. Ainsi, ici Il se trouve au milieu de deux ou trois assemblés en Son nom. L’Église ici n’est pas le corps constitué par le baptême du Saint Esprit ; ce n’est pas la maison où habite le Saint Esprit sur la terre ; mais si deux ou trois sont assemblés en Son nom, Christ est au milieu d’eux. Or, je ne doute pas que tout bien de la vie d’en haut et la Parole de vie ne viennent de l’Esprit, mais c’est autre chose, et l’Assemblée ici n’est ni le corps, ni la maison en vertu de la descente du Saint Esprit. Cet enseignement et cette révélation étaient postérieurs, et restent heureusement vrais ; mais ici nous avons Christ au milieu de ceux qui sont assemblés en Son nom. Même au chapitre 16, c’est Lui qui bâtit, mais c’est autre chose. Naturellement, c’est spirituellement qu’Il est présent.
  56. Il est très frappant de voir ici que la seule succession dans l’office de lier et de délier que le ciel sanctionne, est celle des deux ou trois assemblés au nom de Christ.
  57. Cet acte de livrer au châtiment, et la révélation formelle de la position céleste intermédiaire en rapport avec le Fils de l’homme dans la gloire, se trouvent en Actes 7, lorsque Étienne raconte l’histoire du peuple juif, depuis Abraham, le premier appelé comme fondement de la promesse, jusqu’à ce moment-là.
  58. Le rapport est marqué ici entre la nouvelle chose et la nature, comme Dieu l’avait formé à l’origine, passant par-dessus la loi, envisagée comme quelque chose d’intermédiaire seulement. C’était une nouvelle puissance, parce que le péché avait paru, mais la création de Dieu est reconnue, tout en montrant l’état du cœur qui n’admet pas sa faiblesse. Le péché a corrompu ce que Dieu avait créé bon. La puissance de l’Esprit de Dieu, qui nous a été donnée par la rédemption, place l’homme et son sentier absolument en dehors de tout l’état de la chair, et introduit une nouvelle puissance divine, par laquelle l’homme marche dans ce monde, à l’exemple de Christ. Mais, avec cela, il y a la plus complète sanction de ce que Dieu Lui-même a établi à l’origine. Cela est bon, quoiqu’il puisse y avoir quelque chose de meilleur. Elle est très frappante, la manière dont la loi est mise de côté pour revenir à l’institution primitive de Dieu, la puissance spirituelle ne retirant pas entièrement le cœur de toute la scène, bien qu’il y marchât. Le Seigneur reconnaît, dans le mariage, l’enfant, le caractère du jeune homme, ce qui est de Dieu et ce qui est aimable dans la nature. Mais l’état du cœur de l’homme est sondé. Cela ne dépend pas du caractère, mais des motifs, et est pleinement mis à l’épreuve par Christ (il y a un complet changement dispensationnel, car des richesses étaient promises à un Juif fidèle), et par un Christ rejeté — le chemin du ciel — toute chose et l’épreuve de toute chose, c’est-à-dire du cœur de l’homme.
    Dieu a fait l’homme droit avec certaines relations de famille. Le péché a complètement corrompu cette vieille ou première création de l’homme. La venue du Saint Esprit a apporté une puissance qui, dans le second homme, nous transporte de la vieille création dans la nouvelle et nous donne les choses célestes — seulement, ce n’est pas encore quant au vaisseau, le corps ; mais cela ne peut renier, ni condamner ce que Dieu a créé au commencement.
    C’est impossible. Au commencement, Dieu les a faits. Quand nous arrivons à l’état céleste, tout cela disparaît, mais non les fruits qui en proviennent par grâce. Si un homme, par la puissance du Saint Esprit, a le don de le faire et reste entièrement céleste, tant mieux ; mais il est absolument mauvais de parler contre les relations que Dieu a créées à l’origine, ou de les condamner, ou d’amoindrir, ou de dénigrer l’autorité que Dieu y a rattachée. Si un homme peut vivre saintement au-dessus et en dehors de ces relations, pour servir Christ, c’est très bien, mais cela est rare et exceptionnel.
  59. En effet, la récompense, dans l’Écriture, est toujours un encouragement à ceux qui sont dans l’affliction et la souffrance pour être entrés par des motifs plus élevés dans le chemin de Dieu. Il en était ainsi de Moïse, de Christ même, dont les motifs se trouvaient dans un amour parfait, nous le savons, et cependant, à cause de la joie qui était devant Lui, Il a enduré la croix, ayant méprisé la honte. Il était (archêgos kai teleiôtés) dans le sentier de la foi.
  60. Remarquez la manière dont les fils de Zébédée et leur mère recherchent la première place au moment même où le Seigneur se dispose à prendre la dernière, sans réserve. Que d’exemples pareils ne voyons-nous pas, hélas ! Cela sert à montrer la manière absolue dont le Seigneur s’est dépouillé de tout. Voici les principes du royaume céleste : abnégation parfaite, contentement dans le dévouement complet ; c’est le fruit de l’amour qui ne recherche pas son bien propre — condescendance qui découle de ce qu’on ne se recherche pas ; soumission lorsqu’on est méprisé, douceur et humilité de cœur. L’amour produit en même temps et l’esprit de service envers les autres, et l’humilité qui est contente de cette position. Le Seigneur a accompli cela jusqu’à la mort, donnant Sa vie en rançon pour plusieurs.
  61. Le cas de l’aveugle de Jéricho marque, dans les trois premiers évangiles, le commencement des circonstances finales de la vie de Christ, lesquelles conduisaient à la croix ; le contenu général et les enseignements de chacun d’eux étant terminés. Dès lors, Il est présenté comme Fils de David, étant comme tel la dernière présentation de Lui-même à ce peuple, le témoignage de Dieu Lui étant rendu sous ce titre.
  62. Ce psaume est particulièrement prophétique pour le temps de la réception future du Seigneur ; il est souvent cité en rapport avec cette réception.
  63. Renvoyer à la conscience est souvent la réponse la plus sage, quand la volonté est perverse.
  64. Le mépris et la violence sont les deux formes du rejet du témoignage de Dieu, et du vrai témoin. Ils haïssent l’un et aiment l’autre, ou s’attachent à l’un et méprisent l’autre.
  65. Depuis le verset 28 du chapitre 21, jusqu’à la fin, nous trouvons la responsabilité de la nation envisagée comme jouissant de ses anciens privilèges, selon lesquels elle aurait dû porter du fruit. Ne l’ayant point fait, une autre nation lui est substituée. Mais ce n’est point la cause du jugement qui s’exécutait contre Jérusalem et doit encore s’exercer d’une manière plus terrible, et qui même alors accomplissait la destruction de la ville. La mort de Jésus, le dernier de ceux qui avaient été envoyés pour chercher du fruit, amène le jugement sur ces meurtriers (Matt. 21, 31-41). La destruction de Jérusalem est la conséquence du refus du témoignage au royaume, témoignage envoyé pour les appeler en grâce. Il s’agit d’abord du jugement sur les vignerons — les scribes, les principaux sacrificateurs et les chefs du peuple. Le jugement exécuté à cause du rejet du témoignage du royaume, va plus loin (voyez chap. 22, 7). Les uns méprisent le message, les autres maltraitent les messagers, et la grâce étant ainsi rejetée, la ville est brûlée, et ses habitants sont retranchés (comp. chap. 23, 36, et voyez la prophétie historique en Luc 21). Cette distinction est maintenue dans chacun des trois évangiles.
  66. De fait, cette position d’Israël et le témoignage qui s’y rapportait, ont été interrompus par la destruction de Jérusalem ; c’est pourquoi cet événement se présente à l’esprit en rapport avec la prophétie dont elle n’est certainement pas l’accomplissement. Le Seigneur n’est pas encore venu, ni la grande tribulation ; mais l’état de choses auquel le Seigneur fait allusion jusqu’à la fin du verset 14, subit une interruption violente et judiciaire, par la destruction de Jérusalem, de sorte qu’il y a, sous ce point de vue, un rapport entre les deux événements.
  67. L’évangile du royaume a été confié à Israël au chapitre 10, et ici, quoique cela ne fasse pas l’objet d’un enseignement, c’est le sujet qui s’étend jusqu’au verset 14, mais il n’y a pas de distinction formelle : la mission du chapitre 28 concerne les Gentils ; mais alors il n’y a rien du royaume, c’est plutôt le contraire quoique Christ soit ressuscité, mais tout pouvoir Lui est donné dans le ciel et sur la terre.
  68. Il n’y a aucune raison possible d’appliquer cette parabole à ce qu’on appelle le jugement général, expression absolument contraire à l’Écriture. D’abord, il y a trois sortes de personnages, pas simplement deux — les chèvres, les brebis et les frères ; ensuite c’est le jugement des Gentils seuls ; d’ailleurs, la cause du jugement est tout à fait inapplicable à la grande masse même de ces derniers. La cause du jugement, c’est la manière dont ces frères ont été reçus. Or, pendant de longs siècles, aucun n’a été envoyé à l’immense majorité des Gentils. Dieu a passé par-dessus les temps de cette ignorance, et une autre cause de jugement contre eux est indiquée au commencement de l’épître aux Romains. Il a été question déjà des chrétiens et des Juifs au chapitre 24, et dans la première partie du 25. Ce sont justement ceux que le Seigneur trouvera sur la terre à Sa venue, et qui seront jugés selon la manière dont ils auront traité les messagers qu’Il leur a envoyés.
  69. Combien est solennel le témoignage rendu ici à l’effet produit par la perte de la part de l’Assemblée de l’attente actuelle du retour du Seigneur ! Ce qui fait que l’église professante court à l’oppression hiérarchique et à la mondanité, de manière à être retranchée à la fin comme hypocrite, c’est qu’elle dit dans son cœur : Mon Maître tarde à venir — renonçant à l’attente présente. C’est ce qui a été la source de la ruine. La vraie position chrétienne a été perdue aussitôt qu’on a mis de côté la venue du Seigneur, et remarquez que, quoiqu’on soit dans cet état, on est traité comme le serviteur responsable.
  70. Quant aux serviteurs, dans le chapitre 24, il s’agit de responsabilité collective.
  71. Le mot signifie plutôt : torches. Elles avaient, ou auraient dû avoir de l’huile dans leurs vaisseaux pour alimenter la flamme.
  72. Remarquez ici que le réveil est produit par le cri ; il réveille tout. Il est suffisant pour provoquer chez tous les professants une activité nécessaire, mais il a pour effet de les mettre tous à l’épreuve, et de les séparer. Ce n’était pas le moment d’obtenir de l’huile ou des secours de grâce de ceux qui étaient déjà professants ; la conversion ne fait pas le sujet de cette parabole. La question de se procurer de l’huile n’est là, je n’en doute pas, que pour montrer que ce n’était pas le moment de le faire.
  73. Dans la parabole des talents, en Matthieu, nous avons sans doute l’établissement « sur beaucoup » ; c’est le royaume, mais il y a un sens plus complet dans l’expression : Entre dans la joie de ton maître ; et la bénédiction y est uniformément répandue sur tous ceux qui ont été fidèles dans le service, grands ou petits.
  74. Il en est ainsi des assemblées dans l’Apocalypse ; le Seigneur parle aux églises qui existaient, quoique ces assemblées soient, je n’en doute pas, une histoire complète de l’Église.
  75. Ce n’est pas dans la maison de Marthe que cette scène se produisit, mais dans celle de Simon le lépreux : Marthe servait, et Lazare était à table. Cela rend plus entièrement personnel l’acte intelligent de Marie.
  76. On ne trouve point d’exemple montrant que les disciples aient jamais compris ce que Jésus leur disait.
  77. Christ a rencontré chez le pharisien le cœur de la pauvre femme, qui était une pécheresse, et là Il dit ouvertement la pensée de Dieu, et la lui dit. Ici, Il rencontre le cœur de Marie, Il justifie et satisfait son affection et donne une approbation divine à ce qu’elle a fait. Il rencontre au sépulcre le cœur de Marie de Magdala, pour lequel le monde était vide si Lui n’y était pas, et Il révèle la pensée de Dieu sous sa forme la plus élevée de bénédiction. Tel est l’effet de l’attachement à Christ.
  78. L’inimitié des chefs d’Israël était connue des disciples : « Rabbi, les Juifs cherchaient tout à l’heure à te lapider, et tu y vas encore ! » et ensuite de Thomas — témoignage plein de grâce envers celui qui, plus tard, montra son incrédulité quant à la résurrection de Jésus : « Allons-y, nous aussi, afin que nous mourions avec Lui ». Le cœur de Marie, sans doute, sentait cette inimitié, et à mesure qu’elle grandissait, son attachement pour le Seigneur grandissait également.
  79. Le cœur de Judas est le point de départ de ce mal, mais les autres disciples, n’étant pas occupés de Christ, tombent dans le piège.
  80. « Nouveau » , ce n’est pas de nouveau (Néon), mais d’une autre sorte (Kainon).
  81. Il est merveilleux de voir le Seigneur dans la profonde angoisse de l’anticipation de la coupe — seulement la présentant à Son Père, et ne la buvant pas encore — se tourner vers les disciples et leur parler avec une grâce pleine de calme, comme s’Il était en Galilée ; puis, retournant exactement à la même terrible lutte d’esprit pour ce qui oppressait Son âme. J’ajoute qu’en Matthieu Il est victime, et que ce qu’Il rencontre ici, c’est toute l’aggravation, sans circonstances atténuantes.
  82. Je me propose de parler des souffrances du Seigneur en étudiant l’évangile de Luc où elles sont décrites plus en détail ; parce que c’est comme Fils de l’homme qu’Il y est particulièrement présenté.
  83. Remarquez ici la place que le Seigneur, dans un moment si solennel et si proche de la croix, donne aux Écritures : qui disent qu’il faut qu’il en arrive ainsi ; car ce moment était venu (v. 54). Ce sont les paroles de Dieu.
  84. Je pense qu’on verra, en comparant les évangiles, que le Seigneur fut interrogé chez Caïphe pendant la nuit où Pierre Le renia ; et que les principaux sacrificateurs et les anciens tinrent conseil de nouveau le matin, et interrogeant le Seigneur reçurent de Lui la confession sur laquelle ils Le livrèrent à Pilate. Pendant la nuit, les chefs actifs seuls se réunirent. Le matin, il y eut une assemblée régulière du sanhédrin.
  85. Chose étrange, ce mot signifie fils d’Abba, du père, comme si Satan se moquait d’eux par ce nom.
  86. Nous trouvons en Matthieu, spécialement rassemblés, le déshonneur fait au Seigneur et les insultes qu’on Lui adressait, et dans Marc, l’abandon de Dieu.
  87. La gloire de Christ, dans Son ascension et comme Seigneur de tous, ne se trouve pas, historiquement, dans le cadre de Matthieu.
  88. La part des femmes dans toute cette histoire est très instructive, spécialement pour elles. L’activité du service public, ce qu’on peut appeler « l’œuvre », appartient naturellement aux hommes, c’est-à-dire tout ce qui tient à ce que l’on nomme généralement ministère ; bien que les femmes aient part à une activité très précieuse en particulier. Mais il y a un autre côté de la vie chrétienne qui est plus spécialement le leur : c’est le dévouement personnel et l’affection à Christ. C’est une femme qui a oint le Seigneur quand les disciples murmuraient ; ce sont des femmes qui étaient à la croix, quand tous, sauf Jean, L’avaient abandonné ; ce sont des femmes qui sont venues au sépulcre et ont dû appeler les apôtres qui s’en étaient retournés chez eux ; enfin, ce sont des femmes qui subvenaient aux besoins du Seigneur. Et, en vérité, cela va plus loin. Le dévouement dans le service appartient peut-être aux hommes ; mais l’instinct d’affection, ce qui entre plus intimement dans la position de Christ, et se trouve ainsi plus immédiatement en rapport avec Ses sentiments, dans une communion plus étroite avec les souffrances de Son cœur, cela est la part de la femme : assurément, c’est une part heureuse. L’activité du service pour Christ place l’homme un peu en dehors de cette position, si du moins il n’est pas vigilant. Chaque chose a, du reste, sa place. Je parle de ce qui est caractéristique ; car il y a des femmes qui ont beaucoup servi, et des hommes qui ont beaucoup senti. Notez aussi, ce que je crois avoir fait remarquer, que cet attachement du cœur à Jésus est l’état dans lequel sont reçues les communications de la vraie connaissance. Le premier et plein évangile est annoncé à la pauvre femme pécheresse qui lava les pieds du Seigneur ; l’embaumement pour Sa mort, à Marie ; notre plus haute position, à Marie de Magdala ; la communion que Pierre désirait, à Jean, qui était dans le sein de Jésus. Et ici, les femmes ont une grande part.
  89. C’est-à-dire, la femme de Clopas et la mère de Jacques et de Joses, de laquelle il est souvent question comme « l’autre Marie ». En Jean 19, 25, Marie, femme de Clopas, a été prise comme une apposition de la sœur de la mère de Jésus. Mais c’est une erreur. C’est une autre personne. Il y avait quatre femmes : trois Marie et la sœur de la mère de Jésus.
  90. Mais je crois que le Seigneur Jésus avait quitté le tombeau avant que la pierre fût roulée ; c’était pour des yeux mortels.